Le retour à Poudlard était toujours un moment particulier : le temps filait à toute allure, ne laissant à Saige que peu de moments où elle avait réellement l’impression de pouvoir simplement flemmarder. Il y avait simplement trop de choses à faire et elle traînait sûrement trop longtemps au lit le matin ce qui n’arrangeait en rien son emploi du temps. Mais elle aimait ça : cette effervescence et le sentiment d’avoir une vie bien remplie, c’était le meilleur des remèdes contre l’aigreur de la monotonie.

Tous les ans depuis sa deuxième année, elle rêvait d’intégrer l’équipe de quidditch de sa maison mais jamais elle n’y était encore parvenue. Une première fois, on l’avait simplement refusée : son balai était trop lent, elle était encore très jeune et inexpérimentée et était face à une équipe déjà bien constituée de l’année précédente. L’année d’après, elle avait été malade comme un chien le jour des sélections ; le plus drôle dans cette histoire, c’est encore que ça n’avait rien à voir avec une quelconque malédiction ou autres problèmes chroniques – qui n’existaient de toute façon pas – elle avait juste joué de mal chance et choppé le premier virus qui passait par là. Et l’année dernière... elle s’était dégonflée. Après deux échecs pour des raisons différentes, elle avait juste craint d’affronter une énième déception. Mais cette année, elle comptait bien changer la donne et pour ça, elle devait mettre toutes les chances de son côté. Elle était même allée jusqu’à se lever plus tôt un week-end exprès pour ça, ce qui était déjà un bel effort méritant reconnaissance... reconnaissance qu’elle n’allait en tout état de cause pas recevoir d’Azure, celle-ci rouspétant vaguement alors que Saige se préparait dans le dortoir.

Après son petit-déjeuner, elle n’avait pas traîné pour rejoindre le terrain de quidditch : il fallait tout de même traverser une bonne partie du parc et elle ne voulait pas faire attendre plus que de nécessaire son coatch du jour. Bailey semblait avoir choisi le meilleur moment pour leur petit entraînement : le ciel promettait une douce matinée, sans averse, et il faisait déjà plutôt bon malgré l’humidité de l’air.

Sans grande surprise, le serpentard était déjà là, l’attendant au pied des gradins. L’adolescente s’approcha de lui d’un pas rapide, le visage illuminé d’une expression enjouée.

- Salut Bailey !

Le garçon était un peu plus âgé qu’elle mais ça ne les avait pas empêchés de sympathiser au détour de quelques conversations ces derniers jours. Elle avait été malgré tout un peu surprise qu’il lui propose si facilement de l’aider un peu en vue des sélections, mais sans doute pas assez pour refuser une telle aubaine.

- Tellement prête que je vais t’en faire baver aussi, rétorqua-t-elle en souriant.

C’était assez ambitieux de sa part, lui-même ayant déjà intégré l’équipe de sa maison par le passé, mais Saige avait confiance en ses capacités : objectivement, elle était faite pour être dans les airs depuis sa naissance. Elle était un oiseau. Pas tout le temps certes, mais une partie de son temps tout de même et c’était déjà plus que l’intégralité des joueurs des quatre équipes. Bien sûr, elle pouvait difficilement utiliser cet argument contre le nouveau capitaine des gryffons mais elle comptait sur sa rage de vaincre pour palier à ce petit souci. Et à celui de son balai, qui était encore celui de l’école ; elle économisait pour s’en acheter un nouveau et grâce aux plans de Silas, peut-être qu’elle allait pouvoir réunir la somme suffisante plus tôt que ce qu’elle avait prévu !

- Oui, une question ! Enfin plutôt un avis, répondit-elle. Elle lui montra son balai. « J’ai pas encore pu m’acheter un nouveau balai, donc j’en utilise un de l’école mais d’ici le premier match, si je réussis les sélections, je compte bien m’en acheter un nouveau... tu penses que pour le capitaine, c’est pas trop rédhibitoire de me voir débarquer avec cette brindille si je lui explique... ou vaut mieux que j’en emprunte un mieux à quelqu’un le jour J ? »

Plusieurs potentiels concurrents chez les lions étaient infiniment plus fortunés qu’elle et avaient sûrement des balais derniers cris, ce qui était un avantage majeur – et fortement injuste si on lui demandait – qu’ils avaient sur elle. Si elle était directrice de Poudlard, elle aurait sûrement imposé l’usage d’une même marque de balai pour tout le monde, fournis par l’école : ainsi seules les capacités primaient sur la taille du porte-monnaie.

