Les deux abandons : 1993 et 2008

Aidan ne saura jamais qu’il est le fruit d’un viol collectif entre plusieurs pères potentiels et sa mère toxicomane. En effet, celle-ci, désoeuvrée et accro à l’irréel, l’abandonna dans une petite ruelle de Glasgow, alors qu’il n’avait que quelques jours à peine.
Il survécu miraculeusement dehors par un froid glacial pendant plusieurs jours d’après les ambulanciers qui le retrouvèrent.

Il fut adopté par la famille O’Neill où il vécut une enfance heureuse et presque sans histoires. Le couple de moldus remarqua en effet chez lui des signes étranges d’une chance exceptionnelle : il gagnait systématiquement à tous les jeux d’adresse auxquels il jouait - la balle, le cerceau ou le pion étaient comme aimantés à la cible - lui pourtant quotidiennement si maladroit et il parvint à éviter plusieurs fois des chutes semblant pourtant inévitables en regagnant magiquement son équilibre.
Tous les dimanches, la famille se rendaient à la messe.
Ennuyé des interminables sermons et prières, Aidan préférait déjà lever la tête en examinant avec attention les vitraux et leurs couleurs.

L’été de ses onze ans, il reçut la visite d’un représentant du Ministère de la Magie et une invitation à une école de sorcellerie. Lorsqu’ils comprirent tous les trois que ce n’était pas un canular, ils eurent tous une réaction complètement différente : Aidan dû effacer son sourire ébahi lorsque sa mère s’évanouit sous le choc et que son père, après s’être signé deux fois très rapidement du symbole de la croix, se saisit du tisonnier en hurlant “DEHORS DÉMONS !”.
Ce fut aussi ridicule que rapide. Le représentant, peu impressionné, s’avança pour aider Madame O’Neill. Son mari leva haut son arme en même temps que le sorcier sa baguette. Les deux hommes s’observèrent pendant une éternité aux yeux du jeune garçon.
Le moins puissant baissa les yeux et le Aidan obtint leur accord pour commencer sa scolarité.

Cette scène, Aidan se la rejoua une centaine de fois dans sa tête lorsqu’à quinze ans, ses parents adoptifs refusèrent qu’il revienne chez eux durant les vacances scolaires et coupèrent brutalement les ponts avec cet enfant qu’ils n’avaient jamais voulu magique. Ils n’agirent pas sous le coup de la terreur ou de la surprise. Cela faisait déjà cinq ans qu’il étudiait à Poudlard. Ils avaient eut donc le temps de peser le pour et le contre et ils décidèrent qu’il ne valait pas la peine de prendre le risque de “jouer avec le Diable”.
L'amour inconditionnel n'existait pas.

Durant les deux étés qui lui restaient, il fut hébergé à Pré-au-Lard par le propriétaire de la boutique de prêts-à-porter "Gaichiffon". Celui-ci l'avait pris en affection pour ses histoires sur les étoiles, qu'il était un des seuls à aimer écouter dans le village. Avant même qu'il ne le recueille, la marque proposa à ses clients une gamme de vêtements inspirée du ciel.
L'amour d'Aidan pour les nœuds papillons lui vient de cette époque. Depuis lors, il est hors de question pour lui de quitter son domicile sans cet accessoire de mode.

Statut de sang : inconnu. Origine sociale : moldue. 2004-2011

Ses années à l'école de sorcellerie se passèrent sans accrocs. Il fut réparti dans la maison des Poufsouffles car il se sentit immédiatement attiré par Helga qui "prenait ceux qui restaient". Il associa la fondatrice à sa mère adoptive, ce qui lui laissa un goût amère lorsque celle-ci décida de l'abandonner.
Heureusement pour ses condisciples, il avait compris entre-temps les vraies valeurs des Blaireaux et porta leurs couleurs avec une fierté évidente.

Excessivement maladroit, les cours où il eut le plus de mal fut les potions : il n'arriva jamais à acquérir la précision requise pour réussir un nectar à la perfection. Néanmoins, son acharnement à retenter la manœuvre une dizaine de fois pour obtenir un niveau passable lui valu les compliments du prof.

