Tatiana est née dans une famille aimante, au moins au départ. Sa mère, même si elle ne voulait pas vraiment de l’enfant, était encore portée par l’amour qu’elle avait pour son mari, et le voir si heureux à la naissance de sa fille l’a transporté d’un bonheur qui dura tout de même un moment. La petite enfance de Tatiana se passa sans réel accroc. Son père était au courant de la nature de sorcière de sa mère, et s’il lui a fallu du temps pour intégrer ce monde qu’il pensait imaginaire, il finit par l’accepter. Cependant, il voulut mettre un point d’honneur à ce que sa fille connaisse autant ses origines moldues que celles sorcières. Il était hors de question pour lui qu’elle n’appartienne qu’à un seul monde. C’était un vrai débat au sein de la famille, et l’idée même a donné lieu à de nombreux conflits, notamment parce que Elizabeth, sa mère, avait toujours à l’idée que les moldus ne méritaient pas vraiment de pensées - Jon était différent, Jon était son mari, et elle l’aimait de tout son coeur, plus qu’elle n’avait jamais aimé personne, ça lui donnait un passe-droit que personne d’autre n’avait jamais eu. Mais au bout du compte, c’est ce qu’il s’était passé. Après que Liz fut reniée de sa famille pour avoir fait un enfant avec un moldu, puis ensuite l’avait épousé, ils restèrent à Bucarest. Après tout, c’était là que vivait Jon car même si ses parents étaient britanniques - en témoignait son nom - ils s’y étaient installé alors que le garçon était très jeune. Bucarest fut la première maison de Tatiana, même si elle ne s’en souvient pas parfaitement bien.

C’est sa mère qui gérait une grosse partie de son éducation lorsque son mari n’était pas là. Et il était présent de moins en moins longtemps. Lorsqu’elle sentit que l’habitude avait remplacé l’amour entre elle et Jon, elle commença à voir sa fille comme elle l’avait toujours vue, au fond: comme un fardeau dont elle ne voulait pas, une fille qui avait gâché sa beauté, son visage auparavant parfait étant maintenant habillé de cernes et son corps peinant à retrouver sa forme originelle. Quelque part, c’est là qu’elle se dit que si elle ne réussissait pas à vivre comme elle l’entendait, elle vivrait au travers de sa fille, qui grandissait pour devenir une enfant à la beauté qu’elle enviait. C’était digne d’un conte, la mégère emplie de jalousie quant au succès de son enfant. Mais c’était là la différence: malgré tout, elle l’aimait, Tatiana. Alors elle décida de s’en servir. Profitant de ce que son mari voulait et prétextant qu’il s’agissait là de faire partie intégrante de son côté moldu, elle commença à l’inscrire à toutes sortes de compétition de beauté, à une agence de mannequinat pour enfant, et si au départ, Tatiana prit ça pour un jeu, elle finit par le détester. Sa beauté, c’était sa malédiction. Elle ne pouvait plus manger ce qu’elle voulait, devait apprendre, trop jeune, à se maquiller comme une adulte, devait toujours et en toute occasion être parfaite. Elle connut très jeune l’humiliation des échecs, accentuée par le regard de sa mère qui ne les lui pardonnait qu’à moitié, connut également la rançon du succès alors qu’elle suscitait la jalousie d’autres jeunes filles de son âge. Ce ne fut jamais un monde qu’elle apprécia, loin de là.

Puis un jour, la Roumanie ne suffit plus. Il lui fallait retrouver le monde qu’elle connaissait, l’exhiber dans un univers où elle pourrait réellement s’en vanter. Elizabeth finit par convaincre son mari qu’il fallait qu’ils déménagent, qu’ils retournent vers la source. Espérait-elle, secrètement, retrouver sa famille ? Avoir quelque chose qui serait suffisant pour qu’elle soit de nouveau acceptée? Si c’était le cas, elle se leurrait bien, mais peu lui importait. Et sa décision fut renforcée par l'apparition des pouvoirs de Tatiana. Si elle y avait été préparée, que sa mère l'était également, ce fut un choc pour son père ... C'était une chose de voir sa femme user de magie de temps à autres, c'en était une autre de voir les devoirs de son enfant disparaître quand elle bloquait dessus trop longtemps, pour réapparaître dans le four ou en-dessous de leur lit. Une chance que ce ne soit jamais arrivé lorsqu'elle était à l'école, entourée de ses camarades moldus. Ils arrivèrent à Newcastle lorsque Tatiana avait huit ans. La vie de l’enfant fut trop remplie, jusqu’à son entrée à Poudlard. Sur volonté de son père, elle fut scolarisée dans un établissement moldu où, malgré ses efforts, elle peinait à être brillante. A la maison, elle apprenait ce qu’il fallait du monde magique, même si elle ne brillait pas beaucoup plus. Et à côté de ça, au lieu d’activités qui auraient pu la passionner, elle se trouvait enfermée dans des compétitions, des salons, des défilés de mode dont elle ne voulait plus. Mais sa mère, elle, ne voulait rien entendre, et pour la rendre fière, Tatiana aurait fait n’importe quoi. Après tout, le regard de ses parents était tout ce qui lui importait réellement.

