The bitter taste of your blood

The bitter taste of your blood
@Skyler P. Mills

Les couloirs étaient rouges. Les murs bordeaux, les escaliers cramoisis, les toiles ensanglantées. Ses propres hématomes battaient dans son corps plus furieusement encore que ses tempes qui lui conféraient ainsi une vision imprécise. Bluebell aurait effectivement juré que les autres pouvaient voir eux aussi combien la terre tremblait dans d’étranges nuances de pourpre, ce qui aurait expliqué pourquoi ils semblaient se soustraire à sa présence, se collant aux murs et déviant les regards à mesure qu’elle parcourait les marches pour revenir au hall. Peut-être que si elle n’avait pas ainsi été accaparée par l’obsession qui sifflait dans son crâne, elle se serait alors aperçue que la seule menace environnante était le claquement prémonitoire de ses talons sur le sol, la pression de son poing scellé autour de sa baguette, l’allure électrique de sa démarche impatiente. Un air presque fantomatique se dégageait de son visage, non pas en raison de la pâleur de ses traits - il s’agissait davantage de la transparence de son regard où dansaient des chimères profanes. Skyler blessée. Cette roturière qui revendiquait la misère de son sang, cette garce qui vendait tous principes contre de l’argent, cette gueuse qui avait entaché la royale beauté de son jumeau. Skyler atrophiée. Elle avait osé réitérer son infâmie en provoquant la faiblesse subsistante de Maxton pour se jouer de lui. Skyler agonisant. Elle avait à plusieurs reprises mis la vie de son frère en péril et ce malgré les menaces à son encontre - il était désormais temps de répondre à ses insultes par une déclaration de guerre qui ne s’achèverait que par le versement de sang pour la juste réparation du mal causé. Skyler gisant. Sans même accorder un regard vers l’épaule qu’elle venait de pousser dans son empressement, Bluebell dévala l’escalier menant aux dortoirs de Serpentard, laissant les flammes des torches des cachots réverbérer l’ombre de son ire derrière ses épaules. Elle n’avait jamais été aussi sûre d’elle : ce soir, elle ferait couler le sang de Mills.

L’ironie du sort n’échappera à personne, Bluebell avait passé un semestre entier à craindre la seule ombre de son frère qui avait osé répandre les globules de leur géniteur et la voilà animée du même dessein. En même temps, ne devait-elle pas à son jumeau cette faveur ? Il lui avait signifié combien il n’avait pas tué pour qu’elle lui soit redevable - mais elle ne lui en devait pas moins sa vie. A son tour, désormais, de sauver celle de son jumeau en épuisant tous les parasites qui essaieraient de l’affaiblir. La longue tresse qu’elle avait nouée virevolta dans sa course dans les escaliers conduisant à son dortoir où elle pénétra d’un pied ferme, faisant claquer la lourde porte de bois contre le mur de pierre. “Espèce de sale petite garce, comment oses-tu…” commença-t-elle à persiffler, sa langue de vipère claquant dans une tonalité agressive. En vain, la chambre était vide. Un rire sans joie grinça entre ses dents - où diable était-elle passée ? Sans chercher à contenir davantage sa furie qui ne demandait qu’à éclater, Bluebell jeta son sac en cuir dans le coin de la chambre qui lui appartenait pour avancer de l’autre côté, qu’elle toisa d’un dédain tel que les commissures de ses lèvres en flanchèrent. Levant sa baguette d’un geste, le poignet souple, Bluebell ferma un œil pour viser quelques éléments du décor avant de jeter son dévolu sur la commode de Mills. “CONFRINGO” cracha-t-elle aussitôt, la tête penchée sur le côté alors qu’un éclair bleu électrique zébra de sa baguette pour claquer sur le meuble. Celui-ci se fendit dans une détonation presque docile par rapport au sinistre craquement du bois - les tiroirs s’ouvrirent dans un angle anormal et la commode elle-même s’affaissa sous le choc qui venait d’y laisser un trou béant. D’un coup de pied, Bluebell jeta au loin un pull qui s’était extrait du meuble pour s’approcher du bureau de Mills, soulevant quelques paperasses et photos animées du bout de sa baguette. Dans un rictus mauvais, elle tenta de lancer un incendio - mais certainement parce que sa baguette se souvint du mauvais augure que porterait un nouvel incendie dans l’école, seules quelques frémissantes étincelles éclatèrent, ne laissant qu’une vague trace de suie sur les parchemins qu’elle avait visés. Furieuse de cet échec, elle renversa d’un mouvement toutes les feuilles sur la table qui volèrent grâcieusement par rapport à la précipitation de son geste. Elle voulut poursuivre son entreprise de destruction, mais l’une des photos animées gisant sur le sol retint son attention, figurant le visage radieux de Mills qui riait aux éclats face à son regard empli de mépris. Cet affront raviva son déchaînement à peine bercé du silence qui suivit ses deux premiers assauts, lui arrachant un râle de colère - comment cette impertinente se permettait-elle de rire quand elle avait osé se moquer de son frère, quand elle avait manqué d’ôter sa précieuse vie ?

Bluebell fusillait du regard cette photo pourtant anodine lorsque des bruits de pas derrière son dos redressa son échine. Son sang ne fit qu’un tour à la perspective que Mills l’eût finalement rejointe, si bien que ses phalanges se resserrèrent d’elles-mêmes autour de sa baguette qu’elle dirigea d’un geste sur la chaise du bureau. “OPPUGNO” s’écria-t-elle alors et, en une fraction de seconde, elle pivota pour lancer le meuble qu’elle venait ainsi de soulever sur sa cible. Manque de chance, elle ignorait précisément où se situait Skyler, aussi jeta-t-elle la chaise contre l’embrasure de la porte tandis que son adversaire était quelques centimètres plus en retrait. Le meuble éclata en quelques grossiers bouts de bois qui s’éparpillèrent autour de l’impact, si bien qu’un copeau vint écorcher dans sa chute la joue de la Serpentard. Détournant le visage sous le coup de cette griffure, Bluebell porta ses doigts libres sur sa peau. Quelques traces de sang luisèrent sur ses ongles, la portant à planter ses yeux ombragés de fureur sur Skyler face à elle. Une brutale répulsion dansait dans ses prunelles, conférant à son aura belliqueuse un égarement farouche. “Sombre idiote”marmonna-t-elle en relevant le menton, comme elle aurait essayé de conférer à son dégoût un peu d’arrogance, “Je pensais pourtant avoir été claire avec toi, mais il faut croire que la stupidité a eu raison de ton instinct de survie.” Mais déjà son visage se pencha en avant, sous le poids bien trop lourd d’une agressivité qui n’attendait qu’à exploser. “Je vais te briser, Mills, comme tu as essayé de briser mon frère” fit-elle alors d’une assurance telle que les gouttes de sang qui perlaient délicatement sur sa joue n’en parurent que démentes. “DEFODIO” annonça-t-elle alors en levant promptement le poignet vers Skyler, droit devant elle. L’éclair qui foudroya de sa baguette n’eut en fin de compte rien de plus que l'orage qui s’annonçait dans son propre regard. Seule la vue du sang adversaire en contrepartie de celui qui maculait son visage aurait été en capacité de réfréner les grondements qui pulsaient dans ses veines. Une offrande à la violence pour calmer la tempête divine.

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Skyler
&
Bluebell

Qui a dit que les dames ne faisaient que se crêper le chignon ?

