Librairie Cooper [Entrée libre]

Alice allait bientôt devenir prof à Poudlard, mais en attendant, elle allait passer une partie de l’été à aider sa mère avec Hope à la librairie. Emily profitait toujours de cette période pour impliquer Hope et Alice dans la vie de la librairie. Et puis, elle voulait développer la partie sorcière de la boutique, mais ce n’était pas possible sans l’appui de ces petites sorcières de filles. De fait, Alice faisait l’effort de participer. Et puis, cette année, elle aurait peut-être l’occasion de croiser des élèves qu’elle aurait à l’école. Ca pourrait être une façon intéressante de faire connaissance sans trop de pression.

Installée au comptoir, Alice contempla sa mère ranger quelques livres dans le coin réservé à l’Histoire. Elle tenait toujours à ce que les rayonnages soient impeccables, du moins quand il n’y avait personne dans la boutique. Car rien ne faisait plus plaisir à Emily que des amateurs de livres qui regardaient, feuilletaient, découvraient. C’était ainsi qu’elle voyait une librairie vivante et il fallait reconnaître qu’elle n’avait pas tort. Alice aimait échanger avec de vrais lecteurs sur des livres tant moldus que sorciers. Rien ne pouvait lui faire plus plaisir que cela. Aussi approuvait-elle la façon de voir les choses de sa mère, en la circonstance.

La librairie venait juste d’ouvrir ses portes pour la journée, et le calme régnait encore, mais Alice était prête à recevoir les clients. Elle avait un livre sur le comptoir qu’elle feuilletait en attendant que quelqu’un ne lui demande son aide ou ne veuille lui acheter un ouvrage. L’air doux de ce début d’été entrait par la porte et elle sentait bien combien l’été était là désormais. La lumière vive qui illuminait toute la librairie en faisait un endroit idéal pour rêver et s’évader et toute personne qui en avait envie pourrait facilement se sentir ailleurs en quelques minutes, rien qu’en entrant dans la boutique.

HRP:

**Invité** Invité À SAVOIR DETAILS EN PLUS

Librairie Cooper

Alice Cooper & Cie

Hope se tenait entre deux rayonnages de la boutique de sa mère Emily. Cette libraire avait pris pas mal d’ampleur ces dernières années, mais elle restait et resterait toujours une boutique conviviale et chaleureuse. Rien de bien étonnant quand l’on connaissait sa propriétaire. Une femme douce et gentille à souhait. Sa première fille avait pris le même chemin. Mais Hope avait encore besoin de temps pour se reconstruire. Les souvenirs de la passée n’était pas encore disparut, elle semblait donc peut-être moins conviviale que ses deux compères du jours. Son visage neutre, qui se parait d’un sourire assez faux lorsque des clients entrés, mais reprenait immédiatement sa neutralité si on ne lui parlait pas, donnait l’impression qu’elle n’était pas spécialement heureuse d’être ici, mais en même temps qu’elle se fichait pas mal du fait d’être là. Pourtant, la demoiselle était en réalité dans son élément au milieu de tous ces livres sans fin.

Alors que sa sœur était au comptoir et que sa mère rangeait actuellement une autre étagère, Hope avait pris le choix de s’occuper du rayon sur les runes, sa matière favorite. Bien que ceux-ci étaient des livres moldus. Il n’en reste pas moins qu’elle avait fait le tour de la plupart pour augmenter ses connaissances dans le sujet. Cela ne pourrait lui être que bénéfique pour la suite. Tant dans son travail actuel que peut-être dans son futur métier. La jeune femme avait envoyée de cela quelques jours une demande pour un poste de professeur à Poudlard, elle attendait la réponse. Quand elle découvrit un livre qu’elle n’avait pas encore lu, elle le mit de côté et continua son rangement avec rapidité et professionnalisme. Une fois ce dernier fini, elle se dirigea vers sa sœur et se posta derrière elle. Tous en regardant le bouquin, elle interpella sa sœur :

« - Lice, nous avons reçu qu’une partie de la commande pour le stock de la seconde salle, non ? Devrions-nous nous rendre chez Fleury et Bott pour aller chercher la seconde partie ? De plus, tous a été mis en place, il ne nous manque vraiment rien ? Il ne faudrait pas que ce début d’agrandissement de nos affaires, enfin de celle de maman, commence mal… »

Hope était du genre à planifié de manière minutieuse même jusqu’à la fin, elle cherchait toujours la perfection. Voulant être sûr de ne rien oublier. Elle savait que sa sœur était capable, mais elle ne pouvait s’empêcher de s’inquiéter c’était dans sa nature, celle qu’on lui avait inculquer étant enfant. Soit elle faisait tous de manière parfaite, soit il valait mieux ne rien faire et être transparente. Bien que les deux femmes ne lui eussent jamais demandés quelques choses de semblable durant sa vie avec eux, la demoiselle n’avait jamais su se débarrasser de cette mauvaise habitude.

Hope se tenait prête à partir dans la seconde salle, la librairie offrait une douce fraicheur comparée à la chaleur de ce début d’été qui frappait les rues de Londres. Prenant une pause bien méritée dans ses voyages de recherche, elle était plutôt heureuse de le passer avec ces deux femmes dans un lieu qu’elle appréciait. Elle préférée de loin être ici que prêt d’une plage au bord de l’eau. Elle continua de feuilletait le livre en attendant la réponse de sa sœur.

Cette fois-ci, il ne s’agissait plus de lettres sans réponse, c’était bien plus grave que cela : mon père venait de refuser de m’ouvrir la porte de chez moi. J’aurais du me douter que je ne rentrerais pas comme ça, naturellement, chez moi après des mois où mon père avait refusé de m’adresser la parole. J’avais envisagé des cris, des disputes, un refus de me parler, une ambiance froide durant toute la durée des vacances. Mais je n’avais pas envisagé qu’un père puisse laisser sa fille dehors, à son retour de l’école. J’avais 12 ans et je sentais que le faible lien qui me reliait encore à ma famille venait de se rompre, sans doute définitivement.
L’air hagard, le regard embué de larmes, incapable de réfléchir à ce que j’allais faire désormais, j’errais dans Londres sous le regard étonné des passants. Dans cet atmosphère de joie consécutive à la fin des cours, j’avais envie de disparaître, d’oublier mes problèmes, de supprimer mes pouvoirs… Je n’étais qu’une gamine qui n’avais plus nul part où aller, personne qui pourrait s’occuper d’elle. Cela faisait bien deux heures que j’arpentais les rues, sans but, sans avenir. Plus le temps passait, moins je supportais les regards inquisiteurs des passants. Des regards sans doute autant inventés que réels mais qui ne faisaient que remuer le couteau dans une plaie à vif.
Un passant qui s’arrêta devant moi pour me demander si j’avais besoin d’aide fut la goutte d’eau qui fit déborder le vase. Il fallait que je quitte ces rues au plus vite, que je m’isole, que je fasse semblant que tout allait bien.
« Non, non, merci beaucoup j’allais juste… » Mon regard parcourut rapidement les rares commerces qui bordaient cette rue peu fréquentée pour s’arrêter sur une librairie. « J’allais juste à la librairie. » Sans attendre plus longtemps, je fis les quelques pas qui m’en séparait avec le plus d’assurance possible et m’engouffrait dans cette fameuse librairie. Je me mis à parcourir les rayonnages, l’air absent, sans même lire réellement les titres qui défilaient devant mes yeux. Les libraires discutaient entre elle, Peynir s’agitait dans ma poche, peu à peu je reprenais mes esprits et calmait momentanément mon angoisse de ne pas savoir où aller. Les livres avaient toujours su m’apaiser.

