Dans les boyaux

Bras croisés, le visage sévère, enveloppé dans la tenue martiale de Durmstrang, Blaze fixait les escaliers d’un air particulièrement concentré. Devant lui, une large porte en bois sombre était grande ouverte, donnant sur une volée de marches qui s’engouffraient dans les profondeurs du château. Les cachots, à n’en pas douter, mais bien plus lugubres que ceux qu’on pouvait trouver à Poudlard : refuge des élèves de Serpentard et de Poufsouffle, les sous-sols de l’école britannique étaient finalement l’un des espaces les plus animés du collège. Bien illuminés par des rangées de torches enchantées il y faisait aussi clair que bon.

Ceux de Dursmtrang annonçaient dès la porte d’entrée qu’ils étaient d’une toute autre nature. Humides et laissés sans éclairage, on pouvait voir dès les premières marches la mousse et le salpêtre qui maculaient les vieilles pierres, laissant clairement penser que le lieu n’était pas entretenu, ou laissé dans cet état à dessein. Peut-être fallait-il y voir quelque projet sadique du directeur de l’école qui, comme Blackman en son temps, savait entretenir la portée symbolique des séjours aux cachots comme punitions en les conservant les plus lugubres possibles ?

C’était cette idée qui faisait un peu hésiter Blaze, à ce moment-là. Le jeune homme n'était pas du genre à manquer de courage cependant et des excursions dans les couloirs les plus profonds et obscures de Poudlard, il en avait mené un grand nombre depuis qu'il avait appris comment échapper à la surveillance des pions et des portraits. Pourtant, à voir cette bouche noire qui s’ouvrait devant lui, ressurgissait d’une manière un peu dérangeante des souvenirs qu’il avait cru enfouis. Les cachots sous Blackman, il les avait connu : jeté là-dedans à onze ans après avoir subi le sortilège doloris dans la Grande Salle, on l’y avait laissé sangloter sans lumière pendant une nuit entière jusqu’à autoriser finalement sa grande sœur à le rejoindre. Expérience traumatisante qui avait participé à forger son esprit de rébellion et sa haine profonde de l’autorité.

Pourquoi ces cachots-ci faisaient-ils ressurgir les souvenirs et pas ceux de Poudlard ? Blaze n’en était pas certain, peut-être un effet de lumière ou le sentiment d’abandon qui émanait de cet escalier, ouvert sur un espace froid et désertique, où on ne vous entendrait ni crier ni pleurer. Pourtant c’était cette ancienne angoisse qui loin de le faire déguerpir le clouait sur place, indécis. Son esprit compétiteur et bouffi d’égo ne parvenait pas à reculer devant l’obstacle, une attitude qui l’avait plus d’une fois conduit à adopter des comportements dangereux ou stupides, et qui aujourd’hui l’empêchait de s’enfuir. Cette peur traumatique, il allait la dépasser !

… d’une minute à l’autre, oui, c’était certain.

Dans les boyaux

Blaze & Judith

« En vadrouille »

Que notre aïeul soit loué, nous étions de retour chez nous ! Enfin, pas tout à fait mais on s’en approchait quand même davantage que lors des précédentes expéditions estivales. Savoir mon grand-père à la tête de l’école m’avait convaincue de participer aux réjouissances. De mon plein gré pour une fois. Cette année,ucun risque de tomber dans un quelconque trou moldu. Et sans surprise, la destination était à la hauteur de mes attentes. Nous pouvions enfin apercevoir le château dans lequel nous aurions dû faire nos études si nos grands-parents, avec leurs projets farfelus, n’en avaient pas décidé autrement. Depuis que nous étions arrivés, je me sentais étonnamment bien. Beaucoup mieux qu’à Poudlard évidemment, rien ne valait la Norvège !

Le début du séjour était idyllique. La bibliothèque était un véritable régal pour tout cerveau sorcier normalement constitué. Ce qui, il fallait bien l’admettre, ce faisait de plus en plus rare. Et comble du bonheur, je n’avais pour le moment croisé ni Erin, ni Finn. Nul besoin d’expliquer pourquoi je souhaitais me tenir à l’écart de ma sœur. Quant à mon frère, je n’avais nulle envie de subir ses grands discours plein de suffisance. Il avait l’art et la manière de me taper sur le système depuis quelques temps. Bref, tout était pour le mieux dans le meilleur des mondes. Je passais mes journées enfermée entre quatre murs recouverts d’ouvrages tous plus captivants les uns que les autres, quand je n’étais pas devant un chaudron à m’entraîner après mes lectures. Je n’avais aucune idée de ce à quoi pouvait bien ressembler le paradis, mais à mes yeux Durmstrang s’en approchait. Le temps filait à la vitesse de l’éclair, un mois passé ici me serait plus prolifique que dix passés à Poudlard. Lorsque je n’étais pas assise à une table, une plume à la main, je prenais plaisir à déambuler sans fin dans les nombreux couloirs et recoins de l’école. C’était un vrai labyrinthe, austère mais qui inspirait la solidité et j’aimais beaucoup l’impression qui s’en dégageait. Ici pas de fioritures inutiles, les élèves ne venaient pas pour se prélasser mais pour étudier. La médiocrité ne devait probablement pas être tolérée avec le même laxisme que dans notre collège britannique. En résumé, j’étais au comble du bonheur et rien ne pouvait troubler ma joie.

C’était donc allègre que j’entrepris ma promenade du jour. Emmitouflée dans une cape épaisse, les mains plongées jusqu’aux coudes dans les poches fourrées de l’uniforme en vigueur, je marchais sans trop savoir vers où. Je m’enfonçai à travers les entrailles du château, toujours plus loin à la recherche de lieux que je n’avais pas encore visités. Les cachots faisaient par ailleurs partie de la liste. Empruntant tous les escaliers qui descendaient, je parvins finalement devant la porte qui menait aux sous-sols. Et je n’étais pas seule. Planté devant, raide comme un piquet, un certain Serdaigle semblait vouloir la faire tomber par la seule force de son esprit. « Tu as l’airrrr bien pensif Mansfield, tu songes à ton prrrochain larrrcin ? »

(c) DΛNDELION

Sorti de sa réflexion par l’arrivée d’une jeune fille qu’il connaissait bien, Blaze la salua d’un geste de la main accompagné d’un sourire amical.

- « Salut Judith, content de voir que la bibliothécaire ne te séquestrait pas vraiment, en fait. »

Il était rapidement devenu de notoriété publique que la benjamine des Sorensen, comme à Poudlard, avait élu domicile dans la bibliothèque du château. D’un naturel peu sociable, presque le cliché qu’on pouvait avoir des Serdaigle en fait, Judith menait ses expériences dans son coin en toute tranquillité sans se soucier du quand dira-t-on. Et cela convenait très bien à Blaze. Leurs travaux communs l’année dernière nécessitait pas mal de connaissances théoriques en potions et si le jeune homme n’était pas le dernier des cancres dans cette matière force était de constater qu’il n’arrivait pas à la cheville de Judith. Qu’elle se charge donc de lire un maximum de choses, il s’occupait pour sa part de récupérer les ingrédients et d’assurer la tranquillité de leurs lieux de travail. Une association gagnant-gagnant qui lui avait permis de découvrir sous ses airs butées et prétentieuse une jeune fille ambitieuse voire surprenamment sympathique quand on discutait des sujets qui l’intéressaient.

