Spoiler:

Quand il avait parcouru pour la première fois son emploi du temps, il y avait eu un cours en particulier qui l'avait interpellé. Défense contre les forces du mal. Tout le reste, il voyait : "botanique", "astronomie" ou imaginait "potion", "sortilèges" mais défense ? Qu'est-ce que cela pouvait bien signifier ? Incapable de se représenter le contenu d'un tel enseignement et refusant par principe de demander des précisions aux élèves plus âgés de sa maison, il en était arrivé à la conclusion qu'il devait certainement s'agir d'une sorte d'entrainement militaire pour les préparer à combattre des monstres.

Colin avait toujours rêvé de faire l'armée, devenir un soldat, un officier de marine, plus précisément, mais il ne parvenait pas à se dire qu'on enseignerait un tel programme à des élèves aussi jeune. Bien sûr, lui-même avait voulu aller dans un lycée militaire, mais après, plus tard, onze ans c'était quand même tôt pour jouer à la guerre et de toute façon tout ce qui venait des sorciers était forcément idiot ou mal-fichu. Au mieux on risquait de se blesser.

C'est donc un peu suspicieux qu'il pénétra ce jour là dans la classe, suspicion qui ne fit que s'accroitre lorsque la porte de la salle claqua derrière lui. Les lieux clos n'avait jamais dérangé Colin, sur son bateau il alternait entre grands espaces et tout petits, allant parfois jusqu'à se faufiler pour le plaisir entre les machines, dans des recoins inaccessibles dont sa petite taille lui autorisait le passage. Ce qu'il aimait moins en revanche, c'était la foule d’élève, n'ayant jamais eu sa place avec d'autres enfants, et se trouver ainsi coincé avec eux l'embêtait. Et si l'un se mettait à crier ? Et s'il y avait un feu ? Est-ce que refermer la porte comme ça était bien aux normes ?

Heureusement, leur professeure semblait savoir ce qu'elle faisait. Contrairement aux autres, elle ne s'embarrassa pas de bienvenues un peu nulles et entra directement dans le vif du sujet en annonçant ses règles, et Colin adorait les règles. Les règles étaient ce qui le faisait se sentir en sécurité, ce qui disciplinait le corps, la tête et tous les autres enfants de la pièce, les règles permettait à chacun de savoir où était sa place et d'y faire du bon travail.

Il se surprit d'ailleurs à hocher une ou deux fois la tête quand Miss Thorstein leur parla de valeurs, d'excellence et de discipline, autant de mots qui trouvaient un fort écho chez Colin et le confortait de plus en plus dans l'idée que tout ça avait quelque chose de militaire, martial même, et tant pis si c'était une femme qui s'en chargeait, après tout ils n'étaient que des enfants.

Il laissa un peu trainer son regard sur les autres élèves, certains plus ou moins déconcertés, éprouvant une joie discrète à l'idée que ces sorciers chahuteurs doivent bientôt se conformer à une obéissance stricte des règles, chose à laquelle certainement ils ne devaient pas trop être habitués vu leurs caractères dispersés et leurs goûts pour les bêtises.

C'est donc avec une certaine confiance qu'il entendit Thorstein annoncer qu'elle allait les mettre à l'épreuve et que la trappe devant elle s'ouvrit.

Un instant Colin resta perplexe, puis ouvrit des yeux ronds. C'était la première fois de sa vie qu'il voyait véritablement une créature magique. Il avait bien entraperçu quelques fées dans la grande salle et des fantômes au banquet mais ça, ça ce n'était clairement pas humain ! Et pas animal non plus. Et encore moins tout seul.

Son premier réflexe quand les diablotins s'échappèrent de la trappe fut d'avoir un geste de recul mais il heurta un autre élève qui lui aussi cherchait à s'éloigner de la trappe et puis tout commença à partir en vrille. Les créatures leurs sautèrent dessus, griffant, mordillant, tirant les cheveux... Pas un instant Colin ne pensa à se servir de sa baguette, il en aurait de toute façon été bien incapable, et plaquant ses mains sur son crâne les agita pour essayer de repousser les petites bêtes mais rien n'y faisait.

