FLASH BACK - AOUT 2022

Madeline fit un signe de la main à la mère de Mary, qui s'en alla précipitamment après l'avoir déposée devant sa maison. La jeune fille ne put s'empêcher de pousser un soupir et elle leva les yeux vers sa maison. Tant pis. Elle n'avait plus qu'à s'enfermer dans sa chambre ou aller flotter dans la piscine avec un bon livre.

En fait Madeline aurait du être chez Mary donc. Elle y avait passé toute la journée d'hier et toute la nuit. Enfin les filles avaient passé la nuit à manger des bonbons et à regarder des films. Ca aurait pu être sympa si le frère cadet de Mary ne s'était pas cassé une jambe, obligeant la mère à courir aux urgences et donc raccompagner les adolescents chez eux plus tôt. Donc Madeline était devant la maison familiale. Elle savait que son père était à son bureau, comme toujours, comme là où il avait passé la majeure partie de l'été. Par contre, elle se demanda en avançant dans le chemin qui menait à la porte où donc était sa mère. Soit à la maison seule, soit au spa, soit dans une boutique à acheter des vêtements, soit ailleurs. Elle étouffa un bâillement. Elle regrettait déjà de ne pas avoir dormi plus cette nuit.

En plus le frère de Mary avait vraiment hurlé et cela lui avait donné des frissons. Elle rentra dans la maison, ouvrant la porte grâce à sa paire de clés.

"Maman t'es là ? C'est moi Madeline, je suis rentrée !"

Elle tourna la tête. Personne dans le salon. Elle lâcha son sac dans le vestibule. De toute façon il ne contenait que son maillot de bain et des affaires de rechange. Et sa serviette mouillée. Mais la pile de courrier qui attendait sur le comptoir semblait plus intéressante. Elle s'avança vers la pile, se demandant de qui aurait-elle pu avoir des nouvelles. Et elle vit les deux verres de vins. Ce qui l'interpella. Enfin ce n'était pas le vin le plus choquant, elle savait que sa mère buvait de temps en temps et comme ils avaient une femme de ménage, qu'elle ne prenait pas la peine de ranger. Alors elle se dit que son père était rentré lui aussi, et que c'était une bonne chose, qu'ils allaient quand même avoir une soirée en famille et une fin d'après midi, du temps ensemble quoi.

Et puis elle vit la montre, qui n'était pas celle de son père. Elle se demanda même pourquoi elle remarquait tout ça. Elle prit la montre entre ses doigts, la retourna. Elle se posait des questions, mais elle se dit que cela devait avoir une explication logique. Et les deux jeans sur le fauteuil.

Alors Madeline leva les yeux vers l'escalier qui était le chemin vers les chambres et la bibliothèque. "... Maman ?" Elle lâcha le paquet de lettres. Et il y eut du bruit à l'étage. Il y avait quelqu'un dans la maison. Madeline s'avança vers les marches et se mit à grimper. A la réflexion, elle n'aurait sans doute pas du.

La porte de la chambre de sa père était ouverte. Il y avait du bruit à l'intérieur. Sa mère était là et d'après ce que Madeline pouvait entendre, elle n'était pas seule. Elle tendit la main vers la porte. Elle hésita. Elle déglutit. Elle se faisait peut être des idées. Après tout ce ne serait pas la première fois que sa mère faisait venir un décorateur d'intérieur ou un jardinier ou un peintre, quelqu'un. Ou alors une amie à elle, ou un ami. Madeline poussa la porte en grand et se figea dans l'encadrement.

"... M'man ? Qu'est ce qu'il se passe ?"

FLASH BACK - AOUT 2022

En fait Madeline est pétrifiée par la scène qui se déroule sous ses yeux. Sa mère, Helen, sa mère, qui l'a toujours choyée et aimée, celle qui est mariée à son père, bref, sa mère, SA MERE PAR HELGA POUFSOUFFLE est dans son lit en nuisette en train de ... oh non elle ne veut pas de dessin, elle ne veut pas imaginer ce qu'il s'est passé dans cette chambre. Dans ce lit. Le lit conjugal en plus hein, celui où ses parents dorment. Entre autre.

Oh elle est bien consciente que ses parents ont une vie sexuelle. Mais elle ne sait juste pas, elle n'imaginait pas que sa mère pourrait avoir une relation de quelque nature qu'elle soit avec un autre homme.

