Le mois de janvier s’était passé sans accrocs majeur, mais les emmerdes ne tardaient jamais à revenir une fois qu’elles étaient lancées. Et on avait beau avoir été sur le qui-vive avec les préfets, on n’avait pas vraiment vu venir qu’on serait entraînés par notre directeur de maison si tôt ce vendredi. La tension était palpable dans la salle commune, mais on s’efforçait d’essayer de calmer les ardeurs avec Tracy, avec des résultats plus que mitigés. Et avec Winslow qui était étonnement avare de précisions, ça n’allait pas aider. Malgré tout, je pris la tête du groupe tandis que Tracy fermait la marche, faisant en sorte de paraître le plus serein possible, bien qu’au fond je redoute ce que nous allions trouver. Notre trajet matinal se termina devant les portes de la bibliothèque, ouvertes sur un intérieur dévasté. De la fumée laissait penser qu’il y avait eu un feu, et au loin on pouvait voir de l’eau. Tracy rappela à nos camarades de maison de rester calme tandis que je restais sans voix devant le bordel qu’était devenu la bibliothèque. Et, cerise sur le gâteau, le directeur de la sécurité, dans son discours explicatif, fit aussi mention d’une disparition, en plus. Anthea, à mes côtés, résuma très bien la réaction de la plupart des élèves ici présent.
« J’en sais foutrement rien… »

Puis les consignes furent données. Les professeurs chargés de la surveillance hier soir furent pris à part, et pour le reste nous devions nous assurer que tout le monde était là, et récolter les baguettes pour s’assurer du dernier sort lancé. Je jetais un regard en biais à Anthea, dont la baguette avait fait des siennes depuis quelques jours. Etudier cette baguette ne ferait que révéler des échecs je pense. Et cette situation devait jouer sur son calme, puisqu’elle me tendit sa baguette d’un air passablement agacé.
« T’inquiètes va, on aura qu’à demander à Winslow s’il sait pourquoi ça déconne. »
Parler comme ça de trivialité était surtout une façon pour moi de me calmer. Tout ça ne me disait rien qui vaille, surtout avec une disparition dans le lot. Ce château n’aurait donc jamais le droit à une paix durable ? Après les mangemorts, voilà que c’était… On ne savait même pas en fait, et c’était ça qui était probablement le pire dans l’histoire. On ne savait toujours pas ce qui nous arrivait dessus, mais ça nous arrivait dessus.

Je pris donc les baguettes des Serdaigles en même temps que Tracy, sortant également la mienne pour la rajouter au lot, que je déposais ensuite sur la table à côté de Winslow. Je rejoignais ensuite les rangs tandis qu’on nous annonçait également des fouilles des dortoirs et des affaires de chacun. Je n’avais pas grand-chose à cacher, à part peut-être mon petit nécessaire à potions mais ce n’était rien de bien incriminant que d’avoir de quoi s’entraîner soi-même à faire quelques potions. Et ça n’avait aucun rapport avec ce qu’il s’était passé ici. Aux côtés de Casey, que j’avais rapidement salué d’un hochement de tête, et d’Anthea, j’attendais en silence les résultats de l’analyse de Winslow. Je ne savais pas vraiment quoi dire, je lançais juste de temps en temps des regards aux autres Serdaigle pour discerner s’il y en avait qui se sentaient un peu mal.

Le réveil ce matin se fit plus tôt que d’habitude, les aurors appelant dès le matin tout le personnel à la bibliothèque. Me préparant rapidement, je rejoins donc les lieux où l’on nous avait indiqué un nouvel incident, après un bon mois calme, et la surprise était de taille : le lieu avait été saccagé, des traces montraient qu’une partie avait été incendiée, et de l’eau au sol, coulant d’une canalisation, présentait quelques traces de sang. Aussi, quand M. Blackwood nous indiqua que le bibliothécaire était introuvable, il ne fut pas difficile d’imaginer que ce que nous craignions s’était réalisé : la créature qui avait déjà attaqué une poignée de professeurs avait profité de sa capacité à se déplacer dans les canalisations pour attaquer le bibliothécaire. On avait pourtant fait en sorte de protéger au mieux le château, mais ça n’avait visiblement pas été suffisant, cette canalisation était vieille et avait dû être omise. Quoiqu’il en soit, il nous fut indiqué d’aller chercher tous les élèves dans leur salle commune, et nous nous attelions rapidement à la tâche avec les trois autres directeurs de maison. Les trois étages qui séparaient la salle commune de Serdaigle et la bibliothèque n’auront jamais été aussi rapides…

