Au clair de la lune

A comme Association

Il y a des soirs, comme ça, chez Serdaigles, où l'on est presque sûr d'avoir la salle commune rien que pour soit. Il suffisait de virer les derniers retardataires pour pouvoir profiter du faux ciel étoilé du plafond en toute quiétude, personne n'aimant trop s'attarder passé une certaine heure - il fallait être en forme pour les cours de demain - et Blaze pouvait se montrer plutôt persuasif quand il s'en donnait les moyens, aucun élève moins âgé n'ayant envie de devenir la nouvelle cible de ses plaisanteries.

C'est donc seul et dans un grand fauteuil plongé dans l'ombre qu'il attendit la venue de sa partenaire : Judith. Soit disant que l'éclairage tamisé de la cheminée donnait à sa mise en scène un aspect plus dramatique, c'était la seule source de lumière de la pièce hormis les étoiles du plafond. Quelque part sur un mur l'horloge sonna 23h, Cameron était déjà rentré de sa ronde. Ils auraient donc la soirée pour eux, il suffirait de faire attention aux oreilles indiscrètes.

Quand finalement il entendit les pas de la jeune fille dans l'escalier il se redressa un peu et joignit les doigts de ses mains pour se donner un air de méchant de film d'action.

- Bonsoir Judith, assieds toi je t'en prie.

Puis, incapable de tenir ses blagues plus de cinq minutes, surtout quand elles exigeaient de lui de se tenir tranquille, il rapprocha le fauteuil du centre de la pièce avec enthousiasme.

- Prête pour reprendre les affaires ? T'as fait des recherches alors ? T'as besoin de quoi du coup précisément ?

Pour sa part, il devait bien reconnaitre avoir mis le projet en pause le temps de l'été, ayant eu l'esprit assez occupé par d'autres préoccupations. Mais maintenant qu'ils étaient de retour à Poudlard et que la rentrée avait été digérée, le jeune homme comptait bien mettre à profit cette nouvelle année et ne pas perdre son temps. Il y avait foule de projets enthousiasmant à organiser et qui ne souffraient d'aucun retards !

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Au clair de la lune

Blaze & Judith

« Tromper l'ennui dans ce château maudit »

Il fallait bien trouver un moyen de passer le temps. Cette année s’annonçait encore plus déprimante que les autres, je m’ennuyais ferme et je ne voyais aucune amélioration se produire, bien au contraire. Je ne pouvais pas compter sur les heures de cours pour m’occuper l’esprit et j’avais donc intérêt à me mettre en quête de projets personnels plus conséquents. Je n’avais peut-être toujours pas totalement confiance en la personne de Mansfield mais son idée avait le mérite d’être captivante. Dans ce contexte, il n’en fallait pas plus pour me convaincre. Quelques brefs courriers plus tard et le rendez-vous était fixé.

Vingt-trois heures pile. La salle commune était vide. J’ignorais comment Blaze s’y était pris pour convaincre les quelques retardataires de monter se coucher mais il avait fait merveilles. Voilà un talent qui pouvait se révéler utile et dont je ne disposais assurément pas. Nul doute que les facultés sociales de mon surprenant acolyte allaient être un atout de taille. Il faut dire que de ce point de vue, j’étais tout ce qu’il y avait de plus handicapé. Je descendis l’escalier qui menait à mon dortoir et le trouvait assis dans un fauteuil près de la cheminée. Le feu qui brûlait dans l’âtre était la seule source lumineuse de la pièce, ce qui conférait à l’ensemble une ambiance particulière. « Bonsoir Judith, assieds toi je t'en prie. » Je soupirai. Son idée avait beau être brillante, il me faudrait composer avec la nature quelque peu débordante du Serdaigle. Un détail que j’avais peut-être légèrement oublié pendant les deux mois que duraient nos congés d’été. Je n’étais pas vraiment habituée à ce genre d’attitude et je ne savais pas réellement comment me comporter dans de pareilles circonstances. Néanmoins la plaisanterie fut de courte durée, Merlin soit loué. « Bonsoirrr. »