La journée a été plutôt calme. C'est assez rare pour être souligné. Pas d'entrainement de Quidditch, pas d'envoi de lettres pour rameuter le peuple, pas de réunion secrète, pas de préparation d'Exmalum, pas même l'ombre d'une remarque d'un sang-pur. Bref, une journée banale de temps en temps, ça fait du bien. Avec les cinq matières que j'ai gardées cette année, mon emploi du temps me permet de rédiger les devoirs supplémentaires sans avoir à finir à des heures indécentes le soir. Etonnement, tandis que je longe les couloirs du château, ma tête est vide de toute préoccupation. Je me sens légère, sans pour autant aller jusqu'à être totalement sereine. J'ai juste l'impression d'avoir la vie d'une nana de dix-neuf piges et, rien que pour une journée, ça fait du bien. Néanmoins, contrairement à l'adage, le meilleur n'est pas pour la fin, en ce qui me concerne. Je dors peu, je dors mal et la seule perspective de me retrouver dans la même pièce que Bluebell tend chaque partie de mon corps. Je sais qu'elle sait. Comment pourrait-il en être autrement ? Les jumeaux ne font de nouveau qu'un et Maxton a arrêté notre contrat concernant Exmalum. Ce rat a tout balancé à sa frangine, j'en mettrai ma main au feu ! Je ne comprends pas qu'elle ne m'ait pas déjà menacée ou mise en garde directement. Elle ménage peut-être son effet, me faisant ainsi passer des nuits cauchemardesques sans que ne me décide pour autant à confier ma détresse à quelqu'un. Je suis trop fière pour admettre que j'ai besoin d'aide, comme toujours.

Ma quiétude prend fin au moment où je pose le pied dans ma salle commune. Les quelques élèves présents dans la pièce me dévisagent. J'entends des bruits sourds puis des éclats de voix venant du dortoir des filles. Les visages de mes camarades sont fermés tout comme leurs bouches. Je crois reconnaître l'une des voix et les regards tournés vers moi finissent de chasser mes doutes. Je ne partage mon dortoir qu'avec une seule autre nana et celle ci semble être en train de péter son câble. Sauf qu'on ne parle pas de n'importe quelle autre nana : quand Bluebell Sherwin a un boulon qui saute, mieux vaut ne pas se trouver dans les parages. L'inquiétude d'avoir mon dortoir ravagé et mes affaires détruites est la seule chose qui me fait monter les marches jusqu'au couloir menant aux différents dortoirs féminins. Je marque une courte pause devant le mien. Un boucan assourdissant s'en échappe. Mon coeur commence à s'accélérer. J'ai peur de ce que je vais trouver derrière cette porte. Je pourrais partir et trouver un autre endroit où crécher cette nuit mais je refuse de laisser cette folle ravager les affaires que je laisse dans le dortoir sans réagir. Profitant d'un moment de calme - sûrement le dernier avant un certain temps, j'appuie sur la poignée. La porte me dévoile un champ de bataille. Ma commode est défoncée de tous les côtés. Les tiroirs sont ouverts et mes fringues gisent à terre tels des corps inanimés. De l'autre côté, mon bureau est jonché de parchemins froissés et le sol en est également recouvert. Je sers ma prise sur ma baguette, que j'ai pris soin de sortir avant de pousser la porte. Au milieu de ce paysage apocalyptique, la fine silhouette de Bluebell est penchée sur une photo animée. Avec sa longue tresse, cette dernière a des allures de Lara Croft. En entendant la porte s'ouvrir, Bluebell se tourne dans ma direction. L'expression sur son visage est davantage proche d'une Harley Quinn. D'un sort, la Serpentard balance ma chaise de bureau contre l'embrasure de la porte. Le meuble en bois s'écrase à quelques centimètres de moi et vole en éclats. Je tourne mon visage pour me protéger des morceaux de bois qui explosent dans toute la pièce. Une fois le danger passé, mes yeux se posent à nouveau sur ma camarade. Cette dernière se tient la joue, à l'endroit d'où se forme une goutte de sang qui roule jusqu'à son menton. Je balaie la pièce du regard : je n'ai aucun endroit pour me cacher et je ne peux pas faire demi-tour non plus. Me voilà prise au piège.

Les premiers mots que Bluebell prononce à mon égard confirment mes pensées : elle en a après moi, l'heure de la vengeance a sonné. La suite de sa tirade est cependant moins limpide. Je ne comprends pas de quoi elle me parle. Je me souviens de ses mises en garde mais je n'ai rien fait pour déclencher sa fureur. Au contraire, je faisais plutôt le dos rond en attendant l'orage. C'est lorsque la Serpentard mentionne son frère que je comprends enfin : elle parle de la fois où j'ai voulu négocier de l'Exmalum contre des informations. J'ai presque réussi, soit dit en passant. Mais je n'ai pas le temps d'y penser davantage, déjà la furie se remet en marche et lance un sort dans ma direction. « Protego ! » Malheureusement je ne suis pas assez rapide et le sort me touche en plein dans le ventre. Je grimace au moment de l'impact et porte aussitôt les mains à l'endroit où le sort m'a touchée. J'ai une sensation humide sous mes doigts. Lorsque je baisse la tête, je vois mes mains recouvertes d'un liquide rouge et poisseux. Merde ... merde, merde, merde ! Je sens la rage monter en moi en même temps que la douleur se met à irradier mon corps. Si elle veut voir couler le sang, pas de souci ! Je ne me défilerai pas. « Expulsio ! » Un filet de lumière sort de ma baguette mais disparait aussitôt. Je suis plus blessée que je ne veux l'admettre et n'ai pas eu assez de forces pour réussir mon sortilège. Je me retrouve totalement vulnérable face à une Bluebell déchainée. Quoique ... Il me reste encore une arme. « Ton frère est un faible, il crève d'envie de replonger ! » Une lueur mauvaise danse dans mes yeux. Je vais lui faire péter un câble et, si je ne peux pas la blesser physiquement, les mots feront leur œuvre. Et avec un peu de chance, si elle me fait suffisamment mal, je tiendrai peut-être un levier d'action pour attirer l'attention des autorités sur ce qui se passe à Poudlard.

@Bluebell E. Sherwin

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Hasard:

The bitter taste of your blood

Le sang inonda aussitôt le pull de Skyler. D’abord une goutte, puis une tache, ensuite un épais filet imprégnèrent progressivement le tissu d’une substance poisseuse qui obnubila Bluebell. Alors, elle ne vit plus rouge, bien au contraire ; l’espace entier lui parut noir, à l’exception de la blessure de son adversaire qui rougeoyait tant que la rage qui habillait les prunelles de la Serpentard chancela en une peur déraisonnée. Ses lèvres s’entrouvrirent pour un son qui ne sortit jamais, si bien qu’elle fut aussitôt saisie de la certitude d’être paralysée dans un cauchemar vivant. Incapable de détacher ses yeux de cette vision d’horreur, elle resta ainsi figée dans l’attente que son ennemie tombe, inerte, que Maxton apparaisse, dément, qu’elle glisse sur ses genoux, éteinte. Dans sa quête furieuse de nuire à Skyler, Bluebell avait complètement fait fi de ses terreurs encore vives, lesquelles jaillirent sur la réalité pour dessiner des ombres chimériques d’où seul le liquide écarlate semblait se distinguer. De fait, elle n’entendit même pas son adversaire riposter, ni ne vit un fragile jet de lumière éclater de sa baguette pointée sur elle. Entre nulle part et ailleurs, la jeune fille demeura immergée dans des souvenirs assourdissants qui firent trembler ses poings fermés. Le fait est que Skyler aurait pu profiter de cette faiblesse saisissante pour déguerpir, chercher de l’aide ou même la détruire en retour ; au lieu de quoi, la sottise de son tempérament prit le dessus. “Ton frère est un faible, il crève d’envie de replonger !”