La clochette de la librairie tinta et Alice leva le nez de son livre pour apercevoir une petite qui ne devait pas avoir plus de douze ans entrer et se glisser dans les rayons comme si elle n’avait pas le droit d’être là. Alice fronça les sourcils. Elle ne percevait aucun danger chez la fillette, mais elle percevait une certaine détresse et elle ne pouvait pas laisser cette impression de côté sans la vérifier. Si l’enfant avait besoin d’elle, Alice n’hésiterait pas à s’en occuper, c’était dans sa nature. Elle ne laisserait jamais quelqu’un de fragile ou de blessé sans lui venir en aide.

Elle se glissa dans les rayons et atteignit celui où se trouvait la petite puce. Une rapide observation confirma à Alice sa première impression, elle n’allait pas bien. Ses traits tirés, ses yeux tristes, ses joues où les larmes étaient à-peine séchées, tout cela ne faisait que confirmer à Alice que l’enfant qu’elle avait devant elle était en détresse et il fallait qu’elle sache pourquoi. Maintenant qu’elle l’avait trouvée, elle était sous sa responsabilité et il n’était pas question qu’elle ne la quitte des yeux avant d’être sûre qu’elle était en sécurité. Elle s’avança franchement vers la petite.

« Bonjour toi ! »

Pour éviter de le faire fuir, Alice s’accroupit à son niveau et attrapa son regard. Elle ne mit dans ses yeux que la bienveillance et la douceur qu’elle réservait aux personnes vulnérables telle qu’elle sentait que la petite était. Elle savait que ce ne serait pas facile de lui donner confiance mais elle devait savoir ce qui s’était passé pour comprendre ce qu’elle devait faire de la petite puce. Et il n’y avait qu’elle qui pouvait le lui dire. Alors Alice fit preuve de doigté en évitant de la bousculer et se contenta d’une question douce.

« Ca n’a pas l’air d’aller très fort, tu veux en parler ? Je m’appelle Alice et toi, quel est ton nom ? »

Entrer dans une librairie pour fuir un passant un peu intrusif pouvait sembler une bonne idée. Mais pour cela, il fallait oublier que dans une librairie, on trouvait des libraires. Et que ces libraires pouvaient elles aussi se poser des questions sur ma venue. Je n’avais sans doute pas bonne mine. Les cheveux en bataille, les traces de larmes sur mes joues, le regard vide, toute mes affaires dans une main, Peynir laissant pointer un museau affolé depuis ma poche, l’autre main parcourant les rayonnages machinalement… tout indiquait qu’il y avait un problème. Mais, fière, je ne voulais pas demander d’aide. Qu’aurais-je pu dire d’ailleurs à cette libraire qui s’avançait vers moi ? Je ne pouvais rien raconter, je ne voulais rien raconter.
« Non, non, tout va très bi... » Un sanglot m’empêcha de venir à bout de cette phrase, ruinant mes maigres efforts pour paraître dans un état qui était loin d’être le mieux. Non, je n’allais pas bien. J’avais 12 ans et je venais de perdre mes parents. Je n’avais nul part où aller, aucun avenir. J’étais seule et seul Peynir me rattachait encore à mon ancienne existence. Au milieu des rayons d’ouvrages anciens, je sanglotais sans m’arrêter, sans même chercher à bafouiller un semblant d’excuse. L’aide que je ne voulais pas se révélait nécessaire. On ne vit pas seule à 12 ans, même quand on est une sorcière. Les secousses de mes sanglots m’agitèrent longuement, faisant même tomber ma baguette de ma poche. C’était bien le cadet de mes soucis. Le secret magique semble bien peu important quand on a plus de famille. Les explications attendraient, je vidais d’abord mon corps de ces larmes trop longtemps retenues. La libraire qui s’était approchée, autant que je puisse la voir entre deux flots salés qui me piquaient les yeux, se voulait certainement compréhensive mais dans cette situation, elle ne devait pas comprendre grand-chose.
Quelques minutes passèrent ainsi avant que je ne me calme. Mon chagrin était entier mais mes larmes s’étaient taries. Me souvenant de ma baguette, je me penchais pour la ramasser, tentant ainsi vaguement de préserver, au moins de faire semblant de préserver, le secret magique. Je n’avais pas besoin d’autres ennuis.
« Dé… désolée… Euh, je voulais pas vous embêter, je vais rentrer chez moi… » Je tentais de faire semblant mais évoquer un « chez moi » qui n’existait plus, c’en était trop. Je croyais ne plus avoir de larmes mais je continuais à hoqueter, sans réussir à reprendre mon souffle.

L’enfant semblait de toute évidence en grande détresse, mais elle ne voulait pas l’avouer. Alice ne l’y aurait pas forcée si elle n’avait pas pressenti qu’elle était dans une situation grave. Quand elle s’écroula, fondant en larmes sans pouvoir s’arrêter, Alice se précipita pour la prendre dans ses bras. Mais à cet instant, elle vit tomber sur le sol une baguette magique. La fillette n’était pas seulement une enfant en détresse, c’était une petite sorcière. Alice ramassa la baguette et se concentra sur l’enfant, la serrant contre elle pour tenter de la calmer. Elle avait l’air complétement effondrée et Alice espéra qu’on ne l’avait pas maltraitée.

« Là, c’est fini, tu n’es plus toute seule. Je vais m’occuper de toi. »

Quand elle se calma, la jeune libraire en fut soulagée. Mais elle n’avait pas l’intention de la laisser comme ça, dans cet état, seule et livrée à elle-même. Elle la vit se pencher pour ramasser la baguette. Alice se pencha à son tour afin de murmurer pour que d’éventuels clients ne l’entendent pas. Il ne s’agissait pas de trahir le secret magique aux clients de la librairie. D’autant que la librairie comportait une section pour les sorciers et, à ce titre, devait faire preuve d’une discrétion plus importante pour ne pas se voir retirer la collaboration avec le monde magique.

« J’ai ramassé ta baguette », murmura-t-elle. « N’aie crainte, je suis une sorcière, moi aussi. »

Elle rendit sa baguette à la petite, sans être certaine qu’elle pourrait la tenir mais elle surveilla. Mais quand Zey prétendit partir, Alice n’était pas d’accord pour la laisser faire, pas dans un tel état de détresse.

« Non, tu ne vas pas partir, ma puce. Tu vas venir te reposer un peu là derrière, et on va prendre le temps de parler de ce qui t’arrive. »

Alice entraîna Zey à l’arrière de la boutique par une porte qui menait à la maison d’Emily.

HRP:

Dmitri avait ce petit palpitement si caractéristique des moments de rébellion ; il avait l’impression de transgresser une règle qui n’avait pourtant pas été clairement énoncée. Mais au fond, il savait que sortir du chemin de traverse dans le seul but d’explorer le côté moldu de Londres n’était en rien un projet qui ravirait ses parents ou son grand-oncle. Mais il aimait tellement ce sentiment : ce savant mélange de liberté et de désobéissance le faisait sentir plus vivant encore, comme s’il en avait besoin pour entretenir le battement de son cœur.

Pour l’heure, il ne faisait que se balader dans les rues, observant les londoniens qui, en fin de compte, n’avaient pas l’air si différents des pragois. Le jeune tchèque avait déjà eu l’occasion d’arpenter les rues de Prague, il n’était donc pas particulièrement dépaysé par la vision de tant de moldus. Son but était plus précis : il voulait parler avec des moldus, aller dans des environnements qui lui étaient jusque-là prohibés ; jamais il n’avait mis les pieds dans un moyen de locomotion moldu et, par conséquent, rêvait de pouvoir pénétrer dans ce qu’ils appelaient le « métro ». Mais sans doute que pour une première excursion dans une ville inconnue, ce n’était pas la plus brillante des idées... Dmitri n’avait pas particulièrement envie de se perdre, il aurait l’air bien trop idiot ! En fin de compte, il se rabattit sur les commerces : les échoppes moldus devaient fourmiller de petites choses qui diffèrent de celles des sorciers, il pourrait ainsi repartir avec un souvenir.