D’un geste de la main, il désigna l’entrée des cachots qui s’ouvrait devant eux. Une espèce de bouche noire et humide, aux antipodes des cachots de Poudlard qui servaient de lieu de vie à un bon quart de l’école et où on trouvait toujours du passage à cause des cours de potions.

- « A part des crottes de rats je ne suis pas sûr qu’il y ait grand-chose à piquer là-dedans, hm. Mais j’ai pas encore trouvé leur réserve d’ingrédients alors il y a peut-être moyen que ça soit en bas, comme chez nous. »

Un prétexte qui en valait bien un autre, Blaze n’avait pas d’ambitions particulières quant à cette expédition mais s’il fallait que cela tourne autour des potions, ça lui allait parfaitement.

- « Partante pour une petite aventure ou tu dois terminer de relire l'Encyclopédie Magique avant le dîner ? »

Et comme il n’était pas vraiment du genre à hésiter devant les autres, il s’engouffra dans les escaliers et en descendit trois marches, pénétrant la pénombre, avant de sortir de sa poche sa baguette et d’un « Lumos*» éclairer d’une lumière froide les profondeurs du couloir.

- « Sauf bien sûr si t’as peur du noir ? »

Son ton pouvait bien être un peu moqueur pour sa cadette, il n'en était pas moins bienveillant. Blaze avait appris à apprécier la gamine, du moins à respecter ses talents et son travail, et n'avait aucune envie de se la mettre à dos. Mais bon, tous seuls dans des couloirs obscurs et inquiétants, la tentation de la blague n'était jamais loin... surtout quand c'était un excellent moyen de se rassurer soi-même indirectement.

Dans les boyaux

Blaze & Judith

« En vadrouille »

La première fois que Blaze Mansfield m’avait apostrophée dans la salle commune des Serdaigle, je n’aurais jamais pensé qu’une alliance entre nous soit possible. Il était aux antipodes de ma propre personnalité. Exubérant, toujours fourré dans les mauvais coups, fanfaron… Sur le papier, à des lieux de ce que je tolérais d’ordinaire chez mes camarades. Mais par je ne sais quel tour de passe-passe, il était parvenu à son but. Guidés par nos intérêts propres, nous avions tous les deux reconnus chez l’autre des qualités qui nous faisaient défaut. Et malgré l’image tapageuse qu’il donnait constamment de lui-même, j’avais appris à l’apprécier. Oh bien sûr, j’avais parfois du mal à interpréter son humour mais je ne m’en offusquais plus. A l’inverse de ma sœur, il ne plaisantait jamais pour blesser. Du moins s’il en était capable, je n’avais jamais eu à en faire les frais. Je souris à sa remarque, plissant légèrement les yeux sans toutefois prendre le risque de rétorquer. Il était de notoriété publique que je m’étais approprié une partie de la bibliothèque. Difficile donc de contredire une vérité.

Je jetais un œil à l’entrée désignée par mon acolyte. Pas très engageant tout de même. J’avais beau ne pas être intimidée par ce genre d’endroit, Durmstrang mettait la barre du lugubre assez haute. A côté, la forêt interdite ferait sans doute pâle figure. « Dans ce cas, je serrrais currrieuse de connaîtrrre leurrrs méthodes de conserrrvation car on sent la moisissurrre d’ici. » Je fronçais le nez un peu malgré moi. Les sous-sols de l’école n’avait assurément jamais vu la lumière du jour. Ni même la lumière tout court. Ce château était un palais des courants d’air, l’humidité devait frôler des taux records. « En même temps, le frrroid, ça conserrrve dit-on. » Je remontai le col de ma cape pour échapper à l’air glacé qui remontait des profondeurs des caves. « Je l’ai déjà terrrminée. Deux fois. » répondis-je ironiquement. « En rrroute alorrrs » . Et j’emboitai le pas de Blaze. Vif comme l’éclair, il avait déjà dégainé sa baguette pour éclairer le chemin. Il avait l’habitude de ce genre de coup et cela se voyait. Nous ne faisions cependant rien de mal. Personne ne nous avait interdit de visiter les locaux.

Je sortis ma baguette à mon tour. Vu l’épaisseur de l’obscurité, un deuxième éclairage ne serait pas de trop. « Lumos* » . Une gerbe jaillit de ma baguette de saule, renforçant la lumière émise par celle de mon camarade. « Seulement de mon ombrrre, le noirrr ça va. » Les marches nous emmenaient toujours plus bas. L’obscurité faisait paraître l’endroit plus exigu encore. Ça promettait d’être un vrai labyrinthe. « Blague à parrrt. Qu’est-ce que tu faisais dans ce couloirrr à fixer cette porrrte ? » Faire la conversation permettait de remplir un peu l’impression de vide qui se dégageait des cachots. Je restai toutefois concentrée sur mes pas, ne sachant pas vraiment où l’on mettait les pieds. Après les escaliers, un long couloir humide, orné de torches éteintes. J’éclairais tour à tour le sol et les murs, désireuse de ne pas louper la moindre alcove. Encore un pas et un embranchement s’ouvrait devant nous. « Drrroite ou gauche ? »

(c) DΛNDELION

- « Peut-être que c’est une illusion, ou un moyen d’éloigner les curieux ? » proposa Blaze quand Judith lui retourna que des ingrédients se conservaient mal dans un espace humide. « Si tu veux planquer un truc précieux, le premier réflexe c’est quand même d’aller le cacher dans l’endroit le plus glauque du bâtiment. Enfin, c’est pas très subtil mais faut pas trop en demander non plus, ça reste des profs, pas des gardiens de prison. »

S’il avait ressenti un doute vaguement angoissant en se tenant seul devant l’entrée des cachots, faisant ressurgir sans qu’il le comprenne vraiment très bien quelques vieux souvenirs enfouis, la seule présence d’un autre élève, fut-elle deux ans plus jeune que lui, avait suffit à le ragaillardir. D’abord par fierté – il était impensable pour Blaze Mansfield de laisser apparaitre le moindre soupçon de faiblesse en public – mais aussi pris par un certain goût de l’aventure, toujours plus savoureuse à deux.

