— De tous les endroits fabuleux que comptait Poudlard, le balcon du monde était une nouveauté qu’il trouvait bien plus fantastique que chacune des pièces que Wenceslas avait pu connaître, par le passé. Qu’il aurait aimé la connaître, lorsqu’il était élève ! Un endroit où il pouvait choisir où il se trouvait, où le paysage changeait à volonté... le balcon du monde aurait sans nul doute été le refuge attitré du jeune né-moldu. Devenu adulte et même professeur – si on lui avait dit, à l’époque, il ne l’aurait pas cru ! – il se surprenait à y aller, de temps à autre, pour retrouver le plaisir d’un calme olympien. Comme enseignant, il avait dû renoncer au silence constant, mais ici il pouvait y renouer temporairement... et le balcon prenait souvent l’apparence du département des mystères. Un endroit triste et lugubre qui seyait parfaitement au mélancolique né-moldu. Le lieu n’avait pourtant pas la bonne apparence cette fois-ci ; il devait être infiniment plus agréable aux yeux de beaucoup de monde, mais n’était rien de plus qu’un décor comme un autre aux siens. Incontestablement, quelqu’un avait investi les lieux avant lui et les probabilités jouaient en faveur d’un élève... qui ne s’attendait sûrement pas à y croiser l’un des enseignants les moins appréciables de l’école. Peut-être deux élèves avaient-ils prévus de s’y compter fleurette. Cette petite prairie s’y prêtait plutôt bien, et ce feu crépitant donnait une allure très chaleureuse, presque romantique, à l’endroit.

Adolescent, il aurait craint de se retrouver face à une telle situation. L’intru qui venait s’incruster entre des amoureux frappés de la flèche de Cupidon. Il aurait pu être un peu jaloux, lui qui était alors un jeune homme trop solitaire mais dont les hormones travaillaient tout de même. Désormais devenu adulte, ces préoccupations étaient loin. Il se moquait de ces sentiments puérils qui, de toute façon, ne lui avaient jamais trop réussis. Il suffisait de savoir qu’il avait pu s’amouracher d’une femme aux idéaux diamétralement opposés à un né-moldu comme lui pour comprendre qu’il n’était pas fait pour ces choses. Il laissait ça aux autres, aux adolescents.

Son regard se perdit en direction de la silhouette déjà présente. Une jeune femme ; plus totalement une enfant, mais pas encore une adulte. Des cheveux courts et sombre, une cicatrice sur le visage... « Mademoiselle Reid. » Elle était seule. Lui avait-on posé un lapin ? À moins qu’elle ne soit venue pour pleurer son chagrin. Ah les adolescents... lorsqu’on les observait à l’aube de la Saint-Valentin, l’on pouvait penser que tout était si simple pour eux. Mais à Poudlard, rien n’était si limpide et leur vie n’était pas faite que de tendresse et de guimauve. « Vous séchez les festivités aux Trois-Balais ? » Il devrait sûrement quitter les lieux et la laisser... mais son œil s’était posé sur quelques victuailles. Et s’il pouvait se permettre de la laisser se goinfrer de chocolat jusqu’à en finir à l’infirmerie, le vin demeurait une autre affaire. « Je suis pratiquement sûr que cette chose est interdite dans l’école. » L’adulte croisa les mains dans son dos, son visage ne se départant pas de son habituel air froid, mais calme. Nulle colère, nulle réprimande en approche. Il semblait seulement vouloir lui faire la conversation et peut-être était-ce le cas ? Ou alors s’apprêtait-il réellement à lui faire écoper d’une retenue magistrale. On ne savait jamais trop avec lui, sûrement parce qu’il la jaugeait encore avant de prendre sa décision. « À moins, bien sûr, que le directeur ait omis de me transmettre la note mentionnant que les grades or pouvaient s’affranchir de cette règle. » Non. Il restait des choses immuables, parmi lesquelles le fait que l’on ne laissait pas des mineurs se pavaner dans les couloirs avec de l’alcool. S’ils voulaient en consommer, ils pouvaient le faire à l’extérieur et de préférence ne se limiter qu’à la Bièraubeurre, boisson si peu alcoolisé que sa vente était permise aux jeunes générations.

