La nuit semblait être tombé depuis des heures. Son camarade de chambrée rejetait l’air de son corps à intervalle régulier ce qui lui indiquait qu’il avait rejoint les bras de Morphée. Bailey attrapa son sac déjà prêt au bout de son lit et quitta le dortoir. La salle commune semblait déserte. Pas l’ombre d’un élève. Silencieuse comme cela, elle en paraissait presque paisible et chaleureuse. Le serpentard enfila son manteau par-dessus son pull et son jogging. Le froid d’automne s’était bien installé depuis quelques jours, et les élèves avaient repris l’habitude de superposer les couches pour ne pas souffrir de la fraicheur. Il observa un instant sa montre, surement pour se convaincre qu’il était maintenant trop tard pour que les autres élèves ne fassent encore des rondes. Du moins, il l’espérait, il ne tenait pas à être coupé dans son élan. Ce n’était pas pour rien qu’il avait attendu aussi tard. Depuis quelques semaines, il dormait mieux. Une petite nuit à l’infirmerie sous les conseils de Eléonore n’avait pas été une si mauvaise idée que ça tout compte fait. La dame lui avait fait boire on-ne-sait-quoi et il s’était assoupi presque aussitôt. Depuis, il avait repris un bon rythme, ce qui avait supprimé l’un de ses gros problèmes. Mais ce soir, il était prêt à louper quelques heures de sommeil pour profiter de l’extérieur.

Ainsi le garçon traversa la pièce principale de la salle commune. Mais il sursauta au moment où son regard croisa une personne. Il ne s’attendait certainement pas à voir quelqu’un dans cette pièce à cette heure-ci dans la pénombre. Il laissa échapper un petit soupir de surprise avant de poser son regard sur ladite personne. Elle serait passé totalement inaperçu si son regard n’avait pas balayé ce côté avant de sortir. S’il ignorait ce qu’elle pouvait bien faire ici à une heure aussi avancée de la nuit, Bailey n’avait aucun doute sur l’identité de la demoiselle : Gwendolyn Chastel.

– Tu m’as foutu la trouille. Qu’est-ce que tu fous là ?

Demanda-t-il un peu surpris. Les deux adolescents s’étaient croisés ces dernières semaines, mais ils n’avaient pas eu une réelle conversation depuis cette fois où ils s’étaient entrainés ensemble avant les résultats de sélections. Gwen s’était armée de patience pour supporter et encourager le garçon lors de l’entrainement improvisé. Aujourd’hui, leurs chemins se croisaient à nouveau d’une manière plus surprenante.

– Tu viens ou tu oublies que tu m’as vu sortir en dehors des heures autorisés ?

Demanda le jeune homme. C’était une proposition déguisée. Il ne l’invitait pas à proprement parler à l’accompagner mais c’était tout comme. Elle pouvait le suivre si elle le désirait. Pour une fois, Bailey ne semblait pas complètement réticent à partager un moment avec une personne autre que Zia ou même Eléonore. La proposition lancée, il franchit la porte de la salle commune, bien décidé à mener à bien ses plans de soirée. Quelques secondes plus tard, il se rend compte de la présence de la jeune femme derrière lui. Visiblement, elle a choisi l’aventure plutôt que la soirée paisible en solitude dans la salle commune. Ainsi les deux adolescents traversent les sous-sols discrètement. Ils ne parlent pas, se contentant d’avancer, tout en priant intérieurement de ne pas se faire choper par un professeur ou par un membre du personnel.

Arrivé dans le hall, le jeune homme se plaque contre un mur, il passe une tête pour s’assurer que personne n’est là, et se dirige vers les grandes portes. L’instant d’après les deux adolescents sont dehors. L’air frais vient leur mordiller doucement le visage. Bailey souffle enfin, soulagé d’être dehors, et presque sûr que les ennuis sont pour le moment derrière eux. Mais ils s’éloignent du château avant même de prononcer un mot. Finalement c’est lorsque l’adolescent arrive près du lac, caché derrière quelques arbres qu’il décide enfin de délier sa langue et de faire entendre le son de sa voix à la jeune femme tout aussi silencieuse.

– J’ai de quoi se détendre.

Dit-il alors qu’il enlève son sac de ses épaules et commence à fouiner dedans. Il en sort quelques sucreries, des cigarettes moldus et un sachet de ce qui ressemble à des billes. Il attrape une cigarette et l’allume avant d’en proposer une à Gwen. Il ne connait finalement pas grand-chose de la jeune fille et ne sait rien de ses habitudes nocives pour la santé. Mais le but de cette soirée en dehors du château, pour lui, est de se détendre. Et forcément, cela implique quelques entraves au règlement intérieur de l’école.

– Félicitations au fait pour ton poste dans l’équipe. Tu as géré.

Dit-il avec un faible sourire. Finalement qui aurait cru lors de leur dernière conversation qu’ils intégreraient tous les deux l’équipe de serpentard. Lui n’aurait certainement pas parié dessus. Pas sûr qu’à la place de Jin il aurait été aussi clément. Mais tant mieux pour lui cependant.

– T’as vu les mots sur le tableau d’affichage récemment : genre les crushs anonymes tout ça ? A ton avis, c’est qui qui ose mettre des trucs pareils ?

Demanda-t-il se surprenant lui-même à essayer de faire la conversation.


@Gwendolyn A. Chastel

Bien arrivé au bord du lac, Bailey s’empressa de montrer son maigre butin. Dans ses réserves se trouvaient un paquet de gâteau au chocolat, des cigarettes moldus (qu’il avait chipé cet été), quelques billes qu’il ‘était procuré auprès du serveur des trois balais. Ce n’était pas grand-chose, mais c’était le minimum pour se détendre, disait-il. La brise caressait sa joue et il se félicita intérieurement d’avoir pensé à prendre son manteau. Au moins, il n’aurait pas froid. Gwendolyn l’avait suivi, visiblement curieuse et motivé par une escapade nocturne aux abords du château. Est-ce qu’il était surpris ? Peut être un peu. Elle ne lui paraissait pas comme le genre de fille à aimer aller à l’encontre des règles. Cependant, cela était bien mieux qu’elle soit là plutôt qu’elle ne décide à jouer les mouchards auprès des professeurs ou des préfets. Elle regarda d’un coup d’œil le butin de son camarade avant de commencer à fouiller dans son sac. Il ne s’attendait pas à ce qu’elle ait quoi que ce soit d’utile puisque ce n’était pas une escapade programmée pour la jeune fille qui avait rejoint le navire en route. Et pourtant, Bailey fut surpris par ce qu’elle en sortit : une bouteille de WPF entamée. Cette fois-ci, la surprise pouvait se lire très clairement sur son visage. En effet, il ne s’attendait certainement pas à cette entorse de sa part. Mais après tout, Gwendolyn et lui n’étaient pas si proches que ça, et il y avait surement de nombreuses choses qu’il ne connaissait pas à son sujet.

Elle avait surement remarqué son air puisqu’elle rebondit dessus en s’offusquant presque qu’il ne la prenne pour une sainte. Une sainte ? Peut être pas. Mais en tout cas, celle-là, il ne l’avait pas vu venir. Comme quoi les gens pouvaient toujours surprendre. Elle faisait sans doute référence à la fois où il lui avait balancé, sans grand ménagement, quelques rumeurs qu’il avait entendu sur sa personne. C’était de bonne guerre.

– Impressionnant. Mais je m’en plaindrais évidemment pas.

Répondit-il. En effet, Bailey était plutôt agréablement surpris et satisfait qu’une bouteille soit jointe à leur butin pour la soirée. L’adolescent en profita pour féliciter la demoiselle pour sa place dans l’équipe de quidditch des serpentards. Celle-ci lui retourna le compliment. Désormais qu’ils avaient intégrés l’équipe, il ne leur manquait plus qu’à faire leur preuve et être au niveau de leurs ambitions. Bailey avait bien l’intention de faire mentir Jin quant à ses insinuations par rapport à ses performances. Son ennemi s’était certainement persuadé qu’il avait eu de la chance lors des derniers entrainements. Il n’attendait qu’une seule chose : que Bailey se plante. Et lui n’avait absolument pas l’envie de lui donner raison. Ainsi il prévoyait de redoubler d’efforts et de s’entrainer dés qu’il en aurait l’occasion. Plutôt mourir que de donner une nouvelle fois l’occasion à Jin de le prendre de haut.

