Si jusque là Blaze s’était toujours bien amusé à préparer ses rendez-vous avec Sidney, tournant divers scénarios dans son esprit et mettant un soin certain à l’organisation des lieux où ils devaient se rencontrer, cette fois-ci était très différente. Sans doute parce que ce rendez-vous n’avait pas grand-chose à voir avec tous les autres.

Cela ne tenait pas tant à la nature des activités prévues – quoique – qu’à la dynamique qui les présiderait. Pour le moment, Blaze avait toujours été à la manœuvre, à la façon d’un chef d’orchestre qui menait une partition dont, à défaut d’en connaître la trame exacte, il connaissait l’état d’esprit général et le rendu souhaité. Cela n’avait pas empêché quelques aléas de temps en temps, bien sûr, mais globalement il restait aux manettes d’un bout à l’autre, exception faite de cette fois où il s’était ligoté lui-même comme un crétin.

Rien que d’y penser il leva les yeux au ciel.

Si ce rendez-vous là était spécial, c’était que chacun était un peu sorti de son rôle. Blaze avait lâché du leste côté horloger machiavélique et Sidney… Sidney avait réussi à assumer ses désirs. Ce n’était pas certain que l’élan de courage du jeune homme persiste intacte après quelques jours, mais ce qui était dit ne pouvait être repris. La parole lâchée ne reviendrait pas en cage.

Ce n’était pas non plus du tout comme avec Skyler, déjà, il n’y avait pas de sentiments, du moins de son côté : juste une forme de curiosité amicale, et un cocktail d’hormones d’adolescent de dix-huit ans. Ensuite, Blaze avait plus d’expérience, du moins autant qu’il estimait en falloir pour ne pas complétement s’avancer dans l’inconnu. Mais cela restait de l’inconnu malgré tout, c’était l’intérêt d’une aventure, de sa conception de l’aventure, et rien pour ça une forme de tension sourde ne l’avait pas quitté de la matinée, et tendait même à s’accentuer tandis que l’après-midi avançait.

C’était pour ça qu’il avait jeté son dévolu sur Sidney, au départ, même quand il n’avait pas l’ombre d’un projet le concernant. Le garçon était fragile, timide, sans véritable personnalité affirmée, suiveur et peureux. Pas mal de défaut en somme, certains persistant d’ailleurs encore aujourd’hui, mais qui avaient le mérite de le rendre assez peu menaçant. On ne craignait pas vraiment de la part de Sidney qu’il vous dénonce, qu’il cafte aux autres ou qu’il cherche à vous humilier. Il n’en avait juste pas la carrure et, Blaze avait fini par le comprendre, pas l’état d’esprit. Mélange de lâcheté et de gentillesse, sans doute. Le préfet préférait croire que c’était plutôt cette dernière qui primait chez lui. On ne passe pas tant de temps avec quelqu’un sans finir par s’attacher un peu.

Si Blaze s’appliquait ce soir, c’était aussi pour Sidney d’ailleurs. Non pas pour lui tendre une espèce de piège machiavélique comme il l’avait fait tant de fois, mais parce qu’il savait pertinemment que le jeune homme serait complétement mort de stresse et aussi que c’était la première fois qu’il se retrouverait dans une situation… intime. Disons-le ainsi.
Or les premières fois, c’était important. C’était symbolique. Et quitte à aborder la chose avec une forme de curiosité utilitaire, il n’était pas question que tout ça prenne la froideur glauque d’un protocole expérimental. Ce n’était vraiment pas l’état d’esprit ! Si Blaze tentait cette aventure-là, c’était bien qu’il y avait un intérêt sincère, une excitation mal définie, mélange d’attirance, de goût du pouvoir et aussi juste sa personnalité qui voulait que tout ce qu’il ne connaissait pas devienne immédiatement une source de désir, quitte à ce qu’il s’en désintéresse complétement une fois celui-ci assouvi. Le jeune homme avait passé ses années d’adolescence à pousser chaque porte du château, explorer chaque recoin, chercher les passages secrets, s’attirer l’amitié ou la haine de ses camarades, parcourir les livres de la bibliothèque, explorer – quand il le pouvait – la forêt interdite ou les tréfonds du lac noir… il avait vécu chaque expérience comme une aventure, un shot d’adrénaline particulièrement satisfaisant mais qui menait sans cesse à quelque chose d’autres.

Aujourd’hui il lui semblait avoir exploré tout ce qu’il y avait à explorer. Bien entendu il restait des livres à lire, des sorts à apprendre, et sans doute des secrets à Poudlard qu’il ne connaissait pas. Mais dans un sursaut de conscience, sa curiosité se tournait désormais vers l’après, ce monde inconnu et vierge qu’on appelait l’âge adulte. Il avait suffisamment vécu comme un enfant, il était temps de sortir de l’adolescence.

Enfin… à bien y réfléchir, ce n’était pas tout à fait exacte. Il lui restait encore quelques petites affaires à régler. Gagner la coupe des quatre maisons, régler ses comptes avec les Sherwin, s’assurer que Serdaigle était entre de bonnes mains, que ses amis sortiraient de Poudlard la tête haute.
Et Sidney. Il avait envie de parachever ce qui se tramait inconsciemment entre eux depuis presque deux ans. Donner un sens, une conclusion à toute cette histoire, une résolution, un point final à sa curiosité, à cet espèce d’étrange fascination que provoquait chez lui le jeune homme, chez qui il se contemplait en reflet. Il voulait aller jusqu’au bout, mais pas par la ruse ou la méchanceté. Leur offrir une fin heureuse.

