Ah la botanique. Creuser la terre, planter des fleurs, utiliser le sécateur et arroser. Elle aimait faire. Mais parler des plantes à n'en plus finir, étudier la classification et elle en passait et des meilleurs elle préférerait éviter. L'année dernière elle trouvait tout à fait plus intéressant de compter le nombre de limaces accrochées à chaque feuille plutôt que d'entendre son professeur lui expliquer en long en large et en travers ce qu'était une ortie. Sa prof était nulle. Mais cette année ça allait changer. Elle en était sûre puisque c'est sa marraine qui reprenait le cours de botanique! Rien que pour cela elle avait traîné Kovit pour ne pas qu'ils soient en retard lui répétant au moins trois fois de lui donner un coup de coude si jamais il la voyait décrocher. Elle voulait donner bonne impression, elle ne voulait pas que sa marraine la pense bête ou non intéressée mais parfois elle avait du mal à se concentrer.

Elle entra dans la serre, salua sa marraine d'un sourire et alla s'assoir à côté de Kovit assis en face de Colin. Ce cours était réservé aux premières et deuxièmes années si bien que la jeune fille reconnaissait les têtes de plus de la moitié des élèves de la classe. Peu désireuse d'être avenante au point de leur parler et d'entendre leurs remarques sur le fait qu'elle était toujours en première année, elle se contenta d'un petit signe de la main à Kathleen qui était une de ses amies et plus particulièrement son "Maître de l'imagination" et tenta de rassembler ses esprits pour se concentrer avant le début du cours.

Elle reconnu Dmitri à quelques tables de là et lui lança un petit sourire. Elle se pencha vers Kovit et ne comprenant pas trop l'expression qu'il arborait, leva un sourcil interrogateur pour lui poser la question de façon muette.

Lorsque les derniers bavardages s'estompèrent Rowan prit la parole et Amaïa fit de son mieux pour suivre son discours. Elle leur souhaita la bienvenue. Une chenille. Se présenta. Un bruit d'oiseau. Présenta deux règles. Un papillon. La main d'Amaïa pianotait déjà la table à laquelle elle était affairée. Une pressente envie de se lever la prenait et elle ne parvenait pas à l'estomper. Non loin de là elle entendit Dmitri faire une légère remarque sur son professeur de Botanique. Du tango? Pourquoi pensait-il qu'elle venait faire une démonstration de tango? C'était pas botanique le cours? Le concept de sarcasme étant un peu trop compliqué pour elle, elle ne parvenait pas à comprendre la remarque du jeune garçon, lançant même un regard surpris au professeur en face d'eux, attendant d'elle quelque chose qu'elle ne ferait sans doute jamais. Elle ouvrit son carnet et marqua dans un coin de la page à destination de Kovit. "Pourquoi elle ne ferait une démonstration de danse? J'ai pas appris qu'il fallait danser pour faire pousser les plantes l'année dernière moi". Essayant de rester concentrée par la suite elle se tourna une nouvelle fois vers Kovit qui ne semblait pas suivre le cours. Elle lui donna un léger coup de coude pour le ramener à la réalité.

Lorsque Rowan posa plusieurs question à l'ensemble de la classe, Amaïa se prépara à répondre. Elle le savait. Elle s'était préparé à avoir ses questions. Il fallait juste qu'elle remette ses idées en place. Mais entre le moment de réfléchir et celui de parler, le temps écoulé fut bien trop long. Plusieurs élèves avaient déjà répondu à la question de leur professeur et ne voyant rien d'autres à ajouter le rythme cardiaque de la Serdaigle s'accélérera légèrement. Il ne fallait pas s'étonner de la voir encore en première année si elle devait réfléchir trente an à l'avance avant de donner sa réponse. Sentant une boule se former dans sa gorge la petite fille préféra retourner gribouiller sur son cahier plutôt que de dire une bêtise et de passer pour plus bête qu'elle ne l'était déjà.

Elle qui pensait avoir comblé les difficultés qu'elle avait avec les relations sociales après déjà une année à Poudlard, s'était trompée. Il lui faudrait certainement beaucoup plus de temps que ce qu'elle imaginait même si pour cela elle devait décevoir sa marraine le temps de quelque cours, histoire de se sentir à l'aise avec ses anciens et ses nouveaux camarades de classe.