Je pris place dans le siège en face du sien, les jambes repliées sur l’assise comme à mon habitude. Il entra dans le vif du sujet sans perdre une seconde. Tant mieux, ce n’était pas la peine de tourner autour du pot pendant deux heures. Nous savions tous les deux pourquoi nous étions là. « Prrrête ! » Ce projet m’enthousiasmait plus que je ne voulais l’admettre. Déjà parce qu’il touchait à une discipline pour laquelle j’étais douée et pas qu’un peu. Et ensuite car le résultat final était intéressant à plus d’un titre. J’entrevoyais clairement les bénéfices personnels que je pouvais tirer de la réussite de notre projet. Et je savais très exactement ce que j’en ferais. La harpie en prendrait pour son grade. « J’ai fait pas mal de rrrecherrrches oui mais j’ai aussi eu l’occasion d’expérrrimenter. J’ai trrrouvé des livrrres intérrrressants chez moi en Norrrvège. Et clairrrement, le sang de rrre’em me semble êtrrre un élément clé dans la rrrecette qui nous intérrrésse. Le plus difficile c’est de rrréussir à le stabiliser. Et surrrtout de trrrouver comment le marrrier avec d’autrrres ingrrrédients pourrr que les effets soient plus durrrables dans le temps. » Là-dessus aussi, j’avais quelques pistes mais il restait encore du pain sur la planche. Ce n’était cependant pas ce qui m’inquiétait le plus. « Le prrroblème c’est que c’est assez difficile de s’en prrrocurrrer. Ma grrrand-mèrrre a pu m’en fourrrnirrr un peu pour que je fasse des essais mais je doute qu’elle accepte de m’en envoyer parrr hibou et puis elle rrrisque de me demander des explications. Ce que j’aimerrrais mieux éviter. » Mansfield avait peut être plus d’un tour dans son sac mais il ne s’agissait pas ici de mucus de veracrasse. Le re’em n’était pas un animal que l’on croisait à tous les coins de rue…

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A comme Association

Sans doute mieux réveillée que la fois précédente, la jeune fille paraissait de fait dans de meilleures dispositions concernant leur petit projet. D'ailleurs, n'était-ce pas elle qui l'avait relancé en lui envoyant un hiboux quelques jours seulement après la rentrée ? Blaze n'avait pas osé en espérer autant mais du coup la motivation l'avait immédiatement regagné et il se sentait d'attaque pour faire de grandes choses et ce dès ce soir si nécessaire.

Il écouta avec attention Judith lui faire un compte-rendu plutôt détaillé de ses recherches durant l'été, soulignant par là-même à Blaze que lui-même s'était un peu tourné les pouces, ayant passé la moitié du temps en camp de vacance et l'autre soit avec Misha soit à trainer dans la boutique de ses parents où il donnait un coup de main. Clairement, même si sa famille n'était pas à plaindre, ils étaient loin de posséder leur propre atelier de préparation de potions et la chose qui s'en rapprochait le plus était le fourneau ensorcelé de la boulangerie.

- Ok c'est génial tout ça ! s'exclama-t-il pour se donner l'impression de participer. Avec les concours de potions et compagnie ça va nous fournir de nouvelles occasions pour récupérer ce qui nous manque... ou pourrait nous manquer, à mon avis. Par contre, il va falloir se trouver un endroit où bosser tranquillement.

Il se laissa aller dans son fauteuil, croisant les jambes en tailleur tout à sa réflexion.

- Réunir les ingrédients, j'ai dit que je m'en chargerai. Il faut juste que tu me fasses une liste claire de ce dont tu as besoin. Comme je vais pas faire cinquante allé-retour, mets aussi ce que tu penses qui pourrait nous servir que j'ai pas besoin d'y retourner.

L'année précédente, il avait réussi à faucher un bocal vide dans la réserve, croyant à l'époque qu'il contenait un billywig. Finalement l'étiquette s'était révélée trompeuse mais cela prouvait bien qu'avec un peu d'habilité on pouvait pénétrer dans le petit sanctuaire du maître des potions. Le plus dure restant tout de même d'échapper au regard des tableaux mais heureusement ils n'étaient pas présent en permanence dans leurs cadres et avec la compétition à venir on pouvait espérer qu'il seraient occupés ailleurs.

- Pour travailler, il y a bien la salle sur demande mais elle est quand même souvent occupée maintenant que tout le monde sait où c'est...

Préparer une potion d'une telle complexité ne s'improvisait pas, il fallait être clair. Leurs petits chaudrons d'écoliers n'allaient clairement pas suffir pour un tel niveau de préparation aussi il était absolument nécessaire d'avoir accès à un outillage professionnel. Passant en revue tous les coins possibles où trouver ce genre de matériel, un sourire vint finalement illuminer le visage de Blaze. Un sourire qui n'anonnçait rien de bon.

- J'ai une idée... audacieuse. Il se trouve qu'un passage secret mène jusqu'à la cave de HoneyDukes, tu sais ? Celle avec tous les alambiques pour préparer les bonbons ?

