Russian Roulette is not the same without a gun ◆ Nikita & Kenneth

Russian Roulette

Keep your poker face

La perspective de passer une énième après-midi seul au château pendant que mes potes passent du bon temps au village m’est plutôt désagréable. C’est déjà la troisième sortie que je loupe cette semaine ! Maudire mes parents pour avoir refusé de m’octroyer ce privilège est un bon défouloir, mais cela ne suffit malheureusement pas à m’ouvrir les portes du château… Mais lorsque j’aperçois en contrebas des escaliers une tête connue, il me vient une idée. Quand j’y pense, mes parents ne sont pas là pour me dire ce que je dois faire. Je descends donc, le sourire aux lèvres. « Eh, c’est mon bon vieux pote Nicky, ça ! » lancé-je à l’adresse de mon camarade de Gryffondor, dont l’enthousiasme semble bien plus mesuré. Nous ne sommes pas vraiment amis, lui et moi. En fait, nous nous sommes rencontrés à ce gala de bienfaisance organisé par le ministère cet été, mais nos salutations étaient si protocolaires que c’est à peine si nous nous connaissons, en réalité. Je ne l’ai pas trouvé très causeur ni très démonstratif, voire même plutôt ennuyeux dans mes souvenirs, mais tout cela va bientôt changer. « Qu’est-ce que tu penserais d’aller faire un tour dehors ? Allez, on va bien se marrer. » Sans autorisation pour me rendre au village, j’ai conscience que je joue avec le feu. Heureusement, je ne manque pas de culot : je fais signe à mon camarade de me suivre pendant que je me présente devant August, à qui je présente un morceau de parchemin. Elle est en réalité couverte de griffonnages et de jeux du pendu amorcés avec Dash, mais le préfet dont j’ai les faveurs abonde dans mon sens en m’offrant la voie. Victorieux, je me tourne en direction de Nikita, à qui j’adresse un pouce en l’air, et nous franchissons ensemble les imposantes portes de l'école. Comme je m’y attendais, il n’est pas bien bavard sur le trajet… mais ça ne fait rien, ma liberté retrouvée est une consolation suffisante.

La plupart des élèves prennent ensemble la direction des Trois-Balais, dont l’enseigne caractéristique décorée d’une pinte de biéraubeurre est déjà visible, mais personnellement, j’ai une autre idée en tête. Je me saisis de la manche de ce cher Nikita, et l’embarque vers un chemin de traverse… Et nous voilà, vagabondant de ruelle en ruelle, sur des pavés jonchés de prospectus pour la prochaine foire agricole magique, qui aura lieu au début de l’automne. Nous contournons l’épicerie, où j’entends la vieille Vivian marchander ses potirons à un prix exorbitant, alors que tout le monde sait qu’ils sont rongés par les vers… Je laisse passer un vieux sorcier fou qui poursuit un niffleur avec un médaillon dans la gueule, et je fais signe à Nikita de prendre à gauche, là où le monde se raréfie. Nous descendons ensuite les escaliers qui longent le pont, et j’indique à Nikita un établissement à la devanture peu attrayante, dont la façade mal entretenue en dit long sur sa clientèle. La Tête de Sanglier n’attire pas les foules, mais c’est ce qui me plaît ici. J’ouvre le battant de la porte qui grince bruyamment, et laisse passer mon camarade, manifestement peu convaincu par l’endroit, avec une révérence exagérée…

Un bruit de coucou signale notre présence, et le gérant en train d’astiquer quelques verres lève les yeux de son comptoir. Lorsqu’il me reconnaît, il soupire et repose sa baguette. « Appleton, t’es enfin venu régler ton ardoise ? Elle est longue comme mon bras. » Je ferme précautionneusement la porte derrière moi. Imprégné d’une forte odeur de chèvre, l’endroit est comme à son habitude mal éclairé, bien moins chaleureux qu’aux Trois-Balais. Quelques pichets de McSpratts lévitent entre tables de sorciers à la mine renfrognée, et au comptoir les habitués sont déjà accoudés, tous occupés à leurs paris sportifs. J’agite ma bourse, espérant le séduire par le tintement de quelques gallions. « T’inquiète Joe, c’est le ministre de la magie qui offre sa tournée aujourd’hui. C’est pas génial, sérieux ? » Tu parles, j’imagine déjà la tête de mon père s’il savait que je contournais son interdiction. J’affiche une mine réjouie, et fais signe à mon camarade de me suivre à l’intérieur, malgré ses réticences évidentes. Depuis que j’ai fait la connaissance de ce fils d’ambassadeur rigide comme un chef d’orchestre, j’ai comme une envie de décoincer un peu… À mon avis, il y avait bien moins d’occasions de s’amuser, dans son école russe. Je désigne la grande table au fond, sous la vieille potence en bois à laquelle est suspendue la fameuse tête de sanglier. « Et on va participer à la tablée de poker sorcier, je fais découvrir la culture locale à mon pote. » annoncé-je, non sans fierté. Ce n’est pas comme si je lui laissais le choix, de toute façon… Nos familles respectives sont blindées, alors on devrait pouvoir mettre quelques ronds au centre de la table. Je tire une chaise et m’y installe. « Alors mec, dis-moi, qu’est-ce qu’on boit en Russie ? » Eh bien quoi, mes géniteurs ingrats m’ont suggéré de faire sa connaissance, non ? Alors ils devraient s’estimer heureux que je prenne cette tache très à coeur.

@Nikita N. Yaga

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Être fils d’ambassadeur en Russie, si cela avait des avantages, impliquait également quelques tâches rébarbatives. Celle de passer du temps avec les enfants des personnes importantes, les occuper, les materner pendant que leurs parents discutaient de choses sérieuses, en faisait partie. En bon petit soldat, Nikita avait joué son rôle pendant l’été, et parce que les adultes semblaient toujours trouver important de trimballer leurs précieux rejetons dans leurs jupons lorsqu’ils sortaient parler affaire, c’était lui qui écopait de la corvée de leur faire la conversation.

En règle générale, ce n’était pas passionnant. Il y avait bien eu quelques après-midi mémorables, comme cette fois avec le Coréen, ou l’autre, quand il avait démasqué une espionne du ministère, parce que ces deux-là avaient sensiblement son âge, mais le plus souvent ce petit jeu tournait à la conversation fade avec des gosses qui n’avait rien de plus intéressant à dire que de lui parler de leurs animaux de compagnie ou de leurs devoirs de vacances. Si c’était ça la politique anglaise, il plaignait son père qui en avait fait un métier.
Dans le méli-mélo de journées enchaînées de son été, sa rencontre avec Kenneth avait été un épisode comme un autre, avec ceci de plus que ce n’était pas pendant l’après-midi qu’il avait rencontré le jeune homme, mais en soirée, à l’occasion d’un gala de charité organisé par le ministre de la Magie de Grande-Bretagne. L’occasion de serrer la main de monsieur et madame Appleton, de constater que, contrairement aux rumeurs, le fait d’être tous deux nés-moldus n’influençait pas spécialement leur odeur – la dame avait même un parfum plutôt grande classe que Nikita identifia comme un mélange de prune et d’aubépine, ainsi que de faire connaissance avec leur fils aîné – et unique. Ils avaient passé a soirée à bavarder sagement en s’enfilant des petits fours et Nikita, conformément aux instructions de son père, avait fait un effort de sociabilité, lancé quelques conversations qu’il jugeait intéressantes, sur les relations diplomatiques anglo-françaises, les traités liant Poudlard et Beauxbâtons ou juste savoir si Kenneth se plaisait bien à Poudlard et si sa maison avait gagné la coupe de quidditch l’année précédente, mais le jeune homme n’avait pas semblé très impliqué dans la conversation, qui avait tourné court.

La rentrée aidant, Nikita avait pensé à autre chose et fut sincèrement pris par surprise lorsque, l’apostrophant d’un étage du dessus, Kenneth refit surface dans sa vie.

- C’est Nikita, et non Nikiça le corrigea-t-il avant de tendre la main. « Bonjour Kenneth. »

Se rappelant les instructions de son père, il rentra en lui-même, prêt à s’impliquer dans une nouvelle conversation banale, mais les choses ne tournèrent pas exactement comme prévu et sans qu’il comprenne ce qui était en train de se passer, entraîné dans le tourbillon du Poufsouffle et l’espèce d’énergie impérieuse qu’il mettait dans le moindre de ses gestes, il se retrouva en sa compagnie à Pré-au-lard, un quart d’heure plus tard. Et tant pis pour sa séance de devoirs.

Mais traîner avec Kenneth faisait aussi partie de ses devoirs. Des devoirs d’une autre nature, plus secrète et aussi plus sérieuse. Il ne protesta pas et suivit le mouvement, tiré par la manche.

Kenneth connaissait mieux Pré-au-Lard que lui, ce qui n’était pas difficile, mais il avait fait l’expérience de l’Allée des embrumes, un mois plus tôt, et quelque chose dans l’établissement où les mena son camarade lui rappela avec malaise les sinistres ruelles de Londres.

- Tu es sûr ? demanda-t-il dans un réflexe prudent.

