Aussi loin que je m’en souvienne, les phrases « Regarde ton frère… » et « Tu devrai prendre exemple sur ton frère » m’ont toujours été adressées. Je ne me souviens pas d’un seul jour où Alexander a dû les encaisser à ma place.

Mes parents, Marie née Stenfield et Thomas Wood, se sont rencontrés de manière tout à fait banal, dans un bar moldu où mon père était en soirée avec ses collègues alors que ma mère avait décidé de découvrir l’ambiance d’un bar moldu avec des amies. Elle m’a toujours dit avoir été intéressée par ce monde dans lequel elle avait si peu grandit bien que sang-mêlée de naissance. Encore aujourd’hui je ne vois pas ce qu’il y a d’extraordinaire. A part une baguette entre les mains où était la différence ? Bref. Ils se sont vus, ont discutés, ont fini la soirée ensemble et la suite logique s’est produite. S’en est suivit des rendez-vous, des repas tard le soir, des nuits ensemble, des confidences sur les pouvoirs de ma mère, des je t’aimerai toujours, un mariage et la naissance de mon frère et moi. Rien de bien exaltant.

Nous sommes nés le 19 mars 2012 avec 20 minutes de décalage. Je vous laisse deviner qui est sorti en premier… Alexander, bien sûr. Peut-être était-ce pour cette raison qu’on me disait de toujours prendre exemple sur lui ? Parce qu’il était plus âgé que moi de 20 minutes ? Stupide comme raison. Nous sommes nés à Bristol mais n’y avons vécu que très peu de temps. Mon père, travaillant dans l’évènementiel avait fini par jeter son dévolu sur une agence au bord de la mer lorsque nous avions 2 ans. Autant dire que j’ai toujours grandi à Brighton avec son front de mer et sa jetée, ses ruelles chics et bohèmes et surtout ses innombrables festivals dont mon père est si fier. Pas étonnant étant donné qu’il fait partie de ceux qui les organisent. J’ai toujours adoré l’y accompagner. Je pense même que ce sont ces derniers qui m’ont donné goût à la musique.

Depuis notre naissance, mon frère et moi avons toujours été très proches, presque fusionnel. On parle souvent d’une relation dominant dominé chez les jumeaux, je ne vais pas vous mentir, je suis ou du moins j’ai été le dominé pendant très longtemps. Mais avant, ça ne me dérangeait pas. Je suivais mon frère partout. Il était rare de pas nous voir ensemble. C’était presque vital d’avoir toujours un visu sur l’autre. Je ne compte plus le nombre de fois où ma mère nous a retrouvé dans le même lit à dormir. Je pense que c’est à cause de cette relation là qu’elle a décidé de nous inscrire dans une école moldu. Un moyen de nous sociabiliser avec d’autres enfants de notre âge. Ça n’a pas empêcher qu’on soit encore ensemble et que nous ayons le même groupe d’amis. Mais c’est à partir de ce moment-là que les comparaisons ont commencé. Que ce soit de la part de mes parents et même de nos amis. Alexander était toujours mieux, le plus apprécié, le plus souriant, le plus fort, le plus doué. Moi, j’étais le le frère d’Alex. Mais tant que j’étais avec lui, ça ne me dérangeait pas. J’avais cette pensée innocente qu’il était mon pilier, la personne qui serait toujours là, qu’importe les situations. Quelle belle connerie.

Nous avons beau vivre en grande majorité avec nos amis moldus et faire les mêmes activités qu’eux, Alexander et moi étions bien conscient de la particularité de notre mère et donc de la nôtre. Et comme à l’accoutumé – à croire qu’à notre naissance il était écrit que mon jumeau ferait tout avant moi – Alexander eu ses premières apparitions magiques avant moi. Certes, une journée avant, mais c’était toujours avant. Et bien sûr, je n’échappai pas à la fameuse remarque « Regarde ton frère ! C’est super, ses pouvoirs sont là » . Le fait que les miens arrivent le lendemain ne fut pas autant fêté que les siens. Mais à nouveau je n’en tenais pas compte à cette période-là. Quand j’y repense, ça a toujours été ainsi, Alexander faisait toujours mieux que moi. Si je ramenais une bonne note, mon frère en ramenait une encore meilleure et la mienne était vite oubliée ou balayée d’une remarque me demandant de faire aussi bien que lui. Je n’étais pourtant pas nul, loin de là, j’adore apprendre, mais toujours moins bon qu’Alex.

