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Il ne pensait pas la revoir d’aussitôt, qu’ils se retrouvent seul à seul comme avant, qu’ils se revoient à l’abri des regards indiscrets. Il avait longuement espéré, le temps d’une soirée, tandis qu’il partageait le souper avec son rival loup-garou en pleine St-Valentin, la retrouver à la fin. S’assurer de son état après avoir fréquenté Murphy n’était qu’un prétexte : il avait tenté de sauver le coup pour rattraper l’erreur des elfes de maison et pour qu’ils puissent enfin passer le reste de la nuit ensemble, sans doute à marcher dans la cour sous la belle étoile, ou bien sur le chemin de la Salle Commune si la jeune femme était finalement trop fatiguée. Mais il l’avait perdue de vue, comme il l’avait fait pendant l’été dernier en la poussant inconsciemment dans les bras d’un autre que lui au lieu de rectifier le tir avec elle. Si la conversation avec Thomas s’était envenimée, Shayne aurait eu le réflexe habituel d’imputer à l’apprenti garde-chasse la responsabilité de son moment d’égarement, à un instant où il aurait pu, si son attention n’était pas portée sur son cadet assis devant lui, continuer de jeter des coups d’œil à la table de la brunette et de Murphy. Mais il ne pouvait charger le jeune homme d’une quelconque manière. S’il l’avait perdue de vue, c’était lui le seul responsable.

Ils n’avaient néanmoins pas perdu contact après la St-Valentin. Le match que Gryffondor avait perdu avait conforté la jeune femme à faire un pas vers lui pour l’accompagner le temps d’une soirée entre rouges et or organisée à la dernière minute par Dash dans le but de faire disparaître l’humeur maussade de l’équipe. Ajouté à cela les péripéties avec le professeur de divination et son devoir abracadabrant sur la magie tantrique pour une seule élève qui n’était autre qu’Azure Zinnia, l’une des personnes les plus innocentes qu’il connaissait. Il ne l’aurait jamais su si elle ne lui avait pas mis la puce à l’oreille dans le but de distraire Saige et avoir le dortoir pour elle toute seule pour exercer sonn rituel. Pour le coup, Shayne était soulagé que Walsh fut renvoyé de l’école. Ça aurait été lui, il lui aurait sauté au cou à la première occasion, professeur ou non. Pour qui se prenait-il de donner un tel devoir à une élève mineure ? Il s’était d’ailleurs empressé de remercier par hibou Griffith et Grant pour avoir contribué au renvoi de Walsh. Azure n’avait plus donné signe après lui avoir confié son sentiment de culpabilité à l’égard de l’adulte et où Shayne tenta de la rassurer sur les bienfaits de son partage. Puis, un midi, il avait fallu un hibou, un petit message soigneusement plié pour faire balancer une nouvelle fois son cœur. Elle lui proposa de le retrouver ailleurs et seul.

Shayne était en chemin pour le cours de Sortilège, c’est alors qu’il reçut le bout de parchemin signé Azure. En le lisant, son cœur rata un battement d’excitation et d’appréhension à l’idée de la revoir en tête à tête. Il s’empressa de lui répondre, lui proposant le Balcon du Monde après les cours, avant de se hâter à la salle de cours où il passa pratiquement tout le cours d’Aylmer à regarder l’heure, impatient de retrouver la jeune femme. Il ne devait sans doute pas réagir ainsi. Après tout, elle l’avait dit elle-même : elle ne le voyait que comme un ami, du moins elle ne cherchait pas plus. Et lui, incapable de passer outre les sentiments qu’il conservait pour elle, acceptait de jouer le rôle du garçon qui souhaitait intégrer l’entourage de la belle brunette, dans l’unique but de continuer de faire partie de sa vie, oubliant presque sa promesse de tout tenter pour l’oublier. Comme d’habitude, c’était elle qui invitait. La St-Valentin, la soirée post match, maintenant le Balcon du Monde. Lui qui d’ordinaire se plaisait à jouer l’entrepreneur, il n’en fut pas moins ravi de la posture d’Azure. C’était ce qu’il lui avait demandé maintes fois avant l’épisode du bal de fin d’année, ce qu’il attendait depuis longtemps : un signe qu’il comptait, qu’il faisait partie de ses plans.

Une fois le cours terminé, il se précipita presque vers le Balcon du Monde. Il allait enfin la retrouver et échanger avec elle, non plus par le biais d’hiboux comme ils en avaient coutume à présent. Shayne posa sa main sur la poignée de la porte et appuya dessus après avoir longuement soufflé comme pour se donner confiance, entrant alors dans le décor irréel et paradisiaque du Balcon, un décor qu’il pensait ne plus voir avant un moment : un paysage de plage ensoleillée. Le sable, les rayons, les bruits des mouettes… Tout cela lui rappela non sans lui infliger douleur ses vacances qu’il passa avec certains élèves de Poudlard, et notamment Azure. Mais plus particulièrement ce décor : il ressemblait à l’endroit de dispute entre lui et la brunette l’été dernier avant qu’ils ne se perdent dans l’île déserte et qu’ils aient dû retrouver leurs camarades, Shayne fermant les yeux de rage au souvenir de la Gryffonne se jetant dans les bras du loup. Il avait l’impression pénible d’être revenu plusieurs mois en arrière, jusqu’à cette fameuse excursion sur l’îlot magique. Lorsqu’il les ouvrit, il constata la présence de la brune devant lui, adossée à la rampe du balcon… s’essuyant les yeux du revers de la main. Elle avait pleuré, semblait-il. A cette vue, le cœur de Shayne se serra violemment, l’obligeant à se tenir deux secondes sur la porte tant il était sonné par la douleur. Etait-ce à cause du décor qu’elle pleurait et serait-ce donc qu’elle pensait à la même chose que lui en constatant la plage irréelle ? Pourquoi avait-elle choisi ce décor si elle savait que cela la bouleverserait ?

