Fury makes you do crazy things

Comme tous les après-midis suivant la fin des cours, Maxton se rendit dans le parc de l’école, à leur lieu de rendez-vous avec Bluebell. Quand le temps était assez clément, c’était leur lieu de prédilection, surtout parce qu’il leur permettait de parler loin des oreilles indiscrètes. Ils étaient loin des autres décérébrés qui leur servaient de camarades et aucun élève n’était assez téméraire ou assez fou pour venir les interrompre. Il était généralement heureux à l’idée de retrouver sa jumelle, et ce même s’ils suivaient les mêmes cours. Mais là, Maxton affichait un visage impassible qui laissait soupçonner une certaine contrariété. Il n’était pas présent dans la Grande salle, mais toute la journée des gens plus ou moins bien intentionnés s’étaient faits un devoir de lui raconter avec force de détails. Depuis, même s’il n’avait rien vu, il se représentait la scène à la perfection, pour son plus grand malheur. Lui qui contrôlait ses nerfs avait sérieusement songé à l’idée d’en emplâtrer un, histoire de se calmer. Puis il s’était souvenu que les apparences étaient reines et il avait observé un silence diplomatique agrémenté d’un éternel sourire moqueur. Pourtant intérieurement, il ne comprenait rien à ce qui était en train de se jouer. Les gens murmuraient des choses écoeurantes de bons sentiments comme « mignons tous les deux », « complices » ou pire, « amoureux ». Vaste plaisanterie destinée uniquement à le rendre malade, sans doute. Sa sœur n’était pas mignonne, elle était belle, tout autre qualificatif était une forme d’insulte. Pour le reste, elle n’était sujette à ce genre de faiblesse qu’était l’amour et encore mois pour une personne comme Maxwell Carter. Il devait donc y avoir une raison rationnelle à cette mascarade.

Personne n’aime être pris pour un imbécile, pas même les idiots eux-mêmes. Inutile donc de dire à quel point ce petit jeu, lui qui se considérait comme tout sauf stupide, le plongeait dans des abîmes de colère. Agacement d’être évincé pour la première fois d’un plan diabolique de Blue, horreur à l’idée qu’elle ait réellement pu embrasser ce grossier personnage et effroi à l’idée que cette histoire puisse dépasser le simple baiser. Ce n’était pas compliqué de s’inquiéter quand on connaissait l’énergumène en question, ce Maxwell semblait généralement plus dirigé par ses pulsions que par son savoir-vivre. Non sans une pointe de joie malsaine à cette idée, Maxton se promit de s’amuser un peu avec le sang mêlé à l’occasion. Pas besoin de grands discours pour lui faire comprendre qu’il serait son ennemi, parfois l’éloquence se passe fort bien de mot, surtout quand elle s’exprime par une violence brute. Tant pis pour la discrétion, il y avait des leçons qui devaient s'inscrire dans la chair.

Comme souvent, il sut qu’elle approchait avant de l’avoir dans son champ de vision. Intuition liée à leur gémellité ou forme de magie, il n’en savait rien. Il avait juste une conscience aiguë de sa présence, comme si sa simple proximité suffisait à changer son monde. En temps normal, il l’aurait gratifiée d’un sourire chaleureux, un vrai, pas comme les sourires charmeurs qu’il passait son temps à arborer pour arriver à ses fins. Mais là, il était contrarié et il comptait bien le lui faire comprendre. A quoi bon feindre quand la personne en face vous connaît par cœur ? D’une voix mielleuse, il lui lança quand elle arriva

- Ma sœur préférée ! Sais-tu que j’ai entendu d’affreuses rumeurs sur ton compte aujourd’hui ?

La nouvelle avait fait le tour de l’école en un temps record. A croire que Bluebell Sherwin et sa vie amoureuse passionnaient les foules. Tournant la tête vers elle, il lui laissa voir la colère qui brillait dans ses yeux derrière son ton badin.

- Et pour mon plus grand déplaisir, je n’ai rien trouvé pour les démentir tant il y avait de témoins de tes frasques.

Alors que lui n’avait même pas été mis dans la confidence. Quand avaient-ils cessé d’être une équipe ? Etait-ce sa façon de se venger parce qu’elle avait appris qu’Erin et lui continuaient de communiquer ? Si c’était le cas, cela n’avait aucun sens, Erin avait l’un des sangs les plus purs de l’école alors que son Maxwell était un sang mêlé aux deux neurones qui se battaient en duel. Aucune comparaison possible. Sa voix perdit ses accents doucereux pour se faire ferme, exigeante.

- Dis-moi qu’ils se trompent tous et que tu n’as pas embrassé cet animal.

Ce n’était pas une question, mais un ordre derrière lequel se cachait surtout une forme de supplique. Il souhaitait se tromper. Il voulait sincèrement. Elle allait s’asseoir près de lui et nier d’un ton outré ses accusations. Peut-être même qu’elle lui en voudrait d’y avoir cru ? Qu’importe, s’il avait la confirmation que tout cela n’était qu’une vaste folie, il était bien prêt à subir son courroux. Malheureusement, son impulsive jumelle était capable du meilleur comme du pire. L'avantage, quand on faisait quelque chose d’extrêmement délirant, c'est qu'on surprenait les gens. Et là, il était sacrément surpris pour le coup.

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Fury makes you do crazy things - Bluebell & Maxton Original

Fury makes you do crazy things | ft. Maxton

Le temps était merveilleux ces jours-ci. Le soleil avait repris le contrôle du ciel, chassant tout nuage susceptible d’apporter un peu de fraîcheur à ces longues journées de printemps. L’été n’était finalement plus si loin, et les scandales de Poudlard seraient bientôt anesthésiés sur deux longs mois de repos à l’abri de tous ces médiocres moutons. La guerre qu’avait engagée la Serpentard connaîtrait un délicieux temps de repos, utile à la jeune fille pour limer sa fureur et polir sa rancoeur. Et puis, n’était-ce pas merveilleux ? Alexis avait décidé de fuir, et pour la première fois, elle et Maxton pourraient profiter librement de leur demeure sans la présence importune de leur grande soeur. Ce n’était pas la transparence de Victor qui allait les perturber désormais.

Bluebell quitta l’humidité froide du château pour s’aventurer sur les longues plaines verdoyantes du parc. Une brise tiédie par la fin de l’après-midi l'accueillit, soulevant ses longs cheveux dans un mouvement joyeux. Elle adorait ces grands espaces : premièrement parce qu’ils la libéraient des quatre murs suffocants du château ; deuxièmement, parce qu’ils regorgeaient d’espaces fleuris en ces mois de l’année, répondant à son étrange lubie des fleurs ; enfin, parce qu’ils lui évoquaient toutes ces fins de journées nonchalantes passées avec son frère en début et en fin d’année. Ils avaient ainsi instauré ce genre de rituel : ils se retrouvaient toujours, inexorablement, à la fin des cours, quelques heures avant le dîner, sous un long et large chêne pour converser tranquillement à l’abri de la médiocrité ambiante de Poudlard. En ces temps obscurs de guerre d’égo entre Finnbjörn et elle, Carla et Maxwell, les liant tous les quatre d’une haine mutuelle et de coups bas méprisables, Bluebell se réjouissait d’autant plus de rejoindre Maxton. Enfin un temps de pause parmi leurs offensives, enfin un instant pour souffler et apaiser sa rage qui n’avait de cesse de battre en elle depuis ces dernières semaines. Aussi la Serpentard avançait-elle le pas léger, comme laissant son épaisse armure de combat, faite de vanité, orgueil, amertume et irascibilité sur le chemin derrière elle, le temps d’une entrevue avec son jumeau avec qui elle pouvait enfin être pleinement elle-même. Maxton était bien le seul à jouir d’un tel pouvoir : celui de connaître Bluebell dans ses moindres faiblesses, pleinement nue, sans aucun masque de mépris qu’elle affichait pourtant quotidiennement. Oui, ces après-midis avec Maxton étaient essentiels pour la jeune fille, car ils lui donnaient l’occasion de respirer un peu. Que la suffisance était pesante, et qu’il était bon d’avoir cet appui de confiance infaillible.

Oui mais voilà, cet appui de confiance infaillible présenta pourtant une faille à son arrivée : il ne souriait guère. Il n’y avait rien de très surprenant à cela ; néanmoins, Bluebell connaissait suffisamment son frère pour lire entre les lignes fermées de son visage qu’il maîtrisait toujours parfaitement. Ce qu’elle y entrevoyait ne présageait rien de bon ; et, comme répondant à ses interrogations internes, le Gryffondor l’accueillit directement les pieds dans le plat, annonçant immédiatement des rumeurs à son sujet. Bluebell, qui n’était même pas encore totalement arrivée à sa hauteur, se mordit les lèvres de contrariété. Elle avait presque oublié que cet après-midi ne serait pas aussi reposante qu’à l’accoutumée : elle avait en effet certaines choses à éclaircir auprès de Maxton. Il n’y avait finalement rien d’étonnant à son ton moqueur, ni à ses iris pleines de ressentiment. Il était vrai qu’elle avait tout de même délibérément embrassé Maxwell en pleine Grande Salle, sans même avertir son frère de ce qui allait se passer. C’était déjà un miracle qu’il soit toujours vivant ; elle avait envisagé qu’il finisse à l’infirmerie d’un infarctus. Après tout, avait-elle jamais été aimante envers un homme ? Il y avait de quoi faire une syncope.