Normalement la potion de Judith n’était pas censée servir à cela, mais comme au moment du bizutage en début d’année, Blaze en avait avalé une gorgée. Juste de quoi augmenter ses pouvoirs, assez pour façonner son environnement à sa volonté.
Les lits de sa chambre avaient été repoussés au fond de la pièce, laissant un espace central dégagé. Dans un effort de concentration, il métamorphosa une assiette en une sorte de cuve qu’il modifia de nouveau pour lui donner l’apparence d’un bassin en pierre, dans une ambiance qui faisait un peu nature. Hm, ok, c’était pas mal. Il suffisait de le remplir d’eau, ce qu’il fit d’un coup de baguette. Ça faisait un peu jacuzzi extérieur, sauf qu’on était dans sa chambre, dont il enroula les tapis les plus proches du bassin, révélant la pierre en dessous, pour ne pas tout tremper en cas d’éclaboussures.

C’était quand même un peu bizarre. Blaze visa sa création et puis, dans un réflexe agacé, il l’effaça. L’idée de tout préparer à l’avance, comme une pièce de théâtre millimétrée, non, ça ne lui convenait pas. Ça faisait redite. Sa chambre était en bordel, chamboulée par ses sorts, il renonça à tout remettre à sa place d’un coup de baguette. Tant pis si c’était le chaos, c’était toujours le chaos de toute façon. C’était presque l’heure, il se dirigea vers la porte et se plaça dans l’embrasure, attendant que Sidney monte le retrouver.

@Sidney Driscoll

Blaze n’eut pas à attendre très longtemps que le bruit furtif des pas de Sidney dans l’escalier lui indiqua que son camarade remontait la tour. Il commençait à les connaître un peu, maintenant, ces pas-là, à mi-chemin entre la discrétion et la prudence. D’ordinaire il aimait bien les entendre, cela présageait d’une soirée amusante, et instructive, mais cette fois il fut presque tenter de retourner dans sa chambre. Fermer la porte. Faire mine qu’il n’était pas là. Son camarade lui pardonnerait, il le savait bien. Sans doute lui non plus n’en menait-il pas large, même très certainement bien moins que Blaze. Il prit une inspiration profonde alors que le jeune homme tournait l’angle des escaliers.

Il lui adressa un sourire en retour de son salut. Le pauvre, il n’était pas si impressionnant que ça, on avait tendance à l’oublier. Une part du stress et de l’agacement qu’avait ressenti Blaze s’envola. Mais pas complétement, juste avec sa tronche mal assurée et ses hésitations, le jeune homme avait le don de vous donner confiance en vous, par contraste.

- Salut. Répondit-il tranquillement. « Vas-y entre. »

Il se coula lui-même dans sa chambre qui, maintenant qu’il la regardait mieux, était un peu en bazar. La faute aux préparatifs qu’il avait foutu en l’air juste avant l’arrivée de Sidney. Trop artificiel, mais là ça faisait dérangé.

- Désolé pour le bazar. J’ai essayé de reconfigurer la pièce mais ça m’a pas plu.

Les excuses étaient sincères, bien qu’il n’ait pas le ton larmoyant qu’adoptait son camarade quand ce-dernier cherchait à se faire pardonner une connerie qu’en général il n’avait même pas faite.

Bon. Ils étaient tous deux dedans à présent. Comment ça se passait maintenant ? Blaze avait bien conscience que Sidney ne serait à l’initiative de rien ce soir, c’était beaucoup trop lui demander et ça ne le dérangeait pas, il l’avait d’ailleurs choisi un peu pour ça. Mais d’un autre côté, il ne le voyait pas que d’un point de vue utilitaire. Plus maintenant.

- Je… tu veux boire un truc ? demanda-t-il un peu maladroitement, comme si Sidney venait de faire un long voyage pour le rejoindre. D'ailleurs, à part de l’eau du robinet, il n’y avait pas grand-chose.

Il avisa la dégaine de son camarade, notant seulement l'effort vestimentaire de ce dernier.

- Classes les fringues.

Le regard que Sidney lui adresse lorsque ce-dernier surprend son hésitation fait plisser les yeux à Blaze. Qu’il n’aille pas non plus s’imaginer je-ne-sais-quoi, hein, et comme piqué par un élan de fierté le préfet reprend un peu contenance, laissant certains mauvais réflexes reprendre le dessus. Il hocha la tête à la réponse du jeune homme et d’un pas sûr s’en alla chercher un verre qu’il remplit au robinet du lavabo.

De retour dans la pièce, Sidney s’était assis sur un rebord de lit et tout en lui tendait la boisson, laissa promener son regard sur les vêtements du jeune homme, notant l’effort vestimentaire. C’était à l’image de leur relation, Blaze avait cherché à organiser la pièce et l’ambiance – sans grand succès cette fois – quand Sidney s’était juste ramené lui-même, un peu plus apprêté que d’habitude.

Le compliment, sans arrières pensées, arrache à son camarade un de ses iconique rougissement qui cette fois rassure un peu Blaze. On est en terrain familier, tout se passe comme ça doit se passer, et Sidney n’est toujours pas une menace. Pas de raison de stresser en somme, ni même d’être mal à l’aise. Le fond de tension reflue un peu alors que Blaze à côté de son camarade, l’air un peu détaché, adossé au pilier de baldaquin du lit.

