1. ENFANCE

C’est le 09 novembre 1982 que naquît Melania Harmony Forbes à Londres au sein d’une famille  de sang-pur écossaise. Larry Forbes, son père, poursuivait le chemin tracé par son propre géniteur en tenant les rennes d’une grande société, Forbes Industries, produisant massivement et vendant d’innombrables solutions magiques et pharmaceutiques jusqu’alors inexistantes à des Apothicaires revendeurs. L’activité d’exploitation avait pris naissance en 1947, après la défaite de Grindelwald, après que la peur ait laissé place à l’espoir d’une nouvelle ère. Si à l’origine les apothicaires  élaboraient leurs propres produits finis, ils demeuraient néanmoins limités par leurs propres capacités de production. Face à la demande croissante et à l’ouverture des ministères de la magie  vers la mondialisation, l’idée de la revente de marchandises de masse parut alors novatrice en Grande-Bretagne.  Ainsi le père de Larry Forbes, Dariel Forbes, avait porté ses ambitions ainsi que sa soif pécuniaire avec une détermination notable qui lui permit de se faire un nom parmi les entrepreneurs. Il avait engagé des ingénieurs tout droit sortis de formations de magies avancées et qui lui permirent d’aboutir au développement de nouvelles méthodes de travail. Une sorte de fordisme du monde magique. Les affaires marchaient très bien, la famille jouissait d’une excellente réputation autour d’elle, l’emprunt qui avait été contracté à Gringotts pour financer les frais d’établissement fut remboursé en peu de temps et le profit découlant de cette activité commerciale suffisait à combler sa vie des plus confortables ainsi que celles de ses descendants. Il avait confié plus tard la direction de Forbes Industries à Larry qui, par la suite, était supposé léguer ses parts à ses enfants qui en prendraient la tête. Ou tout du moins l’aîné qui serait l’associé majoritaire.  

Mais lorsque Melania naquît, Rosemary Forbes (née Rosier) constata que son mari ne se montrait pas enthousiaste à l’idée d’être père. Son faux sourire ne suffisait pas à la duper. En effet, Larry s’était attendu à ce que leur premier enfant soit un garçon qui deviendrait un jour un homme fort, suffisamment ambitieux et intelligent pour  le remplacer lorsqu’il serait trop âgé. Une femme serait trop douce, présenterait des lacunes en termes de compétences requises concernant la dirigeance d’une société. Plus généralement, il pensait que la femme n’avait pas sa place dans ce type de fonction et il sous-estimait bien souvent celles qui avaient un poste à pouvoir, notamment au Ministère.  Terriblement déçu, il n’attendait que le jour où Rosemary enfanterait à nouveau afin de satisfaire ses critères. Trois autres accouchements eurent lieu quelques années plus tard et la déception du sorcier n’en fut que plus colossale lorsqu’il s’aperçut, à chacun de ces événements, qu’il s’agissait de filles. Selon Rosemary, c’était le destin : la prochaine génération d’entrepreneurs serait féminine. Cette hypothèse ne plaisait absolument pas à son mari mais compte-tenu des problèmes de santé qu’engendraient ces naissances à sa femme, il dut se résoudre à abandonner l’idée que son héritier serait de sexe masculin.

L’enfance de Melania se déroula sans encombre, dans le confort absolu et la quiétude. Ses besoins et envies étaient comblés, elle ne manquait de rien mis à part la chaleur de son paternel, à la fois tantôt distant, tantôt trop sévère. C’était une enfant calme, très curieuse, qui posait beaucoup de questions sur son environnement et qui s’intéressait à beaucoup de choses. Elle était sage et en même temps têtue lorsqu’elle n’obtenait pas ce qu’elle voulait, que ce soit une réponse à l’une de ses interrogations ou bien un repas qu’elle pouvait trouver bien trop copieux à son goût. Elle savait se faire toute petite lorsque son père accueillait des invités de marque à la maison, toujours dans le cadre du travail, tout comme elle savait se faire remarquer de façon positive lorsque l’attention se portait sur elle. Ses parents surent l’éduquer correctement et la présence de ses trois autres sœurs ne perturbait en rien son quotidien, au contraire. Hormis certaines disputes que l’on pouvait reporter au comportement habituel de chaque fratrie, les quatre sœurs étaient très proches, jouant ensemble la plupart du temps,  vivant leurs propres petites aventures et découvrant la magie  au fur et à mesure qu’elles grandissaient. Melania était notamment proche d’Erin, qui était plus jeune qu’elle de seulement deux ans alors qu’elle l’était un peu moins avec Diana, plus jeune qu’elle de cinq ans et d’Octavie qui avait sept ans de moins qu’elle.

L’un des loisirs préférés de Melania était la lecture. Très jeune, elle se plongeait dans les contes de fée de Beedle le Barde, des romans écrits par de célèbres sorciers, des ouvrages évoquant la magie en général mais dans des termes suffisamment trop techniques pour qu’elle en saisisse  totalement la portée. Déjà à cet âge, elle cultivait une certaine soif de connaissances et le milieu dans lequel elle vivait lui conférait tout ce dont elle avait besoin en termes de capital social. Sa mère, autrefois haut-fonctionnaire du ministère et désormais mère au foyer depuis la naissance de Diana, leur  donnait à toutes quelques cours concernant l’Histoire de la Magie, la façon dont tournait le monde, des bases théoriques en magie qu’il valait mieux savoir pour appréhender certaines notions plus tard, etc. Pourtant descendante des Rosier, Rosemary ne tenait pourtant pas à imposer à ses filles la vision des choses de sa famille : selon elle, les moldus étaient certes inférieurs aux sorciers mais si les nés-moldus étaient dotés de pouvoirs magiques, ce n’était ni par miracle, ni parce qu’ils auraient volé les dons appartenant à d’autres sorciers comme le croyaient bon nombre de partisans de la théorie de la supériorité du sang-pur. Cela ne signifiait pas qu’elle était une adoratrice des nés-moldus mais qu’elle était en mesure de les tolérer de loin et de rester sur la réserve quant à son opinion sur le sujet. Sa seule requête envers ses filles était de faire semblant auprès des Rosier, lors des dîners familiaux, d’approuver tout ce qu’on pouvait leur dire. Du côté de Larry Forbes, seul le business importait. Que les partenaires ou clients soient de riches sorciers influents au sang-pur, des sang-mêlé lambda ou bien de simples né-moldus, ils ne représentaient à ses yeux que la façon de faire prospérer et croître son entreprise indéfiniment.

Au cours des huit ans de Melania, Larry se résigna à faire d’elle l’héritière principale de Forbes Industries. Rosemary ne se sentait pas en mesure de lui donner un cinquième enfant et l’obsession que portait son mari à la quête  d’un héritier mâle l’insupportait. Il la harcela avec cette histoire, tentant de la convaincre de lui donner cet ultime enfant qui, d’après lui, serait très certainement un garçon. Essuyant plusieurs échecs suite à ses refus, Larry fut contraint de réviser sa stratégie lors d’une conversation avec son propre père, Dariel Forbes. Ce dernier lui proposa d’envisager Melania comme successeur lorsqu’il prendrait sa retraite, en accentuant la nécessité de forger son caractère dès maintenant pour en faire naturellement une future femme de poigne, sachant où avancer avec ce si grand navire et surtout comment le diriger. Des quatre enfants, elle semblait la plus adaptée à le remplacer en tant que CEO et avant tout, elle disposait de son statut d’aînée qui lui offrait la priorité sur l’héritage familial.

Du jour au lendemain, Melania s’étonna de trouver son père bien plus présent autour d’elle qu’il ne l’avait jamais été. Il lui parlait beaucoup de son travail, de Forbes Industries, qu’il présentait comme le plus grand projet de la famille, le fameux paquebot qui faisait toute leur réputation en Grande-Bretagne. Naturellement heureuse de pouvoir se rapprocher de son père qui ne lui donnait autrefois que peu d’attention, la jeune enfant buvait ses paroles, les étoiles aux yeux. Toujours curieuse d’apprendre de nouvelles choses, elle percevait le discours de son père comme du pain béni. Elle ne comprenait pas forcément tous les termes complexes qu’il employait pour lui expliquer la façon dont il effectuait son travail au quotidien, mais au fur et à mesure des mois, Melania parvenait à faire le lien entre beaucoup de notions dont il lui faisait part. De temps à autres, elle avait également la chance de visiter les locaux de l’entreprise en question tant qu’elle ne touchait à rien et restait sagement aux côtés de l’assistante de son père. Un jour, tout ce petit monde  lui appartiendrait et ça, elle l’avait rapidement compris. Larry lui expliquait avec des mots simples ainsi qu’à l’aide de métaphores l’importance de la planification, de l’anticipation, le partenariat avec des entités puissantes, du pouvoir que conférait l’information, ce qu’étaient les placements de valeurs mobilières à la Bourse Magique de Londres et tant d’autres choses. Bien que certains concepts lui paraissait totalement vagues ou inconnus, Melania intégra suffisamment dans son crâne le chemin qu’on lui avait tracé pour s’inquiéter de la difficulté de tout ce qui en découlait. Elle admirait son père plus que tout et désirait devenir une sorcière aussi accomplie que lui. Elle calquait ses rêves sur les siens : celui de la gloire, de la réussite et de la satisfaction de gagner beaucoup d’argent. On lui avait expliqué qu’en chemin, elle serait forcément confrontée à des obstacles mais que sa réponse devrait être confiante,  prompt, efficace, féroce si nécessaire et qu’elle devrait refléter une détermination et un sang-froid inébranlables. Toutes ces qualités étaient essentielles pour un entrepreneur digne de ce nom et Larry tenait à ce que sa fille les développe progressivement jusqu’à l’âge adulte. Il avait visiblement tout prévu…

2. SCOLARITE A POUDLARD


Avant son arrivée à Poudlard, Melania connaissait déjà quelques enfants de son âge, généralement ceux des  partenaires ou clients les plus importants de Forbes Industries. Elle les fréquentait assez souvent, ce qui lui permis de tisser ses premiers liens d’amitié avec eux lorsqu’elle était petite. Ils venaient de tous milieux, les Forbes n’ayant jamais eu de préférences particulières en termes de fréquentations (bien qu’ils fassent semblant devant les Rosier) tant que ces dernières pouvaient leur apporter un avantage pécuniaire d’une quelconque façon.  

