Le hasard fait bien les choses

Pour l’occasion de la Saint-Valentin, la grande salle a revêtu ses plus beaux atours afin de charmer tous les couples participant à l’événement organisé pour célébrer l’amour. Amis et amoureux s’avancent à l’entrée, accueillis par le personnel encadrant et quelques elfes dévoués chargés du service en toutes circonstances. De mignonnes tables rondes sont réparties dans des boxes isolés par des parois opaques ; elles scintillent sous la lumière du ciel étoilé baignant la pièce d’une atmosphère romantique et tamisée. L’ambiance est à l’intimité, aux confidences et aux mains égarées sur la table – d’ailleurs, une petite fiole discrète est placée à côté de chaque verre. Une étiquette parcheminée indique en lettres élégantes : “Potion de révélation”. Le choix de la prendre semble réservé aux invités. Quant à ce qu’elle contient, aucune indication n’est laissée à la portée des yeux curieux. L’imagination ou la témérité sauront compléter ce vide.

D’ailleurs, voilà les convives qui arrivent, ravis d’être installés par les elfes de maison enchantés. Du moins, jusqu’à ce que les créatures ne leur amènent la mauvaise personne ! Confus, les elfes s’excusent, mais assurent qu’il s’agit bien des bons noms et que, non, vraiment, désolé, ils ne peuvent pas aller contre la liste des inscrits au risque de perturber le bon déroulé de la soirée. Il doit s’agir d’une erreur isolée. Mais rien n’est moins sûr, car chaque invité se retrouve affublé du mauvais visage avec lequel passer une charmante soirée. Manque de communication ou connivence collective ? Difficile à dire, mais les faits sont là.

D’ailleurs, le repas commence.

Oups…

Bonsoir à vous, @Dashiell Dashner & @Selene O. Paulet ! Bienvenue au traditionnel repas de Saint-Valentin organisé par Poudlard. Brooklyn

Cette fois, il semblerait que deux petits malins aient mis le bazar dans la liste des couples invités. On ne dénoncera évidemment personne (c’est @Silas Jørgensen et @Teodora K. Von Meissen, vous pouvez les huer). Les sacripans ont mélangé au hasard les noms sans s’attarder sur le résultat ; il va falloir faire avec, qu’il vous plaise ou non. Faites confiance au hasard, après tout, on dit qu’il fait bien les choses (parfois).

Amusez-bien ou passez une horrible soirée Le hasard fait bien les choses – Dashiell & Selene 2738742592

Le hasard fait bien les choses – Dashiell & Selene 2738742592

P.-S. : Qui sait ce que contient la potion de révélation déposée là par Silas (eh oui, maintenant que vous savez qui l’a mise, peut-être que vous ne la voyez plus du même œil). Ce qu’elle contient ? Rien que de l’eau et du sucre, mais libre à vous de faire connaître à votre personnage un petit épisode paranoïaque. Le hasard fait bien les choses – Dashiell & Selene 1434744687