La jeune fille décida de dédramatiser au plus vite la situation afin de faire comprendre à son frère qu’il n’avait pas à s’inquiéter : elle n’était pas encore complètement folle malgré ce qu’il devait imaginer. “Mon cher frère, quel accueil chaleureux, je n’en attendais pas moi de ta grande magnanimité.” Elle leva alors la main d’un air désabusé, chassant les propos de son frère à la manière d’un parasite indésirable, en ralentissant le pas. “Ce château ne sait faire que ça ; inventer ragot sur ragot. Et toi, tu vas croire les premiers imbéciles qui pensent tout savoir simplement parce qu’ils se sont fiés à leur vue… A défaut d’utiliser leurs cervelles, ils se servent de leurs orbites pour affirmer tout et n’importe quoi.” Elle avait ainsi rejoint Maxton, se tenant debout face à lui d’un air réprobateur, comme si elle voulut lui faire comprendre qu’il la décevait à ainsi prêter attention aux avis de tous ces idiots, plutôt que de lui faire preuve de soutien et de douceur. Il s’agissait avant tout d’une parfaite démonstration de la mauvaise foi dont la Serpentard était capable, ainsi que d’une manière pour elle de gagner du temps afin de réfléchir à la manière d’amener les réponses aux questions légitimes de son frère. Mais celui-ci prit alors un ton plus ferme, comme s’il eut requis une transparence et honnêteté immédiate. Bien, elle ne pouvait pas esquiver ses interrogations aussi facilement qu’elle l’eût voulu.

Poussant un profond soupir, elle roula ses yeux dans leurs orbites avant de se laisser tomber face à Maxton sous leur arbre. L’ombre de celui-ci effleurait les jumeaux, installés entre un éclat de soleil et quelques reflets sombres des feuilles bercées par le vent. Bluebell pencha le visage sur le côté, les yeux fermés afin de profiter de la lueur éclatante et chaude de l’astre au-dessus d’eux. C’était son petit plaisir après de longues heures passées à supporter la moiteur sombre du château. Elle se délecta quelques secondes d’une aussi agréable sensation, avant de finalement démarrer les hostilités. “Un animal, dis-tu ?” Il était temps pour elle d’affronter les accusations de son frère, sans doute les plus douloureuses qu’elle dut subir. Même le courroux de Finnbjörn était doux comparé aux accents tranchants de son jumeau. “Et bien, techniquement, l’individu en question respire et a quatre membres. C’est un bipède, qui dispose de quelques neurones fonctionnels, et qui est doué de paroles. Ce n’est donc pas un animal, mais un être humain, en dépit d’un sang quelque peu impur... “ commença-t-elle les yeux toujours fermés, le visage tourné vers le soleil. Puis, ses paupières s’ouvrirent soudainement et elle posa son regard sur les yeux glaciaux de son jumeau, qui avait les mêmes iris bleutées, quoiqu’un ton légèrement plus clair lorsque le soleil glissait sur ses yeux. “De ce fait, si tu parles de Carter, qui n’est donc pas un animal et je tiens à cette nuance, et bien oui, il se peut que je l’ai embrassé”, reprit-elle d’un ton qui se voulait négligeant et léger, comme pour atténuer l’ampleur de la situation. Mais bien entendu, cela était vain, d’autant qu’elle-même, en articulant ces dires, fut frappée par l’absurdité de ces faits. Bluebell entreprit alors de jouer avec quelques brins d’herbe autour d’eux afin d’échapper au jugement qui enveloppait le regard de son jumeau. C’était bien le seul regard qu’elle n’osait pas affronter lorsqu’il s’assombrissait. “Cependant, il est inutile d’adopter ce ton réprobateur avec moi,” poursuivit-elle alors avec une certaine prétention qui n’avait pourtant rien de fier au vu de l’embarras qui couvrait ses yeux fuyants, “car je te rappelle que je ne suis pas une idiote et que je sais parfaitement ce que je fais.” Cette dernière phrase sonna un peu sèchement, trahissant une certaine déception. C’est que Maxton devait savoir qu’il y avait nécessairement un plan derrière pareille action, et elle fut légèrement vexée de constater une telle dureté chez son jumeau, comme s’il l’avait réellement crue capable de s’éprendre pour un garçon comme Carter. Bluebell retrouva un peu de son courage dans cette offense et parvint finalement à fixer son jumeau dans les yeux. Mais ce qu’elle y lut ne lui sembla pas un bon présage quant à la tournure de leur conversation.

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Fury makes you do crazy things

- Préfères-tu que je te mente en te masquant mes émotions ?

Puisqu’elle se plaignait de son manque de chaleur, il pouvait très bien la feindre. Il était un acteur hors pair, généralement meilleur qu’elle-même. Si c’est ce qu’elle souhaitait, il pouvait lui offrir une prestation digne des plus grands, de la joie, des embrassades, même l’œil embué par leurs retrouvailles. Ca n’en serait que plus pathétique quand on connaissait le fond de ses pensées.

- Tu peux jouer la carte de l’invention si tu veux, mais c’était quand même une sacrée hallucination collective à ce stade.

Maxton leva les yeux au ciel quand Bluebell lui répondit que Maxwell était un être humain. Depuis quand est-ce qu’ils classaient ce genre d’individus chez les êtres humains ? Ou exactement depuis quand est-ce que les autres avaient cessé d’être une nuisance pour devenir un sujet de préoccupation ? Sa réponse le contrariait, parce qu’elle avait l’inconvénient de ne pas aller dans son sens. Blue aurait pris le temps de proférer des horreurs avec lui qu’il aurait été rassuré. Là, il avait l’impression de parler à une personne qui avait l’apparence de sa jumelle sans en avoir l’esprit. Cruelle situation. Tout aussi moqueur qu’agacé, il répliqua

- Puisque tu souhaites t’aventurer sur le domaine de la technique, ta description convient également parfaitement à un troll, ma chère. Essaie d’en tirer les conclusions qui s’imposent.

Maxton continua de l’observer, partagé par ses aveux. Qu’elle ne lui mente pas le confortait dans l’idée qu’ils étaient toujours liés et il en éprouvait un profond soulagement. Mais qu’elle confirme que cela s’était vraiment produit … Etait-il dans une sorte de cauchemar particulièrement vivace ? Cela aurait expliqué bien des choses. Mais l’attitude fuyante de Blue laissait présager le pire. Elle était normalement dans l’opposition, pas dans cette forme mesurée de minimisation. Cela l’inquiétait, elle n’agissait ainsi que quand ce qu’elle avait fait été suffisamment fou pour qu’elle-même s’en rende compte. Il soupira et détourna les yeux, incapable de lire une forme de colère dans les siens.

- Ai-je dit que tu étais idiote ? L’acte l’est. Toi non, évidemment.

Dans tout son énervement, c’était sa meilleure offre. Il refusait de cautionner, mais il ne pouvait pas la laisser croire qu’il était fâché au point de la penser stupide. Comment pouvait-elle même le croire ? Elle savait qu’elle était l’unique personne en ce bas monde qu’il estimait autant qu’il aimait. Un silence s’installa entre eux, à la frontière entre l’inconfort et l’apaisement. S’empêcher de lui envoyer des piques aussi acides que son ressentiment empêchait une dispute. Mais cette absence de communication volontaire n’arrangeait rien. Au bout d’une trentaine de secondes, il finit par demander, d’une voix aussi détachée que possible

- J’aurais aimé que tu me dises pourquoi tu fais ça avant, mais tu as décidé manifestement de faire cavalier seul. Depuis quand avons-nous cessé d’être l’un avec l’autre contre le reste du monde, Blue ?

Rien dans sa posture ou dans le ton employé ne laissait supposer que cette question était plus profonde qu’elle n’y paraissait. Pourtant, il savait que Bluebell le connaissait assez bien pour en saisir le sens. Evidemment qu’il était fâché par cette étrange histoire. Mais ce n’était pas le baiser en lui-même le cœur du problème. C’était une forme de jalousie à l’idée qu’elle ait pu comploter avec quelqu’un d’autre que lui. Son monde à lui tournait principalement autour d’elle, parce qu’il avait toujours pris soin de l’envisager ainsi. Alors si, par une bouffée d’ego, de rage ou pire, d’amour, elle le laissait sur le carreau, il ne savait plus comment réagir. Il s’inquiétait pour elle aussi. Elle était puissante, intelligente, mais aussi terriblement sanguine. Leur duo avait le mérite de l’équilibre. Est-ce que sans lui, elle n’allait pas droit dans les ennuis ? Et est ce qu’elle ne l’informait pas trop tard pour qu’il puisse intervenir. Néanmoins, il n’en rajouterait pas dans la sensiblerie. Ce n’était pas leur truc et il s’était montré terriblement expressif, à sa façon. Il se redressa donc et reprit son masque de contrariété sur le visage.

- Mais puisque tu sais parfaitement ce que tu fais, vas-y, explique-moi ! Fais-moi rêver, raconte-moi comment une si belle histoire entre toi et l’autre a pu commencer.

La moquerie suintait de chacun de ses mots. Il ne croyait pas une seconde en un amour soudain entre les deux. Par contre, il mourait de curiosité sur ce que ça cachait.