« Je… J’espère ne pas t’avoir trop fait attendre. » Il se remercia de ne pas lui avoir fait la remarque sur ses précédentes larmes. Il ne souhaitait pas une nouvelle fois gâcher le moment. Lorsqu’elle ouvrit la bouche, ce n’était pas pour le rassurer ou quoi que ce soit. Elle lui annonçait qu’elle avait compris pourquoi ils ne pouvaient consentir tous deux à devenir de simples amis. Enfin, aurait-il dit dans d’autres circonstances, mais il se tut lorsqu’il intercepta l’émotion qui lui nouait la gorge et influait dans sa voix. Ce n’était plus du soulagement qu’il ressentait, mais du désarroi, de la tristesse, de la nostalgie. « Ah… Et, qu’est-ce que tu as compris, dis-moi ? » S’il n’était pas sûr de ce qu’il en était chez la brunette, Shayne savait pourquoi lui ne pouvait consentir à la considérer comme une amie et seulement une amie : c’était une fille qu’il avait embrassé, lui volant son premier baiser, une fille qui le faisait tourner en bourrique, une fille qui pouvait l’attendrir comme elle pouvait le briser, une fille qui seulement par ses doux regards pouvait troubler en un rien de temps ses sens, une fille qui l’empêchait de prendre des décisions logiques et de bien réfléchir avant d’agir. Voilà pourquoi il ne pouvait la réduire à une simple amie. La vérité était qu’il l’aimait ; oui, il l’aimait, et ce depuis deux ans bientôt. C’en était indéniable. Que ses sentiments au lieu de perdre de leur intensité au fil du temps n’avaient cessé de s’accroître malgré leurs innombrables prises de becs, leurs ridicules disputes, leurs crises de jalousie mutuelles.

Ses yeux verts se posèrent sur les bras d’Azure, croisés sur sa poitrine comme si elle tentait de se protéger du froid ambiant. S’il ne faisait pas preuve du sang-froid qu’il arborait, il aurait réduit à néant la distance entre leurs deux corps pour l’envelopper dans ses bras et nicher sa tête au creux de son cou, et rester ainsi longtemps pour profiter de la chaleur de sa peau contre la sienne au rythme de leurs respirations synchronisées. Mais il ne le ferait pas. Ce ne serait pas lui qui craquerait cette fois. Il allait lui laisser de l’espace, son espace, le temps de digérer toutes ces émotions qu’elle semblait avoir du mal à contenir. Il s’éloigna tout de même de la porte, s’approchant de la jeune femme mais en s’arrêtant à une distance respectable, tandis que le sang circulant dans ses mains et ses jambes bouillonnait presque d’impatience de pouvoir toucher l’épiderme d’Azure.

Codage par Libella sur Graphiorum

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Que Merlin le retienne… Il n’était pas sûr d’y arriver seul. Rien qu’en entrant au balcon, la voir pleurer l’avait mis dans un tel état que ses poings s’étaient automatiquement serrés à s’en blanchir les phalanges, comme pour empêcher ses mains de se tendre vers la silhouette de la jeune femme pour l’attirer et la prendre dans ses bras, et ainsi faire cesser ses tremblements qui lui fendaient le cœur. Mais il savait qu’il jouerait avec le feu s’il succombait à cette envie, s’il osait s’approcher d’elle comme il l’avait fait devant cet arbre fruitier au camp d’été ; car elle n’était pas à lui, et son cœur bien qu’il penchait un peu pour le Gryffondor penchait également pour le loup qui était totalement l’opposé de Shayne. Il n’oserait pas tenter quelque chose alors que la voie n’était pas libre, que quoi qu’il ferait il demeurait aux yeux de tous ses amis celui sur qui Azure se jetterait à la moindre occasion où Thomas la délaisserait. August n’avait cessé par ses hiboux de le mettre en garde, que quand bien même les agissements de la jeune femme n’étaient pas fomentés et prémédités cette histoire n’avait rien de normal, et qu’il devait y mettre un terme avant que cela ne dégénère. En effet, qui voudrait vivre ainsi, dans l’angoisse de perdre l’être que l’on aime mais aussi dans la crainte de n’occuper que la place du second ?

Il pensait avoir été clair, avec elle comme avec lui-même, que cette relation ne mènerait à rien et qu’il valait mieux qu’il l’oublie. Il avait tenté en vain de se mettre cette idée en tête afin de ne plus avoir à souffrir de l’indécision d’Azure. Pendant longtemps il n’avait cessé de l’ignorer, dans les couloirs comme lors de la sortie scolaire, ses regards se montrant particulièrement froids et fuyants comme pour donner raison aux deux partis d’abandonner la chose. Lors du Bal, il souhaitait parler à sa meilleure amie en feignant d’ignorer la brunette, jusqu’à ce que le professeur Griffith ne vienne usurper la conversation en se moquant ouvertement d’eux deux. Et enfin lors du match contre Poufsouffle, il avait espéré qu’en écrivant un hibou à la belle Agatha après son exploit il puisse enfin enlever de sa tête le visage de celle qui hantait ses jours et ses nuits. Mais il avait fini par lui écrire, et par conséquent par rompre la promesse qu’il avait faite à Azure dans la salle de défense – celle d’essayer de l’oublier – en lui avouant qu’il ne pouvait se résoudre à l’ôter de ses pensées. La réponse de la jeune femme au lieu de le soulager le fit souffrir encore plus : bien qu’elle aussi ne pouvait l’oublier, la seule raison qu’elle eut trouvé pour qu’ils arrêtent de s’ignorer se résumait à tenter le stade d’amitié.