Au bout de plusieurs minutes de marche, il se décida enfin pour une librairie : la dernière fois, ou plutôt la seule fois, qu’il avait eu un livre écrit par un moldu, il n’avait guère eu le temps d’en profiter avant qu’il ne lui soit confisqué. Aller dans une librairie était donc un beau pied de nez qu’il faisait à son père, bien que celui-ci n’en aura certainement jamais connaissance.

Dmitri pénétra dans la boutique : à son grand soulagement, il n’y avait pas foule. Seules quelques personnes arpentaient les rayons, ce qui rendait le lieu plus agréable que s’il était bondé. Il salua poliment d’un geste de la tête la personne la plus proche de l’entrée avant de parcourir quelques rayons, jetant quelques regards furtifs aux livres en espérant tomber sur une étale qui pourrait l’intéresser. Il dédaigna la première partie de la librairie, où rien n’attira l’attention ; les biographies et autres ouvrages portant sur la faune et la flore de divers coins de la planète ne l’intéressaient guère. Son intérêt se porta finalement sur des livres évoquant certaines technologies dont les noms lui étaient totalement étrangers. L’un promettait une découverte des dessous d’une chose appelé « internet » à travers une étude du « dark web ». Dmitri fronça les sourcils en lisant la quatrième de couverture ; s’y enchaînaient des mots n’ayant pas le moindre sens pour la graine de sorcier qu’il était mais qui, compte tenu du manque d’explications apportées, devaient paraître tout à faire compréhensible pour un moldu. Un véritable charabia... autant prendre un livre rédigé en langue aquatique. Il jeta finalement son dévolu sur un ouvrage retraçant le parcours des premiers hommes ayant posé les pieds sur la lune.

Le livre en main, il se rendit au niveau du comptoir. « Bonjour, fit-il à la première femme qu’il y vit, je voudrai vous acheter ce livre. Combien coûte-t-il ? » Accompagnant du geste la parole, il posa l’objet de ses désirs sur le comptoir et commença à fouiller dans sa poche pour en sortir son argent. Il avait déjà acheté le contenu de la liste fournie par Poudlard et ses grands-parents maternels lui ayant offert un hibou, il lui restait un peu d’argent pour se faire plaisir. Mais au moment où il baissa les yeux vers sa main pour trier sa monnaie, il réalisa l’erreur qu’il venait de commettre : la paume de sa main abritait assez d’argent pour acheter un livre... en mornilles et en gallions. Il referma vivement sa main, priant intérieurement que la vendeuse n’ait pas vu les grosses pièces argentées et dorées. « Euh, je suis désolé... je crois que j’ai oublié de... convertir ma monnaie tchèque en monnaie anglaise ! » dit-il précipitamment, hésitant quelques instants pour trouver une excuse crédible. L’espace d’un instant, il douta : les moldus anglais avaient-ils une monnaie différente des moldus tchèques ? Sans doute... et dans le cas contraire, il n’avait plus qu’à espérer qu’elle ne le sache pas.

Cela faisait maintenant plusieurs semaines que Alice avait pris la responsabilité de Zeynep. Les débuts avaient été difficiles. Puis, elle avait conduit la fillette au train pour ses vacances et était elle-même partie comme elle l'avait prévu au départ avec Hope. Au chalet du Pic des Dames, elle avait eu la surprise de retrouver son ami Rowan, avec qui elle avait partagé une partie des activités prévues par le programme. Elle avait également fait la connaissance de Sarah Davenport, qui allait intégrer l'école à la rentrée prochaine. Et maintenant, Zey, Hope et elle passaient du temps à la librairie à aider sa mère avant de retourner à Poudlard.

Aujourd’hui, la librairie n'était pas trop remplie, même si les filles avaient pas mal de clients. Alice avait pris la responsabilité de la caisse pendant que Hope et Zey étaient chargées de renseigner les clients dans les rangées du magasin. Emily s'occupait de la comptabilité dans l'arrière-boutique. Alice sourit au jeune homme qui s'approchait avec un livre qui lui tendit pour l'acheter. En le prenant, Alice aperçut dans sa main quelques pièces qui ne lui étaient pas inconnues, mais qui n'avait rien à voir avec de l'argent moldu. Le garçonnet tenta de le dissimuler en prétextant qu'il s'agissait d'argent tchèque. Alice fut surprise de rencontrer un petit sorcier dans sa librairie, mais elle voulut lui faire plaisir. Elle décida de lui vendre ce livre et elle régulariserait

« Tu as de la chance, dans cette boutique, on prend l'argent tchèque. Ça ne te coûtera qu'une mornille » lui dit-elle avec un clin d’œil, pour qu'il sache qu'elle parlait bien d'argent sorcier et non tchèque.

Elle prit le livre dans ses mains et en lu le titre tout en entrant les informations dans la caisse pour pouvoir procéder à la transaction. Le sujet ayant trait à la lune, cela la fit sourire légèrement en pensant à son meilleur ami, qui aimait tellement l'astronomie. Si ce petit bonhomme était un élève de l'école, nul doute qu'il devait être dans le top des favoris d’Aidan O’Neill.

« Tu t'intéresses à l'astronomie ? »

La femme qui l’accueillit au comptoir lui sourit lorsqu’il s’approcha du comptoir. Lorsqu’elle déclara prendre l’argent tchèque, Dmitri déglutit ; pris au piège dans sa propre excuse, il allait devoir trouver une autre échappatoire, car si la vendeuse prenait bel et bien les couronnes tchèques, il ne lui faudrait guère plus de quelques secondes avant de réaliser que les pièces qu’il avait en main n’en étaient pas. Mais avant qu’il ait le temps de réfléchir à un moyen de se sortir de cette situation rocambolesque, elle ajouta que le livre ne lui couterait qu’une mornille ; levant subitement les yeux vers la femme, il surprit son clin d’œil complice. Une sorcière dans cette boutique de moldu ? Le jeune tchèque était soit très chanceux, pour tomber ainsi sur quelqu’un de son monde alors qu’il n’avait pas pensé à changer son argent, soit malchanceux car une fois de plus, il se trouvait entouré de sorciers alors que son désir était de découvrir autre chose.

Dmitri jeta un regard autour de lui, vérifiant qu’il n’y avait personne d’assez proche pour les entendre. « Vous êtes une cracmol ? » demanda-t-il tout en donnant ladite mornille. Il avait été naïf de penser, en premier lieu, qu’il s’agissait d’une sorcière : une sorcière ne travaillerait surement pas dans une librairie moldue, mais quelqu’un issu d’une famille de sorciers sans pour autant être doté de pouvoir... c’était sans doute possible, surtout si elle venait d’une famille comme la sienne. « J’ai un oncle cracmol. » ajouta-t-il, comme pour assurer la femme qu’il n’allait pas l’insulter de tous les noms. Bien entendu, il n’avait jamais rencontré le frère aîné de sa mère, celui-ci ayant été banni de la famille. Il ne savait même pas comment il s’appelait ; son nom appartenait au passé. Mais ça, la vendeuse n’avait pas besoin de le savoir : il ne serait guère très fin de souligner que les cracmols étaient mal perçus dans la plupart des milieux, ce serait enfoncer une porte ouverte... porte qu’elle avait sûrement dû se prendre de pleine face à de nombreuses reprises.