Baguette dégainée, éclairant les escaliers de la froide lumière de son sortilège, il avait commencé à descendre dans le noir, mettant Judith au défi de l’accompagner. D’autres auraient certainement eu plus d’hésitations, non sans raisons, à l’idée de le suivre dans ces cachots mais leurs travaux communs les avaient déjà poussés à emprunter des passages secrets dans Poudlard à la nuit tombée, notamment celui de la Sorcière Borgne aussi partir à la découverte de cet espace glauque et mystérieux pouvait avoir un air de déjà-vu.

- « Petite personne, grande ombre. » dit-il d’un ton amusé, citant game of thrones, une série un peu vieillotte mais qu’il avait beaucoup apprécié regarder avec sa sœur. Il doutait néanmoins fortement que Judith possède la référence moldue.

A mesure qu’ils descendaient, le froid se faisait plus mordant et l’obscurité plus dense, désormais seulement crevée par la faible lumière de leurs baguettes qui peinait à correctement éclairer devant eux, comme si le noir ici avait été plus épais.

- « Je chassais des démons. » répondit-il d’un ton mystérieux à la question de la jeune fille. Ce n’était pas complètement faux, quoique tourné métaphoriquement. « T’as déjà été enfermée dans des cachots Judith, seule dans le noir, sans savoir quand on viendra t’ouvrir la porte ? »

La question avait été posé d’un ton légèrement plus sérieux, quoique toujours amusé. La jeune fille était trop jeune pour avoir connu l’époque Blackman – tant mieux pour elle – mais de toute façon son sang aurait interdit la moindre maltraitance sur sa personne. Pour Blaze, par contre, le souvenir restait encore là, concret, enfoui, ne demandant qu’à se réveiller. Il pouvait presque le sentir tapis dans l’ombre de l’escalier.

Finalement, après une longue minute de descente, ils parvinrent à du plat, débouchant sur un couloir qui donnait l’impression d’être complètement laissé à l’abandon. Dans la faible lumière de son lumos, l’adolescent pouvait voir les nuages de vapeur s’échapper de sa bouche à chaque respiration.

- « J’ai lu quelque part que dans un labyrinthe, il faut toujours choisir la même direction pour être sûr de ne pas se perdre. » expliqua-t-il. « Et puis si on veut cartographier le coin autant être méthodique. »

Et il s’engouffra dans le passage de gauche. Avoir une stratégie ne semblait pas une mauvaise idée en vérité car les couloirs avaient l’air de se ressembler comme deux gouttes d’eau, à ceci-prêt qu’une série de lourdes portes en bois massif venaient border celui-ci de chaque côté. Blaze essaya d’en pousser une qui resta inerte.

- « T’as remarqué qu’il n’y a aucun fantôme à Dursmtrang ? » demanda-t-il. « Tu crois que la direction les fout dehors ou juste qu’il est interdit de mourir dans le château ? »

En disant cela il avait pointé sa baguette sur la serrure.

- « Alohomora ! »

Sortilège et ce qu'il y a dans la salle:

Dans un satisfaisant déclic, la serrure se déverrouilla, laissant la porte s'entre-ouvrir de quelques centimètres. D'un geste galant, Blaze s'écarta.

- « Honneur aux dames. »

Dans les boyaux

Blaze & Judith

« En vadrouille »

Durmstrang devait renfermer de grands trésors si les professeurs étaient obligés de développer des stratégies de cet acabit pour conserver les ingrédients. Non, il était plus probable que nous ne trouverions rien dans les cachots mais un peu de curiosité n’avait jamais tué personne. Blaze avait l’air d’avoir bossé la question des cachettes en revanche. Il était décidément plein de ressources. « Entrrre un prrrofesseurrr de Durrrmstrrrang et un garrrdien de prrrison, il ne doit pas y avoirrr une trrrès grrrande différrrence ! » L’école n’était pas spécialement reconnue pour sa très grande indulgence. C’était même plutôt le contraire. D’ailleurs la rigoureuse discipline qui régnait ici transparaissait jusque dans l’apparence très austère du château. S’il y avait bien un endroit qui s’éloignait complètement de ce qu’était Poudlard, c’était bien celui-ci. Le manque de confort avait dû choquer nombre de mes camarades, habitués aux commodités de notre collège habituel. Je n’en avais pas fait grand cas. Une école était faite pour étudier, pas pour se prélasser un an durant. En offrant moins de distractions à ses étudiants, Poudlard obtiendrait sans doute de meilleurs résultats. Et avec mon grand-père à sa tête, les choses allaient changer. Il ne pourrait tolérer plus longtemps que la sorcellerie ne soit pas prise au sérieux. Peut-être que ces vacances norvégiennes n’étaient qu’un avant goût de ce qui nous attendait ? Il fallait espérer.

Je n’avais pas pour habitude de partir ainsi à l’aventure. Pour ainsi dire, il n’y avait bien qu’avec Mansfield que je me livrais à ce genre d’expérience. Mais ordinairement, je le faisais avec un but précis et des ingrédients de potions bien cachés au fond de mon sac. Aujourd’hui échappait à la règle, je l’avais suivi dans son idée sans aucun objectif et sans trop savoir où cela allait me mener. Je ne risquais pas grand-chose. Mon aïeul avait peut-être voulu faire passer un message en choisissant la destination estivale mais mettre en danger les élèves avant d’avoir pu passer à l’action ne faisait probablement pas partie de son plan.

Les réponses de mon acolyte étaient bien énigmatiques. Il y avait sans doute une référence que je ne saisissais pas dans ses propos mais j’étais trop fière pour admettre mon ignorance. Je me contentai de sourire poliment. « Je ne te savais pas poète. » La conversation prit soudain un tour plus sérieux, malgré le ton apparemment amusé que prenait Blaze pour en parler. Mais sa question était trop précise pour qu’il n’ait pas quelque chose derrière la tête. « Pas dans des cachots non. » Et ma plus grande peur n’était pas de me retrouver enfermée seule. L’idée d’être prise au piège dans n’importe quelle pièce, éclairée ou non, avec ma sœur suffisait à me donner des sueurs froides. Il avait sans doute quelque chose en tête et je commençais à comprendre. « Tu parrrles de Blackman ? » Enfin, de la période Blackman plus exactement. Malgré la dureté avec laquelle mon aînée me traitait, je ne pouvais pas prétendre comprendre ce qu’avait ressenti les élèves enfermés dans les cachots de Poudlard. Et cela ne m’avait par ailleurs jamais vraiment perturbée : les sang-de-bourbe n’avaient pas à se mélanger aux autres dans une école de sorcellerie. Je n’étais pas encore scolarisée à cette époque et c’était un sujet de conversation risqué étant donné le rôle qu’avait joué ma famille dans cette histoire. Même si les procès avaient finalement innocenté Hannibal, Finn et Erin, je n’étais pas dupe. J’avais toutefois pensé que Blaze avait été épargné et je fus prise d’un doute. Il n’était pas un né moldu à ma connaissance. Avais-je loupé quelque chose ?