A regarder Judith, il n'était pas certain que la jeune fille soit le genre de personne à rafoler des confiseries et quand bien même, il ne l'imaginait pas se fondre dans la masse braillante des élèves qui s'y accumulaient pendant les sorties à Pré-au-lard.

- Enfin bref, si on y allait de nuit, en étant silencieux, on aurait accès à tout le matériel. Le proprio dort au premier, nous à la cave, ça devrait passer t'en penses quoi ?

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Au clair de la lune

Blaze & Judith

« Tromper l'ennui dans ce château maudit »

Quand il s’agissait de potions, je devenais intarissable. Quelle différence avec notre dernière conversation ! Mais contrairement à la dernière fois, Blaze ne m’avait pas surprise au beau milieu de la nuit tentant de trouver le sommeil après la rouste que m’avait infligée Erin. Je n’aimais pas trop ce genre d’embuscade et je préférais mille fois les rendez-vous clairs et bien calculés comme celui-ci. Cela laissait le temps de me préparer, même si en l’occurrence, le sujet du jour ne me mettait pas vraiment en difficulté. « Ok c'est génial tout ça ! » Je n’étais pas certaine qu’il ait vraiment écouté le fond de ce que je lui racontais. La pratique semblait l’intéresser bien plus que l’aspect théorique. Et cela me convenait. Il complèterait là où mes capacités faisaient défaut. « Je ne parrrticipe pas au concourrrrs. Je n’ai pas trrrouvé de binôme. » Je n’avais pas non plus beaucoup cherché. Faire équipe avec quelqu’un m’avait toujours répugné. Et de toute manière, j’aurais eu bien du mal à débusquer quelqu’un qui soit prêt à travailler avec moi. En règle général, les devoirs collectifs imposés tournaient toujours au fiasco…

« Réunir les ingrédients, j'ai dit que je m'en chargerai. »C’était effectivement ce qu’il avait proposé et je hochai la tête en guide d’assentiment. Cela m’arrangeait bien. La seule fois où j’étais parvenue à sortir quelque chose du placard à ingrédients du Professeur Burgess, j’avais écopé de la première et unique retenue de ma vie. « Je dois norrrmalement avoirrr des courrrs parrticuliers avec le prrrofesseur Van Aken. S’il manque quelque chose, je pourrrrais éventuellement compléter le stock. Mais en derrrnier rrrecourrrs seulement car c’est un ami de ma famille et je ne voudrrrais pas qu’il ait une mauvaise image de moi. » Et je le pensais franchement. Alexander m’estimait assez pour me proposer des leçons supplémentaires, je ne voulais surtout pas lui donner tort. D’autant que l’incident parviendrait irrémédiablement aux oreilles de ma grand-mère, ce qui me causerait assurément plus d’ennuis qu’une petite retenue. « Je vais établirrr une liste détaillée d’ici les jourrrs à venirrr. Pour les ingrrrédients les plus courrrants, ce ne serrra pas la peine, j’en ai déjà un bon stock. Ce sont ceux dont nous ne nous serrrvons pas en classe qui vont poser prrroblème. » Et dans tous les sens du terme : le risque était d’autant plus grand que les éléments étaient rares. Si Blaze se faisait prendre, il serait difficile d’expliquer qu’il voulait juste plaisanter. « Et encorrre faut-il que l’on trrrouve tout ce dont nous avons besoin. Je pense surrrtout au sang de rrre’em justement. Sans lui, cela tombe à l’eau. »

