Wayde a l’impression de n’être là que pour servir de garde ou de sécurité au cœur d’une soirée. Cette impression forcée lui fait du bien tandis qu’il se remémore les nombreuses missions qui lui donnaient tant d’adrénaline autrefois. Conscient que les fêtes d’Halloween ne sont plus de son âge, ni même de l’ordre de ses récentes humeurs sérieuses, il avait fait l’effort de s’y rendre et de jouer le jeu. Le personnage de Bane a beau être flippant et vilain, il n’en est pas moins respectable. Fort et enfant d’un dur vécu, il avait inspiré Wayde dès l’instant où il avait pensé à lui dans sa vague de réflexion. Le choix de costume de son neveu lui était totalement inconnu, mais il était bien content que Misha s’investisse dans la soirée, et surtout, qu’il s’y rende. Un bon début peut-être, ou le début d’un drame qu’il ne saurait prévoir. Wayde ne sait jamais ce que son neveu a véritablement derrière la tête. Même lorsqu’il réussit à le rendre prévisible, le Poufsouffle parvient tout de même à le surprendre de son trop plein d’insolence. De toute façon, ce soir, il n’était pas question de Misha. Ce soir, il s’occuperait de veiller sur le reste des élèves, comme il s’est engagé à le faire en arrivant à Poudlard. Il ne se privera tout de même pas de quelques conversations amicales si celles-ci s’offrent à lui. Il espérait bien voir quelques vieilles connaissances ce soir, de vieux visages retrouvés comme celui de l’intrépide Harold et de la fabuleuse Irina, ou de nouvelles connaissances qu’il apprécie déjà beaucoup.

Alors qu’il se décida à emprunter l’un des nombreux chemins sinistres de la forêt, Wayde fut interpellé par le bibliothécaire. Enfin, par Sammy de Scooby-Doo, pour être plus précis. Celui-ci porte le costume à merveille, ce qui esquisse un sourire caché derrière le masque qui ne révèle que le bleu des yeux de l’oncle Bradford. Les salutations de Wes s’accompagnent de celles de Wayde, hochant la tête, tentant de laisser percer quelques mots à travers cette muselière ainsi nommée par celui qui l’accompagne à présent. « Merci ! J’aime beaucoup votre choix, c’est simple et ça fonctionne bien. Et puis, point positif : le chien ne parle pas. » D’un sourire non visible, Wayde pointe le chien et peluche et accompagne le geste du bibliothécaire, s’emparant à son tour d’une boisson accroché à un arbre. Ne parlant pas plus que ça, presque bloqué par ce qui gêne sa bouche, il écoute alors le bibliothécaire chercher le reste du personnel, des mots par-dessus lesquels Wayde regarde autour de lui. La pénombre l’empêche de voir bien loin, si ce n’est carrément de reconnaître des visages maquillés ou cachés sous des masques. Il sait cependant qu’il ne lui sera pas compliqué de faire la différence entre un adolescent et un adulte. Il ignore si la jeune Jane sera là, mais il sait que son ex petite amie le sera. « Irina devrait venir elle aussi, concernant les autres, j’avoue ne pas avoir demandé. Je n’étais même pas sûr de venir moi-même ! » Il exprime honnêtement le manque de motivation qui l’avait poussé dans les réflexions de son choix de costume, tout comme dans sa venue. Mais maintenant qu’il est là, il doit bien admettre que la soirée promettait d’être amusante. Entendre les cris et les rires des plus jeunes, constater l’investissement des plus vieux, ça réchauffe quelque peu le coeur.

