Kathleen était une fillette sage et obéissante et qui ne faisait pas souvent de bêtises. Cette année, elle devait bien reconnaître qu’en compagnie de Maya et de Lunox, elle s’était laissée aller à faire quelques sottises mais malgré tout, elle était quand-même plutôt du genre à respecter le règlement, notamment en ce qui concernait les horaires de couvre-feu. D’ailleurs, la fillette préférait cela parce qu’elle n’aimait pas rester seule dans les couloirs le soir, elle n’était pas rassurée. Poudlard était, certes, un endroit sécurisé, mais elle avait toujours détesté être seule dans des couloirs vides, la nuit. Ca l’incitait à respecter les règles.

Mais ce soir, la fillette n’avait pas eu de chance. Elle s’était à nouveau perdue. On était au mois de juin, quasiment à la fin de l’année, et elle ne s’était plus perdue depuis longtemps mais ce soir, en rentrant de la bibliothèque où elle était restée jusqu’à la fermeture, elle avait dû manquer d’attention, car elle ne savait plus du tout où elle se trouvait. Et elle sentit une angoisse au creux d’elle car à cette heure-ci, il n’y avait pas un élève pour lui indiquer le chemin des dortoirs, pour se retrouver dans la sécurité de sa maison.

Par chance, elle entendit des voix dans une salle près d’elle. C’étaient peut-être des préfets qui se posaient entre deux rondes. Kathleen entra précautionneusement dans la pièce en espérant pouvoir demander son chemin. Mais lorsqu’elle entra, elle constata qu’il ne s’agissait pas du tout de préfets. C’étaient des élèves de septième année qui semblaient utiliser des plantes pour planer un peu. Kathleen savait qu’il existait des plantes qui avaient ce genre d’effet, mais elle savait aussi qu’elles étaient interdites dans l’école. Pourtant, face à ces personnes, presque adultes, qui n’étaient pas tout à fait dans leur état normal, Kathleen avait peur et n’était pas du tout du genre à faire preuve d’autorité.

« T’es qui toi ? » lui demanda un garçon.
« C’est une naine de Première Année ! T’as envie de planer, la naine ? »
« Non… merci » fit Kathleen en reculant, inquiète.
« Steve, elle va nous donner, la gosse ! On fait quoi ? »
« Elle va rien dire du tout », dit le jeune homme avec un rictus menaçant et carnassier envers Kathleen, qui frissonna. « Hein gamine ? » Il la gifla. . « Hein tu vas pas cafter ? »
« Non… non… » balbutia la jeune guérisseuse.

Tout ce qu’elle voulait, à présent, c’était s’enfuir le plus loin possible de ces jeunes qui ne contrôlaient visiblement plus leurs actes sous l’effet euphorisant de la plante. Mais le fameux Steve n’avait pas envie de la laisser partir. Il voulait être sûr qu’elle ne parlerait pas et il la bouscula violemment. Elle tomba sur le sol et il recommença à la frapper sous les rires grivois de ses camarades. Kathleen se replia en boule, tentant de se protéger comme elle pouvait, ne pouvant se libérer.

Soudain, l’un des camarades de son tortionnaire attira son attention. Prise d’une soudaine pulsion d’instinct de survie, Kathleen roula sur le côté, se releva et se sauva vers le couloir. Elle se précipita vers les escaliers et monta, monta sans regarder où elle allait, persuadée que ses tortionnaires la poursuivaient. Elle ne se rendit pas compte qu’elle arrivait au pied de la tour d’Astronomie. Tout ce qu’elle vit, c’était une sorte de cache sous l’escalier dans laquelle elle se réfugia avant de se recroqueviller, serrant ses genoux contre elle. Elle avait mal partout. Elle ne pouvait pas le voir mais elle avait un œil au beurre noir et plusieurs coups sur le visage, sans compter le reste de son corps, et elle tremblait de peur, de froid, du traumatisme qu’elle venait de subir.

Kathleen ne se rendit pas compte que les heures passaient, elle était dans un état second et elle avait toujours l’impression que ses agresseurs la cherchaient et qu’ils étaient sur le point de la découvrir. Elle s’affola quand elle entendit s’ouvrir la porte de la cache où elle était dissimulée. Elle ne pouvait s’échapper nulle part et ne pouvait pas davantage se cacher à la vue de celui qui venait de la découvrir et qui était sur le point de croiser un regard d’enfant empli d’effroi.

La terreur de Kathleen baissa de quelques degrés quand elle reconnut le visage du professeur O’Neill devant elle. S’il y avait une chose dont elle était certaine, c’était que son professeur était tout à fait incapable de lui faire du mal. Parmi les professeurs, elle n’aurait pas accueilli toutes les têtes avec la même certitude, par exemple les professeurs Thorstein ou Van Aken, mais elle avait tellement d’affection et de confiance pour le professeur O’Neill qu’elle se sentit soulagée en constatant qu’il s’agissait de lui. Le professeur posa une main sous son visage et lui releva le menton, jaugeant ses blessures et lui demandant ce qui s’était passé.

