Premier week-end à Pré-Au-Lard depuis le début de l'année scolaire. Comme pour chaque première fois à Poudlard, il avait fallu que les préfets donnent les consignes, vérifie les autorisations de sortie et accompagnent les troisième années jusqu'au village pour sorciers. Une fois cette réelle corvée achevée, bien que ce soit un excellent moyen de se montrer on est bien d'accord, Cruz put vaquer à ses occupations. Elle et Edward se séparèrent donc, après tout ce n'était pas parce qu'ils étaient tous deux préfets qu'ils devaient faire leur vie ensemble. De toute manière, ils avaient des choses à faire, chacun de leur côté. Cruz avait un rendez-vous à honorer et pas n'importe lequel, car il était prévu de longue date. En effet, elle avait eu l'heureuse surprise de recevoir une lettre de son ami Isidore. Elle ne l'avait pas vu depuis longtemps, à cette époque, car il avait été blessé durant la bataille pour la libération des nés-moldus, en juin. Qui plus est, le cerbère qui lui servait de petite amie veillait à ce que Cruz n'approche pas le jeune homme à moins de cent mètres. Difficile, dans ces conditions, d'entretenir leur amitié et de prendre des nouvelles. Aussi, c'était d'abord avec un grand plaisir que la jeune femme avait accepté l'invitation de son ami à se retrouver à Pré-Au-Lard pour rattraper le temps perdu.

Enfin ... Ça, c'était avant. Avant la soirée de rentrée que Cruz et Edward avaient organisée pour les Serpentards. Tout était parfait, pourtant et la jeune femme avait veillé au moindre détail. Mais, comme on dit, les aléas du direct en ont décidé autrement. Et Izzie n'était pas pour rien dans la cacophonie qui avait fait de cette soirée la fête la plus improbable de l'histoire de Poudlard. En effet, il s'était pointé à la soirée après avoir bu pas moins d'une bouteille entière d'alcool à lui tout seul. Je vous laisse donc imaginer l'état dans lequel il se trouvait, il allait tellement bien que Cruz avait dû jouer les chaperons pendant tout le début de soirée. Mais si encore il n'y avait eu que ça ... C'était sans compter Ashley et les soutien-gorges de Savannah, celle-ci qui tape un scandale et quitte la soirée avec son frère, suivi d'Ashley, la musique déprimante jouée au piano, Saskia la peste et j'en passe ... Cette soirée n'avait vraiment pas été de tout repos pour Cruz, qui avait bien failli tout laisser tomber. Mais elle était plus forte que ça et était finalement restée. Ce qui ne l'empêchait pas d'en vouloir à Isidore pour son comportement : cette rancœur était un mélange de colère, d'amertume et de déception. Cruz avait déjà eu droit aux excuses et explications d'Ashley et de Savannah, ne manquaient plus que celles de son ami.

Ce rendez-vous aux Trois Balais était l'occasion idéale, surtout depuis que la rumeur circulait : lui et Savannah auraient rompu. Cruz avait du mal à y croire, il y a encore peu elle se crêpait le chignon avec la jeune femme à cause de son amitié avec Isidore. L'Espagnole comptait bien mettre à profit ce rendez-vous pour tirer ça au clair et, surtout, pour jouer ses cartes. Le jeune homme s'était en effet montré assez flatteur envers elle quand il était sous alcool, sous entendant qu'elle lui plaisait et pas qu'un peu. Cruz en avait donc déduit que c'était certainement pour cela que Savannah avait envie de l'encastrer dans un mur à chaque fois qu'elles se creusaient. Restait à voir si les déductions de l'orpheline étaient bonnes et si elle pouvait s'en servir pour se venger de la capitaine de l'équipe de Quidditch des Serpentards. Vengeance qu'elle avait nourri tout l'été, après leur accrochage houleux devant l'infirmerie à la Ferme Incartable. Cette rupture, si elle était avérée, était du pain béni pour Cruz. Non seulement elle pourrait revoir son ami comme avant mais, en plus, elle n'était pour rien dans toute cette histoire. Une raison de plus de narguer Savannah, qui ne s'était visiblement pas méfiée de la bonne personne.

Cruz fit son entrée aux Trois Balais pile à l'heure convenue par les deux adolescents. La jeune femme scruta la pièce du regard mais ne vit pas Isidore parmi les quelques élèves présents. Rien d'étonnant à cela, il n'était pas connu pour sa ponctualité. La préfète avisa une table vide et s'y installa. Pensive, elle se mit à observer les passants par la fenêtre sans plus se soucier de l'arrivée de son camarade. De toute façon, il n'aurait aucun mal à la reconnaître : de longs cheveux bouclés, un teint hâlé, des yeux sombres ... Cruz n'avait vraiment pas le profil type de l'Anglaise ! Son caractère était d'ailleurs à la hauteur de son physique : mieux valait pour le jeune homme que ses explications soient convaincantes.

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Nothing ever happens

Pensive, Cruz ne prêtait même pas attention aux scènes qui se déroulaient sous ses yeux, à l'extérieur. Les yeux dans le vide, elle réfléchissait à la soirée de rentrée des Serpentards et au comportement qu'elle devrait adopter en présence d'Isidore. S'il se décidait à venir bien sûr et c'était dans son intérêt. Pas sûr que la tempétueuse Espagnole lui pardonne deux fois. Parce qu'elle comptait lui pardonner ses excès de l'autre soir, même si sur le coup la jeune femme avait pris la mouche. Il faut dire qu'aucun de ses amis ne l'avaient aidé dans son entreprise alors que, pourtant, c'était bien le rôle des amis de se soutenir et de s'épauler, non ? Puisque Cruz avait finalement pardonner ses écarts à Ashley, alors que la jeune femme avait agi en ayant pleinement conscience de ses actes, il aurait été injuste de ne pas faire de même avec Isidore, qui avait des circonstances atténuantes. Qui plus est, la préfète était curieuse de savoir si le jeune homme avait des souvenirs de cette soirée. Il était tellement éméché qu'il y avait de fortes chances pour qu'il ne se souvienne de rien et c'était peut-être mieux ainsi. Cruz, quant à elle, avait toujours eu bonne mémoire et pouvait se remémorer au mot près leur conversation ce soir là. La jeune femme comptait bien faire part de ses souvenirs à Isidore, si bien sûr il se décidait à pointer le bout de son nez.

Cruz sentit une présence qui la tira de ses pensées. Elle s'arracha à la contemplation du paysage pour se trouver face à celui qu'elle attendait. Enfin ... à une pale copie de ce garçon en tout cas. Habillé négligemment d'un jean et d'une chemise ouverte, Isidore semblait être l'ombre de lui-même et avait une mauvaise mine. Cruz fronça légèrement les sourcils, soucieuse : Savannah était-elle la cause de ce piteux état ? Les deux jeunes gens s'observèrent ainsi durant quelques instants, à s'observer mutuellement. Même si la préfète avait décidé de faire preuve de clémence, elle ne comptait certainement pas faire le premier pas. Elle avait sa fierté tout de même et il fallait que son ami admette ses torts avant qu'elle ne lui accorde sa grâce. Un peu gêné, Isidore mit fin à l'attente en tirant un paquet de malice-réglisses enrubanné de sa poche. Il lui tendit, la tête baissée comme un enfant pris en train de faire une bêtise, puis releva légèrement les yeux en lui faisant un regard de cocker. Le genre qui voulait dire de ne surtout pas le gronder trop fort. Cruz observa son petit manège sans cilié, ses yeux noirs posés sur son ami. « Pour me faire pardonner en bonne et due forme. Tu vas quand même pas me bouder éternellement, si Cruzie… ? » La jeune femme leva un sourcil inquisiteur. C'était donc là sa façon de s'excuser ? L'intention était mignonne, elle ne pouvait pas dire le contraire. Elle savait aussi qu'il était en train de jouer de ses charmes pour la faire craquer. Et vas-y que je t'offre des bonbons, que je te fais un regard de chien battu et que je te sors le petit surnom mignon qui va bien. La jeune femme se retint de sourire et conserva son air dur. Il ne fallait tout de même pas lui concéder la victoire trop vite. « Je pourrais. » Lui répondit-elle en passant une main dans ses longs cheveux. Cruz laissa passer quelques instants de doute, ménageant son petit effet avant de poursuivre. « Mais bon, j'estime que la gueule de bois que tu as dû te taper le lendemain est suffisante comme punition. Tu as mauvaise mine, l'alcool ne te va pas au teint. » La brune cessa de parler quelques instants, laissant le temps au serveur de disposer les deux Biéraubeurres qu'Izzie avait sûrement dû commander en arrivant dans l'échoppe. L'employé repartit avec un petit sourire en coin : les avait-il pris pour un couple ? Un garçon et une fille dans un bar avec un petit cadeau de la part du jeune homme, c'est vrai que ça pouvait prêter à confusion. Si seulement Savannah était dans le coin pour voir ça ! A cette pensée, Cruz eut un petit sourire. « Tu sais, tu dis des choses très intéressantes quand tu es sous l'emprise de l'alcool. Tu es beaucoup plus bavard qu'à l'accoutumée ! » Conclut-elle, l'air malicieux, avant de porter sa boisson à ses lèvres. Puis elle entreprit de défaire le paquet de bonbons, attendant la réponse de son ami. Cruz avait prévu d'avance de ne pas faire la tête à Isidore mais cette petite attention le fit remonter dans son estime. Ce qui n'était pas de trop.