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— Un simple sourire tranquille, sans fioriture ni trace de rire, fendit le visage du professeur. « La soirée n’étant pas organisée par l’école, ce n’est pas aux professeurs de l’encadrer. » Et quand bien même c’était à eux de le faire, s’il pouvait se débarrasser de tâches si futiles et inintéressantes, il ne s’en priverait pas. L’ennui, c’était qu’avec Sørensen à la tête de l’école, il y avait fort à parier que les tâches les plus ingrates incombes aux enseignants les moins appréciables ; s’il était possible d’écarter un peu le né-moldu du lot, il n’allait sûrement pas s’en priver. Ce n’était après tout pas van Aken qui allait crapahuter derrière les élèves récalcitrants, voyons ! Satané direction.

De ses pensées, l’adulte n’en laissait pas passer une. Gardant les mains croisées dans le dos, il regardait la réaction de la poufsouffle d’un œil amusé, alors qu’elle semble hésiter sur l’objet du délit. Le couteau ou le vin ? Les élèves étaient déjà armés de baguette, c’était fort suffisant pour créer des massacres s’ils le voulaient, alors un tout petit couteau le désintéressait totalement. La boisson, cela étant, ne l’inquiétait pas beaucoup plus. Certes, elle était encore mineure, mais il ne s’appelait pas Armitage : il avait une formation de langue-de-plomb, pas d’agent de police. « Je suis certain que votre préfète sera ravie d’apprendre que vous vous inquiétez de son cœur. » Elle semblait presque être un dragon, cette préfète, pour susciter ainsi l’inquiétude principale de Roxy. « Gardez vos chocolats, il vous restera toujours ça pour festoyer, à défaut d’alcool. » Son visage s’orna d’un sourire plus honnête. « Et à mon âge, il est préférable de ne pas abuser de chocolats si je veux toujours pouvoir grimper les étages qui mènent à ma salle de classe. » S’il y avait au moins une chose qu’il regrettait de l’époque où il avait le jeune âge de son interlocutrice, c’était de pouvoir crapahuter d’un bout à l’autre du château sans sentir le moindre signal de fatigue. Il était encore en bonne forme et d’une silhouette fort respectable, mais il n’était pas aveugle au point de se persuader d’être au meilleur de sa santé. Azkaban n’avait sûrement pas beaucoup aidé, il fallait le reconnaître ; son corps avait connu les premières transformations plus jeunes que d’autres et son visage s’était ridé de préoccupations plus vite. « Mais commencez donc par me dire comment ce breuvage est arrivé dans l’école. » Il se sentait pousser quelques prédispositions pour fouiner un peu. Un reste de sa vie de chercheur, peut-être, à moins que ce ne soit le concierge qui, à force lui parler d’usurpation d’identité et de tentative avortée de grève, faisait naître en lui une curiosité plus grande.

Il n’avait toujours pas fait mine de lui ôter le récipient de vin – l’on pourrait presque croire qu’il était disposé à lui laisser. S’il était moins coincé, peut-être aurait-il partagé un peu verre avec elle, avant de repartir le cubi sous le bras... mais Thorstein préférait l’alcool fort, Siwan le thé et Armitage... tiens, outre manigancer avec lui, il n’était pas capable de dire ce qu’il appréciait. Un jour peut-être, Wenceslas devrait-il le questionner dessus. Il se révélait un collègue fort appréciable, comparé aux autres.

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  —  S’il avait été pressé, Wenceslas l’aurait renvoyé dans son dortoir sans plus de cérémonie, avec la promesse de recevoir une quelconque sanction pour contrevenir au règlement... mais il n’avait rien sur le feu et la plupart des élèves étaient aux trois balais, donc il pouvait perdre un peu de son temps avec une poufsouffle amatrice de vin.

