Le sommeil l’avait abandonnée cette nuit et c’est les traits alourdis de fatigue que la brune quitte son dortoir pour prendre un petit-déjeuner dont elle n’a même pas vraiment envie. Le dernier match de Quidditch de la saison avait eu lieu hier, clôturant la Coupe des Quatre Maisons. Et amenant le rendez-vous que Felicia et Casey avaient fixé déjà plusieurs jours auparavant. Les doigts sur sa tempe droite, la jeune femme masse cette migraine qui menace déjà sa concentration. C’était prévisible : l’insomnie ne pouvait avoir d’heureuses conséquences, et depuis l’arrêt total des potions qui aidaient son esprit à se maintenir à un niveau que l’incendie de l’année dernière avait entamé, Casey ne pouvait espérer qu’une nuit privée de sommeil n’amène pas avec elle des maux de tête.

L’entrevue fixée en début d’après-midi, à quatorze heures pour être précise, lui laissait encore une bonne partie de cette matinée pour retrouver son dortoir, s’étendre sur son lit et tenter de fixer son attention sur un devoir à rendre pour la fin de l’année qui s’annonçait doucement. Vaine tentative : son esprit embrumé par les heures sans sommeil et agité par les heures qui se profilaient ne pouvait se concentrer sur autre chose. Et cette pression sur son crâne qui ne la lâchait pas. Fermant les yeux, elle finit par s’allonger et laisser ses pensées divaguer sur cette potion et ses conséquences.

Felicia avait travaillé d’arrache-pied pour la mettre en place, Casey aidant autant que possible dès son retour de vacances. Elle avait demandé du temps et de la dévotion mais elle était finalement fin prête. Et ainsi, le jour de passer à l’action était arrivé. L’hésitation ne la lâchait pas, questionnement lancinant qui n’avait pas de fin. Était-elle prêt à risquer beaucoup pour retrouver ses facultés d’avant, pour combler les trous qui parsemaient sa mémoire et lui jouaient parfois des tours, pour recouvrer toutes ses capacités de concentration, d’étude, de réflexion ? La réponse était colorée de doute. Ne vivait-elle pas pour la magie ? Si, évidemment que si. Mais il y avait Brooklyn, dont elle n’était pas certaine qu’il la soutiendrait s’il se passait quoi que ce soit de mal, même si elle voulait le croire du plus profond de son coeur. Il y avait Luca, qui l’épaulait et la protégeait de ce père effrayant. Au fond, sa décision était arrêtée, depuis bien longtemps. Mais sa raison se chargerait de la harceler jusqu’à la dernière seconde.

Les heures s’écoulèrent lentement et une dizaine de minutes avant le moment fatidique, Casey délaisse enfin sa chambre pour descendre les étages jusqu’au couloir abritant la salle qui avait été choisie pour cette dernière étape. Un regard pour vérifier que personne d’autre ne se trouve là, et elle pousse le battant en bois qu’elle referme dans son dos. Felicia est déjà présente, entourée de divers accessoires, parchemins et d’un chaudron sur lequel le regard de la brune s’attarde. Salut souffle-t-elle en lui adressant un petit sourire. Tu vas bien ? Tout se déroule comme prévu ? Il avait fallu un chef d’orchestre dans cette nouvelle aventure qui les entraînait un peu plus loin dans la magie noire, et étant donné que Casey allait prendre la potion, Felicia avait tout naturellement endossé ce rôle qui lui permettrait de superviser le tout. Il fallait une confiance aveugle l’une en l’autre pour parvenir à ce stade. Finnbjörn nous rejoint affirma-t-elle, ayant prévenu le Gryffondor de leur rendez-vous et ce dernier lui ayant assuré qu’il viendrait, en tant que spectateur. Elle n’était pas certaine d’avoir envie de jouer tant de choses sous son regard acéré mais peu importe. Il avait été une aide inestimable, il fallait le reconnaître.