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Cruz scrutait le visage de son ami, guettant la moindre de ses réactions. Elle ne l'avait jamais vu aussi ... misérable. Et cela lui faisait de la peine de ne pas avoir en face d'elle le Isidore qu'elle connaissait. Celui qui ne manquait jamais une occasion de la faire enrager, celui toujours prêt à chercher les embrouilles avec elle, celui qu'elle avait eu envie de fracasser durant leurs premières années à Poudlard et qu'elle adorait désormais. Les rumeurs qu'elle avait entendu ça et là, dans la salle commune ou au détour d'un couloir, lui revenaient en tête : Savannah était-elle vraiment derrière tout ça ? Si c'était vrai, que le jeune homme ne s'attende pas à se faire plaindre : ce n'était vraiment pas le genre de la maison. « Mais non, parce que tu sais que je suis un empoté social, et que tu te sentirais mal de me laisser te supplier d'accepter mes excuses. » Cruz arqua un sourcil puis leva les yeux au ciel, d'un air faussement exaspéré. Isidore avait raison sur un point : c'était vraiment le pire des empotés sociaux qu'elle connaissait et bien le seul qui avait l'honneur de figurer parmi ses amis. Ashley aussi était pas mal dans le domaine, mais à une échelle différente. Quant au fait qu'elle se sentirait mal de le laisser la supplier ... La bonne blague ! Elle adorerait ça, au contraire. Mais la jeune femme sentait que ce n'était vraiment pas le moment de l'accabler, il avait l'air bien assez abattu comme cela. « Rooh ça va, cesse donc de prendre tes airs de victime ! Je me trouve bien trop gentille avec toi, monsieur l'empoté social de première catégorie. » Lui confia-t-elle en lui faisant un clin d’œil. La préfète n'avait pas envie de passer un après-midi morose alors autant expédier au plus vite ces histoires d'excuses et de culpabilité, surtout qu'il n'y avait pas eu mort d'homme. Juste mort de dignité et de crédibilité mais bon, je suppose qu'on doit pouvoir s'en remettre, avec le temps, peut-être.

« Ça, tu l'as dit. Je l'ai pas volée, même si concrètement j'étais trop à l'ouest pour me rendre compte de quoi que ce soit. Au moins, t'auras pu démontrer que t'es parfaite comme préfète, en sachant jouer les chaperons. » Cruz esquissa un sourire en repensant à son rôle auprès d'Izzie durant la soirée. Elle avait carrément assuré, il pouvait le dire ! N'est-ce pas dans de tels moments qu'on reconnaît ses vrais amis ? Ainsi, Isidore ne pourrait plus jamais douter de l'amitié de Cruz car elle n'avait pas failli à son devoir. La jeune femme avait surveillé le Serpentard toute la soirée et lui avait soigné son nez blessé, malgré les paroles pas toujours très gentilles qu'il prononçait et les quelques fois où Cruz s'était retenue de lui en foutre une bonne pour lui remettre les idées en place. Non mais sérieusement, il n'y avait bien qu'Isidore Vayne pour s'afficher dans des situations pareilles. Et il n'y avait bien que Cruz Rosewood pour lui trouver des excuses et voler à son secours. « C'était bien le but de la soirée, me montrer sous mon meilleur jour. Et puis, j'étais bien obligée de m'occuper de toi : la salle était pleine de vautours qui n'attendaient qu'un seul faux-pas pour te tomber dessus. Et t'avais le nez en sang. » Se justifia l'Espagnole, tant bien que mal. C'était du grand Cruz ça, chercher des excuses à son comportement altruiste. D'où lui venait cette manie de toujours s'excuser de ne pas être une garce ? Avoir traîné avec Aniek Frowein depuis sa première année à Poudlard n'était sûrement pas étranger à tout ça.

« Bavard ? Vends moi du rêve, vu mon état ça devait être brillant. Et quoi que j'ai pu te dire, j'espère bien que ça va rester entre nous, jeune pie. » Cruz relava les yeux du paquet de bonbons qu'elle était enfin arrivée à défaire et observa son ami. Le jeune homme semblait clairement anxieux à l'idée de ce qu'il avait pu confier à l'Espagnole sous l'emprise de l'alcool. Et il n'avait pas tort de s’inquiéter, car Cruz en avait entendu des choses à cette soirée. Des choses qu'il aurait certainement préféré garder pour lui. Par quel bout commencer ? Difficile à dire. Aussi, Cruz s'accorda le temps de la réflexion en mangeant un malice-réglisse après en avoir proposé un à Isidore. Cela ne lui ferait pas de mal de manger un peu de sucre, le Serpentard avait clairement besoin de retrouver des couleurs. De toute manière, autant crever l'abcès tout de suite et raconter à Isidore l'intégralité de ses paroles. Ce qui était dit était dit, il ne pourrait revenir dessus. Et Cruz avait hâte d'entendre ses explications. « Ah ça, pour sûr, c'était un florilège. T'as commencé par me dire que j'étais pas gentille avec toi et que ma soirée était naze. Après t'as un peu dévié et tu m'as expliqué que tu t'étais mis mal à cause de Savannah, mais ça j'aurais pu m'en douter. T'as essayé d'arranger un coup entre Edward et ... Zoey, je crois. La fille de quatrième année aux cheveux bouclés là. Ah et t'as aussi tenté de me faire un plan drague un peu étrange ... je crois que t'as voulu dire que j'avais de jolies jambes. » Conclut-elle d'un ton détaché. Il avait demandé la vérité, il l'avait eu. Pas de chichis entre eux, ils se connaissaient trop pour ça. « T'inquiète, je ne dirai rien à personne. Je n'suis pas ce genre de nana, » ajouta la jeune femme, « et si t'as besoin de parler, tu sais que je suis là. » Se confier, ça il pouvait oui. Par contre, qu'il ne commence pas à pleurer sur son sort : si Cruz savait être une oreille attentive, elle était bien moins douée pour exprimer de la compassion et plaindre les gens. Faire dans le social, très peu pour elle.

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« Je trouve que tes chevilles sont déjà bien enflées comme ça, madame. C’est pas parce que tu les mérites qu’il faut t’assommer de compliments non plus. Ton insigne te monte déjà à la tête, j’suis sûr ! » D'abord ses jambes l'autre soir, maintenant ses chevilles ... Le jeune homme faisait une fixette ou quoi ? Et qu'est-ce qu'il pouvait l'énerver avec son air moqueur ! Bien sûr que Cruz était fière d'avoir obtenu le poste de préfète des Serpentards, c'était presque l'accomplissement de tous les efforts qu'elle avait fourni durant ses cinq premières années à Poudlard. Elle avait pris la relève d'Aniek, son modèle : elle n'aurait pas pu espérer mieux. L'Espagnole n'était jamais avare de compliments envers elle-même, car elle avait appris très tôt qu'on n'était jamais mieux servi que par soi-même. Connaitre sa propre valeur, c'était le début de la réussite. Autant dire qu'avec cette mine renfrognée trahissant son laisser-aller, Isidore n'était pas près d'atteindre cette fameuse réussite si chère aux yeux de Cruz. Il essayait de donner l'illusion, ça on ne pouvait pas le lui reprocher. Mais la jeune femme n'était pas dupe et se doutait que derrière ses sourires en coin et ses paroles malicieuses se cachait une souffrance intérieure. Ils étaient si similaires, au fond, qu'elle avait toujours eu l'impression de le comprendre sans qu'il ait besoin de lui dire ce qu'il pensait ou ressentait. Encore heureux, en y réfléchissant, car on ne pouvait pas dire qu'Izzie soit vraiment le genre de gars à se confier, préférant esquiver grâce à ses blagues et autres taquineries. « Mademoiselle. Jusqu'à preuve du contraire, je suis encore une femme libre. Si tu me faisais un peu plus de compliments, je n'aurais pas besoin de m'en charger moi-même. » Lui répondit la demoiselle en prenant un air innocent. En réalité, elle n'avait pas besoin des compliments des autres pour avancer. Cruz ne s'excusait jamais d'être arrivée là où elle était, elle s'était construite toute seule en étant partie de rien. Elle était géniale, elle s'aimait. Bon, elle n'irait quand même pas jusqu'à se marier avec elle-même : laissons ce plaisir à Narcissa.