Il n’en pénétra pas moins à l’intérieur. Plusieurs cas de figures avaient eu le temps de défiler dans son esprit pendant le trajet et il lui était venu l’idée que si Kenneth devait s’exposer au danger, il était plutôt stratégique de se trouver dans les parages pour l’en sortir. Des fois qu’il s’arrange pour lui arracher une dette de sang et ses affaires s’en trouveraient pas mal arrangées.

A l’accueil qu’on lui offrit, Kenneth semblait bien connaître les lieux, passablement odorant au demeurant.

- Enchanté Joe, salua-t-il l’aubergiste après que Kenneth lui ait agité une bourse sous le nez. Le patron lui adressa un regard torve, qui devait estimer qu’il n’avait clairement pas l’âge pour se trouver là, mais haussa les épaules et s’en retourna à ses verres.

Tout ici puait et par réflexe, il glissa ses mains dans ses poches, prêt à coller un coup de poing au premier qui essaierait de les lui faire. Plus à l’aise, Kenneth lui indiqua une table un peu plus loin. Nikita n’avait honnêtement aucune idée de la manière dont les choses étaient en train de tourner.

- Du poker ? Et il l’avait appelé « mon pote », bien, bien. Il hocha la tête. « Ce n’est pas spécialement britannique mais d’accord. »

Un regard hésitant à la chaise qui n’avait clairement pas été nettoyée récemment, il consentit malgré tout à y poser son cul et joignit ses mains au-dessus de la table.

- Nous sommes les deux seuls adolescents, fit-il remarquer avant d’hésiter sur le chapitre des boissons. Ils n’étaient pas trop censés boire de l’alcool en étant mineurs, n’est-ce pas ? On l’avait suffisamment mis en garde à ce sujet. D’un autre côté, Kenneth n’avait pas exactement la tête de quelqu’un venu boire de la grenadine.

- La même chose que toi, répondit-il prudemment. « Tu viens souvent ici jouer au poker ? » ou devait-il se sentir privilégié ?

Il avisa la table, soupesa ses options, prit la mesure de l’ambiance et hocha de nouveau la tête roidement.

- Chez moi nous parions.

Et s'il pouvait lui arracher une faveur...

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Évidemment, que je suis sûr. Ça pue le vin d’ortie et les murs sont noircis de nicotine… tout ce décor est assez dissuasif lorsque l’on apprécie le charme moyenâgeux du château ou les grandes galeries ministérielles. J’imagine que du point de vue de mon interlocuteur, cette invitation surprenante doit ressembler à un guet-apens… Mais ce cadre n’est-il pas idéal pour faire mieux connaissance, lui et moi ? Dans ces soirées mondaines dans nos quartiers, on est constamment amenés à réciter les mêmes salades, à obéir à un protocole idiot et archaïque sous le regard inquisiteur de nos familles respectives. Ici, au moins, bas les masques : dans ce pub miteux et mal éclairé, au sein duquel les rayons du soleil ont bien du mal à pénétrer tant l’atmosphère y est lugubre, pas d’étiquette, ni pour lui, ni pour moi. J’imagine qu’il a été habitué à des lieux plus chics. Avec curiosité, je le dévisage sans pudeur, me demandant bien qui est réellement Nikita Yaga, si ce n’est un énième héritier snobinard, n’ayant d’autre particularité que son accent russe bien prononcé. Quand il salue Joe, se disant enchanté, un sourire naît à mes lèvres : sa trop grande politesse m’amuse J’ai l’espoir qu’en le dévergondant un peu, il se révèle enfin… Il fait un commentaire sur le fait que les autres clients n’aient pas le même âge, et je hausse les épaules. « Les autres préfèrent la biéraubeurre, question de goût. Moi, j'aime l’ambiance ici. » Contrairement à mon père qui ferait probablement fermer l’établissement, s’il avait vent des conditions de salubrité de l’endroit. L’an dernier, j’ai retrouvé un scorpion dans ma chope, pas sûr que l’inspection de l’hygiène apprécie… L’air goguenard, le menton enfoncé dans ma main, je fais signe à Joe de venir prendre notre commande. Hélas, il me connaît suffisamment pour savoir que je n’ai pas le droit à l’alcool… mais qui sait, un pourboire ministériel pourrait bien le convaincre que je suis assez grand pour choisir ma médecine. Je fais rouler cinq grosses mordilles argentées sur le comptoir en guise de tentation… Je me tourne ensuite vers mon acolyte qui se doit de faire un choix sur la carte, me demandant s’il y a un peu de cran, derrière ce visage figé. Et sa réponse ne me déçoit pas ! « On va te prendre deux eaux glouglousses. » Joe me fixe longuement, et finit par se saisir des pièces avec un rictus en coin. Il revient avec deux verres à la surface opaque, remplis d’un liquide transparent fortement concentrés en liqueur. Avec un intérêt non dissimulé, je me demande si la boisson sera au goût de mon camarade…

Il m’interroge sur mes habitudes de fréquentation et je prends un air songeur en fixant la grosse tête de sanglier qui pend à la potence, dont la truffe semble encore humide. J’avance des lèvres hésitantes vers mon verre, humant l’odeur âcre de l’eau glouglousse. Mon palais brûle dès la première gorgée, mais je m’efforce de dissimuler la grimace qui menace de me trahir. « Je venais pas mal l’an dernier, ouais. Ça dépend, des fois je me fais trop plumer pour être un client régulier, mais je finis toujours par revenir. » Je songe avec nostalgie à mon retour des vacances de Noël, lorsque j’ai su que mon ancien quartier était condamné à la destruction et qu’August ne reviendrait pas à Poudlard avant la rentrée suivante. Un besoin de solitude et de céder à quelques vices pour se divertir, comme l’appel du jeu… Et puisque l’argent ne manque pas, je ne m’impose pas de limites. Les joues rosies, je toise mon camarade qui se livre ensuite à quelques révélations. Sa réponse éveille évidemment ma curiosité. Je pensais à tort qu’il n’était pas du genre à défier, mais j’ai peut-être sous-estimé l’emblème de sa maison… C’est vrai qu’il n’a pas l’air farouchement intimidé par l’endroit, contrairement à ce que j’imaginais en le traînant ici. « Ah ouais ? Et vous pariez sur quoi, si c’est pas indiscret… ? » Je ne connais rien ni à son pays, ni à son école, ni à leurs traditions. Je ne sais même pas s'ils pratiquent le Quidditch, comme chez nous... Alors quelques éclaircissements de la part de mon camarade seraient bienvenus, avant que nous ne fassions nos jeux… D’autres sorciers ne tarderont pas à nous rejoindre, les élèves de l’école sont souvent pris pour des proies faciles par les joueurs plus aguerris.

@Nikita N. Yaga

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La moitié des mots latins qui composaient les formules magiques de ses camarades échappaient à Nikita et force fut de faire l’amer constat qu’en matière de boisson, il était également largué. L’eau « glouglousse » ne lui évoquant strictement rien, il attendit d’avoir le verre entre les mains pour vérifier ce qu’il soupçonnait déjà : c’était bel et bien de l’alcool, et plutôt fort à en juger l’odeur fruité. Cela dit, il en fallait plus pour le traumatiser. A la manière des latins, les enfants de Russie avaient très tôt le plaisir de goûter à l’alcool mais c’était à Koldovstoretz où les plus âgés des étudiants, profitant des lacunes d’un personnel en sous-effectif, avaient initié les plus jeune à l’antique art de la beuverie. Plus tard, il avait à son tour participé à l’organisation de ce genre de petites soirées arrosées avec ses camarades de dortoirs.

Toujours était-il qu’un Kenneth avait un coup dans le pif, ça lui allait bien. On parlait plus facilement sous l’emprise des spiritueux, cela renforçait la fraternisation et on livrait des secrets. D’un air entendu, il leva son verre et le porta à ses lèvres pour y prendre une gorgée prudent. Vraiment fort. Très fort. Presqu’autant que la vodka, mais le mélange de fruit rendait le goût moins âpre. Restait maintenant à ne pas tomber dans le même piège que son camarade car des deux, il n’était pas encore certain de savoir qui faisait picoler l’autre. Après tout, Kenneth était à l’initiative de leur présence dans ce bar, et Nikita avait déjà eu affaire à un agent infiltré…

- Je comprends, dit-il avec un sourire entendu quand son camarade confessa quelques déboires au jeu. « Le goût du risque attire les gens qui ont le caractère aventureux. »

Il ne se gêna pas pour rendre à Kenneth l’espèce de regard indiscret qu’il lui adressait. Là où le Russe n’était que tenue et fermé, l’Anglais semblait à son aise comme un pacha sur ses coussins. Trop de confiance en soi pouvait aussi bien être synonyme de bêtise, ou d’un pouvoir insoupçonné. Les lieux n’inspirait pas confiance au Russie, le souvenir de l’allée des embrumes et l’importance de sa mission lui donnait l’impression qu’on l’observait dans son dos, prêt à l’attraper par derrière à tout moment, et face à lui, le regard de Kenneth l’empêchait de se détendre ne serait-ce qu’un peu.

Il avisa les alentours, comme dans le réflexe puéril de chercher quelque part la présence du Baioun. Mais il n’y avait pas trace de son protecteur, il allait devoir gérer seul.

- Oh heu, ce ne l’est pas. De l’argent principalement. Ou boire des verres.