Quelques minutes plus tard, le Sørensen pénètre à son tour la pièce. Pile à l’heure. Bonjour. l’accueille-t-elle poliment. Sortilège d’insonorisation, porte bloquée magiquement, les précautions sont prises et Casey se retourne vers la Préfète des Poufsouffle après les salutations d’usage. Avant de t’écouter nous expliquer le déroulé, fait-elle en sortant un parchemin étroitement enroulé sur lui-même de sa poche. je souhaiterais que nous signons chacun ce parchemin. Il est enchanté d’un Oscausi qui frappera quiconque parmi les signataires tenterait de parler de ce qu’il s’est passé aujourd’hui, à l’oral ou à l’écrit, et ce, à chaque tentative. De ce dernier point, elle n’était pas sûre. Est-ce que le sortilège ne fonctionnerait qu’une fois, dans une durée limitée temporellement ou ad vitam eternam ? elle n’était pas en mesure de le certifier. Mais autant faire preuve d’une assurance qu’elle ne possédait pas. Dépliant le parchemin, elle se saisit d’une plume et laisse sa signature s’encrer sur le papier avant de le tendre à Finnbjörn puis à Felicia. Pas la peine de leur préciser qu’elle serait avertie du pacte rompu par un second sortilège, au cas où l’un tenterait de raconter cette entrevue à quelqu’un. Deux précautions valaient mieux qu’une.

Merci répond la brune aux félicitations de la Poufsouffle qui, elle le savait, ne s’intéressait guère au Quidditch. C’en était d’autant plus délicat d’être au courant de cette victoire qui semblait les avoir tous rapprochés encore un peu plus. La soirée de la veille semblait en témoigner. Une seconde, l’esprit vagabond de Casey se perd dans quelques considérations qui n’ont pas lieu d’être. Pas maintenant, pas avec Felicia, pas alors que l’heure du rituel n’a jamais été si proche. L’arrivée de Finnbjörn complète cet étrange triangle qu’ils forment, tous les trois, interrompant Felicia au moment où elle se fendait de quelques mots. Pour dire quoi ? Que Casey pouvait toujours faire machine arrière ? Oh, elle le savait bien. Mais elle ne le voulait pas. Il y avait beaucoup à risquer, mais bien plus à obtenir avec cette expérience. Le jeu en valait la chandelle, c’était ce qu’elle se répétait à chaque nouvelle migraine ou à chaque souvenir trouble. Finnbjörn le salue-t-elle, le détaillant quelques secondes de son regard cobalt, ne parvenant toujours pas à croire que Carla jouait une telle pièce de théâtre en sa compagnie. Il semblait si loin de ces considérations amoureuses, là, face à elles, si droit et si impassible. Puisqu’ils étaient tous présents, il n’y avait plus de temps à perdre, mais la Serdaigle avait une dernière étape à faire compléter. Elle sort le parchemin de sa poche, le déroule devant eux et explique succinctement en quoi il consiste. Felicia signe sans faire de manières, Finnbjörn s’interroge. Pas sans utiliser de nombreux chemins détournés. Elle ne se faisait aucune illusion : ce parchemin n’était pas une garantie d’une fiabilité totale, ils étaient tous les trois bien trop intelligents pour ne pas trouver divers moyens de contourner ce qui les liait maintenant que leurs signatures étaient apposées en bas du papier. Mais Casey en serait avertie s’ils le faisaient, et c’était plus de sécurité qu’elle n’en avait jusque là. Ré enroulant le parchemin sur lui-même, elle le glisse à sa place.