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Fury makes you do crazy things | ft. Maxton

Si Maxton était doué de rhétorique et d’éloquence, il fallait admettre que ces deux qualités n’allaient pas avec la montagne d’aigreur et de moquerie qu’il transportait partout avec lui. Il s’en sortait ainsi toujours avec des remarques pertinentes et amusantes, qui dénotaient toutefois inexorablement un soupçon de raillerie parfois incisive. Si les dires de son jumeau avaient ainsi souvent l’effet d’arracher un sourire de cruauté à la Serpentard, qui jubilait sous l’intelligence sarcastique de son frère, lorsque de tels propos lui étaient dirigés, elle ne pouvait qu’encaisser la dureté des reproches ainsi projetés sur elle. Cela n’avait rien d’un exercice agréable. Le lynchage et l’ironie, ça a avait du bon pour enfoncer les autres, mais pas pour conforter son propre égo. Et par Merlin, il n’y avait bien que Maxton qui était ainsi capable de blesser le sien sans qu’elle fût capable de rétorquer à de telles accusations ! La fragilité n’était jamais une option chez Bluebell, ni le silence, et encore moins la patience. Pourtant, alors que son frère lui rappelait que Maxwell aurait tout aussi bien pu être un troll, juste après lui avoir soigneusement fait remarquer que l’ensemble du château les avait surpris dans leur jeu dangereux, la jeune fille fut démunie par les preuves et la véhémence fondamentalement cohérente de son frère. Oui, elle avait bel et bien entrepris une sorte de relation avec Maxwell, qui n’était pas réellement réputé ni pour son cerveau, ni pour ses bonnes manières. Si elle n’aurait eu aucun mal à parer les accusations des autres, celles de Maxton lui semblèrent insurmontables. Sûrement parce qu’elle n’avait pris l’habitude que de lui dire la vérité, et que de chercher à tisser un mensonge face à ses yeux réprobateurs n’avait rien de naturel. Sans naturel, impossible pour elle d’être spontanée - et impossible de répondre. Elle laissa donc son frère cracher son venin, celui-là même qu’elle s’amusait d’ordinaire à enfoncer sous la peau des autres, jouant nerveusement avec les brins d’herbe autour d’elle. Si elle avait eu un semblant de colère et de remontrance, elle se retrouva bien vite démunie, d’autant que Maxton précisa sa pensée en insistant sur l’idiotie de son acte, pas de la sienne. Comment voulait-il qu’elle rétorque s’il la consolait là où elle aurait pu avoir une fenêtre de tir ? C’en avait toujours été ainsi. Qu’il était difficile de se montrer dure et ferme face à la seule personne qui savait lire entre les lignes de son visage, et qui reconnaissait, derrière les moindres nuances de son ton, des vérités et des non-dits qu’elle-même n’aurait su expliquer. Elle écoutait ainsi Maxton le visage baissé, faisant mine de s’intéresser à l’herbe plutôt qu’aux accents tranchants de son jumeau.

Mais il commit finalement une erreur, une petite erreur, qui laissa entrevoir une fissure derrière son argumentation irréprochable. “Depuis quand avons-nous cessé d’être l’un avec l’autre contre le reste du monde, Blue ?” A priori, cela n’avait rien d’une faiblesse - mais ces dires éveillèrent en la Serpentard des souvenirs tapis qui fusèrent en elle alors qu’elle se sentait justement coupable. Un soubresaut de son égo en pleine agonie, sûrement. Elle releva alors le visage, les sourcils froncés, les yeux presque plissés, plein d’une rancoeur ainsi brusquement éveillée sous les attaques. Laissant échapper un rire jaune, elle répondit alors aussitôt, sur un ton acerbe non par méchanceté mais par réelle colère : “Ne viens pas m’accuser de t’avoir abandonné alors que c’est toi qui as décidé de pactiser avec les autres.” Elle marqua un instant de pause avant de reprendre aussi durement : “C’est toi qui as décrété que ta pseudo-amitié avec cette garce de Sørensen était trop forte pour lui faire front avec moi ! C’est toi qui as décidé de me tourner le dos le premier, Maxton” conclut-elle, emportée par sa rage d’avoir appris qu’il voyait Erin en cachette. Un acte de haute trahison pour Bluebell, qui ne pouvait que mépriser la Poufsouffle. Pourtant, oui, Maxton avait bien décidé que les insultes et les coups, les agressions et les menaces de cette idiote Norvégienne n’étaient rien face à son amitié. Cette blessure était encore vive, et avait ainsi explosé en Bluebell qui n’avait jamais pansé cette nouvelle.

Mais déjà Maxton lui demandait la nature de ses plans avec Carter. Bluebell, ainsi raccrochée à la fureur qu’elle ressentait encore, ne fut plus en mesure de mettre de l’eau dans ce vin empoisonné. Si elle avait d’abord voulu arrondir les angles et faire preuve de calme et maturité dans ses propos, qu’elle voulait explicatifs, clairs et ordonnés, elle se laissa finalement guider par son amertume. Une étincelle ne pouvait pas laisser les bois sains et saufs ; Maxton avait déclenché un incendie, et il allait en payer les frais. Mais il était étonnant de constater que l’allure générale de Bluebell, quoique véhémente et vindicative, relevait bien plus de la posture de blessée que de bourreau. “Pourquoi t’aurais-je intégré à mes histoires alors que tu as déjà les tiennes avec cette vipère nordique ?” commença-t-elle finalement, retournant la situation puisque n’ayant aucun argument concret pour justifier l’exclusion de Maxton de ses plans contre Finnbjörn. Pourrait-elle lui parler des sentiments confus et furieux qui l’agitaient ? Mais déjà, emportée par sa colère, elle poursuivit : “Je me suis rapprochée de Carter pour d’innombrables raisons : c’est un garçon touchant, empathique et amusant, populaire, dont le sang-mêlé me permet un geste politique. Sortir avec lui, c’est montrer à ce château que je ne suis plus la petite arrogante aux idéologies dépassées… Une couverture pour mieux agir dans l’ombre. C’est évident, non ?” Elle crispa inconsciemment sa mâchoire avant d’ajouter à voix basse, presque imperceptiblement : “Avec ce qui est arrivé à nos parents, j’estime qu’évoluer dans le secret est plus sûr.” Elle n’avait jamais réellement fait le lien, mais à présent qu’elle s’expliquait, tout prenait du sens pour elle. Dorer son image, ce n’était pas seulement pour mieux se faire voir après les derniers événements : c’était une porte pour ne pas subir les mêmes représailles que ses géniteurs malheureusement disparus. Elle avait quelques bavures à son actif : mais, franchement, sortir avec un sang-mêlé était finalement capable de rattraper ses dernières actions. “Mais il n’y a pas que ça. Sache que le frère d’Erin”, et elle eut une grimace de dégoût à nommer cette dernière, “m’a porté préjudice à plusieurs reprises en se moquant ouvertement de moi. Comment voulait-il que je me défende face à une telle mauvaise-foi, une telle injustice ! Il a été jusqu’à s’unir à Yaxley pour se moquer de moi en pleine Grande Salle : alors, naturellement, je me suis unie à Carter pour leur renvoyer leur coup. Je ne pouvais pas le laisser me salir de la sorte !” décréta-t-elle avec une lueur mauvaise dans le regard, allumée par le souvenir de ces derniers douloureux affronts. “Cesse donc de me porter de tels reproches ; tu vois bien que je ne suis que victime de tes manigances secrètes et de la perfidie malsaine de Finnbjörn”, conclut-elle non sans culot, emportée comme elle l’était. Elle se demandait comment allait réagir Maxton ; il n’était pas dans sa nature de la contredire, et il était de toute évidence en mauvaise posture. Il l’avait blessée en continuant à bavarder amicalement avec Erin - et elle n’avait qu’embrassé Carter, ce qui était de tout évidence bien moins grave… Si quelqu’un avait des comptes à rendre, c’était bien lui. Oubliée, la culpabilité du début de leur échange : elle n’avait qu’agi en conséquences des actes odieux de son jumeau et de Finnbjörn. N’y avait-il finalement pas une plus noble cause que de ses défendre de façon légitime ?

HRP:

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[quote="Maxton E. Sherwin"]Fury makes you do crazy things

Maxton avait tellement l’habitude d’être piquant, qu’il en oubliait que parfois ce n’était pas une bonne stratégie. Peut-être que s’il avait été plus doux avec Blue, la suite de la conversation se serait mieux passée. Mais ce que lui prenait pour un humour moqueur avait pour seul effet de la blesser plus que de raison. Évidemment, il n’avait jamais voulu cela. La faire réagir, sûrement, mais pas lui faire de la peine. D’ailleurs, quand il crut lui en avoir fait, il rectifia immédiatement son erreur.

Il était rare qu’ils laissent entrevoir une faille à qui que ce soit, même à sa sœur jumelle. Alors quand il avait sciemment choisi de le faire, il ne s’attendait pas à ce qu’elle s’y engouffre, poussée par toute la rage que leur conversation lui apportait. Au contraire, il avait bêtement cru que cela mettrait fin à cette discussion houleuse. Mais sa sœur choisit de riposter, comme si à ce petit jeu, chacun devait nécessairement avoir commis des erreurs. Qu’elle était cruelle de se jouer de ses faiblesses. Qu’elle était cruelle de ne pas entendre que derrière ces mots, se cachait une peur véritable et profonde. Évidemment qui lui en voulait d’agir comme ça. Cela ne voulait pas dire qu’il l’aimait moins, il en était bien incapable. Mais à cet instant très précis, il ressentait une immense colère à son égard.

- Pour quelques mots échangés, je te tourne le dos ? Alors que toi, tu l’embrasses ! Tu es injuste.

Force était tout de même de constater que sa mise à l’écart venait de ses liens avec Erin. Il ne comprenait pas ce qui la contrariait à ce point. Une discussion une fois de temps en temps dans la salle sur demande, ce n’était pas bien méchant. Et ce n’était pas contre elle.

- Mais de quelles histoires tu parles, enfin ?