Ce soir n’était pas le moment de penser au capitaine de l’équipe. Après tout, il n’allait pas gâcher une nouvelle fois la journée / soirée de Bailey. Autant balayer ces pensées de son esprit. Elles reviendront bien assez vite. Alors l’adolescent s’engagea dans quelque chose qu’il ne faisait que très rarement : des petits papotages. Dernièrement, le panneau d’affichage avait été le témoin de bien des mots et annonces en tout genre. L’une d’entre elles semblait être dédié à avouer son amour à un crush. Mais voilà, il n’y avait pas de signature. En anonyme, donc. Bailey n’en voyait que peu d’intérêt. A quoi cela pouvait-il servir de déclarer son amour à quelqu’un sans que cette personne ne sache qui se cache derrière l’envoyeur. Il ne s’imaginait pas plus courageux que ces personnes mais il trouvait que cela ne mènerait simplement à rien. Et donc que c’était inutile. Gwendolyn lui donna son avis sur la question, qui se rapprochait plus ou moins de ce qu’il pensait aussi.

– Je suis d’accord. Je comprends la timidité et la peur du rejet mais déclamer son amour de manière anonyme n’apportera rien, non ?

Il haussa les épaules lorsqu’elle lui retourna la question. Qui pouvait bien se cacher derrière ces déclarations sans noms ? Il y avait quelques destinataires filles mais la plupart étaient des garçons, du peu qu’il ait vu.

– Les mecs cités sont du genre BG populaire, elles doivent penser qu’elles ont peu de chances.

Ce n’était qu’une hypothèse. Peut être ce panneau n’était qu’une vaste blague entre amis, qu’en savait-il après tout ? D’un point de vue personnel, s’il avait un jour un crush sur une fille, il ne se servirait surement pas de cette chose. Mais pas sûr qu’il n’ait le courage d’aller voir la jeune fille en question non plus, le connaissant.

Bailey attrapa la bouteille que lui tendait Gwen et porta le goulot à ses lèvres. Il en but une grande gorgée, qui eut la conséquence de lui bruler quelque peu la gorge. Le genre de brulure assez agréable au final.

– Jamais de la vie je fais une chose pareille. Puis même imagine on te voit accrocher ton bout de papier, la honte.

Pensa-t-il à voix haute.

En partageant cette trouvaille du fameux panneau d’affichage, Bailey n’aurait imaginé que Gwendolyn avait un avis aussi tranché sur la question. Lui ne voyait pas l’intérêt, trouvait cela légèrement inutile mais au fond il s’en fichait. Chacun faisait comme il lui plaisait. Si des filles trouvaient ça fun ou cool de mettre des mots d’amour sur un mur, soit, qu’elles s’amusent de cette manière alors. Il savait simplement que lui n’userait jamais de cela pour faire passer un message. Il faut dire que ce n’était pas dans ses objectifs ou plans futurs que de trouver une partenaire. Bailey n’avait jamais été très à l’aise avec les filles. Du moins pas dans ce sens-là. Il n’avait jamais eu de relation dans le passé, et n’avait jamais fait de pas vers la gente féminine en ce sens. Pas qu’il ne remarquait pas la beauté chez certaines ou n’était pas attiré de temps à autres. Mais il ne s’était jamais aventuré sur ce chemin. La proximité n’avait jamais été son fort non plus. Et généralement cela allait de pair avec les relations amoureuses. Il n’aimait pas vraiment qu’on le touche. Il n’appréciait pas spécialement se confier sur sa vie privée. Il ne parlait pas beaucoup de lui. Et il extrêmement mal à l’aise avec la nudité ou le fait de se déshabiller. Il se souvenait encore de la gêne qu’il avait ressentit lorsqu’il avait vu Eléonore sans tee-shirt. Ou même la fois où il avait dû retirer le sien. Pendant longtemps, et encore aujourd’hui, il n’aimait pas sa propre nudité à cause de quelques traces laissés sur son corps. Et cette habitude de rester toujours couvert ne l’avait sans doute pas aidé à être à l’aise avec la possible nudité des autres. Tout cela pour dire que Bailey avait tellement d’insécurités et de gênes face à ces choses qu’il lui semblait impossible de se lancer de près ou de loin dans une relation. Et puis de toute manière, soyons honnête, les filles ne se battaient pas non plus pour sa compagnie. Ce qui lui allait très bien pour le moment.

Le jeune homme chassa ses pensées pour se reconcentrer sur les paroles de sa camarade de maison. Elle trouvait cela complètement fou qu’on ne puisse avouer ses sentiments en face sans se cacher derrière une forme d’anonymat. Il comprenait et partageait cet avis. Et en même temps, il ne pouvait que reconnaître la difficulté d’avouer des sentiments à quelqu’un. Pas parce qu’il comprenait réellement cette sensation. Mais il comprenait ce désir de ne pas vouloir se retrouver vulnérable, et à nu devant quelqu’un d’autre, au risque de perdre confiance, de se sentir humilié, de se sentir rejeter. Alors certes cela ne servait à rien mais peut être que cela les aidait à verbaliser un sentiment qui se cachait à l’intérieur.

– Je suis d’accord avec toi. Mais en vrai je comprends la peur de se mettre à nu devant quelqu’un. Être vulnérable c’est donner des munitions à la personne en face pour faire du mal.

Pas très optimiste ceci-dit. Mais Bailey n’avait jamais été de ce genre. Il ne voyait pas forcément toujours le bon dans toutes les situations. Gwendolyn semblait plutôt intense sur le sujet. Peut être rapprochait-elle cela à ses propres expériences. Le garçon réfléchit un instant. Mais il n’avait aucune connaissance ou information sur le sujet. Il ignorait tout de Gwendolyn. Il ne savait pas s’il était déjà sorti avec un garçon de l’école, et si c’était le cas, il ne saurait pas donner un nom. Peut être avait-elle déjà souffert de ce genre de chose.

Le jeune homme haussa les épaules tandis qu’il reprenait une gorgée de WPF. Il eut un petit sourire au coin des lèvres, visiblement plutôt content de se retrouver dehors une bouteille à la main, une cigarette dans l’autre. Il avait l’impression de se retrouver dans les bois près de sa maison familiale. Seulement dans les bois il était toujours seul. Aujourd’hui il avait un peu de compagnie. Et en regardant Gwen, il se rendit compte qu’il ne connaissait vraiment rien (ou presque d’elle). Il ne savait même pas qui étaient ses amis. Il la connaissait seulement en tant que joueuse de l’équipe de quidditch, et élève serpentard de sa maison. Pas grand-chose de plus. La jeune femme en profita pour lui poser une question par rapport au panneau d’affichage.

– Aucune idée. Ca m’étonnerait déjà de m’y retrouver. Je suis pas trop le BG joueur dans l’équipe, je suis assez invisible. Mais ça me dérange pas trop.

Dit-il en haussant les épaules, comme si en effet ça ne l’atteignait que très peu. Il faut dire que Bailey avait toujours été un enfant solitaire, et ce depuis son plus jeune âge. Il se complaisait dans sa solitude que ce soit à la maison ou même à Poudlard. Comme s’il se suffisait à lui-même. Il s’était tout de même fait surprendre. D’abord par Eléonore qui avait su se glisser dans sa vie. Et surtout qui lui faisait apprécier sa compagnie. Et maintenant Gwen avec qui il passait un moment plutôt agréable. Elles allaient le faire mentir sur son amour pour la solitude finalement. Eléonore avait su aller au-delà de sa carapace. Il ne savait pas vraiment comment elle s’y était pris et comment elle s’y prenait encore, mais elle réussissait à chaque fois à s’engouffrer dans une brèche qu’il pensait inexistante. Jamais il n’aurait pensé se confier sur certains sujets. Et pourtant avec El’, il l’avait fait.