Le hasard fait bien les choses – Dashiell & Selene 1434744687

(SELENE ☉ DASHIELL)
le hasard fait bien les choses

Après le bal de Noël, la soirée de Saint-Valentin ; Teddy et Selene commençait à faire d'une première fois une habitude, mais cette dernière espérait qu'elle ne prenait pas trop de temps à sa camarade et ne l'empêchait pas de passer du bon temps avec qui que ce soit d'autre. Une fois les doutes habituels relégués au fin fond de ses pensées, là où elle ne les entendait plus vraiment, ne restait que la hâte de passer une bonne soirée avec la Poufsouffle. Ça n'avait rien de très sérieux, elles avaient eu le temps d'en discuter longuement lors de leur sortie shopping à Pré-au-Lard, juste une manière de partager un peu plus que des ombres et des chagrins trop lourds pour des adolescentes de leur âge. C'était d'ailleurs à cette occasion que Selene avait déniché la tenue qu'elle portait, une longue jupe crème et un cardigan rose pastel brodé de petits cœurs blancs, dans le thème sans que ce ne soit trop extravagant. Pas de flocons vacillants à ses pieds, ni de glace à ses oreilles, nul ruban bleu à la surface duquel des lunes dansaient. À l'aise avec cette simplicité qui ne la mettait pas trop de l'avant et lui permettait d'effacer les réminiscences catastrophées du dernier bal, Selene retrouva Teddy devant sa salle commune. Elles papotèrent de tout et de rien jusqu'à la Grande Salle, devant laquelle d'autres élèves se pressaient déjà. Visiblement, les elfes étaient chargés de les mener à leur table, ce qui avait l'air de créer un peu de confusion, à laquelle elle ne prêta pas plus attention puisque sa camarade lui tendit un parchemin accompagné d'un cadeau. « C'est quoi ? Merci, mais, oh je me sens bête, j'ai rien prévu, moi… » La Poufsouffle balaya ses excuses, sans parvenir à faire taire cette petite gêne de ne pas y avoir pensé, et serra sa main dans la sienne alors que leur tour approchait. « Que la chance soit avec nous ! Tu me racontes tout après ? » Selene coula un regard incertain en direction de Teddy. « Comment ça ? » Elle avait chaud, tout d'un coup, face à une incompréhension qui faisait voltiger tout ce qu'elle avait imaginé de cette soirée. Cependant, une elfe les coupa, leur demandant leurs prénoms avec un sourire quelque peu fané par cette organisation chaotique et les complaintes des différents adolescents passés avant elle, les entraînant l'une vers la droite, l'autre vers la gauche, sans que Selene ne puisse protester.

« Je… Il doit y avoir une erreur, j'étais avec elle », tenta d'expliquer Selene en s'asseyant timidement sur la chaise que l'elfe lui désignait. « Non Miss, non, votre nom est bien là, à cette table, c'est bien écrit, je suis désolée. » L'elfe pressée ne resta pas plus longtemps, abandonnant derrière elle une Selene confuse. La table ronde à laquelle elle était installée était enveloppée d'une paroi opaque qui l'empêchait de voir ce qu'il se passait dans le reste de la Grande Salle, illuminée par un magnifique ciel étoilé. C'était beau, c'était romantique, c'était adorable, mais qu'est-ce qu'il se passait avec Teddy ? Sur les nappes, les couverts étaient dressés pour deux et, elle caressa la petite fiole du bout des doigts d'un air circonspect, une potion de révélation était posée à côté de son verre. Décidément, plus les minutes filaient et plus les questions s'accumulaient. La petite lune complètement perdue déroula le mot que lui avait glissé Teddy, espérant y trouver des réponses. Désolée on passera probablement pas la soirée ensemble, sauf si en mélangeant les papiers avec Silas, on est retombée l’une sur l’autre ce qui serait trop cool mais j’y crois pas une seconde. Ils avaient quoi ? Selene se sentit un peu déçue, de ne pas pouvoir passer la soirée en sa compagnie et de comprendre que c'était de son fait, un peu trahie aussi, de ne pas avoir été mise dans la confidence mais devant le fait accompli. En même temps, si elle avait sû, serait-elle venue ? Le risque était minime de se retrouver dans un tête-à-tête compliqué, mais pas inexistant. Son cœur s'emballa franchement quand elle effleura la possibilité de croiser les prunelles moqueuses d'August et ses doigts s'enroulèrent autour du bracelet qu'elle portait toujours, comme pour l'empêcher de conjurer sa silhouette. Ce ne fut pas celle du Gryffondor qui se matérialisa à la suite d'un elfe — bien qu'appartenant à la même maison — mais son soulagement fut plus bref qu'un battement de cils. Un Dashiell confus se laisser guider jusqu'à sa chaise tandis qu'une Selene mortifiée ne demandait rien de plus que de disparaître sous terre. « Je pense qu'il y a une erreur », gémit-elle à l'adresse de l'elfe qui lui retourna une réponse semblable à l'autre, avant de s'éloigner d'un pas sautillant, laissant les deux adolescents dans un face à face déjà embarrassant, plongés dans un silence qui dura de trop longues secondes. « Si ça se trouve, le hasard a placé Silas et Teddy ensemble », osa-t-elle finalement prononcer d'une voix mal assurée. Ses joues la brûlaient et sa poitrine lui faisait mal, ses yeux se refusaient à croiser ceux du garçon. Ils ne s'étaient pas reparlé depuis les quelques mots rapidement échangés à la rentrée, leur dernière vraie conversation remontait à avant Noël quand il lui avait demandé d'être sa petite copine, et ils en étaient restés là comme s'ils n'avaient rien de plus à se dire. Un point final brutal qui peinait à cicatriser, malgré le temps et l'éloignement, ou peut-être à cause d'eux justement.