Elle avait l’air de faire référence à quelque chose de précis, mais il ne comprenait même pas quoi. Il détestait le ton de cette conversation, elle était blessée, il l’était tout autant. Cependant il fallait admettre que cette discussion était nécessaire. Si elle venait à imaginer il était capable de la trahir, alors il fallait quand même prendre quelques instants pour la détromper. Même si, le simple fait qu’elle puisse le penser le peinait profondément. Toute la personnalité de Max s’était construite autour de l’idée de protéger sa sœur. Lui dire qu’il avait failli à la tâche, c’était comme lui indiquer que sa vie était un échec. C’était juste impossible à entendre. Il ne cherche même pas à dissimuler la grimace qui s’inscrit sur son visage quand elle commença à faire la liste des qualités de l’autre abruti. Qu’elle décide de lui faire grâce de sa salive pour des raisons de stratégie ou d’apparence, c’était déjà un petit peu difficile à admettre. Mais qu’elle lui trouve des qualités … il avait l’impression de vivre un véritable cauchemar. Ce n’était pas possible, ce n’était pas sa sœur. Ou alors elle était réellement amoureuse de lui ? Non ça c’était impossible. Mais elle était quand même en train de devenir sacrément délirante.

- Yaxley ?

Mais qu’est-ce qui était en train de se passer dans ce monde de fou ? Il n’arrivait pas à imaginer Blue amoureuse, pas plus qu’il n’était capable d’imaginer Finn intéressé par une fille. C’était tout simplement du grand n’importe quoi. Puis, il fallait voir la fille en question. Le seul avantage qu’elle avait sur Maxwell, c’était que son sang était pur. Mais bon quand on connaissait ses fréquentations passées, elle était plus proche d’être traître à son sang qu’autre chose. Qu’est-ce que le Gryffondor pouvait bien lui trouver ? Des jolis minois, il y en avait des tonnes. Ou alors, il avait juste misé sur la facilité.

Franchement, ses explications n’était pas clair. OK manifestement, Finn avait un goût déplorable concernant les filles. Mais quel était le lien direct avec Blue ? Il l’observa quelques instants avant que des liens encore plus inquiétants ne commencent à se dessiner. Pour agir de manière aussi déraisonnable, il fallait qu’elle soit animée de sentiments qui l’étaient tout autant. Là où il n’avait rien compris, c’était en essayant de les attribuer à Maxwell. Le cœur du problème c’était Finn. Et quelque part, c’était pire. Il a annoncé tous les problèmes du monde. Pour qu’ils en soient à se battre par couples interposés, de toute façon c’était déjà le signe de l’apocalypse. Il allait vraiment falloir intervenir avant que le château ne devienne un champ de ruines, réduit en poussière sous l’effet de leur haine.

- Pourquoi s’afficher avec une fille serait un affront contre toi ? Que veux-tu que je fasse contre lui ?

Il lui avait posé cette question d’une voix douce, certainement de la manière la plus gentille dont il était capable au milieu de cette conversation. S’il avait raison, et que ses soupçons étaient fondés. Il n’était clairement pas sorti de l’auberge. Ménager les sentiments de sa sœur était un travail à plein temps. Néanmoins il avait également besoin de cette réponse pour savoir ce qu’il faisait de Finnbjörn. Il ne fallait pas se mentir, si cet idiot avait osé faire de la peine à Bluebell, ou pire osé lui faire croire qu’elle n’était pas assez bien pour lui, alors tous les coups étaient permis. Évidemment qu’il serait son allié. Il l’était toujours.

- Alors c’est cela ta conclusion, que je manigance contre toi ?

Lui qui avait pourtant le contrôle de lui-même n’arriva pas à masquer à quel point il était outré. Il n’allait pas nier qu’il avait vu Erin, cela aurait été faux et il ne comptait pas mentir à sa sœur. Par contre, il ne comprenait pas réellement comment de simples conversations, elle arrivait à en tirer comme conclusion qu’il complotait contre elle. Décidément tout cela était fort contrariant, elle était en train de perdre sérieusement la tête. Il était habitué aux colères de Blue, elle était plus sanguine que lui, il avait donc l’habitude. Par contre, elle ne l’avait jamais accoutumé à cette irrationalité. Du moment où il l’avait sommée de s’expliquer, toutes les justifications qu’elle avait pu lui donner n’avaient ni queue ni tête. Et le plus inquiétant, ce n’était pas qu’elle lui réponde avec une mauvaise foi crasse. Ça à la rigueur, il pouvait le comprendre. Ce qui le torturait plus, c’est qu’elle semblait y croire. L’observant silencieusement, il se demanda jusqu’où il devait aller pour la protéger d’elle-même. En temps normal, il ne réfléchissait que pour la protéger des autres. Mais là… Il commençait à penser que leur pire ennemi, c’était Blue elle-même. Il soupira, et, en miroir de sa sœur, adopta exactement la même stratégie qu’elle pour simuler son indifférence. Jouant avec des brins d’herbe, il finit par hausser les épaules

- Ma foi, si c’est réellement ce que tu crois, que veux-tu que je te réponde …

Il ne lui ferait pas le plaisir de se défendre. Il n’avait pas à se justifier. Oui de temps en temps il appréciait de papoter avec Erin, mais sa jumelle se doutait bien que ce n’était jamais, au grand jamais, pour fomenter quoi que ce soit contre elle. Et si par impossible, elle croyait réellement en ce qu’elle disait, alors c’est qu’il n’y avait rien à ajouter tellement finalement elle le connaissait mal. Une chose est certaine, c’est que ses velléités de l’aider se fanaient de plus en plus. Il voulait bien être compréhensif, il voulait bien tenter de rationaliser ses actes, mais il était hors de question que cela lui retombe dessus. Il n’avait absolument rien fait, pas plus qu’il n’avait demandé d’être mêlé à des histoires sentimentales. Déjà il n’y comprenait rien, ça ne me touchait pas et en plus il ne mourait pas d’envie d’être au courant de cette partie de la vie de sa soeur.

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HRP:

Fury makes you do crazy things | ft. Maxton

“Moi, injuste ? J’ai embrassé un garçon qui me fait passer du bon temps. Je ne me suis pas non plus mariée, ni même déclarée amoureuse !” trancha-t-elle sèchement en balayant les dires de son frère d’un geste désabusé de la main. “Et lui ne nous a jamais porté préjudices, contrairement à Erin qui a osé profaner notre nom en nous insultant de bâtards ! Un seul mot échangé avec cette garce est déjà de trop”, poursuivit-elle dans un sifflement semblable à un serpent qui glissait vers sa proie afin de l’effrayer. Une lueur folle brillait dans ses iris éclairées par le soleil. Erin, c’était bien la seule personne dont le seul fait de respirer était déjà une nuisance de trop aux yeux de la Serpentard. Même les Enfers semblaient plus doux aux yeux de la jeune fille que les flammes de colère qui la caressaient lorsque ses pensées se tournaient face à sa rivale. Le problème, c’est que Bluebell était déjà suffisamment énervée contre Finnbjörn ; ajouter la relation de Maxton et Erin à ce problème général, c’était comme jeter de l’huile sur le feu. Sa rage n’était plus que forte, cette même rage qui la consumait depuis des mois maintenant ; à vrai dire, cette rage qui était née dès l’instant où elle avait retrouvé Finnbjörn dans ce manteau de fantôme amnésique à la rentrée. Une colère sourde et profonde qui n’avait fait que croître à mesure que le Gryffondor l’avait blessée de son indifférence froide et de ses propos démesurés. Sa relation avec Carla n’avait fait que pointer du doigt une fureur encore tapie : à présent, Bluebell ne cachait même plus la haine viscérale que lui inspirait ce méprisable pantin. Jouer de ses nerfs de la sorte, c’était comme déclarer une guerre, et perdre n’était même pas envisageable. Comment Maxton ne pouvait-il pas comprendre l’ampleur de cette terrible situation ? Ils avaient pourtant été ensemble le jour où Elizabeth leur avait annoncé que Finnbjörn avait été retrouvé amnésique. Maxton avait bien vu la lueur qui avait brillé dans ses yeux ; et il avait suivi de près leurs retrouvailles qu’elle lui avait racontées. Il savait combien cela lui avait fait du mal de voir le Gryffondor lui tendre une main froide et condescendante, alors qu’il lui avait tendu une main si douce et réconfortante quand ils avaient six ans. Maxton savait pertinemment qu’elle avait pris comme un affront toutes les remontrances et insultes de Finnbjörn envers elle, et qu’elle ne supportait pas la simple idée de le savoir sans autre souvenir d’elle que la peste qu’elle se plaisait à lui montrer. Il était somme toute indifférent à elle, lui qui pourtant lui avait accordé une place importante dans sa vie précédente. Pourtant, Maxton continuait de jouer aux effarés qui ne comprenait pas en quoi ce clown pouvait bien la blesser.

