La vie de prof. Du côté des étudiants, sans doute pensent-ils que les professeurs font leur correction des devoirs, préparent leur cours pour les leçons suivantes, font des réunions où ils maudissent leurs élèves dans la Salle des Profs. Ou encore que leurs enseignants jouent aux fléchettes et visent sur les plus mauvais élèves. Celui qui gagne peut donner l’une de ses surveillances à celui qui perd. Mais pour le coup, c’est raté. Miss Thorstein et Monsieur Armitage sont bien loin de la Salle des Professeurs et d’un simple jeu de fléchettes. Si les élèves savaient… Ils en avaient collés pour moins que ça. Elle, du moins. Elle avait déjà collé Carter pour une lettre qui lui avait fait perdre son temps. Alors une bagarre sur un ring… Mais l’idée d’un tournoi entre élèves lui plaisait et, bien qu’elle savait que la directrice ne l’accepterait probablement jamais, elle trouvait que c’était une bonne façon pour les plus impulsifs de venir libérer leur énergie et leurs émotions. Savoir manier la baguette, c’était bien. Mais savoir se servir de ses mains, c’était tout aussi important. Combien de sorciers s’étaient retrouvés désarmés sans savoir quoi faire alors que des techniques de combat auraient pu les aider ? Il ne fallait pas négliger le physique pour la magie.

Son front avait percuter le menton de Fergal avec violence. Elle avait tout donné, sachant pertinemment que ça lui ferait un peu mal, à elle aussi. Mais le coup serait bien pire pour lui. Il crache un filet de sang et elle en profite pour se remettre sur ses pieds. Elle le laisse essuyer sa bouche avec son haut, ça lui permet de reprendre son souffle et de se remettre en position, la garde levée devant son visage déjà meurtri. Mais il se remet plus vite qu’elle ne le pense, elle s’est mise trop proche de plus et elle n’a pas le temps de reculer assez que son genou vient la frapper au plexus, la faisant se courber vers l’avant, expulsant l’air de ses poumons par la même occasion. Elle écarquille un peu les yeux sous le coup de l’impact. Elle recule un peu, prenant le temps de souffler. Ca la brûle, la douleur est lancinante, intense, irradie dans sa poitrine. Son corps lui fait mal et elle peine à se redresser pleinement tellement ses côtes sont en souffrances. Mais elle refuse de lacher le morceau, elle refuse d’abandonner. Il devra la mettre au sol, KO complètement mais tant qu’elle aura la force de le frapper, elle continuera. L’abandon ne fait pas partie de sa vie, c’est impossible.

Elle se déplace un peu, faisant mine de tester un peu son corps avec la douleur de ce nouvel impact, et à nouveau, elle élance son pied vers le flanc de Fergal.



1 – 4 – 6 : Esquive, again and again.
2 – 3 – 5 : Les côtes de Fergy sont touchées.

L’an dernier, à la même période, elle avait ouvert le club de Duel. Des entrainements et une compétition entre tous les participants de l’école. Elle y avait vu certains élèves comme elle ne les avait jamais observé. La combativité, l’impulsion sous la pression, la pression d’avoir un public, d’être jugé directement par un professeur. Parce que oui, ça restait juste une compétition mais Thorstein n’était pas moins regardante pour autant, ça comptait pour elle. Chaque entrainement, chaque combat avait compté. Elle avait tout observé d’un œil attentif, repérant au passage ceux qui valait la peine d’être regardé et ceux… Ceux qu’il avait mieux fallu arrêter tellement elle avait eu peur de mourir foudroyée par l’ennui. Certains élèves s’étaient montrés particulièrement brillants et plein de ressource, c’était ceux là qu’elle gardait à l’œil. Pour ceux qui s’étaient montrés médiocre voir pire, elle ne leur accordait qu’une attitude glaciale.

Cette année, elle n’avait pas relancé le club, suite à la conférence. Ils ne le méritaient pas. S’en prendre les uns aux autres c’était une chose, s’en prendre à l’autorité de l’école, à leurs professeurs, c’était autre chose. Elle aurait préféré des combats physiques, sans baguette, sans magie pour leur permettre de se défouler tout en apprenant certaines techniques de défense contre un éventuel agresseur. La baguette, ça ne faisait pas tout. Mais elle avait une vision des choses bien à elle et ce n’était certainement pas le point de vue de la Directrice. Ou des parents.