– Tu connais un peu Eléonore toi ?

Demanda-t-il innocemment. Qui était donc les amis de Gwendolyn ? Et d’une autre manière qui étaient donc les amis d’Eléonore ? Puisque maintenant qu’il y pensait, même s’il trainait avec El’, ils étaient toujours seuls quand ils étaient ensemble, et il ne savait pas réellement de qui elle était proche ou non.

– Je me suis un peu battu avec Jin au fait, c’est pour ça que je pensais qu’il allait me tej de l’équipe.

Déclara-t-il d’un ton léger.

Gwendolyn semblait vouloir le rassurer sur le fait qu’il n’était pas invisible. Elle lui expliqua que personne ne l’était complètement. Il entendait ce qu’elle voulait dire par là. Mais il doutait qu’elle comprenne que ça ne le dérangeait pas tant que cela. Il ne se plaignait pas d’être moins voyant que les gros bras des équipes, moins populaire que certains garçons qui aimaient se pavaner dans l’école, moins sympathique que ceux qui excellaient dans l’art d’organiser des soirées. Il se fichait plus ou moins de ce que l’on pouvait penser de lui. Il tenait à sa tranquillité et faisait son chemin à Poudlard sans être trop importuné. Il doutait qu’une fille ne soit intéressé en sa personne. Et si un jour, il faisait face à cette possibilité, il ne saurait sans doute pas comment réagir. Il n’était pas de ceux trop proches des gens que ce soit mentalement ou même encore moins physiquement. Cette promiscuité le dérangeait, le mettait mal à l’aise. Et Bailey préférait être apte et dans le contrôle de ses émotions et de son corps.

Gwendolyn lui prit une cigarette. Elle faisait bien. Après tout, il se servait allègrement dans sa bouteille, elle pouvait donc faire de même avec ce qu’il avait apporté. Les cigarettes étaient moldus. Simple, industrielle, avec du tabac dedans. Mais il semblait surpris de voir la jeune fille observer avec soin cette chose qui n’avait plus aucun secret pour lui. N’en avait-elle jamais eu auparavant ? Mais après tout, que savait-il d’elle ? Il ignorait tout de l’éducation qu’elle avait reçu. Il ne connaissait même pas le statut de son sang. Peut être avait-elle grandi autour de sorciers, et que donc tous les objets du monde moldu ne lui étaient pas familier. Lui avait toujours grandi dans cet autre monde, ce monde parallèle à celui des sorciers. Sa mère était (et l’est toujours) moldu. Il avait grandi comme un moldu avant d’intégrer l’école de sorcier.

– Du tabac déjà, et pleins d’autres trucs j’imagine.

Si elle attendait la composition exacte, elle était sans doute mal tombée. Bailey ne faisait pas d’efforts de chercher dans sa mémoire la composition de celle-ci. Parce qu’au fond, tout le monde s’en fichait n’est-ce pas ? L’important était simplement le résultat. Bailey ne fumait pas très souvent. Après tout, c’était plutôt compliqué à Poudlard, puisque c’était censé être interdit. Mais une de temps en temps lui avait toujours fait du bien. Comme si cette chose agissait comme un anti-stress. Comme une bouffée d’air frais qui lui permettait de se détendre de temps à autre. Aujourd’hui, il la partageait donc avec Gwendolyn.

La demoiselle utilisa un sort pour l’allumer. Très sorcier. Bailey, quant à lui, avait simplement utilisé un briquet, comme un moldu. Peut être n’était-ce qu’une question d’habitude. Lorsqu’il était chez lui, il ne pouvait de toute façon pas utiliser la magie. Et cette habitude semblait persistait même s’il était de retour au château.

– Oui. Comme ça. C’est une chic fille. On traine ensemble de temps en temps, mais aucune idée avec qui elle traine en dehors.

Répondit-il de manière nonchalante. Parce qu’il avait bien vu dans ses yeux qu’il venait d’allumer une flamme de curiosité. Il pouvait le comprendre. Gwendolyn restait une fille qui aimait beaucoup les gossips et les secrets. Alors entendre Bailey parler d’une fille comme ça, comme un cheveu sur la soupe, avait titillé son intérêt. Peut être allait-elle penser qu’il était intéressé par la jeune femme ? Il l’ignorait. Pour être franc, il ne se posait pas vraiment la question. Certains problèmes dans sa vie était plus urgent que l’idée d’avoir une copine. El avait été présent pour lui dans des moments qui étaient tout sauf romantique. Et puis, elle était intéressée par le type qui l’avait largué quelques mois auparavant.
Convaincre Gwendolyn de l’innocence de sa question serait sans doute compliqué. Alors il opta pour un changement brutal de conversation en lui confiant les réelles raisons de sa peur de ne pas intégrer l’équipe de quidditch. En effet quelques semaines auparavant, le capitaine et lui avaient eu une grosse altercation en salle commune. Bailey avait perdu son sang froid en premier. Et son attitude aurait très bien pu casser ses chances. Jusqu’à peu, il était persuadé que Jin userait cette excuse pour le virer de l’équipe. Alors il avait été encore plus surpris en voyant son nom sur la liste des joueurs. Lui n'aurait sans doute pas eu la même réaction si les rôles avaient été inversés.

– C’était bien avant l’entrainement, au début de l’année. Ca me surprend que tu en ais pas entendu parler, il y avait quelques spectateurs dans la salle commune. Bref, je l’ai cherché, il m’a fait vriller et c’est parti un peu trop loin. Je pense il aurait bien aimé que je m’en prenne un en pleine face, à coup sûr.

Répondit-il toujours avec cette attitude nonchalante. Comme si rien n’était si grave, comme si ce qu’il racontait ne l’atteignait absolument pas. Bailey n’avait certes pas peur de se battre, mais de manière générale, s’il pouvait l’éviter il le faisait. Ce soir-là, Jin avait appuyé sur une blessure encore fraiche en attaquant sa famille et les relations que pouvaient entretenir ses parents avec lui. Après l’été qu’il avait passé, après les innombrables disputes, le nouveau mec de sa mère, le fait qu’elle soit encore plus sur son dos et qu’elle ne lui laisse aucun répit … il n’avait suffit que d’une goutte pour faire déborder un vase déjà bien trop rempli.

– Crois moi, je suis bien content d’être dans l’équipe, mais à sa place, je n’aurais pas été aussi sympa avec un type que je peux pas blairer.

Dit-il finalement en haussant les épaules, avant de donner la bouteille à sa camarade.

Si on lui avait demandé sur une échelle de zéro à cent la possibilité qu’Eléonore traine avec un type comme ‘Baby’, Bailey aurait sans doute répondu zéro. Peut être était-ce dû aux aprioris qu’il avait sur l’adolescent. Il faut dire que ce garçon débarquait d’une école étrangère, muni de son arrogance, de son argent, et de son fan club. Il aimait se mettre en avant, se faire remarquer. Et il représentait tout à fait le genre de personne avec qui Bailey ne pouvait avoir aucun atome crochu. Il ne jugeait pas Eléonore de s’associer avec un garçon comme ça, mais il ne pouvait non plus cacher sa surprise. De ce qu’il connaissait d’El, cela semblait être un duo improbable. Mais techniquement, il ne connaissait pas réellement la jeune femme en dehors des moments qu’ils passaient tous les deux. Il savait qui elle était en sa compagnie, mais ignorait comment elle se comportait avec les autres. Peut être y avait-il toute une facette de sa personnalité dont il ignorait tout. Tout comme elle ne connaissait pas réellement qui se cachait derrière cette personne qu’il était en sa compagnie. Quoi qu’elle en eût eu tout de même un aperçu en début d’année, alors qu’elle l’avait surpris dans un moment d’anxiété intense. Il n’y avait qu’un seul moment depuis l’année dernière où elle avait observé une facette de lui qu’il désirait enterrer.