Il pouvait lui accorder cette rigueur en classe, dont elle parlait. Du moins dans ses propres cours n’avait-il jamais eu d’ennuis avec Reid. Elle était travailleuse et ses efforts assez souvent récompensés, sans pour autant donner l’impression d’arriver à tout sans avoir à lever le petit doigt. Ce faisant, il avait une certaine sympathie à son égard, d’autant plus qu’elle ne se montrait pas hautaine comme nombre de ses comparses sang-purs – que personne ne s’y trompe : il vérifiait toujours qui étaient ses élèves. « Jusqu’à présent, vous m’aviez l’air toujours moins dissipé que d’autres camarades de votre maison. Votre grade or, d’ailleurs, semblait plutôt prometteur... » Et puis, il y avait eu le cubi de vin. À son sens, ça n’était pas bien grave à son âge, tant qu’elle n’en partageait pas avec des plus jeunes... mais tous ses collègues ne devaient sûrement pas partager sa vision un peu laxiste à ce sujet. Paradoxalement, ceux qui se révélaient être les moins strictes sur beaucoup de pans de discipline avaient tendance à s’arc-bouter sur des détails puérils comme celui-ci. « Préféreriez-vous un simple retrait de points, ou une retenue ? » Il n’avait même pas encore décidé s’il allait lui donner l’un ou l’autre, mais il était curieux de voir ce qui l’ennuyait le plus. Lorsqu’il était élève, ce dont il craignait le plus était d’être l’auteur de pertes de points ; ses camarades de serpentard n’étaient déjà pas bien sympathiques, il n’avait jamais voulu prendre le risque de leur pour prétexte de le haïr pour avoir sapé leurs efforts pour la coupe des quatre maisons. Alors s’il avait eu le choix, il aurait pris toutes les retenues du monde. D’autant que ça lui donnait une occasion de passer du temps ailleurs qu’en compagnie de ses camarades de dortoir fort peu joviaux à son égard.

Il n’attendait pas particulièrement qu’elle le rassure sur son état de santé – il n’avait pas besoin d’une adolescente pour ça – mais sa remarque était tout de même amusante. « Je penserai donc à me reconvertir en maître des potions quand l’âge m’accablera un peu trop. » fit-il alors qu’un sourire naissant apparaissant sur son visage. Toute ressemblance avec une personne existante étant purement fortuite. « Cela étant, je suis plutôt surpris par vos connaissances, mademoiselle Reid. Pour une personne à l’ascendance principalement sorcière, vous êtes bien au fait des contenants de vin moldu et autres systèmes de locomotions. Les sorciers préfèrent généralement ensorceler les escaliers pour grimper que d’envisager un outil comme un monte-escalier. » Il marqua une pause, scrutant l’aspect du lieu qu’avait choisi la jeune poufsouffle. Une prairie en bord de mer qui pouvait rappeler les côtes irlandaises ou écossaises, en un peu plus chaud. L’endroit n’était pas désagréable, quand bien même il n’aurait pas choisi un tel décor.

Assez curieux de connaître son modus operandi, il dut admettre que la réponse de Roxy était des plus classiques : une livraison par courrier. À sa connaissance, il n’y avait guère de contrôle des courriers, sans en période particulièrement risquée... après tout, recevoir des colis faisait partie de la liberté des élèves, les relever et espionner ce qu’il recevait reviendrait à s’immiscer de manière illégitime dans leur vie. Ils n’avaient théoriquement pas le droit d’emmener de l’alcool ou autres drogues, mais les sanctions ne tombaient pas par le biais des hiboux. De toute façon, Armitage avait sûrement bien mieux à faire que de faire le pied de grue dans la volière, et ça n’était sûrement pas van Aken ou Sørensen qui allait s’y coller. Quant aux tableaux, ils n’avaient pas encore la capacité d’ouvrir des paquets ; les êtres faits de peinture à l’huile, c’était pratique pour écouter les discussions, mais pour le reste, ça demeurait fort limité. « Non, mademoiselle, vous jouez simplement de malchance. » Pour le coup, il affichait un air un peu goguenard qui faisait tâche sur son visage de marbre. « Les tableaux vous ont peut-être vu, mais je n’ai pas pris la peine de leur demander. J’ai un don tout particulier pour tomber sur des situations incongrues comme celle-ci. »