A peine avait elle prit de bonnes résolutions afin de rendre fière sa marraine et accessoirement son nouveau professeur de botanique que déjà un de ses camardes la déconcentrait en parlant de tango ou de salsa comme si ils étaient en plein milieu d’un cours de danse et que l’impossibilité d’être assez rapide pour répondre à une question lui donnait mal au ventre l’obligeant à baisser les yeux et à commencer à gribouiller sur son carnet. Elle laissa donc le champ libre pour que le reste de ses camardes démontrent l’étendue de leurs connaissances alors qu’elle se recroquevillait sur elle même se sentant inutile. L’humeur de la petite Serdaigle pourtant enthousiaste à l’idée d’avoir cours avec sa Tante semblait se fragiliser au fur et à mesure que les mots théoriques sortaient des bouches des plus aguerries. Elle en aurait presque oubliée à quelle point elle détestait les manuels...Kovit à ses côtés tenta tant bien que mal de remontrer le moral de sa cousine, lui tapant doucement la côte pour attirer son attention et lui demander sur son carnet quelle plante elle avait préférait l’an passé. Amaïa releva la tête vers son cousin avec un petit sourire mais à peine eut-elle le temps de reprendre son stylo que Rowan recommença à parler. La jeune fille reposa donc gentiment le crayon ne souhaitant pas se faire remarquer par son professeur et ne put répondre à la question de Kovit avant que Rowan ne leur demande de commencer la partie théorique en allant ramasser les feuilles d’orties. Chouette! Elle allait pouvoir bouger!

Imitant son cousin, elle se leva de son tabouret pour rejoindre les élèves qui commençaient à se regrouper devant les pots. Ils avaient décidé avec Kovit de se mettre en groupe tous les deux et elle comptait bien l’aider à accomplir au mieux leur mission. Passée l’étape décisive des choix qui s’imposaient à eux. La jeune fille avait approuvée l’idée de Kovit de ramasser les feuilles des deux plants, elle ne savait pas véritablement ce que sa marraine comptait faire avec et les feuilles pourraient avoir des propriétés différentes en fonction de leur âges. Le tout n’était pas de prendre des risques inutiles en jouant au pile ou face mais de pouvoir réaliser au mieux la mission qu’on leur confiait. Elle s’approcha donc des pots, se tournant vers les ustensiles qui pourraient l’aider à ramasser la précieuse feuille. Un petit sécateur pourraient faire l’affaire le temps de couper précisément la tige, mais devait-elle prendre des gants? Elle se tourna à demi vers son cousin et le voyant trifouiller dans la plantes sans gants et sans aucune expression qui aurait pu selon elle traduire de la douleur, se décida. Allons bon cela ne faisait donc pas mal? Leur aurait-on menti sur les propriétés urticantes des orties? Soit. Elle ferait comme Kovit faute de parvenir à se décider. Elle se dirigea vers le plant mature, trouva une feuille en bon état, un sourire effleura ses lèvres tandis que sans précaution elle mit la main dans le plant pour aller trouver sa feuille.

Sa réaction fut immédiate. Son sourire se perdit tandis que sa main semblait être piquée par des milliers d’aiguilles de couture.

“Aishh!”

La petite métisse ne put retenir le juron coréen qui franchit ses lèvres tandis que blessée elle ressortit sa main du plant. Si d’ordinaire les doigts de la petite pianiste étaient fins et souples ils étaient devenus boudinés et pétrifiés par le venin de l’ortie, de minuscules cloques blanches apparaissaient sur toute sa peau devenu rouge tant et si bien qu’elle avait l’impression d’être devenu un champignon. Mais pourquoi? Elle regarda de nouveau Kovit, une lueur d’incompréhension dans le regard. Pourquoi sa main a lui n’était-elle pas dans le même état que sa main à elle? Avait-elle un problème? Était-elle déréglée à l’instar d’une horloge? La feuille l’avait-elle punie d’avoir voulu la couper? Une feuille pouvait-elle lui en vouloir? Une violente envie de se gratter la prit et elle du serrer la mâchoire pour ne pas succomber à l’envie de tendre son autre main pour apaiser sa souffrance. Super, voilà qu’elle commençait bien l’année!

“Désolé. Je ne t'ai pas prévenu."