Chacun de ses camarades disposait de son propre pécule, la guerre avait eu le mérite de faire fuir les plus pauvres, laissant en Russie les familles les plus patriotes et donc les plus fortunées. Mais l’argent n’intéressait pas Nikita et il balaya les souvenirs de Koldovstoretz. Ce n’était pas le moment de se montrer nostalgique.

- Ou des secrets. Ou des services.

L’air de dire, il porta à nouveau la boisson à sa bouche, espérant inciter Kenneth à faire de même, sans toutefois n’y faire que tremper ses lèvres. S’il parvient à mettre sa nervosité sous le tapis, il est toutefois loin d’afficher la nonchalance de son camarade, et cet espèce de petit sourire qui navigue sur son visage en permanence. Sourit-il autant lorsqu’il se fait plumer au poker ?

Pris d’un doute soudain, il porta sa main à sa poche pour y palper la petite bourse qui s’y trouvait. Une misère, il ne se promenait pas dans les couloirs avec sa fortune sur lui, et il grimaça en constatant le peur de monnaie qui s’y trouvait. Ca partait mal.

- Je suis désolé, je n’ai pas pris grand-chose sur moi, confessa-t-il, agacé de n’avoir pas anticipé. « Les mises sont hautes ? Les inconnus acceptent rarement d’être payés en secrets. »

Fouillant dans son autre poche, il y sentit la présence d'une petite croix qu'on lui avait offerte, pour la protection des icônes. Elle était ciselée de pierres précieuses, suffisantes pour payer plusieurs tournées. Mais il n'était pas certain de vouloir la mettre en gage, c'était un cadeau, et qui venait de Russie.

Jetant de nouveau un coup d’œil aux alentours, il baissa la voix d’un ton sérieux.

- Quelqu’un vient.

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On trouve à la Tête de Sanglier un mélange hétéroclite, composé de commerçants désagréables venus répandre leur bave autour d’un vin de sureau, de sorciers bizarres qui ont toujours un coup dans le nez, et de joueurs expérimentés qui ne craignent pas de faire usage de quelques méthodes discutables pour tirer leur épingle du jeu. Mais cela ne me dérange pas de me mêler à eux. L’idée de me savoir accoudé à cette table en bois ébréché déplairait profondément à mes parents, mais personnellement, c’est l’idée de leur déplaire à eux, qui me séduit le plus. J’aime l’idée d’immerger mon nouveau compagnon dans ce lieu sombre, sale, imprégné d’une atmosphère douteuse. J’aime aussi l’idée d’avoir un caractère aventureux, comme il le sous-entend. C’est pourquoi j’ai bien l’intention de faire de notre rencontre un moment d’exception, entre ces murs décrépits et sous le regard d’un vieil animal empaillé au regard vide.

À la troisième déglutition, ma gorge semble s’habituer aux effets de la liqueur. La chaleur qui irradiait dans mes joues se dissipe peu à peu et je prends de plus en plus mes aises, légèrement désinhibé. J’examine mon interlocuteur avec attention : il ne semble pas vraiment désarçonné, et je constate qu’il évite avec adresse les quelques pièges que je lui tends. Il est presque impassible en buvant, ce qui ne manque guère de m’impressionner… Dire que quelques secondes plus tôt, la boisson me tordait les boyaux ! Ainsi donc, la réputation des élèves russes n’est pas infondée. Il me surprend de plus en plus, moi qui le prenais pour un gamin coincé ! Finalement, on dirait que le décalage culturel et son air froid m’ont induit en erreur. « Ah ouais ? Quel genre de services ? » demandé-je, avec un intérêt non dissimulé. J’ai aussitôt des idées graveleuses qui me viennent en tête et je ricane silencieusement, me promettant que je les partagerais avec August à mon retour. Il semble un peu déçu de constater qu’il n’a pas apporté tant d’argent, ce qui me fait à nouveau hausser des épaules. « Je t’avance la première manche, c’est mon père qui nous régale. » Sans qu'il ne soit au courant, certes… Il faudra juste trouver un mensonge suffisamment gros pour justifier une dépense aussi énorme en attendant la prochaine livraison de mon argent de poche. « Et puis quand on a plus un rond on peut jouer avec les fringues, c’est marrant aussi. » Ça m’est bien arrivé une ou deux fois de rentrer à l’école complètement à poil, mais les températures basses de l’hiver font que j’en garde surtout un souvenir amer. Mais j’ai bien envie que mon camarade se prête à l’exercice… voyons cela comme un rituel de bienvenue à l’école. « Enfin, sauf si ça te fait peur ? » ajouté-je pour le provoquer un peu, ressentant une certaine excitation.

Enfin, nous sommes rejoints par une bande de trois sorciers, le visage à moitié caché par leurs chapeaux trop grands. Je connais ces énergumènes, j’ai déjà eu l’occasion de les affronter… L’un d’eux, celui avec un nez aussi long que le bec d’un aigle, me reconnaît et m’apostrophe directement : « Appleton, tu te rappelles que tu me dois encore cinquante gallions ? ». Je fais mine d’être surpris, comme si ce n’était pas ma spécialité de laisser derrière moi quelques dettes salées. J’ai le souvenir de notre dernière partie qui était pour moi un véritable naufrage… mais j’en ai la certitude absolue, je vais me refaire. Je joins mes mains derrière ma tête et me balance négligemment sur ma chaise. « T’inquiète Selwyn, à la fin de la partie c’est toi qui me seras redevable. » répliqué-je en attrapant le jeu pour en mélanger les cartes collantes. Ce doit être la présence de ce cher Nicky à cette table qui me rend confiant ! Je me sens prêt à en découdre avec n’importe qui, fusse le directeur de l’école en personne. J’échange un regard entendu avec mon camarade et attend patiemment que le croupier nous distribue les cartes, à la lumière tamisée des ampoules nues parfois clignotantes, espérant que j’aurais droit à un beau jeu pour entamer les hostilités.

Les règles du poker sorcier:

@Nikita N. Yaga

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Bingo. Le poisson était ferré. S’il parvenait à arracher à Kenneth une promesse, un gage, quoi que ce soit qui lui donne l’occasion de se rapprocher de sa famille, il aurait fait un pas de géant dans sa mission, et du premier coup ! Son père serait fier de lui, et le Baioun… le Baioun serait bien obligé de reconnaitre le coup de maître, c’était sûr. Excité par l’idée, il avala cette fois une vraie gorgée de liqueur qui l’obligea à se racler la gorge quelques secondes avant de répondre.

- Du genre faire des corvées. Il y avait beaucoup de choses à faire à Koldovstoretz et si on pouvait les donner à quelqu’un d’autre, alors… Il eut un sourire innocent. « Ça évite les problèmes de liquidité. Et les pauvres peuvent jouer aussi. Egalité. »

Et à choisir, il préférait cela que de se retrouver à dessertir les pierres de sa croix orthodoxe. Sans être particulièrement superstitieux – ce qui aurait été ironique étant donné son patronyme – sa famille du côté de sa mère était très religieuse, son ancêtre avait lui-même été un homme d’Eglise, et il préférait éviter de se mettre à dos un Saint du panthéon en misant au poker avec un objet sacré.

- Merci, répondit-il à Kenneth quand celui-ci proposa de lui payer le premier tour. « Je te rembours… ?? »

L’idée de parier ses vêtements le laissa coi un instant, cherchant à vérifier si son camarade plaisantait ou non. Il n’était évidemment pas sans ignorer que cela se faisait mais la non-mixité des dortoirs avait toujours empêché ce genre de jeu et surtout, surtout, il ne s’imaginait pas du tout mais alors pas du tout faire ça à la Tête de sanglier.

- Ça ne me fait pas peur, répondit-il en se raidissant. Je n’ai pas peur.

Cherchait-il à se rassurer ? Si Kenneth pensait l’impressionner parce qu’il avait un an de plus, il se fichait le doigt dans l’œil. N’empêche qu’à le regarder comme ça, avec son sourire nonchalant et sa pause d’habitué des lieux, il sembla à Nikita de moins en moins improbable que son camarade plaisante.

- Tu as déjà parié ça toi ?

La conversation fut cependant interrompue par l’arrivée de trois nouveaux venus. Par prudence, Nikita porta sa main à sa baguette. Ici, il avait le droit de l’utiliser, et pouvait aussi se servir de ses poings et ses pieds si nécessaire, mais Kenneth semblait avoir les choses en main. Sans se détendre pour autant, il les observa prendre place à la table en rigolant.

- Tu parles, c’est 100 gallions que tu me devras ouais, grogna le débiteur.

Non sans un certain malaise, et parce que Kenneth et lui se trouvaient face à face, Nikita nota qu’il se trouvait désormais entouré de chaque côté par des inconnus. L’un d’eux l’avisa d’un regard bizarre.

- Et toi ? T’es pas juste venu regarder j’espère ?

- Non. Je joue.

- Besoin d’un chaperon Kenny ? C’est lui qui paye pour toi si tu te fais encore plumer ?

Considérant la maigre somme qu’il avait sur lui, les trois hommes risquaient d’être déçu sur ce chapitre. Sans leur accorder de répondre aux provocations, il se saisit des deux cartes que Kenneth venait de distribuer devant lui. Les esprits alcoolisées étaient faciles à percer, bien que leurs pensées soient confuses. S’il gardait son calme, il serait aisé de lire le jeu de ses adversaires.