Le jour de nos 11 ans, nous recevions la fameuse lettre nous indiquant être accepté dans la prestigieuse école des sorciers, Poudlard. Mon père ne fut pas vraiment surpris de cette information, ma mère l’ayant mis au courant bien assez vite de ce qu’être sorcier amené. Au revoir l’école moldu, bonjour l’école des sorciers. Ma mère n’eut aucun mal à trouver une excuse pour justifier notre départ de l’école dans laquelle nous étions : un meilleur enseignement dans une école privée et internat. Ce qui en soit n’était pas faux, mais certains détails étaient tout simplement mit sous silence, comme le fait nous allions nous retrouver avec une baguette entre les mains et que ce n’était ni les maths, ni la littérature que nous allions apprendre.

La première année se passa sans encombres. Mon frère se faisant rapidement de nouveaux amis et moi qui continuait encore à le suivre, pensant ainsi que son groupe d’amis était également le mien. Au final, aujourd’hui, je n’en suis plus si sûr. Je pense qu’encore une fois, ils ne m’ont vu que comme son frère. Alexander ayant plus de facilité à sociabiliser avec les autres, je me retrouvais finalement à combler le décor. Je n’étais qu’une pièce rapportée, mais ça je ne m’en suis rendu compte qu’à la fin de ma deuxième année. Jusqu’à ce fameux jour, j’étais aveuglé par le fait qu’il était ou devait être mon pilier. Je ne rendais pas compte que ce sentiment n’était pas forcément réciproque. J’étais incapable de voir qu’il s’éloignait de moi, qu’il n’avait pas besoin de moi autant que je pensais avoir besoin de lui. Je ne me rendais pas compte qu’il aimait jouer de cette faiblesse quand il en avait besoin. J’étais prêt à faire beaucoup de chose pour lui. Mais lui, était-ce le cas ? La cicatrice qui enlaidit mon corps de ma nuque à mon bras me montre encore aujourd’hui le contraire.

C’est à la fin de notre deuxième année que tout a basculée pour moi. L’incendie qui a ravagé le château ne m’a pas épargné. J’étais au mauvais endroit au mauvais moment dirait-on. Pourtant je n’étais pas seul ce jour-là. Je me souviens encore de son regard lorsqu’il s’est enfoui avec ses amis alors que j’étais coincé. Je me souviens encore de son hésitation au fond de ses yeux. Je me souviens encore du moment où il a détourné le regard et a disparu de mon champ de vision. Je me souviens tout ça, avec clarté, alors que je suis encore incapable de me souvenir comment je m’en suis sorti ce jour-là. La chaleur étouffante, les flammes qui me frôlent accompagnent encore une bonne partie de mes nuits à ce jour. Mon séjour à Saint Manguste m’a permis de réfléchir à beaucoup de choses sur ma relation avec mon frère. Ma cicatrice me rappelle sans arrêt que tout ce que je pensais, que je croyais réciproque n’était qu’une pauvre illusion que je m’étais faite. Les visites de mon frère ne firent qu’accentuer ce sentiment, frappant encore un peu plus sur mon cœur déjà bien amoché en rabâchant sans arrêt que s’il m’avait vu, lui qui pensait que j’étais parti parmi les premiers, il aurait tout fait pour me venir en aide. Mais lui comme moi savions que ses paroles étaient trahies par son attitude fuyante. Je le connaissais que trop bien pour qu’il puisse me mentir aussi facilement. Ce jour-là, le lien qui nous unissez depuis notre enfance s’est défait et un gouffre s’est formé entre nous. Ce jour-là, mon pilier est tombé.

L’amertume, le sentiment d’abandon que je ressens ne m’ont cependant pas empêché d’omettre à mes parents qu’Alexander était avec moi lors de l’incident. Ce serait notre dernier secret. A quoi bon rajouter de la peine à mes parents ? Un fils brisé est déjà suffisant non ? Puis convaincre mon père pour que je puisse y retourner fut déjà bien assez compliqué sans qu’on est besoin d’en rajouter.

Ma troisième année fut le début de mon émancipation et le fait d’avoir changé de directrice n’a strictement rien changé à mon état d’esprit. Le mal été fait. Fini la relation fusionnelle avec mon frère, fini le groupe d’amis qui ne me voyait que comme le frère d’Alexander, fini ma naïveté à faire confiance aux autres et fini d’être simplement l’un des jumeaux Wood.