Il tomba amoureux des étoiles dès le premier cours du Professeur Sinistra. Lui qui se sentait gauche à la lumière du jour, trouva une sérénité dans les soirées passées au sommet de la Tour d'Astronomie à lever la tête vers la lune.
Mais c'est à quinze ans, lorsque ses parents et Dieu lui refusèrent son foyer, qu'il grandit une obsession pour regarder au delà du ciel et découvrir ce qui leur était encore inconnu.

Bien que d'origine moldue, personne ne pouvait lui reprocher son statut de sang. A l'époque, ça faisait de toute façon très mauvais genre. A seize ans, il tenta de retrouver les traces de ses parents, mais ne put jamais découvrir leur identité.
Si la magie coulait dans ses veines, personne ne pouvait en connaître son origine, lui le premier.

Le ciel est loin d’être la limite ! 2011-2025

Son diplôme en poche, Aidan partit faire un long tour du monde en s'arrêtant systématiquement dans les plus grands observatoires du monde et vivant de petits boulots.
Après presque une année sabbatique, il était décidé à reprendre ses études mais fit le choix de les effectuer du côté moldu.
Pour lui, l'origine de l'univers n'avait rien à voir avec la magie, présente ou pas, chez le chercheur. Ce métier est en effet un des rares où la technologie moldue équivaut (et dépasse peut-être !) les connaissances sorcières.
Il effectua un master de physique théorique à l'université de Massachusetts puis son doctorat en astrophysique. Il revint ensuite huit ans plus tard en Angleterre pour écrire son post doctorat sous la responsabilité de nulle autre que la Professeur Sinistra.
Son choix d'avoir passé presque dix ans "aux bottes des moldus" fut largement critiqué dans la communauté.
Nous étions en effet en 2019 et Blackman détenait désormais les rênes de Poudlard.

En 2021, Aidan entra au Ministère en tant que technicien en Adaptation Moldue. Son rôle était d’étudier et de sélectionner les innovations moldues intéressantes à détourner pour le monde magique. En effet, depuis quelques années le ministère avait reconnu que, dans certains domaines, les moldus possédaient une technologie plus avancée, qu’ils utilisaient afin de combler leur incapacité à utiliser la magie. Exploiter cette technologie permettrait donc de faire avancer le monde sorcier et de combler le léger retard. Sa spécialité ? Les télescopes, évidemment.

Joshua Gates arriva au pouvoir en 2023. Protégé par son premier abandon (statut de sang : inconnu), Aidan fut néanmoins dénigré pour son origine sociale moldue. La précarité de son état et les lois abusives du Ministère ne le fit néanmoins jamais quitter son poste. Ses recherches et ses adaptations allaient bon train et il se mit des œillères pour ne pas voir ce qui se passait en dehors de son laboratoire. Le télescope magique qu'il adaptait, permit à la communauté d'astronomes d'espérer voir "au delà du possible".
Malgré ses grandes avancées, Aidan garde une honte cachée de son comportement passif à l'époque.

Un nouveau départ - 2025

Le Feudeymon a détruit Poudlard. Très affecté de voir son enfance partir en fumée, Aidan postula au poste de Professeur d'Astronomie à la rentrée suivante. Il désirait jouer un rôle plus important dans sa communauté maintenant que ses recherches avaient abouties, et rien de tel que d'enseigner aux plus jeunes les richesses du ciel. Son parcours professionnel fut un vrai plus pour sa candidature.
Peu respecté par les étudiants ne voyant pas l'espace pour ce qu'il était, Aidan parvint néanmoins à gagner l'affection des plus curieux grâce à son enthousiasme débordant sur le sujet.

Aidan n'a jamais connu ses parents biologiques. Sa mère est morte d'une overdose quelques années après sa naissance.
Ses parents adoptifs, les O'Neill, furent au début, des parents aimants et religieux. Ils inculquèrent à leur fils le mythe de la beauté pour le ciel, même si celui-ci vit bien plus loin qu'un Paradis.

