Quand on est doué, faut pas gâcher !

Aux Serpentards la malice, à nous l'intelligence.
Avec la participation de @Judith V. Sørensen dans le rôle de : une potentielle collaboratrice. •••

La salle commune de Serdaigle était connue pour être un lieu calme, où chacun avait pris l'habitude de respecter une ambiance relativement posée et studieuse, du moins la plupart du temps. Bien sûr il en allait bien autrement dans les dortoirs où les élèves de chaque promotions s'adonnaient plus librement aux chamailleries, mais dans cet espace commun, force était de constater qu'un certain respect du confort de tous se maintenait. La mentalité Serdaigle, peut-être, qui faisait d'eux généralement des gens disciplinés ? De toute façon, si cela ne suffisait pas, leurs préfets ne rigolaient pas trop avec le règlement, et savaient le faire respecter au premier signe de débordements.

Aussi, vers minuit passé, quand Blaze descendit à pas de loup les marches qui menaient à la salle commune, pour aller pisser, il ne fut absolument pas surpris de la trouver vide et silencieuse. Du moins c'est ce qu'il cru au départ. Son affaire terminée et revenant pour se coucher, alors qu'aucun feu ne brûlait dans l'âtre, il fut surpris de découvrir une petite silhouette humaine qui se détachait dans la pénombre de la pièce. Peut-être l'avait-il manqué en descendant tout à l'heure, tout à sa hâte, à moins qu'elle n'ait elle-même investie les lieux pendant qu'il était aux toilettes. Quoiqu'il en soit, il se figea un instant, curieux de voir qui était encore éveillé à cette heure, et ses yeux s'habituant à l'obscurité, finit par distinguer le visage de Judith Sorensen, une jeune fille d'un an sa cadette qu'il avait déjà eu plusieurs fois l'occasion de croiser aux repas ou dans certains cours.

Néanmoins et malgré leur maison commune, Blaze ne la connaissait au final que de loin et de on-dits, ne fréquentant pas les mêmes groupes d'amis qu'elle et ne trainant que rarement avec des gens plus jeunes. Ce qu'il savait pertinemment en revanche, c'est qu'elle et sa sœur, Erin, ne pouvaient pas se voir en peinture. On parlait même de maltraitance, à ce niveau. Ne s'étant jamais senti l'âme spécialement chevaleresque, le garçon n'avait jamais cherché à en savoir beaucoup plus, simplement se contentait-il de ne pas évoquer le sujet devant un membre de cette étrange famille. Il était de notoriété commune que les vieilles lignées de sorciers avaient bien souvent des mœurs surprenantes, voire parfois assez rétrogrades, mais vu que c'étaient encore elles qui tenaient les lieux de pouvoir, on préférait ne rien dire, la plupart du temps. Blaze n'était pas trop du genre à fermer sa gueule, simplement il s'en foutait. Que chacun fasse ce qu'il veut de son côté, le jour où on viendrait lui demander explicitement de l'aide, alors il réévaluerait la question.

Osant quelques pas dans la pièce, afin de se manifester, il se demanda un instant si la jeune fille s'était endormie là, ou si, bien réveillée, elle se contentait de contempler leur plafond enchanté qui reproduisait à la perfection un ciel étoilé. Même si Blaze n'était pas friand de ce genre de moments méditatifs, il pouvait comprendre et respecter leur attrait. Sans s'attarder plus que cela, il passa à côté de sa camarade d'un pas léger, au cas où elle dormirait vraiment, la gratifiant simplement d'un poli :

- Bonne nuit...

avant de reprendre la route des escaliers.

Il avait posé le pied sur la première marche quand un autre souvenir lui revint soudainement en tête. Judith... Judith Sorensen... n'était-ce pas elle qu'on disait si douée en potions ? Du moins c'est ce qu'il avait entendu dire, ici et là, parfois. Blaze était friand d'informations, mêmes celles en apparence les plus futiles. Mais si celle-ci était ainsi revenue à l'esprit du jeune homme, ce n'était pas totalement un hasard. Depuis quelques temps, il éprouvait le besoin de monter en gamme dans ses farces, autant par ambition personnelle et pour le plaisir de s'améliorer que dans l'idée de toujours avoir un coup d'avance sur ses amis, particulièrement lorsqu'il cherchait à les surprendre par son inventivité. Or, malgré des dons certains en magie académique, il ne pouvait aller infiniment plus vite que les cours qu'on leur dispensait, et s'il se révélait assez doué pour suivre et appliquer à la lettre les programmes, il allait autrement lorsqu'il s'agissait d'innover à partir de rien.