Ce crachat releva aussitôt le regard de Bluebell, jusqu’alors perdu dans le vide. Ainsi s’aperçut-elle que le visage de son ennemie n’avait rien de la folie d’Angus, tout au plus un écoeurement nauséabond. Elle n’était pas aussi haute, non, bien au contraire ; elle était lamentablement petite, faiblarde, comme un cafard ; un coup de pied aurait suffi pour l’écraser. Un parasite dégoutant qu’il convenait d'éradiquer avant qu’il ne s'immisce davantage dans son esprit. “Misérable” susurra-t-elle en relevant le menton à mesure qu’elle reprenait conscience et que sa vue retrouvait le cramoisie de sa brutalité. Elle ne voyait même plus la plaie purulente qu’elle avait creusée dans son ventre, reléguée au rang de détail par rapport à l’affront cuisant auquel elle osait la soumettre. Menacer la santé de Maxton était un acte odieux, mais se permettre en outre de l’insulter de la sorte, en se jouant de ses plus craintifs tourments, méritait un châtiment à la hauteur de la peine qu’elle lui suscita. De fait, Bluebell chercha une nouvelle réplique, quelque chose en mesure de faire ressortir le venin qui gonflait sa gorge ; en vain. Le poison de ses veines demeura figé en elle, allant jusqu’à faire briller ses yeux de démence. Elle avait cru son frère névrosé, elle se montra psychotique. Alors, sa baguette se leva d’un geste mécanique, témoignant de l’égarement dans lequel Skyler venait de la retrancher. Elle ne maîtrisait plus rien. Seule sa folie répondait à l’appel de la violence. “Endolo…” Mais son invocation resta suspendue, pour une obscure raison qu’elle ne s’expliqua jamais. Peut-être que la fureur avait eu raison de sa capacité de paroles, peut-être que le silence dévorant ses songes était plus sauvage que ce sort, peut-être que les fantômes qui avaient valsé autour d’elles finirent par lui ôter son âme. Non, Bluebell ne sut jamais quelle force hasardeuse retint cet accent mortuaire. Aussi laissa-t-elle échapper un gémissement de colère - elle n’avait pas une, mais deux ennemies ce soir. La première sanguinolait devant elle, le regard empreint de haine. La seconde habitait en elle-même, mue par des peurs sournoises et des appréhensions féroces. C’était à se demander si Skyler pouvait elle aussi entendre les murmures qui chuchotaient à ses oreilles. Pourquoi lui faire du mal ? C’est à Maxton que tu devrais en vouloir. Elle a raison : il a envie de replonger. - Imbécile ! Ne la crois pas. C’est elle, la responsable. Elle lui fait du mal. - Et alors ? Il s’est laissé faire. Il est instable. - Elle en a profité ! Elle doit payer. Elle doit payer. Elle doit payer.

Dans une grimace indéchiffrable, Bluebell sortit de sa torpeur en se jetant d’un pas sur Skyler devant elle qu’elle poussa contre le mur du couloir. La maintenant fermement contre la pierre froide, elle bloqua sa prise en posant son avant bras sur son cou, sa main libre la tenant en joue. Elles étaient si proches qu’elle sentait son souffle rauque sur son visage, mais aussi une curieuse sensation de chaleur sur son ventre. Les hémoglobines de cette impure collaient désormais à son propre pull. “Je t’interdis de parler de lui, tu ne sais rien, rien de sa vie !” asséna-t-elle en retenant davantage son adversaire. “Insulte-le encore une fois, une seule maudite fois, et je jure que je te tuerai” ajouta-t-elle avec une assurance qui n’appelait aucune objection. Mais déjà, Skyler parvint à se défaire de son emprise, projetant Bluebell en arrière qui ne se rattrapa pas à temps ; elle tomba aussitôt sur le sol, manquant de se blesser contre les morceaux de bois éparpillés ça et là. Lâchant un cri de douleur, elle visa aussitôt son ennemie sans prendre le temps de raisonner. “Confundio !” s’écria-t-elle, faisant claquer un jet bleu vers la jeune fille. Peut-être entendrait-elle ainsi la confusion qui dominait l’esprit fou de son adversaire.

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&
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C'est fou comme certains évènements peuvent se passer à une vitesse supersonique. Il y a quelques instants, je rentrais tranquillement dans ma salle commune après une journée satisfaisante. Le moral était relativement au beau fixe, aucun nuage ne se profilait dans mon horizon pourtant si sombre ces derniers temps. J'aurais du sentir les prémices, saisir les indices disséminés sur le chemin qui me menait dans mon dortoir. Le regard des autres élèves auraient du m'alerter, les cris auraient du m'alerter, le simple caractère de Bluebell aurait du m'alerter. Pourtant, j'ai continué ma route. Je suis arrivée devant la porte de la chambrée, dernier rempart entre le démon et moi. La peur s'est inséminée en moi, mon poul s'est accéléré. Néanmoins, entre affronter la Serpentard et la laisser foutre en l'air mes affaires, le choix était vite fait. Voilà donc que, sans que je ne sache trop comment, je me suis retrouvée avec du sang sur les mains. Mon sang. Comme si souvent dans mon existence, mes talents magiques m'ont abandonnée au moment où j'avais le plus besoin d'eux. Mon Protego ne m'a pas protégée et Bluebell a réussi à créer une plaie dans mon ventre. J'ai failli à ma propre défense et me voilà en position de faiblesse face à mon adversaire. Je n'arrive même pas à contre-attaquer : ma tentative de sortilège se fane en un faible rayon de lumière. La faiblesse de mon corps tranche avec la haine qui grandit en moi. Je veux anéantir Bluebell et je sais exactement comment m'y prendre.

Je me tiens toujours le ventre avec une main lorsque je traite Maxton de faible. Ma main est ensanglantée mais mes yeux ne fixent que sa jumelle. Je me bats avec les armes qu'il me reste mais je compte bien mener le combat jusqu'à la fin. Elle peut idôlatrer son frère si cela lui chante mais moi, je connais la vérité. Ma potion se nourrit des pensées sombres et de la faiblesse de celui qui la boit. Elle a diaboliquement bien marché sur ce cafard de Sherwin. Même moi, je n'aurais pu imaginer qu'il était dévoré par le mal avant qu'il ne me contacte. Mais Maxton l'a fait et m'a dévoilé ses faiblesses, indirectement. Bluebell relève ses yeux déments vers moi : la provocation a fonctionné. Ses lèvres se mouvent en un mot que je ne saisis pas. Mes oreilles bourdonnent, les sons sont totalement étouffés. J'ai l'impression de transpirer et de grelotter en même temps. Je ne comprends pas ce qu'elle dit quand elle pointe sa baguette mais rien ne se passe. Est-ce qu'elle a raté son sort, elle aussi ? J'ai l'impression qu'elle a baissé sa baguette avant la fin de l'incantation, ce n'est pas normal. J'aimerais en profiter pour me barrer ou peut-être juste pour crier mais je n'y arrive pas. Mes jambes refusent de bouger et si j'ouvre la bouche, je crains de vomir. Seuls subsistent les bourdonnements dans mes oreilles et la sensation visqueuse du sang sur ma main.