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—  À ne se contenter que de voir les élèves durant les heures de cours, Wenceslas ne pouvait pas les connaître suffisamment pour savoir ce qu’ils pensaient et comment ils agissaient. La surveillance des tableaux était en cela une bien faible source d’informations, trop peu instructive et révélatrice du cœur de ces adolescents. Aussi, s’il avait admis qu’il ne connaitrait jamais les vraies facettes de ces jeunes gens mais seulement ce qu’ils acceptaient de lui montrer, il ne pouvait savoir qui il avait réellement en face de lui. Pas tant, du moins, qu’ils ne daignaient en montrer un peu d’eux-mêmes. Roxy Reid était une sang-pur mais dévoilait peu à peu une personnalité qui tranchait de celle d’un d’Archambault ou d’un Sherwin. Elle ne faisait montre d’aucun attrait particulier pour les grades, malgré son petit insigne doré brillant à son poitrail. « Ce serait fort dommage qu’après vos efforts en cours, ce soit une escapade alcoolisée qui vous coûte votre grade. » À cet égard, si elle avait été dans la tour privilège, l’enseignant ne l’aurait pas prise la main dans le sac. Un consensus voulait que les membres du corps professoral n’y aillent que pour d’excellentes raisons, tout comme les salles communes : c’étaient des lieux où les élèves pouvaient s’y reposer sans avoir l’impression d’être constamment surveillé par leurs encadrants.

Il pencha discrètement la tête en signe d’assentiment. Retenue plutôt que perte de points, c’était assez compréhensible en fin de compte. Une personne plus égoïste, peu préoccupée par le sort de sa maison, aurait optée pour l’autre solution, mais les poufsouffles avaient un esprit de corps sans doute plus fort que dans les autres maisons. « Eh bien, vous m’avez mis de bonne humeur, vos camarades ne vous reprocheront pas de mettre à mal le sablier de votre maison. » Il aurait été particulièrement perfide d’opter pour l’autre solution et, s’il était indéniablement capable d’une telle fourberie, il n’était guère tenté par ces enfantillages. D’autant que s’il ne cherchait pas à être le professeur préféré des élèves, il ne s’amusait pas pour autant d’en être le plus détesté.  

La poufsouffle sembla se renfrogner un peu face à l’étonnement de l’ancien langue de plomb. Tiens donc, parler d’ascendance la bloquait ? À moins que ce ne soit autre chose, mais pour quelqu’un qui avait été surpris par un professeur à consommer de l’alcool – ou tout le moins qui envisageait manifestement de le faire – et se montrait pourtant fort décontractée, il ne voyait guère d’autre raison. « Je vois. J’imagine que ça explique effectivement beaucoup de choses. » Est-ce qu’il s’adressait à elle ou pensait à voix haute ? C’était assez difficile à dire. Il ne pouvait jusqu’alors savoir que son père était un cracmol, mais ça expliquait sans doute son détachement par rapport aux grades. Bien évidemment, tous les sang-purs ne se révélaient pas être suprémacistes, mais ce semblait être redevenu à la mode, depuis la nomination de Sørensen. « Eh bien, je tâcherais de trouver une retenue qui soit à la hauteur de vos aspirations magico-technologiques, mademoiselle Reid. » Inventive, cette petite, il l’aimait bien. « Avez-vous déjà envisagé d’être langue de plomb ? Ce n’est pas le métier le plus sociable que l’on puisse trouver, mais les études menées actuellement pourraient vous intéresser. » Bien entendue, il restait sous le coup du secret professionnel – et un sort l’empêchait d’ailleurs d’évoquer certaines choses sur son ancien travail – mais ça ne l’empêchait pas de donner quelques bribes d’informations, çà et là. De ce qu’il savait, le ministère peinait à recruter de nouveaux candidats pour le département des mystères : trop peu qualifiés ou trop volatiles... beaucoup trop pragmatiques, pour certains. Des personnes capables de penser la magie autrement et de s’affranchir de certaines règles se révélaient précieuses pour cette profession.

