Dmitri s’étira longuement à la manière d’un chat, laissant ses muscles un peu fourbus et crispés à cause de l’entraînement se détendre et savourant ce plaisir toujours immense qu’il ressentait chaque fois que son pied touchait le sol. Les mois ne lui rendaient pas le quidditch plus appréciable : il trouvait toujours se sport aussi ridicule et les règles aussi absurdes qu’avant. Son esprit d’équipe ne s’était d’ailleurs pas beaucoup développé... mais après tout, à présent qu’il était batteur, il n’en avait plus réellement besoin, si ? Tant qu’il protégeait ses coéquipiers – surtout leur attrapeur Silas – et qu’il faisait tomber les adversaires de leur balai, il n’avait pas trop à se préoccuper de bien s’entendre avec les autres. S’il restait dans l’équipe, c’était simplement par égo... et parce qu’il s’agissait d’un bon défouloir, lequel devenait très important ces derniers temps. Chaque coup de batte dans le cognard semblait être une façon d’expulser un peu de sa colère latente. Ces temps-ci, il s’imaginait frapper en plein milieu du visage de Kryštof, ce qui était l’une des meilleurs motivations qu’il ait pu se trouver jusqu’à présent. L’entraînement s’était donc relativement bien passé pour lui, quand bien même la petite équipe avait-elle dû rester un peu plus longtemps pour finir et compenser leur faible nombre de rencontres ; ils n’avaient à vrai dire pas souvent l’occasion de se retrouver sur le terrain, trop occupés qu’ils étaient tous par d’autres affaires. Le temps de ranger les équipements, et voilà qu’ils quittaient le terrain plus tard que ce qu’il avait escompté. Sac sur le dos et balai sous le bras, le Tchèque emboîta le pas de ses coéquipiers, le pas légèrement traînant pour les laisser prendre de l’avance, lorsqu’une autre silhouette se détacha de l’ombre du château pour approcher de lui. Senna laissa le reste des joueurs passer devant elle en l’ignorant avant de l’alpaguer.

- Bonjour Senna, lui répondit-il machinalement.

Chez la serdaigle d’un an sa cadette se distinguait déjà quelques traits qui n’étaient pas sans rappeler sa botaniste de mère, mais elle arborait un sourire infiniment plus jovial que celui de l’enseignante. Dmitri et elle n’étaient pas tout à fait ce que l’on pourrait appeler d’« amis », mais elle entrait suffisamment dans ses bonnes grâces pour qu’il daigne ralentir le pas et s’arrêter à son niveau. Étrangère à l’accent chantant de la France et fille de professeur, Senna n’avait pu qu’attirer son attention ; Kenneth Appleton mis à part, le Tchèque portait pour les rares enfants liés par le sang à des membres du personnel une forme de solidarité un peu grégaire. Lorsqu’il était arrivé à Poudlard, il avait bien vite compris que son affiliation avec le maître des potions n’allait pas passer inaperçue : certains s’étaient dès lors méfiés de lui, d’autres avaient pu s’en moquer, quoique rarement ouvertement de peur de s’attirer le courroux du vieux van Aken. Mais il avait bien eu quelques railleries ou questions goguenarde, et ce croâsseur qui avait appelé à le pousser dans le lac noir... c’était donc tout naturellement qu’il s’était montré avenant à l’égard de la nouvelle venue, lorsqu’elle avait foulé le sol de la salle commune de leur maison pour la première fois, l’année dernière. Depuis le décès d’Alexander, il lui semblait que l’adolescente se montrait toujours un peu plus présente dans son environnement, posant sur lui un regard de compassion qui aurait pu l’irriter s’il n’y avait pas décelé quelque chose d’autre, et à plusieurs reprises, elle avait couvert ses arrières, lui évitant quelques déboires supplémentaires avec des adultes. C’est ainsi qu’il avait commencé à se dire que l’attitude de Senna pouvait lui être utile ; Dmitri n’était pas innocent en tout point et en bon chapeauflou qui aurait pu tout autant aller à serpentard, il avait rapidement vu tous les avantages que pouvaient lui accorder l’amitié d’une fille comme la petite Clerc-Griffith.