Tout est prêt approuva la brune. Ils pouvaient débuter. Un dernier regard lourd de sens qu’elle échange avec Felicia et elle s’avance d’un pas. Ils connaissaient tous trois le rituel : Finnbjörn pour l’avoir traduit, Felicia pour avoir tout mis en place, Casey pour n’avoir eu cesse de se passer, encore et encore, cette scène, en boucle, jusqu’à des heures indues de la nuit. Irait-elle jusque là ? La brune s’était imaginé des centaines de fois entrain de faire les gestes qui étaient les siens présentement. S’emparer de la petite poupée de son qui était posée à gauche du chaudron, arracher un de ses longs cheveux bruns, l’enrouler d’un geste précis autour du cou de cet avatar vaudou. C’était une nouvelle preuve, s’il en fallait une, de toute la précision de la Poufsouffle : tout ce dont Casey avait désormais besoin était présenté sous ses yeux, dans l’ordre d’utilisation. Une aiguille qu’elle enfonce dans son index jusqu’à l’imbiber d’une goutte de son sang. Elle était d’un calme impassible, ses traits ne reflétaient plus rien qu’une concentration extrême. Loin, bien loin, de ses pensées qui tempêtaient à l’intérieur de son crâne. Continuer, ne pas continuer. Sacrifier, ne pas sacrifier ? Les explications étaient floues à ce sujet. Enfoncer une aiguille, trempée du sang de celui qui réalisait le sacrifice, dans la partie de cette effigie représentant le mieux ce que l’on comptait abandonner en échange des bienfaits de la potion. Casey avait longuement médité la question. Perdre des émotions ou des qualités psychiques avait rapidement été relégué dans la catégorie impensable. Elle ne risquait pas tout, sans réellement savoir quoi, pour se retrouver démunie d’autres capacités mentales. Il était tentant, d’abandonner la colère ou la tristesse, de se délester d’une émotion jugée faible. Tentant mais si pernicieux, car une seule plume en moins dans la balance équilibrée des sentiments, et tout était détraqué. Non, elle sacrifierait quelque chose de physique, mais quoi ? La solution lui était venue en se perdant dans de vieilles légendes moldues et, finalement, c’était là la meilleure décision. Que valait une descendance à ses yeux si elle était incapable d’accomplir ses objectifs et d’engorger toujours plus de savoir ? Voulait-elle seulement des enfants ? Avec tout ce qu’elle-même avait vécu, avec son rapport à la parentalité, aux autres en général ? Son regard se fit plus polaire encore, alors qu’elle fait machinalement rouler l’aiguille entre son pouce et son index. Et puis, elle l’enfonce, en plein dans l’abdomen de la poupée. ... sans perdre de vue votre sacrifice. Ses pensées toutes entières dirigées vers cette capacité à enfanter qu’elle jugeait dérisoire comparée à ses capacités intellectuelles mais qui, elle l’avait longuement pensé et repensé, devrait être un sacrifice suffisant. Du moins l’espérait-elle.

Dé 1 -
PAIR - Au moment où l’aiguille transperce la poupée, Casey sent quelque chose de vague se déployer au creux de son abdomen. Un tour joué par son esprit ou un signe annonciateur ?

Spoiler:

Ses doigts lâchent le tout, la poupée sans vie percée de l’aiguille contenant son sang, dans le chaudron. Elle se recule, son regard partant à la recherche de celui de Felicia qui s’active à nouveau, maître des potions de cette étrange réunion. Ils étaient tous silencieux et il y avait comme une chape de plomb, un poids, sûrement celui de la conscience qu’ils assistaient-là à quelque chose de nouveau. Ce n’était pas leur première expérimentation en magie noire mais bien la première fois que Casey devenait le sujet de l’étude. Elles passaient des études aux réalisations, et des réalisations aux tests. Un geste du menton de la Poufsouffle lui indique qu’elles passent à la suite. Un flacon vide est lestement rempli de la potion aux teintes violacées. Pour la suite du rituel, il est nécessaire que le sujet soit affaibli. Ingérez trois louches de potion en réservant un second flacon vide. Trop d’inconnues, trop d’incertitudes, les précisions étaient imparfaites. Mais Casey observe sans broncher Felicia verser trois louches dans la flasque, sans savoir si la louche est assez grande, assez petite, de taille adéquate. Ses doigts autour du verre translucide, la brune se perd une seconde dans les volutes colorées, puis elle le porte à sa bouche et avale une première lampée, son corps tendu dans l’expectative d’une douleur qu’elle n’imaginait pas ne pas arriver à un moment donné.

Dé 2 -
IMPAIR - Casey suspend son geste, une seconde, ne sentant rien du tout, étonnée que tout se déroule si facilement. Trop facilement, peut-être.