Puis, encore une fois, tout va trop vite. Mais je crois que c'est à cause de mon corps qui me lâche, cette fois ci. A moins que ce ne soit l'instabilité de Bluebell ? En tout cas, cette dernière se jette sur moi. Sans que je ne comprenne ce qui est en train de se passer, je me retrouve subitement plaquée contre le mur du couloir. Je grimace de douleur : j'ai super mal au dos. L'avant bras de ma camarade est collé contre ma gorge, me permettant ainsi de ne pas tomber - mes jambes sont trop chancelantes pour me soutenir correctement. Sherwin est si proche de moi que, lorsqu'elle ouvre à nouveau la bouche, je comprends ses paroles. Un rictus m'échappe, suivi d'un toussotement. Non, je ne connais pas sa vie mais la potion m'en a appris suffisamment sur le tempérament de Maxton. Quant à la menace de me tuer si jamais j'ose insulter à nouveau son jumeau ... « Maxton est un drogué ... » Mes lèvres bougent avec difficulté, ma voix est éraillée mais les choses sont dites. Et avant même que Bluebell n'ait le temps de répliquer, je rassemble toutes les forces qu'il me reste pour la pousser. Mon adversaire tombe sur le sol et moi, je me retiens au mur. Je n'ai même pas la force de tenter un sortilège de protection quand la Serpentard me lance le sortilège Confundio, qui me touche de plein fouet. Si cela était seulement possible, le maléfice ajoute encore plus de confusion dans mon esprit. Je ne sais pas par quel miracle j'arrive à pointer ma baguette sur elle. « Immobilus ... » Malheureusement je suis trop faible et confuse, le sort rate à nouveau. Cette fois-ci, je m'effondre sur le sol du couloir, à deux doigts de l'évanouissement.

@Bluebell E. Sherwin

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Hasard:

The bitter taste of your blood

La chute ne fut en soi guère humiliante. Après une déchéance cuisante, qui l’avait poussée dans ses plus sombres retranchements pendant des mois, Bluebell n’était après tout pas à une honte supplémentaire. Aussi le fait de tomber dans le couloir, poussée par le peu de force qu’il restait au regard vitreux de Mills, ne lui valut pas de franc agacement. En revanche, les mots susurrés par la brune juste avant ce coup, dans un odieux rictus qui lui donna envie d’arracher toutes ses dents, furent d’une exécrable brutalité. Maxton est un drogué. Les pierres du sol lui semblèrent d’autant plus glaciales que son sang perdit de son venin. Se pouvait-il qu’elle ait raison ? Non, bien évidemment. Mais alors, pourquoi s’obstinait-elle dans ses insultes, malgré les menaces de mort pourtant claires ? Seul un damné criant raison se serait permis un tel risque. Tu le sais toi-même. Il replongera tôt ou tard. Il se peut même qu’il te ment déjà maintenant. D’un autre côté, Skyler n’était pas spécialement réputée pour sa pertinence, bien au contraire. Elle dégageait une méprisable aura d’idiotie, de grossièreté, de scandale. Elle te provoque. C’est sa seule arme. Fais-la taire avant qu’elle ne tire à nouveau. Alors seulement, le contrecoup de sa chute lança en elle une vive douleur qui brûla son dos entier, allant jusqu’à engourdir ses doigts autour de sa baguette. Son cri de couleur se conclut en une incantation qui frappa de plein fouet sa cible, rendant Skyler encore plus suitante de confusion qu’elle ne l’était déjà. Celle-ci rata son sort en conséquence. Bluebell esquissa un rictus de dédain, lequel s’élargit férocement à la vue de son ennemie tomber à son tour dans la poussière. Ses canines découvertes semblaient ainsi prêtes à dévorer son cadavre encore chaud. Oui, cette garce était en train de mourir, sous ses yeux jubilatoires. Le dernier meurtre auquel elle avait assisté s’était conclu de la même façon ; un coup coriace, un regard absent, une chute létale dans une marre poisseuse. Elle en avait conservé un traumatisme qui, étonnement, semblait s’égoutter à mesure que le sang de Skyler coulait entre elles. Comme ses chimères se seraient mêlées à la substance dégoulinante, elle se sentit de plus en plus légère, prise d’une euphorie croissante. Elle ne désirait en définitive rien de plus que la disparition de celle qui avait osé mettre à mal son précieux frère, et voici qu’elle avait la chance d'assister à ce merveilleux spectacle aux premières loges. Fascinant. “N’as-tu donc plus rien à ajouter ?” Les yeux plantés sur son ennemie, Bluebell se redressa sans se défaire de son sourire dément. “On dirait bien que je t’ai réduite au silence… Le monde en est déjà tellement plus calme” admit-elle dans un chuchotement. Les hurlements dans ses tympans s’étaient évanouis. Il ne restait plus personne pour lui faire croire que Maxton était fragile, instable, malade. Ne subsistait que la certitude de lui avoir rendu service en terrassant la source même de son égarement. Elle avait hâte de lui annoncer la nouvelle. Il serait si fier.

“C’est quoi ce bordel ??” Bluebell fronça des sourcils en cherchant l’origine de cette désagréable interruption. Une voix vulgaire qui n’avait rien à voir avec le miel de celle qui lui avait intimé de faire taire sa rivale… Une voix réelle, qui accompagnait des bruits de pas précipités. Ainsi rappelée à la réalité, la Serpentard reposa ses prunelles hagardes sur le corps inerte de Skyler, lui valant aussitôt une moue de terreur. Aussi misérable soit-elle, Mills ne pouvait pas être retrouvée de la sorte, inconsciente, baignant dans son propre sang, morte… Par tous les dieux, l’avait-elle réellement tuée ? Bluebell pâlit à cette considération - non pas par la perspective d’avoir ôté une âme aussi futile, mais par l’idée même d’avoir failli à sa parole. Elle avait juré à Maxton qu’elle ne la supprimerait pas, car il ne pourrait jamais endosser un secret semblable. D’un autre côté, il n’y aurait absolument aucun secret si elle venait à être découverte dans cette indélicate situation… Il lui fallait un subterfuge, immédiatement, avant que les mouvements qu’elle devinait au pied de l’escalier ne s’arrêtent sur la carcasse gisante de Skyler et son propre corps immaculé. Dans un râle de colère (après tout, il était bien inconvenant que même inconsciente, Skyler continue de lui porter ainsi préjudice - n’aurait-elle pas pu réussir au moins un sort pour se rendre un peu plus coupable ?), Bluebell se résolut à la seule alternative qui apparut à son esprit embrumé. Se mutiler. Blâmer son adversaire. S’en sortir avec des circonstances atténuantes. En vérité, elle se serait bien épargnée ce difficile exercice s’il ne tenait qu’à elle, mais pour témoigner de sa bonne foi à son frère, elle devait au moins se présenter à lui égratignée. Une blessure assez significative pour justifier le manquement à sa parole. “Defodio” susurra-t-elle en fermant les yeux, sa propre baguette enfoncée dans son ventre. La jeune fille s’attendit à un déchirement, à une douleur lancinante, à un étourdissement ; en vain. Sûrement parce qu’elle n’avait dans le fond pas envie de s’infliger une telle peine et qu’elle préférait autant assumer ses actes par ailleurs parfaitement valides, il lui fut impossible de se blesser par voie magique. Mais les pas approchaient, et avec eux, les remontrances de son jumeau. “Bon sang” souffla-t-elle en cherchant une issue du regard. Ce dernier se raccrocha aussitôt aux morceaux de bois éparpillés autour d’elle, si bien que la Serpentard s’empara du plus aiguisé qu’elle trouva à proximité. Sans réfléchir, elle le planta précipitamment dans sa jambe ; ou plus exactement, dans le tissu de son pantalon, effleurant à peine sa peau dans un acte manqué. Il lui fallut se rendre à l’évidence qu’elle était tout bonnement incapable de se heurter. Une amère résolution couvrait ainsi ses traits lorsque la silhouette de Carla apparut sur le sommet des marches devant elle. Curieusement, parmi toutes les personnes qu’elle craignait de voir arriver, Yaxley fut la plus rassurante. “Légitime défense” annonça-t-elle alors sans la moindre conviction. Inutile de faire davantage semblant… Elle s’en tirait avec une simple griffure sur la joue, une tresse ébouriffée et une vague douleur dans le dos, siégant juste à côté de sa rivale quant à elle évanouie dans une plaie béante. “Elle a manqué de respect à mon frère” argua-t-elle ensuite d’une voix enfantine tandis que Carla se jetait sur Skyler pour lui prodiguer des premiers soins. Comme une petite fille, il lui semblait important de préciser l’objet de sa colère afin qu’on ne se méprenne surtout pas sur ses pures intentions. L’affront porté à Maxton valait tout à fait la mort. Puisse Carla entendre cette évidence, abonder en sens, et laisser cette catin se vider de son impureté.