Comme si citer leurs collègues avait eu le pouvoir des les amener jusqu’à eux, Wayde voit apparaître Irina, deux macarons de cheveux de chaque côté de son visage. Elle salue les deux hommes avec un sourire qui aura toujours su plaire au conseiller, avant d’exécuter un mouvement de recul face à la moitié du visage caché de Wayde. Sa plaisanterie sur la balance rééquilibrée lui extirpe un souffle nasale tandis qu’il réajuste sa veste. Faut-il qu’il libère ses bras pour faire moins peur et ne ressembler alors qu’à un boxer qui se protège un peu trop le visage ? Halloween n’est-elle pas une soirée dédiée au sentiment propre de la peur justement ? Voilà ce qu’il pense sur l’instant, avant de porter une réponse à la Princesse galactique qui lui fait face. « Des chasseurs de fantôme, des princesses et des anti-héros, on a le mérite d’avoir de tout ! » Wayde ne peut s’empêcher de penser qu’à un film Star Wars près, c’est une toute autre tenue qu’Irina serait entrain de porter. Mais qu’importe, ce qui l’interpelle bien plus qu’une histoire de costume en cet instant, c’est la crainte que peut procurer une telle soirée. Poudlard en est arrivé à craindre le pire à chacun de ses évènements, et celui-ci ne fait pas exception. Comment le pourrait-il, alors que les élèves circulent librement dans la forêt ? Malgré les périmètres de sécurité, on ne peut que se méfier. L’école a décidé de ne pas cesser de vivre pour autant, tout comme Wayde a décidé de garder ses doigts très près de sa baguette. « Oui, ça se passe plutôt bien pour l’instant, pour la suite on ne peut qu’espérer et rester sur nos gardes. » Presque trop sérieux au moment de dévoiler ses craintes, le conseiller regarde dans la même direction que son interlocutrice et constate à son tour la présence de Jane. Que le bibliothécaire se rassure, comme il l’avait prédit, elle n’est pas loin.

Harold vient à son tour rejoindre le corps enseignant fraîchement regroupé, vieil ami très apprécié à qui Wayde offre un signe de tête en guise de salutation. Il n’aura pas le temps de s’attarder plus longtemps sur sa venue théâtrale digne de Sherlock Holmes, qu’Irina se tourne une nouvelle fois vers Wayde et lui exprime son besoin de lui parler. Lui qui avait déjà bien trop l’attention tournée vers elle, se trouve à présent totalement dédié à sa demande. Imaginant alors des propos d’ordre privés, le conseiller se tourne poliment vers ses collègues Wes et Harold afin de leur adresser quelques mots. « Excusez-moi. » Sympathie à peine déclarée, que l’instinct écarte les anciens amants de quelques pas, loin des oreilles indiscrètes. Le sujet lui semble sérieux, pour autant, Wayde n’a aucune idée de ce dont Irina peut bien vouloir lui parler. Ôtant alors la muselière qu’il a sur la bouche, l’ex Auror se permet de l’interroger sur cette envie de confidence soudaine. « Y’a un problème ? » Il n’est pas vraiment inquiet, juste légèrement surpris, fixant la brune avec insistance.

Le contraste est impressionant. Le changement d’attitude et d’atmosphère est brutal. Comme si Irina cherchait véritablement à lui faire peur en cette soirée d’Halloween, la curiosité de Wayde se transforme en véritable inquiétude, un bouleversement soudain provoqué par quelques mots simples. D’abord un grand oui sec, la réponse à une question qu’il espérait être totalement hors sujet avec ce dont elle voulait parler. Puis s’installa un silence qui ne dura pas suffisamment longtemps aux yeux de Wayde, car dès lors qu’il fut briser, l’annonce de la décision prise par Irina le colla sur place. « Quoi ? » Dit-il plus surpris qu'offusqué. Il en avait vu des choses dans sa vie, et on ne compte même plus toutes celles qu’il a entendu. Mais celle-ci en tenait une couche. Il ne l’avait pas vu venir. Malgré tout le mystère qu'il était parvenu à lire dans le sourire d'Irina, il ne l'avait pas perçu ainsi. Elle veut quitter sont poste de Professeur et Poudlard par la même occasion. Ne pouvant lui en tenir rigueur, les sourcils de Wayde se froncent, plus par incompréhension que par jugement. Il ne comprend pas. Il ignore pourquoi elle vient lui annoncer ça, ce soir, pendant la fête, et surtout à lui. Il ne dit rien pour l’instant, préférant écouter la jeune Femme visiblement très émue par ses propres révélations. Plus un homme d’action qu’un homme d’écoute, le conseiller a apprit à développer ce sens dernier, autrement il ne serait pas là aujourd'hui. Plus facile d’écoute pour les plus jeunes et les plus démunis de repères, il n’estime pour autant pas être qualifié en psychologie. Son pouvoir d’analyse et les nombreuses rencontres qu’il a fait au cours de sa vie l’aident à comprendre les autres bien plus qu’on ne saurait le penser, ce qui rend les entretiens avec ses élèves parfois plus psychiques qu’on ne le croit. Bradford est parfaitement capable d’être ou de devenir l’homme de la situation, à condition que ça ne devienne pas trop personnel. Tout ce qu’il n’a pas su gérer dans sa vie, tient d’un cadre personnel. Et là encore, sa vie privée le bouffe. Les histoires de famille le boufferont toujours. Mais aujourd'hui, c'est un vieil amour de Wayde qui se fait bouffer pas les fantômes du passé.