Bluebell, n’y tenant plus, bondit sur ses pieds. C’en était trop. Cette colère, cette injustice, à laquelle venait s’ajouter maintenant le poids d’Erin, et l’aveuglement de son frère qui n’avait pas encore saisi la profondeur de sa rancoeur, pour laquelle Maxwell n’était qu’une marionnette, c’en était trop. C’en était beaucoup trop pour une Bluebell qui était ainsi sans armure face à la seule personne qui était en mesure de comprendre la fureur provoquée par ce terrible sentiment d’abandon. Cette dernière pensée déchira son ventre d’une brûlure intense. C’était ça. Finnbjörn l’avait abandonnée, puis avait essayé de renouer contact avant de l’abandonner une seconde fois, non sans jubiler du plaisir de ce rejet. Et maintenant Maxton fréquentait Erin, sans même réaliser qu’il s’agissait là d’un abandon envers sa propre jumelle. “Mes histoires ? Tu me demandes quelles sont mes histoires ?” fit-elle alors dans un rire terriblement jaune et acide, qui avait un accent légèrement fou. Bluebell leva les paumes vers le ciel dans un geste théâtral, montrant tout le parc autour d’eux. Puis elle planta son regard de glace dans les yeux de son jumeau. “Mais enfin, Maxton, TOUTES ces histoires. Tu ne comprends donc rien quand je te parle ? Finnbjörn nous a oubliés, il m’a oubliée, avant de me considérer comme une terrible vipère qu’il lui vaudrait mieux éviter. Je lui dis que je n’apprécie guère sa façon de me traiter à savoir une sauvage indigne de son intérêt, ce à quoi il répond en me montrant combien il est encore capable de m’oublier. Il se moque de moi depuis le début, crachant comme un malpropre sur notre relation passée et sur ce que nous aurions pu devenir, comme dans la Forêt Interdite. Te rends-tu seulement compte que ce soir-là, je lui ai sauvé la vie par deux fois ? Mais il préfère pourtant Yaxley, cette traînée traître à son sang. N’est-ce pas là un terrible affront à tes yeux ? Et comment aurais-je dû répondre à ses attaques, selon toi ?? Comment, si ce n’est en m’affichant avec un troll comme tu le dis, pour lui montrer que MOI AUSSI je peux l’oublier et lui préférer un idiot impur !” s’écria-t-elle d’une traite sans quitter son jumeau du regard.

La jeune fille se tut brusquement, réalisant la portée de tout ce qu’elle venait d’admettre et de crier à Maxton face à elle. Des mois de déni, de silence, où elle n’avait concédé que la moitié des histoires à son frère, ainsi exprimées viscéralement. Sa propre colère, qui venait d’incendier son être, retomba brutalement, ne laissant que quelques secousses spasmodiques agiter ses mains crispées. Après une telle fureur, le calme lui sembla outrancier, lui arrachant un long juron avant de finalement se laisser tomber à côté de son frère cette fois-ci, au pied du large chêne. Le soleil avait coulé sur le côté, et désormais, l’ombre de l’arbre les couvrait entièrement. Ses yeux ainsi assombris avaient une couleur de glace fondue, comme se mêlant à un océan polaire. Les pupilles posées sur le visage de son frère à côté d’elle, il était intéressant de constater que toute la véhémence précédente s’était finalement diluée dans une lueur déboussolée. Maintenant qu’une telle colère s’était exprimée, il ne lui restait plus rien qu’un ton creux et incertain. “Ma conclusion, c’est surtout que je me sens complètement esseulée face à de telles attaques. De savoir que tu converses avec Erin, à mes yeux, c’est comme apprendre que tu es du côté des Sørensen, ceux-là même qui se complaisent à me couvrir de ridicule. Alors, ce que je veux que tu fasses, c’est que tu me dises que non, je ne suis pas seule face à ces affronts.” Elle avait parlé bas cette fois-ci, presque dans un murmure, étourdie par le vide qui prenait possession de ses sentiments confus. D’ordinaire, une telle colère n’aurait fait qu’empirer sous son épaisse armure qui empêchait aux flammes de s’échapper. Mais ainsi démunie, aux côtés de la seule personne qui pouvait la percevoir comme celle qu’elle était réellement, les flammes avaient pu quitter son esprit désormais calciné, stérile, encore fumant.

Elle avait sûrement eu tort d’ainsi s’en prendre à son jumeau, allant jusqu’à l’accuser de manigances douteuses envers elle. Mais alors qu’elle était plongée dans son regard, comme y cherchant une quelconque accroche dans le flot d’égarement où elle venait de se noyer, elle s’aperçut qu’au moins elle avait la chance d’avoir cette bouée de sauvetage immuable.

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Maxton se contenta d’afficher une moue boudeuse. Évidemment qu’il la trouvait injuste, elle jouait une histoire d’amour avec un sang mêlé, tandis que lui échangeait quelques paroles avec Erin deux heures tous les mois. Il n’y avait pas photo sur lequel des deux mettait le plus en péril son avenir. Néanmoins, il n’était pas fou, et la colère que dégageait Blue à ce moment très précis lui faisait dire qu’il n’avait aucun intérêt à essayer de faire valoir son point de vue. Elle était trop fâchée pour l’entendre, trop butée pour essayer de le comprendre. Quant à lui, il n’allait pas s’excuser pour quelques discussions nocturnes, avec une pseudo ennemie dont la querelle remontait à leur tendre enfance. De toute façon, il n’avait rien dit de mal. Puis il fallait admettre qu’il était content d’avoir quelques connaissances. Avoir été séparé de sa sœur pendant la répartition avait été particulièrement difficile pour lui comme pour elle, alors savoir qu’il était capable d’avoir des personnes proches, ça le rassurait quelque part. Même s’il allait sans dire que personne ne serait jamais au niveau de sa sœur. La comparaison n’était même pas envisageable. Et c’était pour ça que ce soir, il choisissait de garder le silence plutôt que de se défendre. Un courroux passager était moins difficile à supporter qu’une bouderie de plusieurs jours de sa part.

Au contraire, alors que lui-même bouillait d’énervement, il la laissa vomir sa rancœur contre lui de ne pas comprendre, contre Finnbjörn de ne pas se souvenir, contre Carla de ne pas s’effacer. Tant de pions pour une partie si compliquée … Cette situation, c’était aussi un peu de sa faute, à dire vrai. Il n’avait pas compris la profondeur des sentiments de Blue. Quand Finn avait perdu la mémoire, il la savait touchée, mais comme une connaissance, à la rigueur une amie. Il ne l’avait jamais envisagée comme étant capable de sentiments comme l’affection en dehors de leur relation. Cruelle erreur. Aujourd’hui, ses propos illustraient parfaitement qu’elle était capable de bien plus.

Il ne lui dirait pas, évidemment mais sa réponse l’inquiétait franchement. Elle devenait sentimentale. Ce n’était jamais bon de laisser ses émotions prendre le dessus. Surtout ce genre là. Elle était en train de mettre son équilibre entre les mains d’une personne qui manifestement on n’en avait pas grand chose à faire. Si pour se sentir bien, elle avait besoin de Finnbjörn, alors elle est devenue dépendante, c’était une forme de faiblesse. Il n’aime pas la savoir faible. La seule vulnérabilité qu’il tolérait, c’était celle liée à leur relation. Mais c’était possible parce qu’il savait qu’aucun des deux ne trahirait jamais l’autre. Pour Finn, rien n’était moins sûr. De toute façon, depuis qu’il avait perdu la mémoire, ce n’était certes pas un mauvais bougre, mais Maxton le jugeait instable. Il ne savait plus ce qu’il passait dans la tête du Norvégien, puisqu’il n’avait plus le prisme de son passé pour savoir ce que le Sørensen pensait. Ne pas être capable d’anticiper ce qu’il allait faire le désignait comme une menace. Preuve qu’il ne s’était pas trompé, toute cette histoire, c’était quand même un peu sa faute.

Le silence s’installa entre eux, sans pour autant être désagréable. Il sonnait au contraire la fin du conflit. Maintenant que Blue s’était calmée, et que lui s’était abstenu de répondre, il n’y avait rien entre eux pour les pousser à se disputer. Il en profita d’ailleurs, et savoura ce calme retrouvé. Ce qu’il pouvait détester se prendre la tête avec elle. De toute façon il n’y arrivait pas longtemps, la voir là du coin de l’œil, osciller entre l’énervement et une forme de désespoir le rendait malade. Pourtant, pour marquer le coup, il avait d’abord pensé garder les lèvres serrées le reste de la soirée. Mais maintenant qu’elle était là à côté de lui, presque vulnérable, Il ne pouvait pas rester insensible. Avec un soupir, il laissa sa main glisser vers celle de Blue, puis, voyant qu’elle ne se détournait pas, entremêla leurs doigts. C’était sa façon de la réconforter, lui signifier qu’il était là. Il n’y avait rien d’autre à dire en réalité pour la consoler. Il ne pouvait pas lui promettre d’arriver à les sauver des souvenirs qui n’existaient plus. Il ne pouvait pas non plus le promettre qu’elle régnerait sur le cœur de Sørensen, même si Maxton la pensait trop bien pour lui. À part lui dire qu’il était avec elle, il n’y avait rien à faire. Cela ne voulait pas dire qu’il appréciait son plan, ou qu’il avait accepté le fait d’être mis de côté. Au contraire, il en ressentait encore une puissante amertume. Mais ce n’était pas le moment de le dire. Ils pouvaient tout se raconter, mais peut-être pas à n’importe quel moment.

- Tu as vraiment besoin que je le dise pour le savoir ?

Il fallait croire que oui, vu la lueur déboussolée de ses beaux yeux bleus. Il soupira et verbalisa ce qui lui semblait être l’évidence même

- Tu n’es jamais seule. Je ne te laisserai jamais seule.

Puis l’essentiel avait pris la forme de mots, sans lâcher sa main, il s’allongea dans l’herbe et tenta de reprendre plus calmement.