- Un jacuzzi, comme la première fois.

Il fait la moue.

- C’est pas tant que j’y sois pas parvenu, mais je sais pas, ça faisait bizarre de t’accueillir direct comme ça, non ?

Il se parle un peu tout haut à lui-même, et tout haut à Sidney aussi. Blaze est las de jouer sa partition en solo, sauf qu’on ne passe pas de la position de chef d’orchestre à celle de duo en un claquement de doigt. Les réflexes ont la vie dure et les rôles se répartissent assez naturellement.

- Enfin je peux te montrer si tu veux.

L’action, il n’y a que ça de vrai. Et va savoir peut-être que ça débloquera un peu la situation ? Il se détache du baldaquin aussi vite qu’il s’y est adossé et levant sa baguette comme… un chef d’orchestre, réinvoque le bassin qu’il avait fait apparaître un quart d’heure plus tôt.

Tout y est de retour : les grandes pierres grises qui creusaient un trou dans le sol où l’on pouvait s’asseoir. Mais vide d’eau.

Blaze adressa un regard à Sidney, le même qu’aurait lancé un maître d’œuvre face à un client.

- T’en penses quoi ?

Blaze attendait sincèrement l’avis de Sidney, parce qu’il n’était pas complétement sûr de son coup, cette fois-ci. Et en même temps, à voir comment ce-dernier se montrait nerveux, Blaze commençait à se demander si l’artificialité de leur rendez-vous ne tenait pas justement à ce que pour une fois il n’avait pas pris les choses franchement en mains… A croire que dissiper un écran de fumée ne donnait que sur un autre, c’était un peu embêtant.

Le jeune homme l’avait rejoint maintenant, toujours avec cette démarche mal assurée et son ton hésitant. Plus hésitant que d’habitude. Le dérapage de tonalité trahit sa nervosité. Blaze pince les lèvres. Ça ne va pas.

- Hm. En fait non, enfin pas comme ça.

En deux pas il s’est éloigné de la cuve. Son cerveau turbine alors que les pièces du puzzle se remettent en place. Bizarre, alors qu’il avait cru être sûr de lui et de ses désirs, du moins de sa curiosité, il semblait que face à la crudité de ces-derniers les choses n’étaient plus si claires. Pourtant le souvenir de leurs précédents tête-à-tête restait tangible, et l’intérêt que ces petits jeux avaient suscité chez Blaze n’était pas feint.

Tout revenait au jeu, pour finir. Avec Skyler, ça avait commencé ainsi aussi. En fait, les règles arbitraires remettaient la responsabilité du déroulé des événements à un tiers, elles éloignaient les jugements et rendaient acceptables les conséquences.

Il hocha la tête de nouveau et se retourna vers Sidney, plus rayonnant.

- Au fond c’est pas notre truc, tout ça ! C’est pas comme ça qu’on fonctionne.

Ce n’était peut-être pas clair mais les idées de Blaze s’agençaient souvent à mesure qu’il les exprimait à haute voix.

D’un coup de baguette il redéroula un large tapis en travers de la pièce et attira quelques coussins qui s’y disposèrent gracieusement. Puis il s’installa sur l’un d’eux en tailleurs et invita Sidney à faire de même non loin de lui.
Du tiroir d’une table de chevet non loin s’extirpa un jeu de carte.

- Bon heu, un truc simple, avec deux cartes, qui a le plus grand nombre ? Genre bataille doublée ?

Honnêtement le jeu en lui-même était un pur prétexte mais déjà Blaze sentait un peu de la tension s’échapper, comme si les choses étaient devenue soudain plus légère et il se détendit sur son coussin.

- Celui qui gagne a le droit de rappeler un truc qu’on a déjà fait et qu’il aimerait refaire.

Blaze inventait les règles au fur et à mesure. Celles-ci lui semblaient honnêtes cependant, relativement sages, et susceptible de faire remonter quelques bons moments, ou des divergences d’opinions par ailleurs. Mais il fallait aussi se donner l’occasion d’aller un peu plus loin…

- … ou alors, il peut proposer une manière dont il aurait préféré que ça se passe, et on essaye.

Un sourire pour Sidney. C’était honnête. Et moins artificiellement amené que tout à l’heure.


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Les deux cartes de Blaze : valeur de 20, pas de pair
➤ 6 de carreau
➤ as de pique
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- Je ne promets rien, répondit-il avec assurance quand Sidney lui demanda de ne pas tricher. Tricher aux cartes, sans doute pas, mais jouer un peu sur les mots pour changer les règles du jeu en cours de route, ça il savait faire.

Désormais confortablement installé sur son coussin, Blaze abattit ses cartes avec un peu de cérémonie. Gagner ou perte n’importait en rien, ce n’était qu’un prétexte, un simulacre assumé, donc il fallait y mettre un peu les formes. Le cérémonial avait son importance.
Et puis même s’il n’y avait pas vraiment d’enjeu, le joueur en lui fut heureux de dévoiler un as, l’une des plus fortes cartes du jeu.

Son partenaire dévoila sa main à son tour, pour une évidente défaite. Pas de pair, le plus gros chiffre remportait donc la mise. Le regard de Blaze croisa celui de Sidney et il hocha la tête, l’air d’annoncer que le bal commençait véritablement maintenant.

