Si la Terre tourne. Noah

Si la Terre tourne

Noah & Judith

« Tu tournes avec elle. »

Un exil. Voilà ce que c’était. On m’avait forcée à partir pour des raisons obscures. Pensait-on qu’un peu d’air frais suffirait à effacer tout cela ? Ou que ma peine n’était pas aussi légitime que celle des autres membres de la famille ? Je ne trouvais aucune explication logique. Aucune explication que je sois en capacité d’entendre. Je voulais voir la Norvège. Me réfugier dans des coins que moi seule connaissait. Entendre l’accent chantant des pêcheurs qui revenaient au port. Observer à m’y noyer la beauté de ma terre natale. Et oublier. Si seulement cela avait été possible. Chaque matin, au réveil des nuits courtes, la douleur me prenait à la gorge. Une douleur sourde que je n’avais jamais ressentie jusqu’à présent. Une énorme boule grossissait tout au fond de moi et bientôt elle m’étoufferait si je ne trouvais aucun moyen de la vaincre. Mais j’étais coincée ici. Au milieu de personnes que je connaissais à peine et qui pour la plupart me méprisait pour mon nom de famille. Les rires des adolescents me mettaient hors de moi. J’avais envie de hurler sur la moindre forme humaine qui croisait ma route. Ce qui aurait été totalement inutile en fin de compte. Comme tout ce que je pouvais faire par ailleurs.

Alors j’errais. Depuis une semaine que nous étions là, j’errais. J’avais exploré de fond en comble tous les alentours du campement. Je marchais, sans savoir où j’allais, juste pour être seule. J’avais évité le village et tous les lieux susceptibles d’accueillir une autre présence. J’avais arpenté des centaines de sentiers, m’étais perdue au milieu d’arbres innombrables et malgré l’état pitoyable de mes chaussures et de mes pieds, je continuais sans relâche. Tant que je restais en mouvement, l’énorme boule restait tapie. Dès que je cessais mon manège, elle reprenait le dessus et emplissait tout l’espace jusqu’à ce que je manque d’air. Je n’avais pas ouvert un seul livre depuis le début de l’été. Tout était resté au fond de mon sac et prenait la poussière. Les lettres n’avaient plus de sens. Elles dansaient devant mes yeux sans s’articuler entre elles et mon esprit n’accrochait rien. Et de toute façon, la seule vue d’une estampe de plante quelconque me donnait la nausée.

Il devait être presque midi à en jauger par la position du soleil et par la chaleur relative qui régnait. J’étais partie du camp aux aurores, une gourde et un quignon de pain dans le sac, un short et un vieux tee-shirt blanc sur le dos. Au bout de quelques mètres seulement, mes pieds m’avaient rappelé que la semelle de mes chaussures ne tenait plus qu’à un fil. Je sentais chaque caillou du chemin, chaque racine en travers de ma route. Et à présent que la matinée se terminait, tout le sentier semblait être fait de braises ardentes. Ma peau, peu habituée à la lumière du jour, était rougie aux endroits qui n’étaient pas masqués par un vêtement. Quelle fière allure Judith ! Si ma grand-mère m’avait vue, elle aurait certainement poussé de grands cris. Mais elle ne me voyait pas. Et c’était par ailleurs entièrement sa faute si je me trouvais ici, à arpenter des ares de forêt écossaise. Un bruit d’eau attira mon attention. Non loin, derrière quelques buissons épineux, le terrain descendait en pente douce jusqu’à une plage de galets. La berge était calme, il n’y avait personne. Je déposai mon sac contre un rocher et retirai ce qui me restait de basket. Je plongeai mes pieds dans l’eau fraîche. Le froid eut tout d’abord le même effet que les pierres brûlantes. Mais la sensation s’estompa rapidement pour laisser place à l’apaisement. Un apaisement physique. Car à l’intérieur, la boule avait senti que le moment était propice et je la sentais grandir de nouveau, compresser ma poitrine et vider mes poumons de leur air.