Spoiler:

À chaque gorgée, l’exacte quantitée d’un liquide rouge apparaissait dans le flacon vide posé sur le bureau derrière lequel Felicia observait tout, d’un oeil aiguisé, Finnbjörn dans leur champ de vision, mais il y avait un lien entre les deux amies qui vibrait à chaque étape du rituel. C’était un moment à elles, avant tout. Chaque gorgée, donc, lui ôtait tout autant de sang. Car c’était son sang, qui rougeoyait en face d’elle. Et encore tant de potion à boire… Pour être affaibli, le sujet allait l’être. Elle était incapable d’estimer l’exacte quantité que contenait la fiole entre ses doigts, mais nous étions proche du litre. Casey ne broncha pas, ne s’assit pas, resta droite et debout durant toute l’étape, et ne bougea pas non plus une fois que ce fut terminé. Elle se sentait épuisée, vidée d’une énergie impressionnante. C’est bon, on peut passer à la suite fait-elle d’un ton légèrement plus blanc.

Felicia plongea deux petits papiers buvard avec une pince dans le chaudron, puis s’approcha de la Serdaigle, l’interrogeant du regard, avant de procéder à la suite. Paupière soulevée, papier placé, oeil fermé, opération répétée une seconde fois. Il n’y avait plus qu’à attendre, une dizaine de minutes exactement, avant de pouvoir les ôter. Et ce serait bon. Cela semblait si simple, si facile. À peine douloureux.

Dé 3 -
6 - Casey ne ressent rien, mais ce sont Felicia et Finnbjörn qui portent leurs mains à leurs lèvres, du sang s’en écoulant subitement.

Spoiler:

Casey pour la suite:

tous les dés lancés ici

Plongée comme elle l’était dans les détails minutieux d’un rituel qui pouvait, à tout moment, décider que le jeu était terminé et leur ravir bien plus qu’ils ne l’imaginaient tous les trois, Casey était devenue comme insensible à l’atmosphère de la pièce. Peu lui importait les regards noirs de Felicia à l’encontre de Finnbjörn ou l’aura glaciale de ce dernier qui attendait, dans un coin de la pièce, les bras croisés. La jeune femme n’était que gestes rythmés par une danse lue et relue. Planter, plonger, boire, masquer les signes de faiblesses, ouvrir les yeux, les fermer, attendre. Une suite de verbe qu’elle exécutait à la perfection, assistée et aidée par Felicia, maître de cette potion. Maître de ce qu’il adviendrait, d’une certaine façon. Il y a encore quelques mois, jamais Casey n’aurait pu concevoir de jouer ainsi avec sa vie ou ses capacités, remettant son destin entre les mains d’une tierce personne, quand bien même cette personne en question était probablement l’une de celles à qui elle accordait le plus de confiance. Néanmoins, aux grands maux les grands remèdes, et la brune ne pouvait souffrir un esprit abîmé. Il lui faudrait s’interroger, plus tard, sur ce que cela disait d’elle. De la petite fille battue qui cachait à tout le monde qu’elle vivait dans une famille d’accueil, qui avait menti et dissimulé bien des choses, elle était devenue cette jeune femme pleinement plongée dans la magie, au point d’en découvrir un géniteur biologique au sang bien plus pur que le sien et aux idées bien plus extrêmes qu’elles ne le seraient jamais… encore que ce point-ci restait à prouver. Elle savait que ce père n’était pas aussi arrêté dans ses idées que le sien l’était. Et au final, s’il trempait dans quelques affaires louches, sa fille n’était-elle pas entrain d’emprunter le même chemin ? Jamais Casey n’aurait qualifié la magie noire de louche, c’était l’utilisation que l’on pouvait en faire qui l’était. Pas la magie en elle-même. Et ici, tous les trois, ils ne faisaient que servir une noble cause, n’est-ce pas ? Il n’empêche qu’il lui faudrait, un jour, affronter ce que cela disait de celle qu’elle était devenue. De ce qu’elle était prête à sacrifier pour atteindre les buts qu’elle s’était fixée. Affronter et prendre conscience, deux verbes, en l'occurrence, qu’elle avait bien du mal à conjuguer.