Il avait ri jaune lorsqu’il avait lu le bout de parchemin où elle l’invita à la St-Valentin en tant qu’amis, se demandant si elle n’avait pas toute sa tête ou si elle le faisait exprès pour le faire sortir de ses gonds, car elle savait mieux que quiconque que l’amitié ne serait pas la solution pour eux. Mais il accepta, non pas par résolution, mais parce qu’il en savait l’occasion rare et qu’au moindre refus ou changement de dernière minute de sa part, le loup débarquerait pour lui voler une nouvelle fois la place. Et il était hors de question pour Shayne, orgueilleux comme il était, de paraître plus distant et indécis qu’Azure l’accusait d’être. Pas besoin de s’attarder sur cette soirée où il passa le plus clair de son temps à observer la gêne non dissimulée de son cadet à chaque parole… Et enfin cette histoire avec Walsh. La voir se mettre naïvement en danger par simple besoin de se changer les idées avait éveillé en lui cet instinct protecteur qu’il ne réservait qu’à très peu de personnes de son entourage. Il était écœuré de constater qu’un professeur puisse autant manquer de distance et de professionnalisme pour répondre aux besoins d’une élève mineure qui avait encore tout à apprendre de la vie. Cette histoire lui avait une nouvelle fois prouvé qu’il ne pouvait avoir la conscience tranquille en la laissant mener sa vie comme elle l’entendait alors qu’elle-même n’avait pas conscience des dangers qu’elle pourrait rencontrer dans sa quête d’ouverture et de sensations nouvelles. Il prit l’information d’Azure comme un appel à l’aide, et il s’empressa de contacter certains professeurs quant aux méthodes dérangeantes de Walsh.

Voilà ce qu’il en résultait des différentes péripéties jusqu’à cet après-midi au balcon du monde : des preuves incontournables et irréfutables des sentiments qu’il éprouvait pour la jeune femme et qu’il ne pourrait réprimer quand bien même il se tuait à la tâche. Il l’aimait, cela va sans dire, il ne pouvait plus le nier. Mais elle… ? Que restait-il à aimer en elle chez lui ? Ses sentiments ne pouvaient être inchangés depuis leur altercation dans les couloirs de l’école au printemps, sinon comment expliquer qu’elle ait embrassé Thomas en camp d’été et que tout le monde semblait les considérer comme un couple depuis ce jour-là ? Il en serait autrement, Azure et Shayne seraient ensemble aujourd’hui... Tu cherches à te prouver qu’elle est la seule coupable dans l’histoire, que c’est elle qui t’a oubliée pour un autre… mais toi qu’est-ce que tu as fait pour empêcher ça ? lui dit sa voix intérieure tandis qu’il écoutait la jeune femme expliquer les raisons pour lesquelles elle ne pouvait être son amie. Et autant dire qu’elle avait raison de le sermonner. Qu’avait-il fait pour arranger les choses ? Avait-il avoué clairement ses sentiments ? Avait-il prononcé les trois mots fatidiques mais clairs « Je t’aime » ? Avait-il seulement rassuré la jeune femme de son intention d’inviter son amie Lilith avant qu’elle ne la bouscule au bal ? Lui avait-il laissé le temps de s’expliquer au camp d’été chaque fois qu’ils se retrouvaient seuls ? Non. Rien de tout cela. Il avait encore une fois, comme à son habitude, évité la confrontation. Alors non, elle n’était pas coupable de penser qu’il ne ressentait rien… Il l’était.

Mais alors qu’il culpabilisait intérieurement pour son indécision et son indifférence, alors que ses yeux scrutaient le visage de la jeune femme comme par peur de voir une nouvelle larme glisser le long de sa joue, le poids qui pesait sur ses épaules tandis qu’il contenait l’envie de l’étreindre, s’évapora, le laissant comme vide, désorienté, perdu. Elle lui avait avoué qu’elle l’aimait. Les mots d'Azure résonnaient dans l'air, ébranlant les fondations même de la forteresse émotionnelle que Shayne avait érigée autour de lui. Chaque syllabe était comme une fissure dans ses défenses, laissant filtrer les émotions qu'il avait tant lutté pour contenir. Son cœur tambourinait dans sa poitrine avec une intensité presque douloureuse, chaque battement résonnant comme le grondement sourd d'un tonnerre lointain. Il sentait l'envie irrépressible monter en lui, une étreinte brûlante qui menaçait de le submerger tout entier.

Il déglutit difficilement, cherchant désespérément une échappatoire à cette tempête qui faisait rage en lui. Ses mains tremblaient légèrement, trahissant toute la tension qui l'habitait. Mais son regard demeurait fixé sur Azure, captivé par la lueur intense qui brillait dans ses iris. Leurs souffles se mêlaient dans l'air chargé d'électricité, créant une toile invisible qui les enserrait tous les deux. Shayne sentait chaque fibre de son être tendue vers elle, comme attirée par un aimant invisible dont il ne pouvait s'échapper. C’est alors seulement qu’il comprit qu’il s’était approché d’elle, son corps attiré vers l’avant prenant un élan de courage qu'il ne se connaissait pas. Tandis qu’il se rapprocha lentement d'elle, jusqu'à ce qu'il puisse sentir sa présence à quelques centimètres à peine, il s’arrêta près d’elle lorsqu’il sentit leurs souffles se mêler, chauds et irréguliers, créant une tension presque palpable entre eux.

Ses yeux plongèrent dans les siens, et il resta figé un moment devant elle, comme pétrifié par cette révélation inattendue. Son cœur tambourinait dans sa poitrine avec une intensité nouvelle, chaque battement résonnant comme le grondement d'un tonnerre lointain. Et dans un élan irrépressible, il tendit lentement la main vers elle, caressant doucement sa joue du bout des doigts.

« Tu as raison, Azure… c’en est assez. Je suis désolé. »

Il prononça ses mots en un murmure près du visage de la jeune femme, ses yeux posés sur les lèvres de la brunette qu’elle mordillait sans cesse après sa tirade. Pourquoi fallait-elle qu’elle les malmène autant ? Poussé pour un besoin irrésistible d’y passer le pouce comme on y passait un baume, il succomba à cette envie, son doigt parcourant sa lèvre inférieure tout doucement, n’ayant plus de retenue. Puis il releva les yeux pour les plonger à nouveau dans les siens.