Mais il n’y avait pas que les ingrédients à trouver… Si ce n’était que cela, l’entreprise aurait pu s’avérer « facile ». Il nous fallait également trouver un endroit calme où personne ne nous dérangerait, élève ou adulte. Et les endroits paisibles dans cette école, il n’y en avait pas des masses… Mais je n’étais encore une fois pas spécialisée en la matière. Je n’avais jamais vraiment eu besoin de me cacher plus que de raison et la plupart du temps, les salles inutilisées du premier étage me suffisaient amplement. Un sourire éclaira le visage de mon drôle d’acolyte. Je ne savais pas si je devais prendre cela pour un bon ou pour un mauvais présage. « J'ai une idée... audacieuse. Il se trouve qu'un passage secret mène jusqu'à la cave de HoneyDukes, tu sais ? Celle avec tous les alambiques pour préparer les bonbons ? » J’avais une vague idée de ce dont il me parlait. Je n’avais pas souvent mis les pieds à Pré-au-Lard et clairement ce n’était pas les confiseries que je fréquentais en règle générale. « Je ne vois pas non mais j’imagine que tu es plus calé que moi en la matièrrre. » Je le laissais exposer le reste de son idée. Et à ce niveau-là, ce n’était plus de l’audace mais du suicide. Je n'avais néanmoins pas de meilleure suggestion à lui faire. Je ne connaissais pas assez Poudlard et ses recoins pour cela. « C’est audacieux en effet. Et nous sommes trrributairrres de beaucoup de parrramètrrres que nous ne maîtrrrisons pas. Mais l’avantage indéniable c’est l’accès dirrrect au matérrriel. Nous n’aurrrions même pas besoin de le trrransporrrter. » Mon cerveau fonctionnait à cent à l’heure, cherchant à calibrer le moindre détail qui pourrait nous mettre en défaut. Je n’aimais pas l’imprévisible et je cherchais constamment à m’en protéger. « Tu maîtrrrises l’assurrrdiato ? Je ne voudrrrais pas rrréveiller qu’on rrréveille le prrroprriétairrre à cause d’un brrrruit malencontrrreux. » Nous n’étions pas l’abri d’une mauvaise interaction entre deux ingrédients. « Il faudrrrait aussi que l’on puisse prrrévoir un endrrroit où stocker les prrréparrrations. » Il fallait par exemple un mois pour fabriquer du polynectar. Je n’avais aucune idée du temps qu’il nous faudrait pour celle-ci mais nul doute que la présence d’un liquide inconnu dans sa cave mettrait la puce à l’oreille du gérant…

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Blaze hocha la tête quand Judith évoqua le vieux van Aken : il était effectivement préférable qu'elle ne se mouille qu'en dernier recours, d'abord parce que le jeune homme ne lui faisait pas trop confiance pour ce qui était de faucher efficacement quoi que ce soit, ensuite parce que le maître des potions n'avait jamais été son enseignant préféré, en tout cas il n'était pas jamais parvenu à entrer dans ses bonnes grâces ce qui avait tendance à l'agacer. Or avec Blaze, ou on était de ses amis, ou on était de ses ennemis et s'en aller piquer dans la réserve au nez et à la barbe de l'ancêtre avait un petit goût de revanche qi lui plaisait bien. L'idée qu'il donne des cours à Judith venait d'ailleurs confirmer ce petit sentiment d'injustice pour lequel il était temps de le faire payer.

- T'inquiète pas ! dit-il d'un ton mi-rassurant mi-prétentieux. On va faire étape par étape : si il manque des choses à la fin on envisagera d'en chercher ailleurs et au pire, il existe peut-être des substituts... si tu taffes avec le vieux, tu pourras lui demander. Enfin, subtilement quoi, faudrait pas qu'il se doute d'un truc.

Mais plus que de berner le professeur de potion, la partie la plus amusante de leur plan serait sûrement l'infiltration du magasin de farces et attrapes de Pré-au-lard pendant la nuit. C'était une aventure très ambitieuse, beaucoup plus que la plupart de celles qu'il avait pu organiser avec son groupe d'amis et si Blaze aurait certainement bien aimé partager cela avec eux il voyait aussi cet essai comme une première pierre pour des projets de plus grande envergure. Après tout, il entrait désormais en cinquième année, le temps filait mine de rien et le jeune homme comptait bien profiter à fond des années qu'il lui restait à Poudlard.

Lorsque Judith lui demanda s'il maîtrisait l'asurdiato, Blaze se fendit d'un sourire. Comment diable n'y avait-il pas pensé lui-même.

- Eh malin ! Non c'est un sortilège de sixième année je crois, mais je peux m'entrainer, ça ne doit pas être sorcier.

Très fier de sa blague, il ajouta :

- Pour le coup, la salle sur demande ferait le taff, non ? Vu qu'on a pas besoin d'y être longtemps, on demande un lieu ou cacher nos affaires, on dépose tout et on file ? Il se laissa aller dans son fauteuil en réfléchissant. Je les mettrais bien dans mon dortoir mais avec Cam' préfet ça risque d'être chaud quand même...