Nous marchions prudemment, ralenti par l’obscurité ambiante que nos baguettes ne parvenaient pas à dissiper complètement. Devant nous, deux possibilités, deux couloirs qui semblaient se ressembler autant que deux gouttes d’eau. « Excellente strrratégie, je te suis. » Là dessus, je lui faisais totalement confiance. Il était probablement capable de se sortir de situations bien plis inextricables. « Carrrtogrrraphier les cachots, c’est ambitieux. Surrrtout sans plume ni parrrchemin. » Peut-être plaisantait-il ? Je le saisissais sans doute trop tard. « A moins que je ne sous-estime l’ampleurrr de tes capacités de mémoirrre ! » Je n’étais pas la dernière des imbéciles mais faire un plan de mémoire après des heures de promenades dans le noir, je n’étais pas sûre d’en être capable.

Je lui emboitait le pas dans le passage de gauche. Le corridor semblait en tous points semblable à celui que nous venions de traverser, excepté que dans celui-ci, nous n’avions plus le choix entre deux chemins mais entre une dizaine de portes identiques. Continuait à bavarder comme si de rien n’était, Blaze entreprit de forcer l’ouverture de la première d’entre elle. « Il me semble qu’ils ne sont pas admis ici mais j’en ignorrre la rrraison. » Son sortilège fit mouche et la serrure s’ouvrit dans un bruit métallique. L’entrouverte ne laissait rien apercevoir de son contenu. « Trrrop aimable ! » Et je passai devant lui, appuyant sur le panneau de bois pour l’ouvrir complètement. D’un geste circulaire, j’éclairai la pièce. A la vue de ce qui nous attendait-là, je ne pus m’empêcher de sursauter. « Voilà qui rrrépond à ta question. » Je m’approchai. « Je savais que les châtiments corrrporrrels étaient autorrrisés mais à ce point… » Je levai ma baguette pour éclairer davantage la scène macabre qui s’offrait à nous, tentant de comprendre ce qui était arrivé.

Le squelette en détail:

« On dirrrait un elfe… A ton avis, qu’est-ce qu’il a bien pu fairrre pourrr mérrriter ça ? » Je n’étais pas du genre à avoir beaucoup de considération pour les êtres qui m’étaient inférieurs. Mais de là à les attacher à un mur….

(c) DΛNDELION

Blaze n’ignorait pas les rapports qu’avaient pu entretenir la famille Sorensen avec Blackman et ses hommes, même si la période commençait à être un peu floue dans ses souvenirs. Les enfants alors à Poudlard étaient même passés devant le juge, d’après ce qu’il avait appris, mais innocenté. N’empêche, Blaze connaissait les rumeurs, et aussi les clichés qui couraient sur eux, famille de sang-pur, ultra-conservatrice, ça ne l’aurait pas étonné pour deux sous que leurs parents au moins soient trempés jusqu’à l’os. Mais c’était ainsi dans le monde sorcier, on s’en sortait avec une simple tape sur les doigts, pourvu qu’on soit né avec le bon patronyme. Au demeurant, Blaze n’éprouvait aucune rancune pour eux. Il avait souvent trainé avec Erin, et maintenant avec Judith et avait toujours eu des relations distantes quoique cordiales avec Hannibal. Seul Finn faisait parti de sa liste noire depuis son accrochage avec Misha il y a deux ans.

Judith, néanmoins, ne semblait pas dupe de ses allusions. Oui c’était bien de cette époque qu’il faisait référence. Epoque qu’elle n’avait pas connu, bien sûr, mais qui restait dans la mémoire des élèves les plus âgés de l’école.

- « Pas bête la guêpe. » répondit-il avec un sourire, empruntant au passage une expression de son père. « C’est ton grand-père qui sera aux commandes pour l’année prochaine, tu crois qu’on est reparti pour un tour ? »

Judith aurait eu de bonne raisons de se vexer d’une telle association, après tout Blackman avait été reconnu comme terroriste et causé la mort de plusieurs personnes dont l’ancienne directrice, Minerva McGonagall. Mais le ton sur lequel Blaze avait demandé cela n’avait rien d’accusateur, juste malicieux. De l’eau était passé sous les ponts et au fond, il n’aurait pas été si mécontent que cela de revivre cette période. Il était désormais un sorcier accompli et aurait ainsi eu l’occasion de prendre sa revanche. Assurément, on n’aurait pas enfermé la Mansfield de 16 ans aussi facilement que celui de 11, incapable de se défendre ou de se rebêler.

Tout en discutant, ils s’étaient engouffré dans le dédale des cachots, devant faire face à leur première intersection. A la manière de son frère aîné, Judith avait tendance à prendre ses crâneries au pied de la lettre, s’interrogeant sur comment il comptait se souvenir de tous les couloirs pour en faire la cartographie.

- « Disons juste ce qu’il faut pour nous éviter de nous perdre complètement alors. Peut-être qu’il n’y a pas de fantômes justement pour éviter que quelqu’un nous retrouve ? »

C’était une hypothèse farfelue mais intéressante. Durmstrang cultivait le secret, encore plus que Poudlard, au point d’exiger des étudiants en visite qu’on leur efface une partie de la mémoire à la fin de leur séjour, c’était dire le niveau de paranoïa. D’un autre côté, avec sa bibliothèque en accès libre et ses cours de magie offensive frisant les arts noirs, on pouvait comprendre que les norvégiens n’aient pas forcément envie de voir tous leurs petits mystères révélés au grand jour par un touriste ou un fantôme un peu trop bavard.

Disant cela, il s’était arrêté devant une porte. Si ça se trouve, ils n’auraient pas à s’aventurer très loin pour trouver quelque chose d’intéressant à faire. Après tout, ces cachots pouvaient bien renfermer tout et n’importe quoi, Blaze n’avait aucune idée de leur utilité réelle. Même pas certain qu’ils servent vraiment de lieux pour enfermer les élèves, quoique vu la gueule de la discipline ici cela ne l’aurait pas étonné pour deux sous.

Un simple sortilège de déverrouillage suffit à ouvrir le cadenas qui bloquait l’accès à la pièce. Si c’était un véritable cachot, il n’était pas très sécurisé, du moins pas pour un élève un minimum doué.

S’effaçant devant sa cadette avec une politesse de gentleman, il l’invita à pénétrer la première dans cet espace sombre et oppressant. La jeune fille ne s’en fit pas prier, le remerciant même au passage sans qu’il parvienne réellement à savoir si elle était sarcastique ou non. L’espace d’un bref instant il fut tenté de refermer la porte derrière elle et d’en bloquer la serrure. Avec une autre élève, il aurait moins hésité, ayant déjà réalisé ce genre de crasse, dont une fois avec une gamine de première année dans une salle abandonnée. Il avait appris après qu’elle était claustrophobe, il espérait que cette petite expérience l’avait guérit, du coup.
Néanmoins, Judith n’était pas n’importe qui. Déjà, elle était sa partenaire de potions et il n’avait jamais eu à se plaindre d’elle, au contraire, travailleuse et solitaire, on ne pouvait rêver mieux. En plus, il connaissait l’inimité de la cadette des Sorensen pour sa sœur aîné et prévoyait que si l’année prochaine devait voir advenir la consécration de cette famille avec leur patriarche à la direction de l’école, il préférait garder un atout dans sa manche. Que ce soit pour se sortir du pétrin ou bien le provoquer.