« Des vautours ? Je regrette presque de ne pas avoir été en assez bon état pour tester un crochet de la gauche. Enfin dans tous les cas, merci pour tout. J’ai pas tout suivi, mais je suis sûr que tu t’en es sortie comme une chef ! » Définitivement, même si Cruz n'avait pas besoin des compliments des autres pour connaître sa propre valeur, elle aimait quand même l'entendre de la bouche d'autrui. Cela expliquait l'apparition d'un joli sourire sur les lèvres de la Serpentard, qu'elle noya bien rapidement dans sa choppe de Biéraubeurre. Pas question de montrer au jeune homme qu'elle pouvait être si facilement flattée, elle avait une réputation à tenir que diable ! Une main de fer dans un gant de velours, et il n'était pas question que le fer se ramollisse. Quant à savoir s'il aurait été préférable qu'Izzie joue des poings à cette soirée ... Clairement, la réponse était non. Leur réception avait déjà été assez catastrophique comme ça, pas besoin de provoquer en plus une bagarre générale. Cruz savait qu'Isidore se débrouillait pas mal en la matière, elle avait d'ailleurs elle-même expérimenté son jeu de poings à diverses occasions. La jeune femme pouvait presque sentir à nouveau sur sa joue droite la marque qu'il lui avait lors d'une de leurs batailles. L'Espagnole espérait bien que son comparse gardait lui aussi des souvenirs de certains coups qu'elle lui avait portés. Cela semblait si loin désormais. « Je me demande ce que tu vaux, de la main gauche. Je veux bien te prêter mon poing droit, au moins là tu auras une chance de gagner ! » Lui dit-elle, l'air malicieux. Oui, elle le taquinait sur le fait qu'il n'avait plus sa main droite mais seulement une main artificielle pas vraiment fonctionnelle. Bah quoi ? On allait quand même pas en pleurer jusqu'au réveillon. « Et de rien, c'est normal ... » Ajouta la jeune femme, plus doucement. Elle savait être loyale envers ses amis, elle l'avait encore prouvé lors de cette soirée.

Le moment du debriefing des paroles d'Isidore sous alcool mit fin à ce moment de malice. Le Serpentard semblait clairement mal à l'aise en découvrant les énormités qu'il avait pu dire. Ce n'était pas étonnant : déjà qu'en temps normal il ne faisait que dire connerie sur connerie, je vous explique pas le business avec trois grammes d'alcool dans le sang ... Cruz espérait bien qu'il allait s'excuser, maintenant qu'il était mis au courant de ses débordements. « Ben déjà… j’suis désolé, déjà pour avoir dit que ta soirée était naze ! Je crois que le fait de suivre à peine ce qui s’y passait devait influer sur mon jugement. Et bon sang, je t’ai draguée… ?! Je devais être sacrément atteint. » Outch. Le malice-réglisse que Cruz venait d'avaler lui laissait un goût amer dans la bouche. Qu'est-ce qu'il insinuait là ? Qu'il fallait être dérangé pour la trouver un tant soit peu jolie ? Cette réflexion la touchait plus qu'elle ne devrait, plus que la jeune femme ne voulait l'admettre. Non mais quelle idiote elle avait été de s'imaginer qu'Izzie la trouvait jolie. C'est lui qui avait raison : si quelqu'un l'avait déjà trouvée jolie, elle ne serait plus dans ce foutu orphelinat. Abasourdie par la claque monumentale qu'elle venait de se prendre par la figure, Cruz n'entendit même pas la tentative de justification d'Isidore. A quoi bon de toute façon ? Le mal était fait. Pourtant, la jeune femme savait que son ami n'était pas très doué avec les gens en général. D'habitude, elle laissait couler car elle savait qu'il ne le faisait pas exprès. Mais là, c'était tellement spontané, tellement criant de vérité ... Il l'avait fait, il l'avait blessée. « Enfin merci de la proposition, mais je pense que t’as plus à gagner que je t’épargne ça, c’est suffisamment compliqué. » Ces dernières paroles tirèrent Cruz de ses pensées. Voilà que son interlocuteur était encore en train de se lamenter, non mais franchement ça commençait à bien faire. Elle n'avait pas souhaité le voir pour l'entendre geindre comme un gamin qui a perdu son doudou, pas plus que pour s'entendre dire qu'elle était la plus dégoutante de toutes les filles de Poudlard. « Et je me sens pas bien, et ma vie elle est trooooop compliquée en ce moment, et gnagnagna. Non mais t'as pas fini de t’apitoyer sur ton sort oui ? Ok t'as perdu ta main droite, ok c'est dur, ok c'est injuste mais si la vie était juste ça se saurait. Tu les connaissais les risques en te joignant aux combats non ? Certains sont morts, toi t'es là et tu gaspilles ton temps à te plaindre. Savannah elle est partie, c'est pas un drame et c'est certainement pas la fin du monde. Si c'est ton grand amour elle reviendra, sinon bon débarras. » Une fois que Cruz était lancée, il était impossible pour elle de s'arrêter avant d'avoir déclamé l'intégralité de ses pensées. Izzie allait passer un sale quart d'heure. « Pas étonnant que ta nouvelle main ne fonctionne pas si tu es dans le déni et que tu refuses d'accepter ce qui t'arrive. Tu la rejettes, normal qu'elle te rende la pareille. Alors cesse un peu de perdre du temps et de l'énergie à te lamenter et bouge toi, va de l'avant, repose toi un peu sur ceux qui proposent de t'aider ! Et arrête de te regarder le nombril, toute la misère du monde n'est pas sur tes épaules ! » Cruz venait de faire une belle démonstration de son impulsivité, qu'elle arrivait bien à gérer en temps normal. Mais Isidore faisait toujours ressortir son côté voyou, grande gueule, fille des rues. Tant pis s'il le prenait mal, tant pis s'il se sentait blessé, tant pis s'il décidait de ne plus lui adresser la parole. Elle aussi était blessée. « Et pour ta gouverne, sache que vu la façon dont tu m'as regardée, ou plutôt matée, j'étais loin de te laisser indifférent. Et vu la jalousie de Savannah à mon égard, ça doit pas dater de ta première cuite ! » Conclut-elle rageusement, ses yeux lançant des éclairs. Sa longue tirade lui avait rendu la gorge sèche, aussi la jeune femme but cul-sec ce qui lui restait de Biéraubeurre avant de s'enfoncer dans son siège en croisant les bras. Quel abruti.

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« Tu sais déjà que je pense tout le bien du monde de toi Cruzie. A quoi ça servirait d’en rajouter ? » C'est vrai que Cruz se savait appréciée du Serpentard. Mais pas de son ex, ça c'était certain. Même si les remarques de Savannah glissaient sur Cruz comme l'eau sur les plumes d'un Hippogriffe, la préfète ne pouvait nier que se prendre autant de méchanceté dans la figure n'était pas sans conséquences. Aussi forte et indépendante qu'était la brune, elle avait elle aussi des coups de mou. Les compliments étaient donc toujours les bienvenus, même si l'Espagnole s'entêtait à faire croire qu'elle n'en avait pas besoin. Un petit bout de femme aussi forte que fragile, bien entourée et pourtant si seule, voilà ce qu'elle était. Mais Cruz n'était pas du genre à s’apitoyer sur son sort, préférant sourire à la taquinerie de son comparse qui piochait allégrement dans le paquet de bonbons qu'il lui avait offert. Dans ces moments là, elle retrouvait le Izzie qu'elle connaissait et ça faisait du bien. « Oh, je le sais déjà ? Ah non, je n'en suis pas certaine : je crois que tu devrais me rafraîchir la mémoire ! » Lui répondit elle avec un clin d’œil. La simplicité de cette conversation contrastait avec leurs premiers échanges, il y a des années de cela. A l'époque, tout était prétexte aux engueulades et aux bagarres. Les deux jeunes gens avaient tous deux une certaine violence en eux, qui menaçait d'exploser à chaque instant. Elle n'avait pas complètement disparue, en ce qui concerne Cruz et il y avait fort à parier qu'elle ne disparaîtrait jamais complètement. L'Espagnole avait fait face à des choses qui ne pouvaient être effacée, même avec beaucoup de volonté. « Eh, on pourrait faire une super team, je suis sûr. Et y a tellement d’énergumènes dans ce château qui mériteraient bien une raclée qu’on serait d’une efficacité redoutable. » Ça, c'était bien vrai. Cruz avait en tête une liste longue comme le bras de personnes à qui elle voulait mettre son poing dans la figure : Keagan et Savannah figuraient en tête, suivis de près par Saskia, entre autres. Mais la jeune femme ne préféra pas divulguer ces noms : après tout, ça ferait mauvais genre de critiquer l'ex de son ami alors qu'il était sûrement encore très attaché à elle. Oui, être attaché à une idiote qui vous largue c'est débile. Izzie ne brillait pas toujours par son intelligence.

