Primordial chaos

Comme à chaque fois que je ressens le besoin pressant de me plaindre de mes parents, je rejoins August sur les toits. On reste là une demi-heure, nichés entre les remparts comme deux oiseaux migrateurs, une clope fourrée dans le bec, le visage levé vers l'horizon s'obscurcissant... les nuages passent et s'agglutinent, comme une gigantesque masse cotonneuse. Ces moments me sont précieux ; je retrouve mon meilleur ami, son humour acide, notre complicité d'antan, nos discussions tardives au crépuscule... Voilà le meilleur remède à la mélancolie. L'extrémité de la cigarette s'embrase et je tire une longue taffe qui manque de me causer une quinte de toux... Les yeux fixés sur la chaîne des Highlands au loin, je continue de relater mes malheurs, quelque peu scandalisé. "Tu te rends pas compte. Une thérapie familiale ! C'est leur dernière idée à la con." C'est ce qu'annonçait en tout cas la dernière lettre de ma chère mère, qui déclarait d'une écriture soignée avoir pris rendez-vous avec un certain Dr. Goldberg pour régler "nos problèmes de communication" et "améliorer nos relations conflictuelles". Mon cul ! Si on est en conflit aujourd'hui, c'est parce qu'ils sont lâches et égoïstes, je ne vois pas ce que j'ai à voir là-dedans. Les jambes croisées sur les pavés de pierre qui recouvrent le sol de la tour, avachi contre la muraille, je poursuis, l'air passablement révolté : "Ils veulent vraiment qu'on se ramène devant un inconnu et qu'on leur déballe toute notre vie. Je m'en tape, je m'y pointerais pas : dans cette famille, ceux qui ont besoin de se faire soigner, c'est eux." poursuivis-je, sourcils froncés. Sérieusement, quand je pense que certains s'imaginent que faire partie de la descendance de Monsieur le Ministre est un privilège... ça se voit qu'ils ne connaissent pas mes vieux, ils préfèreraient mille fois être orphelins.

Ce soir, nous n'avons pas vu le temps passer. L'air a commencé à se rafraîchir, et je devine aux bruits lointains qui résonnent quelques étages plus bas que le banquet vient de s'achever. Nous aurions du nous mettre en route, mais nous nous perdons en confessions, nous remémorons quelques souvenirs, singeons le ton de certains profs. Puis, lorsque la température extérieure a enfin raison de nous, le ciel est noir comme le plumage d'un corbeau. "Allez, on se les caille." lancé-je en amorçant le mouvement, massant mes articulations endolories en me relevant. Sur les pas d'August, je descends l'escalier en colimaçons seulement illuminé par les torches au mur, tout en adressant des doigts d'honneur aux portraits qui nous font des réflexions. Une fois arrivés au septième, je me sépare du Gryffondor, qui se dirige vers le portrait de la grosse Dame, pendant que je poursuis ma route jusqu'au premier. C'est bien ma veine, il n'y a pas âme qui vive... ! À la lueur de ma baguette, j'oriente mes pas, traverse les couloirs, manque de percuter une armure dans la précipitation. Mais alors que je tourne à l'angle du second étage, passant devant les toilettes des filles, je tombe nez-à-nez avec un visage bien connu, à peine visible dans l'obscurité. "Oh oh, pris sur le fait." Ashton Chipperfield est visiblement de corvée de ronde, ce soir... on peut dire que j'ai de la chance, le préfet de Serdaigle est un ami, sa collègue McGregor est nettement plus pénible. Croisant les bras sur ma poitrine, je laisse mes commissures de lèvres s'élargir en un sourire espiègle. "Qu'est-ce que je dois faire, monsieur le préfet ? Mettre les mains en l'air avant que vous me passiez les menottes ?" C'est que même s'il incarne une figure d'autorité, ce mec-là dégage un fort magnétisme. Voilà un minois pour lequel je consentirais bien à me faire envoyer en retenue !