« Désolé… de ne pas t’avoir dit que je t’aimais. »

Et dans un geste aussi irréfléchi qu'irrépressible, il s'avança lentement vers elle, jusqu'à ce que leurs lèvres se frôlent dans un baiser aussi doux qu'électrisant, sa main toujours posée sur sa joue tandis que l’autre se logeait au creux de ses reins pour la ramener à lui, la collant à son torse chaud, leurs cœurs battant presque à l’unisson. Fermant les yeux par la même occasion, Shayne ne pensait alors plus au décor qui jusque-là lui avait laissé un goût amer au travers de la gorge en souvenir du camp d’été, ni même au cours auquel il devrait assister dans moins d’une heure. La seule chose qui l’importait était Azure, et rien d’autre. Il n’y avait plus de doute, c’en était indéniable. Elle l’avait choisi, lui. Et elle l’aimait encore.

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Après leur altercation en salle de défense en octobre dernier, il pensait ne jamais plus pouvoir la prendre dans ses bras comme il le faisait à présent. Il croyait qu’après lui avoir demandé de lui laisser de l’espace, plus jamais il ne sentirait la chaleur de son étreinte, le doux parfum de ses beaux cheveux bruns, le feu brûlant de ses prunelles azur, le goût exquis de ses lèvres roses. Et pourtant elle était bien là, tremblante – non pas de peur, il le savait, mais d’émotion – dans ses bras, ne pouvant lui échapper cette fois-ci, son souffle se mêlant au sien tandis que l’un explorait la cavité buccale de l’autre. Il avait l’impression de rêver, qu’à n’importe quel moment ce qu’il vivait pouvait partir en fumé. Voilà la raison de la pression de sa main au creux de ses reins comme pour l’empêcher de quitter son étreinte. Il l’avait déjà perdue une fois, il n’allait plus faire la même erreur. Il allait rattraper toutes les fois où elle lui demandait un signe alors que lui, plus têtu que prévenant, ne souhaitait pas avoir ce pouvoir de décision. Il s’était longuement persuadé qu’en tentant de fuir la discussion il lui laisserait de l’espace afin qu’elle ne soit pas avec lui tout simplement parce qu’il lui avait pris son premier baiser.

Malheureusement pour lui, le baiser ne dura pas longtemps, Azure le rompant après quelques minutes, son front collé à la joue du jeune homme comme pour l’empêcher d’atteindre à nouveau ses lèvres. A ce constat, Shayne lâcha un soupir de frustration en reportant son regard vers l’horizon, non parce qu’il était une nouvelle fois séparé d’elle et revenu à la réalité, mais surtout parce qu’il la sentait hésiter et qu’il avait compris ce désarroi. Bien évidemment, elle ne l’avait pas encore choisi complètement : Thomas devait sans doute lui aussi occuper ses pensées, voilà pourquoi elle se sentirait coupable à un tel point qu’elle dut s’écarter. « Qu’est-ce qu’il y a ? Tu… Tu regrettes ? » dit-il surpris par sa réaction. Et ce qu’elle lui dit lui fit davantage mal. Elle pensait une nouvelle fois qu’il se forçait à revenir vers elle, que le cœur n’y était pas, que ses paroles ne rimaient à rien, qu’il pouvait du jour au lendemain l’oublier et passer à autre chose. Ce constat le fit d’autant souffrir car elle était sans doute la personne la plus à même d’attester de ses sentiments.

Des paroles aussi absurdes, il en aurait ri en d’autres circonstances. Mais le cœur n’y était pas et il n’était pas disposé aux taquineries à ce moment-là. « Tu as si peu confiance en moi pour croire le contraire ? » dit-il avec peine et douleur, grimaçant un peu alors qu’il la tenait toujours dans ses bras. Voilà l’image qu’elle semblait avoir de lui : un être insensible, joueur, imbu de lui-même et complètement indécis. Un sentiment de culpabilité l’envahit alors qu’il l’écoutait parler. Il aurait dû se montrer plus clair dans ses sentiments, lui dire qu’il l’aimait avant de l’entraîner dans les bras d’un autre, lui donner une raison de lutter pour ce qu’ils partageaient et espéraient garder entre eux. Mais non, c’était tout le contraire qui s’était produit : alors qu’il partait d’une bonne intention en invitant Lilith au bal, il n’avait pas pris les précautions qu’il fallait en prévenant la brunette de sa décision ; au camp d’été, il ne lui avait pas non plus paru nécessaire de recoller les morceaux avec elle, feignant presque de l’ignorer jusqu’à ce qu’elle se précipite dans les bras de Thomas ; à la rentrée il avait déclaré l’oublier alors qu’il en était incapable ; et surtout, à la moindre occasion, il pouvait lui reprocher tous les maux du monde, tout le contraire d’une relation saine.

Résultat des courses : Azure souffrait. A l’heure où elle était censée apprécier les joies d’aimer et d’être aimée en retour, elle ne connut jusque-là que le désespoir et la mélancolie. Alors que d’autres filles voyaient en la réciprocité de leurs sentiments la perspective d’un quotidien plus agréable, la jeune femme ne pouvait concevoir l’idée d’une relation saine avec le jeune homme sans tracas ni tourment. Et que tandis que d’autres seraient soulagés d’entendre des mots d’amour venant de l’élu de leur cœur, Azure, elle, ne semblait en tirer que davantage de désarroi. Tout cela à cause de lui, qui avait attendu presque deux ans pour lui dire qu’il l’aimait et pour au final ne l’avouer qu’après qu’elle se soit lancée. Pris de remords, le jeune homme soupira longuement en tournant la tête ailleurs, les paupières fermées qui ne cachaient rien de la douleur qu’il ressentait alors. Il prit un temps d’inspiration avant de se lancer : « Je suis désolé… Je ne savais pas que tu souffrais autant, que je te faisais autant souffrir. Mais maintenant que je le vois, je comprends que tu ais longuement hésité à m’en parler… J’aurais dû te rassurer sur mes sentiments, gagner ta confiance. Au lieu de ça, je t’ai perdue. »