Les papiers buvards placés sous ses paupières et ces dernières closes, Casey se retrouve plongée dans le noir pour les dix prochaines minutes. Le silence était omniprésent et il était peu probable que l’un des trois protagonistes le brise : ils n’étaient pas les plus bavards de l’école et d’un naturel bien trop sérieux et grave pour se laisser distraire par quelques banalités visant à faire passer le temps. Pourtant, une voix s’éleva, celle de Felicia, quoique étouffée et comme pâteuse. La brune n’a pas l’impression que les mots inintelligibles lui sont adressés et la voix du Gryffondor vient lui confirmer ce fait. Pourquoi mentionnait-il une aide ? Que se passe-t-il ? demanda la Serdaigle, d’un ton dénué de toute émotion. Il ne fallait pas qu’elle ouvre les yeux, sous aucun prétexte, pas même pas réflexe pour constater d’elle-même ce qui se déroulait à quelques pas. C’était une sensation étrange que celle d’avoir l’impression d’être privée de sa vue : elle ne pouvait simplement tourner la tête pour ouvrir en grand ses yeux bleus et comprendre de quoi il retournait. Elle était livrée au bon vouloir de ses deux camarades, au moins pour les huit prochaines minutes encore. Ou peut-être que cela faisait plus longtemps ? Casey n’était pas certaine d’avoir une bonne notion du temps.

Puis, de nouveau, Finnbjörn et son accent âpre venu d’autres terres prennent la parole. Casey fronça légèrement les sourcils, toujours perdue au milieu d’un océan de noirceur sans aucune visibilité sur les regards que devaient certainement s’échanger Felicia et leur camarade. Ils étaient fait d’un bois similaire en ce qui concernait ce trait de caractère, de ceux pour lesquels les silences en disent bien plus que les mots. Sauf que présentement, la brune était dans l’incapacité de les analyser pour en tirer quelque chose. Cela devait sûrement s’apprendre : à n’en pas douter, on pouvait sentir bien des choses, même les yeux fermés, mais elle en était totalement incapable. De quelle prochaine étape parles-tu ? Celle-ci n’est pas encore terminée. Son ton toujours égal à lui-même ne trahissait pas les questions qu’elle commençait à se poser, pas plus que cette désagréable sensation qui enveloppait les mots soigneusement choisis, elle n’en doutait pas, par Finnbjörn. Il y avait un sous-entendu que bien du monde percevrait mais dont le propos lui échappait.

L’impression de ne plus rien maîtriser était tenace, aussi tenace que ce noir qui l’enveloppait de toute part et la plongeait dans cet étrange sentiment d’être en complet décalage avec ses deux camarades. Casey avait toute confiance en Felicia, mais cela n’effaçait pas la sensation de ne plus rien maîtriser du tout. L’oreille tendue, la jeune femme essayait de percevoir le moindre son pouvant l’aider à comprendre une situation qu’elle ne voyait pas. Finnbjörn et Felicia n’échangèrent que quelques mots, rien de bien éclairant, mais il lui semblait maintenant que sa camarade fouillait son pupitre. À la recherche de quoi, elle n’en savait rien. Un froissement qui rappelait celui d’un tissu, quelques paroles échangées d’un ton pâteux, et une tension qui alourdissait l’atmosphère… au milieu de toutes ces informations troubles, Casey était complètement aveugle. Veillant à conserver un ton impassible, la jeune femme formula son questionnement à voix haute. Ses poings se crispèrent quelque peu le long de ses cuisses alors que sa camarade lui assurait qu’il n’y avait rien. Elle était peut-être privée de l’un de ses sens les plus importants et assez peu habile en ce qui concernait l’analyse de ses pairs, mais elle était certaine qu’il n’y avait pas rien. C’est finalement Finnbjörn qui apporta un premier élément de réponse, encore qu’il resta bien vague. Mais au moins comprit-elle qu’ils étaient entrain de subir les effets du rituel. Que savons-nous réellement de ce qui est normal ou non, lorsqu’il s’agit de magie noire releva-t-elle malgré tout, ravalant toute trace de panique qui menaçait de l’envahir. Ça n’avait pas été écrit noir sur blanc, certes, mais peut-être avaient-ils manqué l’information, peut-être avait-elle été mal traduite, peut-être même n’était-elle écrite nulle part, une sorte de présent surprise pour les esprits un peu trop aventureux qui s’essayaient à maîtriser de telles forces. Casey avait confiance en Felicia et c’est ce à quoi elle se raccrocha pour ne pas se perdre dans mille et un tourment. Il lui fallait garder les yeux clos jusqu’à ce que le temps soit écoulé et elle pourrait ensuite constater d’elle-même ce qu’il s’était passé pendant ce laps de temps.