Marie Wood née Stenfield : Ma mère est une sorcière de sang-mêlée. Sa famille, ayant toujours été très ouverte, ne fut pas choquée lorsqu’elle leur annonça qu’elle souhaitait se marier avec un moldu. Ils accueillir mon père avec facilité. Ma mère a toujours été intéressé par le monde moldu et leur façon de vivre. Déjà à Poudlard, elle me disait que sa matière favorite était l’étude des moldus. C’est surement pour cela qu’elle a fini par ouvrir un bar non loin du bord de mer dès lors que nous nous sommes installés à Brighton. Ce bar à la particularité d’être à destination à la fois des moldus et des sorciers. Bien sûr ces derniers ne se mélangent pas dans les salles, à moins que les sorciers acceptent de ne pas faire de magie. Une partie leur est réservé, il leur suffit de se présenter d’une façon très spéciale afin qu’ils puissent y être conduit. C’est assez surprenant de voir à quel point deux mondes peuvent être si proche sans s’en rendre compte.

Quand bien je n’ai jamais été aussi doué que mon frère à ses yeux, il n’empêche qu’elle me voue tout de même un amour débordant, encore plus depuis mon accident. Je ne pense pas qu’elle se rend compte que ses paroles, ses comparaisons puissent me blesser. Tout comme quand elle nous appelle Les jumeaux.

Thomas Wood : Mon père est un moldu. Jusqu’à ce qu’il rencontre notre mère, il n’avait jamais entendu parlé de magie ou de sorcier. Mais il n’eut pas de mal à s’acclimater à ce nouveau monde qui s’ouvrait à lui. Surement parce qu’il fut bien intégré par mes grands-parents maternels. Je le vois encore avoir des étoiles dans les yeux lorsque sa femme faisait de la magie devant lui. D’autant plus lorsqu’il a appris que nous avions également cette particularité. Ce fut cependant un peu moins le cas lorsqu’il m’a retrouvé dans un état pitoyable après l’incendie. Ma mère a dû faire des pieds et des mains pour me laisser retourner au château l’année suivante, lui indiquant qu’une nouvelle directrice venait de prendre place et que cette dernière ne laisserait aucun incident de la sorte se reproduire.

Mon père bosse dans une agence d’évènementiel. Il est chef de projet notamment pour les différents festivals qui se déroulent au sein de notre ville toute l’année. Il adore son métier, la musique, l’art et le divertissement dans toutes ses formes. Ma passion pour la photo doit venir de lui. Je me souviens que c’est lui qui m’a mis mon premier appareil entre les mains. Contrairement à ma mère, il évite de me comparer à mon frère, même si cela doit arriver quelques fois.

Le seul point noir au tableau est que nos grands-parents paternels ne sont pas au courant de nos particularités et à chaque fois que nous sommes chez eux, nous devons oublier le monde de la magie. A la place de parler de Poudlard, nous parlons de notre école privée. A la place de parler de potion, nous parlons physique chimie et ainsi de suite.

Alexander N. Wood : Mon frère, mon jumeau, celui que je croyais être mon pilier. Jusqu’à l’incendie, j’avais une confiance absolue en lui. Je pensais que nous avions une relation fusionnelle où nous partagions nos joies, nos tracas, nos blessures. Mais en fin de compte, je me rends compte que nous étions seulement sur une relation de domination que je n’étais pas capable de comprendre. Mais tout ça, c’est fini. J’ai décidé de prendre mon émancipation, de m’éloigner et de ne compter que sur moi-même. Je ne veux plus que l’on me voit comme le frère ou le jumeau d’Alex. Je suis Noah, simplement Noah.

Notre mère avait annoncé depuis déjà plusieurs semaines que nous ne reviendrons pas à l’école moldu. Elle avait réussi à trouver une excuse comme quoi nous faisions notre rentrée dans une école privée, bien plus performante et dans laquelle nous nous retrouverions en internat. Nous avions ressorti le même discours à notre groupe d’amis afin qu’ils ne soient pas surpris de ne plus nous voir en dehors des grandes vacances. Suite à cette annonce, ils avaient cherchés à trouver une solution pour que nous n’y allions pas, ne trouvant pas ça normal de nous enfermer dans un internat loin de nos amis d’enfance. Alexander avait dû faire preuve d’imagination afin de les dissuader de nous aider, promettant que ça ne changerait rien. Cela aurait été franchement embêtant s’ils avaient réellement cherché à nous faire louper notre train pour Poudlard.