Melania ne se retrouva donc pas toute seule dans le Poudlard Express et fut rapidement répartie à Serdaigle avec quelques-uns de ses amis et connaissances. Le fait d’appartenir à la maison de Rowena n’étonna personne bien que les Rosier auraient préféré la savoir à Serpentard. Néanmoins, tout ce qui ne se rapportait pas à Gryffondor ou Poufsouffle leur convenait. De plus, que ce soit chez les aigles ou chez les serpents, ces maisons permettaient le développement des esprits érudits, ingénieux, indépendants et ambitieux tout au long de leur scolarité. Melania n’y échappait d’ailleurs pas ; elle rêvait de grandeur, de puissance, d’être un puits de savoir en magie, d’être spéciale… Elle le faisait involontairement comprendre à son entourage, que ce soit ses professeurs ou ses camarades. Si elle pouvait naturellement s’attirer la sympathie de la plupart de par son charisme et sa confiance en elle, d’autres avaient un peu de mal à la suivre. Is=ls la trouvaient, par moments, bien trop arrogante et bornée sur certains sujets discussions.

Mais ce qui l’importait par-dessus tout, c’était sa réussite scolaire. Sérieuse tout au long de ses années d’études, ses professeurs ne furent jamais déçus de ses travaux et quand bien même elle enfreignait quelques fois le règlement pour des raisons qui lui paraissaient justifiées, Melania savait toujours entretenir sa bonne réputation au sein du château. Elle était vue comme un modèle au sein de sa promotion, se disputant sans cesse la place de major avec une autre fille de sa classe qui était toute aussi douée. C’est de cette fille que Melania se rapprocha le plus au fur et à mesure du temps,  Enora Hilliard, élève de Serpentard aux aspirations marquées par le désir d’intégrer une place de choix parmi les postes de pouvoir au Ministère afin de suivre les traces de ses parents — objectif familial qui lui rappelait beaucoup le sien. Les deux enfants partageaient une vision commune de ce que devait être l’accomplissement d’une sorcière. Elles se projetaient déjà très jeunes dans le monde professionnel, ce que peu d’élèves de leur âge étaient capables de faire puisqu’ils ignoraient toujours, à la veille de leurs seize ans, ce qu’ils désiraient faire plus tard. Chez nos deux amies, leur avenir était une évidence et elles apportaient l’une à l’autre la force d’y croire et la volonté d’outrepasser leurs limites. Enora et Melania étaient à la fois les meilleures amies et les plus grandes rivales de la classe quand il s’agissait de travaux individuels, de la course aux sabliers des maisons ou  encore de bulletins de notes. Elles étaient plutôt respectées par leurs camarades mais également jalousées par ceux qui enviaient leurs facilités scolaires.

Cette époque n’était pourtant pas la plus rassurante de toutes pour entamer son premier cycle, la scolarité de Harry Potter s’y déroulant en même temps et apportant avec elle son lot d’événements étranges. Lors de sa première année, Melania fut spectatrice de la mise en place du Tournoi des Trois Sorciers en nourrissant secrètement le rêve de pouvoir y participer pour la simple gloire. Elle enviait Harry Potter d’avoir eu cette opportunité, croyant fermement au départ qu’il avait délibérément triché en s’inscrivant au tournoi. Cette information fut démentie et à la fin de l’année, la compétition se solda par les larmes du garçon, effondré aux côtés du corps sans vie de Cédric Diggory. C’était à partir de cet instant là que le Survivant ne cessa de prétendre que Lord Voldemort était de retour. L’opinion publique le pensait soit mentalement atteint ou bien complice d’une manigance émanant de la direction de Poudlard. Melania, quant à elle, se taisait. Elle eut vent par sa mère que le Seigneur des Ténèbres était certainement de retour puisque l’un de ses oncles, seul ancien Mangemort de la famille, avait ressenti une vive douleur au niveau de sa marque des ténèbres. Cette information devait néanmoins rester secrète afin de décrédibiliser au mieux le discours de Dumbledore. Seulement âgée de douze ans au moment où Harry Potter intégrait sa cinquième année, Melania ne voyait aucun intérêt à se mêler à ce genre d’histoires.  Elle appréciait, d’une part, le directeur de Poudlard pour la grandeur qu’il lui inspirait et, d’autre part, les idéologies dictatrices qui fondaient la pensée de ses aïeuls la laissaient indifférente. Au fond, elle n’était pas d’accord avec ces déclarations racistes.   De même lorsque la jeune fille conversait avec certaines connaissances adeptes de la suprématie du sang-pur : elle se contentait de ne pas s’investir dans le débat ou détournait habilement le sujet sur autre chose. Melania possédait ce don de savoir manipuler ses interlocuteurs, usant de vieilles astuces que lui avaient apprises son père. Son éloquence et son charisme se développaient au rythme de ses autres compétences en magie. Ses professeurs l’appréciaient beaucoup et voyaient en elle une grande sorcière qui irait loin dans la vie.  C’était sans compter la pression que lui mettait son père afin de décrocher les meilleures notes, se constituer un réseau de bonnes personnes qui pourrait lui être utile plus tard. Elle appliquait à la lettre ses conseils, très déterminée dans ses objectifs de reprendre un jour l’affaire familiale. Melania poussait au maximum ses recherches approfondies dans les matières principales, notamment en Potions afin d’obtenir la légitimité de l’expertise en la matière. Le cas contraire, comment diriger une société justement basée sur la création et la vente de potions sans être un féru du domaine ?

La quatrième année de scolarité s’avéra être la plus sombre de toutes. Lord Voldemort avait en effet pris le pouvoir de force au Ministère et les Mangemorts occupaient différentes postes à Poudlard, Rogue à sa tête. Les nés-moldus étaient persécutés et aucun de leurs enfants ne s’était présenté à l’école. L’injustice et les violences faisaient partie du quotidien des élèves et l’une des solutions qui permettaient de ne pas en souffrir était d’approuver le nouveau règlement et de se fondre dans la masse. De par ses origines, Melania ne rencontra aucun problème avec le nouveau corps enseignant. Les Carrow punissaient ceux qui étaient dotés d’un esprit de rébellion mais ils saluaient les efforts fournis par les élèves venant de bonne famille. Bien que peu sereine pour autant, Melania s’estimait chanceuse d’être une privilégiée et rien ne pouvait l’arrêter dans sa quête d’excellentes notes et de savoir. Sa bonne réputation la suivait toujours et elle s’entendait notamment très bien avec le professeur Slughorn qui avait remplacé le directeur Rogue au poste de maître des potions depuis l’an dernier. Le professeur Slughorn avait inclus Melania depuis plus d’un an dans son petit club qui regroupait les élèves dont les familles étaient réputées pour des raisons diverses. Naturellement, Dariel Forbes et son fils, Larry, connaissaient parfaitement bien Horace Slughorn qui avait été leur enseignant autrefois et à qui ils rachetaient souvent de rares ingrédients que le professeur trouvait ici et là, comme du venin d’Acromentule. C’était un homme très apprécié et qui apportait toujours sa contribution là où on l’apercevait.  Il proposait régulièrement à Melania des idées qu’elle pourrait mettre en place pour Forbes Industries lorsqu’elle en tiendrait les rennes plus tard. Il plaisantait souvent sur le fait qu’il attendait en échange une petite commission pour tous les conseils qu’il lui prodiguait. Melania en riait et au fond, elle savait qu’elle entretient son lien avec le professeur Slughorn dans son réseau personnel et professionnel. Non seulement elle l’appréciait réellement mais en plus, elle était consciente de tous les avantages qu’elle tirerait en gardant contact avec lui durant sa carrière. Du côté du maître des potions, les aptitudes incroyables de la Serdaigle dans sa matière suscitait sa fierté. Il ne cessait jamais de vanter ses efforts, la qualifiant de digne  héritière de son père. Elle était donc d’autant plus honorée de faire partie de son entourage et de partager toutes ces soirées en petit comité, entre élèves talentueux ou populaires, le tout en dégustant de délicieux mets gourmets.