Madame O’Neill tenta de reprendre contact avec son fils le jour de ses vingt ans. Aidan, alors aux Etats-Unis, refusa de lui adresser la parole et se jura de ne jamais lui pardonner.

Leur abandon força Aidan à ne pas accepter pendant très longtemps des relations d’amitité ou autre, de peur de se voir quitter par la personne aimée.
Pour lui, le mot "famille" n'existait plus dans son vocabulaire. Il ne parvenait même pas à voir ses amis comme une "famille choisie". Derrière ses grands gestes maladroits, il se refusa à montrer tout autre signe de faiblesse aux autres, en les cachant avec de l'autodérision.
On aimait se confier à lui, mais il ne se confiait jamais.

Ses relations amoureuses se terminaient inévitablement, consciemment ou pas, lorsqu'on lui susurrait des "Je t'aime".
Présentement célibataire, il vit à Londres lorsqu'il n'est pas à l'école.

La seule constante dans sa vie est son chat, Smithy, à ses côtés depuis dix ans. Aidan aime son indépendance et l'affection de vieux matou obèse à la fois discrète et rare.

Le cours d'astronomie se donnait le mercredi soir pour les élèves de première année, et à minuit pour les étudiants des années supérieures. Le professeur O'Neill prit donc très vite l'habitude de claper dans ses mains pour réveiller ses élèves. Cette nuit-là, les troisièmes année allaient pour la première fois découvrir les subtilités des dessins d'une carte du ciel.

Les premiers arrivants étaient toujours ceux qui avaient la mine la plus réveillée. Les suivants traînaient des pieds en baillant déjà. Certains avaient encore du mal à reprendre leur souffle une fois arrivés au sommet de la tour.
Une fois que tout ce beau petit monde fut installé, un "clac" sonore fit froncer les sourcils de beaucoup des adolescents présents. Le cours avait commencé.

-Bonsoir à tous ! Ce soir, nous allons découvrir ensemble comment dessiner les cartes du ciel...

Aidan remarqua du coin de l’œil la mimique moqueuse d'un étudiant au fond de la classe. O'Neill était en effet facilement imitable : ses grands gestes maladroits, ses mains qui bougeaient sans cesse lorsqu'il parlait et sa manière gauche de se déplacer. Il n'était pas le genre de personne à imposer facilement le respect et il laissa passer la raillerie.

Une jeune étudiante de Gryffondor soupira, désespérée.

-Mais je ne sais pas dessiner...

Aidan s'approcha d'elle et s'agenouilla à ses côtés.

-L'importance est d'analyser avec précision ce que vous voyez et de respecter les proportions. En dessinant, expliqua-t-il avec douceur, vous retenez mieux ce qu'on ne peut voir à l’œil nu.

La jeune fille lui offrit un timide sourire alors qu'un grand éclat de rire - moqueur à nouveau - s'éleva du côté gauche de la tour.
Le professeur se releva, tituba pour retrouver son équilibre - ce qui provoqua une vague d'hilarité générale, cette fois compréhensible - et se retourna vers le fauteur de troubles.

-Qu'est-ce qu'il y donc de si drôle avec les cartes du ciel, Monsieur Greyson ?

Le jeune garçon tenta de reprendre le contrôle de son fou rire, sans grand succès. Aidan n'avait pas le souvenir d'un tel grabuge durant les cours du Professeur Sinistra.
Monsieur Davidson, son ami, vint à sa rescousse.

-'scusez-nous M'sieur... Mais il vient de dire que pour séduire une fille, il suffit de porter un noeud pap' et de lui dessiner une étoile !

La bouche d'Aidan tressailli malgré lui. Il réajusta machinalement son noeud papillon et déclara.

-En effet, les nœuds papillons sont indémodables mais il faut encore savoir identifier l'étoile pour la dessiner !

Il frappa dans ses mains ce qui fit sursauter tout le monde.

-A vos télescopes !