Un air pensif passa sur son visage, et des souvenirs dans sa tête. Ils avaient vécu pas mal de situation, quand on prenait la peine de remonter le fil. Certaines n’étaient certes pas très glorieuses, ni pour l’un ni pour l’autre. Un bon paquet de fois, Blaze avait été en posture de chef d’orchestre, ou de marionnettiste, et quand bien même ces rendez-vous aient eut un tour agréable sur le moment, il était difficile de les ressusciter sans ressusciter avec eux le sentiment de pouvoir qu’il y avait distillé et qui lui chauffait les veines à blancs, en même temps qu’il lui laissait désormais un sale goût en bouche.

- J’ai bien aimé te fabriquer un chien en papier, dit-il finalement. Il valait mieux y aller tranquillement, non ? « Mais j’ai une autre idée ce soir. »

Il se releva sans attendre et en trois pas fut près de ses tiroirs dont il sortit une liasse de parchemins vierges. Les sortilèges de papier avaient depuis longtemps été ses préférés, pour les infinies potentialités qu’ils ouvraient, leur simplicité, leur élégance, et aussi parce qu’il s’agissait de sa propre véritable formule, son petit sort à lui qu’il n’avait trouvé dans aucun livre.

Il hésita un quart de secondes sur la nature du sortilège, puis fit son choix. C’était le plus cul-cul, mais Blaze s’amusa de constater que si hier il l’aurait sans doute lancé dans l’objectif d’attirer Sidney, comme une abeille avec de la confiture, cette fois il le lançait en toute connaissance de cause, parce qu’il savait que ça lui ferait plaisir. Le garçon n’était pas difficile à émerveiller, mais ce soir Blaze n’avait rien à lui soutirer, ce qui changeait pas mal la donne.

Il posa sa baguette sur le sommet de la pile.

- Origaminerie.

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➤ 1 ; 2 ; 3 ; 4 = les parchemins se changent chacun en un papillon blanc qui viennent se poser sur la tête et les épaules de Sidney
5 = pareil mais certains sont un peu amochés...
6 = erreur de dosage, il ne réussit qu'à créer des chenilles !
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Les deux autres cartes :
5 de pique, as de trêfle

Cette nuée de papillons blancs fait son effet. C’est que si Blaze n’est certainement pas la personne la plus gentille du monde, il a malgré tout un certain don pour cerner les gens, pour le meilleur et pour le pire. Il n’aura pas été très compliqué de comprendre que Sidney attache beaucoup d’importance aux petits gestes, aux petites attentions, c’est d’ailleurs ce qui rend si facile et satisfaisant de jouer avec lui : le garçon ne manque rien et la remarque la plus innocente, habilement tournée pour laisser croire à un double-sens involontaire, peut être interprétée pile dans son sens caché.

Il hoche la tête lorsque Sidney lui demande de lui apprendre. Ce n’est pas vraiment un secret industriel et Blaze n’avait pas la prétention de s’attribuer le mérite de la confection d’un tel sortilège. Au mieux l’avait-il poussé loin par jeu et intérêt.

Les papillons étaient en tout cas une bonne mise en jambe, ils avaient un peu rendu de la légèreté à leur rendez-vous et déjà Blaze redistribuait les cartes, un peu par formalité, avant de révéler sa paire. Cette fois-ci il fut mis en échec, à un point prêt. Chacun son tour, sans doute.
Non sans une certaine curiosité, il entend Sidney avouer avoir bien aimé… ce qui s’est passé cinq minutes plus tôt. Ah, décidément les réponses sont un peu hors des clous. Il hoche la tête alors que son ami s’explique, conscient d’avoir pour sa part manqué l’aspect intéressant de cette brève séquence.

- Touchant et rassurant…

Autant Blaze se flatte d’assez bien cerner la psyché de Sidney, depuis le temps, autant le garçon réussit quand même encore à révéler des chemins inattendus. Le jeune homme n’a de toute façon pas le temps de mouliner la réponse de son camarade que celui-ci l’invite à se lever, proposant de « refaire » son entrée.

Ma foi.

- Ta victoire, tes règles, répond-il tranquillement.

Pas certain de comprendre exactement ce que Sidney trouve de si intéressant à son arrivée dans les escaliers, mais après tout, chacun ses points d’intérêt. Et puis si cela permet de rebooter ce début de rendez-vous un peu tendu, il faut bien l’avouer, pourquoi pas ?

Blaze se place de nouveau dans l’embrasure de la porte tandis que Sidney disparaît dans l’escalier. Il ne lui faut qu’une poignée de seconde pour réapparaître au coin de celui-ci, revenir se planter devant lui pour le saluer.

Beau joueur, Blaze hoche la tête.

- Salut.

Ça fait un peu formalité mais bon. Quoique. La séquence dérape soudain alors que le jeune homme approche son visage du sien pour y déposer un baiser, chaste, sur la joue. Eh bin. Il prend de sacrées initiatives tout d’un coup. Un peu par surprise, mais aussi dans un mélange de triomphe et de gêne, Blaze laisse échapper un peu de rire. Ca aura pris le temps que ça aura pris mais on y est maintenant, et la situation se débloque enfin doucement.

Il adresse un rapide clin d’œil à Sidney et le fait rerentrer dans la pièce avant d’attraper son bras pour le faire asseoir sur le rebord du lit.

- Ok, faisons ça proprement.