(c) DΛNDELION

Si la Terre tourne

Feat @Judith V. Sørensen

Je referme la porte de la cabane que j’occupe sans jeter le moindre regard à mon colocataire encore endormi. C’est calme autour de moi et les premiers rayons du soleil se font voir timidement. Je ne sais pas quelle heure il est mais tout le monde doit encore dormir alors que je ne supportais plus de tourner dans mon lit, incapable de fermer plus longtemps les yeux, les mots de Daria encore bien trop présents dans mon esprit. Elle part. Elle s’en va pour de vrai. Je n’arrive toujours pas à l’intégrer réellement. Et pourtant je suis bien conscient que je ne reverrai pas à la rentrée prochaine. rien que d’y penser me serre le cœur et j’agrippe avec plus de force la lanière de mon sac avant de me mettre en marche. Je profite que tout le monde dort encore pour partir me balader seul à la fois pour fuir les autres mais également prendre le temps d’encaisser l’une des nouvelles qu’il m’a été la plus dure à entendre.

Je laisse mes pas me guider sur le sentier tout en faisant attention à la route empruntée afin de pouvoir trouver le campement au retour. Je m’arrête quelques fois pour immortaliser le paysage qui s’offre à moi, seul le bruit caractéristique de la capture d’image fait écho autour de moi. La lumière est magnifique et les couleurs variées. En temps normal, j’aurai été comblé d’être ici mais ce n’est pas le cas aujourd’hui. A chaque prise de photo, mon sourire finit par se fâner alors que je me dis que je ne pourrai plus prendre Daria entrain de danser ou de sourire, que je devrai profiter du temps qu’il nous reste ensemble pour être avec elle, immortaliser ces moments. Pourtant, je suis là, seul en plein milieu des arbres, un soupir aux bords des lèvres ravalant difficilement les larmes qui menacent de s’échapper.

Le soleil tape plus fort au-dessus de moi, me brûlant sans aucune gêne les bras et la nuque. J’avance péniblement, les jambes ankylosées par les heures de marche. C’est le bruit de l’eau qui me pousse à continuer à l’idée de bientôt pouvoir me désaltérer et profiter de la fraîcheur de l’eau. Après quelques minutes de marche supplémentaires, j’aperçois enfin la source de ce bruit. Derrière quelques buissons, à la fin d’un chemin descendant, se trouve une plage de galets. Je ne sais pas si c’est dû à la précipitation ou à ma maladresse, mais à peine ai-je mis le pied sur la plage, mon pied glisse sur un galet, se tordant sur le mouvement et me précipitant dans une chute lamentable, un hoquetement de surprise sur les lèvres. Frustré et gêné, les mains en sol, je referme mes doigts sur l’un de ces galets et le jette avec force en direction de l’eau sans même regarder ce que je fais. Je relève les yeux que trop tard, lorsque le galet rencontre l’eau dans des éclaboussures bien plus fortes et hautes que je n’aurai cru. Si encore il n’y avait que ça. Les yeux grands ouverts, je remarque qu’à cet instant que je ne suis pas seul et que je viens d’éclabousser - sans le vouloir bien sûr - cette personne.

Je suis désolé ! Je ne vous…

La fin de ma phrase meurt d’elle-même dans ma gorge lorsque j’identifie la silhouette debout les pieds dans l’eau : Judith Sorensen.

Judith ? Je lâche sans m’en rendre compte. Je me sens encore plus gêné. Il fallait que ce soit la petite fille du directeur parmi tous les autres. Je tente de me remettre sur pieds dans la précipitation mais je me retrouve rapidement les genoux à nouveau au sol, une grimace de douleur sur le visage, ma main entourant ma cheville droite déjà un peu gonflée.

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Si la Terre tourne

Noah & Judith

« Tu tournes avec elle. »

La boule prenait de plus en plus de place. Je la sentais grossir au fond de ma gorge. Si je voulais qu’elle rapetisse de nouveau pour retourner tout au fond, tapie dans l’ombre, je devais me remettre en marche. Mais mes pieds n’étaient pas de cet avis. L’eau apaisait les plaies et à l’idée de devoir remettre mes chaussures, mes jambes semblaient soudainement peser plus lourd que du plomb, rendant impossible leur bon fonctionnement. Je voulais bouger mais je ne pouvais plus, quelle ironie ! L’air semblait être de plus en plus dense. Pouvait-on mourir étouffé en pleine nature ? La tristesse pouvait-elle tuer ? C’était des questions que je n’avais jamais rêvé de me poser. Et je ne comptais pas vraiment en découvrir les réponses. Je devais me faire violence pour m’extirper de là et repartir. Le coup de pouce vint de l’extérieur.