Il s’empêcha de donner quelconque avis sur l’information qu’elle venait de lui donner. Ce n’était certainement pas son rôle de juger les relations qu’Eléonore entretenait en dehors de lui. Et il ne tenait pas non plus à donner des fausses-idées à Gwendolyn, qui était tout de même connu, rappelons-le, pour creuser les secrets des élèves de l’école. La serpentard lui confia qu’elles trainaient ensemble de temps en temps pour réviser apparemment. De ce qu’il en tirait, elle semblait l’apprécier. En même temps, Bailey avait du mal à imaginer qu’on puisse détester ou même ne pas aimer Eléonore. Elle était le genre de fille qui attirait autour d’elle, de par son caractère et sa gentillesse envers autrui. Et finalement à peine deux minutes plus tard il s’autorisa quand même un petit commentaire, visiblement ayant vite changé d’avis sur la question.

– Je la vois tellement pas trainer avec un type pareil.

Bailey manqua de s’étouffer et toussa trois fois. La fumée de cigarette était mal passé, et cela était surement dû à la remarque que Gwendolyn venait de faire à propos de sa relation avec Jin. Les tensions entre les garçons n’étaient un secret pour personne, encore moins pour Gwendolyn qui avait dû les supporter pendant près d’une année dans l’équipe. La pauvre s’était souvent retrouvée au centre de disputes inutiles et de joutes verbales. Jamais auparavant ils n’en étaient pour arrivés aux mains. Quatre semaines plus tôt, ils avaient cependant passés ce nouveau cap. Et même si Bailey pouvait reconnaitre (mais pas à voix haute) qu’il avait été mature de le prendre dans l’équipe malgré leurs différends, il ne croyait absolument pas qu’ils puissent être amis un jour, pas même cordiale. Depuis le début, il y avait eu des tensions. Entre eux, une flamme brulait en permanence. Et parfois l’un deux jetaient de l’huile dessus … ce qui donnait lieu à un sale spectacle. Mais Gwendolyn n’y croyait sans doute pas non plus. Elle avait tout même été le témoin de cinq ou six de leurs disputes dans les vestiaires ou dans la salle commune.

– Le jour où tu me vois être sympa avec lui, c’est qu’on m’a fait un lavage de cerveau, ou qu’on m’a menacé de m’écorcher vif … et encore, qu’on m’a menacé d’écorcher vif quelqu’un à qui je tiens. Nan … en vrai impossible. C’est un vieux type.

Il n’avait pas fallu plus de sept secondes au garçon pour insulter son camarade de plusieurs manières. Le résultat final était le même : il n’y avait peu d’espoir de réconciliation. Et Gwendolyn devrait supporter leurs enfantillages pendant encore une année ou presque : plus ou moins huit mois maintenant.

Il décrocha tout de même un petit sourire en l’entendant vouloir avoir le monopole sur le succès d’une amitié incertaine. Puis tira une nouvelle fois sur sa cigarette tandis qu’il se mettait un peu plus à l’aise, avachis légèrement contre l’arbre. Antonella était la nouvelle poursuiveuse : du sang neuf avait-il pensé en voyant son nom. La fille lui avait même envoyé un hibou pour partager son excitation face à cette nouvelle responsabilité dans sa maison. Elle semblait être une fille plein d’entrain, très exubérante. Et même si elle paraissait gentille, Bailey se demandait si elle n’allait pas vite la fatiguer. L’avenir nous le dirait.

– C’est qui que t’aimes pas dans ce bahut toi ? Tu dois pas avoir que des potes avec ton côté fouine un peu.

Demanda-t-il un peu maladroitement. Parce que pour une fois il ne cherchait ni à l’attaquer ni à la vexer. S’il avait réfléchi dix secondes de plus, il aurait peut être réussi à sortir une formulation moins hasardeuse. Lui qui n’aimait que trop peu qu’on parle de lui cherchait simplement un moyen de détourner la conversation vers elle.

Loin de ses habitudes, Bailey se montrait être particulièrement bavard ce soir. Du moins en comparaison à son habitude de ne laisser passer que très peu de mots entre ses lèvres. Evidemment, Gwendolyn, en était surprise et lui fit remarquer. L’adolescente semblait de nature curieuse et observatrice. Ainsi, elle ne pouvait passer à côté de ce changement étrange. Peut être était-ce le sommeil rattrapé, ou le fait qu’il se sente enfin chez lui à Poudlard après quelques semaines compliquées. Moins fermé que d’ordinaire, il profitait de cette pause dans ses soucis personnels pour se détendre. La serpentard semblait être moins hostile qu’elle lui avait paru quelques semaines voire quelques mois plus tôt. Bien sûr, il était loin de lui faire confiance, et ne s’aventurerait sans doute pas à lui partager ses secrets les plus intimes. Mais pour une soirée, il pouvait néanmoins faire l’effort de se montrer cordiale. Cette barrière de froideur n’existant plus ce soir, la demoiselle poussa un peu plus pour en apprendre davantage. Quelques questions par ci, par là. Rien de trop personnel, donc tout allait bien pour le moment. Avait-il un réel intérêt à connaitre les gens qu’elle aimait ou qu’elle détestait ? Pas vraiment. Le fait que Gwen apprécie grandement Eléonore Wright, qu’elle supporte étrangement Jin Kyung Seo, ou qu’elle juge discrètement Willow Gillepsie ne changerait rien à sa vie, où à ce qu’il pouvait bien penser d’elle. Bailey ne forçait personne à aimer ou détester son prochain. Il avait ses amitiés et ses inimités sans désir d’influencer ses camarades. De toute manière, pas sûr qu’il réussisse à convaincre qui que ce soit. Il haussa les épaules face à ses questions. Il ne cherchait pas grand-chose à vrai dire. Ou si c’était le cas, il l’ignorait lui-même.

– Personne ne peut jamais être complètement honnête, tu sais.

Répondit-il en haussant une nouvelle fois les épaules. Il comprenait le désir d’honnêteté, mais il savait trop bien qu’il était compliqué de l’appliquer tous les jours, dans toutes les situations. Une personne par nature ne pouvait pas se montrer vertueux en permanence. Bailey le premier ne se considérait pas comme le type le plus honnête. Il ne partageait pas tous ses secrets, et n’hésitait pas à mentir pour se couvrir. Il ne tenait certainement pas à ce que des élèves apprennent ce qu’il se passait chez lui. Mais le sujet familial n’était pas la seule chose sur laquelle il pouvait mentir ou tricher. Après tout, il avait déjà volé. Plus d’une fois. Et dans le livre des vertues de Gwendolyn Chastel, cela ne passerait sans doute pas. Bailey se garda bien de lui confier une telle chose. Elle n'avait pas besoin de savoir qu’il se jouait les apprentis délinquants dans son temps libre.

Gwendolyn ne semblait que très peu affecté par l’effet qu’elle avait sur ses camarades. Elle se fichait du regard que les autres pouvaient avoir d’elle. En l’écoutant, il avait l’impression qu’elle était imperméable aux critiques. Qu’on l’aime ou qu’on la déteste ne la touchait que trop peu. Bailey pouvait comprendre cette pensée. Il ne pensait rarement à l’image qu’il renvoyait. Mais à part Jin, il n’avait pas l’impression d’avoir réellement des ennemis. Ses camarades se contentaient de l’ignorer, et cela lui allait parfaitement.

– Donc tu échange ta tranquillité contre la menace de dévoiler des secrets ? Rappelle-moi de ne jamais rien te confier.

Dit-il d’un ton légèrement moqueur. La menace que représentait sa camarade ne lui faisait pas réellement peur. Car pour lui, elle ne connaissait rien de sa vie, ou très peu. Les informations qu’elle pouvait posséder à son sujet étaient aussi bien futiles qu’inutiles. Bailey n’était pas dupe cependant, il savait qu’elle chercherait sans doute à fouiner. Ses seuls secrets étaient entre les mains d’Eléonore, et il voulait croire que la poufsouffle ne le trahirait pas en racontant sa vie privée à Gwendolyn. N’avait-elle pas dit qu’elles étaient proches, mais sans plus ? Cela le rassurait légèrement.