Pourtant, d'autres avant lui y étaient parvenu. Les plus grands sorciers de leurs générations, des modèles parfois, pour le jeune homme, tous à son âge avaient déjà commencé à confectionner leurs propres sortilèges. Les plus doués, tel le célèbre Severus Rogue, inventaient même des potions alors qu'il était encore à Poudlard. Quant à Voldermort... eh, n'en parlons pas.

Sans chercher forcément à se comparer à ces maîtres, Blaze était de nature curieuse et aventureuse. Apprendre un sortilège était toujours s'approprier une nouvelle botte, mais c'était à son avis les potions qui renfermaient souvent le plus de potentiel. Plus complexes également, ne serait-ce parce qu'il fallait se procurer des ingrédients parfois rares et chers. Mais cela, le garçon en faisait son affaire. Piquer dans la réserve n'était pas si sorcier que ça, d'autant plus si le jeu en valait la chandelle. Restait à trouver un potionniste doué pour combler certaines de ses lacunes. Ou dans ce cas présent, peut-être, une potionniste.

Il hésita une seconde. Bien sûr il aurait d'autres occasions de causer à Judith en privé, s'il le voulait, mais à présent que l'idée lui trottait dans la tête, il n'était pas certain de pouvoir se rendormir sans avoir tenté le coup. Malheur de son caractère obsessionnel, qui faisait autant de lui un véritable explorateur dans la plupart des disciplines qui lui tenaient à cœur, mais également quelqu'un de relativement insupportable, particulièrement lorsqu'il avait une idée à l'esprit... et ce quelle que soit l'heure de la journée, même au milieu de la nuit.

Le jeune homme fit donc demi-tour d'un pas feutré, pour revenir se porter au niveau de sa camarade.

- Eh Judith...? T'es réveillée ?

Si elle ne l'était pas, elle le serait certainement bientôt, bien que Blaze ne parlait pas assez fort pour réveiller leurs préfets, son intention était clairement de se faire entendre par la jeune fille. Même si pour cela il devait aller chercher son attention jusqu'au creux de ses rêves.

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Blaze & Judith

« Chut »

Vendredi. Jour maudit. J’avais su en me levant ce matin que cette journée ne m’apporterait rien de bon. Et mon instinct ne m’avait pas trahie. La pluie qui tombait derrière les carreaux de ma fenêtre de dortoir avait été un signe funeste. J’avais passé ma journée à fuir le bruit désagréable qui emplissait chacun des espaces communs de Poudlard. La vermine n’aime pas le mauvais temps. Je ne valais pas mieux qu’un rat moi non plus, à voir la manière dont s’était terminée cette journée. Une succession de mauvais choix qui m’avait conduite droit dans la gueule du loup. Comment avais-je pu oublier son emploi du temps ? Qu’est-ce qui m’avais pris pour me rendre au premier étage un vendredi midi, pluvieux qui plus est ? Cette brouille avec mon aïeule semblait accaparer mon attention. Je manquais de lecture et de sujet d’étude, voilà qui expliquerait tout. Mais le mal était fait et ce soir je peinais à trouver le sommeil. Dans la pénombre du dortoir, mon esprit s’était focalisé sur le souffle calme de mes camarades sans que cela ne m’aide à me calmer. Au contraire. Le caractère régulier de leur respiration au lieu de m’apaiser m’énervait davantage. Je fus prise d’une furieuse envie de hurler. Mais rien. Les sentiments et les émotions comme les mots paraissaient être bloqués quelque part dans mes poumons. Chaque inspiration m’oppressait. Le rire, les sarcasmes et cette peur lancinante m’étouffaient littéralement. Il me fallait de l’air, sortir de ce dortoir confiné et moite. J’ouvris les rideaux de mon baldaquin doucement et sur la pointe des pieds m’extirpai de mon lit. Je glissai mes pieds dans une paire de pantoufles et enfilai un gros pull de laine sur ma chemise de nuit. Je glissai ma baguette dans ma manche, simple réflexe. Après l’après-midi que j’avais passé, le geste relevait de l’instinctif. Pas la peine de s’encombrer d’un livre : depuis mon retour dans la salle commune, j’avais été incapable de me fixer sur ma lecture, les mots dansaient devant mes yeux sans former sens. La porte grinça légèrement lorsque je m’aventurai dans le couloir avant de disparaître dans les escaliers.