Je fus éclaboussée par un élément que je ne reconnus pas de prime abord. Mon premier réflexe, instinctif, fut de sortir ma baguette de la poche arrière de mon short, en une fraction de seconde, me sortant ainsi de mon immobilisme. L’intrus n’était rien d’autre qu’un élève. Un élève de mon âge et de ma maison, que j’avais déjà à plusieurs occasions. A en juger par sa position, il venait de glisser sur les galets. Comment diable avait-il réussi à m’éclabousser ? A vrai dire, cela m’importait guère. La boule qui m’étouffait quelques minutes plus tôt était remontée dans ma poitrine, prête à éclater. « Tu peux pas fairrre attention à ce que tu fais, espèce d’idiot ! » Je ne parlais pas, je criais. Je sortis de l’eau, remontant la berge vers lui, baguette toujours en main. Il était toujours affalé sur le sol. Il m’avait reconnue, ce qui m’énervait d’autant plus. Je n’avais pas arpenté des kilomètres de forêt écossaise pourrie pour me retrouver en tête à tête avec quelqu’un. « Qu’est-ce que tu fais ici ? » L’espace ne m’était pas réservé mais il n’était pas question de logique à ce moment précis. Avisant l’appareil qu’il tenait, ma rage se décupla. « Qu’est-ce que tu fabrrriques avec cet apparrreil ? Tu me suis ? » C’était totalement idiot de penser que quiconque avait pu marcher derrière moi sans se faire remarquer. Mais je n’aurais pas toléré qu’une seule photo de moi dans cet état circule. Et j’avais besoin d’un exutoire à mon chagrin. Noah faisait un défouloir parfait. Il était là, gisant pathétiquement et visiblement incapable de se relever. J’avançais à grande enjambées, oubliant que mes pieds ressemblaient désormais à de la charpie. La fureur était un moteur puissant. Brandissant mon arme juste au dessus de son nez, l’empêchant presque de se lever, je hurlai. « Rrréponds-moi ! »

Si un spectateur passait par là, il aurait pu, l’espace d’un instant, me confondre avec Erin. Voilà à quoi la douleur me faisait ressembler. Etait-ce là l’énergie qui animait ma soeur depuis toutes ces années ? Un mystère de plus qui resterait sans doute sans réponse. Maintenant que Finn n’était plus là, il y avait peu de chance que je recroise un jour le chemin de sa jumelle si je pouvais l’éviter. Sa mort terminerait de me couper du reste de ma famille. Les liens de sang n’avaient pas pu le sauver alors à quoi bon ? J’irais aussi bien seule.

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Si la Terre tourne

Feat @Judith V. Sørensen

Je me sens pathétique, en colère et foutrement triste. Je n’aurai pas dû venir à ce voyage. Comme ça, Blaze ne m’aurait pas soulé pour changer de cabane, je n’aurai pas eu à supporter ce crétin d’artémis et surtout Daria n’aurait pas pu me dire qu’elle partait pour toujours. Je sais que je me voile la face, que je l’aurai su un jour ou l’autre et que cela a dû être dur pour elle de faire ce choix et de me l’annoncer. Mais je ne peux pas contrôler mes émotions et la peine que je ressens face à cette nouvelle. C’est cette frustration, alors que je m’étale sur le sol, la cheville douloureuse, que j’attrape un galet et le balance avec force devant moi sans faire attention à ce qui m’entoure. Ce n’est que lorsque j’entend le bruit de la rencontre du galet de l’eau que je la remarque, cette silhouette : Judith. La gêne prend le dessus alors que je me rends compte avoir éclaboussé la petite fille du directeur. Je tente de me relever pour aller m’excuser auprès d’elle mais une douleur fulgurante se diffuse dans ma cheville et m’oblige à reposer genoux à terre, une grimace sur le visage.

Ses cris ou plutôt ses cris m’arrivent en pleine face et c’est surpris, gêné, que je la regarde vociférer contre moi. Je n’ai pas le temps de dire quoi que ce soit, à peine celui d’ouvrir légèrement la bouche pour tenter de sortir un son, qu’elle est déjà à ma hauteur, me dominant de sa hauteur alors que je reste proche du sol, le regard levé sur elle. Je ne comprends pas tout de suite ses questions et me retrouve même à faire l’aller retour entre son visage et mon appareil photo. Pourquoi diable m’accuse-t-elle de la sorte ? Je sens le rouge me monter aux joues, non pas que par gêne mais par colère. Pourquoi les autres se permettent-ils de me parler de la sorte ? De vouloir toujours prendre l'ascendant sur moi ? Mes doigts se referment un peu plus autour de ma cheville blessée alors que le fin bout de bois pointe avec hostilité dans ma direction. Je serre les dents, la regarde avec une sorte de défiance et un voile de déception. J’en ai marre. Alors qu’elle me hurle dessus de lui répondre, je me redresse d’un bond, bousculant la baguette magique pointée sous mon nez, faisant fi de cette douleur qui me tord la cheville.

