Sa question était légitime mais assez tranchée. Au final, est-ce que Casey avait encore le moindre lien avec le monde moldu ? Ni famille, ni amis, ni quoique ce soit qui la rattache à cette partie-là de sa vie. Pourtant la réponse lui vint avec une évidence marquée : non, elle ne couperait pas les ponts. Impossible car Brooklyn, lui, avait la plupart de ses attaches dans ce monde-ci et s’il y avait bien quelqu’un avec qui elle ne comptait pas rompre le contact, c’était lui. Mais s’il n’avait pas été là… qu’en aurait-il été ? Le monde sorcier offrait de telles possibilités qu’il n’y avait rien qu’on ne puisse y trouver. Doucement, l’évidence s’imposa à elle : si ça n’était pas pour Brooklyn, il était fort probable que le temps l’éloignerait durablement d’un monde dans lequel elle n’avait plus rien à faire. C’est difficile à dire commença-t-elle, hésitante, avant de laisser fuir les quelques mots qui lui brûlaient les lèvres. Je n’ai pas l’envie ou le besoin conscients de couper les ponts, mais j’imagine que le temps finirait par faire son oeuvre et je pourrais très bien évoluer uniquement dans le monde sorcier… si je n’avais personne pour m’y rattacher un tant soit peu. Un petit soupir lui échappa : c’était étrange de considérer deux mondes qui cohabitaient si étroitement et qui étaient pourtant si coupés l’un de l’autre. Et encore plus étrange d’avoir conscience qu’il ne suffirait pas de grand chose pour que, lentement mais sûrement, Casey perde rapidement pied avec tout ce qui faisait la normalité de ce monde-là. C’était peut-être en partie à cause des mauvais souvenirs qui hantaient la partie non-magique de ce monde, mais aussi et surtout car elle se complaisait parfaitement dans ce que la magie avait à offrir : qu’aurait-elle pu vouloir de plus ? Évidemment, cette réflexion ne prenait pas son ami d’enfance en compte, car dès lors qu’il rentrait dans la balance, il devenait certain que jamais elle ne pourrait totalement se couper des moldus. Les quelques mots, d’apparence banale, de Brooklyn viennent interrompre net sa réflexion. Une gêne euphorique vint lui rosir de nouveau les joues. Décidément, c’était le soir. C’était bien la première fois que ces mots, aussi francs et dénués de quoique ce soit d’autre, franchissaient les lèvres du jeune homme. C’était aussi plaisant que déstabilisant, pourtant avec tout le temps qu’ils passaient ensemble, comment ne pas s’en douter ? Mais autant demander à une aveugle de voir l’évidence : Casey était plus que douée pour ignorer ce qui était sous son nez, par peur constante de faux espoirs qui la blessaient plus sûrement qu’un sortilège bien lancé. Je suis contente également. Est-ce que retrouvé était le bon terme ? Ils l’utilisaient comme si c’était le cas mais au fond, ils avaient tellement changé que, plus que des retrouvailles, c’était presque une toute nouvelle relation qu’ils avaient dessinée tous les deux. Elle garda néanmoins ses réflexions pour elle, et à raison : deux silhouettes se dessinaient devant eux, annonçant la fin de leur tranquille tête-à-tête.