Elle lui posa ensuite la même question. En dehors de Jin, Bailey avait-il des ennemis ? Non. Ennemi était un mot bien trop fort pour qu’il puisse l’utiliser en dehors de son capitaine de quidditch. Mais Bailey était d’un tempérament calme et solitaire. Il lui arrivait de se poser dans la salle commune ou dans le parc avec un bouquin, et avait profité, dans le passé, d’observer ses pairs interagir. Il n’exposait son opinion des autres que très rarement, mais cela ne voulait pas dire qu’il n’avait pas d’avis pour autant. Alors il réfléchit un instant à la question de Gwendolyn, tout en prenant soin de tirer une nouvelle bouffée sur sa cigarette désormais bien entamée.

Saige Billington était une fille charmante. Il ne la connaissait que très peu mais avait eu l’occasion de s’entrainer avec elle avant les sélections. Cette fille avait la tête sur les épaules. Elle semblait se partager entre une douceur apaisante et une force sauvage. Etrangement, l’espace d’un instant, il s’était senti proche d’elle, et avait ressenti le besoin de la rassurer sur son manque de moyen pour acheter un nouveau balai. Ce partage furtif l’avait un court instant ramené à une réalité : personne n’était réellement jamais seul dans ses problèmes, et d’autres pouvaient partager les mêmes peurs et insécurités que lui. Cependant Gwendolyn n’était nullement intéressée par son affection pour la jeune gryffondor, elle voulait surement des noms qu’il trainerait dans la boue. Après tout, elle aimait surement bien plus le scandale aux bons sentiments. Devait-il lui parler de Dmitri van Aken, le gosse SP tête à claque insupportable ? ou plutôt d’Auguste Rowle, un inconscient qui semblait vivre pour les caméras, et qui s’effondrerait surement en apprenant qu’il n’était pas le centre du monde ? Ou encore Teodora K. Von Meissen devenu la fille que tous les garçons de l’école semblent s’arracher ? La vérité était qu’il ne pouvait rien dire à leurs sujets. Tout ce qu’il avait entendu n’étaient que des rumeurs, des vulgaires ragots qui ne représentaient sans doute pas les personnes qu’ils étaient réellement. Bailey n’était pas enclin à rencontrer, à partager, ou même à apprendre à les connaitre, mais il ne tenait pas non plus à les juger sur des ‘on dit’.

– Non. Enfin, j’suis pas un fan du Professeur Griffith, elle a l’air un peu trop perché pour moi, mais au fond je m’en fous. J’suis pas du genre à aimer ou détester facilement.

A part Jin, évidemment. Tous les professeurs étaient un peu chiants d’un cours à un autre. Après tout, s’il devait lui aussi supporter des classes de gosses remplis d’hormones et incapables de se tenir plus de trente minutes, lui aussi serait sans doute un peu aigri.

– J’aime bien El’ et Zia sinon si on reste sur le positif. Antonella a l’air d’être un sacré numéro aussi.

Après tout, il pouvait toujours parler de relations positives. Là aussi, ce serait plutôt rapide puisqu’il n’en avait pas beaucoup. Zia plus connu par son prénom complet : Anastasia était une serdaigle en sixième année. Depuis la première année, les deux s’entendaient plutôt bien. Zia arrivait de temps en temps à le faire sortir de sa coquille et s’était donné comme mission de le rendre plus sociable. Pour le moment la mission n’était pas une très bonne réussite. Son amitié avec Eléonore avait débuté de manière peu conventionnelle, mais elle avait su l’apprivoiser d’une certaine manière. Outre ces deux filles, le garçon restait plutôt distant avec ses camarades. Antonella était la nouvelle poursuiveuse de l’équipe. Elle remplaçait donc Gwendolyn à son poste. Elle n’avait pas l’air méchante, mais elle semblait à première vu très exubérante, le contraire de son tempérament à lui.


HRP : je pensais que c’était 10 noms, et en vérifiant c’est que 8, tant mieux je galérais vraiment à en trouver un dernier pour le coup.

Son sourcil se fronça légèrement en entendant les quelques paroles de son interlocutrice. Son mécanisme de défense le poussait presque à prendre ses paroles comme une attaque. Il ne pouvait admettre être complètement d’accord avec la jeune femme. Pour lui, l’honnêteté représentait un sentiment bien plus complexe qu’elle ne le laissait entendre. Chaque personne se dotait d’un masque pour naviguer dans un monde complexe. Ces masques portés telle une armure pour cacher les vulnérabilités et les vérités trop dure à assumer. Chaque mot, chaque action, chaque sourire feint se transposait en une brique qui construisait un mur entre eux et l’authenticité. Il était si facile de se perdre dans un labyrinthe de mensonges. Pour Bailey cacher sa vie privée au monde semblait être un besoin impérieux. Il voyait ses secrets comme un poids sur ses épaules. Mais dissimuler ces parts d’ombres lui avait toujours semblé nécessaire, cherchant désespérément à protéger ses fragilités des regards indiscrets. Il s’était engouffré dans un chemin qu’il ne maitrisait plus, dans lequel il lui était impossible de faire demi-tour. Au point où cacher sa vie privée était devenu un acte de survie. Au fond de ce silence imposé se cachait tout de même son désir de trouver un refuge, un lieu, un endroit, une personne où il pourrait alléger son fardeau. Il hocha la tête pour balayer ses pensées de son esprit. A Poudlard, ses démons étaient loin, ses cauchemars ne pouvaient pas l’atteindre aussi bien. Et pour cela, il ne pouvait être son propre bourreau en se perdant dans ces pensées.

Il releva la tête pour reconcentrer son attention sur la jeune femme. Ces quelques secondes de silence l’avaient déstabilisé. Et il reprit la bouteille pour prendre une longue gorgée. Hors de question de gâcher sa soirée avec des pensées futiles alors qu’il s’étais enfuis de son enfer personnel quelques jours plus tôt. Il repassa la bouteille à la demoiselle avant d’essayer de se reconcentrer sur ses paroles. Elle passait souvent pour une commère, pour le genre de personne qui aimait fouiner et dénicher les secrets de ses pairs. Forcément, cela ne pouvait pas engendrer que de bonnes relations avec les autres. Était-ce à cause de la menace d’un secret révélé que ses camarades ne se mouillaient pas à l’attaquer ? Il espérait qu’aucun de ses plus noirs secrets n’arrivent entre les mains de la jeune femme. Pas qu’il la détestait, mais il ne tenait pas à qu’elle détienne un tel pouvoir sur lui. Son anxiété était déjà suffisamment importante sans y ajouter une Gwendolyn qui pouvait lire ce qu’il tenait tant à cacher.

– Non. répondit-il presque immédiatement, sans aucune réflexion Mais tu ne détiens pas le pouvoir de me faire chanter sur mes secrets non plus.

Il haussa les épaules. Il ne la voyait pas comme une provocatrice, il se contentait de faire des suppositions. Il ne pouvait affirmer ou infirmer ces suppositions, puisque Gwendolyn ne s’était jamais retrouvée en position de force face à lui. Aux dernières nouvelles, elle ne connaissait aucun de ses secrets.

Parfois, il avait l’impression que la jeune femme pouvait percevoir bien plus qu’elle ne l’avouait. D’une nature plutôt bavarde, il ne l’aurait pas cru comme étant quelqu’un qui remarque les détails : les changements de ton, de regard, ou autre. Mais elle se montrait être plus clairvoyante qu’il ne l’imaginait. En effet, elle semblait plutôt bien décoder la conversation qu’ils avaient même si Bailey ne lui donnait que très peu. Elle se montrait insatisfaite pas ses réponses et cherchait à en savoir plus en multipliant ses questionnements. Et entre ses questions, elle lui donnait quelques informations sur ses camarades qu’il n’aurait pas imaginé. Peut-être était-ce lui qui manquait de clairvoyance après tout. Antonella lui avait semblé très joviale et exubérante mais il ne l’aurait pas qualifié de personne qui use de ses charmes pour attirer l’attention des garçons. Pourtant, c’était ce que semblait sous-entendre Gwendolyn, n’est-ce pas ?