- Je peux ne jamais te lâcher, mais ne pas être d’accord avec toi. Et en l’occurrence, je ne le suis pas. Si Finnbjörn t’oubliait Blue … Il ne serait pas avec Yaxley. A-t-on vu couple plus mal assorti ? C’est une dinde. Et Finnbjörn n’avait manifesté le moindre intérêt pour les blondes sans cervelle un peu faciles. Ni même pour les relations amoureuses. Il se joue quelque chose que nous ignorons. Mais toi avec Maxwell … Tu lui as donné une raison de continuer. Et tu as fait de Carla une ennemie puisque c’est à dessein que tu as choisi son ex petit ami. L’indifférence était plus indiquée pour les ennuyer.

Comme toujours, elle avait joué avec impulsivité là où le temps de la réflexion aurait été précieux. Mais ce qui était fait était désormais gravé dans le marbre.

- Tu vas tout de même continuer ?

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Fury makes you do crazy things | ft. Maxton

Le silence était une vertu que Bluebell ignorait dans son quotidien, mais qu’elle savourait à chaque instant avec son jumeau. C’était bien là tout le paradoxe de leur gémellité. S’ils dépendaient moralement et physiquement l’un de l’autre, ils étaient également fondamentalement différents. Et curieusement, au-delà de leurs différences notoires, comme pouvaient être différents la lune et le soleil, l’eau et le feu, ils étaient foncièrement complémentaires. Ainsi, si la Serpentard était incapable de se taire et de se contenir, préférant l’explosion au contrôle, la colère au sang-froid, le mutisme de Maxton savait, dans certaines conditions, de manière tout à fait paradoxale, la raisonner. Là où l’indifférence la faisait sortir de ses gonds, le silence entêté de son jumeau lui permettait justement de recentrer ses propres émotions flamboyantes ; justement parce qu’il était le courant d’air léger capable de stopper le vacillement dangereux d’une flamme, tout comme il était la bulle d’oxygène qu’il lui fallait quotidiennement pour ne pas se noyer, tout comme il était la bourrasque motrice de son bateau à la dérive. De ce fait, le silence résolu de Maxton résonna en Bluebell comme un appel au calme que vint soutenir sa main se glissant dans la sienne. Cette chaleur familière, réconfortante, l’apaisa presque aussitôt, comme si elle eût définitivement trouvé la bouée dont elle avait besoin dans les houles de fureur qui la précipitaient vers les abysses. Naturellement, comme se raccrochant à cette prise salvatrice, Bluebell serra un peu plus fort les doigts de son jumeau entre les siens avant de tourner son visage vers lui. Un instant, son coeur se serra à l’idée de l’avoir ainsi éloigné de ses plans tortueux, alors qu’elle aurait pu partager avec lui la rage qu’elle portait comme fardeau sur ses épaules. Il lui dit alors qu’elle ne serait jamais seule ; et ces mots, qui rompirent le silence instauré entre eux, restèrent en suspens un instant.

Mais alors que son jumeau s’allongeait, comme réfléchissant à la situation, Bluebell songea à nouveau à tout ce qu’elle venait d’évoquer. Cette guerre allait avoir de sacrées répercussions ; mais avant qu’elle eût le temps d’y songer, son jumeau lui partagea son analyse des faits. La jeune fille ne sut retenir son sourcil qui vint s’arquer au-dessus de son oeil. Avait-il déjà su faire le tri, là où elle avait mis des jours à réfléchir aux événements ? “Ta perspicacité m’étonnera toujours”, siffla-t-elle avant d’esquisser un sourire amusé en observant son frère allongé à ses côtés, dans un air de nonchalance qui le caractérisait si bien. Ses cheveux légèrement ébouriffés furent caressés par une brise légère, ajoutant de la désinvolture à son allure générale. Il avait des manières désintéressées, détachées et même narquoises, si bien qu’il frôlait régulièrement l’impertinence ; mais à force de jouer avec ces limites, il avait appris à gérer sa posture en ajoutant à son indolence naturelle des manières élégantes, fines, reflétant son esprit rusé et manipulateur. Il excellait dans les apparences et dans les dires : un charisme certain recouvrait sa gestuelle et ses sourires railleurs, comme une lueur intelligente éclairant continuellement sa paresse. C’était bien tout l’art de sa personne, si bien que Bluebell elle-même était parfois étonnée de la justesse du raisonnement de son frère qui pourtant avait l’air parfaitement négligeant. “Tu as raison, l’intérêt de Finnbjörn pour cette vulgaire catin est des plus suspicieux. Elle a peut-être le sang pur, elle n’a cependant aucun amour-propre : et la fierté est pourtant une valeur fondamentale pour les Sørensen. Néanmoins, je ne vois pas ce que cela a à faire avec le fait de m’oublier. Au contraire. Il m’a bien fait comprendre que cette garce, du trou où s’est caché le peu de noblesse qu’il lui reste, est pourtant plus digne de son intérêt qu’une Sherwin”, rétorqua-t-elle avec une amertume non cachée, le regard posé sur le parc devant eux qui s’étendait en de longues plaines verdoyantes. “Mais peut-être n’y a-t-il rien d’obscur à cette pitoyable union. Ne dit-on pas que l’amour a ses raisons que la raison ignore ? Peut-être que la raison de Finnbjörn s’est volatilisée avec sa mémoire, et qu’il ne lui reste plus assez de cellules grises pour songer à préserver son orgueil.” Un sourire moqueur traversa ses lèvres avec une ombre de cruauté. Chaque insulte envers ce couple sonnait à ses oreilles comme une douce chanson. Mais moins douces étaient les considérations de Maxton à son égard. Reportant son attention sur son frère, Bluebell l’observa un instant sans rien dire. Puis, jouant distraitement avec ses phalanges qu’elle se mit à pianoter, elle reprit : “L’indifférence est à la portée de tous. Et on n’a jamais soigné aucun mal par l’inaction. J’ai peut-être Yaxley en ennemie et par extension son cher et tendre promis… Mais au moins sont-ils prévenus. On ne mord pas sans représailles, surtout quand on s’attaque à plus coriace que soi.” Bluebell ponctua ses paroles d’un rictus mauvais. Elle avait conscience que Maxton n’avait pas tout à fait tort ; mais le plaisir viscéral qu’elle avait ressenti en embrassant Maxwell en sachant être épiée lui avait conféré bien plus de satisfaction que n’importe quel silence. La vengeance était meilleure que la sagesse. “Je n’en ai pas le choix pour le moment”, répondit-elle alors. “Ils vont certainement me renvoyer la balle, et il va falloir que j’agisse à nouveau. De toute manière, l’année est presque terminée : il s’agit de préserver les apparences encore quelques semaines. Il ne faudrait pas que j’abandonne en cours de route : capituler, c’est leur donner raison. Et tu sais bien que je déteste avoir tort”, ironisa-t-elle finalement en croisant le regard de son jumeau, une moue taquine sur le bout des lèvres. Cette crainte d’avoir tort pourrait la conduire jusqu’aux Enfers : jamais elle ne plierait le genou.

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Avec autant de force qu’elle était apparue, la colère de sa sœur commença doucement à refluer, prise au piège de son silence. Impossible de savoir si c’était un comportement sage de sa part de ne pas renchérir, ou une forme de lâcheté consistant à refuser de se disputer avec elle, mais le résultat était là. Elle s’apaisait peu à peu et lui savourait cette reprise plus apaisée de leur discussion. En réalité, il pouvait avoir des colères aussi flamboyantes que sa sœur, ils n’étaient pas jumeaux pour rien. Mais il s’y refusait avec elle. Toujours dans cette optique presque chevaleresque de toujours la protéger, il la gardait aussi à l’écart de ses humeurs. De toute façon, il était ce dont elle avait besoin, et au quotidien, il fallait quelqu’un qui soit en mesure de la tempérer. Alors, c’était ce qu’il était devenu.

Preuve que l’orage était enfin passé, elle serra sa main un peu plus fort. Maxton esquissa un sourire satisfait. Ce genre de signe valait toutes les excuses du monde. Il n’y avait pas besoin de mot, sa simple pression de la main signifiait qu’elle ne le pensait pas réellement capable de fomenter contre elle. Cela lui convenait, ils pouvaient donc à nouveau se comporter en équipe.

Il rit, non sans une pointe d’arrogance quand elle loua sa perspicacité. Oh il aurait aimé lui donner raison, mais sur ce coup là, avec les éléments dont il disposait, il aurait fallu être soit particulièrement aveugle, soit particulièrement bête pour ne pas comprendre. Ou être impliqué dans l’affaire, comme l’était sa sœur. Du moment où il était question de sentiment, la rationalité s’effaçait. C’était ce qui l’inquiétait le plus concernant Bluebell, qu’elle ne soit plus en mesure de réfléchir intelligemment. Carter était déjà la preuve qu’elle ne tournait plus très rond.

- Je ne sais pas si on peut parler de perspicacité mais le compliment me touche, ma chère sœur. Plus sérieusement, c’est plutôt une conclusion assez simple avec les données que tu m’as fournies et ce que je sais. D’abord, Yaxley est ridicule dans le rôle de la parfaite petite sang pur amoureuse. Personne n’a oublié qu’elle est bien plus traître à son sang qu’elle ne veut le dire. Finnbjörn est à peine capable d’enlacer sa sœur au quotidien et tu vas me faire croire qu’il trouve plaisir à cette relation ? Je l’imagine en train de désinfecter tous les soirs avec acharnement.

Cette pensée lui arracha un ricanement peu amène. En vrai, le Sørensen s’était puni tout seul. Lui qui n’était ni tactile, ni particulièrement porté sur un quelconque échange de fluide que ce soit, il devait vivre un enfer sur terre. Et c’était terriblement drôle.