Attendez. Pas un homme. Un adolescent. De ce qu'elle peut en juger. Un adolescent. Il se lève pour se rhabiller et elle en profite pour jeter un oeil à sa mère, qui se cache sous les draps. Elle ne dit rien, elle est assisse le drap remonté jusqu'au menton. Madeline la fixe mais ses pensées vont trop vite pour comprendre à quel point elle est dégoûtée par elle. Par sa mère. Qui s'envoie un adolescent. La jeune fille a envie de pleurer.

Et puis : "T'es grande, j'pense qu'on va pas te faire un dessin." Cette phrase qui la calme direct. Et elle fixe l'autre type. Ce mec. Ce truc. Le ça qui est en trop dans la chambre. Qui prend son temps en plus, comme si cette situation était normale. Non mais il se prend pour quoi ? "Qu'est-ce que tu fous là ?" ... Oh bien sûr, elle n'était pas prévue. Parce qu'elle n'était pas sensée être là. Forcément. La colère et le dégoût montent encore d'un cran. Elle regrette d'avoir laissée sa baguette dans son sac finalement. Elle regarde sa mère, qui ne réagit toujours pas. Son regard passe du truc torse nu à sa fille. Madeline serre les dents. Et se force à réagir. A dire quelque chose.

"Et toi ?" Sa voix est tremblante. Elle a peur. Elle a envie que quelqu'un la prenne dans ses bras pour lui dire que tout va bien se passer. Est ce que son père se doute de ça ? Est ce que sa mère va réagir ? Toujours pas. Enfin si, Helen tend une main vers sa fille, puis se ravise et la laisse retomber sur le matelas alors que l'autre se rhabille tranquillement. Et elle comprend. Les liens se font. "Ton jean est en bas." Elle ne sait pas pour qui elle a parlé. Elle veut juste sortir d'ici. Elle court dans les escaliers pour se retrouver en bas. Dans le salon où les vêtements trônent en évidence sur le fauteuil. Elle les observe. Elle saisit celui qui n'est pas à sa mère. Elle le sait, il n'est pas de bonne fabrique. Elle le serre, elle tire dessus et le tissu se déchire.

De surprise, elle se stoppe. Ses mains tremblent. Elle tire encore et le vêtement se déchire plus. Elle l'emmène avec elle dans la cuisine et à l'aide d'une paire de ciseaux achève de tuer le malheureux jean. Action inutile et totalement gratuite. Elle le jette à terre. Elle est en colère. Elle est dégoutée. Elle revoit sa mère en haut, en train d'embrasser l'autre garçon. Elle prend un des deux verres de vin et le lance contre le mur. Puis l'autre. Elle fixe la tâche sur le mur. Et remet ses cheveux en arrière. Elle ne sait pas ce qu'elle veut. Elle aimerait que l'autre descende pour qu'elle puisse lui mettre son poing dans la figure. Et en même temps elle espère qu'il partira par derrière. Elle a visualisé son visage. Elle a envie de lui arracher les cheveux et ces envies de violence lui font peur. Elle comprend alors ceux qui lancent des maléfices dont le but est de faire du mal aux gens. Elle inspire profondément.

Elle réfléchit un instant. Puis ouvre le frigo, attrape la bouteille de jus de pomme pour en avaler trois bonnes gorgées. Ca lui fait du bien. Elle se tourne vers les escaliers. Finalement elle espère qu'il descende. Elle a envie d'entendre sa version de l'histoire. Celle de sa mère est simple. Son père était pas là donc elle a sauté sur le premier petit mec venu. Mais quel est son histoire à lui ? Qui est-il ? Comment en est-il venu à se taper sa mère ? Elle lâche la bouteille. Elle respire trop vite. Elle sert la poignée et referme violemment la porte du frigo. S'il descend et que ses réponses ne sont pas bonnes ... "J'lui démonte sa face ..." murmure-t-elle pour elle même. Ca ne servira à rien. Mais ça la défoulera peut être.

FLASH BACK - AOUT 2022

"Mais t'es complètement cinglée !" Ah. Donc finalement il a décidé de descendre. Super. Enfin non, surement pas. Elle l'a déjà dit, elle ne sait pas ce qui est le mien dans l'immédiat. Elle n'a pas vraiment eu le temps de se poser pour réfléchir à la situation et sur comment elle doit réagir. Elle est simplement dans une rage sourde, violente, destructrice parce que quelqu'un l'a blessé. Elle ne sait pas quelles réactions adopter sur le long terme. La de suite elle a eu envie de passer ses nerfs sur le pauvre jean, qui n'avait sans doute rien demander. Et sur les verres. Bon bref.