@Carla P. Yaxley

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À SAVOIR Arrivé(e) le : 04/04/2020 Parchemins rédigés : 1181 Points : 10

The bitter taste of your blood

@Skyler P. Mills
@Bluebell E. Sherwin

Carla trouvait que sa semaine se déroulait étonnamment calmement. Habituellement en tant que préfète, il y avait toujours un élève récalcitrant sur lequel elle devait faire preuve d’autorité. Ce n’était jamais bien grave, mais les plus jeunes aimaient tester le règlement. Elle n’aurait jamais pensé que ce rôle lui plairait d’ailleurs. Mais pour une fois, elle devait reconnaître que tout le monde était d’une docilité particulièrement louable. Elle ment, qu’elle aurait dû savoir que cela masquait un problème. Après tout, chaque période d’accalmie annonçait au contraire une difficulté encore plus grande que la précédente. Justement parce qu’il ne se passait rien, elle choisit dans la salle commune avec la ferme intention de s’y enfermer pour lire tranquillement un roman dont l’intrigue comme la prose ne passeraient jamais à la postérité. Elle n’eut pas plutôt lu quelques pages qu’elle commença à entendre des bruits de mauvais augure. Au début, elle n’y prêta pas réellement attention, la vie en collectivité lui avait appris qu’il y avait toujours quelqu’un pour faire du bruit. Mais quand au bout d’une minute elle conclut que les éclats de voix ressemblaient une dispute et qu’elle crut entendre un sortilège fuser, elle posa son roman pour gravir les marches qui la séparaient du dortoir. Bizarrement, elle commença réellement à courir quand elle n’entendit plus aucun bruit, animée par un mauvais pressentiment. Tant que ces condisciples avaient la bonne idée de faire savoir qu’ils étaient en vie, il y avait finalement assez peu de matière à s’inquiéter. Mais quand après une violente dispute, seul le silence régnait, il existait un vrai doute sur ce qu’il était advenu des participants.

L’étage était particulièrement calme, d’un climat aussi paisible que trompeur. Trompeur, parce qu’elle pouvait voir en montant les marches quatre à quatre qu’il avait eu de la casse. Elle se précipita vers le couloir, en maugréant d’une voix anxieuse

- C’est quoi ce bordel ?

Elle était prête à donner tous ses gallions du mois pour qu’elles soient juste en train de se tirer les cheveux. Une fois en haut des escaliers, elle se figea, muette d’horreur devant le carnage qui prenait place devant elle. Le couloir était ravagé, mais cela lui importait finalement peu. L’horreur venait du sang qui tapissait une partie des lieux. Skyler gisait au sol avec l’air franchement à deux doigts mourir et Bluebell arborait cet air presque fou que la blonde redoutait. Elle portait également les stigmates d’une bataille mais il n’était guère difficile de deviner qui avait gagné.

- Oh mon dieu …..

Son état de sidération dura une seconde pleine, le temps pour Bluebell d’essayer de lui vendre son histoire de légitime défense. Carla la regarda sans comprendre. Puis elle reprit ses esprits et surtout la maîtrise d’elle-même. Pour avoir elle-même fait les frais des réactions pour le moins virulentes de Skyler, elle pouvait croire sans peine que la griffure venait d’elle, mais il n’y avait pas besoin d’être un génie pour savoir que le motif comme la réaction invoqués dépassaient de très loin ce qui était normalement acceptable. Comme tous les sangs purs, elle était complètement ivre. Ivre de violence, de rancœur et de brutalité. Son visage se ferma pour arborer un masque de neutralité parfaite, comme si rien ne la choquait particulièrement dans la situation et elle pointa sa baguette d’un geste sûr vers Bluebell

- Expelliarmus !

La baguette de la jeune fille sauta dans sa main, à son grand soulagement. Elle ne pouvait pas prodiguer de soins avec l’angoisse que la brune ne se retourne contre elle.

- Ce n’est pas le moment des explications, tu ne bouges pas d’ici et tu pries pour ne pas avoir un cadavre sur les bras.

En deux enjambées, elle était par terre auprès de Skyler, du sang s’infiltrant à travers ses collants au niveau de ses genoux. Elle tâta rapidement sa camarade sans réelle délicatesse mais avec une nervosité palpable jusqu’à relever les pans de sa chemise pour découvrir son ventre et la blessure sanguinolente. Merde, merde, merde, elle n’était pas médicomage. Qu’est-ce qui allait se passer si elle ratait son sortilège ? Et surtout qu’est ce qui allait se passer si elle ne le lançait pas ? Elle pointa sa baguette sur la plaie et fit remonter la pointe le long de la blessure

- Vulnera sanentur

Etant donné les circonstances, elle aurait été bien incapable de dire ce qui lui avait permis de réussir son sortilège. Heureusement, elle avait toujours été douée dans la matière et elle avait pour qualité et pour défaut une forme de détermination totalement malsaine. Habituellement, sa persévérance était surtout mise à l’épreuve dans ses frasques avec Maxwell, mais c’était un trait de caractère indéniable. Assez pour que sa détermination à réussir soit assez forte pour dépasser son envie de s’enfuir à toutes jambes. La plaie se referma au fur et mesure de son geste. Galvanisée par cette première réussite, elle enchaîna en lançant

- Ferula.

Aussitôt, des bandages apparurent et s’enroulèrent autour de la zone qu’elle venait de soigner. Evidemment, Skyler était toujours pâle mais elle ne se vidait plus de son sang et les premiers soins avaient été réalisés. Si une artère avait dû être touchée, elle serait déjà morte et pour le reste, Carla était arrivée relativement rapidement après la dispute à en croire les bruits. L’idée que tout s’était joué à une dizaine de minutes lui donna le tournis. L’envie de vomir aussi. D’accord elle était fâchée avec la brune depuis l’épisode de la volière, mais elle n’aurait jamais souhaité sa mort ! Elle toucha l’épaule de Skyler pour essayer de susciter une réaction

- Est-ce que tu as d’autres plaies ?

Elle n’avait pas l’impression mais elle avait pu louper quelque chose. Elle avait nécessairement loupé quelque chose pour que les deux filles essaient de s’entretuer dans le couloir. Skyler tenta de répondre une première fois, avec assez peu de succès, ce qui fit froncer les sourcils de la blonde, jusqu’à ce qu’elle comprenne qu’il s’agissait, en plus du choc, d’un sortilège de confusion qui commençait à s’estomper. Son regard passa de l’une à l’autre tandis que les rouages de son esprit analysaient aussi rapidement que possible la situation. Avec Sorensen à la tête de l’école et Bluebell comme ennemis, l’histoire serait rapidement déformée pour faire de Skyler la fautive idéale. Et s’ils utilisaient du veritaserum pour lui faire avouer, est-ce qu’elle vendrait ses secrets avec ? Son ébauche de mutinerie, ses amis et les raisons pour lesquelles Blue étaient prête à la tuer ? Courir chercher des adultes n’avait que peu de sens, à moins de vouloir punir la victime. Les laisser ensemble dans le même dortoir n’avait aucun sens. Carla se releva et tendit sa baguette à Bluebell

- Tu prends toutes tes affaires maintenant, tu emménages dans mon dortoir.

Alors qu’elle allait ouvrir la bouche certainement pour protester, Carla secoua légèrement la tête pour lui indiquer de ne surtout pas avoir la brillante idée d’en rajouter. Il ne fallait pas forcer la chance et c’était déjà un miracle que tout le monde soit en vie.