– Je n’ai rien vu de tout ça. Elle me paraissait excité à l’idée de rejoindre l’équipe et de créer une unité dans le groupe. Après ce n’est pas vraiment mon genre … de loucher je veux dire.

Si Antonella avait cherché à lui montrer son décolleté, il ne l’aurait surement pas remarqué. Bailey n’avait jamais été très à l’aise avec ce genre de promiscuité. Il ne désirait pas réellement regarder avec insistance le corps des filles. Ce ne serait certainement pas non plus la meilleure des manières pour elle de se rapprocher de Bailey, d’ailleurs. Il espérait qu’elle ne tenterait pas un tel comportement avec lui. Il ne tenait pas à être mal à l’aise avec une de ses coéquipières, encore moins que Jin le voit dans une situation comme celle-ci.

Mais Antonella ne représentait pas un sujet d’envergure pour Gwendolyn. Rapidement, elle revient sur un passage de la discussion qui l’a marqué, sur un sujet sur lequel elle cherche davantage d’informations et d’éclaircissements. En effet, la serpentard introduisit une nouvelle fois le prénom d’Eléonore, la replaçant au centre de la conversation. Le garçon haussa un sourcil, un peu surpris par son affirmation.

– Tu essaies de la vendre ?

Demanda-t-il pour cacher son inconfort. Bien sûr qu’Eléonore était une fille très jolie. Il n’avait pas de mal à l’admettre et lui avait déjà dit une fois si ses souvenirs étaient bons. Mais Gwendolyn allait plus loin que cela. Elle ne cherchait pas à savoir s’il trouvait sa copine jolie, mais plutôt s’il était intéressé par elle, d’une manière plus qu’amicale surement. Il réfléchit un instant à ce qu’il pouvait lui répondre. Le visage de la poufsouffle lui apparut dans l’esprit. Il ne pouvait nier la trouver jolie évidemment, mais il ne s’était pas imaginé entamer quoi que ce soit avec elle. Déjà, soyons honnête, il y avait peu de chance qu’une fille comme El’ ne puisse s’intéresser à un garçon comme lui au-delà de l’amitié. Et pour le reste, ses raisons étaient plus personnelles. Il se sentait incapable d’atteindre un degré de proximité avec une fille. L’idée même l’emplissait d’une anxiété incontrôlable. Le fait qu’on puisse le toucher lui envoyait comme une décharge désagréable dans sa colonne vertébrale. Et rien que cette pensée lui faisait comprendre que ses élans de paniques étaient loin d’être contrôlables. Comment pouvait-il entretenir une quelconque relation si l’anxiété l’étouffait avant même de passer à l’action … que ce soit avec Eléonore ou n’importe quelle autre personne d’ailleurs.

Il secoua une nouvelle fois la tête, ne voulant pas se perdre dans ses pensées, ne tenant pas à laisser l’anxiété remonter en lui. Et il croisa le regard de Gwendolyn qui attendait surement une réaction à ses paroles, alors qu’il se montrait une nouvelle fois silencieux. Il éclaircit sa voix, et reprit une gorgée avant de lui redonner une nouvelle fois la bouteille. Puis il attrapa une cigarette qu’il alluma avec son briquet moldu. Ce truc avait toujours un effet apaisant. Et il en avait besoin pour sortir de ce genre de pensées qui le tirait vers le fond.

– C’est une fille bien et belle oui. Mais je cherche pas spécialement de relation.

Dit-il avec un petit rictus. Au moins il ne lui mentait pas réellement. Mais si Gwendolyn voulait absolument parler de relations amoureuses, il n’y avait aucune raison pour que la lumière ne soit que sur lui.

– Et toi ? Quel est donc le genre de mec qui te fait craquer dans l’école ?

Il cherchait à éloigner l’attention de lui, au moins pendant un court instant qu’il puisse reprendre le contrôle et éloigner les pensées qu’il jugeait trop encombrantes.

Le simple fait de détourner une discussion semblait avoir mit la puce à l’oreille de Gwendolyn. Bailey se montra légèrement surpris. Pas qu’elle puisse ne le voir comme un grand cachotier, simplement parce qu’il se rendait peu compte des pensées des autres. Trop souvent, l’adolescent se concentrait sur ses problèmes personnels, sur ses sentiments et ressentis. Il ne pensait certainement pas que le monde tournait autour de lui, il n’aurait jamais eu cette audace. Pourtant coincé dans son tourbillon de problème, il ne s’attardait que trop peu sur les autres. N’ayant que peu d’amitiés ou de connexions à entretenir au sein de l’école ne l’aidait sans doute pas en cette direction. A force de se perdre dans un désir de solitude quasi-constant, il s’éloignait d’une réalité qui le frappait à nouveau aujourd’hui. Paradoxalement, il savait que pour comprendre et recevoir, il fallait donner, et lui n’avait absolument rien à donner.

Il haussa les épaules, nonchalant, une nouvelle fois. Bailey se montrait être plutôt doué à faire croire qu’il se fichait de tout, qu’il était au-dessus de tout, que peu de chose ne l’atteignait vraiment. Après tout, n’était-ce pas ce qu’il voulait ? Il choisissait sa propre compagnie à celle des autres, tout en montrant au monde qu’il se fichait de ne pas être dans le haut du panier de la popularité adolescente. Et aujourd’hui encore, il montrait à Gwendolyn qu’il s’en fichait. Elle pouvait croire ce qu’elle voulait. Elle pouvait s’imaginer que Bailey ait un crush sur sa copine si elle le souhaitait, il s’en fichait. Quoi que … il ne tenait certainement pas à ce qu’elle aille mettre cette idée dans la tête d’Eléonore. Dernièrement il marchait sur des œufs avec elle. Depuis qu’elle connaissait quelques informations sur ce qu’il se passait dans la demeure familiale, Bailey craignait qu’elle ne passe à l’action. Bien sûr il avait confiance en sa bonne foi et son affection sincère pour lui, mais il était anxieux à l’idée qu’elle ne puisse pas juste ne rien faire. Il l’avait vu dans ses yeux que ce n’était qu’une question de temps avant qu’elle ne revienne à nouveau à l’attaque. Et la dernière chose qu’il voulait c’était se retrouver dans le bureau de Fergal pour s’expliquer sur cette histoire. Connaissant donc l’ambiance entre les deux, il ne tenait pas à rajouter la possibilité qu’elle ne pense qu’il soit intéressé par elle. Il ne tenait pas à la faire fuir, parce que même s’il ne l’avouerait jamais à voix haute, il avait bien plus besoin d’elle qu’il ne le laissait penser. Son soutien lui importait.

Il changea de sujet. Encore une fois. Parce que si elle tenait autant à parler de relations amoureuses, de flirts et de toutes ces choses, il préférait qu’elle soit le centre de cette fameuse conversation. Alors il lui demanda quel était son style de garçon à elle. Il se fichait un peu de la réponse, cela ne changerait surement rien à sa vie, mais l’éloigner de lui était toujours le but après tout. Plutôt prévisible de toute manière puisque cela avait été sa stratégie depuis presque le début de la conversation. Il releva les yeux presque instantanément vers elle.

– Euh …

Puis il tira une nouvelle bouffée sur sa cigarette. Bailey ne semblait pas sûr d’avoir totalement compris les paroles de la jeune femme. Était-ce totalement innocent ou essayait-elle de lui faire passer un message ? La possibilité l’effrayait complètement. Il le cacha cependant en reprenant une bouffée. La meilleure des solutions était de ne pas avoir de réaction, n’est-ce pas ? Car en avoir une attiserait forcément la curiosité de Gwendolyn, et il ne tenait pas à ce qu’elle plonge dans tous ses problèmes de fille et de contact avec son espèce. Elle cherchait quelqu’un de silencieux qui n’était pas romantique en bref ? Pourquoi pas. Bailey ne pouvait certainement pas se vanter de s’y connaître en filles, mais il croyait justement qu’elles aimaient bien les longues conversations et les cadeaux ? Clairement, ceci lui indiquait qu’il n’y connaissait absolument rien.