Il était vrai. Le principal problème chez Shayne était qu’il ne savait pas s’exprimer clairement. Tout simplement parce qu’il détestait cette image niaise qu’il se renvoyait à lui-même en ressentant de pareilles émotions. Il ne faisait pas dans la romance, non pas parce qu’il ne savait pas s’y prendre, mais parce qu’il craignait qu’en le faisant, il devienne le type de personne qu’il redoutait être : trop émotif et sensible. Les épreuves lui avaient appris que dans la vie pour réussir à inspirer le respect chez les autres, il fallait laisser de côté cette facette de sensibilité de côté car on le boufferait s’il se montrait aussi faible. Il s’était tellement imprégné de cette idée qu’aujourd’hui il fuyait presque les sentiments qu’il éprouvait pour Azure. « Je n’ai jamais su… je ne sais pas exprimer clairement ce que je ressens. Je n’ai jamais eu à le faire et jusqu’à aujourd’hui ça ne m’a jamais dérangé. Je… je ne suis pas le plus avisé dans ce genre de choses. Ces mots… je ne les ai quasiment jamais dit, en tout cas pas dans ce sens-là. Je ne sais donc pas comment les dire. Ce n’est aucunement ta faute, il s’agit de la mienne.»

Il déglutit difficilement en soufflant longuement, relevant la tête alors qu’il sentait ses yeux s’emplir d’un liquide qu’il refusait de sécréter, aussil leva-t-il ses orbes au ciel pour le ravaler. Il détestait se montrer aussi vulnérable, surtout devant Azure. Il avait l’impression de mourir à l’intérieur et ne souhaitait qu’une chose : être à six pieds sous terre pour qu’on abrège ses souffrances. Une fois qu’il se sentir plus calmé, il reprit, cette fois en replongeant ces yeux dans ceux de la brunette. « J’aurais dû te le dire avant, avant que tu finisses par croire que j’aimais une autre fille, avant que tu ne sois avec Thomas… Tu as bien raison pour le coup : c’est moi qui t’ai entraîné vers lui à force de… à force de te repousser. Je ne t’ai pas une fois donné de raison de lutter, pour nous. Je n’ai fait que te montrer la dure réalité, que je ne peux pas, même si je le voulais, te donner ce que tu mérites… ou ce que tu souhaites obtenir de moi. »

N’en pouvant plus, il détourna le regard, et avec regret défit son étreinte avec la brunette, le froid l’envahissant par l’absence de chaleur corporelle. Sa silhouette pivota à 90 degrés, n’offrant à Azure que son profil, son regard balayant les environs comme pour mettre un peu d’ordre dans ses idées. « J’aimerais te dire que ça ne se reproduira plus, que je ne te ferai plus souffrir, que je rattraperai le temps perdu. Mais à quoi bon si je ne sais pas par où commencer ? Si je ne suis pas certain de prendre soin de toi comme je le dois ? Si je te mérite ou pas ?… »

Il prononça ses mots en un murmure, soupirant une nouvelle fois comme pour se donner du courage. Il prit un temps de silence pour reprendre ses esprits et son souffle qu’il pensait avoir perdu après avoir tout déballé. C’est là qu’il se tourna pour avoir la jeune femme en face de lui. Il replongea ses prunelles dans les siennes, sentant une nouvelle l’air d’électrifier. « Mais il y a une chose dont je suis sûr. Il n’y a pas eu une fois où je n’ai pas pensé à toi ces deux dernières années. Si je pouvais t’oublier, crois-moi que je l’aurais fait depuis bien longtemps déjà… mais je ne peux pas. Non, plutôt je ne veux pas. Depuis ce fameux jour à la Salle Commune, j’ai subi les montagnes russes en matière d’émotion. Chaque fois que je te vois avec un autre, je… mon cœur saigne. Même si je ne peux plus t’en vouloir d’aimer Thomas, et bien que lui ne m’ait rien, je ne peux pas m’empêcher de le détester et de me détester par la même occasion pour le haïr comme je le fais. Quand tu m’as parlé du devoir de Walsh, c’est à peine si je me suis retenu d’aller lui casser la gueule avant de me précipiter vers toi et… t’enlacer pour ne plus jamais te lâcher. C’est la vérité, Azure. Je… je t’aime voilà. Je peux pas le dire autrement. Je ne veux pas t’oublier non plus. Pardon de t’avoir fait croire le contraire, mais j’espérais te donner un peu d’espace pour que… pour que tu me choisisses moi. »

Il daigna alors avancer d’un pas pour poser sa main droite sur la joue de la jeune femme. « Je t’aime… je te mentirais si je te disais ne pas t’aimer de tout mon cœur, et oui, j’aimerais être à toi et que tu sois à moi. Mais je ne veux pas t’imposer mes sentiments, Azure. Ce serait injuste vis-à-vis de toi. Crois-moi, tu mérites bien plus que ce que je t’offre ou peux t’offrir. Alors… si pour toi cette relation ne mène à rien, si tu penses qu’elle est trop toxique pour toi et que tu souhaites t’en éloigner… Qu’importe à quel point je t’aime, j’accepterai ton choix. Et je ne me plaindrai pas… Je ne le ferai pas. »

A ces mots, il posa délicatement son front contre celui d’Azure, fermant les yeux, prenant une longue inspiration, restant quelques instants ainsi en attendant sa réponse, sa main droite toujours posée sur la joue de la jeune femme tandis que l’autre était nichée dans sa nuque.

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Le front toujours collé à celui d’Azure, il restait cette fois muet, attendant la réponse de la jeune femme suite à sa tirade. Jusqu’à ce jour, il détestait les confidences et ne les réservait qu’à très peu de personnes de son entourage, dont Kath, August et parfois Lilith. Pour ce qui est de Sarah, Shayne ne se voyait pas lui confier ses maux car en qualité de cousin c’était à lui d’encaisser et de toujours lui montrer un aspect solide de lui-même s’il lui venait un jour de souhaiter se confier au jeune Williams. Pareil pour Siggy : hors de question d’afficher ne serait qu’une once de faiblesse en présence de son petit frère. Cela valait aussi pour ses acolytes à Poudlard, notamment ses complices de mauvais tours. Bien sûr, entre deux farces, il leur arrivait parfois de prendre un temps pour parler de ce qui se tramait dans leur vie, mais ça en restait là.