Pour faire bonne mesure, il répondit à sa présence par un sourire, avant de lever un sourcil étonné en l’entendant parler. Une fois n’était pas coutume, il n’avait guère fait quelque chose qui puisse attirer l’attention d’un quelconque professeur. Certes, Silas et lui mijotaient quelque chose – au sens littéral comme au figuré d’ailleurs – mais de cela, il en était certain : nul adulte de l’école n’avait de raison de voir venir les ennuis. Il devait sûrement s’agir d’un peu de zèle de l’un d’eux qui, s’imaginant que les élèves préparaient toujours un mauvais coup lorsqu’ils devenaient calmes – ce qui n’étaient peut-être pas tout à fait faux.

- C’est gentil de me prévenir, commença-t-il avant d’hausser les épaules d’un air dédaigneux. « Mais je crains qu’ils ne soient paranoïaques, je ne prépare rien de particulier. »

Un sourire fendit ses lèvres alors qu’il ajoutait :

- Ils n’ont qu’à demander à Bevans, j’ai passé tellement de temps avec lui ces dernières semaines que même si je le voulais, je n’aurais pas eu l’occasion de fomenter quoi que ce soit.

C’était assez vrai : entendre de la musique résonner entre les murs du cachot le fatiguait relativement vite et lorsqu’il rentrait d’une retenue, il était souvent vidé de son énergie, peut-être même presque plus qu’à la fin d’un entraînement de quidditch.

- Tu es venue jusqu’ici pour me prévenir ? demanda-t-il finalement, avant de poser son regard sur les gants de vol qu’elle tenait du bout des doigts. « Si tu voulais assister à notre entraînement, tu l’as raté, on vient de terminer. »

Ses coéquipiers avaient poursuivi leur route sans l’attendre, disparaissant au loin et ne laissant plus que Senna et lui à proximité du terrain.

Dmitri cala son balai sur son l’épaule, prenant une posture décontractée qui laissait voir qu’il avait tout son temps, ou presque. Il n’était pas vraiment pressé de remonter jusqu’à son dortoir de toute façon. L’attitude de Senna l’amusait, quelque part : il ne s’inquiétait pas particulièrement de ce que les professeurs pouvaient bien penser ou s’attendre de sa part, mais elle l’avait couvert à quelques reprises et il n’était pas tout à fait désagréable de se dire qu’il y avait quelqu’un qui pouvait l’aider à se tirer de mauvais pas. Elle, mieux que quiconque, était parfaite pour ce rôle : qui se méfierait de la parole d’une gentille élève de troisième année, fille de professeure, et qui n’avait rien à se reprocher ? Il ne feignait pas sa sympathie à son égard, bien entendue : il s’était rapproché d’elle après la mort de son aïeul, sa présence ayant un quelque chose de plus agréable qu’avec bien d’autres de leurs camarades, et il la trouvait plutôt attendrissante dans son désir manifeste de se démarquer de sa mère. C’était assez compréhensible, surtout pour lui qui avait grandi dans une famille trop grande et qui avait toujours été en quête d’une façon de se démarquer des autres.

Il se fendit d’un sourire, prenant la mise en garde avec détachement : depuis le temps, il avait appris à ne pas se préoccuper de ce qui pouvait intéresser les professeurs. Qu’ils le surveillent s’ils le désirent, les adultes avaient toujours un train de retard. Il avait l’habitude de toute façon.

- Moi ? fit-il en prenant un air faussement scandalisé. « Mais voyons, je suis l’innocence incarnée, jamais je ne ferais quelque chose qui aille à l’encontre du règlement. »

Senna était bien placée pour savoir combien cette affirmation était aussi éloignée de la vérité que s’il déclarait que la professeure Griffith était douce et gentille. Il aimait jouer de cette fausse innocence qui allait si bien sur son visage d’adolescent encore un peu juvénile, bien coiffé et toujours tiré à quatre épingles – quoiqu’avec l’entraînement de quidditch, sa chevelure était un peu moins impeccable qu’en temps ordinaire.

Portant son regard sur les gants que sa camarade tenait, il regarda son visage se colorer d’une certaine gêne, non sans amusement. Sa présence n’était donc pas si innocente que ça ; elle sembla hésiter, balbutiant quelques mots avant de finalement avouer d’un air presque coupable les raisons de sa présence si près du terrain de quidditch.