Il continua à reculer les yeux à demi-fermés, battant des bras dans tous les sens, jusqu'à heurter une armoire contre un mur. Ses doigts s'étaient refermés sur un diable et l'espace d'un instant, Colin pu le regarder.

- Beurk... lâcha-t-il dégouté alors qu'il lâchait encore plus littéralement la créature qui s'était mis à lui mordre la main.

Autour de lui, c'était le chaos. Les élèves couraient, s'agitaient, criaient, certains tentaient bien des choses étranges mais rien ne semblait vraiment capable de repousser les animaux. Colin profita de cet instant d'accalmie, regardant tout autour de lui avec un air éberlué la scène. Ce n'était pas un entrainement militaire du tout, c'était un carnage, c'était... c'était carrément un entrainement militaire, en fait. Juste qu'on commençait directement et sans prévenir par les choses sérieuses.

Le garçon jeta un œil à la professeure qui semblait s'amuser de la situation, confirmant qu'au fond il n'y avait rien à craindre, ou se délectant de la détresse de ses élèves. Eleves que Colin avait beau mépriser globalement encore quelques minutes plus tôt, il ne pouvait les abandonner à leur sort, d'autant plus que le sien était lié à ceux des autres. "Protéger et servir" c'était des valeurs importantes, des valeurs qu'il devait mettre en pratique chaque jour, son père le lui avait dit, si ces sorciers n'étaient pas capable de se défendre tout seul, il fallait que quelqu'un prenne les choses en main.

Fonçant au milieu de la pièce, Colin couru jusqu'à sa besace, bientôt de nouveau couvert de diablotin qui s'étaient remis à lui tirer les cheveux et lui griffer la peau, et sortit un livre. Un manuel de potion. Lourd.

D'un grand geste, il balaya l'air à l'aide du manuel. Les lutins esquivèrent sans difficultés ce qui lui fit froncer les sourcils. Seul, il n'arriverait à rien, mais ensemble...

- Regroupez vous !! Tous au centre de la pièce ! cria-t-il mi-encourageant mi-désespéré.

Colin avait beau être pétri de valeurs, il n'en restait pas moins indécrottablement timide et mal à l'aise avec les autres enfants de son âge, mais paradoxalement, leur donner des ordres était plus facile que de sympathiser et il réitéra ses indications.

- Tous avec un livre !! Allez ! Dos à dos et tapez dans le vide !! Si on se colle on se protégera les uns les autres !

Toujours isolé, Colin n'arrivait à rien, mais tous ensemble, ils pouvaient repousser les diablotins... à condition que ses camarades fassent preuve d'un minimum de discipline, bien entendu.

HRP:

Dernier jour de cours de leur première semaine à Poudlard ; Dmitri ne pouvait pas encore se vanter d’avoir pris ses marques. Il continuait de faire des détours inutiles pour aller d’une salle à l’autre, les escaliers n’étant pas particulièrement coopératif. Pour une fois, le trajet fut pourtant rapide et effectué sans encombre : il venait de la grande salle et n’avait donc qu’un étage à grimper, ce qui diminuait grandement le risque d’avoir des soucis avec les marches dérobées, les rampes mouvantes et autres pièges que cachaient l’intérieur du château. Par habitude, il avait tout de même pris de la marge et arrivait donc en avance devant la salle de classe, bien qu’il ne soit pas le premier élève sur place. « Salut » fit-il machinalement à ses camarades déjà présents.

Le cours de défense contre les forces du mal était un de ceux qu’il avait attendu avec le plus d’impatience. Cet enseignement semblait en effet promettre plus d’action que d’autres, sans pour autant se révéler salissant comme la botanique, et entrait également dans un domaine qui attisait facilement les passions et se révélait être plus concret, de prime abord en tout cas, que d’autres. Une autre chose l’attirait également dans ce cours : ce qu’on en disait du professeur. Ou plutôt, ce qu’en avait dit un autre garçon plus âgé de serdaigle, Blaze. Celui-ci l’avait prévenu qu’un professeur, dont il avait par la suite reconnu le nom sur l’emploi du temps en raison de sa consonance étrangère, avait tendance à faire pleurer des élèves dès le premier jour. Simplement pour voir ce qui pouvait bien soulever de telles réactions, Dmitri était curieux de rencontrer l’enseignant.