ft @Teodora K. Von Meissen @Dashiell Dashner

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Le hasard fait bien les choses
surtout quand c'est dans son intérêt

ft. @Thomas Chastel, @Selene O. Paulet & Dashiell Dashner

Ce qui était bien avec cette soirée, c'était que ça n'était pas un vrai date. Aucune attente, aucune prise de tête, rien qui puisse l'enfoncer plus qu'il ne l'était déjà. Thomas était un gars cool, il y avait moyen de bien se marrer. Et puis, franchement, il avait presque l'impression de faire une bonne action en lui tenant compagnie pour cette date symbolique alors que sa meuf préférait y aller avec un autre... à moins que ça soit l'occasion de racheter un minimum sa conscience pas très fringante ces derniers temps ? ...peut-être. Il enfila un pull informe – mais douillet – par dessus sa chemise froissée et décida que ça suffirait. Pas un date, zéro effort. Il comptait parler foot, et histoires gores, et probablement critiquer un peu la gent féminine parce que vraiment toutes les mêmes alors pas besoin de jouer les pingouins. Une caresse sur la tête d'une Jess qui ne prit même pas la peine d'ouvrir les yeux et il détala dans les escaliers. Ce qui était bien avec cette soirée, c'est que ça n'était pas un vrai date... Et ça tourna en boucle, à chaque marche entre l'escalier qui aurait pu mener à la salle commune de Serdaigle et le Hall d'entrée. Sérieux, il faisait pas pitié un peu ? Ça puait la guimauve cette soirée, c'était culcul à mort ! Heureusement qu'il y allait avec Chastel, bordel, ça rendait ça moins niais ! Et puis, au moins, il évitait de passer pour un putain de canard aux yeux de tout Poudlard. Niveau discrétion, on aurait vu mieux. N'importe quoi... ça comptait même pas dans la canarderie, ils étaient juste potes. Si ça n'avait pas été le flot de ses propres pensées, il aurait sûrement ricané. En soi, c'était pas un mensonge, ils étaient juste potes et il sortait avec une fille qui l'avait pas calculé depuis les vacances pour une raison qui continuait à lui échapper. Silas aurait jamais balancé, il en était certain. Aisling était au courant de rien et même si elle était un peu bizarre des fois jamais elle lui aurait fait ça, c'était sa sœur... et le reste du monde n'avait pas été dans les environs pour avoir une vue d'ensemble sur le merdier. Son silence restait un mystère, le froid polaire qui avait entouré leurs brefs échanges également. Eh, c'était plus son dos hein, elle faisait ce qu'elle voulait mais qu'elle vienne pas chouiner qu'il lui avait pas proposé de se taper cette soirée de pourrie avec elle.

— Déso, j'ai pas sorti l'grand jeu lâcha-t-il en guise de bonjour alors qu'il arrivait à la hauteur de Thomas dans un Hall où certains s'étaient mis sur leur trente-et-un. Motivé ? ...p'tain, j'espère au moins la bouffe est bonne.