Jusque-là Shayne s’était toujours mis en tête que le moins il se confiait, surtout s’il s’agissait d’une fille qui lui plaisait, mieux il serait perçu. Et il fallait dire qu’il ne supportait pas de montrer cette facette vulnérable de lui-même à Azure. Il détestait sentir ses yeux désolés et compatissants sur sa silhouette alors qu’il discourait le regard fuyant. Il avait l’impression de mourir en l’écoutant prononcer son nom d’un ton aussi suppliant et presque maternant. Mais en même temps, il mentirait s’il disait que ses pouces qui allaient et venaient sur ses avant-bras ne lui procuraient pas d’agréables frissons de bien-être. Et lorsqu’il la sentit frissonner à son tour lorsqu’il posa ses mains sur sa nuque, il avait l’impression de revivre une nouvelle fois après l’avoir embrassée.

L’entendre lui dire qu’elle l’avait attendu longtemps lui réchauffa le corps en même temps que le cœur. Cette phrase, il n’aurait jamais pensé l’entendre d’aussi tôt. Car tant que la brunette aimait Thomas et que Shayne vivait dans le doute, tous ses rêves ne deviendraient jamais réalité. Mais voilà qu’il la vit s’approcher de lui et lui dire qu’elle avait attendu « affreusement » longtemps, avec son petit sourire triste sur les lèvres que le jeune homme souhaitait faire disparaître à tout prix. Il s’autorisa un petit rire à la remarque de la jeune femme sur les responsabilités : « Ouais, on dirait bien. J’imagine déjà la tête d’Aug’ s’il nous surprend : « mais quelle horreur » ! » Son ami Gryffondor n’avait pas de problème avec Azure, mais s’il y avait bien une personne de son entourage qui lui conseillait de ne pas se casser la tête avec les filles, c’était bien lui. Il partageait avec lui son aversion pour les niaiseries et était le premier à comprendre quand il était agacé. Si le voir avec une fille ne le dérangeait pas, surprendre Shayne se transformer en Roméo aurait certainement le don de lui retourner l’estomac !

Alors qu’Azure lui annonçait toutes les responsabilités qu’il lui incombait, il se mit à réfléchir. Lui trouver un moment dans ses journées ? Depuis qu’il la connaissait, elle faisait partie intégrante de son quotidien, même plus qu’il ne l’aurait souhaité. Etant déjà l’une de ses priorités, il pouvait parfaitement se résoudre à l’intégrer dans ses programmes sans trop d’effort. Faire des « trucs débiles » qu’il détestait ? Cela dépendait de quoi elle voulait parler, mais il la rejoignit dans sa pensée : ce serait mentir que de dire qu’employer des mots comme « ma chérie » ou « mon amour » ne le dérangeait pas. Il avait toujours perçu la réalité comme étant diamétralement opposée à tout ce que l’on pouvait lire dans les romans d’amour ou ce que l’on voyait au cinéma, et que de ce fait seuls comptaient les actes et les comportements. Mais peut-être que pour Azure le fait d’échanger certaines petites attentions était un acte en soi. Lui dire tous les jours qu’il l’aimait ? Jusque-là il ne lui avait jamais dit, et il avait fallu qu’elle le fasse pour qu’il daigne prononcer ces trois mots. Mais on dirait que s’il n’avait pas eu le courage de l’annoncer, la situation ne se serait pas arrangée. Il avait conscience du temps écoulé jusqu’à la révélation de leurs sentiments, constatant qu’il aurait fini par devenir fou si rien ne s’était produit. Alors peut-être que… avec un peu d’efforts, quand bien même il ne le disait presque jamais…

A dire vrai, il n’en savait rien. Il ne savait s’il s’habituerait à cette nouvelle vie, à jouer ce nouveau personnage, à changer son comportement dans l’unique but de plaire à une fille… Mais ce n’était pas n’importe laquelle et il en avait conscience. Alors le jeu en valait peut-être la chandelle… Il soupira de frustration lorsqu’il ne sentit plus la chaleur de son front contre le sien. « Tu me demandes si je peux… si on peut faire ça. Je te mentirais si je te disais être confiant sur ce que cela représente. Tout ça c’est nouveau pour moi, et je ne sais pas si je suis à la hauteur de ce que tu demandes… » Il prit ensuite une profonde inspiration avant d’ajouter, les yeux dans les siens : « Mais ce que je sais c’est que oui, je veux essayer. Je veux être celui sur qui tu peux compter, celui qui te soutiendra dans les moments difficiles, celui qui sera là pour partager tes joies et tes peines… Alors oui, commençons tranquillement. Apprenons à nous connaître encore plus. Je peux au moins… te promettre ça. »

« Alors, donne-moi un peu de temps pour y croire… Et tout l’amour dont tu as envie. »