– Pourquoi ?

Parce qu’il ne comprenait pas vraiment, et parce qu’il tenait à rester aussi éloigné de sa personne au centre de la discussion, et le meilleur moyen pour cela était sans doute de la faire parler sur elle et sur ses problèmes.

Est-ce qu’il n’avait réellement pas compris ? Est-ce qu’il faisait exprès de ne pas comprendre pour cacher une certaine gêne ? Il ne comprenait pas totalement les dynamiques des relations entre adolescents. Avec Zia par exemple tout avait toujours été simple. Elle était son amie depuis le premier jour où il avait mis un pied dans le train. Il la voyait comme une pote, une amie, une sœur. Aucune ambiguïté. Aucun non-dit. Simplement une assurance de qui elle était pour lui. Jin aussi était une valeur sûre. Il le trouvait hautain, lui le trouvait stupide. Il se retrouvait dans la case ennemie. Tout allait bien. Mais parfois dans certaines situations, tout ne semblait pas être aussi clair. Il ne comprenait pas toujours les sous-entendus. Et ne comprenait pas toujours les intérêts des uns et des autres. Peut être était-il trop fermé au monde pour décoder les subtilités des relations entre adolescent. Mais après tout, il récoltait aussi ce qu’il semait. S’il ne voulait pas être mal à l’aise et perdu dans une conversation, il n’avait pas qu’à poser ce genre de questions ou se laisser attirer dans ce type de conversation.

La jeune femme ne semblait pas vouloir faire la conversation toute seule et cherchait à savoir justement ce qu’il voulait, ce que lui-même cherchait. En toute honnêteté, il n’en savait rien. Bailey n’était pas sûr de la raison de son pourquoi. Il prit une nouvelle gorgée, plus calme, plus détendu, essayant de faire sens des paroles. Elle surenchérit quelques instants plus tard en lui expliquant qu’il devait être un peu plus précis. Puis elle laissa s’installer un doux silence entre eux, qu’elle ne semblait désormais plus vouloir rompre. Le voilà donc maitre de cette conversation ou du moins des suites de cette conversation. Il ne savait pas où celle-ci irait, il se rendait simplement compte que l’alcool commençait à avoir quelques effets. Le liquide brûlait agréablement sa gorge et embrouillait quelque peu son esprit, le libérant d’une anxiété qui lui collait trop souvent à la peau. Ce sentiment lui faisait d’ailleurs parfois peur. La douceur, la quiétude, et la liberté qu’il ressentait lorsqu’il s’abandonnait à cette boisson pouvait avoir un côté effrayant. Si tout s’envolait en buvant quelque peu, qu’est-ce qui pouvait bien l’empêcher de le faire en permanence ?

– Pourquoi pas de chocolat ? C’est hyper précis comme requête.

Finit-il par demander. Sans doute car c’était l’affirmation la plus étrange parmi les trois. Mais aussi parce qu’il ne voulait pas avoir de détail sur le reste. Que la description lui ressemble ou non, cela n’avait aucune importance. Peut être que si elle lui expliquait il comprendrait mieux les filles, ou du moins certains aspects de leur personnalité qui lui paraissait très compliqué.

Puis il resta là, un instant, en silence, le regard perdu dans le vide, profitant de cet état agréable ou rien n’avait plus aucune espèce d’importance. Ce genre de moment où l’on oubliait même être à quelques centaine de mètres des portes du château où se trouvait des adultes qui les tueraient surement s’ils savaient comment ils avaient choisi d’occuper leur soirée. Il avait détourné bien vite le regard de Gwendolyn. Fixer les gens n’était pas dans ses habitudes. Encore une chose qui pouvait le rendre mal à l’aise si cela durait trop longtemps. Gwendolyn semblait être au contraire ceux qui ne sont pas affecté par la proximité ou la gêne. Soit elle était reine dans l’art de maitriser ses émotions, soit elle n’était réellement que peu toucher par le monde.

– Ton style c’est pas les BG populaire genre Chipperfield ou autre ?

Demanda-t-il pour la science. Il ne comprenait pas réellement toute la fame autour des gens populaires et pourquoi ils l’étaient ou non. Mais la plupart du temps les personnes dites populaires avaient des atouts physiques plutôt marqués. Et puis tant qu’il pouvait continuer sur une lignée où l’on ne parlait pas de lui et l’on ne s’immisçait pas dans sa vie privée, tout allait bien.

Il resta légèrement décontenancé par ce qu’elle venait de lui dire. Se trouvait-elle dans un moment d’incompréhension ? Il attendit un instant qu’elle continue pour s’expliquer un peu plus sur sa métaphore qui n’en était pas réellement une. D’abord très terre-à-terre puisqu’elle lui confia ne pas aimer le chocolat. Il fronça un sourcil. Quel être humain n’aimait pas ce met divin. Gwendolyn ne tenait pas à faire ses adieux à la fin de l’année lorsque son éducation à Poudlard prendrait fin. Et pour cela, l’adolescente avait pris la décision de ne pas s’accrocher, romantiquement parlant, à qui que ce soit. Bailey comprenait ce genre de pensée. A quoi bon perdre son temps à former des liens si l’on devait partir. A quoi bon s’attacher à autrui si on l’imaginait s’en aller. Lui prônait une toute raison pour expliquer son désintéressement envers ses camarades : la protection de sa vie privée. Car lorsque personne ne le connaissait réellement, ses secrets ne pouvaient être que bien gardé. Il ignorait pourquoi il pensait comme cela. Pourquoi au contraire n’avait-il jamais eu le désir de se réfugier dans les relations amicales, de se construire une famille en dehors de la sienne. Car lorsque l’on possédait un cercle familial aussi restreint, aussi chaotique, n’était-il pas naturel de vouloir chercher et trouver cet amour, cette affection à l’extérieur, en des personnes qu’il rencontrait, chérissait, et choisissait. Lui préférait la solitude. Il s’en justifiait en essayant de se convaincre que cela était plus simple ainsi. Peut être qu’au fond, il avait simplement peur d’être vulnérable, peur d’être rejeté, peur de ne pas trouver ce qu’il recherchait tant. Alors la solution était justement de ne pas le chercher, pour ne pas être déçu. Il comprenait donc un peu Gwendolyn, et comme à son habitude, se contenta d’acquiescer sans dire un mot de plus.

Il changea d’axe en revenant sur ses goûts et en laissant échapper un nom : celui du préfet des Serdaigles, Ashton Chipperfield. Comme la plupart des élèves peuplant le château, il ne le connaissait que de nom. Un beau garçon, plutôt populaire, artiste qui plus est. Le genre de garçon qui attirait la lumière et dont on remarquait la présence dans une pièce. Etant donné que Gwendolyn aimait prendre de la place dans une pièce, il pensait qu’elle serait attirée par le genre de personne qui matche son énergie. Quelqu’un qui puisse être à son niveau peut être. Il se trompait surement puisqu’elle semblait très surprise en entendant le nom. Il hocha la tête pour valider ses questions. Ils parlaient bien de la même personne. Elle le compara presque immédiatement avec les critères qu’elle lui avait donné précédemment. Celui-ci ne les remplissait pas tous apparemment.

– Il vit et respire pour le chocolat ?

Répéta-t-il visiblement confus. De ce qu’il comprenait le chocolat semblait être une métaphore pour l’attachement et le romantisme. Était-ce comme cela qu’elle voyait le serdaigle ? Il était musicien, donc peut être aimait-il charmer les demoiselles grâce à ses chansons. Pouvait-on considérer cela comme du romantisme ? Peut-être. Mais son côté artiste ne pouvait-il pas le rendre fougueux aussi ? Donc le genre de garçon qui ne veut pas s’attacher ? Donc possiblement sur la même longueur d’onde que Gwendolyn ? Au fond, il n’en savait rien. Même s’il avait lui-même cité ce prénom, il ne connaissait absolument pas ce type, ni de près, ni de loin.