Comme démonstration de son incapacité à agir en société de façon normal, Izzie crû bon de dire à Cruz qu'il fallait être un peu débile pour s'intéresser à elle. Très fin, vraiment. Il n'en fallait pas plus pour mettre le feu aux poudres et réveiller l'impulsivité de la jeune femme. Aussi Cruz déballa à son ami tout le bien (hum) qu'elle pensait de lui et de son attitude depuis la rentrée. L'Espagnole n'était pas du genre à faire dans la dentelle et sa franchise était souvent mal perçue car elle ne s’embarrassait pas des convenances. Blesser la fierté des autres n'étaient pas un problème pour Cruz et elle s'était attaquée à un adversaire tout aussi redoutable qu'elle. « Je gaspille mon temps si c’est ce qui me chante. Et je t’ai rien demandé. Si t’es venue me faire la leçon, tu peux repartir sur le champ, Rosewood. J’ai besoin de personne et encore moins d’une mère de substitution. » Ah, il était loin le temps du petit surnom mignon. Cruzie avait laissé place à Rosewood, prononcé d'un ton dédaigneux. Pas de quoi faire faiblir la demoiselle en question, cependant. Celle-ci avait l'impression de se trouver face à un enfant qui faisait un caprice, voir à un ado en crise d'adolescence. La désigner comme une mère de substitution était bien trouvé, tant la différence de maturité entre les deux Serpentards était importante. L'une se servait des casseroles de son passé pour avancer, l'autre s’assommait avec. Toutefois, après coup, Cruz reconnaissait qu'elle s'était peut être enflammée un peu trop pour une malheureuse phrase maladroite. Mais elle s'était sentie blessée, il avait réussi à toucher son poing faible : son abandon, le fait qu'on ne voulait pas d'elle et qu'on n'avait jamais voulu d'elle. Izzie ne pouvait pas le savoir, bien sûr, personne à part Ashley savait que Cruz était orpheline. Mais cela n'excusait en rien les propos qu'il tenait et ce, même s'il n'avait pas de mauvaises intentions à la base. « Ça suffit, ferme-la. Arrête la psychanalyse à deux balles. J’suis content que ce début d’année se passe bien pour toi, que t’aies pu te rétablir après le bal de fin d’année, que t’aies de nouvelles responsabilités et de nouveaux objectifs, que tu sois entourée, mais… ne me parle pas de ça, Cruz. Toi non plus t’as pas vécu des trucs simples, mais ça te donne pas le droit de parler des miens. » Cruz leva les yeux au ciel. Qu'est-ce qu'il en savait de ce qu'elle avait bien pu vivre ? Lui avait-il demander de ses nouvelles durant l'été ? S'était-il un jour intéressé à ce qu'elle avait pu subir ? Même aujourd'hui, était-il venu dans l'optique de savoir comment elle allait ? Non, juste dans celle de se faire pardonner parce que c'était dans son intérêt. Cruz n'allait pas le lui reprocher, elle aurait sûrement fait pareil. Mais cela ne donnait pas le droit à Isidore de lui dire de se la fermer, ni de parler de ce qu'elle avait pu vivre. Car il ne savait pas ce que c'était de passer seize ans dans un orphelinat où des enfants de tout genre transitent : des gosses abimés par la vie et d'autres clairement dérangés. Il ne savait pas ce qui se passait dans le noir ou quand personne ne regardait, il ne savait pas qu'on ne vivait pas dans un orphelinat : on se contentait de survivre. Lui il avait le confort de sa chambre, de sa maison, de sa maman. Il ne savait rien. « Je t'interdis de parler de ce que tu crois savoir sur moi. Tu ne sais rien de ce que j'ai pu vivre, ni de ce que je vis actuellement. Et tu sais pourquoi ? Parce que tu ne penses qu'à ce qui t'arrive. Et c'est tant mieux, parce que je n'ai absolument pas envie qu'on parle de moi. J'suis pas venue pour te faire la leçon, Vayne, mais faut bien que quelqu'un te la fasse : t'as forcément besoin de quelqu'un, ça se voit. T'as rien demandé mais j'men fous : je suis ton amie, dans les bons et les mauvais moments. Même quand t'es un abruti. » Déclama la jeune femme, en prenant sur elle. Elle serait les poings pour se contenir, car elle ne voulait pas faire une nouvelle fois la démonstration de son impulsivité. Elle avait grandi, elle savait se contenir. Puis elle ne voulait pas se fâcher avec Isidore, pour la simple raison qu'elle n'était pas aussi bien entourée qu'il le pensait : en réalité, la jeune femme avait très peu de vrais amis tels que lui.

« Je ne voulais pas te mettre mal à l’aise, ou te paraître déplacé en te regardant de manière trop insistante. Et si j’ai agi comme un gros lourd avec toi ce soir-là, bah… je pense que tu méritais pas ça, c’est tout. T’es une fille bien, et tu mérites mieux que de t’occuper du souillard de la soirée. » Ah ouais, c'était donc ça qu'il avait voulu dire ? Bah bordel, il aurait dû commencer par là. Cela aurait évité à Cruz de piquer une crise et de déballer le fond de sa pensée à son camarade. Bien qu'il méritait d'entendre ses remontrances, parce qu'elle en avait marre d'avoir une loque en face d'elle. Mais quand même, le garçon avait une façon de tourner ses phrases ... C'était même étonnant que Savannah ait réussi à le supporter comme petit ami pendant deux ans. Même si pendant la moitié de ce temps elle était aux cachots, ceci explique peut-être cela. Cruz appréciait qu'Izzie lui parle sur un ton un peu plus posé, l'orage était en train de passer. Il fallait tout faire pour maintenir cette accalmie, car la moindre étincelle et tout pouvait repartir. « Oh, c'était donc ce que tu voulais dire par : faut être atteint pour s'intéresser à toi ? Drôle de manière de le dire. T'étais pas lourd et ça m'a fait plaisir de passer un moment avec toi. J'étais pas mal à l'aise. C'est juste que j'ai pas l'habitude que tu ... me regardes. » Oui, voilà, c'était le mot. Elle ne s'était jamais rendu compte qu'Isidore la regardait, peut-être parce qu'il ne l'avait pas fait jusqu'à présent et que l'alcool avait altéré sa raison. Mais cette dispute qu'elle avait eu avec Savannah, dans le couloir à la Ferme Incartable, ça ne pouvait pas être une coïncidence ... « Est-ce que… Savannah t’a dit quelque chose, à ce sujet ? » Quand on parle du loup ... N'y avait-il vraiment que sa demeurée d'ex copine qui l'intéressait ? Parce que bon, elle n'a pas grand chose pour elle la Savannah : le charisme d'une huitre, le cerveau d'une poule et la beauté d'une guenon. Un bestiaire à elle toute seule. Il était bien évident que moins Cruz la voyait, mieux elle se portait. Alors se laisser aller aux confidences, certainement pas. A la limite se tirer les cheveux ... « On ne se parle pas. Puis après le savon qu'elle m'a passé cet été en m'interdisant de venir te rendre visite à l'infirmerie, je préfère l'éviter. » Lâcha-t-elle innocemment. Bah quoi, c'était la vérité non ? Ce n'est pas parce qu'elle balançait cette information à un moment stratégique que ça devenait un mensonge.