- Pour ma part, il me semble avoir entendu Skyler tomber dans les escaliers et finir sa chute sur un morceau de bois tranchant, ce qui explique sa blessure. Pour le reste, votre mésentente habituelle s’est accentuée et nécessite que vous ne cohabitiez plus jusqu’à la fin de l’année. Une objection ? Personne n’a envie de finir chez le directeur, j’imagine.

Mills ne faisait pas le poids contre le témoignage des jumeaux Sherwin. Cette explication aurait le seul intérêt de museler tout le monde et elle espérait que Skyler comprendrait. Elle ne faisait pas cela contre elle, mais dans une optique de protection, de même que conserver Bluebell à l’œil éviterait qu’elle ne lui fasse la peau pendant la nuit. Quant à récupérer Sherwin dans son dortoir à elle alors qu’elle jouissait d’une délicieuse solitude, c’était sans doute un acte d’amitié que Skyler ne comprendrait jamais. Carla ne supportait pas Bluebell, son venin et ses piques permanentes à son égard. Mais puisqu’elle ne pouvait pas dire ce qu’il s’était passé ici, elle offrait une compensation silencieuse, celle d’un dortoir pour Skyler seule, à l’abri des regards indiscrets, ce dont elle aurait bien besoin avec sa rébellion. Est-ce que cela aussi elle serait capable de le comprendre ?

Quant à Bluebell, il était évident qu’elle n’était pas ravie de son intervention, mais elle n’était pas assez bête pour cracher sur l’aide inattendue qu’elle venait de lui offrir. Le seul témoin proposait son silence. Elle penserait que c’était un signe d’allégeance pour la pureté de leur sang. Si elle avait su. Carla se pencha à nouveau vers Skyler

- Je vais t’aider à te relever. Lit ou infirmerie ?

Mon dieu, elle voulait que cette journée se termine.

Codage par Libella sur Graphiorum

Skyler
&
Bluebell

Qui a dit que les dames ne faisaient que se crêper le chignon ?

Suis-je en train de mourir ? D'autres seraient terrifiés par cette perspective. Moi, au contraire, je la vois comme une douce délivrance. Je me sens glisser le long du mur et je ne fais rien pour me retenir : je n'en ai plus la force, de toute façon. Mon dernier sort a échoué. Bluebell est à terre mais bel et bien consciente. Elle pourra me réduire au silence en un coup de baguette. Je me sens prête, je n'ai plus le courage de lutter. Toute cette rage, ce ressentiment qui m'ont conduit à me révolter, me semblent soudain bien dérisoires. Mes fesses sont les premières à toucher le sol et ce contact me semble presque doux. Ensuite, je m'effondre comme un château de cartes. Mon corps s'écrase lourdement et c'est par miracle que ma tête ne heurte pas le plancher. Je n'ai pas besoin de ça pour être clairement dans un sale état : mon sang trempe à présent ma jupe et s'échappe aussi par mes collants, j'ai l'impression que chaque respiration m'enfonce un poignard dans le ventre et tous mes sens sont brouillés. Certains voient leur vie défiler, au moment de leur mort. Moi, ce sont des visages qui viennent me hanter. Celui de ma mère, tout d'abord, suivi par ceux de mon père et de Blaze. Je crois même entendre ce dernier me parler, me crier dessus même. Je ne réalise pas immédiatement que ce n'est pas le Serdaigle qui s'époumone comme cela.

J'ai soudain l'impression que mon corps est parcouru par des centaines de fourmis. Suis-je déjà morte et enterrée ? Ce sont les vers qui dévorent mon cadavre ? L'un d'eux, sans doute plus gros que les autres, appuie avec violence sur mon abdomen. Je laisse échapper un grognement de douleur. On a encore mal même après la mort ? Putain, quelle arnaque. Au bout d'un temps indéfini - j'ai l'impression que tout est suspendu - la douleur qui irradie mon corps disparait peu à peu. Elle est remplacée par une sensation de chaleur qui part de mon ventre et qui se diffuse un peu partout. Elle suivie par quelque chose de rugueux qui m'entoure le bassin, je crois, je ne sais pas. Je suis peut-être en train de me transformer en momie. Le bourdonnement dans mes oreilles diminue et je commence à distinguer la voix qui s'adresse à moi. Je crois que je la connais. Mes yeux s'ouvrent sur une crinière blonde. Définitivement, ce n'est pas Blaze. « J'ai ... ni ... je ... » J'essaie de parler mais je n'y arrive pas. Je voudrais demander où je suis, ce qui est en train de m'arriver. Chaque mouvement de lèvres est une torture et ma gorge me fait mal. J'ai toute la peine du monde à garder les yeux ouverts mais j'arrive enfin à reconnaitre celle qui est penchée sur moi : Carla.

Cette dernière éloigne son visage du mien. Je m'autorise enfin à fermer les yeux. J'ai très envie de dormir mais un échange de paroles parvient jusqu'à mes oreilles et résonne dans ma tête, réveillant un horrible mal de crâne. J'ouvre à nouveau les yeux, péniblement, et découvre une image beaucoup plus nette que précédemment. Carla - c'était bien elle - est en train de parler d'un ton autoritaire à Bluebell. Bluebell ... La mémoire me revient d'un coup. J'ai envie à la fois de lui sauter à la gorge et de mettre le plus de distance possible entre elle et moi. Peu importe ma volonté, je n'ai clairement pas la capacité de la mettre à exécution. Mon corps ne bouge pas d'un pouce, c'est à peine si j'arrive à serrer le poing. Je suis prise d'une quinte de toux qui m'arrache la gorge et me fait souffrir à l'endroit de ma blessure. Péniblement, je passe ma main droite sur mon ventre. Mes doigts rentre en contact avec le bandage que Carla, je suppose, m'a fait. Il est sec, ma plaie ne doit plus saigner. C'est alors que la blonde entre à nouveau dans mon champ de vision. Celle-ci se penche sur moi et déclare qu'elle va m'aider à me relever. Malgré ma fierté, je ne suis clairement pas en état de refuser. Quant à choisir entre mon lit et l'infirmerie, le choix est vite fait. « Lit ... » Je parviens à articuler péniblement, surprise par le son de ma propre voix. Je ne reconnais pas du tout mon timbre : celui ci est rauque et éraillé, comme si je sortais d'un concert. Mes yeux fixent désormais le visage de la préfète d'un regard implorant. Elle sait que je n'ai aucun intérêt à aller à l'infirmerie : je finirai dans un état plus fâcheux que celui dans lequel je me trouve, si jamais quelqu'un découvre tout ce à quoi je suis mêlée. Je refuse que l'on mette le nez dans mes affaire. Et, surtout, je souhaite ardemment que l'on me laisse l'occasion de me venger de cette salope de Sherwin.