Parce qu'il n'était pas stupide, il savait bien qu'il n'y aurait pas grand chose à boire... alors si au moins ils pouvaient bien manger... Ils emboîtèrent finalement le pas du groupe pour rejoindre la Grande Salle où des elfes s'occupaient du placement. Le couple, devant eux, eut le malheur d'être séparé. « C'était bien le bon nom » qu'ils disaient. Alors soit l'un des deux jouait très bien la comédie pour aller rejoindre l'amour de sa vie en scred, soit on leur avait fait une blague pas super drôle... La voix de son meilleur ami résonna à ses oreilles. Il avait fait une connerie marrante... il n'avait rien dit de plus. Alors si la connerie marrant c'était d'avoir cassé les couilles de gens qu'il connaissait pas, il fallait bien reconnaître que l'adolescent s'en foutait pas mal. Il était bon public en général mais là ça lui faisait à peu près ni chaud ni froid... Sauf que ça n'arriva pas qu'au couple devant eux et que, rapidement, on l'embarqua sans son camarade de galère.

— C'quoi l'délire là ? J'sais c'que j'ai foutu sur l'papier hein, j'suis pas totalement con, j'avais mis Thomas comme binôme.
— Ce n'est pas ce qu'il y a marqué sur la liste. Il faut respecter la liste.
— Elle est foireuse vot' liste en vrai. On peut pas juste faire comme c'était prévu genre ?
— Il n'y a pas d'erreur sur la liste. Il faut respecter la liste, répéta la créature alors qu'il lançait un regard désespéré à l'apprenti garde-chasse en haussant les épaules d'un air désolé.

Tu parles que c'était drôle... Bonne patte, Dash suivit l'elfe jusqu'à la table qu'il avait décidé. Au pire, rien ne l'empêchait de rester. Ils ne leur collaient pas le cul à la chaise, hein ? Il irait retrouver Thomas dès que l'autre aurait le dos tourné et puis voilà. Pas la peine de parlementer pendant cent cinq ans pour rien. Son visage se décomposa en voyant la jeune femme qui se tenait de l'autre côté de ladite table. Selene Paulet. Évidemment. Heureusement que Silas n'était pas dans les parages parce qu'il eut très fort envie de l'étrangler. Sérieusement ? Il était tellement en chien qu'il la lui collait dans les mains en mode « magne-toi le cul de la tej » ? Super Saint-Valentin, merci, fallait pas !

— Je pense qu'il y a une erreur, tenta faiblement la Serdaigle.

L'adolescent singea la réponse dans une raillerie nerveuse et agacée. C'était vraiment n'importe quoi. L'elfe disparut aussitôt son travail fait. Et lui, pauvre abruti, resta planté à côté de la table sans trop savoir s'il devait s'asseoir ou déguerpir. Mais bon, ça se faisait pas trop. Et puis... Il était pas le seul en tort. Genre ok il avait merdé mais c'était elle aussi qui avait fait comme s'il existait pas depuis deux mois, là ! Il avait essayé de lui parler, il s'était pris un vent, il était clean de ce côté, n'est-ce pas ? Ça sonnait faux mais, au point où il en était, il s'en contenta. Il tira péniblement la chaise et hésita une seconde de plus avant de s'y installer. Avec Thomas, ça aurait été cool. Avec elle, sûr que ça lui passerait l'envie de fêter cette merde avant au moins une soixantaine d'années !

— Si ça se trouve, le hasard a placé Silas et Teddy ensemble.
— Hasard mon cul ouais, il est même pas là c'bouffon.

Tu m'étonnes qu'il lui avait laissé la surprise ! Les yeux rivés sur la table, se perdant entre les couverts et la déco lamentable, le Gryffondor laissa le silence s'installer. Ils n'avaient plus rien à se dire, de toute façon, sinon ils auraient communiqué avant ça. Il pianota à côté de son assiette, jeta un œil vers les murs de cette espèce de petit box... On étouffait ici. Quelle soirée à la con !

— T'veux d'l'eau ?