Non mais tu me prends pour quoi !? Un stalker ? Pourquoi je te suivrai ? Je crie à mon tour, laissant éclater la colère qui me tord le cœur depuis quelque temps. J’oublie à qui je parle, je me moque même de son nom. Son regard me fait peur, je me sens même légèrement tremblant. Je ne sais pas de quoi elle est capable et si elle est aussi terrifiante que sa sœur, mais moi aussi je ne veux plus me retenir. Le coin t’appartient pas à ce que je sache. J’ai aussi le droit d’être ici ! J’ai pas de compte à te rendre. Mes poings sont serrés le long de mon corps tandis que je refuse de baisser le regard et d’accepter que l’on me parle comme si je ne représente rien d’autre qu’une nuisance.

J’aurai voulu rester ainsi, débout, la dépassant d’une tête facilement et montrer que je ne me laisserai pas faire mais c’était sans compter ma cheville. La douleur est trop forte et m’appuyer dessus est insoutenable. Je fini par craquer et m’asseoir à même le sol. Bordel, ça fait mal… je lance plus à mon attention qu’à la sienne. Légèrement tremblant, de par la colère et la soudaine adrénaline qui s’est immiscée dans mon corps, je retire doucement ma chaussure pour regarder de plus près. c’est à ce moment là que mon regard se pose sur l’état lamentable des pieds de celle qui me fait face. Je grimace légèrement avant d’oser un nouveau regard sur son visage. Tu n’as pas mal toi ? je demande après un moment d’hésitation, tout en lui indiquant d’un geste de la tête, ses propres pieds.

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Si la Terre tourne

Noah & Judith

« Tu tournes avec elle. »

La colère débordait, sans que je ne puisse la contenir. Et à mesure que je déversais ce flot de hurlements, la boule étouffante qui obstruait ma gorge semblait exploser soudainement pour laisser place à une sensation d’intense satisfaction. L’heure n’était plus à la raison et je n’en étais de toute manière pas capable. J’avais juste envie de déverser ma rage sur quelque chose ou mieux, sur quelqu’un. Et qui de mieux que ce garçon, au sol, en position de faiblesse ? La victime était parfaite. Ses réponses ne m’intéressaient pas le moins du monde, j’avais juste besoin d’une excuse pour me défouler. Mais il s’était redressé. Malgré sa cheville visiblement en piteux état, il avait bondi pour me faire face, me criant dessus à son tour. Sa réaction me désarçonna. La colère tomba d’une traite et les larmes me montèrent aux yeux. Je dus me faire violence pour les empêcher de couler. J’étais pathétique. Erin avait raison. Je n'étais qu’un être faible, incapable d’aller au bout de ses actes. Je baissai ma baguette. « Je ne sais même pas ce que c’est qu’un stalkerrr. » A quoi bon s’acharner sur lui ? En définitive, cela ne changerait rien à la situation et si cela pouvait soulager ma peine quelques minutes, cela ne durerait pas. La violence et la souffrance n’étaient sans doute pas les moyens les plus efficaces de parvenir au bout du chemin.

La douleur sembla prendre le dessus et l’obligea à s’asseoir. Dans son malheur, il était chanceux d’être tombé sur la bonne Sørensen. Ma sœur n’en aurait fait qu’une bouchée et d’une cheville foulée, il se serait sans doute retrouvé avec les deux jambes dans le plâtre et un rapatriement illico sur Sainte-Mangouste. « Fais voirrr. » Ce n’était pas très joli effectivement mais pas non plus catastrophique. « Ne bouge pas. » Je levai de nouveau ma baguette en direction de son pied. « Episkey*. » Le bois de ma baguette vibra légèrement et le résultat ne se fit pas attendre, l’ecchymose s’éclaircit et sa peau retrouva une couleur à peu près normale. « Essaie de te lever pourrr voirrr si c’est mieux. » Je n’étais pas sûre d’avoir réussi à soigner l’entorse en profondeur mais ce serait toujours cela. Nous n’étions pas à côté du camp et s’il comptait sur moi pour le soutenir jusque là-bas, il se trompait lourdement. Je voulais bien faire un effort mais ma bonté était limitée.