- Et en répliquant, tu relances automatiquement le jeu, donc il va continuer. La vraie question est qui franchira la prochaine étape en premier et quelle sera-t-elle.

Faire la bise à né moldu ? Annoncer de fausses fiançailles ? Mon dieu, tant de perspectives plus stupides les unes que les autres qu’il en tremblait. Surtout qu’il ne se faisait aucune illusion, dès que sa sœur ne serait plus en sa présence, elle aurait à nouveau des idées absolument fabuleuses à mettre en œuvre. Et lui, il devrait se contenter de passer derrière pour essayer de réparer ce qu’il pouvait encore l’être. Bref, les prochaines semaines s’annonçaient cauchemardesques pour lui. Encore plus s’il devait regarder Carter embrasser sa sœur sans rien dire. Il voulait bien admettre qu’il avait une assez grande maîtrise de lui-même, mais il ne fallait pas non plus croire aux miracles. D’ailleurs, il faudrait qu’il réfléchisse sérieusement à le faire disparaître de la surface de la terre. Plus de Carter, plus problème. Suffisait d’envoyer Carla avec lui et il pourrait retourner à sa petite vie tranquille. C’était un projet à méditer avec attention donc. Ecoutant la suite de ce que disait sa sœur, il cligna des yeux, interloqué par tout ce qu’elle ne voyait pas.

- Blue, si Finn t’oubliait, il n’aurait pas besoin d’échanger sa salive avec Yaxley, il pourrait juste se contenter d’être lui. Fantomatique et glacial. Donne lui encore une semaine et il va même faire semblant de glousser pour voir si ça t’énerve.

Il choisit de ne pas relever ce qu’elle disait. Non, l’indifférence n’était pas à la portée de tous, la preuve elle en était potentiellement incapable. Et il était en mesure de citer bien d’autres personnes qui ne brillaient pas par leur indifférence. Erin par exemple. Mais si lui avait dit cela, il aurait sans aucun doute relancé la dispute qui venait enfin de se terminer. Il fallait choisir ses batailles, celle-ci n’en valait pas la peine.

- Blue, l’escalade à ce jeu est dangereuse. Garde le en tête.

Il se méfiait de ce qu’elle pouvait faire, mais encore plus de ce que Finnbjörn pouvait envisager. Il était un joueur d’échecs redoutable, et Maxton ne doutait pas un quart de seconde qu’il ait déjà trois coups d’avance. Il n’avait pas envie qu’elle soit déçue encore une fois. Et il n’avait pas non plus envie d’imaginer ce que ce fichu plan pouvait bien donner.

- Tu arrêteras pour la rentrée ?

Quelques semaines à jouer la comédie, il pouvait lui accorder. Il pouvait même la suivre. Mais il refusait que son envie d’avoir toujours raison la pousse à maintenir la mascarade jusqu’à la fin de l’année scolaire suivante. Il voulait bien faire des efforts, mais il n’avait pas signé pour une punition éternelle non plus.

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Que cette fin de journée était douce. Etait-ce là l’effet du soleil déclinant lentement, l’approche de l’été et d’un retour dans une demeure tranquille loin de la vermine polluante de l’école, ou la présence stable et reposante de Maxton ? Son timbre de voix avait toujours eu ce côté apaisant et tranquillisant. Si Bluebell était une montagne russe d’émotions, passant rapidement du silence à la crise d’hystérie, Maxton était capable de la faire redescendre en quelques mots. Il était la limite qu’elle n’avait pas : et avec les dernières péripéties qui s’étaient abattues sur son quotidien, ce temps mort avait quelque chose de berçant. Le seul moment où la Serpentard avait le droit de respirer et de laisser couler sa froideur colérique. La jeune fille observa ainsi un instant son jumeau à ses côtés, allongé dans un air de laisser-aller pourtant anobli par son visage fier et ses allures de prince. Elle esquissa un sourire avant de lâcher sa main pour retirer délicatement une feuille qui était tombée dans les cheveux de son frère. “Les gens de l’espèce de Yaxley ne tombent pas amoureux, ils sont seulement opportuns. Tu as raison. Elle a une image à racheter, et elle l’a trouvée auprès de Finnbjörn… Lequel doit certainement se racler la peau pour retirer les miasmes d’impureté de cette traînée. Il est vrai que le plaisir lui est inconnu, et je doute qu’il le trouve auprès de cette pouilleuse”, acquiesça-t-elle alors que les paroles de son frère trottaient dans son esprit. Il avait visé juste, dans un sens. Si Bluebell n’avait jamais cru en leur pseudo-amour, elle n’avait cependant jamais fait preuve de clairvoyance sur les raisons de leur union soudaine. Mais maintenant que son frère lui rappelait le passé douteux de Carla ainsi que l’hypocondrie maladive du Norvégien, il lui semblait clair qu’un quelconque lien d’affection soit définitivement à exclure. Jetant la feuille un peu plus loin, elle reposa son crâne contre le tronc de l’arbre derrière elle, observant le spectacle des branches secouées par le vent au-dessus d’eux.

Existait-il seulement une étape ultérieure à tout ce cinéma ? Cette pensée la laissa dubitative. Ils avaient déjà bien assez joué. Pouvaient-ils pousser le bouchon encore plus loin ? Les conséquences déjà désastreuses seraient alors irréversibles. La vengeance escomptée en valait-elle tant la peine ? Et si vengeance il y avait, que cherchait exactement Finnbjörn dans cette relation ? La jeune fille reporta son attention sur son frère avant de laisser échapper un soupir. “J’en ai assez de te donner raison aujourd’hui. Néanmoins, tu marques un point de plus. Je ne comprends simplement pas pourquoi il a choisi cette option pour s’en prendre à moi ? Et puis, pourquoi s’en est-il seulement pris à moi ? A croire qu’à force d’être un fantôme, il a craint de disparaître et s’est plu à chambouler son environnement pour rappeler qu’il existe encore.” Cette dernière phrase, Bluebell ne l’aurait jamais avouée à personne : admettre que quelque part, Finnbjörn subsistait toujours pour elle. C’était évident, mais elle ne l’avait jamais réellement énoncé, surtout pas après l’avoir accusé à multiples reprises d’être un spectre informe. Mais il était parvenu à sortir de cet état et à la blesser suffisamment pour lui montrer qu’il était bel et bien vivant. Quelle démonstration douloureuse. Ne pouvait-il pas simplement choisir une méthode plus politiquement correct que l’humiliation ? Après tout, la voilà contrainte à riposter en retour avec de biens maigres moyens : Carter. “C’est un jeu dangereux, j’en ai conscience. Mais je refuse d’être humiliée sans heurter en retour. Il a joué avec le feu, et je me dois de le brûler… Même si ça doit finir en incendie. Qui sait ? Il pourrait renaître de ses cendres et redevenir le garçon intelligent et raisonné qu’il était avant de tout perdre.” Bluebell esquissa un sourire distrait, songeant qu’elle venait d’éclaircir un point obscur de ses songes. Elle s’était souvent agacée face au jeune homme, à force de constater qu’il n’était pas celui d’avant. Mais elle n’avait jamais réalisé que sa colère avait également l’espoir de le réveiller. Finalement, ne devrait-il pas plutôt la remercier d’être aussi dure et tranchante avec lui ? Sa haine avait un noble but, dans un sens. Même si l’imaginer agoniser sous ses doigts lui restait une douce image.

Maxton posa ensuite une question pertinente, et finalement, la meilleure question de cet échange, car la Serpentard n’avait jamais réellement envisagé la réponse. Néanmoins, celle-ci s’imposa comme une évidence. “Bien évidemment. Il y a des guerres qu’il faut savoir écourter, surtout quand les alliances sont douteuses… Et puis, nous avons bien d’autres problèmes à régler, n’est-ce pas ?” conclut-elle en croisant le regard de son jumeau. Son arrogance précédente s’éclipsa alors dans cet échange oculaire teinté de sérieux et de gravité. Quatre ans et aucune trouvaille. Comment n’avaient-ils pu avoir aucune piste après tout ce temps ? A croire que leurs parents s’étaient réellement volatilisés, comme Alexis en cours d’année. Il était temps pour eux de passer à la vitesse supérieure s’ils voulaient retrouver leurs origines. Leur fierté n’avait aucune lacune : mais Bluebell avait le sentiment qu’une ultime pièce du puzzle manquait au tableau de leur histoire, une pièce essentielle qui donnerait de nouvelles couleurs à cette image. Maxton savait de quoi il s’agissait : ils s’étaient construits autour de l’idée de retrouver un jour ce qu’il manquait de leurs origines. Une quête cruciale du passé qui déterminerait leur avenir, qu’ils n’avaient à dire la vérité jamais réellement envisagé, coincés dans un drame familial encore bien trop présent dans leurs esprits.

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Fury makes you do crazy things

Maxton resta songeur face aux paroles de sa sœur. Est-ce que les gens comme Yaxley tombaient amoureux ? Peut-être, peut-être pas. Elle était assez écervelée pour croire à des foutaises comme des sentiments amoureux. Lui ne comprenait pas que l’on puisse se bercer de telles illusions. Les liens du sang étaient indéfectibles, le reste n’était que sensiblerie. Pourquoi accorder de son plein gré une importance telle à une personne qui n’avait aucun intérêt commun avec vous ? C’était nécessairement se laisser glisser sur une pente dangereuse. Il éprouvait le plus grand dédain pour ceux qui s’y laissaient entraîner. Et pourtant, s’il avait fallu être honnête, chacune des réactions profondément irrationnelles de sa sœur ressemblaient fortement aux symptômes d’une amourette. Il soupira et chassa cette idée de sa tête. Ce n’était qu’une passade adolescente, une possessivité teintée de fierté à la rigueur. Mais Blue était comme lui, non ? Incapable de ressentir quelque chose de sincèrement positif et désintéressé en dehors de leur duo terrible. Difficile de dire quelle idée lui était la plus désagréable, qu’elle puisse être fleur bleue ou que leur passé l’ait tellement abîmée qu’elle ne puisse jamais être autrement que dévorée par une rage sans limite. Cela avait toujours été plus compliqué pour elle que pour lui. Lui, il s’était raccroché au but de la protéger et cela l’avait coupé du monde extérieur. Elle, elle prenait encore de plein fouet certains événements.

