Les grands amours projettent de grandes ombres et les profonds désirs dissimulent des obscurités insondables. Les envies des un sont des poisons aux bonheurs des autres. Tout ce qui est vraiment beau est aussi véritablement triste, et c'est avec ces considérations que commence une histoire qu'à loisir il vous incombera de choisir de considérer comme conte de fée ou comme histoire sordide. En tout cas, cela commence dans la pauvreté, le dénuement, et une volonté enragée de s'en sortir. Quelque soit les moyens employés.

Théodora Gale est une jeune femme qui voit le jour dans une famille pauvre, d'une mère soumise et sans ambition avec un goût malsain pour l'asservissement et une existence transparente de spectre soumis aux caprices de son mari. Un esprit servant tout au plus, mais certainement pas un être humain doté de sa volonté propre. Ho, elle en avait bien eu une, dans ses jeunes années, mais cela aussi avait été dérobé par son époux. Et ce qu'il n'avait pu lui dérober, comme sa personnalité, il s'était appliqué à le détruire soigneusement, année après année. Ce père qui n'avait jamais osé monter à la conquête du monde avait décidé de faire de son foyer un petit pays dont il serait le tyran, parfois bienveillant, parfois capricieux, toujours omnipotent. Un homme secrètement lâche qui n'aimait rien tant que de se convaincre que c'était le monde qui ne tournait pas rond, pour ne pas lui avoir reconnu les talents qu'il n'avait pas, pour ne pas l'avoir couvert de succès qu'il ne méritait pas. Ainsi, l'existence lui était plus supportable.

Comment ne pas fuir, quand on est affublé du poids horriblement écrasant d'une famille pareille ? Et c'est en effet ce que fit dès que possible la jeune Théodora. Car sa mère qui avait été tout sauf une véritable mère aimante et douce lui avait cependant laissé un petit quelque chose. Un héritage. Une arme pour faire face à sa vie qui s'annonçait difficile. Un atout naturel pour arriver à toujours surmonter les choses, et parfois même à les tourner à son avantage dans un monde esclaves des apparences et amoureux des faux semblants: Théodora était belle. Non pas simplement jolie, ni charismatique, ou encore irradiante comme certaines femmes sincèrement heureuses, mais bien belle. Sans que cela ne lui demande d'effort pour entretenir cette beauté, sans qu'elle n'ait besoin des artifices du maquillage et de la mode.

Pas une seule fois elle ne fut tentée de se servir de cette beauté pour se dégotter et s'attacher un homme, d'abord leurré par ses charmes mais qui ensuite en viendrait à l'aimer sincèrement pour ce qu'elle est. Pas une seule fois elle ne se sentie intéressée par enfin pouvoir obtenir ce qui avait toujours été refusé à sa mère: une vie heureuse, un petit bonheur conjugale, un foyer. Car comment vivre une enfance comme la sienne et en ressortir indemne ? Dès ses plus jeunes années, Théodora avait du apprendre la ruse, la rouerie et la manipulation. Non pas par plaisir, mais par besoin. Pour survivre. Ainsi, elle ne fit pas de sa beauté un bouclier pour repousser le malheur, mais une arme. Ou plus exactement un mensonge. Pour s'enrichir.

De ses jeunes années adolescentes jusqu'à la trentaine, elle se comporta comme un gentleman cambrioleur au féminin. Beaucoup de termes me viennent aux lèvres et encore plus vous viendront à l'esprit en lisant. Veuve noire, croqueuse de diamant, escroc, faussaire, aigrefin plus qu'écornifleuse, et gredine moins qu'arnaqueuse. Trop douée pour vouloir faire autre chose et en même temps trop dépensière pour vraiment se ranger après avoir accumulé un petit pactole. Excerçant ses talents parce qu'elle le voulait plus que parce qu'elle le devait vraiment, victime de ce vieux proverbe qui désigne les talents comme des démangeaisons qui n'arrêtent pas de gratter jusqu'à ce qu'on veuille enfin les mettre à contribution.

Et dans la carrière de toute escamoteuse de renom vient un Grand Oeuvre. Pour Théodora, il s'agit de Nathan Nott. Un antiquaire de luxe qui a ses entrées dans les salons londoniens et un carnet de client à faire rougir d'envie les collectionneurs d'objets rares et anciens les plus fanatiques. Un homme éduqué, doux, érudit, charismatique et patient. Mais surtout riche, et surtout très vieux. Une relique lui même, une antiquité dans ses derniers moments. Désespérément seul dans sa vie et comme bien des hommes, avide de laisser une empreinte de son passage dans ce monde. En écrivant ses mémoires, peut-être, mais surtout en ayant une descendance.