@Ashton B. Chipperfield

Primordial chaos

À travers la pénombre, seule la lueur faiblarde des cierges fait naître les traits de mon interlocuteur. Quelque part dans le dédale de couloirs entre le premier et le deuxième, on dirait bien que nous sommes les deux seules âmes qui vivent. Un lourd silence s’est installé, on n’entend que le son de cor lointain qui provient de ce grand tableau de scène de chasse, installé un mètre au dessus de nous. Insolent, je ne me départis pas de mon sourire : je connais Ashton depuis ma première année, je sais n’avoir que peu à craindre de sa part. Un stupide insigne et un semblant d’autorité ne suffit pas à changer un individu… enfin, c’est ce que j’aurais dit, avant de voir mon père endosser le costume de ministre. Inutile, donc, de m’empresser de chasser cette haleine de tabac froid dont ma bouche empeste… mon interlocuteur n’en fera pas grand état. Sourire narquois aux lèvres, mon préfet bien aimé me rappelle qu'en effet, le règlement n'est pas un grand partisan des sorties nocturnes... J'affiche une moue faussement contrite, comme un enfant pris en faute. « Ça dépend quelles règles, il y en a une qui défend d’aller saluer le plus beau des préfets ? » tenté-je, l'air enjôleur. Tout détenteur d'autorité qu'il est, il ne sera pas insensible à la flatterie, surtout quand le compliment est accompagné d'une oeillade, avant que je n'ajoute en chuchotant : « Dis pas à August que j’ai dit ça. ». Aussi charmeur que soit mon interlocuteur, mon meilleur ami ne peut hélas être déclassé, c'est notre propre loi.

Dans ce couloir, à la merci de mon charmant tyran, je dois dire que je laisse même prendre à mon propre jeu. Quand bien même nous sommes amis, Ashton et ses yeux amande ont toujours eu un certain effet sur moi, ce qu'il sait pertinemment... ! Qu'il y a-t-il de mal, après tout, entre deux cours ennuyeux ou blagues douteuses, à flirter l'air de rien... « Tu vas pas le dire à ma mère, j’espère… » m’amusé-je, une main sur le front dans un geste théâtral. Comme si j'en avais quelque chose à faire... en ce moment, j'ai comme une envie folle de mettre le feu aux poudres : tout ce qui est susceptible de la contrarier me réjouit d'avance. Elle n'est plus la directrice après tout, elle ne pourra rien y faire... Aussi, si me prend l'envie de céder à quelques caprices à l'heure où le château est sans vie, le seul qui pourra m'en empêcher se trouve devant moi, équipé d'un bout de métal qui lui arroge le droit de me renvoyer prestement dans mon dortoir avec une retenue en prime. Sa réponse me laisse cependant croire qu'il n'en est pourtant pas pressé, avec une ordonnance que je me dois de respecter à la lettre. J'abdique aussitôt, levant les bras en signe de soumission. « Je t’en prie, j’adore les fouilles au corps, surtout quand c’est toi qui te portes volontaire. » Oh, il ne se heurtera à aucune résistance, je doute seulement qu'il déniche sur ma personne quoi que ce soit d'illégal... Une fois n'est pas coutume, j'ai laissé au dortoir toute marchandise suspecte et les cigarettes ne sont plus que cendres. En revanche, il pourrait bien trouver plus dangereux que ça.