- Tu aimes voler ? Il fronça des sourcils. « Tu n’as pas tenté les sélections, si ? Tu sais que l’équipe cherche encore une poursuiveuse ? »

Il n’était pas vraiment le plus grand défenseur de la cause serdaigle pour le quidditch et en temps normal, il se moquait de la compétition comme de son premier dessin, mais à trop affronter les autres équipes en sous-effectif, et sous-entrainés, il commençait sérieusement à s’en lasser. Mauvais perdant ? Un peu. Perdre parce qu’ils n’avaient que deux poursuiveurs, tous deux amateurs d’ailleurs, et une équipe qui s’était constituée à la dernière minute, sans concertation ni plan de bataille l’avait beaucoup irrité lors de leur tout premier match : pire à l’époque, ils n’étaient que trois sur le terrain, sans batteur !

Peut-être Senna ne tenait-elle pas droit sur son balai... mais si elle se débrouillait suffisamment bien pour décoller et voler un peu, il pouvait peut-être l’inciter à rejoindre l’équipe. Il ne doutait pas qu’Aisling accepte facilement l’arrivée d’une coéquipière et dans le pire des cas, si la troisième année se montrait mauvaise, au moins pourrait-elle servir de distraction aux poursuiveurs et au batteur adversaires pendant que les autres marquaient des buts.

L’innocence incarnée, plus grand monde n’y croyait désormais. Sa réputation était émaillée de tant d’histoires que son allure d’enfant à qui l’on donnerait le bon Dieu sans confession ne trompait guère. Peut-être pouvait-elle encore jouer sur les nouveaux enseignants qui avaient le malheur de ne pas lire les dossiers scolaires avant d’affronter leurs élèves, mais ça ne durait guère et pour peux qu’ils discutent entre eux, il ne doutait pas que son nom devait être soufflé dans la liste de ceux dont il fallait se méfier. Quelque part, c’en était un fierté : il aimait l’idée que tous savaient qui il était. De sa première à sa quatrième année, il avait été tant vu, tant remarqué par ses écarts de conduite qu’aucun élève de Poudlard ne pouvait prétendre ne jamais avoir assisté à l’une de ses punitions publiques.  

- Moi, préfet ? Diantre, je n’espère pas ! s’exclama-t-il le plus honnêtement du monde. « Mais tu serais surprise de savoir qui ils nomment parfois. L’ancien préfet de poufsouffle était un guignol fêtard et cancre, il n’avait rien de l’image que tu te fais du rôle. »

Et il n’avait pas été le seul... malgré tout, Maxwell Carter était sûrement l’exemple le plus emblématique de la défaillance professorale quant au choix de ceux qui incarnaient cette fausse autorité ridicule à laquelle de toute façon plus personne ne croyait.

Le visage de Senna s’était peu à peu coloré d’une légère gêne, comme une enfant prise la main dans le sac et peut-être était-ce véritablement le cas, d’ailleurs. Le sujet du vol semblait éveiller en elle des émotions contradictoires, une sorte de plaisir coupable qui l’animait mais qu’elle n’osait pas assumer devant les autres, encore moins devant un des joueurs de l’équipe de sa maison. Dmitri opina sobrement du chef, notant cette petite information dans un coin de sa tête. Mieux connaître l’adolescente lui serait sûrement utile, un jour ou l’autre : s’il n’en parlait pas, il n’oubliait pas qu’elle était la fille de la professeure de botanique, et ce faisant il pouvait avoir besoin d’elle à l’avenir.

De l’équipe, il se préoccupait finalement assez peu, sinon d’avoir de quoi tenir bon pendant les matchs, mais s’il pouvait tirer un bénéfice en incitant la troisième année à tenter de les rejoindre, il n’allait pas s’en priver ; ça n’était pas comme s’ils avaient trop de joueurs, après tout, il rendrait un service à ses coéquipiers en invitent une autre personne à les rejoindre à l’entraînement.

- Dommage, oui... avec un autre poursuiveur, on pouvait espérer gagner notre dernier match et dépasser poufsouffle dans le classement, mais j’imagine qu’on va devoir laisser ta mère jubiler sur la seule victoire qu’elle peut obtenir cette saison.

C’était un pari risqué qu’il prenait là, mais jusqu’à présent, Senna ne semblait pas porter une attention toute particulière à sa génitrice. Il avait même l’impression qu’elle faisait tout pour éviter que l’on parle d’elle, ce qu’il comprenait parfaitement ; mais ne faisait-il pas une projection de ses propres habitudes avec son défunt oncle ? Il s’était toujours débrouillé pour que le sujet de son aïeul ne soit pas trop souvent évoqué, étant assez tatillon sur la question et il était aisé de croire que tout élève ayant un parent plus ou moins proche à Poudlard préférait ne pas trop souligner son lien pour ne pas obtenir une attention néfaste.