Cela ne prend que six visites à la boutique, trois dîners, deux sorties dans des musées et une visite à son manoir londonien pour que Théodora lui ravisse son esprit, son coeur, et finalement son corps. Commence alors une étrange sorte de parade nuptiale typiquement humaine dont elle est coutumière: l'engagement, les fiançailles, le mariage, les noces. Elle mue, comme un serpent, cessant d'être Théodora Gale pour devenir Dora Nott, comme aime à l'appeler son riche mari, sa bourse dotée de parole. Mais ne vient toujours pas l'apogée du piège: aucune naissance. Et comment en vouloir à son époux de se résigner à être sec comme un pruneau dans ses années aussi avancées ?
Et pourtant, intimement, Dora Nott sait qu'elle ne sera jamais véritablement Madame Nott sans un ventre rond avec un joli petit trésor à l'intérieur. Si jamais son époux avait une famille nombreuse, pour eux,elle ne serait qu'une arriviste, une avide, une intéressée. Et... n'auraient-ils pas raison ?

Du peu qu'elle a vu de sa belle famille, des rares visites qu'elle leur a faite, il s'agit de gens qui ne vivent pas dans le même siècle d'elle. Des arrogants, des renfermés, la prenant de haut et la traitant comme une espèce de bâtarde, sans que jamais elle ne puisse véritablement comprendre la raison de ce traitement. Il faut un enfant, comme dans les contes. Un enfant non pas en échange d'une couronne, mais d'une vie dorée assurée pour le restant de ses jours. Une fille, un garçon, un beau, une laide, entière ou cassée, blond ou brun, peu importe. C'est cynique à souhait mais surtout, vital.
Heureusement, c'est son tendre et cher mari, ce si prévenant époux, qui vient à elle. Théodora se rend compte avec un mépris certain et un certain dédain que son mari a cessé d'être un antiquaire le temps d'un soir pour s'improviser alchimiste. Il la gave de potions, l'imbibe de philtres, la gargarise d'elixir. Elle se plie au jeu, non pas par conviction mais par désespoir de pouvoir elle même trouver une solution à sa situation.

Et la solution arrive huit mois plus tard et se fait baptiser Tessadora Nott, comme le souhaite Nathan. Tessa pour la célèbre hétaïre grecque, et Dora pour faire écho au nom de sa mère. Tessadora, tout simplement. Arrivée un mois en avance mais bien là. C'est un petit soleil: celui des vieilles années de son père et celui des jeunes années de sa mère, qui se découvre étrangement capable d'aimer là où sa génitrice en avait été incapable. N'allez pas vous méprendre. Théodora Nott ne cesse pas d'être une fieffée escroc matérialiste, manipulatrice et vénale pour se transformer du jour au lendemain en épouse parfaite. Elle s'en moque et en serait incapable. Souvenez-vous que nous ne sommes pas vraiment dans un conte. Mais elle apprend peut-être à aimer et à tirer fierté d'une autre chose que de ses accomplissements propres. Puis après la consécration de devenir pour de bon Madame Nott, il y a la révélation.

Celle du monde de son mari. Du monde surnaturel. De celui des baguettes, des sorciers, des mystères. Elle s'amuse d'apprendre que son mari qui lui a toujours fait penser à un bibliothécaire sénile et barbant au possible a été dans sa jeunesse un terroriste, un activiste militant en faveur d'une idéologie prônant la supériorité du statut du sang. Elle s'inquiète de savoir qu'elle va devoir renoncer à sa fille car sa petite Tessadora doit aller faire son éducation loin d'elle.
Théodora ne sait pas lâcher prise: elle a toujours eu l'habitude de délester les gens de leurs biens, pas de se faire voler elle même. Et comment considérer cet éloignement si ce n'est comme un vol ?

Les oiseaux se cachent pour souffrir, les animaux effrayés mordent, et les femmes qui ne veulent pas se faire abandonner prennent la fuite avant. A soixante douze ans, Nathan Nott se retrouve avec beaucoups de ses avoirs subtilisés, sa femme en fuite, et sa fille de huit ans à élever. Il décide de faire le dos rond, ne doutant pas un instant que sa femme reviendra. Mais elle ne revient pas. Par un complexe phénomène alchimique, une chimie de sentiments, son amour se transforme en colère, son espoir en chagrin et son humiliation en orgeuil. Et il soigne cet abandon par un mensonge et quelques sortilèges qui altèrent la mémoire.