Business is business

Le sérieux et l’exemple que montrait la jeune fille au sein de sa maison lui octroya l’honneur et le privilège d’être nommée préfète lors de sa cinquième année. Le régime mis en place par Lord Voldemort avait alors pris fin suite à sa lourde défaite face à Harry Potter. La vie des élève avait repris avec au coeur de son quotidien la reconstruction de l’école, la réforme de l’enseignement afin de mieux l’adapter aux prérogatives des élèves. On attendait de cette nouvelle année scolaire un grand changement, du progrès perpétuel. Les professeurs ne cessaient de rabâcher aux élèves qu’il était essentiel d’assurer leur fonction de préfet au maximum afin d’aider les élèves traumatisés par l’année passée. Il fallait donner le meilleur de soi et pour Melania, ceci n’était pas une nouveauté. Elle n’avait jamais cessé de se démarquer parmi les autres, d’accomplir ses devoirs d’élève  avec efficacité et de s’entourer de bonnes personnes pour à la fois se construire un réseau mais également pour pouvoir apporter sa science ou sa lumière quand cela était nécessaire. Elle n’hésitait pas à séduire son auditoire à travers de beaux discours afin d’obtenir tout ce qu’elle désirait ou pour faire comprendre à tous à quel point elle était excellente. Son élégance se développait davantage encore, façonnant plus que jamais sa personnalité dans le charisme et l’assurance. On sentait qu’elle était une leader née. Elle prenait son rôle à coeur avec impartialité, sanctionnant la moindre erreur de ses camarades, motivant ceux qui baissaient les bras devant un devoir et rendant régulièrement des comptes aux professeurs lorsqu’il y avait une remontée à faire. Une préfète modèle, à l’image de l’élève excellente qu’elle avait toujours été. Melania ne restait jamais passive, s’investissait et était dotée d’une force de propositions dans sa volonté d’améliorer le système de l’école. La prise d’initiatives était loin de l’effrayer, elle qui avait parfaitement appris des leçons données par son père en terme de management. Être préfète à Poudlard était l’opportunité parfaite de simuler la dirigeance d’une société. C’était ainsi qu’elle le percevait et elle avait pour objectif de pousser l’ensemble des Serdaigle à remporter chaque coupe des quatre maisons. Néanmoins, dans son souhait de bien faire les choses, sa diplomatie laissait parfois place à de l’agacement lorsque certains objectifs n’étaient pas atteint en cours d’année. En effet, durant ces moments, elle révélait un autre visage plus rude, plus exigeant, plus sévère. Elle agaçait même sa petite sœur Erin qui avait tendance à enfreindre le règlement un peu trop souvent avec ses amis. Leur relation fraternelle ne s’en était pas retrouvée dégradée pour autant mais Erin n’appréciait pas spécialement les conséquences de ces pouvoirs que conférait le statut de préfète à sa sœur. Parfois, elles entraient en conflit mais devant l’entêtement de Melania et sa façon d’avoir « toujours raison » en lui sortant de beaux discours, Erin lâchait l’affaire. Débattre avec Melania était un sacré parcours du combattant et quelques-uns pouvaient même la trouver insupportable selon les jours.

Quant à sa meilleure amie, Enora, cette dernière jouissait également du privilège d’être préfète  mais elle avait, au fond d’elle, toujours ressenti une certaine amertume au regard du fait que Melania attirait davantage l’attention sur elle, de par son élégance naturelle. Elle avait même son succès auprès des garçons plus âgés qu’elle. Un autre exemple générateur de frustration chez la Serpentard était qu’elle ne faisait pas partie du club de Slughorn et elle enviait terriblement les élèves qui y étaient invités. Cela n’avait en rien abîmé l’amitié entre les deux adolescentes mais cela avait en revanche renforcé leur rivalité, Enora prête à tout pour se démarquer autant que Melania. C’était une compétition stimulante mais relativement saine, bien que pour l’une, la frustration restait présente dans les abîmes de ses pensées.

Lors de ses trois dernières années à Poudlard, Melania continua de passer la majorité de son temps à se forger  un esprit fort et une  large culture générale afin d’assurer son avenir. Elle se plongeait dans la lecture d’innombrables livres tous plus compliqués les uns que les autres dans leur compréhension ; elle approfondissait son savoir dans les différentes matières enseignées et notamment en potions, défense contre les forces du mal, métamorphose, enchantements, histoire de la magie et Botanique. Selon elle, connaître sur le bout des doigts l’Histoire de la Magie était primordial pour comprendre les rouages des interactions internationales à travers les différentes époques. C’était un savoir crucial quand on comptait s’investir plus tard dans le commerce magique à grande échelle. La jeune fille voyait les choses en grand, elle souhaitait apporter tant de choses à la société et que toute la Grande-Bretagne puisse reconnaître un jour son parcours ainsi que ses réussites.  Elle désirait la gloire par tous les moyens possibles. Ce qu’il fallait savoir, c’était qu’elle avait beau être très douée dans toutes les matières y compris en Potions, pour lesquelles elle s’investissait le plus au vu de la nature des activités de Forbes Industries, là où elle excellait le plus et où son talent était le plus abouti, c’était en Métamorphose. La matière la plus complexe de Poudlard. Même sa baguette magique était totalement en phase avec les sorts relevant de cette discipline, accomplissant des merveilles sans trop d’efforts. Cela plaisait beaucoup à la Serdaigle de pouvoir épater ses camarades en faisant usage, avec une facilité déconcertante, de sortilèges que l’on étudiait même pas à Poudlard mais ce n’était pas pour autant sa priorité. Sa famille n’attendait pas d’elle qu’elle soit une experte en Métamorphose après sa formation à Poudlard. Seul l’Optimal aux BUSEs et aux ASPICs suffisait.

La pression que lui mettait son père quant à ses résultats scolaires ne l’effrayait plus. Il s’agissait, à ses yeux, de la preuve que celui-ci avait entièrement confiance en elle et qu’il croyait en ses capacités d’accomplissement de soi. Il ne pouvait lui offrir de plus beau cadeau que ce sentiment d’avoir sa pleine confiance. De plus, elle savait depuis bien longtemps ce qu’elle valait et elle réussirait chaque examen même en ayant les yeux fermés. C’était donc dans la confiance absolue qu’elle avait abordé son ultime année à Poudlard et elle ne se doutait pas que celle-ci serait si décisive dans sa vie.