La conversation escalada à toute vitesse et la tension fut rapidement palpable. Interloquée, Casey ne chercha pas à prendre parti entre son meilleur ami et la Poufsouffle, d’autant qu’elle ne comprenait même pas d’où venait cette animosité dont elle ne savait rien avant ce soir. Ni l’un ni l’autre ne voulait faire l’effort de se montrer poli, ne serait-ce que pour les convenances. Connaissant Brooklyn, ce n’était pas si étonnant, il n’en avait rien à faire, des convenances. Mais Felicia était plus discrète que cela en général. Quoiqu’il y ait entre eux, cela devait être particulièrement violent. La joute verbale n’alla pas plus loin, brusquement interrompue par un cri strident et une voix menaçante. Le frisson glacé qui avait parcouru le dos de la Serdaigle quelques secondes auparavant revint, plus fort, plus glacial, plus apeurant. Tout sembla aller très vite et très lentement à la fois, comme dans un très mauvais rêve. Un brouillard opaque s’abattit sur eux et le quatuor se divisa à toute vitesse. Sa main serrée dans celle de Brooklyn, Casey le suivit d’un pas rapide, subissant sa colère, sourcils froncés. Mais peut-être que cela pouvait attendre qu’ils sortent d’ici. Par un heureux miracle, le Serpentard ne répondit rien : ce n’était ni le moment, ni le lieu pour une nouvelle dispute. Sa baguette serrée dans sa main libre, Casey fouillait inutilement le brouillard des yeux, comme si elle pouvait, avec un peu d’obstination, parvenir à percer ce qu’il cachait. Quand Brooklyn poussa un petit cri agacé, elle sentit la peur l’envahir à l’idée qu’il soit blessé ou même tout simplement attaqué par un ennemi invisible. Il lui assura avec une amabilité propre à lui qu’il n’avait rien, et c’était suffisant pour la soulager un petit peu. Ils étaient pourtant loin d’être sortis d’affaire, avançant à l’aveuglette. Leurs doigts un peu plus serrés encore, ils continuent leur route, sans savoir où ils vont, sans savoir ce qu’ils font. Mais la cohue alentours ne donnait pas envie de rester où que ce soit : mieux valait bouger. Cela gardait un peu mieux éloigné la peur panique de l’enfermement qui agitait encore Casey après toutes ces années. Rien ne leur disait qu’ils étaient réellement emprisonnés dans la salle, mais ne rien voir rendait les choses identiques à une prison. Et c’était angoissant.

Ils tombèrent fortuitement sur un groupe… dont Felicia faisait partie. Casey n’eut pas le temps d’ouvrir la bouche que déjà le Serpentard et la Poufsouffle s’invectivaient à nouveau. N’y avait-il pas plus urgent à faire que de se taper dessus ? La peur rendait les adolescents à fleur de peau et la tension déjà présente ne faisait qu’augmenter. Aussi, quand Brooklyn prit le parti de ne pas suivre la chaîne humaine qui se formait, la Serdaigle n’hésita pas une seule seconde à glisser de nouveau sa main, qu’il avait lâché en retrouvant leurs camarades, dans la sienne. Entre le monde entier et Brooklyn, elle savait très bien qui elle choisirait, qu’importe les circonstances. Et il était absolument impensable qu’elle laisse son ami s’évanouir dans la brume. Sans qu’elle ne s’en rende vraiment compte, c’était sa présence et leurs doigts enroulés qui maintenant efficacement la crise de panique éloignée et lui permettait de rester lucide. L’odeur âcre d’un feu d’origine inconnue se mélangeait désormais à l’épaisseur du brouillard. C’était de pire en pire et il devenait difficile de ne pas prendre sérieusement peur. Mais ça, Casey n’allait pas l’admettre à voix haute : cela ne servirait à rien, elle devait conserver un minimum de sang-froid, oublier cette impression glaçante qu’elle connaissait la chaleur étouffante du feu qui s’empare du moindre recoin de la pièce dans laquelle vous êtes piégés, refouler les souvenirs absents qui accéléraient les battement de son coeur, et avancer. Ce n’était pas en restant prostrée qu’ils pourraient s’en sortir. Elle le savait, mais lorsqu’ils buttèrent contre un mur, la panique augmenta également à ses certitudes qui s’effondraient. La raison ne valait rien face à un inconscient aussi perturbé que le sien. Serrant un peu plus la main de Brooklyn, elle chercha à rassembler toutes ces forces pour ne pas se laisser glisser au sol et paniquer totalement. Suivons le mur articula-t-il faiblement. En s’éloignant du feu, on devrait trouver une issue quelconque.