Elle se passionna par la mode. Si les défilés devenaient peu à peu un poison dont elle ne voulait plus, elle découvrit sa véritable passion pour le stylisme. Mais travailler dans l’ombre, ce n’était pas assez pour Liz. Heureusement, la question ne se posa plus lorsqu’elle entra à Poudlard. On ne peut pas dire qu’elle passe une scolarité heureuse, jusqu’à présent. Si, lors de sa première année, elle suivit le tournoi de l’extérieur, la mort des trois élèves fut un choc pour elle, qui n’avait jamais réellement eut à faire le deuil de qui que ce soit. Même si elle ne les connaissait pas, elle mit du temps à se remettre de cette impression d’insécurité et cette peine accablante qui s’était emparée du château. Il y avait comme quelque chose de brisé, à Poudlard. Loin était les débuts de l’année où seule la féérie du lieu importait.

Après ça, les disputes à la maison durant l’été se firent beaucoup plus violentes et Tatiana a pu apercevoir son père casser quelques chaises, à défaut de lever la main sur sa femme. Il ne voulait pas qu’elle y retourne, vivre dans la peur qu’il lui arrive quoique ce soit. Elle, elle était trop jeune pour avoir un avis vraiment posé sur la question et de toute manière, comme toujours, c’est Liz qui eut le dernier mot. Sa décision fut renforcée par le fait que lors de sa deuxième année, rien de tragique n’arriva. Si Jon n’était toujours pas apaisé et que ses lettres se multipliaient pour être sûr que sa fille allait bien, même Tatiana finit par penser qu’il s’inquiétait beaucoup trop pour pas grand-chose.

Puit vint la troisième année avec l’invasion des néos-mangemorts et la reprise de Poudlard par Menesis Blackman. Tatiana, si elle tente tant bien que mal de ne pas penser à cette période, se souvient encore de la terreur, de l’horreur de cette année-là, du traitement infligé aux nés-moldus. Et de la voix de sa mère qui lui soufflait qu’à cause de son père, elle aurait pu se retrouver en danger. Que c’était de sa faute si elle avait une part de moldue en elle, part dont elle ne voulait plus, vu ce qu’elle pouvait lui apporter comme malheur. Elle n’en était pas fière, de sa nature de sang-mêlé, elle la dégoûtait. Pour une fois, c’est la tête basse qu’elle poursuivit l’année, la peur au ventre et l’idée qu’elle n’était pas assez forte pour supporter l’invasion.

Il lui fallut la moitié d’une année de plus pour pardonner son père sa nature même. Pendant six mois elle ne lui adressa plus la parole, même alors qu’elle se trouvait dans la maison familiale. Privée - par sa faute - de la bonne influence de son père, c’est sa mère qui prit le dessus, reprenant de plus belle son projet d’en faire seulement un trophée qu’elle pouvait montrer à qui voulait bien la voir. C’est à partir de cette année là que Tatiana commença à souffrir de troubles anorexiques. Elle n’avalait plus rien, se laissait dépérir, obsédée par le fait qu’elle n’était pas aussi parfaite qu’elle le devrait. Elle perdit des forces et son dégoût pour la nourriture empira lors du bal de Noël alors que l’élève ayant pris place dans son corps avala l’équivalent d’un repas pour quatre personnes. Elle finit les vacances alitée à l’infirmerie, et c’est à partir de là qu’elle commença à avoir des rendez-vous réguliers chez un psychiatre de Ste Mangouste. A la fin de l’année, elle allait beaucoup mieux, même si tout n’est pas encore totalement réglé.

