Il ne m’arrivait que des bonnes choses. J’ai de plutôt bonnes notes en cours cette année, je parviens parallèlement plus ou moins à gérer ma nouvelle responsabilité, je me suis rapproché d’Hadley et les drames avaient quittés nos couloirs depuis des mois. Nos esprits au contraire sont constamment préoccupés, mais on réussissait de nouveau à passer des semaines paisibles. Il aura fallut qu’on quitte Poudlard pour qu’une nouvelle merde nous explose à la gueule. Si les élèves n’étaient pas déjà suffisamment traumatisés comme ça, cette fois-ci on leur a porté le coup de grâce. Une cellule psychologique a dû être ouverte pour les enfants moldus, c’est pas possible autrement ! Je pense que des consultations de groupe ne seraient pas de refus non plus, on a dû rendre des gens complètement timbrés. Alors un nouvel évènement hante nos cauchemars, de nouveaux mauvais souvenirs viennent voiler les bons. Bien que la rentrée fût calme, il est à nouveau l’heure de passer outre, de se concerter sur le reste et faire semblant que tout va bien.

Notre nouveau Professeur de défense contre les forces du mal s’est offert un assistant en ce début d’année 2020, et il nous reçoit pour son premier cours avec lui aujourd’hui. J’ai d’ailleurs déjà entendu parler de lui. Isidore Vayne est un ancien élève de Poudlard, j’ai même déjà dû le croiser dans les couloirs. Ca fait bizarre de voir quelqu’un d’aussi jeune aux commandes, mais ça donne un peu d’espoir pour la suite ! D’autant plus que je suis friand des créatures magiques. C’est un cours que j’ai toujours suivi avec beaucoup de panache et d’attention, sûrement l’un des seuls cours que je bosse avec plaisir. Marchant auprès de Lena, collègue préfète à ma plus grande joie, nous rejoignons Isidore Vayne devant la cabane. Saluer l’assistant avant de le suivre vers le potager où il nous invite à prendre de gros gants en cuir. Ca, ça veut dire qu’on va tripoter un truc. Qu’est ce qu’on va encore toucher aujourd’hui ? On va planter des carottes, c’est ça ? Ma mauvaise foie se tourne vers les terrariums qu’il nous désigne, et mon intérêt est piqué dans la seconde. Passant une de mes mains gantelées dans mes cheveux, écartant une mèche bouclée de devant mon visage, je m’approche pour y voir de plus prêt suite à son approbation. Je pose alors mes yeux sur une espèce de homard. J’ai une petite idée de ce dont il peut s’agir, mais je n’en suis pas encore totalement sûr. Ça pourrait être un scroutt à pétard, sauf que dans mes souvenirs, cette créature est beaucoup plus grosse. Quoique mon idée se concrétise lorsqu’il nous menace d’une corvée de ménage signifiant que notre connerie sera à assumer jusqu’au bout. La menace c’est pour un kiffe sadique, parce que la créature est fragile ou plutôt dangereuse ? S’il s’agit là véritablement d’un Malagrif, je crois que je n’oserais même pas le toucher, j’ai déjà suffisamment la poisse comme ça. Regarder Isidore plonger sa main dans l’un des terrariums, observer la petite bête sous toutes les coutures, des paillettes dans les yeux. Je maintiens mon idée, plus encore lorsque je comprends que la bête peut-être dangereuse et provoquer bien plus qu’une corvée de ménage. Alors comme à chaque cours de soins aux créatures magiques, je joue au petit je sais tout, levant ma main avec une certitude monstre. C’est le retour de m’sieur nature. « Je me demande si ce n’est pas un Malagrif ? Je n'en ai jamais vu en vrai mais j'ai lu qu’ils ressemblent à des homards, avec des petites tâches vertes comme celles-ci. Ils ne sont pas totalement inoffensifs alors ça expliquerait les gants. Si c'est bien ça, je plains celui qui subira la corvée de ménage parce qu'il passera une semaine sacrément pourrie, ça donne la poisse ses bêtes là ! » Dis-je légèrement amusé, mes yeux rivés sur le homard qu'Isidore Vayne tient dans sa main. Est-ce que je réponds vraiment à la question ? Je fais ce que je peux disons. Je ne suis pas sûr parce que je n’en avais jamais vu en vrai. C’est si petit que ça ? Je me demande si je n’ai pas retenu tout ça grâce à un vieux pote et ses expressions sorcières bizarres. "Je me suis fais mordre par un Malagriff, c’est pas possible !" était sûrement l’une des plus bizarres d’entre elles. Je suis quasiment sûr que ça n'existe pas et que personne d'autre au monde ne le dit. Mais bon, je retiens tout ce que j'entends et tout ce que je lie. Il faut juste que je m'y mette sérieusement et c'est souvent la partie la plus difficile de mes études. La flemme.