Lorsqu’il pénétra dans la salle, ouverte avant le début du cours, il fut donc surpris par deux choses : la première, et non des moindres, était le fait qu’il n’y ait ni chaises ni bureau. La pièce était vide, hormis un amas d’objets divers et variés disposés contre les murs. La seconde surprise fut le professeur en lui-même : bêtement, le tchèque s’était attendu à ce que le terrifiant professeur soit un homme. Il avait imaginé un étrange mélange entre son grand-oncle, pour la fermeté et le peu d’égard qu’il pouvait accorder à la sensibilité des gens, et son père, plus jeune donc plus vif et facilement porté sur la violence. Au lieu de ça, il avait une femme dans la force de l’âge, aux traits rudes et à l’accent guttural. Ses premiers mots furent ponctués d’un claquement de porte, dont le bruit fut accentué par l’absence de meubles, le son résonnant dans la pièce d’une manière presque trop théâtrale pour être naturelle.

Le professeur Thorstein évoqua médiocrité, excellence et ponctualité. Son discours d’accueil était de ceux qui raviraient son père, trop heureux d’entendre quelqu’un poser les bases solides d’une relation d’enseignant à élève ; des bases qui impliquaient sans nul doute de mettre sa volonté de côté pour obéir aveuglément aux ordres du professeur. Après tout, puisqu’il était le sachant, il était le plus apte à faire les choix pour les autres, n’est-ce pas ? Dmitri se distinguait de son père sur ce point-là, comme sur tant d’autres, et écoutait donc la harangue de cette femme avec un certain dédain, bien qu’il fît de son mieux pour ne pas le montrer. De toute manière, perdu dans la masse des élèves, il y avait peu de risque pour qu’elle le remarque.

S’ensuivit un coup de baguette, ouvrant une trappe depuis laquelle provenait un léger bruit semblable à un grouillement frénétique. Le son ne plaisait pas beaucoup au tchèque qui fut très rapidement sur ses gardes, du moins plus qu’il ne l’était depuis le claquement de la porte. La rosserie empreinte d’une mise à l’épreuve faite aux élèves de première année fut suivie de la découverte de l’origine du pullulement : des petites créatures mesurant une petite vingtaine de centimètres dotées d’un corps sombre et malingre se ruèrent sur les jeunes gens. Le tchèque crut reconnaître les petites bêtes pour en avoir vu des illustrations dans les contes pour enfant que l’on racontait aux petits sorciers en devenir. Ces êtres étaient sans nul doute ceux qui prenaient un malin plaisir à pousser les pauvres voyageurs dans les cours d’eau auprès desquelles ils vivaient. Mais reconnaître ce qui l’attaquait ne l’aidait guère dans ces circonstances : jamais on n’avait indiqué, dans les histoires qu’on lui lisait lorsqu’il était plus jeune, comment se débarrasser de ces affreuses petites choses.

Heureusement pour Dmitri, il avait eu la bonne idée de ne pas se poster face à l’habitacle de leurs assaillants et ne fut donc pas le premier attaqué. Mais les diablotins ne laissèrent de répits à personne : bien vite, il sentit son sac s’alourdir dans son dos et vit que l’un d’eux tentait de se glisser à l’intérieur, sans doute pour en sortir tout le contenu à la recherche d’objets qui pourrait lui servir d’arme. Ni une ni deux, le serdaigle se défit de son paquetage et projeta violemment celui-ci à ses pieds, ce qui eut le mérite de sonner quelques instants son indésirable occupant. Mais cela n’était guère suffisant, d’autant plus qu’à l’instar de ses camarades il était la cible de plusieurs diablotins. Ceux-ci s’acharnaient sur lui, tirant cheveux et vêtements dans tous les sens ; l’espace d’un instant, il eut l’absurde pensée qu’en réalité, la situation n’était pas si différente que lorsqu’il se trouvait sur les côtes des Hébrides alors qu’une tempête s’approchait. Et que faire contre une tempête lorsqu’on ne peut rentrer s’abriter ?