Il n’y avait pas de prochaine étape à proprement parler. Après celle-ci, et bien… Casey s’attendait à ressentir des effets clairs et qui ne seraient pas sujet à interprétation, n’importe quoi lui montrant que le rituel s’était accompli. Mais, hormis une vague douleur dans l’abdomen et ces vertiges désagréables lorsqu’elle avait avalé la potion, elle était épargnée. Était-ce inquiétant ? Elle n’en savait rien, aussi préférait-elle ne pas se poser la question. À quelques pas de là, Felicia et Finnbjörn échangèrent encore quelques mots, la Poufsouffle ayant visiblement trouvé un remède au mal qui les avait si subitement touché. Elle hocha silencieusement la tête, approuvant les dires de sa camarade. Ce serait terminé. Serait-ce réussi ou non ? c’était encore autre chose. Un petit soupir lui échappa, signe, s’il en fallait un, de la singularité de ce moment. Jamais dix minutes n’avaient semblé si longues et si lourdes. Croisant les doigts sur son bas-ventre, elle patienta dans un silence presque funèbre que Felicia se fende d’une petite exclamation qui marqua la complétion de ces minutes. Désormais, ils avançaient à l’aveuglette, encore plus qu’ils ne l’avaient fait jusque là. Sans attendre que la Préfète ne s’en charge - elle était, après tout, parfaitement capable de s’en charger elle-même et rien n’indiquait qu’elle ne pouvait le faire - Casey ôta les buvards glissés sous ses paupières fermées, se rapprochant du pupitre pour les déposer dans un récipient vide.

La brune cligna des yeux quelques fois avant de retrouver la netteté habituelle de sa vision, portant ses prunelles cobalt de Felicia à Finnbjörn, de ces lèvres où subsistait une trace sanglante à ce mouchoir qui en était taché. Ils ne saignaient vraisemblablement plus. Tout allait bien, tout était normal, peut-être un peu trop. Casey concentra son attention sur le Gryffondor qui venait de la gratifier d’une question qu’ils se posaient tous les trois. Une seconde passa, infinie, avant qu’elle ne secoue la tête de droite à gauche. Rien du tout. Elle n’avait mal nulle part, ne ressentait pas la moindre douleur, vive ou non, son corps ne protestait pas, aucune vague de chaleur ne l’envahissait… Elle ne s’attendait à rien, mais ne pouvait s’empêcher de s’inquiéter : était-ce normal ? Vous vous sentez bien ? Il était légitime de poser la question étant donné qu’ils s’étaient mis à saigner. Je n’éprouve aucune douleur reprit-elle, portant ses doigts à sa tempe droite, comme pour prévenir une migraine qui, si le rituel avait fonctionné, ne devrait plus jamais se faire ressentir. Pour être franche, je m’attendais à des effets secondaires me touchant. Peut-être se manifesteront-ils plus tard. Ou peut-être, peut-être n’étaient-ils pas parvenus à accomplir ce rite sacrificiel comme il le fallait. Tes traductions ne laissaient rien entendre sur ce point-là ? s’enquit-elle, tournant derechef son visage pour sonder celui de Finnbjörn.