Étrangement, le retour à Poudlard avait quelque chose de rassurant pour Lena. Cela faisait plusieurs mois que le château n'avait pas subi la moindre attaque. La dernière remontait à l'incendie qui avait démoli la moitié de l'école. Heureusement, lorsque la jeune fille y avait remis les pieds, presque tous les dégâts avaient été réparés, comme par magie. Bien entendu ce n'était pas que de la magie mais aussi des petites mains qui devaient être bien déçues en apprenant que leurs vacances se résumeraient à reconstruire leur école. La Serdaigle n'avait pas eu à se confronter aux ruines de sa deuxième maison. Ainsi, le jour de la rentrée, c'était comme si rien ne s'était passé. Depuis, Poudlard avait semblé être une école relativement normale et en toute sécurité, sous le contrôle d'une nouvelle directrice. Bien sûr, ce n'est pas sans oublier l'événement dramatique de l'orphelinat moldu qui avait été une terrible épreuve. Or, le fait que ce ne soit pas Poudlard qui ait directement été attaqué, serait peut-être un signe. Les Forces du Mal ont-elles peur désormais de s'en prendre au château avec Appleton ? La sécurité avait probablement été renforcée. Même si les choses avaient mal tournée lors de la soirée de Noël, Lena voulait à tout prix voir le bon côté des choses car elle essayait de se rassurer dans ce qu'elle pouvait.
Pour ce premier cours de Janvier, le professeur de Soin aux Créatures Magiques avait laissé les rennes à son assistant. Lena ne se souvient pas très bien d'Isidore. Si les commères ne lui avaient pas soufflé que c'était un ancien de l'école, elle ne l'aurait sûrement pas reconnu. Évidemment, il y a de quoi se poser des questions avec un assistant aussi jeune que lui. Suivant Vayne à travers le parc, Lena entendait derrière son dos quelques gloussements discrets de filles qui trouvaient sans nul doute leur nouveau professeur séduisant. Elles n'avaient pas forcément tort, cela dit. Un visage familier l'avait rejoint. Ollie marchait à côté d'elle. Les deux adolescents, en plus d'être de très bons amis, avaient la chance de se croiser souvent au détour d'une ronde ou de la salle des préfets. Tout comme Lena, le Poufsouffle vivait sa première année en portant cette enseigne dorée sur sa robe de sorcier. Les cours de Soins n'étant pas souvent très passionnants, la compagnie d'Ollie rendrait certainement l'heure plus agréable.
Pas étonnant que Vayne soit un ancien de Poudlard. Il commença par énoncer quelques règles de sécurité avant toute chose. Il connaissait bien l'école et le genre de fauteur de trouble qui atterrissent dans chaque classe. Il prit ses précautions en garantissant une punition à quiconque faisait un pas de travers avant de présenter à la classe l'animal du jour. C'est vrai qu'ici, vaut mieux prévenir que guérir. En parlant de guérir, ce serait peut-être une bonne chose à faire pour la créature. C'était une sorte de gros homard dégoûtant. Gris clair, parsemé de petites tâches vertes, Lena commençait à se demander si l'animal n'était pas malade ou quelque chose du genre.
– Il va pas bien ce truc, chuchota-t-elle en s'adressant à Ollie. Il a attrapé la gale ou quoi ?
La Serdaigle n'avait pas la moindre idée de ce que pouvait être la créature. Ce fut Ollie, spécialiste en la matière, qui donna la première réponse. La poisse ? Il ne pouvait pas être sérieux. Ce ne sont que des superstitions, une morsure de Malatruc ne peut pas porter malchance ! Si ? Lena fronça les sourcils, car elle n'avait pas très bien compris ce qu'Ollie voulait dire par là. Et si dans le monde magique, certaines créatures étaient bel et bien porteuses de poisse comme il disait ? Non impossible.