« Regroupez vous !! Tous au centre de la pièce ! » Un garçon de serpentard hélait ses camarades, appelant à l’union. Après tout, face à une horde de créatures les attaquant en groupe, ils n’avaient rien à perdre en s’unissant à leur tour. Obéissant à son camarade, ce qui en soit était déjà un immense effort venant de lui, il tenta de fouiller dans son sac pour en extraire un livre. Malheureusement, les diablotins ne lui laissaient aucun répit, visiblement bien déterminé à l’empêcher d’attraper la moindre chose. Il sentit l’un d’eux lui lacérer la joue, tandis qu’un autre tirait résolument ses cheveux vers l’arrière, sans toutefois parvenir à grand-chose, si ce n’est arracher des grimaces à sa victime. Pestant en tchèque contre ces abominations et son incapacité à attraper un livre, il opta pour la solution de secours : son sac ferait amplement l’affaire. Dmitri se rua vers Colin, surpris de voir que pour l’instant, aucun autre élève ne l’y avait rejoint. Dos à dos avec le serpentard, il ballota son sac dans le vide avec l’énergie du désespoir. Il se sentait parfaitement idiot et n’avait d’ailleurs pas particulièrement l’impression de parvenir à mieux se défendre. Le diablotin qui s’évertuait à lui arracher mèche après mèche profita de la seconde tête qui était désormais à portée de main pour s’acharner sur elle également : deux garçons pour le prix d’un, quelle aubaine !

HRP:

Dictionnaire:

HRP:

Spoiler:

Ça ne servait à rien...! Plusieurs de ses camarades l'avaient rejoint à présent et petit à petit ils avaient commencé à constituer une formation serrée mais force était de constater que les lutins étaient trop petits, trop habiles et trop agiles et si les élèves se protégeaient à peu près les uns les autres, ils se fatiguaient aussi pas mal dans le vide. En fait, tôt ou tard les premières années n'auraient plus la force de soulever leurs livres et sacs dans les airs et alors ce serait la fin... les créatures fondraient sur eux, brisant leurs défenses et réduisant leurs efforts à néant...

En fait, Colin en avait presque oublié que tout cela n'était qu'un cours. Les morsures, l'adrénaline étaient bien réelles et pris dans la panique de voir ses camarades et lui-même assaillis par cette nuée volante, il avait réagi de manière extrêmement premier degré et avait abordé la situation avec tout le sérieux qu'elle exigeait. Aussi quand sous l'ordre de son enseignante les lutins se figèrent tous dans les airs avant d'être avalés par la trappe, Colin resta un instant un peu hébété, plus très sûr de bien comprendre ce qui venait de se passer.

Il était un peu en nage, maintenant, mais ce n'était rien à côté de Kovit qui avait une espèce de purée bizarre étalée sur le visage et les mains, et le reste de la pièce était dans un chaos total. Retrouvant lentement son souffle, il entendit Thorstein reprendre la parole et... les féliciter. Il hallucinait un peu. Alors ça se finissait comme ça ? Bien sûr il avait tout de suite compris que tout ça n'était qu'un grand test mais voila, dans le désespoir du moment la chose lui avait paru si réelle, si physique, il avait encore mal à plusieurs endroits et Kovit... Kovit avait l'air d'avoir pas mal morflé, vu comme les créatures s'étaient acharnées à lui écraser des fruits sur la tête.

Son regard quitta son colocataire qui, comme à son habitude, semblait relativement serein, et se posa sur leur professeure qui continuait d'annoncer la suite du cours comme si de rien n'était. Autour de lui, certaines élèves semblaient s'être résigné et s'étaient mis à chercher des partenaires de duel, sans un mot pour ce qu'ils venaient d'affronter tous ensemble.