Alors qu’il se tenait toujours sur le pas de la porte, tergiversant, le faisceau de lumière de la baguette de Judith s’arrêta sur… un squelette ! Blaze n’en croyait pas ses yeux et pénétra dans la salle à son tour, un air à la fois ébahis et ravis sur le visage.

- « Génial. » souffla-t-il.

Oublié son envie de piéger la jeune fille, ce qui les attendait là-dedans était bien plus amusant que toutes les farces auxquelles il aurait pu penser. Malgré toutes les horreurs que Poudlard avait subi ces dernières années, il n’avait jamais vu de cadavre en vrai. Il était trop petit pour avoir assisté à la bataille de Poudlard qui avait emporté plusieurs personnes lors de la fin de sa première année et même l’incendie général du château il s’en était tiré très vite et n’avait appris que plus tard que certains étaient restés piégés dedans.

- « Servir le thé en retard peut-être ? » dit-il en s’approchant.

Il s’accroupit devant la petite carcasse, hésita un quart de seconde et approcha sa main de la tête pour la soulever et la regarder de plus près. Pas de doute, c’était un elfe, le crâne épaté et l’espace pour le nez bien plus allongé ne laissait pas de place à un quelconque mystère.

- « Ils n’ont vraiment pas l’air de rigoler ici. T’imagines, condamné à mourir de faim là-dedans ? »

Puis il tourna la petite tête vers la jeune fille et en actionna la mâchoire pour mimer le mouvement de la bouche en prenant une voix nasillarde.

- « Oh Judith, sauve moi s’il te plait. »

Puis il éclata de rire et se redressa.

- « Dommage qu’on n’ait pas un sortilège pour faire causer les morts. Parait que certains mages noirs savent faire ce genre de truc, en tout cas le Seigneur des Ténèbres en était capable, on a appris ça en cours d’histoire de la magie. »

Dans les boyaux

Blaze & Judith

« En vadrouille »

Discuter avec Blaze était plaisant. Ce n’était pas la première fois que je m’en faisais la remarque et pourtant cela continuait de me surprendre. Il y a un peu plus d’un an de cela, jamais je n’aurais pensé parcourir les cachots de Durmstrang en compagnie de ce garçon que j’avais toujours trouvé beaucoup trop bruyant pour son propre bien. Derrière l’exubérance, je découvrais un sorcier intelligent, malin et plein de ressources. S’il y avait bien une leçon à retenir de tout cela, c’était que mes préjugés n’étaient pas toujours fondés. Dans une certaine limite bien entendu. Il n’était pas question de tout envoyer valser.

Mansfield semblait avoir un talent tout particulier pour mettre les pieds dans le plat. Certes, je lui avais tendu une perche en évoquant Blackman et il s’était empressé de la saisir. J’aurais pu me vexer de l’allusion qui était faite derrière sa question. A quoi bon ? Tout le monde connaissait les idées de ma famille, les Sørensen ne s’en étaient jamais caché. Leur parti pris au cours de la période qui avait vu l’avénement de Blackman à la tête de Poudlard était de notoriété publique. Cependant, si les doutes étaient permis, mon aïeul jouissait d’une réputation sans faille. Il ne se mouillait jamais directement et évitait autant que possible que le nom de notre famille ne soit entaché. Pas toujours facile avec Erin dans la fratrie… Quant à savoir ce qu’il avait derrière la tête… Ce n’était certainement pas à moi qu’il fallait le demander. Ill y avait néanmoins peu de chance que mon aïeul prenne des risques à visage découvert. En tant que directeur de l’école, il ne pouvait plus agir dans l’ombre et ses faits et gestes étaient méticuleusement scrutés. S’il se passait quelque chose, il se débrouillerait pour que cela ne vienne pas directement de lui. Ou d’un membre de la famille. La réputation avant tout. Œuvrer pour nos idées était sans intérêt si nous ne pouvions pas en profiter. « Je n’en ai aucune idée à vrrrai dirrre. Je ne suis pas vrrraiment dans ses petits papiers. » Et même si je l’étais, il y avait peu de chance que mon grand-père prenne le risque de dévoiler ses desseins à quelqu’un d’autre, qu’il fasse partie de la famille ou non. Ma grand-mère était certainement la seule qui bénéficiait de ce privilège. Même mes frères et ma sœur ne connaissaient jamais réellement ce qu’il avait derrière la tête. Et pourtant, Kaspaer Sørensen se souciait infiniment plus de mes aînés que de moi. « Si tu cherrrches à tirrrer les verrrs du nez de quelqu’un, tu n’as pas choisi la bonne perrrsonne. Je ne suis même pas sûrrre qu’il sache en quelle classe je suis. » Il avait certainement reçu un faire-part à ma naissance. Peut-être même qu’il m’avait regardée un jour mais il ne devait pas savoir grand-chose de personnel à mon propos. J’aurais été malhonnête en disant que cela ne me touchait pas. J’avais beau gesticuler devant son nez, il n’y en avait que pour Hannibal, Finn et même Erin à présent. Judith jamais. Ma grand-mère rééquilibrait un peu ce que je percevais comme une injustice. Elle voyait clair en moi et avait toute confiance en mes capacités. Et j’étais fière d’être formée par la sorcière redoutable qu’elle était. Je ne brillais peut-être pas en société. Et je n’étais certainement pas capable de concevoir des plans machiavéliques et bien huilés à la manière de certains membres de ma famille. Mais quand je m’attelais devant un chaudron avec une idée fixe, j’étais quasiment certaine de parvenir à mon but.

Mon analyse était bonne : j’avais été incapable de saisir l’ironie des propos de Blaze. L’anglais n’était pas ma langue maternelle et même si je le maîtrisais plutôt bien, certaines de ses subtilités me laissaient sur le carreau. « Je ne suis pas toujourrrs trrrès douée avec le second degrrré… » m’excusai-je. Il n’avait pas eu l’air de s’en offusquer mais je n’aimais pas trop qu’on puisse me prendre pour une simple d’esprit.