La femme prit son livre des mains et entreprit de faire son office à l’aide d’une machine moldu qu’il regarda avec attention, toujours amusé de voir ces inventions fonctionner, quoique celle-ci ne soit pas d’une complexité aussi surprenante que pouvaient l’être d’autres créations moldues. Il fut un peu surpris lorsqu’elle lui parle d’astronomie, avant de réaliser qu’elle faisait référence à l’ouvrage qui faisait l’objet de ces désirs. Il haussa les épaules : « Je ne sais pas vraiment... c’est surtout le côté technique de l’exploration spatiale qui m’intéresse ici. » Rangeant le reste de son argent dans sa poche - inutile que de vrais moldus voient les étranges pièces -, il poursuivit : « C’est fascinant de voir comment les moldus font sans magie. » Dmitri restait sur ses gardes, surveillant du coin de l’œil les clients de l’échoppe, aucun ne faisant mine d’approcher d’eux.

Le jeune garçon sembla à la fois soulagé et perturbé en comprenant qu’Alice connaissait le monde des sorciers et était même capable de lui procurer le livre en échange d'argent provenant de ce monde. Discrètement, pendant qu'il payait, il lui demanda si elle était une Cracmol. Il était vrai que la librairie était moldue et qu'il était donc peu cohérent qu'une sorcière y travaille. Mais, en l'occurrence, il ne s'agissait que d'un travail qu'elle faisait lors de vacances pour aider sa mère, comme elle le faisait quand elle était elle-même à Poudlard. Du coup, c'était un peu différent, comme concept.

« Non, non ! Je suis bel et bien une sorcière » murmura t-elle à l'égard du jeune garçon. « La libraire et ma mère et je l'aide pendant mes vacances. Je suis arithmancienne. Tu sais ce qu'est l’arithmancie ? »

Alice sourit gentiment en répondant à sa question et en l'écoutant parler de son oncle qui était cracmol. À l'écouter parler, il était probable que cet oncle était le mouton noir de la famille et que le jeune garçon n'avait sans doute pas eu de ses nouvelles depuis fort longtemps. Du moins, c'était ce que Alice présentait.

« Comment t'appelles-tu ? Tes parents sont venus ici avec toi ? »

La jeune femme ouvrit des yeux surpris quand le garçon lui expliquait que ce qui l’intéressait, c'était la façon dont les moldus, techniquement, faisaient pour aller dans l'espace. Apparemment, les techniques moldus intéressaient ce jeune garçon qui ne devait pas beaucoup les connaître. De toute évidence, ce n'était pas un né moldu. Alice demanda s'il appartenait à une riche famille de sorciers au sang pur. Si tel était le cas, ses parents n'apprécieraient peut-être pas de le savoir ici dans sa boutique.

« Les Moldus sont assez fûtés. Tu n’auras pas toute la technique de l’aérospatial dans ce livre, mais tu devrais apprendre pas mal de choses. Si tu veux en savoir plus, il y a des encyclopédies qui en parlent. Je pourrais te conseiller quelques ouvrages. Dans le thème que tu voudras, d’ailleurs. »

Une sorcière dont la mère était la tenancière d’une librairie moldue ? Dmitri pouvait presque entendre la voix de sa propre mère lui susurrer avec dégout : une sang-mêlé... ou pire, une sang-de-bourbe. Mais le garçon chassa cette pensée de son esprit ; même à des centaines de kilomètres, ses parents semblaient toujours là pour contrôler ses relations. « Oui, je sais ce que c’est ! » fit-il, un peu vexé qu’on lui pose la question. Son éducation comportait une introduction aux grandes disciplines magiques ; s’il n’avait jamais eu de réels cours d’arithmancie, au moins avait-il appris ce que c’était. Un de ses oncles paternels avait d’ailleurs coutume de dire que Dmitri ne pouvait avoir qu’un glorieux avenir ; le septième enfant d’un septième fils, compte tenu des propriétés magiques du chiffre 7, ce ne pouvait qu’être annonciateur de grandes choses disait-il. Le garçon n’avait jamais réellement su en quoi le chiffre 7 était particulier, n’ayant pas daigné s’y intéresser plus que nécessaire. « C’est l’étude des propriétés magiques des chiffres. » ajouta-t-il à la manière d’un élève répondant à la question de son instituteur.

Au bout de quelques instants, la sorcière lui demanda son nom. Si elle n’avait pas évoqué ses parents, sans doute se serait-il présenté comme à son habitude, énonçant son nom à la manière de ces familles fières de leurs familles comme on lui avait appris. « Je m’appelle Dmitri » répondit-il plus sobrement. Se présenter comme un van Aken ne lui paraissait pas une brillante idée ; ce nom était assez illustre pour qu’il craigne de tomber sur des sorciers l’ayant déjà entendu et pour une fois que son patronyme ne planait pas au-dessus de Dmitri, il comptait bien profiter de cette liberté. « Non, ils sont en République Tchèque... je suis en vacances juste à côté d’ici. » Une part de mensonge, englobée d’un peu de vérité. Ainsi, il restait le jeune tchèque de passage dans les environs ; on était moins tenté de s’intéresser à un enfant qui repartirait dans son pays sous peu, et qu’on avait aucune chance de revoir un jour. Par ailleurs, il préférait annoncer de but en blanc que ses parents n’étaient pas dans les parages : les adultes avaient beaucoup trop l’habitude de toujours vouloir parler aux géniteurs.

Dmitri fut tenté d’accepter la proposition de la libraire en intérim, mais il n’était sans doute pas très judicieux de rentrer au manoir avec plusieurs livres moldus sous les bras ; un passait encore, il pouvait le glisser discrètement dans son sac sans que son grand-oncle, ou un tableau aux yeux trop indiscrets, le voit. Mais il ne pouvait y ajouter une encyclopédie aussi aisément. « C’est gentil... mais je vais déjà commencer avec ça. Je retourne bientôt à Prague, je n’aurai pas d’autre occasion de venir ici. » Ou de venir dans n’importe quelle autre librairie moldu.

Le garçonnet avait l’air un peu vexé que Alice lui demande s’il savait ce qu’était l’Arithmancie. Mais il n’était pas encore en Première Année et la plupart des élèves de cet âge, y-compris les sorciers, ne le savaient pas. Mais la définition qu’il en donna n’était pas mauvaise et mit un sourire sur le visage d’Alice. Il avait l’air d’avoir des connaissances magiques au-delà de son âge. Il allait promettre d’être un élève de qualité pour son école, il avait l’âge d’étudier la magie. Alice n’était pas certaine qu’on entrait au même âge dans toutes les écoles, mais elle le supposait.

« Excuse-moi si je t’ai vexé, mais la plupart des sorciers de ton âge ne le savent pas. Mais oui, tu as raison, c’est ça. »

Il se présenta avant de préciser qu’il était en vacances sans ses parents. Il venait apparemment de Tchécoslovaquie. Il parlait plutôt bien anglais pour un tchèque. Elle accueillit sa présentation avec un franc sourire.

« Enchanté, Dmitri, je m’appelle Alice Cooper. »

Le garçonnet avait l’air timide. Mais l’était-il par nature ou parce qu’il était un sorcier dans un milieu moldu, Alice n’avait aucun moyen de le savoir. Elle était curieuse de lui comme elle était curieuse de tout et de tout le monde. Elle se demanda s’il avait choisi de ne pas dire son nom ou s’il n’y avait seulement pas songé. Mais peut-être portait-il un nom connu. Cela dit, Alice ne voulait pas le mettre mal à l’aise. Elle lui proposa gentiment de lui indiquer d’autres ouvrages en lien avec celui qu’il avait acheté. Mais il refusa, arguant qu’il n’aurait probablement pas la possibilité de revenir.