@Ashton B. Chipperfield

Primordial chaos

J’ai eu de la chance : que la silhouette émergeant de l’obscurité, apparue à l’angle du couloir, me soit bien familière… Légèrement ébloui par l’extrémité brillante de sa baguette, je dois cligner des yeux pour maintenir le contact visuel avec mon interlocuteur. Les flammes vacillantes des torches projettent des ombres dansantes sur les murs, et moi, je lui susurre quelques marivaudages d’un air aguicheur. Nos voix seules résonnent aux alentours, se réverbérant dans un écho lointain. Je suis cependant satisfait de réaliser que nous sommes seuls dans cette aile du château… Peu pressé de voir Aylmer et sa face livide de croque-mitaine rappliquer, je veille à garder mon volume sonore suffisamment bas pour n’être entendu que d’Ashton. « Dans ce cas-là, je suis premier de la classe, sois fier de moi. » Je ne devrais probablement pas fanfaronner : si j’étais tombé sur Violet, j’aurais probablement eu le droit de l’écouter soliloquer sur mon affligeant manque de responsabilité, avant d’être tout droit escorté jusqu’à ma salle commune dans une déversement de réprimandes. Un léger craquement me fait sursauter, mais un coup d’oeil à ma gauche me permet de me rendre compte qu’il provient du tableau au dessus de nous ; celui qui représente une scène de chasse, dont les personnages sont les silencieux témoins de ma transgression nocturne.

Le couloir tout entier devient le théâtre de notre rencontre clandestine, comme si cette dernière n’était pas le fruit du hasard et avait été préméditée… J’aime bien cette image. Difficile de lui résister, à vrai dire. Mon ami a ce sourire qu’il sait ensorceleur, et je suis loin d’être insensible à ses fossettes marquées dans le creux de ses joues. Chaque regard échangé avec lui emplit l’atmosphère d’une drôle de tension… « Alors fais ton devoir, qui suis-je pour me mettre entre la loi et toi… » réponds-je, d'un air faussement résigné, comme si je ne lui offrais mon corps que par sacrifice. Ce dernier s'exécute avec une certaine assurance, ce qui m'amuse au plus haut point : nous avions déjà laissé notre attirance mutuelle déborder parfois sur notre amitié, mais cela n'avait encore jamais franchi les limites du physique... J'apprécie la fermeté de ses doigts autour de mes membres, bien que la sensation soit légèrement chatouilleuse par endroits... et excitante par d'autres, ce que ma virilité ne manque guère de signaler. Je manque presque de lui demander d'insister sur certaines zones, pour m'assurer qu'il ne soit pas accidentellement passé à côté d'un objet de contrebande qui se serait glissé là... Il conclut finalement son examen physique par un verdict clair : mon haleine n'était finalement pas si épurée. Je joue aussitôt les ingénus : « T’es sûr ? Bizarre, ça devait être le goût d’une de mes dragées surprises. » Je sors le petit paquet de ma poche, et glisse un petit bonbon ovale dans ma bouche, que je tiens bien serrée entre mes dents. « Tiens, tu veux vérifier quel goût a celle-ci ? » Je le défie d'un air provocateur, réduisant l'écart entre nos deux visages, jusqu'à sentir son souffle chaud. Mes doigts remontent le long de sa cravate, avec laquelle je joue, l'air de rien, sourire aux lèvres... Dommage, je ne crois pas vraiment que ça corresponde à sa définition de "se tenir à carreaux". Sans pour autant franchir le pas, je lui envoie une invitation qu'il ne pourra refuser.

@Ashton B. Chipperfield

Primordial chaos

Depuis mes huit ans, le diagnostic est posé : j’aime aussi bien les filles que les garçons. Les rondeurs des unes que les membres bien galbés des autres, leur silhouette se dévêtant à travers la vitre opaque des cabines de douche… Depuis que Nico, de ma bande de Cricklewood Square, partageait ma chambre et que j’observais d’un oeil curieux son torse dénudé, à la dérobée. Depuis que j’ai embrassé Jane, la soeur de Lee, derrière le grand cèdre. Et lorsque j’ai cessé d’être ce gringalet boutonneux dénué de charisme, je me suis lancé dans cette grande exploration de ma propre sexualité, héritant parfois de suffisamment de vestes pour être rhabillé pour l’hiver. Alors pourquoi Ashton, au physique athlétique de poursuiveur et au charme indéniable, échapperait-il à la règle ? Nous voilà à un angle de couloir, l’un face à l’autre, sous l’oeil attentif d’une statue de griffon, nous défiant du regard jusqu’à ce que l’autre cède. Nos corps se rapprochent comme des aimants, et sous quelques taquineries un brin ambiguës, me voilà à moins d’un pas de lui, prêt à lui céder bien volontiers. Sa force d’attraction est férocement efficace sur moi, me voilà entièrement à la merci de ses phéromones… Sous ses faux airs d’adjudant, je sais qu’il est réceptif à mes appels, et l'écart se réduit entre sa bouche la mienne : le voilà qui s'empare de la petite dragée que je tenais fièrement. À une heure où même les esprits somnolent, nos ombres ne font plus qu’une, sur la pierre froide du sol poli. Le contact furtif de ses lèvres tièdes me fait doucement frémir... Je suis même tenté d'en redemander.