Pas de fantôme, pas de témoin. Bien pensé. « C’est un peu perrrverrrs comme rrraisonnement mais c’est une hypothèse plausible. Les fantômes de Poudlarrrd sont de vrrraies concierrrges. » Un peu comme les tableaux qui ornaient les murs d’ailleurs. Difficile d’aller et venir sans être vus. Mais du moment que personne ne venait les interroger, ils ne divulguaient rien. Restait donc à ne jamais se faire prendre, pour ne pas leur donner l’occasion de raconter tout ce qu’ils savaient. Peut-être que c’était la raison pour laquelle Alexander recouvrait sans cesse ses murs de tous ces cadres ? Il s’assurait ainsi une surveillance à moindre coût. Il faudrait que je lui pose la question un jour.

La porte s’était ouverte sur une petite pièce humide et sombre, à l’image du reste des cachots. Il ne fallait d’ailleurs pas s’attendre à mieux en partant à l’aventure dans les sous-sols d’un château comme celui de Durmstrang. Et le contenu des lieux ne dénotait pas non plus avec l’ambiance lugubre. Un squelette, rien que ça ! J’étais à peu près certaine qu’on ne trouverait rien de semblable à Poudlard. Du moins pas accroché à un mur en guise de châtiment. Contre toute attente et à l’inverse de la réaction qu’aurait eu quatre-vingt-dix pour cent des élèves britannique, Blaze avait l’air de trouver cela fascinant. « Tu es… surrrprenant comme garrrçon. » Pas la moindre grimace ni une once d’hésitation dans son attitude, au contraire, il semblait fasciné. A vrai dire, difficile de ne pas l’être. Je ne m’étais jamais trouvée en présence des restes d’un être vivant. Ne serait-ce que pour la science, j’avais bien envie d’y jeter un œil. Je m’approchai pour l’éclairer un peu plus. « Ou alorrrs il a tenté d’empoisonner son maîtrrre. » Ce serait une histoire intéressante. Mais nous en serions réduits aux hypothèses. La pauvre créature n’était plus en état de nous raconter ce qui avait bien pu lui arriver. Ma baguette n’était plus qu’à quelques centimètres des os. Il devait être là depuis longtemps car il ne restait plus que la carcasse. Elle était d’ailleurs si propre qu’il était difficile de ne pas penser que les rongeurs du coin s’étaient livrés à une véritable orgie. « Ça doit êtrrre atrrroce. Perrrsonne ne mérrrite ça. » Et j’étais sincère. J’avais beau ne pas trop me préoccuper du sort des personnes et des êtres que je jugeais indignes, la violence gratuite ne m’avait jamais procuré aucune sorte de plaisir. Je détaillai les ossements, cherchant un petit indice qui aurait pu nous éclairer sur sa présence ici. Peine perdue, je n’étais pas médicomage.

Pendant que j’analysais, Blaze passa à l’action. Saisissant la mâchoire, il la fit bouger en imitant la voix un peu ridicule des elfes. J’éclatai d’’un rire spontané. C’était tout à fait grotesque comme situation. « Hm. Tu parrrles des inferrris ? Je prrréfèrrre que les morrrts rrrestent là où ils sont. » Un fantôme passe encore,. Un mort qui parle, non. L’ectoplasme faisait le choix de revenir. Les défunts avaient le droit à un minimum de respect. En parlant de ça… « Tu crrrois qu’on peut crrreuser ce sol ? On pourrrrrait l’enterrrrer. Ce serrrait mieux que de le laisser pendu comme ça. » Je ne sais pas ce qui me gênait avec l’idée de laisser la dépouille suspendue au mur. Après tout, ce n’était qu’un elfe de maison malchanceux. Mais cela me semblait plus… correct ?

(c) DΛNDELION

Aux explications de Judith lui assurant qu’elle n’était pas vraiment la bonne personne à interroger quant aux plans de son grand-père, Blaze répondit d’un haussement d’épaule à la fois détaché et résigné. Qu’elle lui mente ou non, il n’allait pas la soumettre à la question pour vérifier, et puis le jeune homme s’imaginait très bien les Sorensen comme une famille cloisonnée et froide, façon vieille noblesse prout prout ce qui correspondait au fonctionnement que semblait sous-entendre sa camarade. Et tant pis pour l’anticipation de ce qui se passerait l’année prochaine, on improviserait bien sur le moment.

Judith lui tira par contre un franc éclat de rire quand elle avoua avoir du mal avec le second degré. Elle était marrante cette gamine décidément : assez consciente de ce qu’elle renvoyait et des limites de son éducation, c’était plutôt rafraichissant.

- « T’inquiète va, ça s’apprend sur le tas. Au pire je te filerai des cours. » puis revenant sur les fantômes : « Peut-être que l’emplacement de Durmstrang est tellement secret que les spectres eux-mêmes ne savent pas comment y retourner ? Ou alors qu’on les a viré justement pour qu’ils ne puissent pas répéter ce qui se passe ici. »

En parlant de squelettes dans les placards de l’école, Blaze ne s’attendait pas vraiment à tomber véritablement sur l’un d’entre eux en poussant la première porte venue. Cette macabre découverte donna instantanément un caractère beaucoup plus excitant à leur exploration : ainsi ils risquaient bel et bien de tomber sur des trésors dans ces lugubres cachots ! Une excellente perspective du point de vue de Blaze qui s’était lancé dans l’aventure sans trop y croire. Bien sûr il était de notoriété publique que les vieilles écoles de sorcelleries étaient trophées de passages secrets et de pièces dissimulées, Poudlard n’y faisait pas exception, mais le jeune homme avait mis plusieurs années avant de trouver les premiers dans le château écossais et cela avait demandé des soirées entières d’exploration minutieuse. Franchement, il n’était pas dupe quant à leurs capacités à tomber du premier coup sur quelque chose d’excitant.

Mais visiblement il se trompait. Laissant s’exprimer son enthousiasme, ce qui lui valu une remarque dubitative de Judith, il se rapprocha du squelette pour l’observer de plus près. « Surprenant » ? Ça lui allait bien, la plupart de ses héros de fiction étaient surprenant, imprévisibles, audacieux. Parfait.

- « Oh, un elfe rebelle alors ? » demanda-t-il avant de manipuler le petit crâne pour imiter une supplique qui tira un éclat de rire à sa camarade. Bon au moins aucun des deux n’avait l’air trop flippé par le cadavre, c’était déjà ça.

Il hocha la tête quand elle évoqua les inferis. Il ne se souvenait plus du terme exacte.

- « Ouais c’est ça, mais ça ne marche pas sur les squelettes de toute façon. » de toute façon c’était surtout de la magie noire et certainement largement en dehors de leur portée, même si Blaze ne doutait pas qu’avec un peu d’entrainement il pourrait sans doute se hisser à ce niveau de compétence. Alors qu’il cherchait quoi faire de cette situation étrange, Judith reprit l’initiative en proposant de lui creuser une tombe. Surpris, Blaze se redressa.