Tatiana n’a jamais été autorisée à passer les vacances d’été au château et c’est donc, pour elle, à chaque fois un soulagement de se trouver de nouveau entre ses murs, malgré les événements tragiques qui ont pu arriver depuis son entrée. Sa cinquième année ne fit pas exception, et elle la commença avec l’espoir que tout irait pour le mieux et qu’elle pourrait enfin réellement vivre cette année comme elle le devait. Mais si elle n’a pas été au coeur de l’action, Tatiana a bien suivit les événements de l’année et le climat qui régnait au château. L’angoisse ne semble pas s’atténuer, jusqu’à atteindre son paroxysme à la fin de l’année, lors de l’incendie. Tatiana n’est pas courageuse. Elle ne sait pas prendre de décisions en situation de crise et c’est cette hésitation et cette panique qui l’avait envahie qui avait causé sa douleur. Elle avait été sortie du château par un professeur, quelques minutes trop tard, le feu ayant eu le temps de l’atteindre. Si elle était en vie, elle s’était retrouvée avec une partie de la gorge, du bras et de la main gauche marquée par les flammes.

Elizabeth et Tatiana passèrent pratiquement tout l’été à Ste Mangouste. La douleur finit par passer. Mais pour sa mère, elle était devenue hideuse. Liz, à la fin, n’arrivait même plus à la regarder et c’est Jon, son père, qui l’amena à la gare pour sa sixième année. Mais elle n’avait plus envie d’y retourner. Elle avait honte d’elle-même, de son physique désormais imparfait et de tout ce qu’elle renvoyait chez les autres. Mais elle ne voulait pas non plus rester chez elle, à subir le dégoût de celle qui avait tout fait pour qu’elle s’en sorte.

Mais c’était une nouvelle année. Elle avait passé le pire, avant le drame, elle avait réussi ses examens. ça ne pouvait qu’aller mieux. Bien sûr que ça ne pouvait qu’aller mieux.
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Elizabeth Andromeda Pumpkin est née le 23 août 1983 à Londres. Issue d’une famille de Sang-Pur, elle a été élevée avec l’idée que les nés-moldus n’étaient pas dignes d’être appelés sorciers et qu’il fallait à tout prix garder la lignée pure. C’est quelque chose qu’elle a cru, intégré, tout au long de sa scolarité à Poudlard et de ses études, ses prétendants n’ayant jamais vraiment de chance face à la dureté de son père et sa propre incapacité à ne s’intéresser à personne d’autre qu’à elle-même. C’est qu’elle était belle, Liz. Pas aussi belle que sa fille, l’incitant à la jalousie inconsciente, mais belle. Elle finit pourtant ses études seule et sans mari, ce qui semblait peu acceptable par le reste de sa famille. Pourtant, sa réussite au sein du Département de la Justice Magique faisait taire ce manque d’héritage au sang-pur, et on la laissait relativement tranquille. Puis elle fut envoyée en Roumanie par le Ministère. Elle tentait toujours de faire ses preuves et prenait réellement à coeur la mission qu’on lui confia. Elle avait à l’époque vingt-cinq ans.

A partir de ce point, tout alla très vite. Elle fit la rencontre, alors qu’elle cherchait son chemin dans les rues de Bucarest, de Jon Francis Dwyer. Un moldu. Ce ne fut pas facile pour la sorcière d’accepter son aide, ni même de lui répondre sans condescendance, mais c’est quelque chose qui amusa l’homme. Comment s’est déroulé le début de cette relation qui n’avait pas lieu d’être, c’est encore une chose qu’ils préfèrent garder pour eux, mais l’important est qu’elle tomba amoureuse pour la première fois. Si cette relation demeura secrète, compte tenu des circonstances, elle ne put le cacher trop longtemps puisque l’annonce d’une grossesse lui tomba dessus comme un couperet. Si Jon se voyait père depuis qu’il avait appris ce que le mot voulait dire, elle n’avait jamais réellement souhaité tomber enceinte. La déformation du corps dont elle était si fière et un autre être qui devrait passer devant ses propres besoins, c’était sans doute le pire qui puisse lui arriver. Pourtant, l’amour le lui fit oublier, et Tatiana vit le jour.

Mais c’était loin d’être fini pour Liz et ses malheurs. Si sa grossesse provoqua un soulagement presque perceptible chez son père, il déchanta bien vite à l’annonce du père. Il ne fallut pas longtemps pour que le mot se répande au sein de la famille et qu’Elizabeth soit démise du nom Pumpkin et que plus personne ne lui adresse la parole.

Tatiana, à l’heure actuelle, se retrouve donc avec un oncle et un grand-père qu’elle ne connait pas, un cousin, Luca, dont elle n’a entendu parler réellement que quelques fois, et a découvert il n’y a pas si longtemps que l’une de ses camarades, Casey, semblait être également de sa famille. Mais pour elle, seuls ses parents comptent réellement, à défaut d’avoir jamais été intégrée chez les autres, elle qui se contente de les voir le coeur amer évoluer au sein d’une famille qui aurait pu être la sienne.