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Blaze & Judith

« Tromper l'ennui dans ce château maudit »

Que Blaze se charge des ingrédients, cela me rassurait quelque peu. L’ensemble de l’entreprise était déjà relativement dangereux, je ne voulais pas prendre plus de risques que nécessaire. Je jouissais d’une réputation quasi parfaite, si l’on exceptait les rumeurs qui tournaient autour de mon nom de famille et je préférais que cela ne change pas. Je ne songeais pas une minute aux conséquences pour Mansfield si celui-ci se faisait prendre. Avec du recul, c’était une attitude tout à fait égoïste, on se refait pas ! Sa stratégie me convenait donc parfaitement pour le moment. « Ne t’en fais pas, je suis capable de subtilité. Même si visiblement, tu en doutes ! » C’était dit sans animosité et un léger sourire éclaira mon visage. Après tout, si nous devions travailler ensemble, j’avais peut-être intérêt à me montrer un peu plus… sympathique ? Même si je doutais fortement des mes capacités en matière de socialisation.

Bon, pour ce qui était du contenu de la marmite, nous étions à peu près au point. Enfin, bien sûr rien n’était fait mais la théorie était posée. Restait maintenant à élaborer la phase pratique qui était de loin la plus compliquée. S’installer dans la cave d’Honey Dukes me paraissait très risqué mais je n’étais pas une habituée de ce type de « plan ». Là-dessus, je n’avais pas d’autre choix que de faire confiance à Blaze, qui était je n’en doutais pas, plus habitué que moi aux activités illicites. L’idée avait cependant quelque chose d’attirant, pensée que je n’aurais jamais cru avoir… Je n’avais pratiquement jamais enfreint les règles jusqu’ici. D’ailleurs, cela ne s’était pas encore produit mais rien que le fait de le programmer était une nouveauté. Il fallait dire que Poudlard offrait bien peu de motifs de divertissement… Tromper l’ennui n’était pas chose aisée. « Eh malin ! Non c'est un sortilège de sixième année je crois, mais je peux m'entrainer, ça ne doit pas être sorcier. » Restait à voir s’il méritait sa place chez les Serdaigles. Bien que je n’ai jamais prêté beaucoup de crédibilité à cette histoire de maison : il n’y avait qu’à voir la répartition de mes aînés. Pour Hannibal encore, d’accord. Mais Finn et Erin ? Une vraie comédie. « Parrrfait ! Tu me tiendrrras au courrrant de tes exploits. Sinon on trrrouvera une autrrre solution. » Laquelle ? Mystère. Je ne connaissais pas mille façons d’insonoriser une pièce mais ma science n’était pas infinie. Je ne relevai pas sa blague. D’ailleurs, je n’aurais pas su quoi répondre à cela.

Les détails se réglaient les uns après les autres et leur plan prenait forme petit à petit. Il n’y avait plus qu’à espérer que tout se déroule correctement et sans embûches. Ce qui n’était pas gagné. « Oui ça pourrrrait aller. Le passage est loin de la salle surrr demande ? Ce serrrait dommage de se fairrre pincer surrr le chemin du rrretourrr. » Et encore plus de se voir confisquer leur labeur d’une nuit. « Oui inutile de prrrendrrre le rrrisque de tout rrramener dans la salle commune, on ne sait jamais qui peut tomber dessus ! » Même si promener toute une marmite de potion non terminée à travers le château et après le couvre-feu n’était pas non plus sans péril. « Il va falloir la tester à un moment donné également. Je prrrévoirrrai les antidotes les plus communs, au cas-où. J’espèrrre que ce serrra suffisant. » Courir à l’infirmerie ou dans les appartement d’Alexander pour cause d’ingestion de mixture non approuvée n’était pas une option valable.

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Si Blaze ne put s'empêcher de lâcher un discret ricanement quand Judith eut l'air de s'offusquer en lui répondant qu'il la pensait incapable de subtilité, ce n'était pas méchant pour deux sous. Après tout, si sa grande soeur Erin n'était clairement pas un modèle de nuance, on ne pouvait pas en dire autant d'Hannibal et de Finnbjörn qui pour extrêmement agaçants qu'ils étaient n'en étaient pas moins des gens dont Blaze reconnaissant le sens politique. Non, c'était surtout qu'avec ses airs de discrète sainte nitouche, le jeune homme pensait sa camarade assez incapable de véritable roublardise, tombant de fait dans le piège qu'il tendait lui-même aux autres avec sa tête de bonne famille. Un ange pouvait très bien cacher un démon, il aurait pourtant dû le savoir.