- « Si c’est un héros de la résistance, on lui doit bien ça, oui. Et si c’est un criminel… autant éviter que ses mannes reviennent nous hanter, non ? » expliqua-t-il avec un sourire qu’il espérait vaguement inquiétant. « Je connais un sort pour creuser le sol, mais est-ce qu’on fait ça ici ? Directement dans le cachot ? »

Instinctivement ça ne lui semblait pas l’endroit le plus approprié pour recevoir une tombe, ne serait-ce que parce que le sol était fait de pierre et non de terre et qu’un trou à cet endroit se remarquerait immédiatement. Au demeurant, pour une fois il n’avait aucune idée de la marche à suivre et interrogeait sincèrement sa cadette. Procéder à des enterrements n’était pas vraiment une activité qui lui était familière.

- « Sinon on le sort d’ici et on va le planquer dans le parc. » proposa-t-il et se rapprochant de nouveau du squelette et fit jouer le poignet de celui-ci à l’intérieur de sa menotte. « Vu le poids qu’il a perdu on peut très bien lui retirer ses fers sans soucis. »

Dans les boyaux

Blaze & Judith

« En vadrouille »

Cette promenade improvisée prenait une tournure inattendue. Je n’étais pas tellement du genre à provoquer de grands éclats de rire autour de moi et voilà que Mansfield se moquait de mes déconvenues avec la langue anglaise. Je n’en étais pas vexée. Après tout, j’avais moi-même admis mon ignorance. « Des courrrs de second degrrré, j’aimerrrais bien voir ça ! » répondis-je avec un grand sourire. J’avais bien du mal à me représenter Blaze en professeur, lui que tout semblait amuser. Et l’ironie ne me paraissait pas être un talent que l’on pouvait apprendre si facilement. Du moins je n’avais jamais rien vu de tel dans les livres… Et parlant de culture, Durmstrang était une énigme à laquelle je ne m’attendais pas. Plus je passais de temps ici, plus il y avait de questions sans réponse. Et cette histoire d’ectoplasme en faisait partie. « Si l’école est incarrrtable, les fantômes ne doivent pas pouvoirrr la trrouver non plus. Il n’y pas de rrraison que les sorrtilèges de prrrotection ne marrrchent pas sur eux. » Il y avait cependant une faille dans mon discours. « Mais Poudlarrrd est incarrrtable aussi et pourrtant il y a des fantômes… » Nous en serions donc réduits aux suppositions. Peut-être simplement qu’ici, on ne tolérait aucun manquement à l’ordre et que les spectres étaient considérés comme fauteurs de troubles. Ce qui serait plausible quand on voyait le bruit qu’ils pouvaient faire quand ils voulaient. Sans parler des esprits frappeurs… Peeves aurait mérité qu’on le mette à la porte depuis belle lurette. Mais visiblement, en Grande-Bretagne, on aimait le désordre… C’était un peu désespérant.

Avec ce que je voyais dans les cachots, Durmstrang n’était cependant pas en reste question désordre. Qu’on torture des elfes, ce n’était déjà pas glorieux, mais qu’on laisse traîner les preuves, ce n’était franchement pas joli. Nous n’avions toutefois jamais rencontré les élèves de l’école : ce genre de traitement ne les choquait peut-être pas. D’un autre côté, les châtiments corporels étant toujours autorisés sur les étudiants, un elfe à côté, ce n’était pas grand-chose. Je demandais ce qu’il avait bien pu faire pour être suspendu de la sorte… Il fallait que ce soit grave. Ou alors l’avait-on oublié ? « Un elfe rrrebelle, ça me parrrait bien comme explication ! » C’était toujours moins triste que d’imaginer qu’il était la victime malheureuse d’un jeu cruel. Le genre dont serait capable Erin. « Ou un cobaye… Je crrrois que cerrrtains sorrrciers ne se gênent pas pour les utiliser comme sujet d’entrrraînement. » Et comme les efles étaient par nature toujours consentants, il n’était pas très difficile de les obliger à subir les pires sortilèges.

La conversation dérivait. Des elfes nous étions passés aux inferis. L’idée même de faire se relever des cadavres me dégoûtait. C’était franchement malsain. « Oh je suis sûrrre que ça doit exister pour les squelettes aussi. C’est tout à fait le genrrre de choses qu’il doit y avoirrr dans la bibliothèque de cette école. » Du bref aperçu que j’avais eu de l’endroit, j’avais pu constater qu’il n’y avait aucun tabou ici en matière de magie. Les seules limites étaient celles que nous imposait notre niveau. Ce qui en disait long sur leur manière d’enseigner : pas question de niveler par le bas, leurs élèves devaient poussés à faire toujours mieux. J’espérais que mon grand-père prendrait exemple sur les Norvégiens pour redresser Poudlard…

Mais l’heure n’était pas aux plans sur la comète : nous avions d’autres chats à fouetter. Ou plutôt un cadavre à enterrer. Mon initiative sembla surprendre quelque peu mon camarade. D’ordinaire, les idées venaient plutôt de lui mais our une fois, les rôles étaient inversés et c’était à moi que les questions d’organisation étaient posées. Cette expédition était vraiment des plus surprenantes. « Ça rrrisque d’êtrrre compliqué de rrreboucher le trrrou convenablement, ça a l’airrr d’êtrrre de la pierrrre. » Si nous avions le droit d’être ici, nous n’avions certainement pas l’autorisation pour creuser dans leurs sous-sols. Enfin, du moment que nous ne nous faisions pas prendre, nous avions tous les droits que nous voulions bien nous arroger. Je jetai un œil autour de moi. C’était tout de même un peu lugubre de reposer à l’endroit où on l’avait attaché pour mourir… « Le parrrc c’est mieux oui, ce sera plus gai pour inaugurer un cimetière. » Les deux concepts n’allaient pas de pair mais enfin, l’idée était compréhensible. « Qu’est-ce qu’on fait ? On y va maintenant ou on le rrreprrend au passage ? » Il restait un certains nombres de portes que nous n’avions pas poussées mais étant donné l’ampleur de leurs caves, il nous faudrait des jours pour en venir à bout. D’un autre côté, quand on voyait ce qu’on avait découvert en poussant la première, difficile de ne pas avoir envie de regarder ce qui se cachait derrière les autres…

(c) DΛNDELION

Discuter du sort de ce pauvre elfe avec Judith avait quelque chose d’un peu étrange qui tenait certainement à la réputation entourant la famille Sorensen. Même sans connaitre les tristes forfaits dont on avait accusé ses aînés, il suffisait d’avoir un peu fréquenté Erin pour savoir que ce genre de traitement « torture », « punition mortelle » ou « entrainement magique sur cobaye humain » était plus que possible chez les sang-purs. Une idée qui fit hocher la tête à Blaze d’un air expert, l’air de dire « t’inquiète je connais » alors que ses parents à lui tenaient une boutique de gâteaux. On faisait plus inquiétant comme histoire familiale.