A ces mots, il la vit s’approcher de lui et la sentit, d’abord timidement, poser ses lèvres sur les siennes, d’un geste aussi léger qu’une plume, avant d’oser, à la grande surprise du jeune homme, entrouvrir sa bouche pour approfondir le baiser. Il la regarda d’abord faire, presque immobile, les yeux un peu écarquillés d’étonnement, fasciné par son audace soudaine qui rendrait fou n’importe quel homme. Au bout de quelques secondes, il ne put se retenir tant la chaleur de son corps lui manquait et tant l’envie d’explorer sa cavité buccale le démangeait à le rendre fou. Il répondit alors avec ferveur au baiser qu’elle donna, sa main autrefois sur sa nuque glissant le long de son dos pour finir au creux de ses reins afin de l’attirer contre lui, tandis que l’autre tenait son cou en coupe pour maintenir leurs bouches collées. Sa langue entama une danse endiablée avec la sienne, l’empêchant de penser correctement, le transportant dans un tourbillon d’émotions qu’il crut jusque-là avoir perdu pour toujours. Il était bien là, heureux, épanoui dans les bras de celle qu’il aimait, qu’il chérissait depuis bientôt deux ans. Il ne pensait plus à Thomas, ni aux avertissements d’August sur sa relation avec Azure, ni même à la belle Agatha dont le charme l’avait troublé en l’espace de quelques mois. Plus rien ne comptait, rien d’autre qu’eux. Car il la tenait. Car elle lui appartenait. Car il l’aimait. Absorbé par leur échange enflammé, il ne se rendit pas compte qu’entre deux baisers il lui souffla sur un ton empli de désir et de supplication, sans savoir non plus si elle le percevrait : « Comme je t’aime. » On pouvait dire que là, il s'agissait bel et bien d'une promesse.

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Il l’aimait. Il n’avait plus peur de le dire, plus besoin de le cacher. En tout cas à lui-même. Il songea même qu’il le savait depuis le jour où ils échangèrent leur premier baiser à la Salle Commune de Gryffondor. Juste qu’il était si décontenancé par la vitesse à laquelle il s’était laissé emporter et par la rapidité de la réponse d’Azure à ses étreintes, qu’il se demandait s’il ne s’était pas un peu trop précipité. Il n’avait jamais aimé s’incruster ou forcer quelqu’un à le suivre dans ses actions, tout simplement parce qu’il savait que dans le cas inverse il n’apprécierait pas lui-même qu’on le manipule. Il avait donc l’impression qu’il jouait avec les sentiments d’une jeune femme qu’il venait à peine de connaître. En y réfléchissant, étrange qu’il ne l’ait pas remarquée plus tôt, elle qui pourtant partageait ses appartements, son école, son environnement. Aussi incroyable que cela puisse paraître, Shayne ne la connut que ce jour béni où leurs corps s’étaient irrémédiablement entrechoqués et où ils s’étaient livrés à un échange ardent et passionné.

Azure avait raison : l’important n’était pas August qui malgré ses avertissements et ses remontrances à l’égard de la brunette ne changerait pas son comportement avec son ami pour autant. Le préfet en effet n’en voudrait pas à Shayne de vivre ce qu’il avait toujours voulu jusqu’à présent et d’essayer de rattraper le temps, même si le sixième année imaginait bien ce qu’il lui dirait en apprenant les faits : « Si ça casse, tu me diras pas que je t’ai pas prévenu ! » Non, le problème était bien plus grave encore : il fallait qu’il sache comment l’annoncer à sa meilleure amie, à son appui, à son soutien de toujours et à celle qui lui tendait toujours les bras et l’oreille pour qu’il se confie lorsqu’il en avait besoin, Kathleen. La pauvre jeune femme était déjà blessée depuis que Florent avait quitté l’école sans prévenir personne. Qu’adviendrait-il si elle apprenait d’une autre personne ou d’une autre façon la relation entre lui et Azure ? Elle devait sans aucun doute en avoir compris quelques bribes depuis Noël, sans compter depuis la dernière fois, il y avait un an de cela, où il lui confia qu’il avait embrassé la brunette. Néanmoins comme il n’était pas certain de ce qu’il vivait avec elle, il s’était contenté d’en rester à cet aveu, sans autre précision. Son cœur se serra à l’idée de faire du mal à sa chère amie en lui révélant ce qu’il lui cachait involontairement depuis quelques temps déjà. Il comprit qu’il devait agir vite s’il ne voulait pas que Kath l’apprenne d’une oreille indiscrète et qu’elle prenne la nouvelle bien plus mal que si c’était lui.

« Tu as raison… Il faut que je trouve quoi et quand lui dire. Pas question qu’elle l’apprenne toute seule. » Pas besoin d’un dessin pour comprendre qu’Azure partageait son avis. De par son regard, elle semblait compatir au sort de leur amie commune, elle qui ne méritait définitivement pas qu’on la laisse de côté. Et pour bien montrer qu’ils se comprenaient, leurs bouches furent à nouveau attirées l’un de l’autre comme des aimants, menant un ballet d’abord timide puis ensuite brûlant et empli de désir, à un tel point que le Gryffondor lui avoua une nouvelle fois entre deux baisers qu’il l’aimait. Et quelle fut la stupéfaction du jeune homme lorsqu’elle y répondit en prononçant délicieusement son nom, enflammant tout son être d’un doux feu longtemps enfoui avant de pouvoir enfin imploser et se répandre dans tout son organisme. Sentant qu’elle se redressait à la pointe des pieds pour l’atteindre et amplifier leur échange, il enroula son bras autour d’elle pour la soutenir dans sa lancée et l’attirer davantage vers lui. Il avait l’impression que ses bras étaient faits pour encercler la taille de la belle brunette, que ses lèvres occupées s’accordaient parfaitement aux siennes et que la chaleur de leurs corps aussi insoutenable qu’agréable leur était propre. Il avait réussi à lui dire qu’il aimait ! C’était, comme le disait Azure, un bon début.

Shayne la sentit s’éloigner, sa bouche quittant la sienne après un dernier bruit de succion. Il aimerait protester, et l’aurait fait s’il n’était pas pris de court à la vue d’Azure qui retira d’un coup son débardeur de laine devant lui. Là, il en était retourné : il ne s’attendait pas à un tel geste, et s’il avait eu les idées claires à ce moment précis, il se serait demandé d’où lui venait cette soudaine envie de se dévêtir. Mais non, il était déjà incapable de penser correctement après tous ces baisers enflammés, comment croyez-vous qu’il soit après un tel spectacle ? Car en effet, maintenant qu’elle ne portait plus de haut, le jeune homme mit un temps à se remettre les idées en place tant ses yeux allaient et venaient sur la silhouette découverte d’Azure. Merlin soit loué, elle portait un sous-vêtement en dessous de son débardeur, infime tissu qui couvrait en grande partie sa poitrine, bien qu’avec un décolleté ne laissant presque rien à l’imagination. Shayne en eut l’eau à la bouche tant il était scié, et l’on jurerait à en juger sa posture statique et ses yeux grands ouverts qu’il ait vu un fantôme. Un fantôme, non. Pire que ça : la peau découverte d’un corps de femme qu’il n’aurait jamais imaginé voir un jour. Il ne savait pas quoi dire, quoi faire, et il maintint ses bras près de son corps pour ne pas être tenté de les tendre vers la belle Azure.