« Je comprends. J’espère que ce livre te plaira. Si c’est un sujet que tu trouves passionnant, je connais quelqu’un qui est particulièrement doué en astronomie. Tu n’auras qu’à m’envoyer un hibou et je vous mettrai en contact. »

Elle ponctua sa proposition d’un sourire et d’un clin d’œil.

Les joues de Dmitri s’empourprèrent légèrement alors que l’arithmancienne notait sa réaction quelque peu offusquée. Il hésita entre la fierté d’avoir apportée une bonne réponse et la gêne lorsqu’elle lui fit remarquer la beaucoup de sorciers de son âge n’étaient pas capable d’y répondre ; en effet, une personne n’ayant pas été élevé dans une famille de sorciers soucieux d’instruire au maximum leurs enfants avant l’entrée en école de magie n’aurait pu y répondre. Là encore, par sa réponse, il trahissait son appartenance à un milieu facilement identifiable, ce qu’il ne souhaitait pas faire. Au contraire, il aurait préféré pouvoir faire une croix sur cette part de lui qu’il détestait tant, sa famille étant un sujet de discorde chez lui.

La sorcière se présenta à son tour, et le garçon inclina légèrement la tête en entendant son nom, en guise de salutation. Les habitudes étaient coriaces : puisqu’on lui avait toujours inculqué une forme de respect envers autrui, il était dans sa nature de faire un signe de déférence. Cette manie pouvait être assez absurde, mais reflétait à la perfection ce qu’il était : un garçon à l’allure policée, capable de charmer les adultes par quelques formes de respect pas toujours tout à fait honnête mais qui, par ailleurs, demeurait un petit garnement aimant la défiance et particulièrement susceptible de prendre part à des situations de conflit.

Après qu’elle l’eut proposé de le mettre en contact avec une personne qualifiée en astronomie, un simple hibou suffisant à lui en faire la demande, Dmitri s’apprêta à prendre congé. Il fut néanmoins stoppé dans son élan pour une question qui lui trottait dans la tête ; puisqu’il avait face à lui une sorcière maîtrisant les arcanes de l’arithmancie, autant en profiter pour en apprendre plus sur cette discipline dont il n’avait eu que quelques bribes, par ailleurs souvent partielles en raison du manque d’intérêt qu’en avaient les membres de sa famille chargées de son éducation. « Dites, ça fait quoi au juste une arithmancienne ? Je sais que vous étudiez les propriétés magiques des chiffres, mais concrètement, en quoi consiste votre métier ? » Il eut quelques instants de réflexion, apportant une première tentative de réponse à sa propre question. « Vous êtes payés pour prédire la vie des gens avec les chiffres ? » Le garçon peinait à imaginer à quoi pouvait bien ressembler la vie d’une arithmancienne ; son père avait toujours dénigré certaines formes de magie tenant à la voyance, ce qui poussait inconsciemment Dmitri à faire de même et, bien que l’arithmancie fonctionne d’une manière tout autre, il assimilait donc cette discipline à la voyance. Comme toujours, il cherchait néanmoins à entendre un son de cloche différent, qui puisse contredire celui de son géniteur, tout ce qui allait dans le sens opposé de ce dernier étant bon à prendre à ses yeux.

La discussion entre une vendeuse et son client se limitait généralement à la transaction effectuée. Mais dans le cas d’un enfant, surtout d’un enfant sorcier, mais également tout enfant curieux, Alice prenait généralement le temps de parler pour comprendre à quoi il s’intéressait et éventuellement le conseiller sur des ouvrages adaptés à ses besoins. En l’occurrence, avec Dmitri, elle était curieuse de son intérêt, et avait envie de l’ouvrir sur le monde moldu. S’il venait, comme elle le supposait, d’une grande famille de sorciers, il était intéressant de lui apprendre des choses sur le monde moldu, pour lui permettre d’appréhender ce monde qu’il ne devait pas connaître.

Mais après qu’elle eut proposé de le mettre en contact avec Aidan, l’enfant sembla estimer que la conversation était terminée. Il était sur le point de repartir quand quelque chose sembla traverser son esprit, interrompant son geste. Il interrogea alors Alice sur son propre travail. La jeun femme en fut extrêmement contente, et flattée également. Elle aimait beaucoup parler de son métier et de sa passion. Les questions du garçonnet faisaient donc écho à la partie passionnée du caractère de la future prof. Elle se demanda jusqu’à quel point elle pouvait lui parler des recherches effectuées par son équipe.

« L’étude de la personnalité est la part basique de l’étude de l’Arithmancie, ce qu’on étudie à Poudlard. Mais les chiffres en magie et leurs puissances peuvent servir pour améliorer la puissance de certains rituels, ou pour optimiser les quantités d’ingrédients en potion. Les chiffres ont une puissance magique qui leur est propre et selon le résultat que tu veux obtenir, tu vas te concentrer sur un chiffre en particulier. Les recherches de mon équipe se basent actuellement sur les propriétés spécifiques du chiffre 3, en lien direct avec l’impact de ce chiffre également dans la culture moldue. »

Alice savait que pour la plupart des personnes, les éléments les plus évolués de l’étude arithmancienne étaient un véritable mystère. Et elle se demandait, malgré tout, ce que les recherches allaient donner, maintenant qu’elle ne serait plus avec eux pour étudier.

Lorsqu’il la questionna, l’arithmancienne ne fut pas avare en explication, tant et si bien qu’il en oubliait que le temps s’écoulait toujours, et qu’il devait prendre garde à ne pas revenir trop tard sur le chemin de traverse. L’enfant y était allé pour acheter tout ce dont il avait besoin pour sa scolarité, mis à part la baguette qu’il avait obtenue à Prague dans la boutique pour laquelle son grand-père travaillait autrefois comme sculpteur de baguette. Profitant d’un moment qu’il pouvait passer seul, loin de la surveillance de son grand-oncle, il s’était donc éclipsé, estimant que tant qu’il reviendrait à une heure descente, ça n’attirerait pas l’attention du patriarche.

Écoutant avec attention ses explications, il répondit du tac au tac : « Ah, je ne savais pas qu’on étudiait l’arithmancie à Poudlard. » Machinalement, s’étant fait à l’idée qu’il allait finalement aller dans l’école de sorcellerie anglo-saxonne plutôt qu’à Durmstrang, il avait utilisé le pronom personnel « on », oubliant l’espace d’un instant qu’il se faisait passer pour un garçon en vacances qui ne tarderait guère avant de retourner vivre à l’étranger, donc loin de l’école basée en Écosse.

Espérant que la sorcière n’ait pas remarqué cette erreur, il tenta de détourner l’attention avec une nouvelle question : « Les moldus ont également l’arithmancie ? » Sa voix laissait transparaître un réel étonnement en apprenant qu’il existait une corrélation dans la culture moldue avec certaines propriétés d’arithmancie. Il imaginait les mondes sorcier et moldu tellement cloisonnés, à la manière de son éducation, qu’il n’avait jamais pensé que ceux dépourvus de magies puissent partager plus que de vieilles légendes tirées de créatures existant véritablement, bien que cachées à leurs yeux.

Il lui était assez étrange de réaliser qu’une chercheuse puisse étudier un domaine magique au regard de la culture moldue, étant certainement trop habitué à entendre dire que celle-ci ne représentait pas un intérêt suffisant pour qu’on puisse s’y intéresser. C’était d’ailleurs la raison qui faisait qu’à Durmstrang, l’étude des moldus n’existait pas.