Mais est ce que ça fait de Madeline une cinglée ? Il est trop tôt pour le dire. Elle est énervé. Triste. Elle a peur. Elle est perdue. Plus tard elle réalisera que son univers vient de voler en éclat et qu'elle ne pourra plus voir sa mère comme avant. Quelque chose s'est brisé quand elle a ouvert la porte. A tout jamais. Et personne ne pourra la rassurer. Elle se retourne vers l'autre, en caleçon et tshirt dans sa cuisine.

Il est chez elle. Dans sa maison. Dans sa vie. Dans son monde. Dans le lit de sa mère. Il est l'intrus. C'est lui qui n'est pas à sa place. C'est lui les emmerdes. Cet individu vient de prendre une place considérable dans son existence, alors qu'il ne devrait pas. Qu'est ce qu'il fait là ? S'il n'existait pas, rien de tout cela ne serait arrivé. Enfin peut être que si, peut être que sa mère aurait fini par coucher avec Alan, le frère de Lucy ou avec un autre crétin de passage. Mais lui, qui est-il ? De quel droit ose-t-il être ici ? Et pourquoi est ce qu'il est encore là en plus ? Définitivement il aurait du partir par la porte de derrière. Ca aurait évité à Madeline la pénible épreuve de lui parler. Elle inspire.

"Tu te débrouilles comme tu veux mais t'arranges ça." ... mais de quoi il parle ? ... Ah oui le vêtement. Elle l'observe à terre. Elle l'a massacré. Elle le fixe un instant. Comment veut-il qu'elle fasse ça ? Elle n'a pas le droit d'utiliser la magie, elle ne sait pas coudre, il n'y a pas d'autres pantalons masculins dans la maison à part ceux de son ...

Oh. Non. Enlever cette image de son esprit. Vite. Maintenant Madeline comprend l'intérêt des Pensines. Elle fronce les sourcils. Pour qui se prend-t-il au juste ? Est ce qu'il s'estime en droit de lui dire ça ? Elle songe qu'il pourrait être son beau père. Si par hasard ses parents se séparaient et qu'en plus par hasard sa mère aurait des sentiments pour lui ... Elle maudit son imagination et préféra se reconcentrer sur la situation présente. Elle se baissa, ramassa ce qu'il restait de son pantalon et lui lança à la tête. "Dégages. Arrange ça toi même."

Madeline avait encore beaucoup de choses à faire. Elle allait devoir parler à sa mère. Lui demander des explications. Peut être parler à son père. Elle grimaça. Elle avait peur. Elle ne savait pas quoi faire. Elle observa l'autre jeune homme, la chose qui n'avait pas sa place dans le cadre de la maison familiale. "Tu es chez moi ici. Chez mes parents." Elle fit exprès d'employer le mot de parents et au pluriel. Histoire qu'il comprenne que sa mère était une femme marié, à son père en plus, bref qu'il venait tout simplement de briser une belle histoire familiale. "Tu le sais ? Que ma mère est mariée ? Qu'elle a un enfant ? Qu'elle a quarante ans ?"

Elle tremblait. Si il ne le savait pas, au moins c'était chose faite. Parce que Madeline ne sait pas ce qu'il se passe entre eux et elle ne veut pas le savoir. Pour le moment, elle ne veut pas réfléchir à un éventuel couple. Le couple, le duo, c'est Helen et Henry. L'autre n'est rien. Et en plus c'est un adolescent. Helen pourrait être sa mère et elle trouve ça dégoûtant. "Je suis sa fille d'accord ? J'habite ici, avec ma famille. C'est ma maison, c'est là qu'est ma place. T'es qui toi ?" Madeline se raccroche à ses mots. Elle est sûre de dire la vérité. Et lui n'est rien ici. Il n'a pas à se trouver dans cette maison. Elle aimerait lui faire comprendre.

Elle n'a que quatorze ans. C'est encore une enfant. Ce n'est pas à elle de lui dire ça. Elle le fait pour elle même. Elle veut quand même croire qu'il a une bonne raison de faire ça. Quel qu’elle soit.