ft. C. Junior d’Archambault et le reste de l’équipe

Sans aucune surprise, le souafle traversa l’anneau de gauche. Le gardien avait eu beau se jeter littéralement dans la bonne direction, il ne parvint pas à faire plus que de regarder la balle lui passer sous le nez. C’était lassant de jouer face à des incapables. Certains prendraient ça pour de la vantardise, ça n’était pas mon cas : je savais seulement ce que je valais et tous les matchs que nous avions joués jusque là me donnaient raison. Rares étaient les fois où les poursuiveurs adverses m’avaient donné du fil à retordre et ça n’était pas cette bande de débutants qui pouvaient changer la donne… Enfin… Ils n’eurent même pas l’occasion de réessayer puisqu’avant même que le gardien remette en jeu, un tonnerre d’applaudissements éclata dans les gradins. Il me fallut quelques secondes et un coup de sifflet pour comprendre ce qu’il venait de se passer : le vif d’or était attrapé… Et, plus surprenant que le but que nous venions de marquer, c’était Caleb qui s’en était saisi ! Et, comme toujours, la victoire n’avait pas beaucoup de saveur. Celle de l’indifférence, à la limite. C’était fou, tout de même, de réaliser que le seul match où j’avais vraiment pris plaisir à jouer, c’était celui que j’avais joué contre ma propre équipe. Mais qu’importe. J’allais pour aller féliciter mon camarade quand cette chère Skyler fondit sur lui avec toute l’hypocrisie pitoyable qu’on lui connaissait. Quelques semaines plus tôt, elle était en train de chouiner que sa place n’avait aucune légitimité — ce qui était vrai, une des rares paroles sensées ayant quitté ses lèvres — et voilà maintenant qu’elle prenait les devants comme si elle avait quelque chose à voir dans cette victoire, comme si on attendait d’elle qu’elle se comporte autrement qu’en vermine misérable… Je fis donc ce que n’importe qui de normalement constitué aurait fait à ma place : changer de plan. Je ne doutai pas que toute « l’équipe » — le groupe de personnes habillées en vert, tout du moins — se fendrait d’éloges et de félicitations, il pourrait bien se passer des miens ! Je me contentai de passer près d’eux sans un regard, puisqu’ils étaient sur le chemin des vestiaires.

— Vous avez tous assuré ! entendis-je de loin sans y accorder plus d’intérêt que ça.

Néanmoins, je pris la peine de me tourner vers la nouvelle avant de quitter définitivement la pelouse :

— Eh, Leonhart ! Ton vestiaire, c’est toujours celui de gauche.

Si ça pouvait lui éviter de venir se rincer l’oeil, à l’avenir, ça serait toujours ça de gagner… Et ça s'avérerait plus utile que la victoire d’aujourd’hui, en tout cas.