L’enfant paraissait intéressé par ce que Alice avait à raconter. La jeune femme était impressionné par la curiosité du garçonnet, compte tenu de son jeune âge, et songea que son école de sorcellerie aurait beaucoup de chance de l’avoir. Il serait sûrement un élève assidu et intéressé. Mais il ne savait pas que dans l’école où Alice allait travailler, on enseignait l’Arithmancie. Elle se demanda si c’était une matière qui n’existait pas dans l’école où le garçon allait étudier ou s’il n’était simplement pas au courant. Ce n’était pas impossible. Même à Poudlard, certains jeunes élèves découvraient les matières optionnelles au moment de les choisir, ce qu’elle trouvait dommage.

Elle ne releva pas le « on » spécifiquement, étant un pronom générique qu’elle comprit comme une réalité un peu générale sur ce qui se passait à Poudlard et non comme une inclusion personnelle du garçon. Ce fut donc sans comprendre qu’il allait devenir un élève de l’école qu’elle répondit à sa remarque concernant l’étude de l’Arithmancie à l’école. Elle ne pouvait pas lui dire qu’elle allait devenir professeur car Hope n’était pas loin, elle n’était pas encore arrivée à le lui dire. Mais elle pouvait lui expliquer le fonctionnement de l’école, si ça l’intéressait. Elle, ça ne la dérangeait pas.

« Les troisième année doivent choisir plusieurs options parmi l’Arithmancie, l’étude des Moldus, le Soins aux Créatures Magiques, la Divination, l’étude des Runes et le vol. Tu as une idée de comment les choses se passeront sur ta future école ? »

Lorsqu’il l’interrogea sur les liens entre l’Arithmancie et les moldus, Alice sourit. Il y avait des sciences qui étaient à cheval sur la magie et les moldus, comme l’astronomie, mais ce n’était pas le cas de l’Arithmancie. Par contre, cette matière se basait sur les mathématiques et ça, ça avait une certaine influence qui provenait des moldus. Mais si cela impactait les recherches, on ne pouvait pas dire que les moldus étaient réellement inclus dans le système. Ni qu’ils avaient fait des recherches de leur côté. Mais les chiffres étaient ce qu’ils étaient et ils provenaient essentiellement de la culture moldue.

« Non, les moldus n’étudient pas l’Arithmancie, mais ils sont sensibles aux influences, sans vraiment s’en rendre compte. Du coup, les chiffres et les nombres qui sont importants dans leur culture peuvent être intéressants à étudier afin de savoir comment ils peuvent influer la magie. »

La sorcière ne fit pas de remarque sur Poudlard ; qu’elle n’ait pas noté sa manière d’en parler, ou qu’elle ait simplement choisi de ne pas en parler, Dmitri était au moins rassuré sur le fait qu’il n’ait pas à s’embourber un peu plus encore dans ses pieux mensonges. Son choix de cacher son identité et le fait qu’il soit désormais un résident du pays anglo-saxon avait été fait assez naturellement, sans réellement y réfléchir. L’expérience de ces derniers jours, et surtout ce que lui avait dit son grand-oncle, le laissait à penser qu’il valait mieux ne pas trop en révéler. Si à Poudlard, il ne pourrait y échapper bien longtemps, il pouvait se payer le luxe d’être quelqu’un d’autre face à cette sorcière.

Alors que l’arithmancienne lui expliquait le système éducatif de sa future école de sorcellerie, le garçon réalisa qu’il n’en savait en réalité que très peu sur l’établissement. Excepté l’existence des différentes maisons, dont il avait entendu parler grâce à son grand-père, et qu’elle accueille les nés-moldus, à l’inverse de Durmstrang, il n’avait pas réellement cherché à en savoir plus, ce qui ne l’empêchait pourtant pas de se réjouir d’y aller. Le simple fait que sa mère juge Poudlard décadente suffisait à lui faire dire qu’il y serait bien mieux que dans la mystérieuse école nordique. « C’est à peu près la même chose à Durmstrang... aucun de mes frères et sœurs ne m’ont parlés de cours d’arithmancie, mais l’un de mes oncles a dû en avoir, donc j’imagine que c’est aussi en option. » répondit-il, repensant aux prétendues propriétés du chiffre 7 dont parlait ledit oncle.

Le visage de Dmitri passa de l’excitation à la déception en entendant évoquer l’étude des moldus ; d’abord réjouis à l’idée d’avoir de tels cours, puis dépité en apprenant qu’il lui faudrait attendre la troisième année. Et ce dans le meilleur des cas ! Alexander serait bien capable de le dissuader très fortement de choisir cette option. « Par contre, il n’y a pas d’étude des moldus. Il y a beaucoup plus de cours sur la magie offensive, avec les duels et les différentes formes de magie martiales. »

L’enfant hocha la tête, pensif : d’un côté, s’il déchantait quelque peu face à son éclaircissement sur l’arithmancie et ses liens avec la culture moldue, il était également satisfait de cet enseignement sommaire dont il venait de bénéficier. Il n’y avait que peu de sujets qui n’intéressait pas de prime abord le tchèque ; il était d’une nature passionnée et appréciait donc tout particulièrement ce genre de découvertes. Bien entendu, cet aspect touche-à-tout rencontrait parfois le caractère assez instable du garçon, si bien qu’il se détournait de certaine discipline par lassitude ou ennui.

Visiblement, l’école de référence de Dmitri et donc probablement celle qu’il fréquenterait était Durmstrang. Alice ne savait pas à priori où les tchèques étudiaient la magie, mais Durmstrang n’était pas si étrange car l’endroit où l’école se situait, du moins ce qu’il était supposé, n’était pas très loin du pays d’origine du jeune garçon. Alice n’avait jamais aimé la réputation de cette école qui était apparemment plus orientée vers la magie noire et les formes de magie plus sombres. Alice trouvait que c’était dangereux d’orienter si jeune les enfants sur le chemin de la noirceur. Du moins, c’était ainsi qu’elle voyait les choses.

Alice hocha la tête, toutefois, face aux propos de Dmitri. Elle aurait été surprise qu’il y ait beaucoup d’école qui ne propose pas l’option d’Arithmancie. C’était un domaine d’étude de la magie assez spécifique et il importait d’avoir des arithmanciens un peu partout pour pouvoir accomplir des actes magiques ou construire des protocoles magiques en accord avec les principes de base en Arithmancie. Elle se demanda si elle avait assez intéressée le garçon pour qu’il choisisse sa matière en option, mais elle ne le saurait probablement jamais. Elle crut percevoir un peu d’amertume dans sa remarque concernant l’étude des moldus.

« Tu le regrettes ? Ca te plairait d’étudier le monde moldu ? »

Alice trouvait que le monde des moldus était fascinant quand bien même elle en était partie intégrante. Quand elle voyait ce que pouvait faire la magie, elle était fière de la façon dont les Moldus s’adaptaient à l’aide de la technologie à ce qu’ils ne pouvaient pas faire par magie. Et elle pensait que les sorciers qui ne connaissaient pas ces façons de faire pouvaient avoir envie de les découvrir. Cela dit, elle n’était pas sans savoir que la plupart des sang-purs trouvaient les moldus, de base, méprisables et inutiles.

« La culture moldue est passionnante. La façon dont leur intellect compense le manque de magie dans leur vie est assez fascinant, je trouve. »

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Dmitri regarda un instant le livre qu’il avait entre les mains. Nulle trace de magie dans l’exploit de ces moldus ayant été jusqu’à la lune. Les sorciers avaient-ils déjà fait de même ? Il savait que l’un d’eux s’était un jour vanté d’y être allé en utilisant un balai, mais la véracité de ses propos semblait fort critiquable.