Mais d’où viennent précisément les maux d’Irina ? Leur conversation dans la salle des professeurs leur aura permis d’en apprendre un peu plus sur les épisodes de la vie qu’ils auraient manqués de l’autre. Ce soir à nouveau, Wayde sent qu’Irina a besoin d’une nouvelle consultation. La première fut fictive, une simple plaisanterie taquine. Ce soir le ton est sérieux. C’est d’un regard fixé au sien que lui vient l’envie de la calmer, ou plus précisément, de calmer les ardeurs de ses prises de décision. Soudaines ou non, il a l’impression d’entendre une mauvaise blague. Parce qu’au fond, il sent que ce n’est pas ce qu’elle veut. Continuant de l’écouter, il se conforte dans cette idée, maintenant persuadé que la brune est face à un mur. Qu’est-ce qu’elle ne lui dit pas ? Qu’est-ce qu’elle n’a pas pu mentionné le jour de leurs retrouvailles ? Une chose s’est passée l’année dernière, et elle veut être sûr de pouvoir lui faire confiance. Le regard brunâtre d’Irina scrute les alentours, le signe que cette conversation n’est toujours pas suffisamment privée à son goût. « Que le moment soit mal choisit, ça m'est égal, je vois bien que quelque chose ne va pas. Je t’écoute… » Dit-il d’un sérieux inébranlable, posant une main flottante sur le dos d’Irina afin de l’emmener toujours plus loin des regards indiscret. Plus les rires et les voix se font basses, plus l’avancée du conseiller d’orientation se fait rare. Seuls à seuls, les yeux dans les yeux, Wayde hoche sèchement la tête avant de répondre à sa crainte avec sincérité. « Jamais je ne te jugerais Irina. Moi encore moins, je suis bien mal placé pour le faire. Mais ne dis pas de connerie, on perd tous nos repères à un moment ou à un autre, ça ne fait pas de toi un faible débris, tu ne le seras jamais. » Mépris apparent envers ses propres erreurs, évidence même du métier de conseiller d’orientation missioné pour guider les esprits perdus, et non les juger. Que ce soit son nouveau métier et sa relation spéciale avec Irina, rien ne lui donnera le droit ou l’envie de la juger. L’homme juste commence tout de même à se poser des questions de plus en plus forte. Il a cependant la patience d’attendre qu’elle soit prête à lui parler. Malgré l’inquiétude qui perce son visage, Wayde ne lui montre rien d’autre que sa préparation à l’écouter. Oui, ils se connaissent. Du moins ils se connaissaient. Malgré les années qui séparent l'intimité qu'ils avaient autrefois partagés, les jeunes adultes qu'ils étaient demeurent encore en eux. « Qu'est-ce qu'il s'est passé ?.. » Affection dans le bleu de ses yeux, voix soudainement plus basse, maussade mais encourageante.