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Ses cartes : Gryffon et Fée
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Ce n'était pas excellent.

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'Le Hasard' : 4, 3

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Je suis plutôt surpris par mon interlocuteur et l'audace qu'il manifeste... et curieux en ce qui concerne cette histoire d'échange de services et de secrets. Ça avait l'air plutôt marrant, mais lorsque Nikita m'explique ce qu'il en est réellement, j'ai du mal à camoufler ma déception. « Ah ouais, trop chiant, c’est pas les elfes qui s’occupaient de vos corvées ? » C'est difficile à imaginer, j'ai bien vu au cours du voyage à Durmstrang que ça avait l'air de filer droit dans leurs rangs, mais j'ai du mal à nous imaginer obéir à une telle rigueur. Finalement, Poudlard n'est pas si mal... « Si ça veut dire que tu peux te retrouver à laver les chiottes à cause d’une sale main, je passe mon tour… » lâché-je en grimaçant. J'aime à croire que je ne suis pas comme ces gosses de riches qui ne jurent que par leurs majordomes, mais même quand on vivait à Cricklewood Square, j'étais toujours extrêmement paresseux quand il s'agissait de mettre la main à la patte. Alors imaginer une école dont le fonctionnement est basé sur des taches ingrates à réaliser, très peu pour moi... ! Je me fiche qu'il me rembourse ou non, de toute façon c'est le fric de mes parents. Je m'empourpre légèrement quand il me demande si j'ai déjà du payer un tribut en vêtements, et je pouffe légèrement en y repensant. « Euh… ouais, une ou deux fois. » Je vais éviter de rentrer dans les détails, je n'aimerais pas dissuader mon interlocuteur alors que nous sommes déjà en si bon chemin. « Sombre histoire. » ajouté-je avec un léger sourire, me souvenant de la tête ahurie de ma préfète lorsqu'elle m'avait découvert en caleçon devant les tonneaux faisant office d'entrée de notre salle commune. J'en avais pris pour mon grade ce soir-là, et j'ai écopé d'une sévère retenue que je ne suis même pas parvenu à esquiver, malgré la lettre suppliante envoyée à mon père. Quand je dis que mes vieux n'ont d'autre intention que celle de me pourrir la vie injustement... ! Et une chose est certaine, il me passerait un savon s'il savait dans quelle drôle d'affaire j'ai embarqué ce cher Nikita. Mais après tout, on ne fait rien de mal... La Tête de Sanglier a beau être un lieu peu fréquentable, nous sommes juste venus nous amuser un peu, en ne défiant que quelques points élémentaires du règlement. Nous serons rentrés à l'heure pour le dîner et avant le couvre-feu, et ce, avec ou sans habits !

Je demeure impassible face aux provocations que nous adressent les types qui nous ont rejoints, tachant de demeurer imperméable à leurs tentatives de me faire perdre mes moyens. À nouveau, je porte mon verre à mes lèvres et bois une longue gorgée, faisant irradier jusque dans mon estomac une vive chaleur. « Très drôle. Mon pote Nicky est un champion, messieurs. Vous n’avez pas la moindre chance. » annoncé-je fièrement, rendu trop confiant par les quelques gorgées d'alcool que je viens d'avaler et qui embrument déjà mon cerveau. Les trois sorciers qui nous défient ne paraissent guère intimidé et laissent échapper un ricanement sardonique... "Tu fais un peu trop le malin, pour le rejeton du ministre." Je commence finalement à ressentir une légère pression, mais l'alcool m'aide à ne pas lui céder. "Faites vos jeux !" lance Selwyn, et je m'empare aussitôt de mes cartes, espérant y découvrir une paire. Ce serait de bonne augure pour la suite, et nous permettrait de montrer à ces sales types que nous ne sommes pas venus plaisanter... Je jette un oeil à Nikita, qui est assis en face de moi et semble bien concentré sur son jeu. Je cherche à capter dans le regard de mon camarade une information, une petite lueur dans ses yeux qui pourrait me donner un aperçu de ce qu'il avait en main... Mais son visage est indéchiffrable. Peu importe, nous sommes tous les deux venus ici pour jouer, et je n'ai pas l'intention de me débiner dès la première manche. Je pourrais toujours m'en sortir habilement par un bluff bien senti, si besoin... « Je suis. Et Nicky aussi. » lancé-je en avançant devant moi deux grosses pièces dorées, que je dépose dans la bourse centrale qui les avale aussitôt goulûment. Elle ne les recrachera qu'à la fin, en direction du vainqueur désigné par les cartes...

@Nikita N. Yaga

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Le membre 'Kenneth D. Appleton' a effectué l'action suivante : Le Hasard

'Le Hasard' : 3, 4

Sentant la déception de son camarade, et le poisson lui échapper par la même occasion, Nikita réagit un peu au quart de tour.

- Ce n’est pas obligé d’être laver les chi… le truc là.

Chiotte c’était quoi ? Un truc sale, sans doute. « Il n’y a pas d’elfes en Russie. » On n’y esclavagisait pas les démons, là-bas, leur loyauté devait se conquérir, mais Kenneth n’était pas là pour se faire entretenir des différences culturelles entre leurs deux pays. Nikita aurait bien tenté de lui proposer un autre type de défi – quelque chose qui lui permette de mettre un pied dans la maison de ses parents peut-être ? il fallait y réfléchir, mais d’un autre côté rien ne pressait non plus. Il serait d’autant moins suspect qu’il garderait son jeu pour lui le plus longtemps possible.

Curieux de ces fameuses « une ou deux fois », il fut un instant tenté par le fait d’aller chercher les souvenirs directement dans la tête de son interlocuteur, comme il s’amusait souvent à le faire à Koldovstoretz, mais ce n’était pas un jeu, cette fois, et s’il se faisait prendre à trifouiller dans la tête du fils du ministre… Il fallait que ses intrusions vaillent le coup.

Leur discussion fut finalement interrompue par le début de la partie. Nikita avisa ses cartes, tout en essayant de ne pas se laisser perturber par l’odeur musquée de son voisin de gauche. Un mélange de vieille bière renversée qui imbibait son pardessus et refoulait sacrément. Il plissa le nez. Sa main n’était pas bonne, quelqu’un de prudent se serait couché. Mais Nikita n’était pas un joueur hors pair, loin de là, et il avait, comme beaucoup de débutants, tendance à vouloir parier sur sa chance plutôt que de jouer la gagne en se couchant tant qu’il n’avait pas de bonnes cartes.

Il releva les yeux, croisant le regard de Kenneth qu’il soutint. Il aurait voulu croire que c’étaient eux deux contre les trois autres, que cela renforcerait leur camaraderie, mais pouvait-il se fier au jeune homme ? Rien n’était moins sûr. Et s’il devait lui arracher une faveur, il allait falloir le faire perdre. Epuiser sa bourse pour forcer à miser plus.

Kenneth ne lui laissa guère le temps de tergiverser et renchérit pour deux. Bon, tant mieux d’une certaine façon, c’était son argent qu’il était en train de perdre.

Les autres suivirent également et la première carte révéla une fée, lui offrant une paire. Bien. Maintenant, allez savoir qui bluffait… Il se focalisa sur l’homme qui puait la bière.

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1 ; 2 = Nikita perçoit les deux cartes de l'homme
3 = Nikita perçoit une carte sur deux
4 = Nikita ne perçoit rien
➤ 5 ; 6 = Nikita perçoit des idées confuses et croit voir une main beaucoup moins forte qu'elle ne l'est véritablement
---------------------

➤ (L'homme a 3 et 2, Nikita perçoit 1 et 2, la plus mauvaise main possible, et ne voit pas la paire)

Pas de danger de ce côté là, donc. De toute façon, étant donné qu'il pariait avec l'argent de Kenneth, il avait tout intérêt à monter le plus haut possible la mise. Au pire, si son camarade remportait la manche, il n'y gagnerait rien, mais si c'était lui qui avait la meilleure main, il le dépouillait de gros.

- Je relance de un.

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'Le Hasard' : 6

Russian Roulette

Keep your poker face

Je crois que finalement, je préfère nos conversations aux abords d'un comptoir mal éclairé plutôt que dans mon salon, là où tout le monde joue à ce jeu d'apparences ridicules, loin des aristocrates pédants. Ses tournures de phrases m'amusent, même si je ne devrais pas rire de sa grammaire approximative... J'en viens même que j'aime bien ce gars, en fin de compte. Un peu étonné de l'absence d'elfes en Russie, je hausse un sourcil interloqué, me demandant par quoi ils peuvent bien les avoir remplacés... À moins qu'ils ne soient totalement indépendants, et dans ce cas de figure, cela signifie que leur société diffère en tous points de la notre. Quand je vois le nombre d'elfes qui affluent au ministère, j'ai du mal à imaginer un monde sans eux ! « Ah ouais, sérieux ? C’est marrant, je pensais qu’y en avait chez tous les sorciers. Vous avez quoi chez vous, alors ? » C'est une question un peu naïve, mais je ne connais rien de l'endroit d'où il vient, qui cache peut-être une multitude de créatures qui me sont inconnues, ou d'êtres magiques aux propriétés insoupçonnées. Au moins je ne retournerais pas dans mon dortoir plus bête qu'avant !