Arborant l’insigne de préfète-en-chef, Melania suscita la plus grande fierté de toute sa famille. Le poste de préfète pouvait être aisément accessible lorsque l’on faisait partie des meilleurs de sa promotion mais le poste de préfète-en-chef n’était confié qu’à la crème parmi les crèmes, autrement dit ceux qui étaient véritablement en capacité de prendre de plus fortes responsabilités et de les assumer. Parallèlement à cette activité, la jeune fille prenait le temps de s’investir dans la préparation de ses ASPICs, dernier diplôme à obtenir avant de pouvoir quitter l’établissement et de s’orienter vers les études supérieures. A ce propos, elle avait toujours eu l’intention d’intégrer un cursus de droit, commerce et artisanat magique à l’université mais l’arrivée d’un nouveau professeur de Métamorphose en début d’année bouleversa progressivement ses aspirations. Le professeur Byrne était à la base un chercheur indépendant en magies profondes, plutôt spécialisé en Métamorphose. Il avait entamé des travaux qui s’étaient soit achevés sur des publications célèbres dans le monde des sorciers ou soit avortés parce que le manque de moyens monétaires ne lui avait pas permis de pouvoir multiplier les expériences les plus complexes et coûteuses. Malgré cela, il avait de la renommée et son parcours intéressait Melania bien qu’il soit bien différent du chemin qu’elle souhaitait emprunter. Bien conscient des points forts de l’élève dans sa matière, le professeur Byrne s’entretenait souvent avec elle en dehors des cours afin d’en savoir un peu plus à son sujet, singulièrement à propos de ses intentions en termes d’orientation professionnelle. Melania lui avait dit qu’elle comptait reprendre Forbes Industries, ce qui semblait logique pour tout le monde lorsqu’elle racontait son histoire. Néanmoins, le professeur Byrne ne le voyait pas de cet œil. Lui-aussi descendait d’une famille de botanistes qui s’était spécialisée dans la culture de végétaux très rares qu’ils revendaient après cueillette. On l’avait destiné à exercer la même profession mais il s’était découvert un talent particulier ainsi qu’un goût prononcé pour la métamorphose qui l’avaient poussé à changer de voie. Selon lui, nous n’étions pas forcés d’obéir aux attentes des parents concernant l’avenir professionnel. Melania lui répondait pourtant qu’elle était sûre d’elle et qu’elle s’était préparée toutes ces années dans le but de faire carrière dans le commerce et l’artisanat magique. En vérité, elle n’avait pas le choix si elle souhaitait faire honneur à sa famille et l’idée même de changer de voie signifierait qu’elle serait certainement déshéritée. C’était inconcevable, elle ne pouvait se le permettre. Quand ils abordaient le sujet, Melania finissait par couper court à leurs petits entretiens et en même temps, elle revenait d’elle-même voir le professeur Byrne plusieurs jours ou semaines après. En effet, plus elle conversait avec lui et plus elle se rendait compte du potentiel exceptionnel dont elle était dotée en Métamorphose. Son interlocuteur ne souhaitait pas la forcer à s’orienter vers cette discipline mais il trouvait dommage qu’elle ne prenne pas le temps de réfléchir par elle-même de ce qu’elle souhaitait faire de son avenir. Au fur et à mesure du temps, il parvint à briser la carapace bien solide de la jeune septième année, à lui faire prendre conscience de bien des choses. Elle adorait la magie, elle adorait découvrir de nouvelles choses, faire des recherches et même inventer des sortilèges ! C’était une piste à explorer. Tous ces moments de nature intellectuelle passés en la compagnie de cet enseignant suscita même un attachement de Melania envers cet homme pourtant plus âgé qu’elle de 13 ans. Un attachement qui fini par évoluer en  sentiments amoureux, plus forts que ce qu’elle avait pu ressentir envers son ex petit-ami à Poudlard. Elle avait la sensation qu’elle pouvait confier les moindres partielles de son histoire à ce fameux professeur et que celui-ci les garderait sans jamais les trahir. Plus les mois passaient et plus elle remettait en question ses perspectives d’avenir, causant chez elle des doutes, de l’anxiété et une immense peur de devoir plus tard avouer la vérité à son père sur ce qu’elle envisageait de faire. Elle se rendait compte que toute sa détermination à devenir chef d’entreprise avait été façonnée par les discours permanents de son père qui l’avait parfaitement conditionnée à atteindre cet objectif. Il avait réussi à lui donner l’impression qu’elle était son propre chef, qu’elle décidait pour elle-même et que rien ne pouvait l’influencer alors que c’était faux. Se rendre compte de ces choses à quelques mois de l’obtention des ASPICs marqua le début d’un bouleversement  dans son quotidien. Sans oublier qu’à côté de cela, elle tomba  amoureuse du professeur Byrne qui, lui, était déjà marié et père d’un enfant. Ce mélange d’émotions frôlant un brin la dépression la poussa à avouer ses sentiments. Bien évidemment, le professeur Byrne dressa immédiatement  des barrières quand bien même cette élève pouvait lui plaire sur bien des aspects. Cependant, c’était négliger  la détermination de la jeune fille qui détestait ne pas obtenir ce qu’elle voulait parce qu’elle avait tant l’habitude de pouvoir persuader ses camarades de tout et n’importe quoi. Au vu de l’état émotionnel dans lequel elle était embourbée et son incapacité à avouer à son père qu’elle souhaitait entreprendre des études de magies avancées plutôt que du commerce, Melania se montra très insistante auprès du professeur Byrne. Il était devenu son repère, la raison pour laquelle elle attendait que les journées se terminent afin d’aller le rendre visite. N’ayant pas d’autre choix que de la repousser, l’enseignant fut contraint de se montrer plus ferme envers elle afin de lui faire comprendre qu’elle dépassait les limites et qu’une relation entre eux était tout bonnement impossible, même après la fin de ses études. Il ne souhaitait pas blesser sa femme, ni compromettre son rôle de père de famille. La culpabilité d’une tromperie le rongerait à tout jamais. Alors, Melania en décida autrement : elle obtiendrait ce qu’elle désirait sans que le professeur Byrne ne puisse s’en sentir coupable. C’était à l’aide d’un philtre d’amour parfaitement élaboré et versé dans un verre de vin, lors de l’une de leurs entrevues du soir au cours de laquelle ils effectuaient ensemble des recherches en métamorphose, qu’elle parvint à le convaincre de satisfaire toutes ses envies ne serait-ce que le temps d’une nuit. Elle en éprouvait un si grand désir qu’elle était prête à tout pour l’assouvir. La Serdaigle était parfaitement consciente que jamais un professeur n’aurait douté qu’une élève aussi sérieuse et responsable qu’elle puisse être capable de commettre un acte illégal. Son plan fonctionna à merveille jusqu’au lendemain matin où le professeur s’était réveillé à six heures et demi du matin aux côtés de son élève qui brandit sa baguette magique vers lui, prête à lui lancer un Oubliettes afin qu’il ne se souvienne guère de cette nuit. Neutralisée aussitôt par un sortilège lancé sans baguette dont il en était maître, le professeur Byrne lui demanda des explications, se mettant en colère comme il ne l’avait jamais été. Il s’était senti trahi par son élève et cela n’ôtait en rien la culpabilité qu’il ressentait vis-à-vis de sa femme, d’une part, parce qu’il avait continué à voir Melania alors qu’elle l’aimait et d’une autre part, pour lui avoir accordé sa pleine confiance. Il qualifia ces actes d’agressions et menaça la préfète-en-chef de la dénoncer, ce qui lui vaudrait une exclusion définitive de Poudlard avant la fin de sa scolarité.  Au moment où il  franchit l’étage auquel était situé le bureau de la directrice McGonagall, Melania  s’effondra en larmes devant lui, lui formulant mille excuses. Elle disait regretter amèrement ce qu’elle avait fait, justifiant ses actes par le fait qu’elle ne se sentait pas heureuse dans l’état actuel des choses parce qu’elle était effrayée à l’idée de ne pas remplir son devoir auprès de Forbes Industries. Effrayée à l’idée d’échapper aux projets que son père avait construit pour elle depuis son enfance. Effrayée de voir sa réputation dégradée si elle faisait ses propres choix. Ces arguments étaient véridiques et traduisaient totalement son état d’esprit mais ce qu’elle ajouta par la suite de son discours n’avait eu que pour but de retourner la situation. Effectivement, elle se mit à accuser le professeur d’être la source de tous ses ennuis. Après tout, c’était lui qui n’avait pas cessé depuis le début de l’année de vouloir remettre en cause tout ce à quoi elle croyait ? Selon elle, il avait sa part de responsabilité. Il l’avait cherché. Piégé par Melania, le professeur Byrne renonça à l’idée de la dénoncer mais en contrepartie, ils ne se verraient plus en dehors des cours, ni après l’obtention des ASPICs de la jeune fille.

Les deux derniers mois passés à Poudlard furent consacrés à la révision de tout le programme des septième année. De temps en temps, Melania aidait ses sœurs dans leurs propres cours, fortifiant son lien fraternel avec elles alors qu’elle les avait mises de côté lorsqu’elle passait son temps avec le professeur de métamorphose. D’ailleurs, elle s’occupait au maximum afin d’oublier ses sentiments. Cela fonctionnait plutôt bien et elle regrettait de l’avoir forcé indirectement à passer une nuit avec elle pour la simple raison qu’elle ne contrôlait plus ses émotions durant cette période. Comme pour expier sa faute, elle accomplissait  son rôle de préfète-en-chef avec encore plus de volonté et de ferveur. Elle épuisait toute son énergie à aider les membres de sa maison dans chacune des problématiques qu’ils pouvaient rencontrer. Octavie, la cadette, était celle qui l'admirait et la respectait le plus. Elle voulait ressembler à son aînée et la prenait comme exemple auprès de ses camarades. Octavie était adorable et Melania trouvait en sa compagnie un sentiment d'apaisement et de joie. Mais au fond d’elle, tout n’était pas si rose. Effectivement, elle appréhendait la réaction de sa famille lorsqu’elle leur annoncerait qu’elle ne comptait pas reprendre la direction de Forbes Industries.


3. APRES POUDLARD – FORMATIONS

Les ASPICs acquis haut la main, Melania s’inscrivit à l’université dans la filière de magies avancées, cursus Métamorphose. Lorsque son père prit connaissance de cette information durant l’été,  il sombra dans une colère noire, allant même jusqu’à gifler sa fille à plusieurs reprises devant ses petites sœurs. La scène les avaient choquées mais complètement apeurées par le comportement violent de leur paternel, elles n’avaient pas porté assistance à leur aînée. Elles étaient restées figées, attendant que tout ne se termine, le coeur compatissant.

Pendant toutes les vacances estivales, Larry Forbes s’en prenait à sa fille. Il la brutalisait verbalement ou bien, quelques fois, tentait des approches plus mielleuses pour tenter de la faire changer d’avis. Mais Melania, écoeurée de ce changement drastique de comportement qu’il avait envers elle, ne cédait pas. Elle lui en voudrait pour toujours de l’avoir giflée à maintes reprises et de lui avoir si mal parlé en tentant de briser sa confiance en elle. La jeune femme se remémorait des propos du professeur Byrne au sujet de mener sa vie comme elle l’entendait et non pas en se soumettant à ce que sa famille attendait d’elle. Plus que jamais, elle regrettait d’avoir violé l’intimité de ce professeur avec lequel elle avait dû couper les ponts par la suite. Le cas contraire, elle aurait pu trouver refuge chez lui. Ses nuits étaient terribles, elle ne cessait de faire des cauchemars, de remettre toute sa vie en question, d’angoisser au sujet du fait qu’elle serait entièrement déshéritée et d’affronter le regard sévère et déçu de son père chaque matin au petit-déjeuner.  Le seul point positif était qu’elle pouvait compter sur le soutien de ses sœurs ainsi que celui de sa mère bien qu’aucune d’entre elles n’ouvraient la bouche lorsque le père de famille entrait dans une profonde acrimonie.