Arrivé sur place, je me plaçais devant l’entrée, attendant qu’il y ait un peu de monde sortant du lit, et surtout les deux préfets.
« Bonjour. Je sais qu’il n’est pas courant pour vous de me voir ici, surtout si tôt, mais je vais vous demander de vous rassembler rapidement, puis de me suivre en silence. »
Mon ton et mon expression étaient graves. J’espérais au fond de moi qu’il n’y ait pas de coupables parmi ma maison, mais je ne pouvais m’empêcher de l’imaginer pour autant. Quand tous les élèves furent rassemblés, je les ramenais donc à la bibliothèque, les laissant aux côtés des autres maisons avant de rejoindre le petit groupe des aurors. Blackwood fit son discours, expliquant ce qu’il s’était passé ici, ainsi que les consignes qui allaient s’ensuivre. Mes collègues de garde hier soir allaient avoir une discussion avec le directeur, et pour moi, ça allait être une inspection des baguettes de chacun. On atteignait un certain niveau de fliquage, mais les temps nous demandaient des mesures drastiques. Si l’on voulait mettre un terme rapidement au fléau qui s’était de nouveau abattu sur le château, nous devions agir en conséquence. Quand Blackwood finit de décrire ma tâche, je fis un pas en avant pour confirmer ma coopération, me plaçant à côté d’une table pouvant accueillir les baguettes des élèves, et sortant la mienne au passage pour effectuer mes analyses.

Scrupuleusement, j’appliquais un sortilège de rappel aux baguettes, une à une. La plupart des baguettes ne donnaient rien de bien particulier. Des Lumos ayant sûrement servi aux lectures nocturnes, les sortilèges qu’ils avaient appris la veille, des sortilèges utilitaires. Rien ne donnait un sortilège qui pourrait correspondre au carnage ou à une partie du carnage qu’avait subi la bibliothèque. Les minutes passèrent, lentement sûrement pour ceux qui observaient. Je commençais à désespérer de trouver quoi que ce soit qui corresponde, jusqu’à ce qu’une baguette me ressorte un sortilège qui correspondait parfaitement, et qui ne rentrait clairement pas dans le cadre de l’apprentissage. Cette baguette en chêne blanc, environ 28 centimètres, ne m’était pas inconnue, et un frisson parcourut mon échine. C’était une baguette d’un élève de Serdaigle. Je préfèrerais ne pas avoir à afficher les élèves ainsi, mais au vu de la situation, c’était nécessaire. La sécurité, les aurors, n’accepteraient probablement pas de laisser les élèves partir sans un résultat. Après avoir terminé mon analyse afin d’être sûr qu’il n’y avait pas d’autre baguette correspondant aux méfaits, bien que le sortilège trouvé sur la baguette de miss Fancourt était bien trop invraisemblable pour imaginer qu’une autre pourrait correspondre, je leur demandais rapidement si je pouvais m’écarter un peu pour m’entretenir avec la propriétaire de la baguette à l’abri des oreilles indiscrète avant d’appeler cette dernière.
« Miss Fancourt, ainsi que vos deux préfets M. Thompson et Miss Bennett, veuillez me suivre je vous prie. »
J’appelais également les préfets de Serdaigle afin d’avoir une vision plus globale de ce qu’il avait pu se passer hier soir, voir si leurs versions de l’histoire étaient cohérentes entre elles. Je m’écartais donc un peu plus loin dans la bibliothèque, restant tout de même dans le champ de vision de Blackwood, avant de me tourner vers les trois élèves, et plus particulièrement miss Fancourt, lui montrant la baguette que j’avais gardé en main, et commençant l’interrogatoire avec un ton grave et une expression sérieuse.
« Ceci vous appartient, miss Fancourt, je me trompe ? C’est la seule baguette dont le dernier sort correspond à l’état des lieux. Et en plus de correspondre, il s’agit d’un sort loin d’être anodin. Ce que cette baguette m’a révélé n’est autre qu’un Incendio… Maxima. J’aimerais donc en savoir plus. Je vous déconseille de me mentir, si j’ai fait venir vos préfets c’est pour qu’ils puissent valider ou non votre version des faits. »