La pièce était calme, tout le monde devait être couché. Je n’avais aucune idée de l’heure qu’il pouvait bien être : dehors le ciel était bien noir et aucune étoile n’était visible parmi les nuages. Une nuit sans lune et sans lumière. Je jetai mon dévolu sur l’un des fauteuils de velours bleu à haut dossier. Dans l’âtre, un feu continuait de crépiter, réchauffant un peu l’atmosphère. Je me lovai contre l’étoffe et relevai mes jambes sur l’assise. La danse des flammes dans la cheminée avait quelque chose d’hypnotisant et je ne pouvais plus détacher mon regard de cette chorégraphie, toujours incapable cependant de trouver le sommeil. J’avais perdu la notion du temps, impossible de dire depuis combien de temps j’étais là lorsque qu’un léger bruit me fit sursauter. Rien qu’un élève venu soulager un besoin primaire. Il était à peine passé qu’il remontait déjà. Je pensais être passée inaperçue. « Bonne nuit... » Je n’étais peut-être pas si invisible que cela après tout. La politesse élémentaire aurait voulu que je réponde mais je n’avais aucunement envie d’amorcer la conversation. Même s’il y avait peu de chance que quiconque ait envie de faire un brin de causette à une heure aussi tardive, pas besoin de prendre le risque. J’avais assez tenté ma chance aujourd’hui et d’ailleurs, celle-ci m’avait clairement faussé compagnie. La première marche craqua et puis plus rien. Je levai la tête de mes genoux. La silhouette s’était arrêtée en bas des marches. S’attendait-il à ce que je lui réponde ? J’aurais pu tout à fait dormir. J’étais partie pour l’ignorer, enfonçant de nouveau la tête entre mes bras. Mais il ne paraissait pas prêt à remonter. « Eh Judith...? T'es réveillée ? » Si je ne l’étais pas, c’était chose faite à présent. Je levai de nouveau les yeux. Le garçon en question, puisque c’en était un, s’était approché de moi. Je lui offrais un visage qui ne devait rien avoir d’engageant. Je devais même avoir une mine affreuse, décoiffée et fatiguée comme je l’étais. « Que veux-tu ? » Son visage me disait vaguement quelque chose mais je n’étais pas assez physionomiste pour me souvenir de son nom. Alors pourquoi connaissait-il le mien ? Je ne l’avais jamais aperçu à une des réunions organisées par ma famille. Un ami d’Hannibal peut-être ? Un peu jeune sans doute pour intéresser mon aîné. Et étant donné la capacité exceptionnelle de mon frère à me faire surveiller, je préférais que ce ne soit pas le cas. Je resserrai mes bras autour de mes jambes dans un geste défensif. A moins que je ne l’ai vu à l’occasion de l’un de ces cours communs avec les quatrièmes années ? Oui cela devait être ça. Difficile pour autant de retrouver son patronyme et la fatigue de la journée ne me facilitait pas la tâche. Que me voulait-il à une heure pareille ? Ce n’était certainement pas le moment de discuter chiffon. Etait-il un de ces idiots incapables de laisser passer une occasion d’ennuyer quelqu’un ? Il n’y en avait pourtant peu à Serdaigle, j’avais miraculeusement atterri dans une des maisons qui comptait le moins d’handicapés. Alors quoi ? J’avais quelque chose sur la figure ?

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Ah, ba elle était réveillée finalement ! Tant mieux. Blaze avait envie de causer. Fallait dire qu'il avait passé la moitié de l'après-midi avec la langue collée au palais à cause d'un sortilège d'Erin, et ça ne lui ressemblait pas d'avoir fermé sa gueule si longtemps. Et puis, si c'était bien vrai que Judith ne s'entendait pas avec sa sœur, il tenait peut-être là une parfaite partenaire pour une petite vengeance, après tout ? Prenant la réaction laconique de la jeune fille pour une invitation à entamer la conversation, Blaze alla s'installer dans un des fauteuils, non loin du feu, face à elle, en souriant d'un air sympathique. Judith avait l'air mal réveillée, le regard un peu ailleurs et les cheveux en bataille, ça lui donnait une drôle de tête. Mais surtout, elle semblait avoir du mal à le remettre. Dans un autre contexte, le garçon en aurait été un peu vexé, mais là il était prêt à passer l'éponge. Il y avait plus important en jeu.

- Blaze. On s'est vu pendant la chasse aux trésors.

A eux deux ils avaient affronté un kappa tueur et malgré que leurs méthodes divergeaient un peu, ils en étaient venus à bout. Bon, il faisait noir à ce moment là, et tout s'était passé très vite, ça expliquait sans doute l'hésitation dans le regard de sa camarade. Sans se démonter, Blaze reprit comme si de rien n'était.