S'il y a bien eu une Théodora Nott, c'était une grande sorcière, d'une ancienne lignée, bonne et douce, dévouée, ayant laissée la vie dans l'accouchement,quittant sa fille en la mettant au monde... une femme qui n'aurait abandonné son mari que pour mourir, en aucun cas par trahison. La magie convainc sa petite Tessadora, et lui même arrive à se persuader de la véracité de tout ça...
IL noie ses souvenirs dans une amertume, un orgueil et un renfermement sur lui même, renouant dans la solitude des nuits avec ces si vieilles idées qui ont été ses amies pendant une longue partie de sa vie: celui qui fait confiance à une Moldue est un dupe qui mérite de souffrir, et qui mérite le déshonneur.

Mais une seconde bataille commence pour ce pauvre homme sur la fin de sa vie:Tessadora ressemble trop à Théodora pour que cela ne l'inquiète pas. Elle est belle, pour commencer. Sans effort et avec arrogance. Au lieu de profiter de l'innocence et de l'insouciance de la jeunesse, sa fille montre des dispositions précoce pour le cynisme, l'humour noir et interpréter et déchiffer ce que les gens pensent sans oser dire, et disent sans vraiment penser. Là où il la voudrait érudite, amoureuse du passé, enivrée de littérature et de savoir, il la trouve ambitieuse, obstinée et trop charismatique pour que cela ne lui nuise pas un jour. Là où l'ambition montre le bout le son nez, les ennuis ne tardent pas à s'inviter.

Nathan berce sa jeunesse de ce qui a bercé la sienne. La lecture, l'écriture, la culture, la découverte des choses des temps passés, les mystères du monde. Ils ne jouent pas à cache-cache, mais aux énigmes. Il ne lui lit pas des histoires, mais L'encourage à en écrire. L'homme s'applique à tout faire pour que sa fille ne devienne pas une roublarde, mais une érudite. Une sorcière respectable, une Nott. Pas une Gale. Et cela fonctionne, selon Nathan, qui n'ose pas s'imaginer que sa fille de moins de dix ans est assez futée et forte de caractère pour assimiler ce qu'il cherche à lui enseigner sans renier qui elle est.

Les premières années à Poudlard réconfortent le vieil homme qui tire une immense fierté des prouesses intellectuelles de sa fille. Elle est une élève studieuse, ingénieuse, bien vue des professeurs. Une amatrice de livre, les traitant en amis et non pas en outils. Ce qu'ignore Nathan, c'est que Tessadora est assez rusée pour savoir déjà comment jouer un rôle de manière à duper en monde.

Il ignore que sa fille préside une modeste société secrète, à peine un groupe d'étudiants en fait, Rara Avis. Qu'à son idée, ses suiveurs s'affublent de noms d'oiseaux rares pour se moquer des élèves moins bien nés et moins doués. Il n'a aucune idée que la Théodora en Tessadora est encore bien présente. Pire, que sa fille lui ressemble en la seule chose qu'il redoute: qu'elle partage ses idées anciennes et ses convictions passées sur la supériorité des sangs-purs. Que n'ayant aucun véritable souvenir de la véritable identité de sa mère, elle s'illusionne sur sa propre pureté fantasmé. La ruse et la rancune de Nathan suite à l'abandon de Théodora, ce qui l'a poussé en vérité à travestir la mémoire de sa propre fille... tout cela se retourne contre lui.

Aux yeux du monde et grâce à ses mensonges, Théodora est une lointaine cousine à lui, d'une branche mineure mais encore pur, égarée en France, déracinée d'Angleterre. Et sa propre famille n'ose éventer le mensonge de peur de jeter l'opprobre sur eux. Ce qui permet à Tessadora de prospérer et de s'épanouir. Les sombres évènement de 2019/2020 sont une terre noire, un terreau mauvais dans laquelle elle plante ses racines. Quand la vieille chouette de McGonagall portée disparue est remplacée par Blackman au directorat de Poudlard, Tessadora passe pour une Sang-Pur. Sa main ne s'orne pas du NM sacrilège qui jette l'anathème sur les médiocres, les communs, les moindres. Elle n'est ni tyrannique, ni ridiculement raciste... non. C'est peut-être pire. Elle est méthodiquement, judicieusement et intellectuellement raciste. Tessadora est une érudite de la discrimination, une analyste totalitaire. Elle fait des moyennes, établis des chroniques, ostracise comme ostraciserait un fonctionnaire. Avec imagination et astuce.