Il y a un petit instant de doute. Embrasser un mec, bizarre, mais sans doute pas si différent qu’une fille après tout. Puis ça va, c’est Sidney. Alors fort de son expérience, il penche un peu la tête et vient poser ses lèvres sur les siennes, sans jeu de langue superflu. Elles y restent quelques secondes, le temps de sentir un peu le bordel du truc et puis, constatant qu’il n’est pas foudroyé sur place par quelque sentence morale, rompt le lien et se redresse, satisfait.

- Pas mal ! Et toi ?

Ce « et toi ? » sort un peu spontanément, moins la marque d’un amoureux transit que d’un apprenti sorcier excité par une nouvelle découverte. Dans la tête de Blaze, c’est comme cocher une petite case. D’ailleurs, assez bêtement, il rebondit avec enthousiasme sur la réponse de son camarade.

- Oui moi aussi.

Sauf que non, bien sûr que non. Lui il a déjà embrassé des filles, ce qu’il veut c’est essayer l’autre bord, voir ce que ça donne de ce côté de la barrière. Pour Sidney c’est… c’est autre chose. Plus vertigineux très probablement. Mais Blaze n’a pas la tête à ça, et puis les choses ont été faites dans les règles de l’art, non ? Alors il n’y a pas de raison que ça ne compte pas comme un premier baiser valide, et puis tant pis si ça ne se fait pas sous une branche de gui avec tout le tralala, les bougies etc.

Tous les baisers ne sont pas des baisers d’amoureux, il serait temps de l’accepter.

Tout émoustillé par son petit test, il se fait presque surprendre par la main du garçon qui vient comme chercher la sienne. Evidement sauf à être un gros psychopathe, c’en est touchant. Et puis cet air qu’il prend, ce ton qu’il a, le genre de chose qui réveille les instincts de Blaze. Il est aux manettes, encore, et ça lui plait bien quand même, de tenir un peu la soirée, de tenir un peu Sidney aussi, hier par la peur, maintenant par le plaisir. Dresser le cap, quitte à se faire surprendre en chemin d’ailleurs.

- Allez !

Après tout, s’il en redemande… mais il ne s’agit pas de refaire la même chose. Blaze n’est pas là pour « passer une bonne soirée » et se bécoter avec Sidney n’est pas un but en soi. Même si ce n’est pas forcément désagréable, c’est d’avantage la découverte qui l’émoustille, plus que tout le reste.

Alors, histoire de pousser le vice jusqu’au bout, il pose sa main sur le torse du jeune homme et le repousse en arrière pour le forcer à s’allonger sur le lit. Comme une fille, oui, puis vient se placer à ses côtés. Pas au-dessus quand même, ce serait bizarre un peu quand même. Mais à côté, sur le flanc, histoire de rester un petit peu plus en hauteur, et venir passer un bras par-dessus lui, s’appuyer de chaque côté de sa tête pour l’embrasser à nouveau, plus longuement, et plus appuyé aussi.

Bilan des courses : moins bien qu’avec Skyler, mais un peu intéressant quand même. Disons que c’est sans doute agréable dans l’absolu, et le fait que ce soit avec un garçon rend la chose originale, stimulante. Après, il ne ferait pas ça toute la soirée.

Il n’aura suffi de pas grand-chose pour que les vieux réflexes rejaillissent à la surface et comme on se coule dans un moule déjà forgé, Blaze reprend ses habitudes un peu meneuses avec Sidney. Au fond c’est certainement comme ça que ça devait se passer, n’est-ce pas ? Il fallait juste le déclic et ensuite les choses s’enchaînent naturellement entre eux, pas besoin de trop se prendre la tête.

L’expérience se révèle concluante, sans transcendance. L’esprit curieux de Blaze se satisfait avant tout de la découverte et de la nouveauté de la situation, plus que des sensations qu’elle procure vraiment. N’empêche que ça n’est pas complétement anodin non plus, et que la douce sensation de puissance que lui procure le fait de mener la barque, couplée à l’intimité de leur baiser, l’embarque vers des émotions exotiques.
Pas électrisantes, pas chavirantes, mais plus douces et plus confortables aussi. C’est moins embrasser un amant qu’un ami, et en conclusion de plusieurs mois à se tourner autour, avec ses hauts et ses bas, cela ouvre vers une conclusion satisfaisante, sous forme de résolution d’une énigme. Il se joue là quelque chose de simplement agréable, et pas prise de tête. Un peu comme rendre service, en fait.

Alors qu’ils s’embrassent, et que Blaze sonde ses sens, il peut sentir Sidney s’agiter contre lui, presque comme s’il signalait se présence. Les réflexes du préfet sont encore assez égoïstes et cette piqûre de rappel recentre ses pensées alors qu’il rompt finalement leur baiser. Pas mal, à nouveau, un peu plus passionné, si ce mot à du sens dans ce contexte.
Blaze se laisse aller sur le côté, la tête dans la main, d’où il sourit à Sidney. Tout ça prend une tournure intéressante, non ? C’est un peu comme cocher des cases dans une liste, à ceci-prêt que la transition entre chacune est encore un peu maladroite. Mais c’est normal, sans doute.

- Pour un premier baiser tu t’en sors pas mal.

Ce n’est pas méchant, ça ignore juste un peu l’autre. S’il avait eut en tête de flatter Sidney, il aurait simplement pu mentir, mais ça n’aurait ni été très juste, ni très crédible.