- Dis, j'ai entendu que tu te débrouillais pas mal en potion, c'est bien ça ? Des potes m'ont raconté que t'avais beaucoup d'avance sur le reste de ta classe...

Comme il n'avait pas vraiment prévu d'aborder Judith ce soir, il n'avait pas non plus anticipé la manière dont il parviendrait à la convaincre. Le soucis, c'est qu'il était face à une Sorensen, autant dire un caractère de cochon doublé d'une importance de l'étiquette et du détail qui frôlait la débilité. Si Blaze avait grandit dans une famille de la petite bourgeoisie, Judith était à un cran largement au-dessus, de ce qu'il avait compris. Ça obligeait à se montrer un peu plus stratégique, s'il voulait réussir à attirer son attention. Se basant sur le caractère de sa sœur aînée, il s'était dit que quelques compliments ne feraient pas de mal. Et puis, ils étaient apparement mérités, alors, pourquoi s'en priver ?

- Voila, ça fait un petit moment que je cherche quelqu'un qui se débrouille bien dans ce domaine, une vraie potioniste, quoi. Et si possible quelqu'un de sérieux. L'idée ce serait de se baser sur des recettes simples, en fait, avec des ingrédients facilement récupérables, ou qu'on peut faire pousser, dans des endroits différents pour pas attirer l'attention. Voire pourquoi pas inventer nos propres concoctions.

Il haussa les épaules d'un air nonchalant, sans pour autant s'arrêter sur sa lancée et ajouta d'un ton qui se voulait plus détaché.

- Nos cours de potions encouragent pas assez la créativité, en fait. On répète tous les mêmes choses, j'ai envie d'aller un peu plus loin, expérimenter, travailler plus en autonomie. Mais j'aurai besoin d'un coup de main pour ça.

Et comme s'il prenait soudainement conscience que l'heure et le lieu étaient un peu incongrus pour une demande aussi professionnelle, il ajouta rapidement :

- C'est... pas tout à fait officiel, tu vois, comme projet ?

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Blaze & Judith

« Chut »

Cette journée était en passe de devenir la plus longue de mon existence. Un jour sans fin et sans paix. Après l’altercation que j’avais eue avec Erin, si tant est que l’on puisse qualifier les événements d’altercation, j’avais cherché par tous les moyens à éviter la compagnie des autres. Je m’étais terrée dans mon dortoir comme un animal dans son trou, priant pour qu’il ne vienne pas à l’idée d’Hannibal de venir me trouver. Mais si mon frère avait remarqué mon absence au dîner, il m’avait toutefois laissée tranquille. Peut-être avait-il d’autres occupations. Cela m’était totalement égal en réalité. La vie de mon aîné n’avait pour moi aucun attrait. Nous ne nous comprenions pas vraiment, nous n’avions ni centres d’intérêt communs ni sujets de conversation. La différence d’âge avait creusé un fossé entre nous que je me gardais bien de combler. J’étais devenu l’élément le plus solitaire de notre fratrie et ce rôle me convenait à merveille. Je leur laissais volontiers les mondanités. Blaze cependant, puisque c’était ainsi qu’il s’appelait, ne semblait pas au courant de cet état de fait. En l’espace de quelques secondes, il avait pris place en face de moi, sans aucune gêne. Il avait pris ma question pour une invitation et je me renfrognai. Etait-il possible d’être tranquille quelque part dans ce château ? « Je me souviens maintenant. Celui qui s’exprrrime en crrriant. » Il avait certes réussi à tirer Junior d’un mauvais pas, ce qui à mes yeux, valait certainement bien quelques louanges mais j’avais du mal à oublier que sans ses hurlements, le kappa ne serait jamais venu à notre rencontre.