Il lui assura rapidement qu'il s'entrainerait au sortilège d'asurdiato ce qui, tout comptes faits, faisait reposer sur ses épaules une grande partie de leur opération. Mais cela lui convenait très bien, le serdaigle était tout à fait conscient qu'il ne parviendrait pas à réaliser l'exploit de reproduire la potion seul et même si cela lui faisait un peu mal de le reconnaitre, Judith avait les capacité intellectuelles et les ressources financières pour y parvenir bien mieux que lui. Le plus stratégique était désormais de s'associer à elle et de lui faciliter la vie pour tirer profit de sa future réussite. Une grande partie de son job consistait donc à trouver des solutions à la plupart des problèmes techniques que poseraient l'opération et que la jeune fille soulevait les uns après les autres.

- Il y a quatre étages entre le passage et la salle sur demande. Donc à moins d'avoir une cape d'invisibilité, va falloir trouver quelque chose pour se faire discrets...

Il se laissa aller dans le fauteuil, signe apparent de se réflexion.

- J'ai envie de te dire que pour la potion en elle-même, on peut juste la glisser dans des thermos de café, personne ira vérifier le contenu. Il eut un sourire et précisa : C'est des espèces de bouteilles opaques pour garder les liquides au chaud, pas de magie là dedans donc pas de risques d'altérer le produit.

Avec les sang-purs, on n'était jamais à l'abri d'un quiproquo quand on utilisait du vocabulaire moldu. Blaze lui-même s'était senti bien idiot à plusieurs reprises en compagnie de Skyler ou des jumeaux Brown quand ces derniers évoquaient le plus naturellement du monde des éléments de leur quotidien qui lui étaient complètement étrangers.

- C'est le reste du matériel qui peut poser soucis, se balader avec des chaudrons crasseux en pleine nuit c'est louche. Quoique... on pourrait peut-être se trouver un de ces sacs sans fond, non ? Comme ça on se fait pas chier à tout transporter à la main. Ça doit se trouver en boutique un truc comme ça.

Et si la riche famille Sorensen pouvait financer un tel objet, le jeune homme signait immédiatement. De toute manière, c'était ça ou rien, sa mère rechignant déjà à augmenter son argent de poche de la moindre mornille si son fils ne lui présentait pas une raison justifiée et limite tamponnée par un professeur de Poudlard.

Pour ce qui était de tester la potion, processus nécessaire à toute expérimentation, Blaze n'avait pas trop d'avis. Il n'aurait pas eu beaucoup de scrupules à en glisser quelques gouttes dans le jus de citrouille d'un camarade mais si le résultat était que ce-dernier tombait malade, on risquait d'attirer l'attention sur leur travail. Pire, si la potion réussissait, c'était prendre le risque d'augmenter les pouvoirs d'un idiot.

Il haussa les épaules.

- Soit on teste sur nous, soit sur un premier année. Comme ça si ses pouvoirs augmentent, il ne s'en rendra peut-être même pas compte lui-même.

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« Tromper l'ennui dans ce château maudit »

Bien que je sois capable d’ironie, je ne savais jamais sur quel pied danser pour ce qu’il s’agissait des réactions d’autrui. Blaze avait ricané et j’étais incapable d’interpréter cela. Se moquait-il de moi ? Ou peut-être qu’il n’y fallait voir aucun mal. C’était très certainement une des raisons pour lesquelles je faisais preuve de peu d’humour, quitte à passer pour une porte de prison. Mais passons, nous n’étions pas là pour faire connaissance et tailler le bout de gras en buvant du thé. Je fis comme si de rien n’était. Je continuais à réfléchir aux différents aspects de notre plan. Je n’aimais pas les choses imprévues et anticiper les événements me rassurait. Bien sûr, il serait difficile de pallier à toutes les éventualités et je ne doutais pas qu’à un moment ou à un autre, il nous faudrait improviser. Ne serait-ce que quand viendrait le moment de remonter de la cave d’Honey Dukes à une heure interdite… « Je n’ai pas de cape d’invisibilité sous la main… Et c’est un objet tellement rrrarre que je ne vois même pas comment je pourrrrais nous en prrrrocurrrer une… » Ma famille n’était financièrement pas à plaindre mais les gallions ne pouvaient pas tout acheter. Mettre la main sur un artefact d’une telle valeur pouvait sans doute prendre des mois voire des années. « Et le sorrrtilège de désillusion n’est pas à notrrre porrrtée… » Ce qui restait encore le moyen le plus facile de cacher aux yeux des autres. Malheureusement, même si nous n’étions pas mauvais sorciers, le niveau requis pour ce type de magie surpassait de loin le nôtre. « Il y a bien le polynectarrr mais c’est rrrisqué : déjà avec mon accent j’aurrrais bien du mal à me fairrre passer pour autrrrui. Et puis c’est long à fabrrriquer. » Un mois complet de préparation et tout cela pour remonter quatre étages ? Est-ce que le jeu en valait la chandelle ? Pas sûr. D’autant que si nous tombions sur quelqu’un, il faudrait être de parfaits acteurs. « Je crrrois qu’on aurrra pas d’autrrre choix que d’êtrrrre prrrudents. »