Si la rentrée après des vacances de Noël bien méritées avait été calme, le mois de Février ne s'annonçait pas aussi indulgent. À peine Lena commençait à penser à autre chose que ces maudits badges et ces maudites lettres que le château recommençait à être le témoin d'horribles événements. Le professeur Winslow s'était présenté dans la Salle Commune, ce qui n'était guère habituel. C'était soit très très bon, soit très très grave. À en voir l'expression du professeur, cette réunion de crise improvisée ne présageait rien de bon. Lena, qui venait tout juste de sortir du lit, suivit l'air complètement désorientée les autres Serdaigles en bas des marches. Elle portait encore son pyjama et le grand plaid noir de sa mère et elle s'empressa de se couvrir du mieux qu'elle put avec car les couloirs n'étaient pas aussi mieux chauffés que la Salle Commune. Les Serdaigles n'avaient aucune idée de l'endroit où leur professeur les escortaient et Lena jeta des regards interrogatifs à certains de ses camarades. Elle reconnut dans le tas Tracy, en tête du cortège aux côtés de Winslow, et cherchait vivement Ariel des yeux. C'était auprès d'elle que Lena voulait être à ce moment même. Peu à peu, les élèves de toutes les maisons se joignirent au groupe des Serdaigles et tous se retrouvèrent à la bibliothèque. Mais qu'est-ce que cela pouvait bien vouloir dire ? Soudain, lorsque les premiers élèves franchirent les portes, les premiers cris de surprise se firent entendre. Lena vit par la suite de ses propres yeux le spectacle: la pièce entière avait été saccagée, retournée dans tous les sens. Des pages par milliers gisaient arrachées à leur livres d'origine, des étagères avaient été brisées, et des aurors ainsi que certains professeurs se tenaient devant la scène l'air particulièrement grave. Toujours emmitouflée dans sa couverture, Lena essayait de se fondre le plus possible dans la masse et c'est là qu'un des aurors prit la parole.
Pendant son discours, tous les élèves se regardaient bouche-bée. Une disparition ? Elle ne connaissait pas le bibliothécaire plus que cela, préférant se débrouiller pour trouver ses livres par elle-même. Mais son absence ne la laissait pas de marbre. Si il avait été enlevé, il devait bien y avoir une raison. Et tout ce qu'elle voyait dans la bibliothèque saccagée ressemblait à un enlèvement. Quelqu'un devait sans doute chercher quelque information et s'était rabattu sur les connaissances d'Ethergsen afin de ne rien rater. Les préfets de chaque maisons se démarquèrent de la foule et passèrent dans les rangs, comme ordonné par Blackwood. C'est là que Lena remarqua Ollie dans le groupe des Poufsouffles. La jeune fille lui fit signe de la main, le regard inquiet et interrogatif. Elle ne voulait pas perturber le regroupement des maisons et rendre la tâche plus facile pour Tracy et Zach. Elle tendit sa baguette à son préfet et attendit. Pendant ce temps, Lena regardait autour d'elle à la recherche d'un visage familier. Elle aperçut Ariel qui était en pleine discussion avec deux autres Serdaigles. La brunette s'approcha discrètement de sa chère amie, un sourire forcé aux lèvres.
- Salut... souffla-t-elle aux trois Serdaigles sans une once de joie dans la voix. Ça y est ça recommence. J'espère qu'ils vont retrouver Ethergsen. Mais à quoi ça rime tout ça ?
Lena se tourna vers le coin des Serpentards. Elle espérait de tout cœur que Bonnie n'ait rien à voir avec tout cela cette fois-ci. Elle remarqua que beaucoup d'élèves avaient le regard tourné vers elle. La pauvre, cette histoire de mur ensanglanté lui collera à la peau encore longtemps ? Quoi qu'il en soit, la Serdaigle n'avait plus qu'une envie, c'était de retourner dans son dortoir, que les aurors effectuent leur fouille au plus vite et d'être débarrassée de cette histoire au plus vite.
Le temps passait, passait, et Winslow invoqua une élève de Serdaigle. Il s'agissait d'Anthea Francourt, une des poursuiveuse de l'équipe de Quidditch. Lena ne la connaissait pas vraiment avant d'avoir intégré l'équipe, et cela n'avait pas réellement changé, mais au vu de l'air grave du professeur, elle n'allait pas passer un bon moment. Aurait-on trouvé une coupable ? Tracy, Zach, Anthea et Winslow étaient beaucoup trop loin pour que Lena n'entende quoi que ce soit, mais elle essayait de tendre l'oreille au mieux et se dandinait afin d'avoir la meilleure vue entre les grands de septième année. Pas facile de récolter des informations. Elle tapota sur l'épaule d'Ariel et l'invita à regarder en direction des quatre protagonistes.
- Ariel, regarde. Tu la connais toi ?
Avec un peu de chance, Ariel assouvirait sa curiosité en lui en apprenant d'avantage sur cette jeune fille.