A la fin de l’été, Rosemary Forbes engagea de sérieuses discussions avec son mari. Elle en avait assez de constater la dégradation de l’état mental de Melania qui avait cessé de s’alimenter correctement depuis des semaines, ne ressentant ni la faim, ni l’envie de faire autre chose que d’étudier pour mieux oublier l’atmosphère pesante du manoir. C’était son rôle de mère que de veiller au bien être de ses filles et la tournure que prenait les événements l’horripilait. Après des heures de négociations autour de la table du salon, il fut convenu que Melania ne serait pas déshéritée. Elle ne prendrait pas la tête de Forbes Industries mais conserverait des parts sociales  pour lui assurer une rente pécuniaire. Une simple associée, en somme, pouvant jouir des droits découlant de sa participation au capital de la société.  Ensuite, ce serait Erin, leur seconde fille, qui deviendrait le futur leader de l’entreprise. Cela ne lui posait aucun problème, elle-même n’ayant jamais éprouvé plus que cela d’intérêt pour un autre domaine en particulier.

Suite à cette décision, Larry Forbes avait pris ses distances avec Melania et avait pleinement consacré son temps à la formation d’Erin. Elle avait tout à rattraper : les années de formatage et de conseils que Larry avait prodigués à Melania pour en faire la parfaite entrepreneuse.

Soulagée de s’en être sortie sans avoir été enterrée sous terre par la fureur de son père, Melania avait pu appréhender ses études supérieures avec une certaine sérénité. Elle avait repris du poil de la bête très rapidement, sa rigueur et sa détermination étant une nouvelle fois des facteurs cruciaux dans sa réussite et sa volonté de parvenir à ses fins professionnelles. Le parcours de magies avancées à l’université englobait notamment les matières telles que Potions, Sortilèges, Défense contre les Forces du Mal et la Métamorphose. Il s’agissait des quatre matières qui prenaient le plus de place dans son planning et plus particulièrement la Métamorphose qui, à partir de la deuxième année d’études, était devenue sa matière principale. Elle était totalement en phase avec les nouvelles notions qu’on lui apprenait et sa baguette, toujours fidèle à elle-même, réalisait d’incroyables exploits à en rendre verts de jalousie la plupart des camarades de sa promotion. Melania était une prodige en la matière et elle s’épanouissait dans ce cursus. Elle ne regrettait pas d’avoir modifié la trajectoire de son avenir en choisissant elle-même ce qu’elle désirait faire. De plus, elle n’était pas inquiète d’un point de vue financier puisque chaque année, une partie du bénéfice de Forbes Industries lui était versée sous forme de dividendes, ce qui lui permettait de vivre aisément. En vérité, elle se sentait totalement gagnante dans cette histoire et cet été de malheur post-Poudlard en avait valu le coup. Plus personne ne pouvait lui dresser de barrières et quand bien même Larry ne donnait que très rarement de nouvelles à sa fille, cela la laissait quasiment indifférente tant elle nourrissait de la rancune à son égard. Et puis, le contenu des lettres de son père n’évoquait majoritairement que le contenu des activités annuelles de Forbes Industries, ses rapports de performance, ses études de marché, etc. Il ne lui parlait pas énormément de lui, se contentant de lui raconter comment il formait Erin mais que, hélas, elle ne se montrait pas forcément à la hauteur de ses exigences. Il regrettait amèrement la voie qu’avait prise Melania et lui faisait part du fait qu’il n’était pas trop tard pour revenir sur sa décision. Mais cela lui était complètement égal : la jeune femme ne prenait même pas le soin de répondre à ce genre de questionnement, se contentant d’envoyer des banalités. Fort heureusement, elle recevait plus de détails des lettres de sa mère qui s’accompagnaient généreusement de colis remplis de choses diverses et variées que Melania appréciait, telles que des bouteilles de vin, de champagne, de nouvelles robes de soirées ou encore de tablettes de chocolat noir venant de grands maîtres chocolatiers.

Au cours de son cursus établi sur cinq ans, l’ancienne Serdaigle fut amenée à mener des recherches approfondies concernant des thématiques en métamorphose jusqu’alors non-étudiés. Elle fit plusieurs découvertes en collaboration avec des enseignants de l’Université, publia certaines théories dans des magazines spécialisés en Métamorphose et participa même à certains séminaires visant à piquer l’intérêt des jeunes sorciers dans la matière dans plusieurs académies d’Europe, telle que BeauxBâtons.  Elle s’investissait énormément dans ses études et ne refusait jamais l’occasion de pouvoir participer à n’importe quel projet. Elle était même force de proposition quand il s’agissait de trouver des idées novatrices ou d’entamer des recherches sur un sujet complexe de Métamorphose qui laissaient d’autres chercheurs perplexes. Dans le domaine, de plus en plus d’experts finirent par connaître son nom. Elle attirait l’attention autour d’elle, faisant usage à la fois de ses connaissances solides mais également de ses capacités oratoires pour capter son public. Elle disposait de son charme, de son élégance et de son charisme qui forgeaient la vitrine idéale pour attirer les regards vers ses travaux, à tel point qu’à la fin de ses études, on l’engagea dans une structure rattachée au Ministère mais qui était déconcentrée dans le pays : l’Institution nationale de la recherche magique (INRM) qui ne recrutait que l’élite dans de nombreux domaines. L’INRM était divisée en plusieurs départements, chacun effectuant des recherches dans une discipline précise. La structure était financée par les recettes de l’Etat mais également par des donations faites par de riches et puissants sorciers qui étaient passionnés par le développement de nouvelles magies.

4. CARRIERE

A vingt-trois ans seulement, Melania était déjà promue au grade de chef de projets et dirigeait une équipe de chercheurs plus âgés qu’elle. Asseoir son autorité ne fut pas une tâche bien compliquée pour quelqu’un comme elle qui avait déjà exercé les fonctions de préfète, puis de préfète-en-chef à Poudlard. Au final, les adultes n’étaient rien d’autres que de grands enfants qui avaient besoin d’être gouvernés pour travailler dans des conditions optimales. Ca, elle le comprit très vite et ses techniques de management portaient leurs fruits ; très rapidement, son équipe devint la plus performante. Elle savait doser entre la fermeté, la diplomatie et la valorisation du travail bien fait de ses collaborateurs. On leur confiait les missions les plus difficiles à appréhender, les cas d’enquêtes les plus casse-tête du département de Métamorphose. En effet, certains sorciers payaient des prestations de l’INRM afin de résoudre des problèmes relevant de l’usage de la magie : quelqu’un qui avait fait disparaître par erreur son chat avec un Evanesco et qui ne parvenait plus à le faire revenir de la dimension du « tout », la perte de contrôle du pouvoir d’un animagus, la résolution de troubles majeurs liés à la magie que le département ministériel des catastrophes magiques ne parvenaient pas à gérer, et tant d’autres choses. Il ne s’agissait pas de l’essentiel de leur quotidien mais intervenir sur le terrain leur permettait parfois de découvrir des cas problématiques complexes pouvant faire avancer leurs recherches, voire même les orienter vers de nouvelles thématiques à explorer.

Ce premier emploi était très formateur et occupait notre protagoniste à un point où il ne lui était pas possible de conclure ses travaux sans faire d’heures supplémentaires. Cela ne lui laissait que peu de place pour sa vie sociale et elle ne fréquentait que les employés de l’INRM. C’était une sorte de grande famille, comptant des centaines d’employés. Les seules personnes extérieures qu’elle parvenait à côtoyer de temps en temps étaient ses sœurs, le professeur Horace Slughorn (oui, elle tenait sa promesse de le garder dans son réseau personnel) ou encore sa meilleure amie de Poudlard, Enora Hilliard, qui avait obtenu un poste au département de la justice magique au Ministère. Elles entretenaient notamment leur lien d’amitié par correspondance.  Cela permettait à Melania de souffler un peu et de ne pas se sentir constamment absorbée par l’environnement de l’INRM. Là-bas, les jours se ressemblaient pas mal : on se levait pour se rendre à l’INRM, on mangeait INRM, on pensait INRM, on travaillait INRM, on rentrait chez soi en pensant encore INRM et on se couchait en planifiant à l’avance ses tâches à l’INRM. C’était ainsi que la plupart des cadres de l’institution le ressentaient mais tous en avaient pris l’habitude. En contrepartie, ils étaient bien payés même si on comptait bien plus sur leur passion pour continuer à être motivé jour après jour plutôt que sur la rémunération.