- Je suis fauchée donc il me faut du temps pour économiser de quoi m’acheter la Rolls-Royce du balai, ajouta-t-elle en riant.

Ce n’était pas avec ce que sa mère gagnait autrefois qu’elle avait pu hériter de quoi que ce soit.

Saige possédait un franc-parler assez louable, de ceux-là qui lui donnaient un air facilement décomplexé sur beaucoup de sujets. Le fait est qu’elle l’était en partie, n’ayant réellement honte que de peu de choses ; le manque d’argent avait été durant un temps un domaine qu’elle avait dû mal à évoquer en public, surtout à une ère où certains de ses camarades et amis n’en manquaient pas. À présent, elle avait délaissé ce complexe inutile : ça ne lui apporterait pas d’argent et elle ne pouvait pas se prétendre plus riche qu’elle ne l’était réellement. En outre, entre Teddy qui n’était pas bien fortunée et Silas qui semblait désormais lui aussi partager le même souci monétaire, elle se sentait bien plus libre d’en parler, d’abord avec eux puis avec tout le monde.

En grandissant, elle s’était fait une raison : elle n’allait pas devenir riche du jour au lendemain, et ce n’était ni avec les anciens petits boulots de sa mère ni à présent qu’elle était orpheline qu’elle allait toucher le pactole. Bien sûr, depuis qu’elle vivait chez les Shaw, la donne avait quelque chose changée, mais quand bien même Ed et Lucy recevaient une aide financière pour faire famille d’accueil, elle n’escomptait pas pour autant demander d’eux qu’ils financent ses caprices. C’était à elle de s’en occuper. Pour l’heure, ses économies n’étaient pas encore tout à fait au rendez-vous et elle savait bien, au fond, qu’il lui faudrait encore plusieurs mois avant d’avoir assez pour s’acheter un balai un tant soit peu meilleur que celui qu’elle utilisait actuellement... mais avec les potions de Silas et son nouveau rôle de vendeuse sous-traitante, elle espérait bien pouvoir accélérer un peu la chose. D’ici là, elle allait devoir faire avec son bolide rapiécé et un peu trop lent proposé par l’école, un vieux balai qu’elle suspectait d’avoir été utilisé par au moins six générations de sorciers avant elle. Et ça... eh bien, ça la complexait un peu. Pas parce qu’elle était pauvre, non, mais parce qu’elle était de fait moins bien équipée et donc moins efficace qu’un élève de même niveau qu’elle qui possédait un bolide de meilleure facture.

S’enquérir de pareilles complications avec Bailey était relativement aisé, sans doute parce qu’elle avait inconsciemment noté que l’objet qu’il tenait ne semblait pas sortir de l’usine. Le bois semblait rêche et les poils abîmés, comme un balai qui avait connu maintes compétitions et sûrement plusieurs aléas de vol. Elle opina du chef à son premier conseil : être en confiance et ne pas stresser étaient très certainement ses préoccupations principales pour les sélections. Elle se savait douée pour voler ; après tout, elle était un oiseau une partie du temps, au sens le plus littéral du terme, et avait toujours aimé lutter contre le vent pour avancer, survolant les longues étendues d’herbes, de forêt ou de toits. La seule discipline scolaire où un splendide « optimal » figurait sur son dossier scolaire était le vol aussi sur le papier était-elle particulièrement apte à jouer dans une équipe de quidditch. Dans la pratique, ce sport souffrait d’une cruelle inégalité qui la frustrait autant qu’elle s’en inquiétait. Peut-être devrait-elle effectivement demander à quelqu’un d’utiliser son balai, juste pour le jour J... Kenneth, peut-être ? Leurs sélections n’étaient pas le même jour, après tout.

- Ah, toi aussi tu joues avec les brindilles de l’école ?

Cela expliquait l’état de son bolide. Tout d’un coup, le serpentard lui paraissait encore plus sympathique qu’avant : ils partageaient la même passion et le même handicap pour exercer celle-ci.

- Je ne vais pas te cacher que ça me rassure... rajouta-t-elle en riant. « J’avais peur qu’utiliser les vieux trucs de l’école soit un gros problème pour le quidditch. »

Saige avait beau fanfaronner un peu en disant qu’elle comptait bien s’en procurer un nouveau d’ici le premier match de la saison, rien n’était moins sûr : même sans viser le balai dernier cri, un modèle qui soit un peu plus récent et efficace que celui qu’elle utilisait actuellement coûtait déjà une petite fortune.

- Ma mère m’avait toujours promis d’essayer de m’en acheter un, mais on a jamais eu assez. Ça fait cinq and que j’économise presque tout mon argent pour ça, à quelque chose près.