- Même si je pense que tu devrais te laisser une chance. Souriant de toutes ses dents, il ajouta : « Ça ne coûte rien de participer à un entraînement, pour essayer, non ? »

S’il parvenait à trouver ne serait-ce qu’un peu de motivation pour y aller chaque fois, n’importe qui pouvait venir : elle, elle aimait le quidditch, contrairement à lui, après tout.

- Et Aisling serait sûrement contente de ne pas être la seule fille de l’équipe.

Entre Silas et Dmitri, la pauvre n’avait pas écopé des coéquipiers les plus doux et sympathiques de l’école.

Dmitri était plus que conscient de ce qui pouvait animer les pensées d’une élève qui voyait chaque jour à table et en cours un parent, qui subissait son regard et sa présence. Il l’avait vécu, sûrement très différemment de Senna, mais il partageait un peu de cette difficulté – car malgré tout ce que l’on pouvait penser, ça n’était pas toujours une bénédiction que d’être constamment sous le regard de son tuteur. Alors quand il fallait amener sa camarade vers un sujet qui l’intéressait, l’inciter à changer sa position, il savait quel levier tirer. Ou à tout le moins, il savait par où commencer. La réaction de sa cadette ne se fit d’ailleurs pas attendre : il avait touché un point sensible visiblement, attisant un peu de ce qui ressemblait à de la colère. Elle dénigra les poufsouffles sans vergogne, ce que le Tchèque ne pouvait pas vraiment lui reprocher. Mis à part Teddy, qu’il appréciait, il avait à l’écart des membres de leur équipe de quidditch au mieux de l’indifférence, au pire du mépris teinté de haine. Quant à leur directrice – la mère de son interlocutrice – il n’avait pour elle guère d’affection mais au moins pouvait-il se douter que c’était assez réciproque.

- Justement, ce serait un peu la honte si on était derrière eux, tu ne trouves pas ? répondit-il non sans qu’un sourire malicieux ne se dessine sur ses lèvres.

Nul besoin de fournir le moindre effort pour s’en convaincre ou pour manipuler qui que ce soit : il le prendrait effectivement très mal s’ils étaient derrière ce crétin d’Appleton, qui aurait tôt fait de se moquer de l’équipe de serdaigle alors même qu’il était un attrapeur catastrophique. Perdre contre d’autres, il pouvait le supporter... mais pas contre lui !

Pas si simple à convaincre, Senna continua sur sa lancée, lançant quelques fleurs à l’équipe en sous-nombre – comme si cela pouvait y changer quelque chose – avant de rappeler combien cela lui coûtait que de jouer avec eux. L’aiglon fronça les sourcils, quelques instants. Si lui, qui détestait amèrement le quidditch, parvenait à fouler le sol du terrain suffisamment souvent pour s’entraîner, comme une adolescente qui aimait manifestement voler et appréciait ce sport pouvait dénigrer ainsi la possibilité de jouer ? Dans les autres maisons, il y avait plus de concurrence pour intégrer la sélection et nombreux étaient les élèves qui auraient rêvé de pouvoir s’accorder une telle chance de rejoindre leur équipe comme la troisième année. L’explication ne tarda pas à venir, trahissant un sentiment que, bien qu’il ne le partageât pas, Dmitri pouvait parfaitement comprendre. Le besoin de se différencier, de se distinguer de ce parent si visible était grand, primordial même pour des gens de leurs âges qui cherchaient encore à se construire. Les frasques même du Tchèque avaient été pour lui un moyen de sortir du lot, d’être unique parmi tous ces van Aken qui dardaient leurs ombres sur lui.

- Je vois... commença-t-il en haussant des épaules, l’air de capituler face à cet argument. « J’imagine qu’à ta place, j’aurais sûrement pensé la même chose. »

Il savait qu’Alexander avait été, en son temps, membre d’une équipe de quidditch. Un portrait du manoir le lui avait raconté, mentionnant qu’il avait été batteur de serpentard durant son passage à Poudlard. Mais à vrai dire, il avait toujours eu du mal à l’imaginer voler sur un balai, une batte à la main et ce encore plus depuis un rêve, plutôt comique il devait le reconnaître, où son grand-oncle était subitement devenu professeur de vol... à ceci près qu’à la place d’un balai, il s’agissait de sa canne qu’il utilisait pour la discipline.