Malgré cette sensation de cloisonnement, Melania parvint au fil de ses premières années de travail à mieux s’organiser afin de s’adonner à des loisirs ou d’autres activités lui permettant de ne plus penser à la métamorphose lorsqu’elle rentrait chez elle. Elle s’intéressait au Quidditch, effectuait des paris sportifs avec l’argent qu’elle était prête à perdre, se rendait à des soirées mondaines où elle était invitée par Enora qui connaissait bon nombre de personnes influentes au Ministère. Elle reprenait goût à la vie sociale, au fait de fréquenter des personnes intéressantes et puissantes dans un cadre différent que celui de sa profession. Elle recroisait d’anciennes connaissances de Poudlard  et partageait en leur compagnie des anecdotes au sujet de son emploi.  A nouveau, elle décidait de se forger un réseau autour d’elle parce qu’elle savait que c’était essentiel pour satisfaire ses ambitions de grandeur. Elle ne comptait pas rester simplement chef de projet à l’INRM même si son statut d’associée aux Forbes Industries lui assurait la pérennité financière. Elle avait besoin de plus. Elle voulait devenir une grande sorcière et que toute la Grande-Bretagne le sache. Ce n’était jamais assez pour sa détermination dévorante et la personne qui la comprenait le plus à ce sujet était Ulrich Walsh, un jury auprès de la cour au département de la justice magique, plus âgé qu’elle de cinq ans.  Elle l’avait rencontré lors d’un gala de charité et tous deux avaient succombé à leur charme mutuel. Ils étaient deux personnes ambitieuses, prêtes à tout pour obtenir ce qu’elles voulaient et par dessus-tout, Melania avait l’impression de revivre avec cet homme la même relation de confiance qu’elle avait eue avec le professeur Byrne, à Poudlard.  Il fallait savoir qu’au-delà de sa très bonne réputation au sein de l’INRM, Melania se méfiait facilement des autres parce qu’elle suscitait  la jalousie chez certains qui n’attendaient qu’un seul faux pas de sa part pour enclancher sa chute. Elle ne se permettait donc pas de confier les points les plus sensibles de sa vie à n’importe qui et sa rencontre avec Ulrich Walsh donna un tournant à sa vie sentimentale jusqu’alors éteinte depuis la fin de ses études supérieures. Ce qui plaisait à Ulrich était l’élégance naturelle qui se dégageait de Melania lorsqu’elle s’exprimait, ses connaissances débordantes en magie, sa confiance absolue en elle, ses désirs de grandeur ainsi que son séduisant sourire. Inversement, la jeune femme lui trouvait d’innombrables qualités en plus d’un physique avantageux dont il s’était toujours servi pour séduire des femmes. En parlant de femme, il était divorcé depuis quelques mois et ne voyait ses enfants que rarement. L’idée de reconstruire sa vie avec Melania l’intéressait beaucoup.


Comme elle l’avait préalablement prévue, Melania candidata au poste de directrice du département de métamorphose de l’INRM, aidée par les recommandations de ses connaissances du Ministère qui étaient des sorciers influents. La réponse suite à son entretien fut positive. A trente ans seulement, elle devint la plus jeune sorcière jamais nommée à ce poste et quand bien même son jeune âge en aurait fait douter plus d’un quant à ses capacités à diriger, ses aptitudes exceptionnelles en Métamorphose ainsi que ses prouesses en tant que chef de projet avaient constitué des arguments suffisants pour qu’elle obtienne la crédibilité de ses collègues.  Les responsabilités rattachées à ce grade étaient nombreuses mais en quelques semaines seulement, elle était parvenue à prendre la maîtrise totale de toutes ses tâches, parfois aidée par son adjoint qui avaient quinze ans d’expérience dans son métier. Elle faisait le point avec toutes les équipes de son département, recueillait leurs avis,  inspectait leur travail, les orientait vers de nouveaux sujets de recherches, participait elle-même à certaines d’entre elles quand cela demandait plus d’expertise, rassemblait d’innombrables rapports et soumettait les résultats  à la direction de l’INRM. Les journées étaient à la fois courtes et longues : courtes parce qu’il était impossible d’effectuer les tâches du jour en sept heures et longues parce que Melania était forcée de quitter son bureau plus tard que prévu afin d’accomplir ce qu’elle avait à faire. Autant les heures supplémentaires étaient monnaie courante au poste de chef de projet, autant elle ne s’attendait pas à ce que sa charge de travail en tant que directrice soit d’autant plus éreintante. Néanmoins, elle tenait le coup et elle était animée par le pouvoir que lui conférait ce titre. C’était un tremplin parfait pour évoluer encore et intégrer un jour les hautes sphères du Ministère de la Magie avec un tel C.V. C’était une femme responsable, répondant à tous les impératifs et qui étaient parmi les plus qualifiées de l’institution. Elle suscitait le respect et l’admiration à la fois.
Durant la même année, elle épousa Ulrich Walsh, devenant Melania Walsh, et emménagea avec lui dans une grande maison qu’ils avaient fait construire. Cette nouvelle vie maritale comblait parfaitement Melania qui ne pouvait que se sentir heureuse tant elle était satisfaite des plans professionnels et sentimentaux de sa vie. C’était ce à quoi elle aspirait même si elle en attendait encore plus d’elle-même pour continuer d’évoluer.

Pourtant, elle ne se doutait pas que leur relation ne tiendrait pas. Il y a des choses que l’on ne devine pas forcément à l’avance chez sa partenaire et que l’on ne prend conscience qu’au moment de vivre avec elle. Ulrich était quelqu’un de très attaché aux valeurs familiales et au-delà de sa rigueur et de son investissement au Ministère, il tenait à trouver du temps pour profiter du plus possible de sa compagne. Néanmoins, ce n’était pas le cas de notre héroïne qui privilégiait clairement son travail à sa vie privée. Les mois passaient et Ulrich se sentait complètement délaissé par sa femme qui, elle, ne voyait aucun problème relatif à leur couple. Selon elle, il était capricieux et l’empêchait d’effectuer son travail en lui demandant de quitter plus tôt de l’INRM de temps en temps. Ces conflits devinrent de plus en plus fréquents au fur et à mesure, à tel point que Melania sentait ses sentiments s’envoler.  Pour autant, l’idée de divorcer lui paraissait trop abrupte et elle la repoussa sans cesse. Finalement, peut-être aurait-elle dû l’envisager plus tôt avant de commettre l’irréparable…

Il y avait ce nouveau jeune homme de vingt-deux ans, fraîchement sorti d’études et qui venait d’intégrer une équipe du département qu’elle dirigeait : Clay Preston. Melania l’appréciait et avait vite joué le rôle du mentor en lui apportant l’étendue de son savoir en Métamorphose. Clay, tout aussi passionné qu’elle, passait bon nombre de ses soirées en compagnie de sa patronne, discutant du travail ensemble tout en trinquant autour d’un verre de vin ou de champagne. Il admirait son parcours et rêvait d’être aussi réputée qu’elle. Melania, de son côté, s’amusait de voir le jeune homme dans ses pattes, toujours à poser des questions, toujours à s’intéresser à elle. Mystérieusement, elle préférait dédier son temps personnel à lui plutôt qu’à son mari. Ce constat l’avait, au départ, rendue perplexe mais au vu des disputes conjugales répétitives ces derniers temps, Melania préférait esquiver Ulrich. Quand elle parlait de son époux à Clay, ce n’était donc pas de façon positive et le jeune homme se sentait vraiment désolé pour elle. Il faisait tout pour la mettre de bonne humeur, il accomplissait son travail avec efficacité dans le but que sa directrice ne le remarque et de fil en aiguille, ils tissèrent bien plus qu’une relation amicale ou professionnelle. Ils étaient allés plus loin, s’enlisant dans des rapports charnels durant les soirs de la semaine, dans le bureau de Melania. Clay était tombé amoureux et ne demandait qu’à vivre officiellement sa relation avec elle mais Melania n’éprouvait qu’un fort attachement en vers lui, du simple fait qu’il lui apportait ce qu’elle n’avait pas avec Ulrich. De plus, il était hors de question que toute l’institution ne soit au courant qu’elle fréquentait l’un de ses subordonnés. Elle le lui avait fait jurer sous serment inviolable tellement elle ne souhaitait pas créer de scandale autour d’elle qui puisse nuire à son image et justifier son évincement à son poste.  Clay le prit mal mais il finit par accepter puisqu’il s’agissait de la seule alternative possible pour qu’il puisse continuer leurs petites soirées. Avait-elle conscience, à cet instant, que ce lourd secret la poursuivrait longtemps ? Non. Elle s’en voulait parfois de penser d’abord à sa réputation avant de penser à la réaction et au chagrin de Ulrich s’il apprenait qu’elle l’avait trompé. Malheureusement, elle avait bel et bien cet ordre de priorité en tête.

Deux ans plus tard, Melania donna naissance à deux faux-jumeaux : Callum et Cleo. Ce que personne ne savait, c’était que ces enfants étaient également ceux de Clay. Mais ça, elle se gardait bien de le dire. Même Clay l’ignorait.  A partir de ce moment, elle ferait donc passer pour toujours Callum et Cleo comme les enfants d’Ulrich, sachant parfaitement qu’avouer la vérité un jour ou l’autre lui apporterait beaucoup trop de problèmatiques qu’elle n’était pas prête de gérer. Elle considérait avoir suffisamment de pain sur la planche dans sa vie professionnelle pour nourrir de l’anxiété pour autre chose.

En raison de son congé maternité, la mère de famille dut se consacrer pleinement à ses nourrissons. Mais pour quelqu’un qui avait l’habitude de se donner corps et âme au travail, ce n’était pas aussi simple. Elle avait besoin d’une occupation intellectuelle qui lui apporterait quelque chose de concret. Alors, parallèlement à son quotidien de maman, Melania s’intéressa de près aux marchés financiers de la Bourse Magique de Londres. Elle en connaissait les bases de par ce que lui avait appris son père depuis son enfance mais elle avait jusqu’alors abordé la chose que de façon abstraite. Les dividendes qu’elle percevait chaque année se constituaient de sommes colossales qu’elle comptait bien faire croître encore et encore. C’est ainsi qu’elle eut l’idée d’investir cette somme dans d’autres entreprises à fort potentiel et qui, évidemment, n’avaient rien à voir avec l’activité commerciale de Forbes Industries. Elle tirait de ces investissements d’innombrables valeurs mobilières de placement, des titres financiers qui lui permettrait plus tard de rentabiliser l’excédent de trésorerie des établissements qu’elle visait. Une vraie femme d’affaire !