Elle leva un peu plus haut son propre balai – enfin celui prêté par l’école – se donnant très vaguement des airs de conquérants.

- Mais si tu me dis que tu as fait toute la saison avec un de ces machins, alors tu m’as convaincu de brandir fièrement ce vieux machin aux sélections. Au diable les gosses de riches, je veux bien leur laisser le pognon, nous on a le talent !

Il en fallait peu pour que la lionne en elle se réveille. Elle n’avait pas à avoir honte d’être fauchée depuis sa plus tendre enfance : sa mère et elle s’étaient toujours battues pour vivre au mieux avec le peu qu’elles avaient et malgré la malédiction, elle escomptait bien continuer ainsi.

Il n’y avait sûrement rien de mieux que de confier un peu ses doutes pour qu’ils s’envolent au bénéfice de quelques paroles rassurantes. Saige n’avait pas besoin d’être riche pour être douée sur un balai, elle l’avait toujours su, mais il était indéniable que ce sport était grandement impacté par la qualité des équipements ; entendre l’expérience de Bailey et son intégration dans l’équipe, l’an passé, malgré une brindille de bas prix, était on ne peut plus réconfortant. Après tout, sans doute étaient-ils nombreux à s’en contenter. Elle n’abandonnait pas l’idée de s’en procurer un de meilleure facture, un jour, mais cela ne lui paraissait plus si urgent que cela... si elle pouvait s’affirmer avec un équipement moins bon, sa fierté n’en serait que plus grande et sa place renforcée comparée à celles des plus fortunés de leurs camarades.

Ça n’était pas comme si elle avait vraiment le choix, de toute manière ; sa mère n’avait jamais eu suffisamment pour le lui offrir, malgré sa promesse. Elle avait essayé mais le temps avait joué contre elles et désormais la gryffondor se retrouvait seule à gérer... il y avait bien sa famille d’accueil, mais en l’espèce, ils ne comptaient guère. Elle n’aimait pas l’idée de trop leur en demander ; ils étaient déjà si gentils et prévenants avec elle, elle ne pouvait en prime exiger d’eux qu’ils pourvoient à chacune de ses exigences.

- J’imagine qu’elle fait ce qu’elle peut pour pouvoir réaliser cette promesse un jour, souffla le serpentard d’un ton doux.

Elle ne lui répondit d’abord que par un sourire discret, ne sachant trop quoi dire. Ça ne serait pas la première qu’elle clame de but en but le décès de sa mère ; excédée, elle l’avait déjà fait pour mettre fin aux questions de ses camarades, anéantissant toute velléité de curiosité par ce profond moment de gêne qui avait suivi la révélation... mais cette époque de sa vie était lointaine et Bailey ne se montrait pas si intrusif qu’elle veuille le mettre mal à l’aise. En outre, c’était partiellement un mensonge...

- Oui, on peut dire ça... se contenta-t-elle de répondre, éludant la question avant de rebondir aussi sec sur la question du quidditch.

Elle opina vigoureusement du chef face à sa remarque : croire en son talent et être fière de ce qu’elle entreprenait, c’était là certaines des caractéristiques qui allaient bien aux gryffondors, après tout ! Et il avait raison : eux au moins n’auraient jamais à douter des raisons de leur présence dans l’équipe, pour peu qu’ils soient recrutés. Bailey, c’était presque assuré ; il en avait déjà été membre de l’année dernière, il avait de l’expérience !

- Le rôle de batteur me fait pas mal de l’œil, répondit-elle après quelques secondes de réflexion. « Faut croire que j’aime bien cogner sur la tête des gens. Ou poursuiveuse ? Ce sont les postes qui m’iraient le mieux, je pense... je m’ennuierai comme gardienne et je n’aime pas trop travailler en solitaire. »

Saige n’avait aucun doute quant à sa capacité à être une bonne coéquipière ; elle était vivante et attentive, travailler de concert avec d’autres personnes était comme une seconde nature. Elle le faisait déjà pour certains de ses devoirs après tout, quitte à tricher un peu en plusieurs, alors pourquoi pas sur un terrain de quidditch ? Cela étant, elle n’était pas très difficile et sa priorité était avant tout d’intégrer l’équipe... le reste était superflu, secondaire.

- Et toi ? Tu étais poursuiveur, l’année dernière, c’est ça ? Tu vises toujours le même poste ?

Trêve de bavardages, il était temps de rentrer dans le cœur du sujet. Ils étaient là pour voler, après tout ! Empoignant son balai, elle rendit son sourire au serpentard, bien décidé à lui montrer ce dont elle était capable.