3 - En suivant le mur de leur doigt, ils parviennent finalement à la porte : enfin.
4 - 6 - Toujours pas mais ils sont sur la bonne voie
2 - Ils ne sont pas sur le bon chemin, qui sait, mais en tout cas ils trouvent une fenêtre c'est déjà ça
5 - 1 - Rien de rien, à croire que cette pièce est sans fin. Peut-être que les ennemis ont lancé un sortilège visant à les déboussoler ?

Goutte à goutte, le sang coule de mon oreille le long de ma mâchoire. L’étrange mélange d’un lapin et d’un niffleur disparaît de mon champ de vision. Un rictus mauvais étire mes lèvres : si je le recroise, il peut s’attendre à ce que je ne me contente pas d’un simple coup de pied. Je l’ai touché de plein fouet, j’ose espérer que la douleur l’a poussé à se rouler en boule dans un coin de la pièce embrumée et qu’il se fera écraser par des orphelins paniqués. S’ils pouvaient au moins servir à quelque chose… Une simple hémorragie interne le tuant à petit feu me conviendrait très bien également. Je caresse ma pommette du bout des doigts, les tâchant d’un rouge sombre dont la source m’élance douloureusement. Ce n’est pas la pire souffrance que j’ai eu à subir mais elle n’en est pas moins désagréable. Irritée par cette intervention indésirée, je ne ressens guère plus d’amusement à me jouer des élèves paniqués qui courent et pleurent d’un peu partout. L’odeur caractéristique d’un feu vient me chatouiller l’odorat et mon sourire fauve s’étend. La flamme de la chandelle malencontreusement tombée dans toute cette confusion se propage. Ils commencent doucement à en prendre conscience : un léger flottement se fait ressentir puis la panique gonfle et explose. Je comptais désormais sur les instigateurs de cette attaque pour veiller à ce que les rares sang-purs présents puissent providentiellement s’échapper avant que le feu ne fasse ses premières victimes.

En attendant, il me fallait retrouver Finnbjörn et Junior. Je souhaitais découvrir ce que le premier savait exactement de cet événement inattendu et m’assurer que le second se portait bien. Le contraire n’avait aucune raison de se produire, mais l’idée d’un brouillard enveloppant mon meilleur ami, l’isolant de tous et créant une panique liée à ce que je connaissais de plus troublé chez lui m’inquiétait suffisamment pour que je me mette à sa recherche sans plus tarder. Je n’avais plus aucun repère, isolée dans ce brouillard épais, et un petit soupir impatient m’échappa. L’idée d’un brasier immense mettant fin à l’existence de cette minable école et à ceux qui souillaient la nôtre m’emplissait toujours de la même joie féroce, mais je laissais les responsables s’en occuper. L’intérêt pour cette attaque s’était envolé aussi vite qu’il était arrivé, probablement car j’étais seule au milieu d’insipides gamins, sans mes repères pour jouir de la situation comme il se devait.

3 - Je laisse mon instinct guider mes pas, prenant néanmoins bien soin de me diriger à l’opposée de ce buffet enflammé. Où étions-nous situés, avant que le regard sombre de Misha ne m’interpelle loin d’eux ? Je me faisais cette réflexion au moment où se dessinent les traits tant attendus. Finn, Juniorrr soufflé-je en arrivant à leur hauteur. Constatant que mon meilleur ami se tenait le bras comme pour le protéger de quelque chose, je lui lançais un regard interrogateur. Tu es blessé ?
4 - Mon chemin ne croise aucun visage connu jusqu’à ce que je parvienne devant des hauts battants. La porte se dresse, devant moi, et une chaise s’y écrase avec force au moment où j’y arrive. Je constate que cette cruche de Shepherd est à l’origine de cette piètre tentative et mon rire moqueur vient saluer sa pitoyable tentative.
Le reste - Je marche sans croiser quiconque. Du moins aurait-ce été préférable, comme je m’en fais la réflexion alors que je m’arrête en face de visages connus. Génial, des sang-de-bourbes. (Felicia, Skyler et Ollie)