- Et je ne lui souhaite pas de le trouver. Il a choisi son propre enfer avec elle, qu’il reste y brûler encore un peu.

Pour chaque douleur, chaque affront infligé à Bluebell, il lui souhaitait de longues heures d’agonie. Il se tourna vers sa sœur et la gratifia d’un sourire enjôleur, une lueur amusée dansant au fond de ses prunelles

- Blue, ce n’est pas que l’histoire d’aujourd’hui. J’ai toujours raison, tu le sais bien.

Habile façon de détourner le sujet pour ne pas répondre aux questions suivantes. Pourquoi elle, pourquoi comme ça ? C’était tout de même diablement évident. Il avait choisi cette méthode parce qu’elle fonctionnait au-delà de ses espérances et il visait la Serpentard parce qu’elle avait à ses yeux un intérêt. Sans être capable de dire lequel, il était assez sceptique sur le fait que ce ne soit qu’un sursaut animé par l’envie d’exister. Finnbjörn s’accommodait fort bien du rôle de fantôme. Les éclats et la lumière étaient bien seyants sur Erin que sur lui. Non, il devait y avoir quelque chose qui le liait à Blue. Sentiment réel ou réminiscence d’un passé oublié ? Il ne le savait pas. Mais il essaierait de creuser la question discrètement. Aussi respectable que soit sa famille, il ne pouvait décemment l’autoriser à jouer avec sa sœur pour des bribes souvenirs.

- Les incendies sont la marque d’Erin, la glace celle de Finnbjörn. Toi, tu vaux bien mieux.

Pourquoi vouloir brûler quand on pouvait juste tout balayer ? Elle était tellement plus qu’eux que si elle l’avait souhaité, elle aurait pu être le feu et la glace à la fois. Une sorte de tourbillon qui aurait tout emporté sur son passage, et surtout l’ectoplasme qu’était devenu Finnbjörn.

- Tu sais …

Il hésita une seconde, cherchant les mots qui pourraient apaiser le chagrin de sa sœur d’avoir perdu le Finn d’avant l’incendie.

- Toi qui as voulu Eurydice comme second prénom, tu devrais connaître les enfers mieux que personne. Tu te souviens, dans les mythes que tu lisais, de l’un des cinq fleuves, le fleuve Léthé ? Les âmes qui avaient gagné le droit de revenir sur terre, parce qu’elles étaient pures ou parce qu’elles avaient fini par expier leurs fautes, devaient boire les eaux de ce fleuve pour oublier les souvenirs de leur vie d’avant. Le mythe disait que c’était une faveur. D’ailleurs, c’est le plus beau des cinq fleuves. Il est paisible. Si tu crois cette légende, alors il a déjà eu sa renaissance, Blue, et cette amnésie est censée être bénéfique. Pourquoi vouloir retrouver ce qui est perdu quand tu peux contribuer à avoir mieux ?

Ces souvenirs perdus … Peut-être était-ce une forme de chance ? Peut-être que cela pouvait aboutir sur quelque chose de mieux. Quelque chose qui la servirait elle, pour peu qu’elle daigne essayer.

Il esquissa un sourire, soulagé de savoir que cette mascarade ne se poursuivrait pas à la rentrée. Il était aussi heureux de l’entendre clairement dire qu’elle n’abandonnait pas leur projet, celui d’en apprendre plus sur leurs parents. C’était leur ambition depuis tellement longtemps que si elle lui avait préféré des tourments adolescents, il s’en serait senti terriblement trahi. Presque abandonné une nouvelle fois.

- Nous avons les vacances entières pour nous y pencher. On trouvera bien quelque chose.

Plus que de l’espoir, il avait asséné ces mots avec certitude.

lumos maxima

Fury makes you do crazy things | ft. Maxton

Maxton était arrogant et altier, prétentieux et orgueilleux, et pourtant, derrière cette façade fanfaronne tenait en lui de solides bases de bienveillance et d’empathie que Bluebell redécouvrait parfois encore. Il avait toujours été là ; et il serait de toute manière toujours là ; mais sa présence n’avait pas toujours des tournures douces et protectrices. La plupart du temps, il était là, et jouait avec ses doigts ou usait de son regard pour réconforter ou calmer les ardeurs de la jeune fille. Mais parfois, il trouvait des mots, des mots terriblement justes, des mots que Bluebell devait entendre pour étouffer l’incendie qui montait en elle. Erin était la feu, Finnbjörn la glace ; et Maxton avait visé juste, elle était bien plus, un complexe entremêlé de différents éléments en furie dont la stabilité et l’harmonie du Gryffondor était l’environnement. Une brise vint caresser son visage et jouer avec ses cheveux détachés, comme confirmant ses songes. “Tu as souvent raison, petit impertinent. Ne commence pas à mélanger tes adverbes”, rit-elle en secouant les cheveux de son frère qui étaient de toute façon très souvent emmêlés, énième marque d’une négligence qui pourtant, sur ses traits fins, prenaient des allures d’élégance naturelle.

Et son élégance résidait également dans son éloquence innée. La jeune fille resta silencieuse un instant, réfléchissant aux dires de son jumeau. Une infime part d’elle lui soufflait qu’il avait encore probablement raison ; et pourtant, peut-être par esprit de contradiction, ou par suggestion du mépris qui coulait toujours dans ses veines après les récents événements, la jeune fille secoua lentement le visage en signe de désaccord. Souvent n’était pas toujours ; et il avait tort sur ce point, en guise d’exemple. “Je ne veux pas retrouver ce qui est perdu. Car, vois-tu, je ne pense pas qu’il ait bu le Lethé, mais plutôt qu’il se soit perdu dans le Styx. Il est cette âme errante qui n’a pas le droit au repos. Il est ce damné qui regarde les autres poursuivre là où lui s’est arrêté. Je ne veux pas retrouver ce qui est perdu, parce que celui qu’il était est à jamais éteint, et celui qu’il devient n’en sera jamais que la pâle copie sans consistance.” Bluebell marqua un instant de pause, ravalant l’amertume qui remontait dans sa gorge. “Et toi, Eaque, tu ne dois juger que les âmes qui se retrouvent. Et moi, Eurydice, je ne déambule qu’avec ceux qui ont gagné le droit d’avancer.” Elle appuya ses propos d’un sourire entendu qui semblait vouloir indiquer que le débat était de toute évidence clos. Sans armure, naturelle, elle n’avait plus la patience de porter ses réflexions à terme ; et l’air était bien trop agréable pour s’alourdir de considérations aussi âpres.

Bluebell resta ainsi contre le tronc de l’arbre à jouer avec les cheveux de Maxton, pensive, observant les feuilles au-dessus d’eux bercées par le vent. L’été approchait à grands pas ; et les saisons continueraient de se succéder, encore, inexorablement. Et eux, parviendraient-ils à suivre ce rythme effréné encore longtemps, avec le poids de l’incertitude qu’ils portaient comme fardeau ? Bluebell était forte et solide ; mais le passé qu’ils partageaient commençait à l’épuiser. Pourquoi n’avaient-ils pas avancé en quatre ans ? Pourquoi est-ce qu’ils n’avaient de leurs parents que cette maudite photo ? Pourquoi tout était si silencieux, alors qu’ils entendaient en eux un cri assourdissant réclamant la vérité ? Comme à chaque fois que ses pensées commençaient à s’aventurer sur ce terrain, la jeune fille se sentit étourdie, comme emportée par un tourbillon de questions tempétueuses. Elle était certainement trop impulsive, trop hargneuse ; mais comment aurait-elle pu trouver la paix tant que soufflait en elle cette douleur croissante ? Il leur fallait des réponses ; et ils en auraient. Maxton en avait toujours été certain ; elle, en revanche, se laissait plus aisément porter par les doutes. Quelque chose était fondamentalement étrange, elle en avait l’intime pressentiment ; mais, dans le fond, c’était cette pensée-même qui la réconfortait. Les secrets n’étaient jamais laissés pour mort. Et les Enfers étaient leur terrain de jeu. Ils y étaient depuis si longtemps maintenant qu’ils ne pouvaient pas s’y perdre… Ils avaient appris à avancer dans le noir dès leur plus jeune âge. Un aveuglement qui subsisterait jusqu’à ce qu’ils percent enfin ce mystère, tôt ou tard.

Bluebell esquissa un sourire déterminé alors qu’elle laissait ses pensées glisser sur le visage de son frère, qui regardait les branches au-dessus de lui. A deux, ils avaient tout affronté, en sortant triomphant de chaque bataille. Ils n’allaient pas rester sur un tel échec ; après tout, il s’agissait du combat de leur vie. Une lutte acharnée pour éclairer un passé qui lui seul serait capable d’illuminer l’avenir.
Ils sortiraient des Enfers, ensemble, comme ils y étaient entrés. Et c’était là le seul espoir que Bluebell eut jamais nourri.

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