Notre père avait tenu à nous accompagner jusqu’au quai 93/4, comme lorsque nous sommes allés sur le Chemin de Traverse pour acheter nos différentes fournitures. Notre mère avait profité de chaque instant pour l’observer, des étoiles pleins les yeux et à dire à haute voix que tout cela lui donnait tellement d’idées pour ces prochains évènements. Il faut dire qu’il n’avait pas tort. Même si maman nous avait déjà emmener quelques fois dans le coin, tout comme à Pré-au-Lard pour nous faire découvrir les boutiques emblématiques du coin, je restais encore un peu estomaqué par la différence entre l’architecture de notre ville et celle d’ici.

Arrivé sur le quai, l’énorme locomotive rouge ronronnant derrière nous, notre mère nous donna les derniers conseils - avec quelques interruptions de notre père - avant les innombrables embrassades : Soyez sage, ne faites pas trop de bêtises Mais profitez quand même de votre jeunesse Ecoutez les professeurs et pensez à nous écrire de temps en temps. Une petite tape dans le dos du père pour nous souhaiter bonne route et nous retrouvions dans l’un des wagons du Poudlard Express. Comme à l’accoutumé, je suivis mon frère entre les allées, cherchant un wagon vide où nous pouvions nous poser, nous et nos paquets de friandises. Aux fenêtres, les immeubles firent place à la verdure marquant ainsi réellement le départ pour Poudlard. Un sourire s’étira sur mes lèvres alors que je m’asseyais en face d’Alexander, les yeux rivés sur l’extérieur. J’avais attendu ce jour avec impatience. Et puis j’étais avec mon frère, rien ne pouvait briser l’enthousiasme que je ressentais à ce moment précis.

Agglutiné aux autres élèves de premières années à la sortie du train, je pris soin de ne pas perdre des yeux mon frère, ce dernier sympathisant déjà un petit groupe de garçons de notre âge. Faisant des coudes pour le rejoindre, je me retrouvai à sa droite et lui donna un coup de coude pour l’informer de ma présence. Automatiquement je me sentais déjà plus à l’aise et moins perdu. Accompagné d’un sourire joyeux, il enroula son bras autour de mes épaules et me présenta aux autres C’est mon jumeau, Noah ! C’était toujours lui qui nous présentait. Plus social, plus enclin à la discussion et moins timide que moi. Je salua le petit groupe d’un geste de la main avant que l’on soit interrompu par un adulte qui nous demandait de le suivre : la répartition allait débuté.

C’est avec les yeux écarquillés que je regardais la grande porte s’ouvrir devant moi, découvrant ainsi la grande salle, là où les maisons se regroupaient pour manger ou pour les grands évènements. Ma mère nous en avait parlé des milliers de fois mais aucun récit ne pouvait réellement décrire ce que je voyais sous mes yeux. Le plafond magique illumina mon visage de joie alors que je suivais le mouvement afin de rejoindre le centre de la salle, là où trônait un vieux chapeau tout rapiécé : le fameux choixpeau magique. Celui qui déciderait de mon futur lieu de vie. Toujours à côté de mon frère, je lui attrapai un bout de sa manche et tira dessus, attirant ainsi son attention. Tu crois qu’on sera réparti dans la même maison ? C’était l’une de mes plus grandes peur, celle d’être réparti dans une autre maison que mon frère. Mais ce n’était pas possible n’est-ce pas ? après tout nous étions jumeaux, donc ressemblant, non ? Alex n’eut pas le temps de me répondre, son nom résonnant dans toute la pièce et c’est avec un sourire chaleureux qu’il s’éloigna de moi afin de s’assoir sur le tabouret et être réparti. Le temps me sembla long avant qu’il ne soit répartie et c’est en me faisant un clin d’œil qu’il sauta de son siège et alla rejoindre sa maison. Je le suivi du regard, les mains serrées à m’en faire craquer les doigts, anxieux de ne pas pouvoir le rejoindre. Sans surprise ce fut mon nom qui fut appeler après lui et c’est, une boule dans la gorge, que j’allais m’assoir à mon tour sur le tabouret, la salle grande salle disparaissant sous le choixpeau qu’on venait de me mettre sur la tête.

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