Même avec la meilleure volonté du monde, Kathleen était profondément incapable de lui répondre, pas plus, d’ailleurs, que de bouger. Elle était littéralement pétrifiée. Quand il l’attrapa pour la sortir de sa cachette, la fillette s’agrippa à lui comme à une bouée de sauvetage. Lorsqu’il voulut la poser sur une marche, refusant de s’éloigner de son protecteur, elle tenta de s’accrocher à lui, mais ses petites forces ne se firent même pas sentir. Alors, elle se contenta de serrer le plus fermement possible dans son poing la manche du professeur assis à-côté d’elle. Son regard était tourné vers le sol.

La question du professeur tourna dans sa tête et elle repensa aussitôt à ce qui s’était passé, se rappelant le regard fou de l’élève et l’angoisse qu’elle avait ressenti quand le jeune homme s’était acharné sur elle. Elle s’était même demandé si elle n’allait pas mourir. A y repenser, elle sentit un poids sur son estomac et les larmes commencèrent à monter. Elle se mit à pleurer à chaudes larmes, tentant d’évacuer son angoisse et sa peur, mais en réalité, cela ne diminua pas et ses larmes continuèrent de couler sans qu’elle ne parviennent à les arrêter, la main toujours cramponnée à la manche de son enseignant.

Quand ses larmes commencèrent à couler, la fillette n’eut pas conscience de grand-chose, même si elle se rassurait un peu de savoir son professeur à proximité d’elle. Elle se disait qu’avec un adulte de confiance auprès d’elle, il ne pourrait probablement plus rien lui arriver, en tout cas pas dans l’immédiat. Son professeur lui tendit un mouchoir qui la fit sourire à travers ses larmes, il lui évoquait les étoiles. Elle essuya ses larmes d’une main sans lâcher son professeur de l’autre. Elle n’enleva sa main que pour se moucher et la remit aussitôt comme si ce contact lui était nécessaire pour ne pas sombrer.

Quand elle commença à se calmer, son enseignant lui demanda à nouveau ce qu’il s’était passé. Kathleen était tellement terrifiée que la simple idée d’en parler la bloquait mais elle se rappela qu’elle avait affaire à son prof préféré, un homme de confiance, doux et paisible et qu’elle pouvait lui faire entièrement confiance. Elle avait peur mais elle pouvait au moins le lui dire. Mais lorsqu’elle ouvrit la bouche pour parler, sa voix ne sortit pas de son gosier. Elle s’efforça à plusieurs reprises de formuler quelque chose, mais elle n’y parvint pas. Elle agita les mains vers sa bouche comme pour exprimer à son enseignant qu’elle n’arrivait plus à parler.

Elle baissa un instant les yeux, un peu honteuse de ne pas réussir à communiquer. Elle songea également aux menaces du jeune homme, à ses menaces pendant qu’il la frappait. Si elle parlait, ce garçon allait peut-être la frapper encore, ou pire encore. Et s’il s’en prenait à son professeur… Elle imaginait cette brute s’en prendre au professeur O’Neill, si gentil et attentionné. La peur lui vrilla encore davantage le ventre, additionné de culpabilité. Elle ne pourrait pas le supporter s’il arrivait malheur au professer à-cause d’elle. Même si elle ne parvenait pas à sortir ne serait-ce qu’un murmure, elle ne voulait pas le laisser dans l’attente et se tourant vers lui, elle tenta d’articuler Je ne peux rien dire, c’est dangereux.

La fillette était déroutée de ne plus arriver à parler. Elle ignorait qu’un grand choc psychologique pouvait entraîner ce genre de cécité. Troublée, elle jeta un regard inquiet à son professeur qui lui affirma que ce n’était pas grave, d’un ton qui se voulait le plus rassurant possible. La jeune fille pouvait sentir qu’en réalité, son enseignant était inquiet mais s’il lui disait que ce n’était pas grave, Kathleen avait envie de le croire. Tant qu’elle ne lui causait pas de problème, c’était le plus important. Elle frissonna, le souvenir de ce qui s’était passer toujours dans son esprit. Elle leva la tête vers le professeur.

Elle se demanda comment elle-même réagirait face à quelqu’un qui se trouvait dans le même état qu’elle. Elle aurait probablement été en colère. Hier encore, elle se serait sûrement précipité pour lui venir en aide mais au jour d’aujourd’hui, elle songea qu’elle aurait plutôt envie de se cacher. Kathleen n’avait jamais connu la violence. Tout le monde avait toujours été doux et gentil à son égard. La violence lui faisait peur, non en réalité, elle la terrifiait. Quel plaisir pouvait-on trouver à faire du mal aux autres ? La fillette n’en savait rien mais elle trouvait cela horrible.

Son professeur attira son attention en lui demandant de communiquer par hochement de tête. Au moins, cela n’impliquait pas de parole. Elle se sentait un peu humiliée de ne pas réussir à parler mais elle appréciait que le professeur O’Neill en tienne compte et fasse attention à ce qu’ils puissent se comprendre. Elle ne savait pas si elle aurait la force de marcher jusqu’à l’infirmerie mais après tout, le professeur serait là pour l’aider et elle avait réussi à courir jusqu’ici. L’enfant se disait aussi qu’il devait avoir envie de la confier à quelqu’un d’autre. Elle ne pensait pas que le professeur ait envie de s’occuper d’elle, après tout, elle n’était qu’une fillette qu’on pouvait bousculer sans aucune difficulté. Un peu triste à cette idée, elle hocha néanmoins la tête.

La suite du RP a été déplacé à l'infirmerie, par ici