Mais Gwendolyn reprit la parole et avec cela, son lot de questions. Elle lui en posa deux cette fois-ci. Il la regarda un instant. Planté, comme un idiot. A cause de l’alcool, mais aussi parce qu’il ne s’attendait pas à se faire questionner sur ses motivations à chaque fois qu’il ouvrait la bouche. Il haussa les épaules. Il voulait juste qu’elle parle pour que lui n’ait pas à parler, en théorie, il n’avait pas pensé plus loin que cela. Mais maintenant qu’elle essayait de creuser, il ne pouvait pas lui dire qu’il n’en savait rien et continuer à se taire, non ? Une gorgée de plus … au bout d’un moment, il n’aurait plus besoin de réfléchir à ses réponses, l’alcool s’en chargerait.

– Parce qu’ils se font remarquer, un peu comme toi, j’imagine.

Ils parlent beaucoup. Elle parle beaucoup. Un point commun déjà. Il haussa une nouvelle fois les épaules.

– Non il y a pas que le physique, mais il y a l’aura derrière tu vois. Un type qui prend de la place, qui attire les regards, qui sait où il va, ça fait forcément un peu plus rêver qu’un type qui va se cacher dans la bibliothèque pour pas qu’on le remarque.

Bailey ne se cachait certainement pas à la bibliothèque. C’était le sanctuaire des têtes de classe, et il ne tenait clairement pas à se perdre là-bas.

– Mais t’inquiète, je disais pas ça pour t’insulter.

Essaya-t-il de la rassurer, ne sachant pas vraiment comment elle allait prendre ses paroles. Il n’y avait pas un méchant fond, mais parfois il pouvait se montrer assez maladroit dans ses propos.

Il haussa les épaules. Encore une fois. Visiblement c’était le mouvement qu’il adoptait lorsqu’il ne savait plus quoi dire ou quoi faire face aux paroles de la jeune femme. Il ne cherchait pas à l’insulter. Mais il ne tenait pas à ce que ses paroles soient mal comprises. Il ne sous-entendait pas qu’elle puisse être une fille superficielle à s’intéresser à des garçons attrayants, juste qu’elle pouvait surement se complaire avec des personnes de son niveau sonore. Dans tous les cas il partageait son avis sur la futilité d’être intéressé par une personne que l’on ne connaissait que trop peu. Mais encore une fois, il ne connaissait pas assez la serpentard pour savoir de qui elle était proche ou non. Aujourd’hui était sans doute la première fois qu’il entretenait une conversation aussi longue avec sa camarade malgré le fait qu’ils aient été dans la même équipe pendant toute une année. Bailey n’avait pas cherché dans le passé à s’intéresser plus que ça à la demoiselle. Il restait dans son coin. A vrai dire, l’an passé, il ne se souvenait pas avoir eu de grandes discussions avec qui que ce soit. Même Skyler, l’ancienne capitaine de l’équipe … Il ne lui parlait que très peu, ou alors rapidement pour échanger quelques mots sur un match ou un entrainement. Dans tous les cas, Bailey ne la pensait pas si superficielle que cela. Après tout, elle démontrait vouloir aller plus loin dans ses relations avec autrui en cherchant leurs secrets, ce qui indiquait donc sa résolution à aller plus loin que le superficiel. Appréciait-il ce genre de comportement ? Il ne le condamnait pas … du moins tant qu’il ne se trouvait pas être la victime. Il entendit son rire, ce qui le fit sourire quelque peu.

L’alcool commençait à doucement faire effet sur lui. Il lui montait à la tête, commençant à embrouiller son esprit et ses pensées pour l’emmener dans un état plus ou moins second, plutôt agréable. Son regard se perdait dans le vide alors qu’un faible sourire quelque peu béat commençait à s’inscrire sur ses lèvres. Loin de ses soucis, il pouvait respirer, et appréciait chaque brise de vent qui venait lui caresser doucement le visage. Pas un seul instant, il ne s’inquiétait des conséquences de ses actes. Pas une seconde il ne pensait au moment où il devrait rentrer au château en toute direction. Car cela n’avait plus la moindre espèce d’importance. L’important désormais était de se laisser aller dans cette sensation de plénitude.

Plénitude qui se stoppa presque immédiatement. Même s’il ne fixait pas la demoiselle à ce moment précis, il sentit son corps se tendre subitement. Elle venait de se rapprocher dangereusement de lui. Il sentit sa respiration changer, comme si l’anxiété remontait doucement prêt à s’emparer de lui. Et ses pensées qui l’avaient lâché quelque peu grâce à l’alcool se cognait dans son esprit. Il se retrouvait à nouveau coincé … avec cette sale impression que la pièce (qui en théorie n’existait pas) se refermait peu à peu sur lui. Elle attrapa la bouteille de whisky de ses mains. Prisonnier une nouvelle fois de ses ressentis étranges, il se poussa rapidement pour remettre une distance de sécurité entre eux, dans un geste saccadé, un peu trop rapide, un peu trop urgent. Il savait que son comportement pouvait porter à questionnement. Mais sur l’instant, il ne pensait qu’à bouger pour retrouver un semblant de paix intérieur, dans son esprit, et dans son corps. Une fois qu’il se trouvait séparé ‘physiquement’ de la demoiselle, il expira. Ce mouvement semblait détendre son corps qui se calma, pour laisser cette sensation d’étouffement disparaitre peu à peu. Il se sentait stupide. Et avait l’impression également de se donner en spectacle. Pourquoi ne pouvait-il pas être comme n’importe quel adolescent de son âge ? Pourquoi devait-il souffrir d’une anxiété dévorante à l’idée que son corps puisse être proche de celui de quelqu’un d’autre ? Normalement, il devrait être content, voir excité à l’idée qu’une jeune fille se déplace pour n’être qu’à quelques centimètres de lui … mais lui, il paniquait à cette idée même, et manquait de faire une crise juste à l’idée qu’on puisse l’effleurer. Il se trouvait pathétique.

Pour autant, cet enchainement d’actions étrange allait forcément mettre la puce à l’oreille de Gwendolyn ou du moins attiser sa curiosité sur le pourquoi du comment Bailey Dawson avait agi aussi bizarrement. Pour essayer de palier à ce moment, il essaya de se vider la tête et reprendre le cours de la discussion. Après tout maintenant qu’il se trouvait à nouveau dans son espace, il se sentait bien mieux.

– J’aime bien.

Acquiesça-t-il. Parfois il avait la sensation qu’il ne pouvait être quelqu’un de normal sans un peu d’alcool dans son corps. Et d’autres fois, comme aujourd’hui, il se rendait compte que même en buvant, il ne suffisait que d’une action pour l’enfermer à nouveau dans ses maux.

Mais elle lui donna une occasion d’oublier ce qui venait de se passer en se rappelant de ce qu’il lui avait montré à leur arrivée dans le parc : les fameuses billes qu’il avait dégoté grâce au serveur des trois balais.

– Apparemment c’est des billes slash shot d’alcool. C’est le serveur des trois balais qui me les a refilés. Apparemment et je cite ‘c’est grave de la bombe, ça te retourne le cerveau en dix secondes’. Tu veux essayer ?

Le serveur était un ancien élève de l’école, connu pour sa vie assez chaotique. Bailey ne trainait certainement pas avec lui à l’époque, mais il savait qu’il avait une sacrée réputation que ce soit dans le milieu des fêtes ou même des filles. Le serpentard fouilla dans son sac pour en ressortir deux billes. Il n’avait aucune idée de quel genre d’alcool il y avait dedans. Maus au point où ils en étaient … ? Pas sûr que ce soit la meilleure des idées sachant qu’ils étaient censés retourner au château. Mais à ce moment précis, Bailey n’en avait plus rien à faire. Il espérait juste que le sujet soit assez intéressant pour que Gwendolyn oublie à quel point il était un looser et qu’il avait flippé à l’idée qu’elle se rapproche de lui de quelques centimètres.

– Je commence à être un peu défoncé, mais clairement pas assez pour pas être chelou.

Mais clairement assez pour dire ce genre de chose à voix haute. Et il plaça l’une des petites billes dans sa bouche. Il sentit un petit ‘pop’ et le liquide brûla sa gorge.