Mais Ashton ne se fait pas prier ; se saisissant d'un petit bonbon qu'il coince à son tour entre ses incisives, il m'invite à venir m'en emparer prestement. Sa main, taquine, descend subtilement jusqu'à se déposer sur ma hanche... Espiègle, je hausse les sourcils, faisant mine d'approcher jusqu'à toucher son front, sans ne jamais franchir le seuil de ses lèvres... avant de lui glisser : « Tes désirs sont des ordres. » Et je ne m'embarrasse plus de ces jeux de séduction : ma main se dépose sur sa mâchoire et ma bouche épouse la sienne avec passion. On n'entend plus le cor, issu de ce tableau de scène de chasse... les murmures, même les plus imperceptibles, se sont tus tandis que laisse ma langue côtoyer la sienne. J'ai bien conscience que ce baiser assassine le côté platonique de notre amitié qui subsistait, mais au fond, quelle importance ? C'est curieux, cette sensation qui naît dans mon bas-ventre, mais guère désagréable... J'ai envie de prolonger l'instant jusqu'à me rassasier de lui, mais pour l'instant, je me satisfais de mon premier objectif, me retirant lentement. Triomphant, j'entrouvre légèrement la bouche pour lui dévoiler mon bien volé : la petite dragée rose, qui répand son goût sucré sur mon palais. « La procédure est bien respectée, comme ça ? » fis-je mine de m'assurer, le regard fiévreux, comme si j'étais à cheval sur les protocoles. Pour autant, la partie n'est pas terminée, puisque mes doigts habiles entreprennent maintenant de défaire le noeud de sa cravate. Et je m'approche de son oreille, pour lui glisser discrètement, comme un secret : « Et au fait, tu sens la barbe-à-papa, Chipperfield. »

@Ashton B. Chipperfield

Primordial chaos

Nous ne sommes pas naïfs ; lui et moi savions tous deux que cela finirait bien par arriver, que nous nous retrouverions dans une situation où nous ne saurions plus contenir nos penchants l’un pour l’autre. Réceptif à son charme depuis nos premières années, j’estime que cela n’a jamais été un obstacle à notre amitié. Maintenant qu’il caresse ma mâchoire et que ma virilité s’en retrouve quelque peu ébranlée, j’estime que nous avons franchi un certain cap, quand bien même je ne connais pas sa signification. Afin de détendre un peu l’atmosphère, je l’interroge sur la procédure… Comme si son rôle de préfet devait intervenir au sein de cette drôle de situation. « Tu n’auras qu’à me les apprendre. » Sujet à cette drôle d’attirance qu’il exerce sans vergogne sur moi, j’ai un grand plaisir à lui servir de pantin. Il pourrait bien se servir de moi et aller ensuite me balancer aux professeurs que je ne m’en formaliserais pas outre mesure, tant qu’il me permet de l’embrasser encore. Mais mon ami est impatient ; je comprends à ses regards fuyants qu’il n’a pas l’intention de s’éterniser ici. Rapidement, il m’intime de le suivre… Me laissant guider, je décide cependant de jouer les rebelles sur le pas de la porte. « Je comprends, si on nous trouvait ça ferait plutôt "mauvais genre". » J’esquisse une petite moue, avant de rire et de l’attirer à moi, par sa cravate dénouée. L’étoffe bleue coincée entre mes doigts, je le tiens à ma merci, prêt à unir mes lèvres aux siennes dans un élan fiévreux. Pourtant, j’arrête ma bouche à quelques centimètres seulement de la sienne, empourprée. Durant quelques secondes, je contemple son visage… Provocateur, je lui souris en tirant de son col la fameuse cravate, dont je m’empare comme un trophée de chasse.