- C’est dommage, cela dit. Je suis certain que tu pourrais devenir tellement plus forte que ta mère. Il se fendit d’un sourire angélique : « Ça lui ferait tout drôle si sa propre fille éclipsait sa réputation, tu ne crois pas ? »

Son regard s’attarda quelques secondes sur le terrain, au loin, avant de revenir sur l’adolescente.

- Surtout en jouant dans une équipe adverse. Ce n’est pas comme si tu étais à poufsouffle.

Était-ce vraiment si important de convaincre la petite Griffith de venir s’essayer à un entraînement avec l’équipe pour combler le vide dans leurs effectifs ? À vrai dire, ça ne l’était pas tant que ça et Dmitri n’avait pas assez d’attrait pour le quidditch pour se jeter corps et âme dans une négociation animée. Pour autant, il avait un reste de cet égo qui le poussait à vouloir mettre toutes les chances de leurs côtés, à vouloir diminuer les obstacles qui se tenaient entre eux et non la victoire mais l’absence d’humiliation trop cuisante. Cela était d’autant plus fort qu’avec l’arrivée de Kryštof à Poudlard, le Tchèque commençait retrouvait l’une de ses toutes premières – sinon la seule – motivation pour intégrer l’équipe de serdaigle : montrer qu’il était capable et doué dans ce sport qui, lorsqu’il était enfant, ne lui avait guère été appréciable. Jouer avec ses frères n’avait jamais été une partie de plaisir et il avait une revanche à prendre qui devenait d’autant plus flagrante à présent qu’il y avait justement l’un de ses tous premiers adversaires pour l’observer. S’il devait convaincre Senna pour ça, soit, il le ferait. Ce ne devait pas être bien compliqué, après tout : il fallait trouver quelques leviers sur lesquels tirer, animer un peu de ce qui titillait son égo et sa motivation. Enfant d’un professeur, comme lui quelque part, il pouvait facilement comprendre ce qui se cachait dans sa caboche.

Le sujet de poufsouffle sembla éveiller un peu de sa combativité. Ainsi donc, elle aimait critiquer cette maison que dirigeait la botaniste : argument aisé, d’autant plus pour Dmitri qui nourrissait une aversion toute particulière pour l’attrapeur de leur équipe. Ça n’était toutefois pas suffisant. Un début prometteur, tout au plus. Mais l’idée gagnait malgré elle du terrain dans l’esprit de la benjamine, il le voyait bien. Sa posture ne semblait plus si empressée de cacher qu’elle venait sur le terrain pour voler un peu ; à présent, elle l’écoutait et il avait finalement happé son attention. Le piège se refermait : si le sujet n’avait pas été si trivial – ça n’était que tu quidditch après tout – il aurait pu savourer chaque instant de ce moment comme d’un moment de puissante. L’enjeu n’était toutefois pas assez important pour cela. Un sourire fendit toutefois ses lèvres alors qu’elle exprimait les premiers mots de sa capitulation : sa mère ne l’avait jamais vu voler, elle ne s’y attendrait pas. C’était là un bon argument. La surprise.

La surprenant dans la contemplation du terrain de quidditch, il dut se faire force pour ne pas laisser son sourire se tendre un peu plus. Rester souriant, mais pas trop. Il savait pourtant qu’il avait presque gagné.

- Te laisser essayer, bien sûr. Il haussa des épaules. « Ça ne serait ni plus ni moins que des sélections retardées et il serait idiot de refuser quelqu’un par principe. »

Sans compter qu’Aisling avait récupéré son insigne de capitaine simplement parce qu’elle passait par hasard dans les environs : jamais jusqu’à présent, elle n’avait été membre de son équipe. Seul Dmitri avait eu de l’expérience par le passé : tous les étaient tous des débutants à peine plus expérimentés à présent que Senna.

- Mais si ça peut te mettre en confiance, tu peux me montrer ce que tu sais faire sur le terrain ? J’ai été poursuiveur il y a deux ans et pour le premier match cette année, j’ai encore quelques restes.

Et il n’était pas particulièrement pressé, aujourd’hui.