@Bluebell E. Sherwin

CODAGE PAR AMIANTE

The bitter taste of your blood

De toute évidence, Skyler avait le droit de survivre. Il en allait de la loi primaire des êtres vivants ; ils pouvaient succomber, ils pouvaient résister. Aussi lamentable soit-elle, la sang-de-bourbe pouvait donc tout à fait se remettre de ses blessures, guérir et retrouver sa place dans la hiérarchie humaine, quelque part au-dessus des cafards, quelque part en-dessous des singes. Dans sa grande bonté, Bluebell l’aurait laissée se relever et en vérité, il s’agissait plus d’humilité que de générosité. Qui était-elle pour s’opposer aux codes du vivant ? Résolument, il suffisait à Skyler de rouvrir les yeux pour mériter sa survie et pour éteindre ses ardeurs. Hélas, Yaxley ne sembla pas partager ce raisonnement pourtant évident - d’un autre côté, le bon sens n’était pas son fort - et décida d’elle-même la survie de la Serpentard, dérogeant aux règles de Darwin et attisant au passage les feux de sa rage. Peut-être aurait-elle rappelé Carla à sa condition mortelle en la soumettant elle aussi au test de survie si cette idiote ne s’était pas empressée de lui lancer un expelliarmus. Prise au dépourvu, dans la mesure où la faible raison qu’il lui restait derrière sa colère était déjà toute accaparée à faire entendre sa folle logique, Bluebell n’eut le temps d’aucun geste et sa baguette vola aussitôt dans les airs, laissant entre ses doigts une sensation fourmillante. “Imbécile” persifla-t-elle en levant ses yeux de sa main vers le visage de Carla devant elle. “Je viens de t’expliquer qu’elle méritait cette punition. Je me fiche bien d’avoir sa mort sur la conscience” ajouta-t-elle plus bas en reportant son attention sur le corps inerte de son ennemie, s’adressant davantage à elle-même qu’à Carla qui venait de s’agenouiller. “Mieux vaut la sienne que celle de mon frère” conclut-elle dans un murmure certainement inaudible. Le rictus qui parcourut ses lèvres n’eut rien de l’égarement psychotique précédent. Non, il parut étonnement doux, ému, humain, probablement par reflet de la prise de conscience qui venait de la saisir. Si elle avait déjà effleuré cette pensée, jamais elle ne lui parut aussi pesante. Bien sûr, Maxton avait raisonné ainsi. Le tuer lui ou la voir mourir elle. Supprimer Skyler ou assister à la déchéance de son frère. Le choix était d’une évidence frappante qui pourtant ne s’abattait sur elle qu’à présent, alors qu’elle regardait doucement Skyler s’éloigner du monde des vivants. Que Carla annonce son décès, qu’elle admette à tous qu’elle avait tué quelqu’un, que Maxton aprenne qu’elle avait failli à sa parole. Tout cela lui paraissait bien futile par rapport au soulagement brutal qui coulait en elle à la perspective d’avoir sauvé son jumeau des risques de son addiction. Carla ne comprendrait certainement jamais, malgré ses excuses, malgré ses explications. Se contentant injustement de soigner la née-moldue, la blonde prodigua quelques sorts qui captivèrent son attention, suspendue entre la véhémence des évènements, la colère cuisante de sa peur et l’amour sauvage pour son frère, quand elle reprit la parole. Le timbre de voix ferme de la jeune fille lui permit de détacher ses yeux du corps de Skyler pour retrouver le vert de ses prunelles. Ce ne fut qu’à cet instant qu’elle s’aperçut que Carla lui rendait sa baguette.

Alors quoi, tout était déjà fini ? Elle avait manqué de tuer, ratant de justesse un acte terriblement héroïque, Skyler était pansée, et la vie devait ainsi reprendre son cours sans autre mesure ? Tout cela lui parut absurde, peut-être autant que l’ordre de la préfète. Elle s’était attendue à des remontrances, à des invectives, à des interventions adultes ; à un jugement, à des menaces, à tout, sauf à une conclusion aussi rapide, sauf à une demande de changer de chambre. Ce fut si facile que Bluebell en demeura déconcertée. La hauteur de sa rage semblait démesurée par rapport à la surface lisse de la réalité. Pas de mort, pas de conséquence. Juste un changement de chambre, intimé à proximité d’une mare de sang, soufflé sur les braises de sa furie. Le sourire absent qui avait figé ses lèvres jusqu’à présent s’évanouit pour un déboussolement qui ne trouva une réponse qu’après quelques secondes de silence. “Mais j-” bredouilla-t-elle ; intervention qu’interrompit aussitôt Carla d’un hochement de tête. “D’accord” s’entendit-elle finalement murmurer avant de se relever avec lenteur pour ne pas chanceler. Hagarde, Bluebell n’eut pas l’enthousiasme de riposter. Oh certes, elle n’avait aucune envie de loger avec Carla. Néanmoins, s’en tirer avec cette seule contrainte relevait d’un véritable miracle du destin, une curiosité qu’elle aurait été sotte de remettre en question. La survie de Skyler était une infâmie - le privilège de n’être condamnée qu’à une colocation avec Yaxley, une opportunité. Bluebell tenta alors d’avancer d’un pas vers sa chambre, mais fut contrainte de suspendre son mouvement en posant sa main libre sur le mur à côté d’elle, prise d’étourdissements qui s’intensifièrent à mesure que Carla exposait calmement la situation. Par tous les dieux, s’agissait-il d’un rêve ? Comment pouvait-elle raisonnablement avoir droit à un tel soutien de Yaxley alors que celle-ci la méprisait à la hauteur qu’elle la dédaignait, alors qu’elle avait vidé Skyler de son sang, alors qu’elle avait sussuré le début d’un sortilège impardonnable ? Il lui semblait ne plus rien comprendre face à une chance aussi brute. Sa colère commençait à s’égoutter en de longs fourmillements qui firent trembler sa main droite fermement raccrochée à sa baguette. Un rire nerveux parcourut sa gorge alors qu’elle toisait Carla d’un regard insolent, comme l’invitant à revenir sur sa version des faits. Mais Carla n’ajouta rien, résolue de la défendre. “Aucune, votre Honneur” affirma-t-elle dans une raillerie en seule réponse. Non, aucune objection au récit de la préfète qui seyait avec perfection les contours sanguinaires de leur confrontation. S’il était impossible pour elle de comprendre le motif pour lequel Yaxley avait tenu à la protéger, en dépit de leurs différends, en dépit de leur défiance, il lui était en revanche nécessaire d’abonder en son sens. Les explications viendraient plus tard, si besoin. Du reste, il était temps d’accepter cette main tendue.

Yaxley se tourna à nouveau vers Skyler qui semblait progressivement reprendre connaissance. Détournant le visage pour s’épargner ce pitoyable spectacle, Bluebell reprit son avancée vers sa chambre, le menton haut afin de contrôler les vertiges qui l’assaillaient. Ces dernières minutes étaient passées vite, trop vite, et la bonté de la fortune se révélait en définitive surprenante, si bien qu’il lui parut difficile de croire qu’elle pouvait reprendre à vivre. En vérité, seul le soulagement lui permit de tenir ; un sentiment si intense que le regard effronté et le rictus amusé qui décoraient son visage ne quittèrent pas ses traits à mesure qu’elle rassemblait ses affaires dans son dortoir éventré. Bluebell se sentit surhumaine, d’une puissance divine qui l’enivrait plus subtilement encore que la hargne. Il ne s’agissait pas d’une animosité enflammée, mais d’une véritable force qui, dans tout le soulagement de son corps, l’enveloppait pour lui permettre d’avancer, légère, dans une arrogance démesurée. Elle avait eu tout ce qu’elle voulait. Elle s’était vengée, elle avait défiguré Mills, elle avait sauvé son frère, elle avait souligné sa supériorité, elle s’en tirait avec une seule égratignure. Carla s’était rangée de son côté, acceptant enfin de se soumettre à leurs dogmes, et elle était désormais en train de boucler sa valise pour quitter définitivement ce dortoir et rejoindre une chambre à sa grandeur. Jamais la violence ne lui avait porté une telle satisfaction, un sentiment si délicieux qu’elle se demanda s’il était possible de le faire perdurer à jamais. Peut-être que tuer, définitivement, ou peut-être que faire souffrir, cruellement, réitèrerait cette gloire. Bluebell était ainsi passée de l’autre côté de la peur, abandonnant ses cauchemars, ses appréhensions, ses doutes, pour une certitude glaçante qu’il lui fallait être chimère pour échapper à ses démons. La solution était là depuis tout ce temps. La démence pour survivre, mieux, la démesure pour vaincre. Elle avait toujours cru faire de son mieux pour avoir le triomphe tant désiré, le royaume dessiné dans ses ambitions ; mais qu’avait-elle fait tout ce temps ? Se contentant de vivre, de mordre, de piquer, elle avait raté l’essentiel dans le contrôle de son venin. Il lui fallait déverser ce poison, il lui fallait dresser l’échine, il lui fallait pourfendre la frontière avec le réel pour parvenir à ce pouvoir. Il lui fallait plus, intimement plus, infiniment plus, et cette étincelle d’outrance venait d’éclater pour la première fois du bout de sa baguette. De fait, son déboussolement laissa progressivement place à une résolution qui se boucla en même temps que ses affaires rassemblées dans une volumineuse valise de cuire. En réalité, Bluebell n’avait pas beaucoup d’effets personnels dans sa chambre, convaincue que Skyler aurait taché de sa nauséabonde condition ses plus précieux objets, aussi vida-t-elle aisément ses tiroirs pour traverser à nouveau la pièce éclatée de morceaux de bois le pas léger, en direction du dortoir de Carla. La Serpentard ne s’arrêta même pas à hauteur des deux jeunes filles alors que Yaxley couchait Skyler dans son lit. “Tu feras attention où tu marches, la prochaine fois” glissa-t-elle en guise d'au revoir, un rictus mauvais sur ses lèvres. Sarcasme ou avertissement, il fut difficile de saisir la nuance de ses propos qui restèrent en définitive marqués de provocation. On ne froissait pas les dieux sans conséquence, et s'empaler sur un morceau de bois était un châtiment clément qui ne se répéterait pas une seconde fois.