Quelle est la suite du coup maintenant ? S’embrasser est un chouette amuse-gueule, sans mauvais jeu de mot, et Blaze se retrouve un peu partagé maintenant. Il sait que si une initiative doit venir, elle viendra de lui, même si Sidney s’est montré étrangement plus explicite sur ses désirs depuis quelques temps. Sauf que quoi faire à présent ? Jusqu’ici les choses se sont faites naturellement parce qu’ils n’y ont pas trop réfléchi, aussi Blaze se méfie des plans tout prêts, ça n’a pas trop réussi jusque-là.

- Hum, bon.

Ça reste moins spontané qu’avec Skyler.

- Honnêtement, je kiffais bien quand t’étais un peu gêné, explique-t-il d’un ton badin. « C’est plutôt stylé d’arriver à te faire rougir avec genre un geste ou des mots. »

Et disant cela, il laisse promener deux de ses doigts sur le torse du garçon, comme si un petit bonhomme s’y baladait l’air de rien.

- Après l’idée c’est pas de te mettre mal à l’aise non plus.

Ça l’a été, c’est certain, mais ce que Blaze voudrait bien retrouver est plus à chercher dans cet espèce d’équilibre entre découverte et rapport de force. Ce sentir tout puissant, invincible, désirable. Ubris de jeune homme qui se cherche, même si sans doute que ça n’excuse pas d’avoir été un salaud.

Les deux petites jambes du petit bonhomme ont atteint le col du t-shirt de Sidney sur lequel un doigt vient négligemment tirer.
Blaze soupire, sincèrement tiraillé entre deux sentiments contradictoire : une forme de bienveillance paternaliste d’un côté, et le désir de ressusciter ces sentiments plus sombres qui l’habitaient encore quelques mois auparavant, et nourrissaient leur relation toxique.

Alors il se redresse soudain sur le lit, en position assise, une espèce d’air soucieux sur le visage, point final d’une réflexion partiellement confuse et solitaire qu’il partage avec son camarade. Après tout il est le premier concerné.

- Je suis pas sûr que ce soit ça qu’il te faut, pour être honnête. Enfin, ce serait pas cool de ma part de t’embarquer là-dedans si ça doit être, genre, ta première expérience.

On ne va pas se le cacher, la réaction de Sidney est surprenante. Imprévue tout du moins. Le genre de truc que pourrait lui balancer Skyler sans qu’il ne comprenne bien la raison de cette rebutade. Parce que ça partait d’un bon sentiment, vraiment, et voilà que c’est comme si une vanne avait été ouverte et que n’en sortait qu’un flot incontrôlable de détresse.

- Mais…

Ba merde alors il ne comptait vraiment pas que ça tourne ainsi. Juré ! Au point d’en rester un peu pantois, se contentant de crisper un peu le visage alors que Sidney lui balance ses reproches à la gueule, comme s’il fallait attendre qu’une bourrasque passe. Les mots s’enchaînent sans trouver vraiment résonance dans l’esprit de Blaze, un peu confus face à cette marée qui monte.
Une sorte de vague souvenir de Skyler aussi et de leurs engueulades, est-ce qu’il faut systématiquement en passer par là, est-ce qu’il doit toujours s’excuser, s’expliquer ? C’est un coup à regretter de ne pas s’être formé à la légilimancie, peut-être que les choses seraient plus simples.

En fait, les choses sont plus simples. Vraiment plus simples. Il le réalise soudain à voir Sidney là presque larmoyant devant lui, une boule de nerf et de fébrilité. C’est plus simple qu’avec Skyler parce qu’il n’y a qu’une chose à faire pour calmer le jeu.

D’un geste rapide, Blaze se saisit du col de son camarade et le force à s’écraser contre le lit. Franchement, c’est cool d’être entre mec. Moins prise de tête. Il l’oblige à le regarder avant d’articuler.

- Je. Ne. Me fous pas de ta gueule. Et je passe aussi une bonne soirée.

Le regard se veut perçant, l’est-il vraiment ? En tout cas quelque chose de sérieux, qui assoie qu’il n’est pas là pour rigoler.

- C’est la première fois que tu fais un truc pareil, c’est toi qui me l’a dit, et j’ai pas envie de la gâcher.

C’est un peu ironique vu comment la situation a dérapé, et sa position actuelle, le poing qui lui sert le col : vu de l’extérieur on croirait presque à une bagarre. Très asymétrique par contre, mais comme toujours avec ces deux-là.
Tellement palpable, cette ironie, qu’il laisse échapper un demi sourire.

- Bon ok dit comme ça c’est pas super crédible.

Il fixe Sidney, sorte de petite chose tremblotante. Une vague d’empathie se dégage au creux de son estomac. La cruauté c’est plus son truc maintenant, il va falloir se faire une raison.
Il relâche le col et à la manière d’un chat, vient s’allonger en travers sur le buste du jeune homme, les bras croisés sous le menton au niveau du torse de Sidney qu’il fixe désormais. Très proche.

- Je t’ai dit dans le couloir, j’ai envie d’essayer des trucs. Mais tu veux peut-être pas « essayer », toi, tu vois ?

Pas sûr que ce soit clair, c’est quelque chose que Blaze touche vaguement du doigt, une impression motivée par l’empathie plus que la raison, le genre d’intuition qui fait de vous un bon manipulateur, et pas complétement un salaud aussi.
A nouveau ce soupire profond, les yeux qui se baissent, puis remontent dans ceux de Sidney. On parle vrai, là, entre mecs.