La partie commence, et je m'empare d'une main moyenne, contemplant la fée qui s'agite sur sa carte, et le griffon qui rugit silencieusement en battant des ailes. En face, je sens leurs regards scrutateurs nous évaluer avec suspicion… Selwyn attrape une petite boîte métallique dans la poche de son long manteau et en tire un énorme cigare. Du bout de sa baguette, il en allume le bout avec un Flambios murmuré d'une voix caverneuse et inspire longuement. L'odeur forte du tabac s'invite dans nos narines et la fumée grise flotte paresseusement dans la pièce... Je le soupçonne même de la diriger intentionnellement dans notre direction. « J’espère que la fumée ne vous dérange pas, les jeunes. » Ma gorge me gratte, je lutte contre l'envie de tousser que je réprime, m'efforçant de rester concentré sur mes cartes. « Pas du tout. » réponds-je en feignant une parfaite indifférence, me demandant si Nikita est incommodé par ces effluves parasites. Selwyn s'étire le dos et se retourne vers son voisin à qui il s'adresse à voix basse, avec un sourire complice. Je tends l'oreille intrigué... mais il n'est question que de courses d'abraxans et de cotes de paris, autant d'informations inutiles pour la partie que nous sommes en train de jouer.

Les premières mises viennent d'être empochées, et je constate avec soulagement que j'ai au moins une paire. Nikita, de son côté, semble plus confiant… Il relance, et je sonde aussitôt du regard nos adversaires, me demandant si ce mouvement pourrait les dissuader... Mais chacun suit, et j'ajoute la somme correspondante. Je regarde à nouveau mes cartes, et la fée qui vient d’être dévoilée sur la table, révélant l’illustration d’une petite créature aguicheuse voletant hors de son cadre. Avec un peu de chance, sa soeur apparaitra parmi les suivantes... ! Les gallions fusent et viennent s’ajouter à la bourse centrale, qui s’empresse aussitôt de les avaler dans un drôle de bruit de déglutition. C'est mon tour de me prononcer : avec une certaine réticence, je plonge une main mal assurée dans la mienne, et ressors quelques pièces que je viens ajouter au butin global. « Je suis. » On dirait qu’il va falloir que j’écrive à ma mère pour réclamer une avance sur mon argent de poche plus vite que je ne le croyais… J’ai encore de quoi tenir un peu, mais ma bourse commence doucement à se vider. J'espère que comme il semble le faire croire, ce cher Nicky a de la ressource ! La main de Selwyn s'avance lentement vers la seconde carte retournée et soulève son coin pour la révéler...

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Un instant, il fixa Kenneth sans répondre. Le sujet des elfes était une question sensible. De par chez lui, on croyait à l’indépendance des forces de la nature, aux sous-bois inapprivoisables. Contrairement à la société sorcière britannique qui avait accompagné et s'était enrichie sur la révolution industrielle, la Russie était longtemps demeurée féodale, jusqu’au début du XXème siècle. Ensuite étaient venus les bolchéviques et tout s’était soudain accéléré. Mais pas eux. Eux avaient bâti leur puissance sur un monde ancien, où les hommes négociaient encore avec les monstres.

- Des démons du foyer, répondit-il seulement. « Je t’en montrerai un peut-être un jour. »

Mais pas aujourd’hui. Aujourd’hui, il était là pour transformer l’essai, et tant pis si le pauvre Kenneth trouvait sa réponse un peu trop énigmatique à son goût, il n’était pas obligé de toujours obtenir ce qu’il voulait après tout.

La fumée du cigare était lourde et sentait fort mais il ne voulu pas donner l’impression de se plaindre devant ces trois types, et pas devant Kenneth non plus, aussi secoua-t-il la tête avant de planter son regard dans celui de l’homme.

- Si je gagne cette manche, vous en donnerez un à mon ami.

L’autre manqua de s’en étouffer.

- Pouah, gagne d’abord !

Et il révéla la seconde carte. Une lueur de triomphe éclaira le visage du jeune homme, qu’il travailla à éteindre aussitôt pour ne rien laisse paraître. Il adressa un regard à Kenneth. C’était avec son argent qu’il jouait après tout, et avec son argent qu’il allait gagner également.

- Je mise.

Il jeta un coup d’œil à son verre, tenté par une lampée. Mais ne serait-ce pas trahir son excitation ? Mieux valait rester sobre, et ne pas oublier son véritable objectif par ailleurs. Peu importait de gagner ou non cette partie, tant que Kenneth la perdait.

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Keep your poker face

Il n’y a pas grand monde dans le pub à cette heure, mais les conversations autour de nous sont animées, rythmées par des éclats de rires forcés, des voix bruyantes et quelques jurons lâchés sur le score du match de Quidditch en cours, opposant l’Irlande à l’Australie. Nikita et moi, attablés l’un en face de l’autre, sirotons tranquillement notre eau glouglousse comme si nous étions de jeunes adultes. « Wow, stylé. » Je n’ai jamais entendu parler de démons du foyer de ma vie entière, mais ça doit être de drôles de bestioles. Je m’empresse de hocher la tête en signe d’acquisition quand il fait la promesse qu’il me montrera un jour… Si l’occasion se présente, je suis plutôt partant.

Attablés face à des joueurs aguerris à la mine patibulaire, nous suivons avec attention la révélation des cartes tandis que Selwyn nous crache sa fumée à la gueule. La revendication exprimée par mon camarade étire mes commissures de lèvres. Voilà un esprit qui me plaît ! Le type s’empresse de le remettre à sa place, mais je commence à croire que mon nouveau pote en a dans le pantalon. « J’aime cette attitude, Nicky. » Ce que j’aime moins, en revanche, c’est que derrière cette promesse de m’offrir un bon cigare qui rendrait August vert de jalousie, se cache peut-être une main meilleure que la mienne, tant il semble confiant. Certes il joue avec mon argent, mais j’avais une certaine envie de l’impressionner en remportant cette manche ! Si je perds le droit de fanfaronner devant mon jeune camarade, que me restera-t-il donc ? Quoi qu'il en soit, je préfère que ce soit lui qui l'emporte plutôt qu'un de ces types louches. Rien ne me ferait plus plaisir que nous les dépouillons pour ensuite aller nous offrir une bouteille avec notre butin amassé. Nous sommes peut-être moins expérimentés que ces énergumènes, mais j'aime à croire que nous ferons un bien meilleur usage de tout ce blé !

Une nouvelle volute de fumée se répand au dessus de nous, recrachée par le cigare de Selwyn, comme un nuage planant sur la table. Je retiens ma respiration, les yeux piqués, et m'efforce de rester focalisé sur le tirage des cartes. C'est un griffon qui est dévoilé en seconde carte... Je me retiens de manifester mon enthousiasme en voyant apparaître une seconde copie de mon jeu : une double-paire, c'est excellent. À nouveau, je redeviens confiant en mon jeu, refusant de croire que quelqu'un à cette table pourrait avoir une meilleure main. Pour me donner du courage, je bois une nouvelle gorgée d'eau glouglousse que je déglutis lentement, laissant l'alcool faire son effet. « Je relance de deux ! » annoncé-je avec entrain, brandissant deux piécettes à l'éclat doré que je m'empresse de glisser dans la bourse au centre et qui les avale expressément, espérant un full lorsque serait révélée la prochaine carte. J'éprouve un léger tournis, ignorant si je suis enivré par mon verre, ou bien par l'excitation causée par le jeu... Mon geste ne semble pas intimider nos adversaires : après quelques instants d'hésitation, le type à l'odeur de bière tenace regarde sa main et dépose à son tour la mise réclamée, imité par Selwyn ... « C’est du bluff, gamin. Vous avez que dalle. » me lance son comparse, le type aux gros sourcils et aux cheveux gras, d'un ton arrogant. Je ne réponds pas à sa provocation... Qu'il le croie, je ne veux pas imaginer m'aplatir devant ce connard. Tous les regards se tournent désormais vers Nikita, et nous attendons avec impatience sa parole. Au vu de son assurance manifeste, peu de chance qu'il se couche...

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Malgré la mine patibulaire du type qui fumait, Nikita n’en oubliait pas que son objectif principal se trouvait de l’autre côté de la table et s’étant vu opposer une fin de non-recevoir au fait de faire offrir un cigare à Kenneth – qui semblait en apprécier l’odeur – il remit son nez dans ses cartes, non sans avoir adressé une ombre de sourire à l’adresse de ce-dernier. Finalement, passé le stress initial, la soirée était plutôt amusante, d’autant que sa main lui donnait des ailes. Comment aurait-il pu craindre des hommes qu’il s’apprêtait à écraser à plate couture ? Peut-être que ce seraient eux qui finiraient à poil, d’ailleurs, et le jeune homme se demanda ce qu’il pourrait bien faire de vêtements aussi mal coupés et deux fois trop grands pour lui.