A nouveau, le garçon ressentit un fort tiraillement intérieur, partagé entre son respect quasi fanatique de l'ordre et des hiérarchies, et sa défiance profonde envers tout ce qui touchait au monde magique. Or là on venait littéralement de l'agresser et d'agresser ses camarades et son colocataire et leur professeure agissait comme si tout cela était parfaitement naturel, sans un mot d'excuse ou d'explication sur ce qu'ils venaient de vivre. Colin serra les poings, les dents, trépigna un peu sur place. S'il devait dire quelque chose, c'était maintenant ou jamais car il sentait bien que s'il laissait passer sa chance, toute son indignation deviendrait inappropriée.

Que devait-il faire ? Le tiraillement était terrible mais au fond de lui, une petite voix très juste lui soufflait que s'il choisissait de se taire, il se sentirait très lâche en rentrant dans son dortoir ce soir.

- Madame...?

Une fois de plus, le garçon sentit des regards se tourner vers lui et inspira profondément pour se donner du courage. C'était la bonne chose à faire.

- Il n'y a aucune ingéniosité là dedans : les foules paniquent toujours face à un danger si personne n'est formé à réagir en situation de crise. C'est vraiment dangereux ce qui vient de se passer, là, quelqu'un aurait pu se faire mal à cause des bousculades ou mettre le feu à quelque chose ou tomber et se crever un œil sur un objet pointu.

Pour appuyer le sérieux de son propos il tenta bien de regarder Thorstein dans les yeux mais se ravisa aussitôt qu'il eut croisé son regard et préféra fixer intensément le bureau juste en dessous d'elle pour donner le change.

- Je ne pense pas qu'il soit judicieux de mettre les gens dans ce genre de situation sans les avoir formé avant. Il désigna Kovit. Et je ne crois pas que ce soit légal de jeter des fruits à la figure des élèves.

Il insista sur le "avant". Pour lui, ce qui venait de se passer revenait à jeter un apprenti pompier dans un incendie pour "voir sa réaction" autant le condamner directement, c'était évident que quelque chose allait mal se dérouler. Il aurait bien aimé rajouter qu'il écrirait à son père pour le prévenir et peut-être même à la directrice car tout ça était honteux mais bizarrement le jeune homme se sentait largement moins en confiance face à Thorstein que devant le professeur O'Neill et tout sa hargne l'avait progressivement quitté au point de rendre son dernier reproche presque penaud.

Finalement, son regard avait baissé avec son ton et il réalisa qu'il était en train de fixer ses chaussures, déglutit et se redressa un peu avant de conclure :

- Voila... c'est tout ce que j'avais à dire.

Colin retint in extremis un "désolé" qui aurait discrédité toute sa critique en balayant d'un coup toute l'autorité dont il avait essayé de se parer et se détournant de Thorstein, croisa le regard de Dmitri d'un air explicitement interprétable comme voulant signifier "si on pouvait se lancer dans un duel tout de suite ça m'arrangerait".

Sortilège:

cours de DCFM / petrificus totalus

Alors qu’il se démenait toujours avec son camarade de serpentard contre les diablotins, balançant son sac plein de livres et de parchemins de gauche à droite, une autre silhouette vint vers eux. Une fureur bleue aux traits asiatiques frappa violemment le petit être qui s’était épris de la chevelure des deux garçons, assommant tout bonnement celui-ci, qui s’écroula au sol sans demander son reste. « Merci pour le coup de main ! » lança le jeune tchèque à sa camarade de serdaigle alors qu’il effectuait à nouveau un mouvement brusque du poignet pour projeter contre l’un de ses assaillants la plus imposante masse que ses muscles pouvaient porter à bout de bras ; son sac. Mais heureusement pour eux, la lutte ne dura plus très longtemps ; leur professeur daigna enfin les libérer du bazar ambiant d’un coup de baguette. Les petites créatures s’immobilisèrent dans l’air avant d’être attirés dans l’antre d’où elles venaient, laissant derrière elles des élèves échevelés, griffés et sans doute un peu hagards. Il laissa tomber son sac au sol, incapable de porter plus longtemps ce poids qu’il avait dû supporter à bout de bras pendant un temps qui lui avait paru interminable. S’il pouvait apprécier, par certains égards, une forme de désordre, il ne s’agissait que de celui qu’il provoquait lui-même et dont il n’en subissait pas les effets ; son aspect d’ordinaire soigné n’était pour leur qu’un vieux souvenir, et en avoir conscience le mettait particulièrement en rogne. En réalité, il trouvait la situation assez inconfortable et était un peu gêné par l’impression qu’il avait d’être devenu l’un de ces sauvageons dont parlaient tant sa grand-mère, sans qu’il n’eût jamais réellement su de qui elle parlait.