A son retour de congé parental, Melania reprit son quotidien de directrice à l’INRM tout en prêtant attention à sa nouvelle activité annexe en tant qu’actionnaire de plusieurs entreprises. Au bout d’un an, elle finit même par siéger au conseil d’administration de l’une d’entre elles, Cauldron’s Time, qui commercialisait divers chaudrons magiques innovants sur le marché. On pouvait dire que c’était une sorcière accomplie, sachant parfaitement ce qu’elle faisait et qui montrait l’exemple. Mais la contrepartie de tout cela était qu’au fil des années, elle négligeait l’éducation de ses enfants. N’ayant que peu de temps devant elle, Melania était de ceux qui rentraient très tard le soir lorsque ses enfants dormaient déjà et partait très tôt le matin quand ils n’étaient toujours pas réveillés. C’était Ulrich qui s’en occupait ou bien une nourrice qu’ils avaient engagés. Elle ne voulait justement pas être une mère qui sacrifierait son temps pour élever des bambins alors que sa place l’attendait sur son fauteuil de cuir, dans les grands locaux de l’INRM. Elle tenait en horreur l’image de la femme au foyer qui négligeait ses ambitions et ses rêves pour des petits qui n’avaient même pas pleinement conscience de la vie. Tout comme son argent, son temps lui était précieux et elle ne souhaitait le consacrer qu’à sa propre réussite. De cet égoïsme en découlât sa décision d’engager la fameuse nourrice qui répondait au nom d’Elvira Moorehead. Quand elle avait la rare occasion de parler à ses enfants le soir en rentrant du travail, c’était toujours avec une certaine distance qui s’apparentait presque à de la froideur. Elle ne s’était jamais habituée au rôle de mère et elle avait du mal à s’y attacher plus qu’elle ne s’attachait à son travail. Pourtant, une part d’elle les aimait tout de même. Une part dont il lui était difficile d’exprimer mais jamais elle n’aurait accepté qu’il ne leur arrive quoi que ce soit. Elle veillait toujours à ce qu’on leur apporte ce dont ils avaient besoin pour être contents, même si leur bonheur venait des mains délicates et bienveillantes de leur nourrice. C’était une jeune couturière qui rêvait de percer dans la mode des sorciers et qui économisait depuis l’arrêt de ses études pour ouvrir sa propre boutique de vêtements sur le Chemin de Traverse. Elle s’entendait très bien avec Melania et cette dernière s’assurait toujours qu’Elvira se sente comme chez elle, dans sa maison. Elle la soutenait dans son projet et la motivait en lui racontant  souvent son propre parcours dans le but de l’inspirer. Un parcours qui, certes, n’était pas donné à tout le monde et dont il fallait prendre en compte le fait que Melania était née dans une famille s’étant déjà donné les moyens de réussir. Sans ce patrimoine familial, les choses auraient pu être compliquées en particulier pour acquérir une aussi grande et belle maison. Cependant, son principe de mettre au coeur de sa vie le travail et la détermination d’accéder à ses ambitions n’en demeurait pas moins valide ; on ne parvenait pas au sommet par le plus grand des hasards.

Les années passèrent et l’ambition de Melania semblait ne jamais vouloir s’éteindre. Elle finit par prendre la direction de l’INRM toute entière et elle avait cessé de fréquenter Clay depuis un bon moment lorsque celui-ci s’était trouvé une femme avec qui partager sa vie. Plus que jamais, Melania était absente de son foyer familial. Ses enfants la réclamaient et leur père trouvait moultes excuses pour leur expliquer la situation sans leur avouer que leur mère ne souhaitait pas perdre de temps à les éduquer alors qu’elle avait du travail ou qu’une nouvelle soirée mondaine était organisée par le conseil d’administration de Cauldron’s Time chez qui elle avait investi de fortes sommes. Cette manie de prioriser le reste à sa famille agaçait Ulrich. Melania était certes une sorcière responsable et remarquable à l’INRM mais sa vie privée était chaotique, mal gérée et cela, personne ne le savait dans son entourage professionnel.

Avec le temps, sa relation avec sa femme se dégrada davantage. A bout du comportement de celle-ci, obsédée par ses projets professionnels au détriment de Callum et Cleo, demanda le divorce après 10 ans de mariage. Si Melania avait ressenti de la mélancolie et de la stupéfaction face à cette décision, elle se remit de cette procédure de divorce plus facilement que prévu et ce fut avec fierté qu’elle arbora à nouveau son nom de jeune fille, Forbes. Elle ressentait certes un vide en elle-même après dix ans de relation avec un homme aussi impliqué et conciliant que Ulrich mais elle était soulagée d’être libérée de la pression constante qu’il lui faisait ressentir vis-à-vis de son statut de mère irresponsable.  Elle ne subit pas immédiatement la solitude de plein fouet, la trouvant même plutôt agréable pour l’instant. Elle continuait toujours de correspondre avec sa meilleure Enora, même si elles avaient pris leurs distances l’une envers l’autre à cause de leur vie professionnelle. Ce n’était plus comme avant, c’était certain, mais elles s’entendaient relativement bien.  Quant à ses enfants, Melania tenta de s’en occuper du mieux qu’elle le pouvait en se montrant la plus présente possible mais cette intention ne dura qu’un temps et rapidement, elle déchargea derechef cette tâche à la nourrice qu’elle avait embauchée.

L’année de ses quarante ans se solda certes par un divorce mais également par une excellente nouvelle : un ami de longue date qui était secrétaire d’Etat et chargé de la gestion du bureau du Cabinet du Ministère de la magie lui proposa un poste de conseiller rattaché à ce même cabinet. Les choses avaient pris une autre tournure depuis que les mangemorts avaient fait tomber le précédent régime du Ministère, au début de l’année 2023. Le nouveau secrétaire, fraîchement élu durant la période estivale où les mangemorts furent évincés, cherchait à constituer une équipe fiable, compétente et suffisamment déterminée pour réformer toutes les administrations du Ministère de la Magie. Cela constituerait l’occasion idéale pour Melania d’accomplir un objectif qu’elle avait toujours gardé dans un coin de sa tête : celui d’intégrer les hautes sphères politiques du ministère. Cela la rapprocherait également du premier ministre lui-même et contribuerait à enrichir son expérience tout en apportant la sienne en termes de management et de conseil. Il était souvent nécessaire d’avoir un passif en droit pour intégrer le Cabinet mais ayant travaillé pendant presque vingt ans dans un service déconcentré de l’Etat jusqu’au rang de directrice de l’INRM, Melania savait pertinemment comment fonctionnait le système et sa connaissance des marchés financiers était un gros plus qui avait valorisé son profil.  

Il lui parut parfaitement étrange de changer radicalement de lieu de travail du jour au lendemain. Rassembler les affaires de son bureau à l’INRM s’était avérée être une tâche plus ardue que prévu tant elle était déjà frappée par une vague de nostalgie. Ce département qu’elle gérait était comme l’un de ses enfants. Un enfant qu’elle avait choyé bien plus que les deux autres qu’elle avait enfanté. Cela lui briserait presque le coeur mais la perspective d’intégrer un poste important au sein du Ministère appâtait son goût pour le pouvoir et la gloire. Ce nouvel emploi lui permit de revoir chaque jour sa meilleure amie Enora avec laquelle elle tissait toujours des liens forts après toutes ces années. Son intégration en était d’autant plus facilité par le biais de ses diverses connaissances  dans les différents départements. Rapidement, elle se sentit dans son élément et c’était d’ailleurs en partie pour ses capacités d’adaptation et son absence de peur de l’inconnu qu’on l’avait prise à ce poste de conseillère dans le système exécutif. Il était certes également étrange de quitter le domaine de la Métamorphose pour lequel elle avait la sensation d’avoir dédié sa vie et en même temps, elle nourrissait une envie immense de s’intéresser et de participer aux rouages juridiques et politiques de la société. Elle n’était évidemment pas seule à ce titre, d’autres conseillers formant en sa compagnie une équipe soudée répondant au besoin de renforcer le service public, de définir et mettre à bien les objectifs du gouvernement, mettre en œuvre des réformes, garantir la cohérence, la qualité et l’efficacité des opérations décidées ou encore offrir des solutions aux problématiques posées par les politiques actuellement en vigueur.

Cette nouvelle routine n’était pas pour autant plus reposante que celle de l’institut nationale de la recherche magique. Les tâches étaient nombreuses et il y avait même du retard sur certains dossiers. Mais globalement, les compétences de chaque membre de l’équipe apportaient une réponse adaptée à chaque urgence qui osait pointer le bout de son nez. Ils étaient proactifs, capables de résister au stress et avant tout,  ce cabinet était majoritairement composé de sorciers pas très loin de la retraite qui avaient suffisamment de vécu dans le monde politique pour faire valoir leur expertise. Cette situation n’avait rien d’une nouveauté pour notre protagoniste, habituée à collaborer avec des individus plus âgés qu’elle. Pour ce qui était de la rémunération, elle était bien plus alléchante qu’à l’INRM.