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Le calme qui précède la tempête ... Voilà comment l'on aurait pu qualifier le début de la conversation entre les deux Serpentards. Autant être honnête, avec eux l'orage n'était jamais bien loin. Tous les deux avaient un sale caractère, dans leur genre. Cruz était au feu ce qu'Izzie était à la glace et lorsque ils étaient confrontés l'un à l'autre, difficile de savoir comment cela allait finir. Et aujourd'hui, cela semblait plutôt tendre vers le mal que vers le bien. « En effet, je ne sais rien de ce que tu as vécu, ou de ce que tu vis maintenant. Je pensais que tu serais capable de venir vers moi lorsque tu t'en sentirais prête. Alors oui, peut-être que je n'ai pas été assez là ces derniers temps, ou peut-être que j'ai loupé des choses… mais moi, j'aurais été prêt à t'écouter si t'en avais besoin, et j'aurais bien été le dernier à t'aboyer dessus ou à te juger pour ces choses que, comme si tu l'as si bien mentionné, je ne connais pas ! » Elle venait de rêver ou il avait insisté sur le "moi" ? Et c'est qu'il commençait à hausser le ton en plus. Bientôt, ils allaient faire un scandale dans l'échoppe et tout le monde allait se retourner sur eux pour ensuite en propager la rumeur dans toute l'école. C'était bien la dernière chose dont Cruz avait envie, le maintien de sa réputation était capital. Et penser à la joie de Savannah si elle apprenait que Cruz ne parlait plus à Izzie suffisait à faire passer l'envie à la jeune femme de poursuivre le conflit. L'avantage, avec le feu, c'est qu'il peut s'éteindre aussi vite qu'il s'est embrasé. Et pourtant, les propos d'Izzie étaient loin d'être apaisants, bien au contraire. Genre elle lui avait aboyé dessus ! Elle avait légèrement haussé le son de sa voix, tout au plus. Bon ... il fallait essayer de se concentrer sur le positif : il reconnaissait ne pas avoir été très présent et il lui avouait qu'il était là si elle avait besoin de parler, c'était plutôt encourageant dans le fond. La jeune femme devait apprendre à ranger son égo et sa fierté dans sa poche quand c'était nécessaire et, croyez moi, si elle le faisait c'est qu'elle tenait vraiment à la personne. « Je ne te juge pas, j'essaie de te réveiller ! J'ai l'impression que tu as perdu foi en toi depuis cet accident, que tu te sens diminué mais ce n'est pas vrai ! Je ne suis pas diplomate, je ne sais pas toujours dire les choses gentiment et de toute façon tu n'as besoin qu'on soit gentils avec toi. J'ai toujours été franche avec toi et ouais, parfois la franchise ça fait mal. J'aimerais que tu te vois comme moi je te vois. » Commença Cruz, en essayant de peser ses mots et de tourner sa langue sept fois dans sa bouche avant de parler. « Et je ne parle pas que d'aujourd'hui. On ne s'est pas beaucoup parlé depuis la rentrée, mais j'ai bien vu comment tu étais. Ce n'est pas parce que t'as perdu ta main droite ou que ... » La jeune femme hésita avant de poursuivre. « Ou que Savannah est partie que tu n'es plus qui tu étais. Elles ne te définissaient pas, alors avance. Si je te propose de te confier, c'est parce que j'ai envie de comprendre et d'être là pour toi. C'est idiot de refuser, tu sais bien que je peux être forte pour deux. » L'essentiel du message était passé et Cruz avait su employer les mots justes, du moins elle trouvait qu'elle s'en était plutôt bien sortie. Isidore la connaissait, il savait qu'elle était impulsive : aussi la préfète espérait qu'il ne lui tiendrait pas rigueur de ses propos. Surtout que c'était lui qui avait commencé en premier !

« Oh… je voulais pas du tout que tu le prennes comme ça. Ni qu'on se saute à la gorge pour ça, d'ailleurs. » Encore heureux que ce n'était pas voulu, il ne manquerait plus que ça ! Cruz ne préféra pas répondre, Isidore semblait encore en train de chercher ses mots. Pour une fois ... « Ben… entre nous, t'es très jolie. Et je me suis déjà fait taper sur les doigts pour l'avoir remarqué une ou deux fois avant ça. C'est pas de la drague ou quoi, c'est juste... comme ça. » Oh ... voilà qui changeait tout et expliquait beaucoup de choses. Il la trouvait jolie, non TRÈS jolie, même sans alcool. La jeune femme n'était donc pas si horrible que ça, c'était un premier point important. C'est qu'à force d'être repoussée, la préfète allait bien finir par perdre sa confiance en elle. Déjà qu'au fond d'elle, ce n'était pas trop ça ... Deuxième point important, il semblait qu'elle ait déjà été le sujet de disputes entre lui et Savannah. Cela expliquait l'évidente animosité de la jeune femme à l'égard de Cruz. Cette dernière retrouva le sourire qu'elle arborait avant de partir en live. Elle aimait qu'on lui dise qu'elle était jolie, quand ça venait de personnes qu'elle appréciait. C'est ce moment que choisit le serveur pour apporter les deux Bieraubeurre commandées précédemment par Isidore. Parfait, la jeune femme avait besoin de boire après ses divers monologues. Elle avala donc une gorgée avant de répondre au jeune homme, définitivement apaisée par ses propos. « Fallait le dire comme ça dès le début, ça m'aurait évité de m'enflammer ! En tout cas ... merci. Je n'ai pas l'habitude d'entendre ça. » Là encore, c'était vrai. Souvent, elle percevait la chose par des attitudes mais jamais on ne le lui disait réellement et surtout aussi simplement qu'Isidore, sans arrières pensées. « Et je savais pas que tu pensais ça. Enfin bref, désolée de m'être emportée comme ça. » Voilà, c'était sorti et ça n'avait pas été simple. Cruz n'était vraiment, mais alors vraiment, pas du genre à s'excuser. C'était pas simple pour elle qui avait un caractère si fort et une énorme fierté. Isidore pouvait se vanter d'être le témoin d'un évènement rare.

« Elle t'a… interdit ? Mais pourquoi elle aurait fait ça ? » Le jeune homme semblait vraiment surpris d'apprendre que Savannah et Cruz ne pouvaient pas se supporter. Comme si cela datait d'hier .... En même temps, connaissant Izzie, il n'y avait rien d'étonnant à ce qu'il n'ait rien remarqué. En réponse à sa question, la jeune femme se contenta de hausser les épaules, geste qui avait l'air de dire « Je ne vois pas du tout pourquoi elle ne voulait pas que je vienne te voir, c'est pas comme si j'étais le genre de filles à la provoquer en lui faisant comprendre que je me ferai une joie de ruiner son couple en m'amusant à séduire son petit ami qui me trouve canon ! Non vraiment, ça ne me ressemble pas ! Elle doit être parano. » Surtout que, pour de vrai, Savannah n'avait pas de raison valable de lui interdire les visites puisque Cruz ne savait pas encore qu'elle plaisait à Isidore et qu'elle s'était rendue à l'infirmerie avec d'honnêtes intentions. « Et moi qui pensais que prendre de mes nouvelles ne t'intéressait pas plus que ça… » Cruz rendit son sourire au Serpentard. Elle préférait vraiment ce ton léger, un peu taquin, plutôt que celui des reproches. C'est aussi pour cela qu'elle appréciait les moments passés avec son ami, tout était toujours plein de rebondissements. Elle avait parfois l'impression d'être vraiment elle, avec lui, et ça c'était plutôt rare. Surtout ces derniers temps. « Évidemment que ça ne m'intéresse pas ! J'étais juste venue dans l'espoir de trouver ton testament et d'y inscrire mon nom dessus ! » Lui dit-elle avec un clin d’œil, sur le ton de la plaisanterie. « Après, j'aurais pu enfiler mon costume d'infirmière si vraiment tu étais à l'agonie. Mais je t'avoue que les piqûres, c'est pas trop mon truc. » Par contre, planter une seringue dans le coup de Savannah à l'occasion, ça devrait être dans ses cordes. Et la capitaine de Quidditch n'était que la première d'une longue liste, où Keagan et Saskia entre autres figuraient en bonne position également.

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« Non, je n’ai pas besoin de gentillesse. Sois comme tu es d’ordinaire. » Heureusement qu'Isidore n'avait pas besoin de gentillesse, car on ne pouvait pas dire que Cruz était un modèle de bonté et de patience depuis le début de leur discussion. Après tout, la jeune femme n'était pas vraiment connue pour être gentille. Enfin, si, elle l'était. Avec Maddie par exemple, ou encore avec Matrim plus récemment. Mais que dans l'intimité, jamais en public. Puis, elle manquait tellement de tact avec les autres. Après tout, ne valait-il mieux pas dire les choses comme elles étaient plutôt que de tourner autour du chaudron pendant dix ans ? Isidore semblait d'accord avec elle, c'était assez rare pour être souligné. A dire vrai, ils étaient rarement d'accord voire même jamais d'accord sur rien. C'est pourquoi les clashs et engueulades étaient monnaies courantes avec ces deux là. L'avantage, c'est que les disputes retombaient aussi vite qu'elles étaient venues. Celle d'aujourd'hui en était la preuve. Prenant un air boudeur, comme elle savait si bien le faire, Cruz répondit à son camarade sur le même ton apaisé. « Ah ? Parce que je ne suis pas la gentillesse incarnée, d'ordinaire ? Dis tout de suite que je suis une harpie ! » Le taquina Cruz, en plongeant ses yeux sombres mais malicieux dans le regard clair de son camarade, le menton en appuie sur ses phalanges. Non, décidément elle n'arrêtera jamais de chercher la petite bête. Bah quoi, il lui avait bien dit d'être comme d'ordinaire non ? Bah le voilà servi !