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—  Assez étrangement, la jeune Reid n’avait pas de mal à s’épancher sur les grades et ses bêtises... elle les assumait assez facilement – cela étant, elle venait d’être prise la main dans le sac, ça devait aider – et reconnaissait trouver sa montée en grade inexplicable. Tous les sang-purs n’étaient pas aussi haut ; beaucoup stagnaient chez les argents, ce qui s’expliquait facilement avec leurs faibles accointances puristes. Ceux qui arboraient du doré sur leur robe étaient les plus traditionnels – ou extrémistes – d’entre eux. Et il y avait le petit van Aken, en queue de peloton, mais il était un cas un peu à part. Roxy, quant à elle, tranchait un peu... vraisemblablement proche du milieu moldu et ne versant pas le moins du monde dans les idéaux de Sørensen, et pourtant elle les côtoyait. Soit elle était très maline – mais confier tant de choses à un professeur né-moldu n’était peut-être pas la preuve d’une fourberie suffisante – soit les grades n’étaient pas assez clairs qu’ils n’y paraissaient. « Eh bien si un jour vous trouvez un lien entre vos actions et l’évolution des grades, prévenez-moi, je serais très curieux d’en savoir un peu plus. » Inutile de cacher l’opacité qui entourait les mesures récentes de la direction : tout Poudlard savait plus ou moins que Sørensen faisait peu de cas de l’avis des professeurs.

Puisqu’il était désormais question de sa retenue potentielle – s’il ne lui retirait pas de points, il ne pouvait tout de même pas lui en épargner une, ça serait injuste – il se plaisait à la questionner un peu sur ses origines et ce qu’elle voulait faire de sa vie... c’était un bon moyen de lui trouver une occupation qui joigne l’utile à l’agréable. « On ne me dit pas souvent ça ! » répondit-il en riant. « Je vais finir par m’inquiéter de l’efficacité de mes retenues si les élèves commencent à avoir hâte de m’y rejoindre. » Non pas qu’il ait toujours eu beaucoup d’intérêt pour cette forme de pédagogie... mais il savait pertinemment qu’il fallait parfois sévir et corriger les élèves pour les remettre sur le droit chemin. Il tâchait le plus souvent de leur faire faire quelque chose qui ait un intérêt... recopier des lignes, c’était assez inutile – il était bien placé pour le savoir – et ça ne servait même pas au personnel. Se faire détester des élèves n’était pas une excellente manière de leur inculquer de bonnes choses et lorsqu’il en avait l’occasion, Wenceslas tentait, à défaut d’être sympathique, de montrer aux jeunes générations qu’il ne les voyait pas simplement comme des enfants incultes et mal élevés. Mais aujourd’hui, sa nature peu joviale se révélait tout de même plus badine que d’accoutumée ; si le cadre inhabituel devait y contribuer, c’était surtout le caractère de la poufsouffle qui y était beaucoup. « Comme beaucoup de gens... c’est un métier assez obscur, je l’admets. De fait, il n’est pas toujours simple de recruter des éléments qui aient la volonté et les qualités nécessaires pour effectuer un travail comme le nôtre. » Un instant, il sembla presque se perdre dans ses pensées, happé par les souvenirs de ses premières années au département des mystères. Cet endroit n’avait pas volé son nom et par bien des aspects, il avait été salvateur pour l’enseignant. Longtemps il s’était morfondu, ressassant sans cesses les souvenirs de la guerre, sans parvenir à s’en décrocher réellement. Il lui avait fallu beaucoup de travail sur lui-même pour s’en décrocher, en partie tout du moins. « L’architecture, donc ? » L’homme posa un regard intéressé sur Roxy. « C’est un projet intéressant. Et plutôt atypique, je ne peux que vous encourager dans ces projets... ils sont infiniment plus formateurs que des parcours préétablis. Je présume que vous avez déjà des contacts avec ce cabinet ? » En fin de compte, il parlait assez rarement des projets de ses étudiants : c’était plus l’apanage du conseiller d’orientation ou des directeurs de maison que celui du – nouveau – professeur de sortilèges, qui plus est s’il se montrait aussi accueillant qu’une porte de prison. Il fallait dire qu’il avait une certaine expérience, en la matière.