L’anglo-coréenne, regarda son cousin. Prévenue de quoi? Qu’elle allait se métamorphoser en légume si elle touchait l’ortie? Elle secoua négativement la tête comme pour lui dire que ça ne faisait rien. Elle aurait dû faire attention et ne pas suivre son cousin tête baissée. Le mimétisme avait ses limites comme on disait. En soignant Amaïa Kovit lui confia l’idée qu’il avait eut pour ramener les plants sains et saufs sur la table. Duro? Ce sortilège en était un de deuxième année! Mais après tout il pouvait essayer non? La petite fille hocha la tête, résolument bouche cousue depuis l’incident de peur d’attirer Rowan trop près de leur travail. Avait-elle besoin de se faire remarquer en plus de cela? Elle acquiesça donc quand Kovit reparti les tâches entre eux. Elle foudroya la plante du regard. Hors de question qu’elle s’approche de cette créature du diable encore une fois!

Elle laissa Kovit tenter l’expérience le premier. Le sort était prononcé. La baguette pointée. Et la feuille toujours dans le même état. Les deux cousins échangèrent un regard. Le sortilège n’avait pas eu l’air de fonctionner. Le visage de Kovit s’affaissa quelque peu. Amaïa fronça les sourcils décelant chez son cousin une désapprobation et sûrement de la peine. Elle ne pouvait pas rester les bras croisés et tant pis pour sa main gonflée. Amaïa inspira profondément comme pour oublier la douleur de sa main et tandis sa main gauche non mutilé a Kovit pour qu’il lui donne délicatement la feuille. Elle finit par briser enfin le silence.

“Kovit? Donne, je vais essayer!”

Regardant du coin de l’œil la feuille comme si elle allait lui sauter dessus, piquant vers le haut, Amaïa sortit sa baguette, la présenta à la manière de son cousin et exécuta un geste observé avec assiduité. Lorsque Kovit se tourna de nouveau pour aller continuer à cueillir des orties elle inspira.

“Duro”

Confiante, la petite métisse attendit avec un petit sourire le sort faire effet. La magie colorée qui s'éleva de sa baguette pour cueillir la feuille tenue entre les doigts de sa main non amochée lui donna quelque peu espoir. Malheureusement pour la jeune fille le sort exécuté manquait de pratique et au lieu de transformer la feuille dûment visée en pierre, transforma la feuille ainsi que les doigts tenant celle-ci de la jeune fille en pierre. Non. Non!

"Ah...jinchaaa"

La jeune fille tenta en vain de bouger ses doigts mais la pierre qui les encerclaient l'en empêchait. Bloquée dans cette positon elle secoua sa main souhaitant se libérer de son sort mal exécuté. Ses joues la brûlaient affreusement. Elle avait envie de rentrer la tête sous terre et de ne jamais en ressortir. Elle aurait tout donné pour être une autruche à ce moment là. En plus d'avoir une main ressemblant à un légume immonde, elle était ressemblait maintenant à une gargouille. Elle jeta un regard vers sa marraine et ayant trop peur que celle-ci s'aperçoive de son désastre magique, cacha ses deux mains derrière son dos comme si de rien n'était. Elle qui ne voulait pas se faire remarquer. Une boule prit forme dans sa gorge. Il lui fallait de l'aide. Maintenant. Tout de suite.

Elle laissa le panier et trottina jusqu'à son cousin. Elle leva sa main droite rouge et gonflée pour tapoter gentiment l'épaule de Kovit.

"Kovit...Kovit! J'ai un problème. Un gros problème. Un très gros problème. Le sort, il a fonctionné. Trop bien. Un peu trop bien même. Je fais quoi? "

Et une fois qu'elle eut son attention, leva à présent la gauche pétrifiée et proche d'un caillou. Son regard croisa celui de son cousin, une lueur de détresse faisait flamboyer les doux yeux marron de la petite métisse. Pourquoi rien ne se passait comme elle l'avait prévu? Pourquoi fallait-il toujours que tout ce qu'elle entreprenne finisse en catastrophe? Elle ne faisait que donner raison au professeur qui l'avait fait redoubler. Elle soupira. Exaspérée elle voulu se taper le front avec la paume de la main, oubliant momentanément que ses doigts était aussi dures que de la pierre. La tête d'Amaïa n'était pas assez creuse pour que l'on attende le "bong" qui résonna néanmoins dans sa tête pourtant toutes les personnes assez près de la petite purent entendre encore une fois une protestation à la fois coléreuse et exaspérée de la jeune fille. Elle pensait que cette année la botanique allait être bien. Qu'elle allait apprécier. C'était décidé. Elle détestait la botanique. Et elle la détesterait toute sa vie.