- « Tu crois ? » demanda-t-il avec malice. « Genre ça ne t’ai jamais arrivé à toi ? »

En tout cas dans une école comme Dursmtrang, Blaze était tout à fait prêt à accepter que cela ait pu avoir lieu. Inferis, expériences sur les elfes, Judith avait raison s’il y avait bien un endroit dans ce monde où les gens étaient décomplexés par rapport à tout ça c’était ici. Et c’était également ce qui donnait tout son charme à cette visite des cachots : même si Poudlard n’était pas l’endroit le plus sécurisé du monde, loin s’en faut, restait qu’avec un peu de courage et un bon lumos il n’y avait pas tant de couloirs si effrayants que ça. En tout cas aucun que Blaze n’ait pas un jour eu la hardiesse d’emprunter au cours de ses nombreuses explorations.

Ici par contre, tout était différent et le jeune homme s’attendait presque à tomber sur un détraqueur ou une créature étrange enfermée dans la prochaine pièce qu’ils ouvriraient. C’était aussi effrayant qu’excitant. Toutefois Blaze n’était pas du genre à ne pas prendre la situation très au sérieux : ils étaient tombé sur un cadavre et celui-ci relevait donc en quelque sorte de leur reponsabilité à présent. Qui qu’ait pu être ce pauvre bonhomme, ils ne pouvaient tout de même pas le laisser là.

- « Non, on va l’enterre maintenant. » dit-il finalement d’un ton résolu. « Je pense qu’on n’est pas assez préparé pour ce genre d’expédition, faut revenir avec des torches et des sacs sinon dans une heure on sera mort de froid. »

Il pointa sa baguette sur l’efle et dissipa son sortilège de lumière. La pièce fut soudain plus bizarre.

- « Garde ton lumos, je le déplace. Mobilicorpus ! »

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1 ; 2 ; 3 ; 5 : le corps se soulève docilement, il ne reste plus qu'à le remonter... de préférence sans se faire remarquer
4 : le corps se soulève et... retombe par terre dans un fracas d'os. Super Blaze le profanateur, si avec a tu ne te tapes pas un esprit vengeur...
➤ 6 : clic clac, on dirait bien que tout ça n'était pas là par hasard, parce que la porte vient de se refermer sur le groupe
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Le corps se soulève à la grande satisfaction du jeune homme... et entraine un mécanisme dans son mouvement, faisant violemment claquer la porte dans leur dos ce qui eut pour effet de le faire sursauter.

- « Merde on est trop con, c'était prévisible en plus... » lâcha-t-il avec une grimace.

Il avait vu assez de films d'aventures pour savoir que ce genre de pièces étaient toujours piégées. La bonne nouvelle toutefois, c'était que ça devait signifier qu'il était le héros de l'aventure. La mauvaise, c'était qu'ils étaient à Durmstrang et que tout était possible désormais...

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Blaze & Judith

« En vadrouille »

Je n’étais pas sans savoir que ma famille avait la réputation d’être… peu recommandable ? C’était probablement un euphémisme mais qu’importe, j’avais appris à vivre avec. Que les ragots soient fondés ou complètement inventés, je pensais néanmoins que Blaze n’était pas du genre à prêter attention à ces racontars. Je me trompais visiblement à la manière dont il me demanda avec ironie s’il m’était arrivé de torturer des elfes .Je servais suffisamment de cobaye à ma sœur pour ne pas avoir envie de faire souffrir d’autres êtres vivants pour mon plaisir. Mais ça, Mansfield ne le savait pas. Et je n’avais pas l’intention de lui en parler. « J’ai la tête de quelqu’un qui attache des elfes dans des cachots ? C’est vexant. » Je disais cela en souriant. Je savais que mon acolyte ne pensait pas à mal. Du moins, j’espérais. « Mais venant de quelqu’un qui a prrroposé de tester nos expérrriences surrr des prrremièrrres années, c’est un peu irrronique, tu ne trrrouves pas ? » Dans tes dents Mansfield. Il ne me semblait pas faire partie de ces personnes que la morale encombrait lorsqu’il s’agissait de mener à bien un projet. Enfin, sans doute que comme tout un chacun, il avait ses propres limites. Et aucun des élèves dont nous avions projeté de nous servir pour tester notre potion n’aurait fini attaché à des chaînes dans les sous-sols de Poudlard. Même dans le cas où l’expérience tournerait très mal. Je préférerais encore admettre mon erreur et faire appel à l’infirmière simplette embauchée par l’école que de laisser quiconque se décomposer seul dans un cachot humide. Exception faite de mon aînée peut-être.

Mais comme nous n’étions pas totalement dépourvu de cœur, nous ne pouvions décemment pas laisser cette pauvre créature ici. Le projet était certes un peu loufoque mais moral. Etonnant quand on pensait que l’idée venait d’une Sørensen. Je plaisante bien entendu… Si l’on mettait de côté les jumeaux et leur cœur maladif, au sens propre et au sens figuré, les membres de ma famille n’était pas des monstres. Nous avions juste les idées bien arrêtées et une certaine volonté d’en découdre contre vents et marées. Et en parlant d’aléas météorologiques, Mansfield semblait moins bien acclimaté que moi au climat local. Un peu normal quand on songeait que j’étais née sous les mêmes latitudes que Durmstrang. « Tu trrrouves qu’il fait frrroid toi ? » Bon pour les torches, il n’avait pas tort, allumer nos baguettes nous empêchait de nous en servir pour quoi que ce soit d’autre. Ce qui d’ailleurs, allait finir par nous porter préjudice. « C’est vrrrai que ça manque de lumièrrre dans le coin. Mais pour ce qui est du rrreste, j’ai toujourrrs sur moi le sac sans fond dont on se serrrt à Poudlarrrd » . Son idée avait d’ailleurs été lumineuse. Cet objet était une invention de génie. Grâce à cela, j’avais toujours sur moi quelques potions utiles et mes poches n’étaient pas encombrées.

Alors que j’avais imaginé remonter les escaliers avec le squelette sous le bras, Blaze eut une idée bien plus intelligente. Nous étions des sorciers, non ? D’un coup de baguette, il souleva le corps de l’elfe malheureux… actionnant en même temps un piège qui nous enferma dans la pièce. « On a l’air malin maintenant. » Nous nous retrouvions donc enfermés dans un cachot sombre avec un elfe lévitant et pour seule source de lumière ma baguette. Bien, bien, bien. « Dépose l’elfe, je vais éteindrrre mon lumos. » Nox. Et le noir fût. Bravo Judith. Tu aurais mieux fait de repérer l’emplacement de la porte avant de nous plonger dans le noir… « Alohomorrra » . Simple, basique. Efficace ? C’est ce que nous allions voir.

Spoiler:

5, 6 : le sortilège frappa la porte sans l’ouvrir. « Trrrop simple évidemment… Va falloirrr se crrreuser les méninges ou tenirrr compagnie à l’elfe. »

(c) DΛNDELION

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'Le Hasard' : 5

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