Une chance incroyable m’a poussée aujourd’hui à rejoindre Finnbjörn et Phoenix avant le cours de Métamorphose, et donc à être à l’heure. Car l’imprudent professeur avait choisi aujourd’hui de faire un cours unique pour les cinquièmes, sixièmes et septièmes années. Je misais sur une incompétence profonde de sa part : quel enseignant digne de ce nom pourrait sérieusement penser que des élèves de trois niveaux différents requéraient un cours identique ? Dans cette fatalité, j’avais malgré tout la faveur d’être arrivée à temps pour m’installer aux côtés de mon jumeau et d’éviter ainsi la plèbe qui s’entassait un peu partout. Et cela voulait dire que nous allions partager la salle de classe avec Hannibal ! Une petite excitation me gagna à l’idée de suivre un cours en compagnie de mon aîné bien que cela signifiait également que j’allais devoir me tenir à carreau pour les deux prochaines heures. Seul lui était réellement capable, dans cette école, de me faire suivre une certaine discipline.

Nous commençions à être à l’étroit dans cette salle de classe : l’enseignant aurait au moins pu avoir l’intelligence et la sagesse d’en choisir une autre pour l’occasion. Lorsqu’un élève dont la tête ne me revenait pas tenta de s’asseoir à ma gauche - ma droite étant occupée par mon frère - je lui jetais un regard noir et méprisant avant de poser exagérément mon sac sur la place libre. Hors de question que n’importe qui s’installe à cette place. Je la réservais à une bien meilleure compagnie. Celle-ci semblait avoir entendu mon appel à l’aide et vint poser son fessier très français sur le banc. Arrrive à l’heurrre la prrrochaine fois, un sot a failli polluer mon airrr de sa prrrésence fis-je avec toute la mauvaise foi du monde : c’était une habitude pour moi de ne pas être exactement pointilleuse sur les horaires, surtout lorsqu’il s’agissait d’un cours ennuyant comme celui-ci, et Junior veillait bien souvent à me garder une place non loin de lui.

Le cours débuta et je n’écoutai que d’une oreille désintéressée les têtes savantes exprimer le peu de savoir qu’elles possédaient face à toute la classe. Hannibal était plus intelligent qu’une majorité des élèves réunie et c’était bien la raison pour laquelle il n’avait pas besoin de l’étaler à la vue de tous. Désabusée, je commençai à dessiner sur mon parchemin du bout de ma plume, jusqu’à ce que l’annonce de la partie pratique, un tant soit plus intéressante bien qu’il ne s’agisse que de transformer un animal en un objet parfaitement inutile. Je jetai un coup d’oeil intéressé à mon frère tandis que celui-ci se concentrait et… réussissait ! Quelques secondes seulement, certes, mais tout de même : depuis son amnésie, il n’y avait pas de petites victoires. Il ne la savoura pas longtemps, ne tardant pas tourner son pâle visage vers moi. Je ne voulais pas déconcentrrrer parrr ma rrréussite lui retournai-je avant de m’emparer de ma baguette. J’avais l’habitude de percevoir l’énergie de cette dernière qui répondait bien souvent à l’excitation que je ressentais à l’idée de lancer un sortilège. Celui-ci n’avait rien de très enthousiasmant, la laissant insensible. Strigiforma !

1 - 2 - Malgré mon désintérêt total pour la métamorphose du jour, le sortilège fonctionne à la perfection. J’attrape les jumelles avec un sourire victorieux et les tend sans plus attendre à Finnbjörn, avant de nonchalamment m’accouder au pupitre. Démonstrrration dans les rrrègles de l’art fais-je avec un grand sourire.
3 - 4 - Las ! Ma baguette se révolte autant que moi face à l’inutilité de cette pratique. Et tout comme moi, ne prend pas pincettes pour le montrer. J’observe avec début de sourire hilare mon hibou projeté à l’autre bout de la salle, les plumes noircies à l’image du bois du pupitre, et j’écoute les cris désemparés des deux piailleuses qui se le sont reçu en pleine tête. Le regard narquois de mon jumeau me fait m’appuyer contre le dossier de mon assise et croiser les bras, avant de nonchalamment rajouter : Trrrop ennuyant.
5 - 6 - Rien ne se passe. Pas même une métamorphose éclair comme Finnbjörn. D’agacement, je donne un coup de baguette sur la tête du volatile qui s’envole mécontent. Grand bien lui fasse ! Le regard de mon jumeau ne laisse aucun place au doute et je lui retourne deux yeux sombres. Qu’il ne crie pas victoire trop haut, il n’est toujours pas apte à me défier en duel !