5. RETOUR A POUDLARD

Parmi les plus gros dossiers à la fois compliqués et polémiques qu’elle avait dû traiter depuis ces cinq dernières années au sein du Cabinet, Melania avait eu pour mission de plancher sur certaines réformes scolaires affectant l’académie de Poudlard. En compagnie de la division chargée de l’éducation, elle avait principalement contribué au renouvellement de certains chapitres étudiés en Métamorphose ainsi qu’en Sortilèges et Enchantements, adaptant certains contenus aux récentes découvertes faites par l’INRM avec laquelle elle entretenait toujours d’étroites relations. Sur le plan pédagogique, les dispositifs mis en place répondaient aux objectifs mais là où l’administration de Poudlard pêchait, c’était dans la gestion de la sécurité des élèves. Bien trop d’événements à la fois graves, sinistres et inacceptables s’étaient déroulés depuis la fin de l’année 2022 : Menesis Blackman à la tête de l’école, les maladresses constantes de Neville Londubat durant l’année scolaire 2023/2024, la menace d’une créature attaquant à la fois les membres du personnel ainsi que les élèves durant l’année 2024/2025 et c’était sans compter l’incendie de fin d’année qui avait réduit l’établissement en ruines. Les ingérences de Poudlard se cumulaient, les parents se plaignaient légitimement du manque de sécurité et certains d’entre eux refusaient même que leurs enfants ne soient inscrits là-bas. Suite à la démission de Londubat, le conseil d’administration de Poudlard avait désigné Evelyn Appleton au poste de directrice de l’école. L’idée d’origine était d’ouvrir les élèves à la tolérance des sorciers aux origines moldues. Le ministre et son entourage issu de son cabinet pensait que c’était la meilleure solution afin d’aider les apprentis sorciers à se remettre de leurs traumatismes. Melania avait assisté aux changements prévus par la nouvelle dirigeance mais à cette époque encore, l’impact du Ministère lui-même dans les affaires de l’école restait des moindres. On avait donné une ligne directrice à Mrs Appleton mais pour ce qui était de la façon de les appliquer, elle avait eu carte blanche. Malheureusement, cela n’avait pas empêché d’autres événements dramatiques de se produire : lors du repas de Noël 2026, le nouveau Ministre de la magie avait été empoisonné dans l’enceinte même de l’école. Le ministère avait donc dû mettre en œuvre un protocole comprenant diverses restrictions visant à limiter le danger couru par l’ensemble des habitants de l’établissement.  Hélas, une nouvelle rébellion avait eu lieu, débouchant sur un champ de bataille entre deux catégories d’élèves dont un groupuscule souhaitant faire lever le secret magique. L’objectif d’ouverture vers la tolérance avait échoué et les parents avaient saisi le tribunal administratif dans le but de révoquer Appleton de ses fonctions. Ils obtinrent justice pour les préjudices causés. A nouveau, le conseil d’administration dut nommer une nouvelle personne à la tête de l’école :  Kaspær Sørensen leur parut être le plus adapté à la tâche afin de faire régner le calme et la discipline parmi les élèves. Etait-ce une bonne idée ? Melania n’en était pas sûre, elle ne le sentait absolument pas. Toutefois, elle ne pouvait aller à l’encontre de cette décision sur une simple intuition de sa part. Le mieux était d’attendre et de voir comment les choses se dérouleraient. Pourtant, attendre et voir était ce que le Ministère avait fait depuis des années, adepte de l’inaction lorsque les événements prenaient une sombre tournure et soudainement réactifs quand les dégâts étaient déjà présents. Il y avait d’autant plus un sérieux problème de recrutement au niveau de la direction de Poudlard : tous finissaient par démissionner. Est-ce que ce fameux Sorensen assumerait son poste jusqu’au bout ? A première vue, ses objectifs pour l’année scolaire de 2027/2028 étaient respectables. Il avait la bonne et due intention de rendre à l’académie son prestige et sa noblesse d’antan. Pourtant, une bombe avait fini par éclater dans l’une des tours du château. De nombreux élèves avaient été gravement blessés. Le Ministère se devait d’apporter une réponse urgente, efficace et adaptée afin de mettre fin à ces actes de terreur et rassurer les parents. Entre-temps, le directeur Sorensen avait disparu des lieux, abandonnant Poudlard à son sort. Combien de temps cette mascarade annuelle allait-elle durer ? Melania trouvait cette incompétence administrative absolument scandaleuse, d’autant plus que ses enfants étaient scolarisés dans cette école depuis maintenant deux ans. Cette année, ils allaient entamer leur troisième année dans ce château et elle ne supportait guère l’idée qu’il puisse leur arriver quelque chose. Elle avait baigné dans la plus forte des inquiétudes ces deux dernières années face à toutes ces menaces et c’était désormais à la fois au nom de ses devoirs et obligations de haut-fonctionnaire ainsi qu’en tant que mère de famille qu’elle osait hausser la voix contre le conseil d’administration. Il n’était pas normal que les informations remontent beaucoup trop tardivement au Ministère, ce qui ne laissait pas ce dernier la possibilité d’agir au plus vite afin de protéger un maximum d’élèves en cas de danger. Par ailleurs, elle n’avait nullement confiance quant aux compétences d’un certain Fergal Armitage en tant que directeur. Elle avait insisté pour que le conseil d’administration revoit sa décision mais elle n’obtint pas d’avis favorable quant à sa demande. Vraiment, elle se demandait comment il était possible de nommer un simple concierge sans passif dans l’éducation, ni dans le management à un poste aussi primordial. On marchait visiblement sur la tête…

Melania fit part de son incompréhension la plus totale de cette décision impertinente au Ministre lui-même. Cependant, ce dernier décida d’accorder au directeur Armitage le bénéfice du doute : peut-être avait-il réellement les compétences requises à la gérance de Poudlard par le fait qu’il connaissait très bien les lieux ainsi que son fonctionnement. Cet argument ne convenait pas réellement à la quadragénaire mais elle avait fini par tourner les talons, consciente que le Ministre lui-même n’était pas prêt de changer de point de vue sur ce recrutement. Elle préféra ne plus parler de ce sujet, même auprès de ses collègues du cabinet. Ce ne fut que lorsque la démission du professeur de Métamorphose tomba aux horizons de fin novembre 2028 que Melania fut convoquée par le Ministre qui lui soumit une proposition : le Ministère la mandaterait pour une mission d’enseignement de Métamorphose à Poudlard  à durée indéterminée. Officiellement, sa nomination permettrait de combler le vide laissé par l’ancien professeur et d’y placer une personne experte en la matière et fiable. Officieusement, ce serait dans le but de  surveiller les affaires de l’école, d’établir régulièrement des rapports secrets au Ministère par hibou express sur ce qu’il s’y passe et d’enquêter lorsqu’un événement indésirable se déroule. Ces missions ne seraient pas connues du conseil d’administration, ni du directeur Armitage. En contrepartie, sa rémunération actuelle n’en serait pas dévalorisée, quand bien même elle changerait de corps. Après mûres réflexions, Melania accepta la proposition. Ce serait, après tout, un moyen parfait de donner au Ministère toutes les informations clefs en temps et en heure pour leur permettre d’agir au plus vite si un danger se dressait face aux autres professeurs et élèves. D’autre part, ce serait la première fois en treize ans qu’elle aurait le temps de voir plus souvent ses enfants et de s’en occuper. Ils lui en voulaient énormément de ses absences récurrentes depuis leur plus tendre enfance, surtout Cleo qui ne mâchait pas ses mots pour lui faire comprendre le fond de sa pensée… Ses erreurs auraient pu la mener à perdre l'amour de ses enfants et pourtant, ce n'était pas cela qui l'effrayait le plus. Effectivement, elle s’en voulait uniquement de leur cacher l’identité de leur vrai père et elle craignait plus que tout qu’ils ne le découvrent un jour.  C’était sa seule grande peur.

Deux jours plus tard, le professeur Forbes se présenta toute souriante au bureau du directeur Armitage. Elle se méfiait beaucoup de ce sorcier mais elle avait un devoir de réserve qui l’interdisait de se prononcer quant aux choix de l’administration. Tant pis, elle ferait avec. Elle déroula devant lui le parchemin qui la nommait officiellement professeur de Métamorphose à Poudlard. Puis, elle entra plus en détails concernant son parcours professionnel, répondant spontanément aux questions que pouvaient lui poser le directeur. Globalement, leur entrevue s’était bien déroulée et le directeur Armitage la nomma même directrice de la maison de Serdaigle. Au final, il n’y avait rien d’étonnant à cela car peu de personnes seraient surpris de voir une femme au C.V si  riche être recommandée par le ministère à ce poste. Peut-être pouvait-on se demander quel intérêt elle gagnait à quitter le cabinet ministériel pour le simple métier de professeur ? Mais quand bien même le directeur Armitage lui aurait posé la question, Melania avait naturellement anticipé cette partie par le biais de réponses toutes faites. Personne n’apprendra à une si bonne oratrice comment réussir un entretien, ni comment remporter un débat.