Je me laisse entraîner bien volontiers à sa suite, dans cette de classe dont nous serons les deux seuls élèves. Éclairés à la lueur lointaine des torches et à la lumière de la lune que dévoilent les embrasures, nous devinons à peine nos traits respectifs dans cette obscurité… Cela ne fait rien. Nos corps prennent le relais, nos mains se touchent, nos bouches se lient, nous nous explorons l’un l’autre. Pourtant, mon camarade me pose cette étrange question, au moment où j’ai le sentiment que nous allions enfin passer aux choses sérieuses… « Haha, et pourquoi je ferais ça ? » demandé-je, le regard animé d’une drôle de lueur. Qu’il se rassure, je sais bien ce que je veux. Ivre de désir, j’éprouve bien au contraire l’envie d’assassiner toute distance entre nous et d’en profiter jusqu’au bout de la nuit. J’imagine que mes parents auraient jeté sur cette petite aventure un regard réprobateur, mais je m’empresse de chasser aussitôt leur image, considérant qu’ils n’ont pas leur place au coeur de la nuit, là où les torches peinent à éclairer nos pas. Je laisse glisser un index sur les fines lèvres du Serdaigle. « T’as peut-être les chocottes, mon Ash, mais c’est pas mon cas. » Je me hisse sur le bureau jusqu’à m’y asseoir, et entoure la taille du préfet de mes jambes. Puis, je laisser errer mes doigts prudemment jusqu’à l’extrémité de sa chemise, frôlant les quelques centimètres de peau tiède qu’elle dissimule. D’un air espiègle, je relève les yeux vers mon ami : « Je peux… ? » demandé-je, n’attendant que son signal pour m’inviter à pénétrer ce territoire jusqu’alors inconnu. Sous ma paume, je peux sentir la contraction de ses muscles et une légère chair de poule… L’avantage, avec les garçons, c’est qu’ils se formalisent moins d’une main baladeuse passée sous le tee-shirt que les filles. À croire que c’est un crime majeur chez ces dames de se laisser peloter en bonne et due forme… ! Je veux explorer chacun de ses grains de beauté.

@Ashton B. Chipperfield

Primordial chaos

Seuls, à la lueur des torches, il naît de nos échanges de regards appuyés tout autre chose que lorsque nous sommes entourés de nos camarades. La tension entre nous prend vie et ne tarde pas à se traduire par des gestes sensuels, des chuchotements aguicheurs, puis un premier baiser langoureux. Et je voudrais que la nuit jamais ne termine, nous enveloppant avec elle de son voile sombre pour ne pas que l’aurore ne nous rappelle à elle trop vite. Alors, serais-je un bon élève ? Je fais mine de réfléchir avant de répliquer un laconique : « Non ». Trop indiscipliné, trop inattentif, incapable de me contenir. Je suis une bombe à retardement qui menace d’imploser à chaque seconde. Toutefois, mes mains attrapent le col de sa chemise et je murmure, enfiévré : « Mais pour toi, je veux bien en devenir un. » Et pour joindre la parole aux actes, je me hâte de le suivre dans la nuit noire, euphorisé par cette douce excitation. Il enclenche la poignée de porte, qui laisse se dessiner une embrasure dans un grincement significatif, et nous nous y introduisons avec empressement, refermant soigneusement derrière nous ; le monde extérieur peut bien s’arrêter de tourner quelques instants. On se faufile comme des voleurs vers les rangées de tables désertes, seulement éclairées par le reflet de la lune. Ce serait en effet dommage que notre petite aventure lui coûte son insigne, mais égoïstement, je veux bien courir le risque. « C’est vrai » réponds-je, prenant mes aises sur le pupitre auquel je me suis arrimé, avant d’attirer le menton de mon camarade par l’index : « Et puis se faire pincer par une figure d’autorité aussi sexy, ça relève du fantasme. » On se connaît depuis longtemps, lui et moi, mais j’ai l’impression que c’est ma première rencontre avec cette partie de lui. Il me plaît, ce gars à la voix suave et au sourire nonchalant, dans toute sa superbe insolente. Alors quand se présente l’opportunité de redéfinir les limites de notre amitié, je n’hésite pas bien longtemps.
Après tout, le platonisme, ça m’emmerde.