- On peut passer la soirée à se galocher si tu veux, et même plus, je suis assez chaud en vrai, ça a bien commencé mais… il pince les lèvres, fait la moue. Sa main revient faire le petit bonhomme au niveau du cou de Sidney, la gorge, la pomme d’Adam. « Bon peut-être que tu préférerais découvrir avec quelqu’un qui a pas été un connard avec toi quoi. »

Allongé – étalé ? – sur Sidney à qui il explique posément son raisonnement, Blaze a la satisfaction – le soulagement ? – de voir ce-dernier s’apaiser. Bon, sans doute qu’il devait bel et bien s’agir d’une sorte de méprise dont il a le secret. A croire qu’il faut décidément tout formaliser dans les histoires sentimentales, c’est un peu épuisant, et pour être honnête il n’en a pas l’habitude. Lui fonctionne d’avantage à l’instinct, il va là où ça lui plait, avant de se rendre compte parfois qu’il casse des branches au passage. Apprendre à avoir conscience de ces choses-là, ça doit sûrement vouloir dire « devenir adulte » ou une connerie de ce genre. Franchement ce soir il s’en fout, ça le fait juste chier, s’il pouvait s’en passer ce serait mieux.

Mais bon, faut faire gaffe à Sidney quoi. Ses potes sont tous un peu fragiles à leur manière. Skyler, Misha, et les autres. Quelques visages, quelques noms, Hayden et Judith, Jade, Marlon, et puis ceux qu’il oublie, un paquet de gens dont il s’est pris d’intérêt pour les parcours, se glissant un peu dans leur histoire, au-delà des apparences. Et lui qui gravite au milieu, comme un roi sur la montagne. S’il commence à prendre soin des autres, sa position va devenir intenable…

… bon, on y réfléchira une autre fois.

La main hésitante de Sidney qui passe dans ses cheveux lui tire un nouveau sourire. C’est mignon. Ils doivent être mignon, tous les deux comme ça. Blaze est sensible à ces choses-là.

Il est aussi sensible à tout ce qui peut venir nourrir son ego. « Je veux que ce soit toi. » une phrase plutôt innocente mais qui a le double mérite à la fois de le rassurer sur le fait qu’il n’est pas une fois de plus en train de tout démolir sur son passage, et aussi sur sa valeur. Peut-être n’est-il pas si mauvais bourreau au bout du compte.

Pour toute réponse, il adresse un clin d’œil au jeune homme. La main de se dernier furète dans son dos, avec plus d’hésitation qu’un tout petit oiseau incapable de se décider à se poser. Il faut donc l’y encourager. A nouveau, et pour la troisième fois, Blaze embrasse Sidney, se réhaussant un peu sur les coudes cette fois. Cela dure moins longtemps néanmoins et une main baladeuse vient, cette fois franchement, s’aventurer sous le t-shirt du garçon.

Où en est-on dans la check-list déjà ? C’est sans doute un peu procédurier mais ça permet quand même de se raccrocher aux branches. Et de mettre en perspective la situation pour le garçon 100% hétéro qu’il est. Hm.

Joueur Blaze, se redresse à nouveau. Au fond il ne veut pas griller les étapes, et puis… d’une certaine manière il a une petite « revanche » à prendre sur ses plans foireux. Laissant traîner un doigt sur le rebord du t-shirt de Sidney, il prend un air pensif.

- J'ai bien aimé notre première rencontre, récite-t-il comme s'il reprenait le jeu au vol. « T’étais complétement flippé mais mignon. »

Son regard se pose dans celui de Sidney, avec malice.

- Mais je crois que j'aurai vraiment aimé aller dans ce jacuzzi, finalement.

Il y a chez Blaze une volonté de boucler la boucle. Finir là où les choses ont commencé. Et aussi d’exorciser ses erreurs, en réécrivant ce qu’il considère moins comme un faux départ que les reliques du parcours qu’il s’est forgé tout au long de ces sept années à Poudlard. Terminer en beauté, d’une certaine manière, solder les comptes, avancer l’esprit tranquille, sans remords, et surtout sans regrets.

Mais ce n’est pas tout. C’est-à-dire que même si Sidney demeure adorablement inoffensif, on ne se lance pas à corps perdu – c’est le cas de le dire – dans des amourettes avec un autre garçon comme ça. En tout cas, pas Blaze. Pas après les années qu’il a passé à se figurer comme une sorte de prince charmant, à mi-chemin entre le héros homérique et l’agent secret, heureux de constater son succès certain chez les filles qu’il ne s’est d’ailleurs pas privé d’exploiter, parfois cruellement.

C’est tout une image de soi qu’il faut repenser, et ça ne se fait pas en un claquement de doigt, non. Alors bon, cette histoire de jacuzzi… comment dire ? C’est une sorte de sas ? Oui, le mot est un peu juste. Un moment de drague prolongée, où il faut se réapprivoiser, encore. Malgré que tous les voyants soient au vert. A croire qu’il n’ose pas sauter le cap, en fait. Sauter quoi d’ailleurs ? Sauter qui ? Hm, bref.

Blaze s’est paré d’une armure de confiance et de force, c’est grâce à elle que, grisé par le sentiment de toute puissante qu’elle lui procure, il est allé jusqu’ici. Mais fort et confiant, il ne l’est pas à ce point. En tout cas pas au point de savoir exactement quoi faire au bon moment et à chaque fois que les choses deviennent plus concrètes, on dirait qu’il renâcle. Qu’il hésite. Qu’il ne sait pas s’y prendre. Il ne sait pas s’y prendre. Peut-être est-ce aussi bête que ça.