Blaze s’était enfoncé dans son fauteuil tandis que je restais toujours dans la même position, genoux relevés dans un geste quasi défensif. Et cela malgré moi. « J'ai envie de te dire que pour la potion en elle-même, on peut juste la glisser dans des thermos de café. Un quoi ? Mon visage devait refléter mon ignorance car Mansfield s’empressa de préciser. Je n’étais clairement pas une adepte des objets et coutumes moldus mais je devais admettre que dans ce cas, cela ferait clairement notre affaire. « Ça peut marrrcher effectivement. Mais je ne sais pas du tout où on trrrrouve ce… therrrmos, c’est ça ? Tu en as un toi ? » J’avais bien du mal à me représenter ce à quoi cela pouvait bien ressembler. Et je ne me voyais pas fréquenter une boutique pleine de sang-de-bourbes ou demander à un membre de ma famille de le faire pour moi. C’était impensable. « C'est le reste du matériel qui peut poser soucis. » Il soulignait là un point important… En plus d’être louche, ce chargement risquait de nous ralentir et de nous rendre moins discrets. Là encore, mon acolyte fit preuve d’une belle inventivité. « Pour le côté crrrasseux, un coup de rrrecurrrvite avant de lever le camp ferrra l’affairrre. C’est une bonne idée le sac sans fond, je me charrrge de cela, cela ne devrrrait pas êtrrre trrrop difficile à obtenirrr. » Je n’aurais qu’à prétexter que le poids de mes manuels devenait handicapant et ma grand-mère m’en ferait parvenir un sans délai. Cela ne poserait aucun problème.

Restait à régler les difficultés de la phase d’expérimentation. Je n’avais pas envisagé d’utiliser des cobayes par peur d’être démasquée mais visiblement cela ne semblait pas faire peur au Serdaigle. « Peut-êtrrre que l’on pourrrait tester les prrremières phases sur un prrremier année ? Ce sont celles qui ont le plus de rrrrisques d’échouer. Mais il faut en trrrouver un suffisamment crrrédule et qui n’irrrra pas tout rrraconter au prrremier venu… » Pour la stupidité, je n’avais aucun doute sur le fait que cela serait facile à trouver à Poudlard. Suffisait de voir le taux de crétinité de ma promotion. En revanche, quelqu’un capable de se taire, cela devait être beaucoup plus difficile.

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Lorsqu'il s'était décidé à aborder Judith, l'année dernière, Blaze ne connaissait d'elle que son talent certain pour la préparation des potions. Talent qu'il avait remarqué, mais de loin, n'ayant ni la patience ni l'occasion de fréquenter des élèves alors en troisième année sans un bon motif, de toute façon il doutait que la cadette des Sorensen se montre très intéressée par son amitié. Mais finalement, malgré un premier contact seulement motivé par le pragmatisme, le jeune homme découvrait chez sa camarade un véritable esprit d'initiative et - plus étonnant encore - une certaine forme d'énergie motivante. Lui qui avait craint de s'associer avec un bloc de glace, se fiant au caractère très monolithique de la famille, Judith se révélait plus amusante qu'il ne le pensait, et force de propositions ingénieuses.

Suivant silencieusement le raisonnement de la jeune fille qui énumérait tour à tour les propositions : capes d'invisibilité, désillusion et polynectar pour à chaque fois les rejeter non sans raison. Si dans un autre monde Blaze aurait certainement été partant pour tester la moitié d'entre-elles, il fallait cette fois se montrer sérieux, le plaisir viendrait moins de la discipline qu'ils s'imposeraient que du résultat final. Mais tout de même, l'imagination de Judith lui tira un sourire amusé, montrant bien qu'elle pouvait indiscutablement faire preuve un certain esprit d'aventure.

- T'inquiète. conclue-t-il d'un ton un peu frimeur. Je sors en douce dans ce chateau depuis la première année, ça n'est pas SI difficile que ça d'éviter les ennuis.

Visiblement il avait eu le nez fin en lançant la jeune fille sur l'idée d'un sac sans fond, celle-ci lui confirmant qu'elle n'aurait pas grand mal à leur en trouver un. Parfait, ainsi chacun apportait tour à tour sa pierre à l'édifice, c'était ça former une vraie équipe et c'était un sentiment particulièrement agréable, il fallait bien le reconnaitre, que de voir soudain leur projet très concrètement prendre forme, tout en partageant cette énergie avec un autre être humain.