« D'accord. » Quoi ? Sérieusement, il était d'accord ? Il approuvait les dire de la brune pour la deuxième fois en moins de cinq minutes. Comme quoi, les miracles devaient bien exister, finalement. A moins qu'il n'y ait anguille sous roche ... « Mais si je me confie, pourquoi t’en ferais pas autant ? Aussi forte pour deux que tu sois, y a bien un moment où tu pourras plus garder tout ça en toi, Cruz Rosewood. » Ah bah voilà, qu'est-ce que je disais ? C'était même plus une anguille sous roche mais carrément une baleine sous gravillon à ce niveau là. Non mais où voulait-il donc en venir ? La Serpentard n'avait absolument rien à confier, rien du tout. Elle était très bien dans son corps et dans sa tête, en paix avec son passé et sereine quant à son avenir. Franchement, on ne pouvait faire plus équilibrée comme jeune femme. Et puis, ce n'est pas comme si elle avait quelque chose à cacher, si ? Comme le fait qu'elle avait été abandonnée peu après sa naissance et que son enfance miteuse au milieu de gosses tous plus dérangés et pervers les uns que les autres lui restait en travers de la gorge ? Noooooon, c'était vraiment pas le genre de la maison. « Tout ça quoi ? » Lui demanda-t-elle, faisant mine d'être étonnée. Voilà, c'est ça, jouer les ravissantes idiotes ça marchait toujours. Après tout, Cruz ne savait pas vraiment de quoi il pensait être au courant ou de quoi il se doutait. Elle était bonne actrice et excellente menteuse, alors pourquoi donnait-il l'impression de savoir quelque chose ? Elle devait en avoir le cœur net, elle ne pouvait pas risquer que son secret soit possiblement menacé. « Que veux-tu savoir, Isidore Vayne ? » Poursuivit l'Espagnole en reprenant les mêmes codes que ceux employés par le jeune homme, sans jamais le quitter des yeux. Bien qu'elle ne semblait pas décidée à lui révéler ses secrets, il était bien l'une des personnes à qui elle faisait le plus confiance dans ce château. Même si c'était un boulet et un gaffeur de première. Peut-être allait-elle lui laisser une chance, peut-être pas.

« Ça va, on est quittes. Et si tu l’entends pas assez souvent, c’est que ton entourage a besoin d’une remise au point ! » Cruz esquissa un sourire en réponse à la plaisanterie d'Isidore. Ce n'était pas tant qu'elle ne l'avait jamais entendu, les gros lourdauds de l'orphelinat s'étaient toujours fait un plaisir de lui rappeler. L'art et la manière n'étaient pas là, pas plus que les bonnes intentions, mais le sens si. Néanmoins, Cruz n'avait jamais réussi à s'enlever de la tête que si sa mère n'avait pas voulu d'elle, c'était de sa faute à elle. Elle n'était sûrement pas assez jolie, pas assez intéressante, trop ceci, trop cela ... Bref, on ne voudrait jamais d'elle. Preuve en est, personne n'avait jamais adopté la petite brune. « Dans ce cas, je compte sur toi. » Lui répondit-elle doucement, avant de porter à son tour sa biéraubeurre à ses lèvres. Peu importait qu'on lui dise cent fois qu'elle était la plus jolie fille du monde, elle n'en croirait pas un mot. Mais dites lui une seule fois qu'elle n'est pas désirable et elle vous croira sur parole. Malgré les airs que Cruz essayait de se donner, elle n'était pas aussi sûre d'elle qu'elle voulait le faire croire aux autres. C'est pour cela qu'elle appréciait de se retrouver en dehors de Poudlard et de ces vautours toujours à l'affut du moindre faux-pas et de ces langues de vipères toujours prête à propager de fausses rumeurs. La compagnie d'Isidore valait bien mieux que celle des trois quarts de Poudlard, ça ne faisait pas l'ombre d'un doute aux yeux de l'Espagnole.

« T’aurais pas gagné grand chose chérie. T’aurais mieux fait d’aller rendre visite à Milo, c’est lui la poule aux oeufs d’or. » Lui dit-il en faisant un clin d'oeil pour accompagner sa boutade. C'est vrai que, niveau parents pleins aux as, Milo de Baskerville devait être le plus chanceux de l'école. Jusqu'à son rôle de l'année dernière dans la résistance, Cruz avait toujours méprisé le jeune homme. Un gosse de riches, né avec une cuillère en argent dans la bouche et dépourvu de toute qualité justifiant cette aisance sociale. Comme tous les gosses de riches. Depuis qu'il avait osé se rebeller, Cruz portait un oeil nouveau sur le préfet des Poufsouffles. Pas au point de l’idolâtrer, mais assez pour ne plus le mépriser. « Tu n'as pas tort. Si tu m'aides à cacher le cadavre, je te donnerais un petit pourcentage. » Lui confia Cruz sur le ton de la confidence, le plus sérieusement du monde, en se penchant vers Izzie comme pour lui dire un secret. Seule la lueur malicieuse qui habitait ses yeux trahissait la jeune femme. « Mais je suis quand même déçu d’avoir loupé le costume. J’étais souffrant quand même, j’avais au moins le droit aux efforts de base ! » Wait wait wait ... Attendez, on met sur pause ! Était-ce ce que Cruz croyait que c'était ? Il était en train de la draguer ? La biéraubeurre lui était déjà montée à la tête ? Ou la jeune femme se faisait-elle des idées ? Et cette façon de faire tourner son doigt sur son verre ... Non, elle ne rêvait pas. Savannah n'avait peut-être pas tort de veiller au grain, finalement. « Si tu es sage, tu auras peut-être droit à un rattrapage ... » Déclara Cruz d'un air innocent, tandis qu'un sourire prenait naissance sur ses lèvres. « Mais si cela arrive, j'espère avoir droit à une petite récompense, sinon ce n'est pas drôle ! » Termina l'Espagnole en affichant son éternelle mine boudeuse, sans que son air malicieux ne s'efface. Elle savait très bien à quel petit jeu ils étaient en train de s'adonner. Et, comme pour tout jeu, Cruz Rosewood avait bien l'intention de le gagner.

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« T’es une vraie crème, c’est de notoriété publique. » Cruz esquissa un sourire en réponse à celui d'Isidore. Elle saisissait bien l'ironie de sa réplique mais, contrairement à tout à l'heure, ne s'en formalisait pas. Cruz avait beau se donner des airs de petite fille modèle en public, la réalité était toute autre. Il n'y avait qu'à se remémorer son coup de sang, quelques minutes plus tôt, pour une simple tournure de phrase maladroite. C'était plutôt rare que l'Espagnole se laisse ainsi dominer par son impulsivité : avec le temps, la jeune femme avait réussi à canaliser cette rage qui ne demandait qu'à sortir. Mais pas avec Izzie, avec lui elle se permettait quelques écarts. Parce qu'ils étaient pareils, au fond. Il n'y avait pas besoin de mots pour le savoir : leurs bagarres des premiers temps en étaient la preuve. « Et tu n'as encore rien vu : je peux être la douceur incarnée, en privé. » Dit-elle d'un air mystérieux, en ponctuant ses paroles par un clin d'oeil. Le Serpentard pouvait interpréter cela comme il le souhaitait, le jeu n'en serait que plus distrayant. Qui plus est, Cruz pouvait effectivement être une personne adorable avec certaines personnes, à l'abri des regards. Comme avec la petite Madison, pour laquelle Cruz s'était prise d'affection. La préfète essayait de garder ce genre de faiblesses, comme elle les appelait, secret afin qu'on ne puisse pas s'en servir contre elle. L'avantage de passer pour un tyran aux yeux des autres, c'était qu'en général personne ne s'essayait à lui chercher des noises.