Ignorant ses états d’âmes, le professeur Thorstein prit la parole, récompensant deux élèves de serpentard, dont celui avec qui l’aiglon avait fait corps pour lutter contre les diablotins, puis fit apparaître sur le tableau la suite du programme. Deux mots. Deux de trop à ses yeux, puisqu’il ne les connaissait que trop bien. « Voici le sorrrtilège qui vous aurrrait grrrandement aidé dans cette situation, surrrtout si vous n’aviez fait qu’un pourrr lancer ce sorrrt. Vous allez vous y entrrrainer dès maintenant. » Ce sort n’était pas inconnu au garçon et pour une bonne raison ; il en avait déjà fait les frais. Il avait passé une nuit entière pétrifié suite au maléfice, ainsi condamné par son aïeul pour avoir osé dépasser certaines limites. L’enseignante continuait de donner ses instructions, les intimant finalement à se mettre pour deux pour s’entraîner à lancer le sortilège du jour. S’il ne se considérait pas comme quelqu’un de particulièrement couard, il ne pouvait toutefois nier appréhender quelque peu l’idée d’en être à nouveau la cible, bien que pour une fois, il doutait fortement de devoir attendre plusieurs heures avant d’en être libéré. Un peu perdu dans ses pensées, ressassant avec une légère anxiété ce souvenir désagréable, il ne réagit pas immédiatement aux exhortations de l’adulte. Une élève de gryffondor, Jazzlyn, s’évertuait déjà, sans grand succès, à pétrifier son partenaire de combat. Lorsqu’il daigna finalement tirer sa baguette de la poche de sa robe de sorcier, une voix l’interrompit dans son mouvement ; son compagnon de lutte venait d’alpaguer leur professeur avec un aplomb qui forçait le respect. Dmitri dut se mordre l’intérieur de la joue pour ne pas éclater de rire en l’écoutant. En fin de compte, lui, qui pensait avoir l’esprit de contradiction, paraissait d’un coup bien docile comparé à Colin, dont les protestations, qui perdaient toutefois leur contenance au fil des instants, avaient attirées l’attention de toute la classe.

Au bout de quelques instants, le serpentard se détourna de Thorstein pour venir croiser le regard du tchèque. Celui-ci en aurait presque pu oublier ses ressentiments à l’égard du maléfice qu’ils devaient pratiquer. Alors que derrière lui, il entendait quelqu’un parvenir à pétrifier son partenaire, il brandit sa baguette en direction de Colin. « Petrificus totalus ! » incanta-t-il en s’efforçant de chasser son désagréable ce sentiment de déjà-vu. Malheureusement, ou heureusement pour Colin, il ne parvint guère plus qu’à provoquer un tressautement dans la chevelure de son camarade, ce qui, compte tenu du début du cours plutôt mouvementé, ne changeait pas grand-chose à leur état initial. Déçu, il abaissa sa baguette en faisant une moue boudeuse. Voyant que l’enseignante était occupée à délivrer une élève du maléfice, il souffla au vert et argent avant que celui-ci n’essaie à son tour : « À ta place, je ferai attention au professeur... elle n’a pas l’air commode et je ne serai pas étonné qu’elle te choisisse comme prochain cobaye pour une démonstration de magie. » Et si jamais l’envie lui prenait réellement de le faire, au moins Dmitri sera-t-il fixé quant aux probabilités très élevées qu’elle et son aïeul partagent plus que leur sens de l’accueil. « À ton tour... » finit-il par ajouter avec bien moins de malice dans la voix que précédemment.

(c) mars.

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