Et je me demande, en effleurant sa gorge avec mes lèvres, en faisant le tour de sa nuque du bout des doigts, en parcourant son échine, si je le connais vraiment. J’en ai l’impression, même si au fond, tout ce que je sais de lui, c’est ce qu’il veut bien me laisser entrevoir de sa personne… On parle ensemble de tout et rien, on se plaint de nos cours, on tire parfois, on n’est jamais sérieux. Lorsque le Poudlard Express arrive à quai en Juin, je ne suis même pas sûr de savoir où il se rend. Et au fond, est-ce un problème ? « Je finirais bien par te découvrir tout entier. » répliqué-je, provocateur, une lueur d’amusement illuminant mon regard. Aussi bien au propre qu’au figuré, puisqu’il m’accorde l’autorisation d’explorer de nouveaux reliefs… Je m’exécute donc sagement, glissant mes doigts sous le tissu de sa chemise pour parcourir son abdomen. Sentir ses muscles raffermis et légèrement gonflés sous ma paume accroît mon excitation ; je me sens comme un gosse qui brave une interdiction. Je resserre mon étreinte et me rapproche de son oreille… que je me risque à mordiller légèrement. « Si tu le prends comme ça… je vais pas me gêner. » susurré-je en caressant sa peau tiède et marbrée avant d’être gêné par un premier obstacle. J’entreprends de défaire immédiatement le bouton qui me barre la route, puis un second, sans cesser mon exploration de ces nouveaux territoires, jusqu’à finir par ôter sa chemise. Il en fait de même avec la mienne, et je laisse échapper un râle de plaisir lorsqu’il s’empare à nouveau de mes lèvres ; ce n’est pas la première fois que je flirte avec un garçon, mais je n’avais jamais été aussi loin auparavant… Curieusement, ça ne me fait pas peur. Je laisse ma bouche s’égarer dans son cou, puis descendre jusque dans le creux de sa clavicule, laissant la poudre se répandre jusqu’à faire naître de notre échange charnel un formidable brasier. Je m’attarde du côté de ses pectoraux, joliment sculptés par les entraînements de Quidditch et pars à la découverte de son dos nu, frémissant au contact de mes phalanges. Durant quelques secondes, je prends le temps de l’observer longuement : charmant éphèbe aux yeux d’amande. Enfin, j’achève mon voyage à la frontière de ses hanches, entreprenant d'ôter la ceinture récalcitrante qui me barre l’accès à ses parties plus intimes. J’ignore si ce pouvoir qu’il exerce sur moi a un nom, mais je consens à m’y abandonner volontiers, pour peu que cela m’offre encore quelques précieuses minutes pour me repaître de lui.