Ayant déjà par deux fois ressenti le frisson de l’excitation de découvrir au centre de la table des cartes identiques aux siennes, il fut presque surpris de voir retourner un gobelin. Il était passé à peu de choses du brelan. Cette fois, il s’empara effectivement de son verre et y prit une gorgée qui le fit grimacer. Suffisamment, espérons-le, pour dissimuler sa déception.

Tout le monde relança et Kenneth de deux. Etait-il encore temps d’utiliser sa legilimancie ? Mais déjà les regards se tournaient vers lui, attendant une réponse. Ce n’était pas prudent d’utiliser son pouvoir en public, aussi abandonna-t-il l’idée.

- Moi aussi, conclue-t-il.

L’homme qui puait la bière fut un peu trop heureux de révéler une fée et un mage.

- Paire et mage, annonça-t-il. Nikita hocha la tête. Une bonne paire, mais ça ne suffirait pas. Il retourna à son tour ses cartes.

- Deux paires. Fée et griffon.

Un léger sourire vint trahir sa satisfaction. A moins que quelqu’un lui sorte un brelan, la partie était gagnée pour lui.

En grommellant, le fumeur révéla une paire de fée et un dragon. Son voisin ne fit pas mieux, révélant pour sa part... aucune paire. Devant les regards ahuris de ses compères, il se mit bredouiller bêtement.

- J'croyais qu'ils bluffaient moi... t'as dit qu'ils bluffaient Selwyn.

Nikita se recula légèrement sur son siège, croisant les bras. Restait Kenneth encore dans la partie. Si son camarade ne sortait pas mieux que lui, alors il venait de gagner assez d'argent pour rejoindre la partie à ses propres frais.

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#1 'Le Hasard' : 2, 1

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#2 'Le Hasard' : 1, 3

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Keep your poker face

J'attends la révélation de la dernière carte avec une certaine impatience, espérant voir apparaître une seconde fée ou un griffon qui saura m'offrir une main glorieuse. A la place, c'est la douche froide en découvrant l'illustration représentant un gobelin à la mine sinistre, qui examine des diamants dans son cadre... Mais je ne perds pas espoir, j'ai toujours une double-paire qui pourrait bien me garantir le succès, si aucun de nos adversaires ne révèle une plus forte figure. Et l'heure de la révélation sonne : avec soulagement, je découvre que la type à ma droite ne dispose que d'une paire, et que Selwyn n'a guère mieux. Quant au type avec les cheveux gras, il aurait bien mieux fait de se coucher... Mais en découvrant la main de Nikita, je me délecte de l'ironie de la situation... « J’peux pas le croire. » lâché-je avec un sourire narquois, étudiant le jeu déposé par mon camarade. Je révèle les miennes l'une après l'autre, réalisant avec surprise que nous avons les mêmes mains ! Si ça n'est pas un coup du sort, je ne sais pas comment le qualifier. « Double-paire, fée et griffon aussi. » annoncé-je en déposant fièrement mes cartes. Les deux paires de fées s'unissent dans une petite explosion d'étincelles et les griffons se répondent l'un l'autre en battant des ailes. Je relève les yeux vers mon ami, victorieux. « Décidément, Nicky, on est connectés toi et moi. » Je ne crois pas au destin ni à ces conneries, mais j'apprécie ce moment de communion inattendu entre lui et moi. On dirait que nous sommes en veine, aujourd'hui !

Je fais signe à Joe de nous ramener deux verres supplémentaires. Après tout, nous les avons bien mérités ! La bourse centrale recrache dans ma direction et dans celle de Nikita une bonne trentaine de piécettes dorées que je me hâte d'enfouir dans la mienne. « Allez, pause clope pour tout le monde, j’ai gagné un cigare. » renchéris-je, un brin désinhibé et fier comme un paon, à mon adversaire qui ouvre sa boîte métallique l'air furieux. Je tends la main pour récupérer mon du, mais lorsque Selwyn me le tend, il attrape mon poignet m'attire vers lui, si près que je peux sentir son haleine douteuse, un mélange hétéroclite de tabac froid et de mauvais vin. « Tu perds rien pour attendre, microbe. T’as intérêt à remettre mon fric en jeu pour la prochaine ou je vous casse les jambes, à toi et à ton pote. » Durant quelques secondes, je demeure immobile, avant de faire un geste en arrière pour me libérer de son emprise. La main moite, je glisse le cigare dans ma poche, riant un peu jaune... « On se calme, ok ? On voit ça quand je reviens. » me contenté-je de répondre, peu désireux de souffler sur les braises quand je sais que ce type est suffisamment impulsif pour faire l'usage d'un sortilège impardonnable sur un coup de tête. Mais pour ne pas effrayer Nikita, je choisis de faire comme si de rien n'était. Nous nous levons de table sous le regard noir de nos adversaires et je me presse vers la sortie sans jeter un œil en arrière. Même sans les voir, je sens leur regard mauvais fixé sur nous... On a une cible dans le dos, maintenant. « T’inquiète, ils sont tout le temps comme ça. C’est que de la gueule. » affirmé-je sans conviction, l'air faussement sûr de moi. Chez ces types-là, mon nom de famille n'a rien d'une arme de dissuasion... Ils ne craignent ni l'influence du ministère de la magie sur leurs petites affaires, ni la menace planante des conséquences de leurs actes. Malgré cela, je passe la porte et m'accoude à la fenêtre, rejoint par Nikita. Je plante le cigare entre mes dents et le tend en direction de mon nouvel associé. « Tu me l’allumes ? » parvins-je à articuler, pressé de goûter à ma première bouffée. Ces trucs-là ont l’air sacrément forts, et j’ai bien l’intention de faire tourner à mon acolyte. Après tout, c'est grâce à lui que nous avons récolté cette part de butin !

@Nikita N. Yaga

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Il était quasi sûr de gagner. Les trois autres avaient révélé des mains bien plus modestes, aussi ne restait-il plus que Kenneth dans la partie. Il y avait bien une petite chance encore que ce-dernier abatte un brelan mais, franchement, c’était peu probable, d’autant que les cartes sur la table ne formaient en soit aucune paire. Nikita n’avait beau maîtriser que des rudiments de poker – assez pour ne pas finir complétement plumé lorsqu’il disputait une partie avec ses camarades de dortoir – il savait qu’une double paire lui offrait de sérieuses chances de l’emporter.
Le visage narquois de Kenneth lui mit cependant le doute à l’esprit. Se pourrait-il que… non, c’était encore plus improbable qu’une main gagnante : le jeune homme avait exactement la même combinaison de cartes que lui. Passé la seconde de stupéfaction, la situation arracha un soufflement de nez amusé à Nikita. Bon, cela n’allait pas exactement l’aider à atteindre son objectif de faire perdre Kenneth, mais il fallait bien reconnaître que la situation était cocasse.

Croisant le regard du Poufsouffle, il hocha la tête en souriant et leva son verre dans salut silencieux, avant de le porter à ses lèvres. Ça méritait bien un toast. Sans doute enivré autant par l’alcool que par le son des pièces qui rebondissaient sur la table, Kenneth passa déjà commande d’une seconde tournée. Nikita était lui aussi sur le point de laisser l’enthousiasme le gagner, lorsqu’il nota que les trois autres hommes s’agitaient. C’était à prévoir, les règles du jeu ne tenaient que tant que tout le monde y trouvait son compte. Face à la défaite, la tentation était grande de mettre fin à la partie, par la force.

Soudain anxieux, l'adolescent reposa son verre, avisant les trois types, et serra les poings au mauvais ton du mec avec le nez crochu. Il ne se faisait guère d’illusion, face à trois sorciers adultes, il doutait de faire le poids. Mais il pouvait malgré tout décocher quelques bons coups, prendre la fuite sur un effet de surprise ou, dans le pire des cas, ruer et mordre. Pour ce qui était de la magie, en revanche, il ne comptait pas trop là-dessus. Il avait toujours fait un piètre duelliste.
La main du type au long nez avait filé saisir celle de Kenneth mais alors que Nikita se tenait prêt à bondir, son camarade conserva sa nonchalance naturelle, malgré la situation. Il dégagea sa main, empochant au passage le cigare dû.
Nikita lui adressa un regard interrogateur et, toujours silencieux, fut heureux de lui emboîter le pas lorsque Kenneth lui fit signe de le suivre. L’atmosphère à table était devenue soudain beaucoup moins chaleureuse.

- D’accord, répondit-il, manifestement pas très convaincu par les explications de son camarade. « Tu crois que c’est prudent de gagner encore cependant ? »

Ils se glissèrent en dehors de l’auberge et Nikita caressa l’idée de proposer de s’en aller maintenant, pendant qu’ils étaient hors de vue. Mais Kenneth affichait un tel air sûr de lui, et une telle connaissance des lieux qu’il craignit de passer pour un pleutre et s’abstint d’avouer son idée.

- Tiens, dit-il en comptant les cinq pièces pariées que lui avait avancé le jeune homme. « La dette est payée. C’était un bon investissement. »

Il s’autorisa un petit sourire, confessant son amusement, alors que Kenneth lui pointait le cigare dessus. Avait-il également l’habitude de fumer ce genre de choses ? Il sortit sa baguette, toute torsadée en bois du tilleul de son jardin, et prononça la formule en russe.

- пожар.