Restait quand même le dernier problème et pas des moindre : qui se porterait volontaire pour le test final ? Pour martyriser régulièrement les premières années depuis un bon moment, Blaze savait qu'ils ne se plaignaient en vérité que rarement, souvent de peur de passer pour des rabats-joies ou que les farces reprennent de plus belle. C'était l'intérêt des internats : il existait un certain esprit de corps entre les étudiants, d'autant plus que dénoncer un camarade de sa propre maison revenait à prendre le risque de faire perdre des points à tout le monde pour la compétition finale.

- On trouvera bien quelque chose à leur promettre en échange de quelques maux de ventre. Les premières années découvrent tout, contre un secret ou la promesse d'une formule très puissante pour frimer devant leurs amis ils feraient n'importe quoi.

Blaze parlait là en connaissance de cause : il était passé exactement par cette même étape, cinq ans auparavant.

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Blaze & Judith

« Tromper l'ennui dans ce château maudit »

Notre petite affaire avançait bien. Finalement, j’étais peut-être capable de m’associer avec quelqu’un d’autre que moi-même. J’aurais somme toute dû m’inscrire à ce stupide concours de potions. Mais il était trop tard maintenant et l’heure des regrets n’étaient pas venus. Je n’avais pas besoin d’entrer en compétition avec le reste de l’école pour savoir ce que je valais. Et ce que me proposait Blaze aujourd’hui était infiniment plus intéressant que ce que nous demandait Alexander, avec tout le respect que j’avais pour lui. Le « T'inquiète » un peu prétentieux de Mansfield m’arracha un vrai sourire. Avec le temps, je pourrais possiblement m’habituer à cet aspect-là de sa personnalité qui contrastait tant avec le mien. C’était sans doute d’ailleurs cette distance entre nous deux qui ferait fonctionner notre duo. « Tu m’en dirrras tant. Et à combien d’heurrres de rrretenue s’élève ton palmarrrès ? » Je ne doutais pas qu’il devait dépasser très largement le mien et mon unique sanction infligée par l’ancienne maîtresse des potions. Je n’avais jamais été aussi heureuse de voir s’en aller un brillant professeur, effaçant par là-même mon ardoise au sein du château.

La nuit avançait et notre plan prenait forme. Il ne restait plus grand chose que nous puissions anticiper, il faudrait maintenant improviser au fil de l’eau. Là dessus, je comptais amplement sur les capacités de Blaze car même si j’étais loin d’être idiote, je n’aimais pas être prise au dépourvu. Mon acolyte semblait totalement confiant pour ce qui touchait aux testes auxquels il faudrait probablement se livrer. Même si je n’avais jamais trop douté de l’idiotie des élèves de Poudlard, la voir ainsi étalée se révélait navrant. Il fallait être complètement écervelé pour accepter de goûter une mixture venant d’inconnus sans aucune garantie. Enfin, ce que j’en disais... Cela arrangeait bien nos affaires d’avoir autant d’êtres stupides sous la main. « Je te laisse le contrrrôle des rrrelations humaines. Tu dois sans doute avoirrr constaté que ce n’est pas mon point forrrt. » Et même s’il ne me connaissait pas particulièrement, la réputation des Sørensen n’était plus à faire.

Le feu commençait à faiblir dans l’âtre et je frissonnai. Je n’étais pas assez couverte et la fatigue commençait à se faire sentir. Que ce château pouvait être froid… Et pourtant j’étais née et avait grandi en Norvège. Mais notre demeure de Kristiansand, malgré ses épais murs de pierre, m’était toujours apparue beaucoup plus chaleureuse que ne le serait jamais ce trou perdu d’Ecosse. Je ne pus retenir un bâillement incontrôlé. Je portai ma main au visage en rougissant. Ce n’était pas très poli... « Je crrrois qu’il est temps que je rrregagne mon dorrrtoirrr… » De toute évidence, nous n’avions plus rien à planifier. Restait maintenant à rassembler tout ce dont nous avions discuté. Dès demain, je m’attellerai à préparer une liste des ingrédients dont nous pourrions avoir besoin. Je sautai hors de mon fauteuil dans un geste qui ressemblait à celui d’un chat et pris le chemin de l’escalier. « C’est un plaisirrr de fairrre des affairrres avec toi Mansfield. »

(c) DΛNDELION

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