Je baissai les yeux pour regarder mes pieds. Ce n’était pas beau à voir en effet. Entre la poussière du sol et les coupures et ampoules multiples, on aurait pu me croire partie sur le front pour la guerre. J’avais mal oui mais finalement pas tant que ça. Un peu d’essence de dictame aurait résolu le problème en moins de deux. J’en avais toujours un flacon qui traînait dans mon sac sans fond. Mais je n’avais aucune envie de l’utiliser pour quelque chose d’aussi futile. « Il y a des choses qui font bien plus mal que ça. » Et tout ce qui pouvait m’empêcher de penser à Finn était le bienvenu. J’aurais volontairement taillé des entailles plus profondes encore si j’avais pu avoir l’assurance que cela me ferait oublier le reste.

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*Dé lancé dans le flood

Si la Terre tourne

Feat @Judith V. Sørensen

En à peine quelques secondes, plusieurs émotions se succèdent : la gêne, la surprise puis enfin la colère. Cette dernière prend une place tellement importante dans mon cœur ces derniers temps que je ne suis plus en mesure de la contrôler. Moi qui d’ordinaire aurait serré les dents tout en m’excusant, je me retrouve à me redresser de tout mon long, faisant abstraction pour quelques instants de la douleur qui me vrille la cheville. Faire face à quelqu’un, monter le ton, limite crier n’est pas une chose que je pratique souvent. J’en ai pourtant affreusement besoin. Besoin de tout lâcher. Peu importe la personne qui me fait face. Je me moque de son nom à cet instant. Peut-être que je le regretterai par la suite mais là, maintenant, je n’accepte plus que l’on me traite de la sorte et que l’on m’accuse de tous les maux. Les poings serrés, j’hurle à Judith que je n’ai aucun compte à lui rendre et que je peux bien faire ce que je veux sur cette plage.

Malgré le voile de colère devant mes yeux, je vois la petite fille du directeur changer d’expression, comme… surprise et triste ? Elle finit par baisser sa baguette en m’informant qu’elle ne sait même pas ce qu’est un stalker. J’ouvre légèrement la bouche avant de capituler face à la douleur. Je m'assois à même le sol tout en grognant avant de retirer ma chaussure les doigts tremblants. Je tente de reprendre contenance tout en examinant ma cheville gonflée.

C’est une sorte d’harceleur… Le stalker. Je lâche soudainement, d’un ton revenu à la normale sans attendre ne serait-ce qu'une réaction de la part de la Serdaigle. Cette dernière pose son regard sur ma blessure avant de m’intimer de rester immobile sous mon regard surpris. Le sortilège qui sort de sa baguette enveloppe soudainement ma cheville faisant disparaître quasiment la douleur de cette dernière ainsi que l’ecchymose qui avait marqué ma peau. Sourcils froncés, je passe de son visage à ma cheville avant d’enfiler ma chaussure et me remettre debout doucement. Je pose mon pied délicatement sur le sol jusqu’à constater que seule une légère gêne reste présente. Ca va mieux. Je réponds en reportant mon attention sur elle. Merci.

A son tour, Judith regarde l'état de ses pieds alors que je lui fais remarquer que cela doit être douloureux. D'un ton évasif elle me répond qu'il y a bien plus douloureux que ça. Je veux bien te croire… un soupir au bord des lèvres. Ma relation avec Alexander, l'annonce du départ de ma meilleure amie le sont par exemple…

Mais il vaut mieux les soigner. Je reprend après un moment de silence. Je ne sais pas pourquoi, mais cela me fait de la peine de la voir dans cet état alors qu'elle fait partie de ceux qui m'ont sûrement méprisé cette année. A mon tour, je sors ma baguette et la pointe en direction de ses pieds. EpikseyLe sort fonctionne et ses pieds semblent reprendre une apparence normale.

La colère dissipée, c'est la gène qui reprend le dessus. Je me racle doucement la gorge en m'éloignant d'un pas, mon regard bleu posé sur l'ezu tout aussi bleu qui recouvre les galets.

Je… suis désolé de t’avoir éclaboussé et de t’avoir hurler dessus.

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