Le retour de Blackman en 2022 l'inquiète plus. Car la mise en place d'un système totalitaire dans un lieu d'érudition la fait se questionner sur ses convictions et allégeances. La brutalité avec laquelle les nés-moldus sont privés de baguette puis envoyés cachot, et contraints de jouer les elfes de maison pendant leurs moments de libertés la choquent. Elle même se voyait comme un tyran éclairé, un despote éduqué... représentante d'une aristocrate supérieure de nature, mais non pas barbare et cruelle. La Dora romantique argumente sans cesse avec la Tessa intellectuelle, cette dernière expliquant à la première que les sang-purs ne domineront jamais rien, ne serait-ce qu'à cause de l'argument mathématique du sous-nombre et de la consanguinité fatale et inéluctable.

Quand des lettres anonymes encouragent les élèves de sang pur à se battre pour leurs droits en 2024, elle ne se laisse pas avoir par un mensonge, un insulte à sa propre intelligence. Rien n'est plus important pour elle que de reconnaitre que chaque homme et chaque femme nourrissent des désirs et des ambitions, et qu'il est lâche de les ignorer, de ne pas se donner les moyens de les réaliser. Mais pas à ce prix, pas à celui de détruire toute une culture pour retomber dans les âges sombres de l'esclavagisme, de la stupidité et de la violence. Elle se sait capable de soutenir ses idées avec intelligence, par les mots,la propagande, par son charisme.

Nathan Nott
Avoir été élevée par un père aussi âgé a surement contribué pour beaucoup à faire de Tessadora une petite fille mature avec l'heure. Cherchant à se cultiver plutôt qu'à se distraire. Voulant écrire ses propres contes plutôt que de relire sans cesse ceux écrit par les autres. Elle a très vite enfouie loin d'elle la frustration de ne pas pouvoir physiquement avec ce père si frêle aux gens dont raffolent les enfants: à dada, à cache-cache, à la course et à la balle. Mais Nathan a été en tout temps un père aimant, cherchant à faire de sa fille une personne capable de réfléchir. Car l'intelligence n'est-elle pas une des premières richesses des hommes ? Celui ou celle doté d'un bon jugement évitera les principales embûches de la vie, et pourra surmonter les autres, celles impossibles à véritablement esquiver.
L'homme n'a jamais rechigné aux moyens pour stimuler l'imagination de sa fille par la musique, l'art, la création. Préférant la voir se perdre dans les études et le savoir plutôt que comme sa mère dans la rouerie, la manipulation et les mauvaises actions.

Théodora Nott
Si Nathan a été un père-mentor pour Tessadora, sa mère a été brièvement une complice, une amie, une acolyte de bêtise, de farce, de mauvais coups. Une présence très maternelle pour la conforter dans sa féminité et son espièglerie juvénile. Une adulte lui apprenant la notion du beau, de l'esthétisme, de la classe. Autant Nathan était un homme de mot, autant Théodora a été une personne bien plus tactile: à l'aise pour exprimer son amour par les gestes et les attitudes.
Retrouvant une seconde adolescence après sa grossesse et voyant dans sa fille une complice, Théodora a été une femme-enfant pleine d'énergie.

La Fausse Madame Nott.
Après avoir effacé la présence de sa mère de ses souvenirs, Nathan s'est efforcé de décrire à Tessadora ce qu'avait été son épouse fantasmée morte en lui donnant la vie. Et cette description a toujours fortement influencée Tessadora, non seulement dans ses actes mais aussi dans ses actions. Cela l'a chargé du poids d'un héritage qui n'a jamais vraiment été réelle.
Nathan a décrit cette femme comme douce, bonne et protectrice de son foyer. Épouse loyale et fidèle. Mais également doté d'une grande force de volonté, d'un amour du savoir, et d'une prestance certaine. Curieuse et imaginative, patiente et appliquée. Toujours douée pour lire les esprits comme des livres. Nathan a toujours insisté sur la ressemblance physique entre la Tessadora et sa mère.

Pelagius Nott
Tessadora a eu une enfance solitaire, rehaussée des plaisirs et passions de ceux qui favorisent leur propre compagnie plus que celle des autres. Alors qu'elle passait de longues nuits dans la bibliothèque de la demeure familiale, elle s'est rendu compte qu'un observateur attentif la regardait nuit après nuit dévorer les livres page après page, chapitre après chapitre. Il s'agissait du tableau de l'un de ses ancêtres, aïeul de son père. L'honorable Pelagius Nott, érudit de son temps. Un parent mort mais cependant très présent dans sa vie qui a renforcé son goût pour le passé, l'histoire, les secrets poussiéreux et les choses oubliées, aux langues mortes. Il a fallu un long moment à Tessadora pour pouvoir ne serait-ce que comprendre cet ancêtre s'exprimant dans un anglais ancien, biscornu, si différent du sien. Et encore plus de temps pour pouvoir converser avec lui.