« Où est-ce que t’as passé les vacances d’été ? » Enfin ... presque personne, de toute évidence. Isidore se doutait de quelque chose, c'était plus qu'évident à entendre le ton insolent avec lequel il avait posé cette question. Qu'attendait-il d'elle, au juste ? Qu'elle se mette à déballer tout ce qu'elle tenait secret depuis son arrivée à Poudlard, juste parce qu'il lui payait gracieusement des Bièraubeurres ? Si la jeune femme n'avait jamais rien lâché à Shaelyn, qui pourrait pourtant obtenir le titre nationale de fouine de l'année, ce n'était certainement pas pour le faire maintenant. Et, en même temps, elle n'avait jamais eu pour coutume de mentir aux gens et à Isidore plus particulièrement. La jeune femme se contentait souvent d'éluder la question, de changer de sujet ou de ne clairement pas vouloir répondre. Mais mentir, c'était une autre histoire. Après un instant de réflexion, Cruz décida de répondre avec détermination. « A la Ferme, comme toi. Puis je suis rentrée et une copine m'a invitée chez elle. » Réponse assez précise pour ne pas éveiller les soupçons mais assez vague pour ne pas en dire trop. Tout n'était que vérité : elle était rentrée à l'Orphelinat puis Ashley l'avait invitée à passer le reste des vacances chez elle. Cruz en avait d'ailleurs bien profité, en découvrant le sens des mots « fêtes » et « soirées » à la sauce Rosenbach. Mais ceci est une autre histoire, ce qui s'était passé en soirée restait en soirée. « Mais je ne vois vraiment pas ce qu'il y a d'intéressant là-dedans ! » Conclut la Serpentard, avec un petit rire. Clairement, elle cherchait à dédramatiser le truc et à changer de sujet. Cruz n'était pas prête à tout dévoiler, pas encore. « C'est à ton tour, maintenant. Qu'est-ce qui ne va pas ? » C'était la règle : elle avait répondu à sa question, il répondait à la sienne. S'il se montrait sincère, peut-être qu'elle accepterait de se livrer davantage. Mais tout dépendait de lui et il fallait s'armer de patience pour dépasser la méfiance habituelle de Cruz.

« Compte sur toi-même. T’as pas besoin des autres pour leur montrer que t’es capable de changer le monde. » Dumbledore avait bien raison : les mots sont notre plus inépuisable source de magie. Ils peuvent à la fois infliger des blessures et y porter remède. Après avoir blessé Cruz au plus profond d'elle-même, Isidore venait de lui soigner ses plaies. C'était cela, qu'elle avait besoin d'entendre. Juste une fois, juste de la bouche d'une personne, pour la conforter dans ses objectifs. L'Orpheline n'avait toujours compté que sur elle-même, elle n'avait pas vraiment eu le choix d'ailleurs. Même si elle s'entêtait à prouver à quiconque que rien n'était mieux que d'être maître de son destin, cela faisait du bien parfois de savoir que quelqu'un d'autre était du même avis qu'elle. Une lueur de fierté s'alluma dans ses yeux sombres. « C'est vrai. Tu verras, un jour je mettrai le monde à mes pieds. » Oui, un jour elle prendrait sa revanche sur tous ceux qui l'avaient condamnée à rester une moins que rien. A commencer par ses parents biologiques et la directrice de l'Orphelinat. Ce n'était pas de l'arrogance, même si l'Espagnole avait toujours été fière. C'était un désir de vengeance, de casser les codes, de montrer qu'elle pouvait devenir quelqu'un d'important. La foi qu'un jour, le nom de Cruz Rosewood signifierait quelque chose pour elle et pour les autres. « Et toi aussi, tu le feras. On leur montrera de quoi on est capable. » Rien que d'y penser, Cruz en avait des étoiles plein les yeux. C'était son rêve le plus cher, prendre sa revanche sur cette vie misérable. Izzie et elle étaient de la même trempe, c'était une évidence. Leurs chemins se sépareraient peut-être mais ils feraient des grandes choses. Le Serpentard n'en avait sûrement pas conscience, surtout en cette période, mais Cruz y croyait pour deux. Et elle n'avait pas l'habitude de se tromper.

« Marché conclu, j’ai toujours eu envie de me lancer dans le business. Ça te va si notre prochaine cible c’est ta copine Breckenridge ? » Répondit le jeune homme à la plaisanterie de sa camarade, en lui tendant une main pour sceller leur pacte fictif. Cruz n'était pas naïve, pas plus que sotte, elle saisissait fort bien le sous entendu qui se cachait dans cette proposition. C'était presque un reproche, à peine voilé. La Serpentard pouvait aisément le comprendre : Narcissa avait vraiment dépassé les bornes lors de leur premier cours de Sortilèges, quand elle s'était moqué d'Izzie et de la perte de sa main. Cruz lui en voulait beaucoup d'ailleurs, elle détestait qu'on s'en prenne à ses amis proches. Surtout de cette manière. Aussi, la jeune femme fronça les sourcils en serrant la main que lui tendait son camarade. « Vayne & Rosewood, le duo qui valait un million. Ce n'est pas parce que je traîne avec elle que je cautionne tout ce qu'elle fait. Encore moins tout ce qu'elle dit. » Lui dit-elle en plantant son regard dans le sien. Cruz savait quel intérêt il y avait à être copine avec Narcissa et, qui plus est, c'était une fille intéressante à écouter. Un peu trop centrée sur elle-même, certes, mais cela n'indisposait que ceux qui avaient un problème de confiance en eux. Ce n'était pas le cas de Cruz, du moins pas en apparence. S'il fallait choisir entre Cissy et Izzie, Cruz choisirait le Serpentard sans hésiter. Elle espérait que ce dernier en était conscient. « J’espère que tu te satisfais de peu niveau récompense, j’ai plus grand chose à offrir. » Le petit jeu de séduction qui avait commencé à se mettre en place entre les deux Serpentards prenait fin, à cause du cruel regard qu'Isidore portait sur lui-même. Était-ce possible d'accorder aussi peu d'importance à sa propre existence ? Tout ça parce que sa copine l'avait quitté et qu'il avait perdu une main. Bon ok, perdre une main c'est grave, mais quand même. Il était toujours le même gars et le regard que Cruz portait sur lui n'avait pas changé. Et, à moins d'une faute grave et impardonnable, il ne changerait jamais. « Ne t'inquiète pas pour moi, j'ai l'habitude de me contenter de peu. Un moment en ta compagnie, c'est déjà génial. » Lui dit-elle, le plus sérieusement du monde. Car elle le pensait sincèrement, elle passait un agréable après-midi avec lui. Puis, elle reprit, plus malicieusement. « Donc un moment en ta compagnie alors que tu enlèves un par un tes vêtements, ça doit être le top. » Nouveau clin d'oeil, suivi d'un nouvel éclat de rire. L'image d'un Isidore en sous-vêtement, essayant maladroitement de tourner autour d'une barre de pole-danse, lui était naturellement venue en tête. Ce n'était pas désagréable à regarder, d'ailleurs.

I just keep crashing Living on my rations The bullets and the roses Devil and the poses Don't know where my ghost is Don't know where my home is Guess we never chose this I'm in the sea with Moses Looking for my roses I guess it's never hopeless The bullets and the passion Devils and the poises This has never happened Nothing ever happens Rob from always on the run dot net is so bad and copy paste is a sin
Nothing ever happens

Comment en étaient-ils venus à parler aussi sérieusement ? L'instant d'avant, ils se taquinaient simplement et notamment sur l'impulsivité dévastatrice de Cruz. La jeune femme aurait préféré continuer sur ce sujet, bien moins risqué pour elle et son secret. Mais non, la conversation avait dévié sur un sujet beaucoup plus délicat. Où la demoiselle Rosewood avait-elle passé ses vacances d'été ? Une question anodine, banale en apparence. La plupart des élèves de Poudlard aurait répondu sans problème : ils auraient dit qu'ils avaient passé du temps avec leur famille afin de se remettre de cette douloureuse année. Mais ce n'était pas le cas de Cruz. La Serpentarde avait dû panser ses plaies seules, se guérir par elle-même. Elle en avait l'habitude, cela ne la faisait plus souffrir d'être seule. Par contre, la jeune femme n'aurait pour rien au monde voulu que son secret s'ébruite. C'était une partie de sa vie qu'elle avait toujours gardé pour elle et ce, depuis son arrivée à Poudlard. Certes, elle était plutôt proche d'Izzie et elle sentait qu'il avait lui aussi un passé compliqué derrière lui, mais cela ne suffisait pas à la mettre totalement en confiance. Le Serpentard faisait tellement de gaffes ... Et il était proche de Savannah : Cruz aurait préféré mourir que de savoir que cette dernière était au courant de quelque chose. Prudente, l'Espagnole répondit donc à Isidore sans rentrer dans les détails. Elle avait passé ses deux semaines de vacances chez une amie, point final. Elle était quasiment certaine de ne pas avoir été assez convaincante : elle était restée trop vague pour ne pas éveiller les soupçons. Isidore était un garçon intelligent, il allait forcément se douter de quelque chose. C'était le prix à payer pour ne pas avoir voulu lui mentir, Cruz en était consciente. « Tu t’es bien amusée ? » Se contenta de lui demander le Serpentard. Il n'avait pas cherché à creuser davantage sous cette réponse un peu trop simple et la jeune femme lui en était reconnaissante. Elle n'aurait aimé se sentir contrainte de déballer certaines choses. Izzie était certainement l'une des personnes les plus susceptible d'appendre un jour la vérité sur le passé de Cruz. Mais, pour cela, il fallait qu'il se montre patient. Vivre avec cette solitude était devenu banal pour l'Espagnole : le formuler à haute voir, ce n'était pas la même histoire. « Oui, c'était sympa. Ça m'a changé les idées. » Répondit Cruz, simplement. Inutile de rentrer dans les détails en parlant des soirées alcoolisées qu'elle avait fait avec Ashley. Cela ne ressemblait tellement pas à la Cruz de Poudlard, ce genre d'attitude. C'était une partie plus sombre de la jeune femme qui s'était exprimée durant ce séjour, une partie qu'elle dissimulait aux autres de peur que cela lui porte préjudice. Mais il fallait bien exprimer cette noirceur de temps en temps : voilà à quoi lui servait les vacances d'été.