Lorsqu’il releva les yeux vers la sorcière, il acquiesça d’un signe de tête en réponse à sa question. « Oui, c’est absurde d’en savoir si peu sur eux ! Chez nous, on vit tellement à l’écart des moldus qu’ils pourraient être une légende, je ne serai même pas au courant ! » Une forme de colère sembla s’installer dans sa voix, comme si le fait d’en discuter avec cette inconnue changerait le cours des choses. « Même les nés-moldus sont tenus à l’écart de notre monde. » Le souvenir des qualificatifs utilisés par son père, lorsqu’il parlait du diplomate français né-moldu, lui revinrent, comme une piqure de rappel. « Ils ne sont pas admis à Durmstrang » précisa-t-il d’un ton amer, ne sachant pas si l’arithmancienne connaissait bien l’école nordique.

Au fond, le garçon avait peur de devenir comme son géniteur, qu’avec les années il s’assagisse et accepte la vision isolationniste de sa famille. Être envoyé en Écosse était une première victoire pour lui, preuve qu’il avait tenu bon au point que ses aïeux estiment qu’il était trop risqué de l’envoyer à Durmstrang, mais il savait que son grand-oncle n’avait pas pour but de le laisser continuer sur cette lignée et qu’il était bien déterminé à faire de lui un digne héritier des van Aken. Certaines des promesses qu’il lui avait faites était assez alléchante pour que Dmitri soit tenté par une forme de docilité feinte ; depuis son départ de Prague et bien qu’il prenne peu à peu ses marques, il se sentait en terrain hostile. La guerre des idées qu’il avait menée contre ses parents prenait une autre mesure face à Alexander dont l’attention n’était pas diluée entre toute une fratrie.

« Vous au moins, vous connaissez le monde moldu... » fit-il légèrement grognon. Et ne risquez pas des coups de cannes pour vous y être intéressé, aurait-il pu rajouter.

(c) mars.

Le jeune garçon était apparemment un sang-pur provenant d’une famille qui était réticente à avoir des contacts avec les moldus. Ou peut-être un Sang-Mêlé. Mais en tout cas, ça famille ne semblait pas propice à lui faire connaître le monde Moldu et le jeune garçon semblait le déplorer, ce qui lui apportait automatiquement la bienveillance de la jeune libraire et arithmancienne. Elle approuvait l’esprit ouvert du garçonnet, qui ne se limitait pas aux préconceptions de ses parents et qui avait envie d’en apprendre plus sur ceux qu’ils ne connaissaient pas. C’était un signe de tolérance qui ne pouvait qu’être félicité par Alice.

« Je comprends que ça te dérange d’être coupé de toute une partie de la population, y-compris magique, d’ailleurs. Je suppose que les Nés-Moldus de Tchécoslovaquie doivent être orientés sur d’autres écoles. Je ne sais pas comment ça se passe exactement. Ca ne me semble pas très sécurisé de ne pas apprendre à un être possédant des pouvoirs comment les contrôler. Qu’en dis-tu ? »

Elle avait envie de faire réfléchir le garçonnet sur ses propres réflexions, de lui donner envie d’aller plus loin. C’était dommage qu’il fût étranger car Alice songea qu’il aurait de grandes chances de bien s’entendre avec Zey. Quand il lui fit remarquer qu’elle, au moins, pouvait avoir des contacts avec le monde Moldu, elle ressentit de l’amertume dans sa voix, et elle en fut ennuyée. Elle se demanda comment elle pourrait aider le jeune garçon et une idée lui vint soudain, mais elle ne savait pas s’il serait intéressé.

« Tu sais, si tu veux en apprendre plus sur les moldus, tu peux toujours m’envoyer des hiboux. Bien entendu, ça prendra peut-être un peu de temps pour leurs voyages, mais si tu as envie d’en apprendre plus sur ce monde que tu ne connais pas, je serais ravie de t’y aider. »

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« Je comprends que ça te dérange d’être coupé de toute une partie de la population, y-compris magique, d’ailleurs. Je suppose que les Nés-Moldus de Tchécoslovaquie doivent être orientés sur d’autres écoles. Je ne sais pas comment ça se passe exactement. » Le garçon hocha la tête d’un air pensif. Il n’avait pas réellement pensé à cette question, les seuls nés-moldus qu’il ait un jour côtoyé étant des expatriés représentant, pour la plupart, les intérêts politiques d’autres gouvernements sorciers, ceux-ci venant alors de pays plus ouverts qui donnaient une éducation aux nés-moldus. Mais les nés-moldus de son propre pays ? Il était évident que parmi le peuple moldu Tchèque, des sorciers voient le jours, comme dans toutes les autres nations. Il n’y avait pas de raison que la sienne fasse exception. « À vrai dire... je ne sais pas. » Dmitri se sentait un peu honteux de n’y avoir jamais pensé auparavant. « Je pense qu’ils doivent eux aussi quitter leur pays... pour un plus accueillant. » À cet instant, il ne pensait plus du tout à conserver son petit secret, ce pieux mensonge qu’il avait tricoté sans même y prêter attention pour conserver ce sentiment de liberté, quoiqu’il fût bien factice et on ne peut plus éphémère. « Déjà que de devoir aller dans une école étrangère, je trouve ça assez intimidant... mais quand on vient d’apprendre l’existence des sorciers, ça doit être particulier ! » ricana-t-il non sans ironie. Au moins avait-il quelques points communs avec ses compatriotes nés-moldus de Tchéquie ; lui-même s’était préparé à l’idée d’aller dans une école de magie internationale, principalement composée de Russes, de Bulgares et autres sorciers issus de pays nordiques, apprenant des bases linguistiques et culturelles essentielles mais étrangères à son éducation, pour finalement être envoyé à la dernière minute dans une école anglaise qui lui était bien plus étrangère que Durmstrang l’était déjà. Il avait beau avoir des origines anglaises, et avoir reçu une éducation impliquant la culture de ses aïeux, il n’en restait pas moins un étranger à Londres. « Ça ne me semble pas très sécurisé de ne pas apprendre à un être possédant des pouvoirs comment les contrôler. Qu’en dis-tu ? » Il opina une nouvelle fois du chef. « Je suis d’accord... les accidents sont inévitables ! Et j’imagine que si les sorciers rejettent les moldus... l’inverse doit être vrai aussi, non ? Les moldus pourraient être effrayé en voyant que certains d’entre eux sont différents... » Alors qu’il réfléchissait à haute voix, le discours de son grand-oncle sembla résonner dans son esprit, comme une funeste menace de ce que pouvait entraîner la présence de nés-moldus dans le monde sorcier. Un souvenir tenance d’une discussion qui l’avait bien plus marqué qu’il ne se l’avouait. Quelque part, il était partagé entre les deux opinions ; il ne pouvait nier que l’argument de son aïeul n’était pas infondé, il avait fait mouche dans l’esprit du tchèque, mais les objections de cette sorcière, dont l’avis semblait diamétralement opposé, amenait Dmitri au-devant d’une perspective moins injuste. Devait-il prôner la conservation et la protection de son monde, ou l’ouvrir aux nés-moldus au risque de faire du mal aux siens ?

« Tu sais, si tu veux en apprendre plus sur les moldus, tu peux toujours m’envoyer des hiboux. Bien entendu, ça prendra peut-être un peu de temps pour leurs voyages, mais si tu as envie d’en apprendre plus sur ce monde que tu ne connais pas, je serais ravie de t’y aider. » La proposition de l’arithmancienne semblait faire écho à ses pensées. Elle était la première adulte qu’il rencontrait à tenir un autre discours ; n’était-ce pas pour lui l’occasion de forger son esprit à ces objections dont il avait cruellement l’impression de manquer face à son aïeul ? L’enfant eut un léger sourire, une pointe de culpabilité l’envahissant. Celle-ci était pourtant loin de le décourager, bien au contraire. Son sourire s’élargit alors qu’il répondait, tout de même un peu intimidité : « C’est vrai ? C’est gentil de votre part. » Son ton était poli, presque formel. Face à quelqu’un qu’il ne connaissait que depuis quelques minutes, les instincts dictés par son éducation reprenaient le dessus. Lorsqu’il s’agissait d’exprimer de la gratitude, il n’était pas très à l’aise ; rares étaient les fois où il s’était retrouvé dans une telle position, et plus rare encore étaient-ils lorsqu’il s’agissait de quelqu’un n’étant pas de sa famille. Son père lui avait inculqué une forme de condescendance de laquelle découlait la croyance que tout, ou presque, lui était dû du fait de son sang.