Je m’enfonçai un peu plus dans mon fauteuil, dans une posture de défense. Que voulait-il ? Blaze ne me laissa pas longtemps dans l’ignorance. Une fois lancé, il était d’ailleurs intarissable. Son monologue d’explication n’avait pas de fin et je l’écoutai d’une oreille distraite. Alors comme cela, on lui avait parlé de moi ? Voilà qui me semblait hautement improbable. Les quelques élèves qui partageaient ma promotion ne me portaient pas dans leur cœur. Hilary avait une sainte horreur de moi, Aster me prenait de haut et Eliana était juste piquée d’une curiosité mal placée. Quant aux autres, ils se contentaient de m’ignorer et cela me convenait parfaitement. « Tes potes, comme tu dis, semblent bien inforrrmés. Je serrrais currieuse de savoirrr ce qu’ils t’ont dit d’autrrre à mon prrropos. » Certainement que je n’étais qu’une sale gamine hautaine et méprisante. Pendant qu’il continuait de m’exposer son projet, mon regard s’attarda sur la jambe que j’avais découverte en changeant de position. D’un geste brusque et mal à l’aise, je tirai sur ma chemise de nuit pour masquer l’entaille qui n’avait pas encore commencé à cicatriser. Je levai aussitôt les yeux, prête à riposter dans le cas où le Serdaigle se permettrait un commentaire. Mais Blaze continuait à parler, apparemment accaparé par sa grande idée. Il me faisait penser à Maxine, toujours prête à suivre ses intuitions les plus folles simplement pour voir où cela allait la mener. Mais Max était partie l’an dernier et depuis, je n’avais pas cherché à lui trouver un remplaçant. D’ailleurs, personne ne lui arriverait à la cheville. Rien que l’antipathie qu’éprouvait Hannibal à son encontre valait tout l’or du monde. Mais elle était retournée en Amérique et je n’avais jamais eu de nouvelles. Max m’avait rayée de sa vie, voilà qui résumait bien le peu d’importance que je devais avoir aux yeux des autres. « C'est... pas tout à fait officiel, tu vois, comme projet ? » De quoi parlait-il ? J’avais décroché depuis quelques minutes déjà mais voyant sa mine interrogative, je compris qu’il attendait quelque chose de moi. « Je crrrois que je vois, oui. Mais je ne vois pas en quoi cela me concerrne ? Je veux dirrre. Que peux-tu m’apporrrter ? » Si je voulais m’exercer, je n’avais nul besoin de m’encombrer d’un novice en la matière. Qu’avais-je à y gagner dans cette affaire ?

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Spoiler:

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Il ne fallait pas être un génie pour lire dans l'expression de Judith que non seulement elle ne l'appréciait que peu, mais qu'en plus ce n'était pas du tout une heure à son goût pour discuter business. Dans d'autres circonstances, un tel sentiment de défiance n'aurait pu que plaire à Blaze, qui n'aimait rien d'autre que déranger, mais pour le moment il accordait plus de priorité à recruter une partenaire compétente qu'à s'adonner à son passe-temps favoris : emmerder le monde. De fait, il décida de se montrer diplomate et ne releva pas la petite remarque de sa cadette sur le fait qu'il criait beaucoup. Et alors ? C'était tout de même pas un crime.

- Lui-même, ouais. Oh, tu sais, des rumeurs, ceci-celà... le prend pas mal mais avec les zigotos qui te servent de frères et sœur, les Sorensen passent pas trop inaperçus, tu vois, les ragots sur votre compte c'est un peu la rubrique people de Poudlard, hein.

Est-ce que c'était maladroit ? Blessant ? Déplacé ? Il en avait rien à foutre, parce que c'était surtout la vérité. Sans exagérer non plus l'importance de cette famille de sang pur dans les conversations, le fait qu'on en trouve des représentants pour quasiment toutes les années de l'école, et que chacun ait un caractère aussi unique que bien trempé avait certainement contribué à les identifier rapidement. Sans compter leur affreux accent. Alors qu'en général, on ne connaissait pas la moitié des noms des élèves qui n'étaient pas dans sa propre maison, eux se repéraient de loin.

S'en s'attarder plus que cela, il se lança dans une explication qu'il espérait la plus claire possible de son projet.

Quand il eut achevé, il fixa la jeune fille dans les yeux, un sourire avenant aux lèvres, limite charmeur, de ceux qu'il était capable de produire lorsqu'il voulait s'attirer la sympathie de quelqu'un. En général ça fonctionnait, mais peut-être que Judith avait mauvais goût. Finalement elle déserra les mâchoires pour lui demander ce qu'elle avait à y gagner.

- Ah, je reconnais bien là un esprit d'entreprise ! Parfait !

Il ricana et se laissa aller dans son fauteuil, croisant les jambes et les bras, d'un air qu'il espérait à peu près professionnel mais surtout détendu. Au moins ne l'avait-elle pas envoyé chier, on pouvait donc commencer à causer sérieusement.

- Premièrement, je te fournirai la plupart des ingrédients. C'est moi qui prend les risques de la récolte et toi tu peux t'exercer avec des recettes non autorisées à ton âge. Ensuite, je te reverse une partie des bénéfices si t’arrives à produire quelque chose de vendable. Enfin...