- Allez, faisons ça !

La vitesse, ça lui connaissait ; elle était née pour ça, née pour voler et battre des ailes furieusement... ou se pencher toujours plus sur son balai pour accélérer jusqu’à ce que le vent vienne à vous lacérer le visage. Ou presque.

- On fait un tour de piste tranquille et ensuite on se lance ? Le premier qui traverse le terrain en entier a gagné ?

Le premier tour pour réveiller les muscles et se réhabituer à voler sur leurs brindilles, avant d’entamer les choses sérieuses et foncer droit vers la victoire. Saige avait une âme joueuse, elle aimait se rajouter quelques petits défis et tester ses capacités face à un joueur de quidditch plus aguerris qu’elle était un bon début.

Une fois d’accord sur la marche à suivre, tous deux décolèrent. Le vent frais souffla contre elle, faisant légèrement dévier son balai sur la droite avant qu’elle n’en reprenne pleinement le contrôle. Les cheveux emmêlés par la brise, quelques mèches vinrent se glisser devant ses yeux, avant qu’elle ne les rabatte en arrière d’un geste de la main. Le premier tour se fit tranquillement, d’abord assez lentement puis elle accéléra progressivement, le temps de reprendre ses marques et de réveiller la machinerie magique de son balai sans trop forcer dessus. Enfin, elle rejoignit Bailey à une extrémité du terrain.

- Prêt à te faire humilier par la prochaine meilleure joueuse de gryffondor ? lança-t-elle en rigolant. « Le premier qui traverse l’anneau central de l’autre côté du terrain a gagné ! »

On ne peut plus simple, comme consigne.

Les craintes assez naturelles de Saige envolées, il ne semblait presque plus y avoir d’obstacle entre elle et son futur poste dans l’équipe. Confier son projet à Zola, puis à Bailey le rendait concret et plausible. Ça n’était plus un rêve d’une pré-adolescente à l’avenir incertain mais un but bien réel pour une adolescente qui n’avait pas grand-chose à perdre. Ce poste, elle désirait ardemment l’avoir et elle avait au moins confiance en sa force de conviction pour la porter jusqu’aux sélections... le reste, eh bien, ça n’était peut-être plus tout à fait de son ressort. Mais c’était possible, comme en témoignait la présence du serpentard dans sa propre équipe, malgré un balai qui ne favorisait guère plus sa réussite.

Rassurée, elle expliqua son plan d’avenir : batteuse ou poursuiveuse, elle n’était pas si difficile que ça, quand bien même elle lorgnait sur le premier rôle avec un intérêt tout particulier, ses iris brillant presque d’une lueur rêveuse quand elle en parlait. Quoi qu’il en soit, elle était une fille profondément sociale, aimant jouer en groupe et coopérer, aussi les deux autres postes étaient-ils complètement à exclure.

- Promis, je viserais en priorité tes coéquipiers alors, rétorqua-t-elle en riant doucement. « De toute façon, je n’ai pas besoin de mettre à terre toute l’équipe, la moitié suffira. »

Et si elle y parvenait, peut-être envisagerait-elle une carrière dans le quidditch... c’était bien la seule profession qu’elle pouvait viser avec ses notes actuelles. Une carrière assez brève qui allait de pair avec ses espérances de vie humaine, quelque part. Qui a dit qu’il n’était pas permis de rêver ? Pas elle, en tout cas. Elle pouvait se montrer d’un fatalisme déprimant, mais quelque part en elle, il y avait toujours cette petite fille qui avait tant espéré aller à Poudlard au point de batailler des jours durant avec sa mère.

- Outch... c’est si compliqué que ça, avec votre capitaine ?

Elle avait beau être dans la même classe que Jin Kyung, il n’avait jamais été de ces camarades qu’elle fréquentait beaucoup... parce qu’il était arrivé en cours de scolarité, d’une part, mais surtout parce qu’il semblait aussi aimable qu’une porte d’Azkaban. Sans compter qu’il fallait être aveugle pour comprendre qu’il ne donnait pas l’air de vouloir fréquenter des gens comme elle. Elle devait être trop vulgaire et pauvre pour monsieur Coréen-Sang-Pur-De-La-Haute. Bon, ok, elle fréquentait aussi des gens comme August, dont l’éducation ne devait pas être si différente que celle de Seo, mais il savait rigoler, lui. Il ne fréquentait pas que des gens dont on craignait que le visage se fissure à la moindre esquisse de sourire.