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—  « À vrai dire, certains langues de plomb peuvent se révéler très loquaces. » Ce qu’il avait toujours trouvé assez irritant pour travailler sereinement. Cela étant, le département des mystères demeurait assez grand et riche en études possibles pour qu’il puisse s’éloigner des pies bavardes du bureau, ce qu’il avait toujours pris grand soin à faire. « Nous sommes tous soumis à un sort que nous empêcherait de parler de ce qui doit rester dans le département des mystères. » expliqua-t-il finalement. « C’est une petite spécialité de notre profession. » Un enchantement fort pratique, même en dehors de son ancien emploi. Il savait qu’à tout moment, il pouvait compter sur un ancien collègue pour lui lancer à nouveau et abriter quelques détails de son esprit s’il le fallait. À défaut d’être particulièrement réputés pour leur sympathie à l’égard des autres employés du ministère, les langues de plomb étaient relativement solidaires entre elles... une forte camaraderie qui s’expliquait facilement par leur vie parfois à l’écart du reste du monde. Oh certains de ses collègues avaient une vie bien sous tout rapport avec époux, enfants et dimanche en famille... mais la tentation de rester isolé pouvait être forte chez les loups solitaires comme lui.

Quoi qu’il en soit, la jeune poufsouffle semblait déjà avoir ses projets. Un avenir très précis dont il pourrait presque penser qu’il lui soit tout naturellement tracé par les discrètes machinations parentales, chose plutôt coutumière dans le milieu dont elle provenait. Néanmoins son attitude et ses explications laissaient à penser qu’elle ne soit guère du genre à se conformer aux décisions d’aïeux plus ou moins impliqués dans son éducation et qu’elle ait elle-même tracé une partie de désir d’architecture magique. « Ah oui, il me semblait bien avoir aperçu dans votre dossier une référence à votre scolarité hors de Poudlard. » Elle n’était peut-être pas une enfant pistonnée, mais elle bénéficiait tout de même d’avantages que lui procuraient ses origines sorcière. Rares étaient les nés-moldus qui pouvaient se permettre de quitter l’école de magie ne serait-ce que quelques mois, c’était beaucoup trop d’organisation pour le ministère. « Je ne vais donc pas pouvoir annoncer à mes anciens collègues que j’ai une potentielle future langue de plomb en ligne de mire. » Le sourire qui striait son visage laissait voir qu’il n’était point sérieux en évoquant ce recrutement potentiel. Elle ferait effectivement une bonne candidate – à son plus humble avis, il n’avait jamais été l’un des formateurs de sa fonction – mais quand bien même certaines langues de plomb s’étaient amusées à l’imaginer comme recruteur au sein même de l’école, il n’était pas là pour ça et ne cherchait nullement de probables candidats. « Si vos continuez vos efforts et que ceux-ci sont dans les autres disciplines sont équivalent à ceux que vous faites dans la mienne, je suis plutôt optimiste quant à vos résultats. »

Ses paroles rassurantes – et qu’il espérait plus encourageante qu’autre chose – terminées, il ôta de la poche sa baguette et fit disparaître le cubi de vin d’un simple evanesco. « Mais évitez de calquer vos efforts scolaires sur ceux disciplinaires, tout de même. » Il rangea sa baguette. « Je vous transmettrais votre retenue prochainement. »

HRP : j'ai pris la liberté d'amener notre RP vers la fin, j'espère que ça te va

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