Il laissa planer une fausse hésitation, comme s'il doutait que Judith soit en mesure de saisir toute la qualité et la pertinence de son dernier argument.

- Il s'agit pas de produire des filtres d'amour à deux sous à la chaîne. Je ne suis pas mauvais en potions non plus, je compte bien inventer quelque chose d'un peu sensationnel. On a tout ce qu'il faut à Poudlard, si on sait comment se le procurer. C'est une bonne occasion de laisser s'exprimer sa créativité. Une chance rare.

Et également une chance de briller par soi-même, loin de l'ombre de ses aînés. Blaze n'était pas certain que cet argument face mouche chez la plus jeune des Sorensen, mais en tant que benjamin de sa famille, il connaissait très bien ce désir de faire ses preuves par rapports à une fratrie plus avancée. De creuser sa propre voie.

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HRP:

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Blaze & Judith

« Chut »

Il y avait quelque chose d’agaçant dans l’attitude charismatique et presque charmeuse de Blaze. Cette manière de se tenir me mettait mal à l’aise. Me prenait-il pour une de ces sottes à qui un sourire et un clin d’œil suffisent à faire oublier le reste ? J’estimais être quelqu’un de plutôt rationnel au contraire. J’aimais les arguments bien pensés et les raisonnements convaincants. Qu’il garde ses manières pour son harem, ce n’était pas ainsi qu’il attirerait mon attention. Et pour le moment, il était assez loin du compte. Le moment était mal choisi, l’approche était douteuse. Bref, il n’avait pas l’ombre d’un as dans sa main. Ajoutez à cela qu’il avait l’air bien au courant des potins de Poudlard, ce qui ne le faisait pas remonter dans mon estime. Il fallait être bien futile pour s’intéresser à des choses aussi insignifiantes que les ragots. Bien entendu, je n’ignorais pas que la réputation de ma famille me précédait. Mes frères et ma sœur m’avaient savonné la planche bien avant que je n’arrive à l’école et les rumeurs couraient bon train depuis des années déjà. Qu’il s’agisse de notre accent, de notre ascendance ou de nos idéaux, nous ne passions pas vraiment inaperçus. J’étais peut-être plus transparente que ne l’étaient mes aînés mais à treize ans, mon patronyme m’ouvrait déjà des portes qui resteraient définitivement closes pour d’autres.

Visiblement, les réserves que j’avais émises ne semblaient pas suffisamment bien formulées. A voir la manière dont il s’était à présent vautré dans le fauteuil en face du mien, il avait pris mes paroles pour un assentiment. Quelque chose me disait que je n’étais pas prête de me débarrasser de lui. Je resserrai davantage mes bras autour de mes genoux, dans une posture de défiance. Ce type était intarissable. Ou peut-être était-ce l’heure avancée de la nuit qui me faisait paraître les minutes plus longues. Rien dans son argumentaire n’était de taille à me décider. Je n’étais pas du genre à m’engager pour un quelconque projet avec n’importe qui et ce Blaze, je ne le connaissais pas outre mesure. Hormis cette brève rencontre lors de la sortie camping, qui ne m’avait d’ailleurs pas laissé un souvenir impérissable, je ne l’avais jamais croisé nul part. Ou bien ne m’étais-je jamais intéressée à lui. Ce qui était hautement probable. « Tu sembles connaîtrrre ma famille. Du moins de nom. Je pense que je n’ai pas l’airrr de quelqu’un qui a besoin d’arrrgent de poche. Et je n’ai pas attendu qu’on me donne l’autorrrisation de m’exerrrcer, sans quoi je ne serrrais pas aussi avancée. » Je restais volontairement vague. Il n’avait pas besoin de connaître la nature de mes expérimentations et j’avais aucun intérêt à lui faire part de mon niveau réel. Il fallait qu’il trouve mieux que cela pour me convaincre.

La deuxième partie de son laïus était bien plus intéressante. Si je n’étais pas certaine de son génie en matière de potions, je doutais moins de sa capacité d’imagination et de son ingéniosité. Il semblait être l’archétype parfait de cet élève brailleur toujours fourré dans des coups interdits. Ce qui signifiait qu’il connaissait l’école bien mieux que moi. Et je devais admettre que je peinais parfois à trouver des endroits calmes et désertés pour m’entraîner sans être dérangée. Les heures passées à expérimenter avec Max m’avaient prouvé qu’il n’y avait pas de meilleur allié dans une recherche qu’un esprit créatif. « Voilà qui est plus intérrressant. Carrr si effectivement tu comptais surrr moi pour fabrrriquer des babioles que l’on trouve à une morrrnille chez Zonko, tu pouvais m’oublier tout de suite. Maintenant j’imagine que si tu me rrracontes tout cela, c’est que tu as déjà une idée derrrrièrrre la tête ? » Je l’imaginais mal se lancer dans un discours en plein milieu de la nuit sans poursuivre un objectif particulier. Peut-être que je me trompais. Et dans ce cas, cela serait décevant.