- Toutes les équipes se doivent d’avoir un jour un capitaine psychopathe, j’imagine. Chez gryffondor, on a eu Sherwin, il devait pas être beaucoup mieux... bon et poufsouffle, ils ont eu Sørensen et Sheperd, eux ça devient pathologique, énuméra-t-elle, un sourire rieur aux lèvres. « Y’a que serdaigle qui est tranquille, mais vu leur réussite l’année dernière, on devrait changer leur emblème pour une poule, ça serait plus crédible. »

Ça n’était pas très charitable de tirer sur l’ambulance, mais puisqu’il n’y avait pas de bleu pour l’entendre, personne n’allait s’en offusquer. Ils n’étaient pas là pour commenter les équipes adverses, cela dit, mais bien pour s’entraîner et réussir leurs sélections respectives. Après un bref échauffement, mue par un élan de compétition, Saige le charia un peu, provocant une petite course pour leur donner un peu de motivation. Pour l’heure, puisqu’ils n’étaient qu’à un banal entraînement, il n’y avait nulle raison de paniquer et d’angoisser ; seul le jeu comptait, et quoi de mieux pour les stimuler un peu que de se donner quelques défis ?

- Moi ? Présomptueuse ? JA-MAIS ! rétorqua-t-elle faussement avant de s’élancer sur son balai.

Si son départ fut très bon, Bailey n’était pas en reste et fila rapidement devant elle, au plus grand désespoir de la jeune fille. Elle eut beau forcer sur son balai pour le rattraper, il avait profité, au bon moment, des faveurs du vent pour prendre une avance qu’elle ne put jamais rattraper. Il arriva en premier à la fin de la course, tout sourire.

- J’ai dû la délester en chemin, elle m’alourdissait, rétorqua-t-elle, sans se vexer. Saige était une bonne compétitrice mais elle n’avait pas grand-chose d’une mauvaise perdante.

Mine de rien, ça faisait du bien de remonter sur un balai et de sentir le vent siffler dans ses oreilles. Pendant les vacances, les occasions de voler n’étaient que celles, rarement aussi agréables, de ses transformations en faucon ; cette raison suffisait à voir la fin des vacances et le retour à Poudlard comme une bonne chose, qu’elle attendait alors avec impatience.

- Let’s go !

Là, ils commençaient sérieusement les choses avec les tirs au but. C’était un exercice auquel ils allaient sans nul doute devoir se livrer pour les sélections... un moment qu’ils ne pouvaient se permettre d’échouer s’ils voulaient obtenir – ou conserver pour le serpentard – une place dans l’équipe.

Déjà presque en place, Saige décala son balai de quelques centimètres sur la droite, pour se placer bien au centre devant les anneaux et couvrir le plus large terrain possible, tandis que Bailey s’éloignait avec la balle. Elle ne visait pas le poste de gardien, mais intercepter le souafle était malgré tout une part du travail de poursuiveur et cela lui permettait de travailler ses réflexes et sa coordination.

La gryffondor fixa son regard sur lui, scrutant chacun de ses mouvements, jusqu’à ceux même de ses iris pour apercevoir où il visait... quoique de là où elle était, malgré sa très bonne vue – qu’elle mettait souvent au bénéfice de la malédiction quand bien même elle n’en savait fichtrement rien – elle ne pouvait guère voir grand-chose des yeux clair du garçon. Trop accaparée sur ça, et pas assez sur le souafle, elle ne réagit pas suffisamment rapidement et louper celui-ci de quelques bons centimètres, ne l’éraflant même pas des doigts alors qu’elle jetait son balai sur le côté pour l’intercepter.

- Bien joué ! encouragea-t-elle en récupérant la balle pour la relancer en direction du serpentard.

Et aussi sec, il repartit à l’assaut de ses anneaux, mais cette fois-ci sans succès. Cette première interception réussie lui donna un peu de baume au cœur et elle se sentit progressivement gagner en confiance, réussissant à rattraper une deuxième, plus une troisième balle. La suivante, en revanche, fila droit vers l’anneau central dans un tir parfaitement exécuté et un peu humiliant pour Saige qui s’était laissé berner par la trajectoire légèrement en biais et avait plongée vers l’un des anneaux latéraux. Après une dernière à son avantage, elle rejoignit son camarade, souafle sous le bras, plutôt contente de ses arrêts.

- Peut-être que je devrais viser le poste de gardien, finalement, ria-t-elle de bon cœur. « À mon tour ! »

Elle lui laissa le temps de rejoindre les anneaux, driblant dans les airs quelques instants avec la balle – non sans manquer de le faire tomber dans le vide au moins deux fois – puis se posta, prête à attaquer.