Le coup de genou qu’elle a reçu dans la cage thoracique lui fait mal à chaque respiration. Son corps entier la fait souffrir à chaque mouvement, mais elle se refuse à jeter l’éponge. Elle n’a pas encore eu son compte, elle tient sur ses pieds, elle peut encore frapper, ça fait mal, mais elle peut. D’ailleurs, elle élance son pieds droit sur les côtes de son adversaire du jour. Le mouvement lui arrache une grimace et elle se retient de gémir. Elle a l’impression que sa poitrine se déchire mais ce n’est pas le moment de stopper. Elle y a mit toute son énergie restante, son poids, sa hargne. Quitte à ce qu’elle ait mal aux côtes, elle ne sera pas la seule, elle en est sûre. Il n’y a que la peau pour protéger les côtes à cet endroit, il y a peu de graisse, ça a claqué, il a du bien le sentir passer. Mais elle n’a pas le temps de se déplacer assez vite que son pied la frappe au genou. Sa jambe plie et la fait tomber une nouvelle fois. Décidément, il aime le combat rapproché au sol apparemment. Ca lui lance. Si elle se remet debout, elle ne pourra pas poser le pied au sol, elle le sent, son genou ne le supportera pas. Mais au sol, ça pourrait faire l’affaire.

Il ne faut pas lui laisser le temps de trop bouger, alors Thor tente un mouvement de jambes le faire tomber au sol. Il tombera de plus haut qu’elle, avec un peu de chance, il fera une mauvaise chute.


1 – 2 – 6 : Esquive, again and again.
3 – 4 – 5 : Le jeu de jambes fait tomber Fergal.

Son genou est out. Hors de combat. Il ne pourra plus tenir son poids si elle tente le moindre appui sur un seul pied. Et elle pourra encore moins combattre sur un seul pied. Tenir sur une jambe, ce n’est bon que pour les flamands roses sui dorment le long des rives. Elle n’est pas un flamand rose. Le rose d’ailleurs, elle trouve ça répugnant. Elle aime le vert forêt, ça l’apaise, ça la décontracte. Elle aime l’odeur des sapins, de l’herbe mouillée, des bois. Le côté sombre et inquiétant de la forêt contre la luminosité du soleil qui se reflète sur les clairières.

Elle est fatiguée, elle a donné. Elle pourrait donner plus et ça la frustre, ce n’est pas un manque d’énergie mais son visage lui fait mal, son genou lui fait mal, sa poitrine est en feu et elle s’empêche de grimacer à chaque respiration douloureuse. Elle aurait pu tellement faire mieux, ça la frustre. Elle est en colère. Et en même temps, il est bien plus grand qu’elle, plus fort aussi. Il a une puissance aussi élevée qu’elle l’espérait quand elle l’a convié à venir se frotter à elle sur un ring. Il y en a eu peu, depuis qu’elle est à Poudlard, des personnes dignes de son intérêt pour qu’elle les fassent entrer dans son cercle d’amis, et encore moins des dignes de l’affronter lors d’un combat ou d’un entrainement. Ce n’est clairement pas à Siwan qu’elle proposerait ce genre de choses, elle n’a clairement pas le gabarit pour. Wayde l’a, lui. Mais c’est trop compliqué. Elle ne pourrait pas supporter de perdre et lui non plus. Il y aurait trop de hargne. Ou trop de passion, aussi.

Le balayage est raté, il a esquivé. Il grimace, comme elle. La Nordique ne l’a pas loupé, il faut dire. Lui non plus, d’ailleurs. Et contre toute attente, au lieu de reprendre sa garde et de profiter qu’elle soit au sol, comme un peu plus tôt, il attrape une chaise et il s’installe. Elle reste un instant interdite quand il lui donne une chaise à elle aussi mais elle se lève. La blonde tâte son genou, la douleur se diffuse, il faudra mettre de la glace. Quant au coup dans la poitrine, elle sait déjà la taille qu’aura l’hématome. Un passage par l’infirmerie s’imposera sans doute ce soir. Mais pour le coup, Fergal lui offre le meilleur des remèdes. Une bière. Un sourire en coin s’étire sur les lèvres de l’enseignante.


« Tu as pensé à tout. »


Il lui retorque avec une phrase des plus simples. Baston/Bière, c’est la base. Leur base, en tout cas. Elle frappe sa bouteille contre celle de son adversaire en le regardant dans les yeux.


« On va devoirrr rrreprrrendre ça une autrrre fois, je ne compte pas en rrrester là. »


Elle appuie la bouteille froide contre son plexus, espérant inconsciemment que ça réduira le mal. Mais elle sait, au fond, elle sait que l’infirmière va se demander ce qu’ils ont fichu. Cela dit, il lui suffira de la foudroyer sur place pour la mettre mal à l’aise et qu’elle pose les questions à la personne la plus avenante, Fergal, donc. Refiler la patate chaude aux autres, ce n’est pas le genre de Thor mais dans ce cas-ci, elle lui refile volontiers pour ne pas perdre son temps à répondre à des questions dont elle se fiche. Pas besoin d’une explication pour soigner un simple hématome. A moins qu’il ne lui ai fêlé une côte, ce qui n’est pas impossible.


« Cerrrtains donnerrraient cherrr ici pourrr pouvoirrr fairrre ne serrrait-ce qu’un dixième de ce que tu as fait. »


C’est une simple information, mais ça la fait sourire un peu. Qu’ils essaient seulement un jour, qu’ils essaient.


« Brrradforrrd le prrremier, sans aucun doute. »