Pour le coup, je m’étonnes moi-même. Cette créature que l’assistant du Professeur de soin aux créatures magiques prend dans sa main, est un bien un Malagrif. J’hoche alors la tête avec approbation lorsqu’il s’assure de mon identité, et je souris comme un con lorsqu’il accorde 5 points à ma maison. Poufsoufflfe commence tout doucement à remonter dans le sablier, et rien ne peut me faire plus plaisir. J’avais peur qu’au départ de Milo, la maison ne se mette à couler sous mon poids. Felicia est une très bonne préfète, j’ai entièrement confiance en elle. C’est plutôt en moi que je n’ai pas confiance. La preuve, je n’étais pas sûr de la réponse que j’ai donné à Isidore. C’était pourtant bien ça. Et aussi compliqués soient les élèves blaireaux, Poufsouffle fait encore preuve de grandeur. Ce sourire que je jette alors n’est peut-être pas si idiot que je le pensais. Il est fier, tout simplement.

Les explications de Vayne confirment mes faits et se font plus précises. J’ai presque envie de faire un pas en arrière maintenant que je suis certain du malheur que peut porter un Malagrif. Franchement, je prends déjà suffisamment cher comme ça. Une chose que j’ignorais cependant, ce sont les effets qu’il pourrait provoquer si on était amené à le manger. Certes, la créature n’est pas comestible, ça se voit à sa tronche. Qui aurait envie de manger ça ? Cela dit, je trouve l’idée bonne à faire comme blague. T’invites quelqu’un à manger, tu lui fais du Malagrif. Bon difficile de faire passer ça pour du poulet, mais franchement, le résultat serait jouissif.

Explications faîtes, regard fixé aux notes gravées dans l’air d’un simple coup de baguette, le Malagrif retourne dans son bocal. Quand on pense le danger éloigné, il se trouve qu’il ne fait que se rapprocher d’avantage. En vérité, cette créature-ci est atteinte d’une maladie grave. Je n’ai rien remarqué, mais l’écaille qu’Isidore tient entre ses doigts n’est effectivement plus efficace pour un sous. Terne et sans solidité, ce Malagrif est clairement dans un piteux état que je n’aurais jamais souligné au départ. Sa couleur et son aspect sont déjà particuliers, comment y voir la maladie ? Je le regarde à présent avec beaucoup d’affection, presque triste pour cette pauvre bête. Est-ce qu’elle souffre ? A cette pensée, je tire un peu plus mes gants vers moi, comme s’ils n’étaient pas bien mis. Ou peut-être est-ce un réflexe de gros parano lorsqu’Isidore propose au volontaire le plus courageux d’entre nous de venir donner ses soins à la créature. Je déglutis, ouvrant un peu plus les yeux. Je ne vais pas vous mentir, j’ai l’adrénaline qui monte. Je suis tenté, terriblement tenté. Et c'est loin de m'étonner mais personne ne réagit. Un long silence sévit pendant de longues secondes. Bande de lopettes. « Je dois être complètement timbré, mais je veux bien tenter ! » Dis-je dans un souffle, pas forcément rassuré. Seulement mon avenir professionnel se concrétise peu à peu, et c'est aujourd'hui ou jamais une chance de me prouver que je ne me trompe pas. Toujours le même à ouvrir sa bouche hein ? Toujours le même à plonger droit dans les emmerdes. Que voulez-vous, j'aime ça faut croire. Mes gants bien agrippés à mes mains, je m'approche des côtés d'Isidore pour empoigner le gel et me préparer au pire.

1 - 3 - 5 - 4 : Je parviens à appliquer le gel avec succès sous les conseils avisés d'Isidore.
2 - 6 : Eh merde.
Mon professionnalisme me tuera