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Blaze avait beau s'y être un peu attendu, Judith faisait tout de même preuve d'un manque d'enthousiasme particulièrement criant. Peut-être l'heure tardive y était-elle pour quelque chose, mais le jeune homme préféra se dire qu'il n'avait simplement pas fait assez d'efforts pour se montrer convaincant.

Il se contenta de hocher la tête d'un air concentré quand sa camarade lui fit remarquer qu'elle n'avait ni besoin de financements, ni besoin d'entrainement à son niveau. Soit, noté. Il le prendrait en compte pour la suite des événements, c'était toujours important d'avoir une idée de ce qui motivait ou non ses partenaires.

Car partenaires ils seraient, Blaze n'en doutait pas un seul instant. Outre son incroyable confiance en lui, d'autres indices venaient le confirmer dans cette idée. D'abord le fait que Judith ne l'ait pas rembarré tout de suite, chose dont elle aurait parfaitement capable, il en était tout à fait certain, ensuite parce qu'elle commençait à montrer quelques signes d'intérêt vaguement dissimulés derrière sa morgue. Enfin, il savait très bien que les relations entre Sorensen pouvaient parfois être... houleuses. Il le tenait d'Erin elle-même, alors appuyer sur ces petites crispations, c'était une technique de poids quand il s'agissait de persuader quelqu'un de faire équipe avec soi.

D'un air assuré, il hocha de nouveau la tête, affichant un sourire malicieux. Évidement qu'elle voulait voir la marchandise avant de se lancer, au moins pour voir ce qu'il avait dans le bide, c'était normal, il aurait fait pareil.

- Évidement que je connais notre premier projet...

Il avait répondu tranquillement, sans se presser, laissant planer une espèce de suspens quelques secondes. Puis il baissa la voix, plus mystérieux.

- Est-ce que tu as déjà entendu parler de la potion exstimulo ?

Si Judith avait un peu de connaissances en histoire moderne de la sorcellerie, ce nom lui dirait peut-être quelque chose. Il s'agissait d'un breuvage qui avait le don d'augmenter les pouvoirs et la puissance magique de celui qui le consommait, pour un temps du moins. Elle avait été expérimenté au cours de la décennie dernière par le ministère qui en avait fourni à ses aurors et réparateurs de catastrophes magiques, avec un certain succès.

Toutefois, la préparation restait encore un monopole d’État et on hésitait à autoriser sa commercialisation de peur qu'elle ne devienne rapidement la norme pour des sorciers avides d'exploits magiques et que le dopage ne se répande comme une trainée de poudre.

Blaze qui aimait bien les magazines sensationnalistes et comme beaucoup de garçons de son âge, s'intéressait à la magie militaire, avait eut plusieurs fois l'occasion de lire des articles et commentaires sur cette potion, ventant ses mérites. Bien sûr, c'était une invention récente, il n'était donc pas question d'en trouver la recette dans l'un des vieux livres de la bibliothèque, mais une enquête un peu minutieuse avait permis au jeune homme de retracer quelques opérations et ingrédients nécessaires à sa confection.

Au cas où, il s'expliqua.

- Pour le moment c'est pas accessible au public mais ça permettrait d'augmenter le pouvoir de celui qui la boit...

Il la laissa digérer l'information avant d'enchaîner.

- Si on avait un truc pareil à notre disposition, ça ouvrirait pas mal de nouvelles perspectives, non ? Je parle pas juste de gagner les duels en cours de défense, je veux dire... pour encore plus d'expériences, c'est un bon début, non ?

Pensif, Blaze se caressa le menton comme s'il savourait par avance les perspectives qu'une telle potion lui ouvrirait.

- J'ai récupéré quelques infos sur les bases de la préparation, mais pour le reste, il va falloir y aller à tâtons pour retrouver la manière dont elle est préparée. Donc je vais avoir besoin de quelqu'un de doué pour m'aider. Le bon côté, c'est qu'on a quasi tous les ingrédients déjà disponibles à Poudlard... si on sait où les chercher.