Une nouvelle forme de culpabilité commençait peu à peu à s’immiscer en lui ; cette fois-ci pourtant, elle lui semblait moins facile à ignorer. Par réflexe, il lui avait menti. Un mensonge qui, s’il n’avait a priori pas de conséquences bien graves, demeurait tout de même gênant alors qu’elle lui offrait de l’attention sans, semblait-il, attendre quelque chose en retour.

(c) mars.

Dmitri ne savait pas davantage qu’elle ce que les Nés-Moldus des pays bulgares faisaient, mais la probabilité qu’ils ne doivent quitter leur pays pour un autre plus accueillant n’était pas tellement réjouissante comme une idée. Ces enfants découvraient déjà le monde magique, mettant une barrière entre eux et leur famille et en plus, ils devaient s’en éloigner irrémédiablement pour aller dans un autre pays. C’était cruel. Cela dit, peut-être que Durmstrang leur enseignait quand-même, mais en leur inculquant des choses qui les incitait à penser qu’ils étaient inférieurs. Ce ne serait guère une meilleure perspective cela dit. Alice avait de la chance de vivre en Angleterre.

« Cela doit être dur d’être expatrié loin de son pays natal », dit-elle, pensivement. « Et tu as raison, cela doit être quelque peu intimidant de découvrir la magie de cette façon. »

Dmitri avait vraiment saisi l’essentiel du problèmes si on refusait aux nés-moldus l’accès à l’enseignement de la magie. Non seulement le manque de contrôle pouvait générer des accidents mais aussi du rejet de la part des moldus ordinaires qui s’en prendraient à quelqu’un de différent d’eux. Ces enfants ne trouveraient leur place ni dans un monde ni dans un autre, quelle cruauté. On ne pouvait pas condamner des enfants à de telles choses, ce n’était pas raisonnable. Cela dit, Alice savait que bien pire avait été fait au nom de la pureté du sang. La cruauté des hommes était sans commune mesure.

« Rejeté d’un côté, rejeté de l’autre, cela doit être horrible pour ces enfants… »

Elle pensa à Aidan qui avait déjà mal vécu d’être rejeté par ses parents à la découverte de ses pouvoirs. Il avait trouvé un foyer dans le monde des sorciers mais que serait-il devenu si tel n’avait pas été le cas ? Il aurait sans-doute été abîmé par le choc et il ne serait peut-être pas devenu l’homme qu’il était aujourd’hui. Quand il la remercia pour sa proposition, Alice sourit gentiment à Dmitri. Il était peut-être un peu timide, mais il était visiblement gentil

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« Cela doit être dur d’être expatrié loin de son pays natal » Un sourire traversa furtivement son visage. Lui-même ne pouvait pas dire qu’il se sentait particulièrement affecté par son arrivée subite en Écosse, mais il voulait bien croire qu’il était un cas un peu particulier. Être débarrassé de ses frères et de la présence trop pesante de son géniteur dans sa vie valait bien un dépaysement. Et au fond, s’il se sentait pleinement tchèque et que Prague lui manquait, il avait toutefois reçu un semblant d’éducation anglo-saxonne ; une parodie d’anglicisme comparé aux natifs, mais au moins connaissait-il l’histoire sorcière de ce pays autant que celle de Tchéquie et il parlait déjà anglais malgré un accent bel et bien présent.

Le garçon hocha distraitement de la tête en écoutant la sorcière ; que des nés-moldus aient été rejetés par leur famille avait forcément dû arriver. Elle qualifiait cette idée d’horrible, ce qui était certainement le cas. Pourtant, Dmitri eut une pensée plus égoïste, qu’il chassa de son esprit presque aussitôt alors qu’une culpabilité d’une nature toute autre que celle issue de ses pieux mensonges l’envahissait. L’espace d’une seconde, il s’était imaginé, comme ces nés-moldus imaginaires, délivré de la mainmise de sa famille. Cette idée, aussi charmante soit-elle sur le plan de la liberté, fut remplacée par l’effarement alors que les bribes d’une discussion avec son grand-oncle lui revenaient sous la forme d’accusations.

Un peu chamboulé par ces pensées, puis par la proposition d’Alice Cooper, il resta un moment silencieux, les yeux rivés sur le livre qu’il tenait dans les mains. Ce n’était plus seulement sa malhonnêteté qui lui rendait la situation inconfortable ; à présent, il était également honteux d’avoir caché son patronyme. Sa mère lui avait inculqué l’idée que le nom de famille d’une personne était important, qu’il était porteur de bien plus de choses qu’un prénom. Or, il avait voulu cacher qui il était ; pris dans l’étau d’un semblant de superstition, il en vint à conclure que l’idée de ne plus avoir sa famille dans son sillage en était le corollaire.

« Je... je dois rentrer. On va s’inquiéter si je m’absente trop longtemps » Il battait en retraite. En quittant le chemin de traverse quelques minutes pour visiter le Londres moldu, il n’avait pas imaginé se retrouver à discuter politique d’intégration des nés-moldus, s’embourbant dans un mensonge par omission qui semblait peser sur une conscience qu’il ne pensait pas si douillette.

(c) mars.

Cette conversation qui n’aurait dû être que la vente d’un livre commençait à prendre une dimension philosophique. Heureusement, il n’y avait pas d’autre client qui attendait pour acheter un livre, parce qu’elle aurait un peu culpabilisé de les faire attendre trop longtemps. Mais elle était vraiment heureuse de bavarder avec ce petit sorcier et ses idées étaient tellement encourageantes qu’elle ne pouvait pas faire autrement que d’échanger avec lui. Sa famille de sang n’approuverait peut-être pas ce genre de débat philosophique qui pouvait de fait manquer au garçonnet. Alice aurait été ravie de prolonger l’échange, si cela avait pu lui faire plaisir.

En revanche, elle ne savait pas où se trouvaient ses tuteurs légaux mais ils ne l’avaient pas rejoints. Et Alice prit soudain conscience qu’ils ne savaient peut-être pas où le garçon avait trouvé refuge. Ils devaient sûrement s’inquiéter pour lui. Elle regretta de l’avoir retenu si longtemps. Si elle avait su, elle lui aurait conseillé de partir pour ne pas donner de souci à sa famille. Mais maintenant que l’enfant s’était rendu compte qu’on allait sûrement se demander où il était, il décida de partir de lui-même. Alice jugea la chose sage, elle se demanda seulement s’il parviendrait à retrouver son chemin seul.

« Je vais te raccompagner jusqu’où se trouve ta famille. Ou au moins jusqu’au chemin de traverse. Je ne voudrais pas que tu te perdes. Hope, tu tiens la caisse quelques minutes ? »

Elle ne lui laissa pas le choix, mais elle le laissa à l’entrée du Chemin de Traverse, à-partir du moment où il fut sûr de savoir où aller. Il était maintenant temps de reprendre le boulot et le rangement des bouquins dans les rayons. Hope ne lui laisserait pas reprendre la caisse si elle pouvait s’y reposer un peu, Alice en était sûre.

HRP:

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