@Ashton B. Chipperfield

Primordial chaos

J'ignore où je vais, ou ce que me vaudra cette incartade dans une salle de classe, une nuit où nous n'aurions pas du nous y trouver. Et je m'en moque bien ! Tout ce qui m'intéresse à l'heure où chacun dort profondément, c'est Ashton et ses baisers langoureux, n'en déplaise à ceux qui auront cours dans cette pièce dans quelques jours. J'ai envie de laisser mes doigts et ma langue parcourir chaque parcelle de sa peau, j'ai envie de trouver ce qui le ferait gémir de plaisir. Dévoré par l'envie pressante d'abattre les dernières barrières qui nous séparent, je joue avec lui, je l'amène à moi avant de m'arrêter subitement, me divertissant silencieusement de cette frustration naissante que je suis en train de créer chez lui. « Zut, t'as percé à jour mon petit manège. » soufflé-je en m’appropriant son cou pour y apposer mes lèvres. Et puis, nous voilà embarqués dans une drôle de valse : nos corps s'emmêlent pour ne former plus qu'un, nos soupirs se confondent, nos caresses s'intensifient. Malgré quelques gestes maladroits, je suis inlassablement ramené à lui, comme si j'étais le pantin d'une étrange sorcellerie... J'ai un frisson à chaque fois qu'il m'effleure, soumis à cet étrange magnétisme qu'il opère sur moi... Et tout à coup, je sens ses mains dans le bas de mon dos, descendre le long de mes cuisses en rapprochant son bassin du mien, me retrouvant bien vulnérable devant lui ; c'est furieusement excitant. Et lorsque enfin nous nous retrouvons dans nos plus simples appareils, il ne nous faut qu'un instant pour franchir cette maudite ligne.


Je me laisse tomber sur le sol à bout de souffle, ruisselant, fixant le plafond d’un air béat. Putain, c’était bon. Enfin… sauf cette écharde qui s’est planté dans mon pied pendant qu’il me maintenait appuyé contre le mur, et la sensation rugueuse de cette latte de plancher pendant que je m’emparais de ses hanches. Avec un sourire en coin, j'éponge mon front du dos de la main : « On peut dire que tu sais y faire, mon champion. » Je ne m’étends pas sur mon ressenti personnel, ça fait puceau inexpérimenté. Pourtant, jusqu’ici, mes seules explorations anatomiques s’étaient révélées catastrophiques : il y a Katie, la fille de Gryffondor qui m’avait laissé la peloter sous la ceinture et qui a fini par me gifler parce que j’ai commis l’erreur de me gourer sur son prénom, et… ah oui, ce poursuiveur de Serdaigle ; on s’était chauffés dans les vestiaires et on était prêts à passer à l’acte, jusqu’à ce que… je découvre son tatouage de marque des ténèbres sur l’omoplate. Comment dire, ça a un jeté un léger froid entre nous ! Mais avec Ash, j'ai le sentiment d'avoir franchi un cap nouveau. Amusé, je constate autour de nous les dégâts : on s'est adonnés aux plaisirs les plus charnels sur ce plancher, sur les deux pupitres du rang de devant et... quant au bureau du prof, j'espère qu'il n'a pas l'intention de s'en servir de sitôt. Et même quelques minutes après que nous ayons terminé nos ébats, je reste grisé, contaminé par cette étrange force qui m'attire inlassablement vers lui... Désireux de détendre un peu l'atmosphère, je me tourne vers lui : « Je te proposerais bien une clope, mais… c’est con, j’ai pas de clope. » fis-je remarquer en ricanant, glissant mes mains derrière ma tête, pour étendre mes bras endoloris par nos exploits gymnastiques. Puis, je tourne la tête dans sa direction : « Faudra remettre ça un de ces quatre. » suggéré-je, le regard animé d'une lueur espiègle. Je ne peux envisager qu'il refuse, après tout, il a bien du la ressentir lui aussi, cette alchimie sauvage entre nous ! Et puis, je ne vois pas pourquoi cette petite aventure devrait nous empêcher d'être amis. « Mais dans les vestiaires la prochaine fois, c'est quand même plus confortable. » ne pus-je m'empêcher d'ajouter en grimaçant. J'ai la désagréable sensation de m'être froissé ou deux muscles, j'ai des fourmis dans les mollets, et on commence à sévèrement se les cailler. Alors, sans perdre de temps, j'attrape nos chemises, abandonnées sur le sol comme les étendards de camps vaincus, et je lui tends la sienne en laissant mes doigts s'attarder autour des siens.

@Ashton B. Chipperfield