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Blaze & Judith

« Chut »

Malgré mes réticences initiales, je devais bien admettre que ce Blaze savait s’y prendre pour convaincre son oratoire. Qu’il soit parvenu à m’intéresser au beau milieu de la nuit et après cette journée du diable représentait un exploit que peu d’autres pouvaient se vanter d’avoir accompli. Il faut dire que je connaissais assez peu d’élèves capables de s’adonner réellement à la confection de potions. Et d’ailleurs la plupart des âmes qui peuplaient ce château n’avait tout simplement aucune idée de mon existence. Je ne savais peut-être rien des compétences en la matière de cet acolyte étrange mais il avait d’autres qualités susceptibles de m’intéresser. Pour ce qui était du domaine théorique et méthodique, je ne faisais confiance qu’à moi-même mais je manquais parfois cruellement d’ingéniosité pour certains aspects pratiques indispensables… Et là-dessus, Mansfield pouvait m’être utile. Nul doute que ce garçon avait de la suite dans les idées et que sa petite intervention de ce soir répondait à un objectif précis. Restait à savoir lequel. Je ne m’engagerais dans rien sans en connaître les tenants et les aboutissants. Vivre avec une fratrie telle que la mienne m’avait au moins appris une chose : la méfiance.

Il avait gardé le meilleur pour la fin. Sa dernière carte à abattre très certainement. Une stratégie qui ne m’était pas inconnue. Ce Serdaigle me faisait penser à Han. Mon frère trouvait systématiquement le moyen de parvenir à ses fins usant du discours comme d’une arme aussi efficacement que s’il avait utilisé sa baguette. Il serait l’avocat de génie qui, un jour, éviterait à Erin de terminer sa vie à Azkaban. Idée qui n’était pas pour me déplaire… La marque de ma jambe était encore bien trop récente pour que je lui souhaite autre chose qu’une vie dans l’ombre et la misère. Cela n’aurait été qu’un juste retour des choses. « Est-ce que tu as déjà entendu parler de la potion exstimulo ? » Je relevai la tête. Avec un grand-père proche du ministère et une grand-mère se chargeant de près de ma formation depuis plus de six ans, je ne pouvais pas être passée à côté de cette invention. Mais lui, qu’en savait-il ? Je hochai la tête en silence, l’invitant à poursuivre sur sa lancée. Ce qu’il fit sans se faire prier. Je commençai à cerner le caractère du bleu et il devenait évident qu’il ne doutait de rien et surtout pas de sa personne. Il avait l’air définitivement bien informé, ce qui était rassurant. Il ne comptait donc pas sur moi pour me charger de tout le travail afin d’en récolter les mérites. Je le laissai terminer ses explications, sans prendre le temps de répondre à sa question rhétorique. Je n’avais pas besoin de lui pour imaginer les possibilités offertes par un tel breuvage. D’ailleurs l’une d’elle me venait en tête très distinctement et si nous parvenions à notre but, nul doute qu’une certaine personne allait enfin mordre la poussière. Cette perspective était d’ailleurs follement réjouissante à l’issue de la raclée qu’elle m’avait encore infligé cet après-midi. « Ton idée est trrrès intérrréssante. Je crrrois que j’ai déjà quelques idées qui mérrriterrraient d’êtrrre essayées. Pour ce qui est de l’apprrrovisionnement, ma grrrand-mèrrre ne pose que rrrarrrement de questions quant à l’usage que je fais des ingrrrédients que je lui demande. Cela perrrmettrrrait de compléter ce qui manque à l’école, si nous pouvons patienter car les colis de Norrrvège ne me parrrviennent pas tous les quatre matins. » Et même si mon aïeule faisait mine de ne pas interférer dans mes expériences, certaines demandes pourraient attirer son attention. Et pour une fois, je préférais conserver ma liberté et mon autonomie en la matière. Je me redressai dans mon fauteuil. « Sache que ta prrroposition est alléchante et qu’elle m’intérrresse. Ce n’est pas pourrr autant que je te fais entièrrrement confiance. Au moindrrre faux pas, tu te débrrrouillerrras seul : contrrrairrrement au rrreste de ma frrratrrrie, je prrréfèrrre rester discrrrète. Aussi je compte sur ta rrretenue. » Ces précisions me semblaient indispensables. Hors de question que tout Poudlard soit au courant de cette histoire. J’avais tout intérêt à ce que personne ne l’apprenne. Et surtout pas ma sœur. Il était désormais temps de clore la discussion. D’un geste prompt, je me levai et tirai sur ma chemise avant de me diriger vers l’escalier. « Si cela ne t’ennuie pas, je rrrremonte me coucher. A bientôt Blaze. »

(c) DΛNDELION

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