-------------------
1 ; 2 = fonctionne
3 ; 4 = fonctionne pas
➤ 5 ; 6 = fonctionne trop
-------------------

Peut-être le stress de l'après-midi - pleine de rebondissements - ou son très sincère retard en sortilège jouèrent sur sa concentration, mais au lieu d'allumer comme attendu le bout de sa baguette, à la manière d'un briquet, celle-ci fut prise de folie et cracha soudain sans prévenir une épaisse gerbe de flamme, à la manière d'un souffle de dragon.

- Oh ! sursauta violemment le jeune homme en bondissant en arrière, laissant retomber l'objet fumant comme s'il lui avait brulé (littéralement) la main. Il balaya la scène d'un regard à moitié paniqué, avisant sa baguette, puis Kenneth, le cigare toujours aux lèvres.

- Dé... désolé. Il secoua la tête. C'est le... la pression je crois.

Prudent, il récupéra sa baguette en jetant un coup d'oeil vers la fenêtre où il discerna quelques regards étonnés. De l'intérieur de la pièce, la grosse voix de Joe leur parvient.

- Vous me faites pas cramer la façade les jeunes là !!!

Nikita grimaça.

- Mieux vaut que tu l'allumes toi. Je suis plus fort aux cartes qu'en magie.

Et ça lui faisait un peu mal de l'admettre.

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Nous voilà dehors, abandonnant l'atmosphère tiède et poisseuse qui règne dans l'auberge pour retrouver la fraîcheur de l'air extérieur, gallions en poche. Grisé par notre victoire récente, je chasse la drôle de sensation des doigts de Selwyn se refermant autour de mon poignet... Si les menaces proférées par ce dernier semblent avoir eu un peu d'effet sur mon acolyte au visage inquiet, je m'empresse de chercher à le rassurer, laissant échapper un petit rire nerveux. « Tu rigoles ou quoi ? T’as vu la veine qu’on a ? On peut se faire un blé monstrueux. » Il serait bien plus raisonnable de partir maintenant, notre butin en poche, et choisir de ne plus retourner dans l'auberge... Mais à vrai dire, je n'ai aucune envie d'être raisonnable. Cette trop grande confiance, exacerbée par l’alcool que j’ai dans le sang, m’a souvent desservi… mais ce soir c’est la bonne, je le sens ! Je suis ivre d'excitation, à moins que ce ne soit d'eau glouglousse... peu importe ce qui me procure ce regain d'endorphine, j'en reveux bien volontiers. D’accord, ces types-là ont la gueule de quelqu’un qui sort tout droit d’Azkaban, mais la tentation d’y retourner et de les affronter à nouveau est trop grande, alors pas question de les laisser nous déstabiliser. Nikita me rend les quelques pièces que je lui ai prêtées avec un ton reconnaissant et je lui fais signe de la main pour lui signifier que ça n'est rien : après tout, ça n'est qu'une goutte d'eau dans la mer dans le compte en banque bien fourni de mon père, je peux bien m'y servir quand je veux. Des occasions aussi belles que celles-ci le valent bien ! Et puis, je les emmerde.

Comme pour exhiber un trophée durement acquis, je m'empresse de porter le cigare que nous venons de remporter à mes lèvres. Je somme mon camarade d'en allumer l'embout, curieux de goûter à l'interdit... mais lorsqu'il dirige l'extrémité de sa baguette tout près de mon visage, j'ai un mouvement de recul lorsque je vois en jaillir une gerbe de flammes. Une forte chaleur m'irradie soudain ; sous le coup de la surprise, je mords même dans je cigare tandis que mon acolyte laisse échapper sa baguette flambante... « Woah Nicky, tout doux hein, tu veux m’envoyer chez les grands brûlés ou quoi ? » lancé-je à la fois hagard et un peu amusé par la situation. Il a tôt fait de m'assurer qu'il n'a pas fait exprès, ce que je crois volontiers au vu de son air contrit. Et puis, disons qu'une rue passante n'est pas un choix très pertinent pour tenter de m'éliminer... J'entends la voix bougonne du gérant venue de l'intérieur râler un peu, et je me hâte de le rassurer : « C’est rien Joe, mon pote est tout feu tout flamme. » Je replace le cigare entre mes lèvres et agite ma baguette en murmurant le sortilège, faisant naître une petite braise à son extrémité. Puis, je le tiens entre mes doigts, me plaisant à me sentir comme un adulte aux mauvaises habitudes... « T’inquiète, je suis pas un as en sortilèges non plus. Et les cartes, ça rapporte plus. » Et je tire une taffe, inspirant longuement... À peine une seconde plus tard, j'ai les larmes aux yeux, pris d'une toux violente. Je crache une fumée grise avec laquelle je manque de m'étouffer, sous le regard de mon camarade... J'ai déjà pioché des dizaines de fois dans le paquet de cigarettes d'August, mais ça ne m'a jamais fait cet effet-là ! J'essaie de garder contenance, conscient que c'est un peu la honte d'exposer ainsi mes poumons inexpérimentés, mais je m'empresse de retrouver mon souffle et de faire comme si de rien n'était. « Bah dis donc, ça arrache la gueule. » commenté-je avec une moue de dégoût, pourtant tenté de réessayer. Puis, je le tends à Nikita, attendant qu'il s'en saisisse. « Tiens, essaie. » Après tout, ça ne devrait pas l'effrayer, sa résistance à l'alcool est après tout plus élevée que ce que je croyais. Et ce serait trop dommage de s'arrêter en si bon chemin... c'est avec ses limites que j'ai envie de jouer, maintenant.

@Nikita N. Yaga

rainmaker

L’espace d’un instant, il s’était comme oublié. L’alcool, bien que seulement siroté, avait dû jouer, ainsi que l’évidente euphorie de la victoire, et puis l’adrénaline du danger. L’espace d’un instant, il s’était senti vraiment comme un héros de roman vivant une aventure aux côté de Kenneth, qui semblait ne se laisser impressionner par rien, savoir tout faire, quoi faire, et comment faire. Le feu l’avait ramené à la raison. Il fallait qu’il se reprenne, il avait une mission, on comptait sur lui et les yeux perçants du Baioun… que dirait-il, le Baioun, s’il ratait une occasion pareil ? Il n’était pas là pour jouer au poker, ni picoler ou fumer le cigare, il était là pour arracher ses secrets à Kenneth, ou plus exactement à ses parents.

… mais peut-être ? Peut-être que les choses n’étaient pas incompatibles ?

Un peu honteux de ce débordement d’énergie magique incontrôlée qui avait manqué de roussir le poil de son camarade, il hocha la tête, presque reconnaissant, quand ce-dernier confia n’être pas le plus doué du monde en formules magiques.

- C’est vrai, confirma-t-il en hochant la tête. « Les cartes c’est mieux. »

Un problème de taille se posait cependant : comment arracher à Kenneth le fameux service, avec ces trois types qui les flanquaient à la table de jeu ? D’autant qu’ils étaient mauvais joueur. Il aurait sans doute fallu les plumer eux-mêmes avant, ce qui rajoutait une étape supplémentaire et malgré son don de légilimancie (pour ce qu'elle lui avait servie jusque-là...), Nikita n’était pas certain de pouvoir gagner autant de partie à la suite.

Tout à ses pensées, il se rendit compte qu’il fixait Kenneth qui tirait sa première latte, non sans esquisser un léger fond de toux au passage.

- C’est bon ? demanda-t-il alors que son camarade lui tendait le cigare. Il n’était pas tout à fait certain de savoir comment s’y prendre… Il le porta cependant sans rechigner à ses lèvres et tâcha d'en aspirer la fumée.

--------------------
1 ; 2 = la fumée passe bien et le goût lui plait plutôt !
➤ 3 ; 4 = yeux qui piquent, mais l'honneur est sauf
5 ; 6 = grosse quinte de toux bien nulle
--------------------

Se ruant dans ses poumons, la fumée lui fit l'effet de le brûler de l'intérieur, mais rien qu'un instant, puis la sensation fut plus agréable. Il toussa deux fois, relâchant à chaque toux un petit nuage, mais garda contenance et après avoir grimacé pour dissimuler l'humidité soudaine de ses yeux irrités, s'autorisa même de tirer dessus à nouveau. La seconde bouffée passa mieux.

- C'est bon, confirma-t-il avec dignité avant de rendre le cigare à son camarade. « Ecoute, j'ai une proposition à te faire. »

Il y avait réfléchi pendant les quelques instants de lucidité froide où Kenneth avait allumé le cigare. S'il voulait réussir à arracher au jeune homme de pénétrer sa maison, ou d'obtenir des infos sur les siens, il devait non seulement le forcer à miser au-delà de ce qu'il pouvait s'offrir - et ainsi forcer une mise immatérielle - mais surtout gagner sa confiance. Et pour cela, les trois autres allaient lui servir.

- Je pense qu'on peut gagner facilement le prochain coup, expliqua-t-il posément. « En faisant équipe. »

Il planta son regard dans celui de Kenneth.

- Maintenant qu'on a toute la monnaie, si chacun de nous renchérit sur l'autre, ils ne pourront pas suivre. Ça les intimidera. Ensuite, peu importe lequel de nous deux remporte la manche, on partage les gains à la fin.