« Je… Wow... » Pff. Pa-thé-tique. Mais c’était bien ce qu’il était : faible devant elle, incapable de bouger un seul muscle tant il était impressionné. Alors lorsqu’elle se justifia en ajoutant qu’elle avait chaud, Shayne ne fit rien d’autre que remontrer très vite son regard sur son visage, craignant de perdre le contrôle si ses yeux osaient s’aventurer encore une fois sur le corps d’Azure. Il se mit à penser la même chose, tenté par l’opportunité de se libérer son haut, son T-shirt en coton le collant à la peau par la forte transpiration que suscita la chaleur qui le consumait. Il ne s’agissait pas des lieux et il en avait conscience. Il pensait surtout que ce serait plus juste vis-à-vis d’elle que de rester là, le seul habillé, à entendre les mouches voler sans rien dire. Mais il craignait de perdre pied s’il osait quitter son haut devant elle. Il n’était jamais gêné lorsqu’il s’agissait d’ôter ses vêtements, même en public, lorsqu’il ne supportait pas le climat ambiant ou qu’il faisait un effort trop intense. Nombreuses étaient les fois où en temps de chaleur il enlevait son haut à la fin des entraînements avant même de se rendre aux vestiaires, et à aucun moment ne s’était-il préoccupé du regard des autres. Mais avec Azure, c’était comme si c’était la limite qu’il souhaitait ne pas franchir, ne serait-ce que pour garder l’infime contrôle qui subsistait en son for intérieur.

Mais alors qu’il restait dans la confusion à se demander s’il devait consentir à enlever lui-même son haut ou bien à rester comme il était pour ne pas forcer les événements, il sentit la main douce et chaude d’Azure se poser sur son avant-bras, pour ensuite tout doucement remonter jusqu’à son épaule. La jeune femme n’était plus séparée de lui désormais, son visage retrouvant sa place initiale à savoir à quelques centimètres du sien, son regard fixant celui de Shayne qui restait encore immobile. Des frissons agréables le parcoururent par le trajet de sa main sur sa peau, le poussant à fermer les yeux pour en apprécier le contact. Il s’autorisa à laisser échapper un soupir d’aise, son souffle saccadé essayant de reprendre un rythme plus régulier, notant à la dernière minute qu’il s’était arrêté de respirer au moment où la Gryffonne s’était retrouvée à moitié nue devant lui. Lorsqu’il l’entendit reprendre parole, il rouvrit les yeux pour sonder les siens avec appréhension et douceur. Mais elle ne termina jamais ses phrases entamées, et se contenta de poser à nouveau ses lèvres rougies par l’effort sur celles fiévreuses du jeune homme. Le cœur de Shayne rata un battement au moment de cet échange, ne pouvant plus retenir la chose qui menaçait jusque-là d’imploser à tout moment en lui. Il mit un temps avant d’y répondre, plongeant davantage dans la cavité buccale de la jeune femme, tandis que sa main glissa sur son bras pour retrouver la main qui tenait le débardeur, la poussant à le lâcher pour pouvoir enrouler leurs doigts.

Le baiser que lui donna Azure le conforta dans ses désirs, l’éloignant de toute raison, le forçant à céder à cette passion terrible qui le dévorait. Et il se jeta sur ses lèvres tel un prédateur affamé se jetant sur sa proie pour n’en faire qu’une bouchée. Sauf que la proie de la situation était la bouche d’Azure, le fruit d’un paradis qu’il rêvait de vivre, mais aussi enfin la cause de sa descente aux enfers. Car il n’était désormais plus capable de contenir sa fièvre, pressé par ce besoin de savourer pleinement cet instant avec elle. Quelques secondes après, il se sépara lui-même des lèvres et de la langue d’Azure pour s’offrir un espace et retirer lui-même le tissu dans lequel il étouffait. Il tira sur les pans bas du T-shirt pour les diriger vers le haut, libérant alors sa tête et son corps de la chaleur de ce vêtement encombrant. Il quitta toute pensée à ce moment-là, seul comptait son retour vers Azure, désireux de sentir sa peau contre la sienne, loin des tissus de leurs vêtements jetés au sol. Ses bras encerclèrent alors la taille fine de la jeune femme pour la coller à lui sans ménagement, la pressant contre son torse, sa bouche retrouvant la sienne dans un rythme endiablé. Il se surprit à sourire au milieu du baiser, et quelques temps après elle aussi. Et alors qu’il laissait libre cours à son désir, ce constat l’emplit de joie, car enfin il comprit qu’il n’était pas le seul à ressentir tout cela. Qu’il ne serait sans doute pas le seul à vouloir le ressentir encore. Et encore. Et encore. Il se sentait tellement bien contre elle, si bien qu’il se refusa de penser qu’ils puissent s’arrêter à un moment donné. Que ce soit d’eux-mêmes ou d’autres personnes qui viendraient les découvrir dans ce balcon du monde, torses nus, enlacés comme deux serpents, emportés dans cette passion incommensurable qu’était le désir, mais aussi...

Boum. Il entendit un bruit derrière la porte, le poussant à quitter à contrecoeur les lèvres d'Azure pour se tourner vers la sortie. Oh non... Quelqu'un allait entrer, allait ouvrir la porte et les découvrir à l'intérieur. Et il se tourna ensuite vers Azure, toujours contre elle, les yeux écarquillés, mimant un « Merde. »

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