« J’ai pas de projet. J’veux dire, j’ai aucune idée de ce que je vais faire de ma vie. C'est ça le bilan, il me reste deux ans à tirer ici, et je sais pas où ça me mènera. Je crois que je préfère ne même pas le savoir. » Cruz resta interdite, en entendant ces paroles. La jeune femme n'avait jamais eu de problème pour trouver sa voie : depuis toujours, elle savait qu'elle voulait devenir quelqu'un d'important. Une femme qui imposait le respect et l'admiration, la crainte aussi. Depuis deux ans, la Serpentard était quasiment certaine de s'orienter dans le domaine de la Justice Magique à sa sortie de Poudlard. Elle s'imaginait bien avocate, dans un premier temps. Elle trouvait que c'était un métier qui réunissait toutes les qualités qu'elle recherchait, en plus de convenir parfaitement aux talents qu'elle possédait déjà. Mais, comme l'avait si justement souligné Izzie, il leur restait deux ans à tirer avant de vraiment devoir s'orienter. Tout avait encore le temps de changer, qui sait par quels événements ils seront passés d'ici là ? « Moi, je pense que nous existons tous pour une bonne raison. Tu as ta place dans ce monde, elle n'est peut-être juste pas encore visible. Mais ça viendra. Tu n'es pas de ceux qui se contentent des miettes. » Lui répondit Cruz. Ce n'était pas des paroles en l'air ni le genre de mots bidons qu'on prononce pour réconforter tant bien que mal quelqu'un. La jeune femme pensait réellement ce qu'elle venait de dire. Isidore était comme elle, c'était une certitude. Il voulait sa revanche sur la vie et il l'aurait, cela ne pouvait se passer autrement. Le Serpentard pouvait penser le contraire, estimer qu'il ne valait plus rien à cause de son amputation, se dévaloriser autant qu'il le voulait ... Cela ne changeait rien, pour Cruz. Elle aurait tellement aimé qu'il puisse se voir avec ses yeux à elle. Avec ou sans sa main droite, pour l'Espagnole il restait le même. Si son regard évoluait en fonction des casseroles que traînaient les gens, Cruz n'aurait aucune estime pour elle-même. Et ce n'était pas le cas, elle savait voir au delà de tout ça.

« Il vaut mieux, sans quoi je te reconnaîtrais pas. Tu vaux quand même mieux que ça, Cruzie. Enfin… j’vais pas te faire la morale, t’es assez grande pour traîner avec qui tu veux, mais les Narcissa de ce monde te tireront pas vers le haut, ça c’est sûr. » Cruz but une gorgée de Biéraubeurre. Le voilà, le fameux retour de bâton. L'Espagnole l'avait bien mérité, après ses remontrances de tout à l'heure. Elle n'était pas sûre de valoir mieux que Narcissa et les autres filles du Club, mais elle se savait différente. La personne dont elle se sentait le plus proche était sans conteste Casey, les autres n'étaient pas comme elles. Cruz n'aimait pas se moquer ouvertement de tout le monde comme Narcissa, elle n'était pas aussi peste. Mais, pour avoir lu ses confidences épistolaires, la Serpentard savait que la blonde n'était pas aussi détestable qu'elle voulait le faire croire. Il y avait autre chose derrière tout ça, c'était une évidence. Voilà pourquoi la jeune femme s'était rapprochée de Narcissa, entre autres raisons. Puis, il y avait cette passion commune pour la mode ... Les filles voulaient habiller Cruz avec leurs créations, c'était un si grand honneur et une telle reconnaissance ... Isidore ne pouvait pas comprendre bien sûr, mais l'Espagnole y trouvait son compte même si elle désapprouvait parfois (même souvent) le comportement de sa camarade. « Je sais faire la différence entre des copines et des ami(e)s. Narcissa donne l'air d'être une vraie connasse, je te l'accorde. Mais toi et moi savons que les apparences ne sont pas toujours la réalité. Ne t'inquiète pas pour moi, je sais ce que je fais. Et si elle me demande de choisir entre elle et toi, je n'aurai aucun mal à la virer de ma vie. » La sensation d'appartenir à un groupe, d'avoir une place bien définie ... Voilà ce qui avait attiré Cruz dans l'idée du Club. Quant à Narcissa, c'est vrai que leur rapprochement était récent. Ce n'était pas une amie et peut-être que cela ne le deviendrait jamais : Cruz ne bafouerait pas ses valeurs, pas même pour une place au soleil. Mais, pour l'instant, elle y trouvait son compte. A voir ce que cela allait donner sur la durée ...

« C’est beaucoup pour moi aussi. Dommage qu’on soit rattrapés par le couvre-feu. » Cruz sourit, avant de tourner la tête vers la fenêtre. La jeune femme n'avait vraiment pas vu le temps passer. Combien de temps étaient-ils restés là, assis à cette table, à refaire le monde ? Une bonne partie de l'après-midi, c'était certain. Cela avait manqué à Cruz, ce genre de discussions. Elle avait l'impression que ce n'était pas arrivé depuis une éternité. Leur amitié n'impliquait pas forcément de se voir ou de se parler tous les jours pour rester intacte, mais force est de constater que leurs discussions mettaient du baume au cœur de l'Espagnole. Elle aimait entendre ses taquineries, ses encouragements et même se prendre la tête avec lui. Parce que c'était une relation qu'elle n'avait avec personne d'autre dans ce château. Isidore était unique à ses yeux, pour toutes ces raisons, et elle osait espérer qu'il pensait la même chose d'elle. Même si elle était très certainement l'une des filles les plus chiantes de Poudlard. « Mince, c'est vrai qu'il est déjà tard ! Les troisièmes années doivent déjà être en train de m'attendre ! Si j'en paume un, Burgess va m'arracher les dents une à une ! » Dit-elle en riant, en finissant sa chope de Bièraubeurre. Elle allait devoir partir et mettre fin à ce moment privilégié avec son ami, rattrapée par ses obligations de préfète. Elle repartait de ce rendez-vous requinquée, gonflée à bloc pour entamer la semaine d'enfer qui se profilait devant elle. Entre les cours, les devoirs, son rôle de préfet et les réunions du Club, Cruz avait à peine le temps de souffler. Cette parenthèse avait donc été la bienvenue, d'autant plus qu'elle lui avait permis d'éclaircir le comportement d'Izzie à la soirée des Serpentards. « Tu sais bien que je peux plus faire ça tout seul, trésor. Je vais forcément avoir besoin d’un coup de main. » Prononça Isidore, alors que Cruz était en train de rassembler ses affaires. La jeune femme se figea quelques instants avant de tourner la tête vers son ami. Était-ce la Biéraubeurre qui lui était monté à la tête ou une ultime provocation de sa part ? Ou rien de tout cela ? Car quand même, ce n'était pas des paroles anodines. Cela dépassait tout ce qu'ils avaient pu se dire auparavant, ils n'étaient jamais allé aussi loin. D'ailleurs, depuis quand ils se draguaient comme ça, au juste ? Était-ce sincère ou juste un jeu ? Cruz, qui pensait avoir tout mis à plat, se retrouvait à nouveau dans le doute. Mais le temps jouait contre elle, aussi la jeune femme attrapa sa veste et l'enfila avant de se lever, son sac à la main. « La préfète consciencieuse que je suis se fera une joie de t'aider dans cette tâche. Merci pour les Biéraubeurres et pour les bonbons, j'ai passé un chouette moment. » Cruz se dirigea vers Isidore et lui fit un bisou sur la joue en guise d'au revoir. « On se voit au château. » Dit-elle en se dirigeant vers la porte des Trois Balais, le sourire aux lèvres. Le froid qui régnait dehors contrastait avec la chaleur du bar et des échanges qu'elle avait eu avec Isidore. Cruz avait hâte de rejoindre les troisièmes années pour pouvoir rentrer au chaud à l'intérieur du château. L'automne laissait progressivement place à l'hiver, la neige n'allait certainement pas tarder à faire son apparition.