code by EXORDIUM.

BORDERLINE

Are you too terrified to try your best? Better ascend into the sky, dangerously fine and unforgiven, relentless, zealous: inspired by the fear of being average.

À SAVOIR Arrivé(e) le : 04/04/2020 Parchemins rédigés : 1181 Points : 10

The bitter taste of your blood

@Skyler P. Mills
@Bluebell E. Sherwin

Carla tourna la tête quand Bluebell tenta de se justifier. Tout cela était incompréhensible. Son frère se portait comme un charme, la dernière fois qu’elle les avait vus tous les deux, les jumeaux Sherwin avaient l’air aussi diaboliques qu’à l’accoutumée. Lors de la précédente année scolaire, ils avaient bien connu une période durant laquelle ils faisaient peine à voir, mais cela était de l’histoire ancienne depuis la rentrée. En tout cas, elle n’avait rien vu d’alarmant qui expliquait cette attaque et pourtant, elle avait largement eu le temps d’observer ses petits camarades. Quand elle était parmi eux, sa présence était tolérée, mais elle n’était pas une interlocutrice de choix, si bien qu’elle avait eu l’occasion de détailler avec soin leurs mimiques, de retenir leurs tics de langage … Elle la dévisagea, interdite. Cette fille était cinglée. Ce n’était pas une punition, mais une exécution. Cela ne l’émouvait pas un quart de seconde. Si elle n’avait pas acquis leur certitude précise en cet instant que la fille devant elle était une sociopathe, elle aurait tenté de la raisonner, sans doute. Là, elle se contenta de conserver le silence et de louer la présence d’esprit qu’elle avait eue de prendre la baguette de Bluebell. Cette fille l’aurait saignée à son tour sans hésiter. Cinglée.

Dieu merci, Skyler arrêta de se vider de son sang sur le parquet et Carla respira mieux quand sa capitaine ouvrit les yeux. Elle ne dit rien de clair, mais au moins, elle parlait. Pour le reste, son teint cireux n’était certes pas très engageant, mais rien que le temps ne pourrait résoudre, non ? Du moins, elle essayait de penser cela pour se rassurer.

Quand son regard revint vers Bluebell, elle avait perdu cette lueur de folie qui dansait dans ses prunelles et elle semblait désormais plus perdue par l’enchaînement des événements que décidée à les assassiner toutes les deux. Tant mieux, Carla n’avait aucune envie de mourir. Pour le reste, elle débita des ordres avec une voix qui ne souffrait aucune contradiction, offrant un masque d’assurance qu’elle était loin de ressentir. La solution qu’elle avait choisie ne réglait rien. Mais elle évitait les retombées. Pour le reste, tout n’était qu’un numéro d’actrice réalisée sous la pression. Les mensonges avaient toujours fait partie de sa vie depuis qu’elle était enfant, tout comme l’expression de froide neutralité qu’elle arborait. C’était des compétences qui, sans être innées, étaient présentes chez elle depuis si longtemps qu’elles en étaient devenues naturelles. Après avoir fréquenté Maxwell trop longtemps, elle avait cru que ces aptitudes avaient disparu, jusqu’à être capable de jouer la comédie avec Finnbjörn. Pour ce moment précis, c’était la même chose. Il fallait feindre l’assurance et imposer sa volonté. Bizarrement, elle ressentit une forme de plaisir malsain à faire plier Bluebell. C’était elle qui la voyait toujours dans le rôle de la brebis égarée et pour la première fois, le rapport de forces venait de s’inverser. Elle détenait l’un de ses secrets, Sherwin lui était redevable et elle venait de lui obéir. Si elle n’avait pas été aussi choquée par les événements et aussi peu enthousiaste à l’idée de sa nouvelle colocataire, elle aurait laissé le pouvoir lui monter à la tête jusqu’à la griser. Là, elle resta plantée au milieu du couloir, laissant Bluebell s’échapper pour effectuer son déménagement.

Prise de remords, elle laissa le choix à Mills de l’infirmerie. Ses mensonges ne devaient pas la priver de soins. Mais la brune refusa immédiatement pour lui demander de la raccompagner jusqu’à sa chambre et Carla se contenta d’acquiescer. Elle hésita à lancer un nouveau sortilège pour la faire léviter jusqu’à son lit, puis sa ravisa. Il ne fallait pas forcer la chance, si elle échouait, elle risquait de faire plus de mal que de bien. Elle passa doucement sa main dans le dos de la jeune fille et lui indiqua

- Tiens toi à moi.

Elles avaient sensiblement la même stature, mais heureusement Skyler était plus fine, ce qui lui permit d’arriver à l’aider à se relever en tanguant, certes, mais sans finir par terre. Alors qu’elle la soutenait vers la chambre, Carla se rappela que si les tâches de sang ne se voyait pas sur ses collants sombres qu’elle sentait toujours aussi poisseux, le parquet était plus clair. D’un mouvement délicat du poignet, elle fit avancer un tapis sur la flaque de sang avec sa baguette, histoire d’avoir le temps de nettoyer tout cela après. Pour l’instant, elle allait rester dans la chambre avec Skyler le temps que Bluebell termine son transfert. Hors de question de la laisser seule après ce qu’il venait de se passer. Il n’aurait plus manquer que Sherwin l’achève.

Une fois Skyler dans son lit et alors que Bluebell quittait la pièce, non sans un dernier coup d’éclat, elle s’assit au bout du matelas, la baguette à la main, elle indiqua à la blessée, d’une voix sans émotion

- Je vais rester ici tant que Bluebell n’a pas terminé. Après je rangerai un peu et je te laisserai te reposer.

Promesse implicite de ne pas la laisser en position de vulnérabilité donc. Skyler en comprendrait ce qu’elle voulait. Quant au rangement, entre la tâche de sang et la chambre détruite, elle avait une bonne heure de boulot devant elle. Mais enfin, c’était mieux que d’avoir un cadavre sur les bras. Quant à Bluebell … Bluebell lui devait désormais une faveur et c’était sans doute la nouvelle la plus surprenante de la journée.

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Codage par Libella sur Graphiorum

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