C'était évidemment risqué, si l'un des trois compère s'obstinait avec une excellente main, ils risquaient de se retrouver tous deux sur la paille d'un seul coup, mais considérant les résultats de la partie précédente, en élevant assez haut les enchères, on pouvait faire le pari que leurs camarades de tablée ne prendraient pas le risque de les suivre.

Par ailleurs, et c'était l'aspect le plus ambitieux de son plan, si des deux Kenneth avait la plus mauvaise main, alors Nikita raflerait tout et pourrait dès lors, en cas de troisième manche, proposer de mettre dans la balance des choses plus intéressantes que de l'argent. Si en revanche c'était son camarade qui gagnait, il n'aurait qu'à récupérer ses pertes à la sortie de l'établissement. Il n'y avait pas grand chose à perdre, sinon un peu de dignité.

- Tu auras des cigares, et même une paire de botte si tu veux.

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'Le Hasard' : 4

Russian Roulette

Keep your poker face

Il me questionne sur le goût du tabac, et pour être honnête, je ne suis pas certain de bien savoir quoi lui répondre. Son effet puissant dépasse largement toutes les substances que j'ai bien pu essayer depuis que je suis à Poudlard. « Ouais » mentis-je. C’est surtout très fort… la fumée m’arrache tellement la gorge que je ne sens plus grand chose, si ce n'est mon palais qui me brûle. Malgré tout, je m'obstine à tirer une seconde taffe, désireux de prouver ma résistance, avant de le tendre à Nikita. Après tout, c'était un travail d'équipe, de l'obtenir... Alors, à lui de se mouiller un peu aussi. Lorsqu'il se saisit à son tour du cigare, ses yeux ne tardent pas à trahir une légère irritation... Mais ses poumons semblent tenir bon sans recracher subitement toute la fumée qu'il a profondément inhalée. J'ouvre la bouche, à la fois plutôt admiratif, mais aussi un peu frustré : comment ça se fait qu'il tienne mieux que moi... ? Il est plus jeune et ne semble pas avoir l'habitude de fumer ! Pourtant, il y a quelque chose d'adulte dans sa posture. Il finit par lâcher avoir un plan pour la prochaine manche, et je m'adosse au mur sans le quitter des yeux, intrigué. « Tu m’intéresses. » J'étudie silencieusement sa proposition, qui consisterait donc à surenchérir continuellement sur nous-mêmes pour dissuader nos adversaires, et profiter de notre avantage financier... Théoriquement, ça pourrait jouer en notre faveur. Cela dit, j'ai quelques réserves concernant nos adversaires... Pour avoir déjà joué quelques parties contre eux, je sais que Selwyn ne se décourage pas facilement, et que notre coup de pression pourrait bien se retourner contre nous. Enfin, peu importe ! J'ai surtout envie qu'on y retourne, et de leur montrer de quoi on est capables. « Tu veux dire qu’on joue le tout pour le tout ? Ok, j’te fais confiance, je kifferais rentrer avec une nouvelle paire de bottes. » Disons que je me fierais davantage à son niveau de stratégie qu’au mien… Il n’aura qu’à être la tête, et je serais les bras, ce qui paraît être une excellente idée si l’on évite de considérer mon absence de muscles.

Maintenant que nous sommes tombés d'accord sur un plan d'action, je pousse à nouveau le battant de la porte, laissant passer mon acolyte et m'introduis lugubre dans le bâtiment à sa suite. Joe est toujours planté derrière le comptoir, à essuyer des chopes et à faire léviter des cornes à boire remplies d'un liquide mousseux jusqu'à une table de vieux sorciers qui semblent uniquement vêtus d'animaux empaillés... Le plancher grince sur nos pas, lorsque je m'arrête à nouveau à la table que nous occupions avec Selwyn et sa clique. « Messieurs, mon associé et moi-même sommes de retour, pour plier un classique. » annoncé-je sur un ton faussement solennel. Sans faillir, je les dévisage tour à tour, pour leur montrer que je ne les crains pas et que leur manège n'a pas eu l'effet qu'ils espéraient... Enfin, intérieurement, j'ai les chocottes, mais rien ne sauraient en témoigner à part la sueur qui dégouline dans mon dos et mes mains moites. « Dépêchez-vous de déposer vos mises, les gosses. » nous lance le sorcier aux gros sourcils et aux cheveux huileux, les jambes croisées sur la table, probablement pour nous mettre un coup de pression. L'homme à l'haleine fortement alcoolisée s'empare des cartes pour les distribuer, d'un geste vif, et nous jette à chacun deux éléments qui constitueront notre main. J'échange un dernier regard entendu avec Nikita et m'en saisis pour les examiner... Son idée de faire équipe pourrait-elle fonctionner ?

Rien n'est moins sûr... en observant le gobelin et le rat qui figurent sur mes cartes, je me demande s'il ne serait pas plus raisonnable de me coucher tout de suite.

@Nikita N. Yaga

rainmaker

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'Le Hasard' : 5, 6

A cet instant précis, Nikita n’était pas certains de se faire confiance à lui-même, mais il devait bien trouver un moyen de forcer le destin s’il voulait atteindre ses objectifs et dans le cas présent, la défaite de Kenneth requérait un peu d’audace à arracher. Son père serait assez fier de lui, il en était certain, aussi hocha-t-il la tête quand son camarade acquiesça à son plan. Le jeune homme semblait n’avoir peur de rien, c’était assez bluffant, mais il faisait ainsi preuve d’une certaine forme de naïveté à son égard. Il aurait dû être d’avantage méfiant. Nikita trouva cela presque triste, un instant, mais sans savoir s’il l’était pour Kenneth, qui se faisait rouler, ou pour lui-même, incapable de profiter sincèrement de sa victoire sans devoir tout remettre en jeu pour un objectif tordu.

En pénétrant de nouveau dans le pub, l’atmosphère chargée le reprit à la gorge et l’espace d’un instant, alors qu’il se dirigeait vers la table, il fut pris de doute. Il n’était plus si certain que tricher contre ces trois types soit une si bonne idée que cela. Dehors, il n’y avait que Kenneth qui comptait, mais dedans, il devait gérer une menace supplémentaire, et au vu des regards qu’on leur décochait, ces trois-là semblaient n’avoir toujours pas digéré la manche précédente.

Silencieusement, tâchant de ne pas montrer son anxiété – il ne devait pas donner à son camarade l’impression qu’il était une poule mouillé – il reprit sa place sur sa chaise et laissa distribuer, tout en plaçant au centre de la place un gallion d’or. Celui-ci lui appartenait en propre, cette fois, et cela donnait soudain à la partie une autre atmosphère. Plus sérieuse. Après tout, ce serait également sans doute aussi la dernière.

Tout en ramassant ses cartes, il croisa le regard appuyé de Kenneth, mais n’osa pas hocher la tête dans sa direction, aussi le soutint-il une seconde, avant de revenir à sa main. Son camarade lui faisait confiance, du moins en donnait-il l’impression. Sinon, pourquoi l’aurait-il amené jusqu’ici ? Pourquoi accepter son plan ? Les astres s’alignaient, d’une certaine manière, c’était donc l’occasion ou jamais de transformer l’essai. Il jeta un coup d’œil à sa main.

Rat. Et Gobelin. Littéralement la pire main possible. Dans son esprit, il revit tout son plan défiler et il douta. Peut-être était-il encore temps de tout arrêter ? Il releva le nez de sa main mais sentit plusieurs paires d'yeux posées sur lui. Impossible d'adresser le moindre signe à Kenneth sans révéler la triche. Il déglutit. Il ne devait pas se laisser déstabiliser. Après tout, il restait encore la possibilité que les cartes sur la table leurs soient favorables. Ou, que le bluff fonctionne. Oui, ça laissait une chance. S'il se couchait maintenant, Kenneth penserait qu'il s'était dégonflé, et si le jeune homme avait une main formidable, il lui en voudrait sans doute de ne pas avoir monté les enchères pour lui... c'était insoluble. Quoique, pas tant que ça. Il pouvait essayer de sonder l'esprit de son camarade, de l'autre côté de la table, pour révéler sa main dans ses pensées. Quoi que ce ne soit pas sans risques non plus, si Kenneth réalisait l'intrusion, il perdait l'un de ses meilleurs atout à Poudlard.

Nikita aurait sans doute continué de se torturer le cerveau longtemps quand, le faisant littéralement sursauter, Selwyn grogna.

- Je relanche. Panique pas gamin.

De sa grande main, il vint déposer un gallion dans la bourse au milieu de la table, qui rota bruyamment. Sentant son regard inquisiteur sur lui, Nikita hocha la tête, tâchant de rassembler ses esprits.

- Je relance aussi.

Vraiment, il n'était vraiment pas sûr que ce soit la bonne stratégie, mais on n'allait pas lui laisser le temps de réfléchir trois heures, et s'il semblait trop douter, il serait impossible de tenir le bluff derrière. Il fallait de bonnes cartes au centre, ou que Kenneth ait une bonne main, ou les avoir à l'usure. Ça pouvait le faire. Sentant l'adrénaline lui parcourir l'échine, il observa les autres renchérir tous aussi, puis Selwyn porta la main au centre.

- Griffon.

Et merde.

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#1 'Le Hasard' : 5, 6

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#2 'Le Hasard' : 4

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