Problème, il donne tout pour laisser penser que c’est le cas. Le voilà coincé.

Sidney dépose à son tour un petit baiser sur ses lèvres. Mignon encore. Puis lui accorde ce bain. Pour apprendre à se connaître, c’est peut-être mieux qu’un lit. Les symboles, c’est important. On s’y raccroche quand on craint de glisser.

Sa dernière remarque cependant fait froncer les sourcils du jeune homme un quart de seconde. Le temps que la pièce du puzzle se glisse dans l’engrenage de son cerveau. Alors il laisse échapper un éclat de rire. Un peu de stress, mais beaucoup par surprise. C’est qu’il avait presque fini par croire que Sidney savait ce qu’il faisait, lui.

Son indexe vient se poser sur le torse du jeune homme et y presser pour l’inviter à se rallonger.

- Un truc de bain ? Genre un maillot ?

On parle bien de ça ? L’idée est vraiment saugrenue. Si c’est des serviettes qui l’inquiètent, ça Blaze en a dans sa commode. Un maillot aussi, d’ailleurs, m’enfin ce n’est pas trop l’esprit du truc.

Il secoue la tête, l’air de faire la leçon.

- Désolé je t’ai pas dit ? C’est interdit dans ma chambre, c’est une règle de préfet, un peu de niche je suis d’accord, mais bon.

Il hausse les épaules d’un air faussement innocent genre « eh, c’est balot ! » avant de jouer avec le rebord du t-shirt du garçon. Un coup d’œil à la figure rougeoyante du garçon lui tire un vague, infime remord. Encore une fois il se retrouve en position d’imposer des trucs. C’est pas l’idée non plus.

- Tu te baignes comme tu veux, ok ?

Il lui adressa un nouveau clin d’œil et passa ses jambes sur le rebord du lit, à la recherche de sa baguette qu’il avait dû poser quelque part. S’agissait de faire un truc classe cette fois, et la potion qui coulait encore dans ses veines allait l’y aider !

- Pas vraiment, répondit-il tout en réfléchissant à la question.

Un simple sortilège de réparo suffit à remettre les choses en l’état, c’est-à-dire réorganiser une énième fois la pièce, comme elle était avant l’arrivée de Sidney. C’était comme remonter le temps un peu, pour l’arrêter au moment jugé le plus opportun par le sorcier. La cuve se remplit d’eau à nouveau mais il n’en resta pas là. La potion aiguisait encore son potentiel magique, lui offrant de faire les choses en grands, et considérant que ce bassin planté au milieu de la pièce était assez artificiel, Blaze se concentra.

- Orchedeus, erigo… !

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➤ 1 ; 3 ; 5 = de jeunes arbres commencent à s'ériger
2 ; 4 = le sort n'a pas l'ampleur voulue
6 = il n'y a que des ronces qui poussent autour de cette eau
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Composition de sortilèges, difficile à effectuer mais en septième année Blaze maîtrisait son art et la pousse des plantes n’avait plus de secrets pour lui, tant il avait abusé de ce sortilège. Sauf qu’il n’était plus question de simple fleurs, non, des interstices du sol de pierre sortait des tiges épaissent, devenant bois pour certaines.

- Incarcifors ! appela-t-il avec l'emballement d'un chef d'orchestre faisant monter crescendo la musique.

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➤ 1 ; 3 ; 5 = les plantes s'entrelacent élégamment pour former des murs
2 ; 4 ; 6 = la structure en bois a quelque chose d'inquiétant, d'avantage barreaux de cellule que quadrillage de bois
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Les petites branches où poussaient désormais feuilles et fleures s’entrelacèrent comme un quadrillage de bois et montant, montant, grimpèrent pour venir se réunir au-dessus du bassin comme une cloche. C’était une cabane feuillue qui entourait la cuve, la dissimulant au reste de la pièce.

Dans l’entrelacs des banches, une ouverture persistait, où l’on pouvait se glisser en se penchant un peu.

Blaze hocha la tête. Ça avait de la gueule, comme beaucoup de choses qu’il créait avec sa magie. Ses talents naturels, son travail et les effets de la potion réalisaient des structures ambitieuses, à défaut d’être pérennes. Qu’importait si cette petite hutte de fleurs pourrissait dès ce soir, il ne lui demandait pas plus que de tenir quelques heures.

Elle dégageait un agréable parfum de lys.

Blaze jeta un regard satisfait vers Sidney. Il n’attendait pas des applaudissements, mais voir qu’il parvenait toujours à impressionner ses camarades était une petite satisfaction dont il ne voyait pas de raison de se priver. Il aurait de toute façon été très hypocrite de prétendre avoir le triomphe modeste.

Restait la question de l’immersion.

Sa satisfaction se fana un peu. Blaze était suffisamment empathique et connaissait assez Sidney pour percevoir certaines réticences, fussent-elles infimes. Il hocha la tête. De toute façon, c’était plus confortable de penser que s’ils prenaient leur temps, c’était entièrement afin de ne pas brusquer le garçon, et non parce que lui n’avait aucune idée d’où ils allaient comme ça.

Se penchant en avant, Blaze retira ses chaussures et, toujours en t-shirt en pantalon, se glissa sous l’arche de la hutte boisée. Puis, sans un regard pour Sidney, il s’immergea dans l’eau. Celle-ci était parfaitement à la bonne température et le resterait sans doute, la magie avait ce pouvoir là.