Le Roi de la Volière.
Le manoir familiale dispose d'une grande volière pleine de magnifiques créatures non magiques. Les oiseaux y nichant sont sélectionnées pour la beauté de leur chant ou la majesté de leur plumage, comme des quetzals, des tangaras, des rois de saxe, et les splendides oiseaux de paradis. Ces derniers l'ont toujours fasciné plus que les autres. Mais le roi de la volière était sans aucun doute un vieil Augurey ne sachant pas, ne pouvant pas s'empêcher de chanter la nuit dès que le ciel s'annonçait pluvieux. Tessadora avait l'étrange habitude d'essayer de reproduire son chant et de l'honorer par l'offrande de petits objets déposés dans son nid.  

En voyant les élèves défiler pour confier leur avenir à un artefact, un chapeau parlant, Tessadora a une réflexion incroyablement mature pour son âge. Ou alors tristement cynique. Une réflexion dont elle n'a pas vraiment le mérite et qui lui est entièrement inspirée par un vers d'un poème de Kiping. ''If you can meet with Triumph and Disaster/And treat those two impostors just the same''. Voilà le danger dont préviennent les vers et voilà exactement dans celui que tombent les nouveaux élèves. Dont elle fait partie. Et malheureusement, elle va devoir se forcer à subir le danger tout en connaissant le risque.

De ce qu'elle connait de l'histoire du monde magique, ce chapeau a pour ainsi dire était à l'origine de deux guerres. En divisant, en opposant, et en disant aux enfants ce qu'ils devaient être et ce qu'ils devaient faire pour coller aux valeurs des Maisons. Qui ils devaient être. Très pensive, elle caresse le bout de son nez de son index, comme à chaque fois qu'elle risque de se perdre dans ses réflexions ou sur les sentiers de son imagination. Elle voit des élèves se moquer de futurs blaireaux, médirent de serpents, accueillir par le rire des lionçeaux. Il y a des aigles qui prennent de haut tous les autres.

Son nom va bientôt venir et elle devra se plier à cette tradition... alors qu'elle déteste se forcer à accomplir des choses qu'elle sait, qu'elle sait pertinemment être stupides. Pensivement, elle plonge en elle-même pour ouvrir son sénat intérieur à ses deux orateurs. Tessa la Pragmatique et Dora la Romantique. Elle aime procéder de la sorte pour rendre agréable des réflexions anxiogènes ou complexes.

-Ce sont juste des symboles et des proverbes, ces Maisons. Nous suivrons tous le même programme et se sera le mérite personnel qui comptera.
-Pourquoi jouer les simplettes ? Bien sûr que certaines Maisons valent mieux que d'autres !
- En fait non, elles sont toutes décrites par des traits de caractères qui sont aussi bien des défauts que des qualités.
- Tu rationalises toujours tout. Laisse-moi me sentir supérieure, même si c'est un mensonge.
- Haaaan... qu'est-ce que tu peut-être stupide, ma pauvre fille !

IL y aurait tellement à faire avec cet artefact, le Choixpeau. Pourquoi s'en servir comme ça alors que des gens pourraient le mettre, le coiffer, et le questionner sur les époques passées ? Sur les créateurs ? À sa connaissance, aucun livre n'a été écrit de la sorte. Se serait un dialogue direct avec les figures du passé, pour ainsi dire. Si personne ne lui vole cette idée, elle compte bien la mettre en pratique.

On ne lui laisse pas plus le loisir de réfléchir. Son nom est appelé. Elle doit se lever, s'asseoir sur le tabouret, puis le Choixpeau est coiffé. Juste pour contrarier l'artefact, elle se met à penser à autre chose, en espérant futilement qu'il ne puisse pas lire en elle. Qu'il peine à faire son choix. Ça l'apprendra pour la forcer à prendre part à tout ça. Alors qu'elle récite une nursery rhyme sur un serpent et une tortue, Tessa et Dora lui font savoir depuis le tout fond de sa tête que ça ne sert à rien...

- C'est inutile. Penser à autre chose ne va pas bloquer la très puissante magie qui l'habite.
- Ho laisse toi faire ! Nous allons être bien accueillie ensuite... un petit mensonge de temps en temps, ça n'est pas si grave, non ?

Et pourtant, ça à l'air de marcher. Elle rouvre les yeux qu'elle avait fermés et ne voit dans un premier temps que les larges bords de cuir du Choixpeau. Elle fronce le nez quand elle renifle une odeur ancienne de poussière et... ça semble prendre un peu plus de temps que pour les autres...