Rentrée 2020

Poudlard. Depuis qu’elle est en âge de comprendre, Tatiana entend parler de cette école, et n’avait qu’une seule hâte: en faire partie. Certes, s’il fallait être totalement honnête avec elle-même, il s’agissait également de fuir la maison et plus particulièrement sa mère qui avait toujours quelque chose à lui reprocher, quelque chose à redire, à revoir sur son attitude, sur sa façon de se tenir, de s’habiller, de se coiffer. Elle ne faisait jamais rien toute seule, Tatiana, pas qu’elle ne savait pas le faire - même si sa mère dirait bien volontiers que c’est le cas - mais parce qu’on ne lui en laissait pas la possibilité. Alors arriver à Poudlard, c’était avant tout une libération, plus que le réel bonheur de ce lieu magique. C’est du moins ce qui lui a traversé l’esprit pendant le trajet du Poudlard Express, alors qu’elle s’était retrouvé au milieu d’autres élèves de première année, tous enthousiastes à l’idée d’enfin arriver. Elle n’a pas beaucoup parlé, Tatiana, pendant le voyage. Non, elle se contentait de lister dans sa tête les bagages qu’elle avait pris, persuadée d’oublier quelque chose, avait poliment souri à ceux qui se présentaient, donné son nom du bout des lèvres puis son regard s’était perdu vers l’extérieur et les autres avaient rapidement oublié qu’elle était là. Ce n’était pas la bonne chose à faire, d’après sa mère. Il fallait qu’elle se lie, qu’elle commence à se tisser des liens, puisque la réputation, c’est sans doute ce qui importera le plus lors de sa scolarité. Mais dans son esprit, elle aurait bien le temps de le faire plus tard. Sans qu’elle ait réellement vu le temps passer, l’annonce de l’arrivée imminente fit battre son coeur un peu plus fort.

C’est après avoir posé les pieds sur le sol de la gare qu’elle comprit à quel point elle avait tort. Elle n’était pas excitée par l’idée de ne plus voir sa mère, de ne plus subir ses remontrances et ses critiques. Elle sentait son coeur battre si fort dans sa poitrine parce qu’elle allait enfin découvrir plus du monde auquel elle appartenait. Un garçon qui devait avoir son âge et qui lui était passé violemment à côté lui fit reprendre ses esprits, et elle se mit rapidement dans la file des premières années, comme on le lui demandait. Elle aurait pu garder la bouche ouverte d’émerveillement en passant sur le lac en barque, mais elle savait mieux se tenir que ça, alors elle se contentait d’observer, de ne rien lâcher des yeux, tant l’étendue d’eau que le château qu’on pouvait apercevoir. Si sa mère est une sorcière, elle a vécu élevée autant par un moldu que par elle. La magie était donc quelque chose dont elle rêvait mais dont elle ne connaissait pas encore les secrets.

Pourtant, elle s’était renseignée. Sa mère lui avait tout dit de la Répartition. Mais c’est une chose d’en entendre parler et de le vivre. Alors qu’ils attendaient devant les portes de la Grande Salle, le coeur de Tatiana était serré. Elle allait faire sa première apparition en public. Il fallait qu’elle tombe juste. Dans sa manière de marcher, d’être face à cette salle pleine d’élèves, dans sa façon de se tenir et surtout, il fallait qu’elle soit correctement répartie. Les portes finirent enfin par s’ouvrir, après un temps qui sembla durer une éternité. Et toutes les pensées qu’elle avait pu avoir quelques secondes plus tôt s’évanouirent. C’était magique, c’était magnifique. Le plafond avec son ciel étoilé, les bougies qui éclairaient la pièce de mille lumières et tous ces visages qui la regardait. Elle avait déjà connu ça, avec les concours de beauté que sa mère lui forçait à faire, mais ça n’avait jamais eu cette puissance. A ce moment-là, elle se dit qu’elle jouait réellement son avenir et toutes les années qui suivront.

Les noms défilaient et le sien ne tarda pas. Dwyer. Elle se dit qu’elle avait de la chance d’être dans les premiers de l’alphabet, la pression d’être le dernier devait être horrible. La tête haute, elle s’avança vers le Choixpeau. Son visage n’arborait aucune expression et pourtant, intérieurement, elle était en feu, excitation, peur, appréhension, bonheur. Elle n’avait jamais autant ressenti de toute sa vie qu’au moment où elle se retrouva face à la salle, le Choixpeau sur sa tête, fière. C’était l’heure de vérité.

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