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(SELENE ☉ DASHIELL)
le hasard fait bien les choses

C'était, de loin, la pire chose qui pouvait lui arriver ce soir. La silhouette sinistre qui occupait jusque-là ses pensées fut balayée par la réalité, bien plus angoissante. Dans sa poitrine, les battements se firent erratiques, plus fort à mesure que Dashiell s'approchait de la table. Selene tenta bien de protester, mais ses faibles revendications se heurtèrent à un elfe qui ne faisait que ce qu'on lui avait ordonné, se basant sur une liste qu'il ne savait pas être traficotée. Heureusement que le mot de Teddy mentionnait un bref espoir d'être quand même ensemble, ce qui suggérait que le mélange avait été purement aléatoire, sinon elle lui en aurait voulu ; et Selene ne voulait pas ressentir de telles émotions envers la Poufsouffle. Il y en avait bien assez — en elle et tout autour — pour qu'elle veuille à tout prix protéger cette nouvelle amitié qu'elle n'avait pas vu venir et qui lui apportait tellement de réconfort. Du coin de l'oeil — ses prunelles se refusant à plonger dans celle du garçon — elle constata que Dashiell prenait place sur la chaise qui lui faisait face, faisant légèrement crisser les pieds sur les pierres qui recouvraient le sol, arrachant au passage un frisson d'appréhension à la jeune fille.

Sur ses genoux bordés par la nappe romantiquement brodée de petits chérubins, ses doigts crispés dansaient les uns avec les autres, valse en solitaire qui tentait, en vain, d'évacuer tout le chagrin. Elle ne savait pas comment faire, elle ne savait pas quoi dire, alors elle laissa la première chose qui passa par là briser leur mutisme conjoint. « Hasard mon cul ouais, il est même pas là c'bouffon. » L'agacement qui habillait son ton la fit se recroqueviller intérieurement, repoussa la question que ses propos soulevaient pourtant, à savoir où se trouvait Silas ? Ils n'étaient pas venus ensemble ? C'était à ne rien y comprendre. Le silence, lui, revint, aussi tranchant qu'une lame parfaitement aiguisée ; les conversations qui allaient bon train partout dans la Grande Salle le rendaient plus coupant encore. Selene avait beau se creuser la tête, elle ne trouvait rien à dire, rien qui puisse faire taire ce mutisme pesant, rien qui puisse alléger la chape de plomb qui pesait sur leur tablée. « T'veux d'l'eau ? » Machinalement, elle hocha la tête. « Oui, merci… » Ses doigts se refermèrent autour de son verre comme s'ils ne pouvaient rester par eux-mêmes mais sans le porter à ses lèvres ; elle avait la gorge bien trop nouée.

La jeune fille était triste de ce qu'ils étaient devenus. Deux silhouettes qui se tournaient le dos, qui n'échangeaient même pas un regard, à peine plus que quelques banalités aussi froides que l'hiver. Il n'y avait plus rien de l'automne chatoyant, des sourires à répétition, des images qu'elle voulait graver dans son esprit. Non, elle aurait souhaité tout oublier, ne serait-ce que pour ne plus ressentir cette peine déchirante dès que ses yeux menaçaient de croiser les siens. Au chagrin se mêlait la culpabilité, celle d'être à cette place alors qu'il y avait Silas, celle d'avoir dit oui à une histoire qui n'aurait jamais dû naître, celle de s'être laissée aller dans les bras d'un autre juste après, celle de ne pas avoir reçu ses lettres, celle de l'aimer pourtant, peut-être juste pas suffisamment. « Tu venais avec qui, à la base ? » demanda-t-elle après ce qui lui sembla être une éternité. « On peut peut-être échanger de place sans que personne ne dise rien ? J'veux pas… j'veux pas déranger. » Pitié, qu'il dise oui. Il n'avait pas envie d'être là, elle aurait été aveugle de ne pas le remarquer.

Pourtant, au fond d'elle, elle sentait confusément que c'était peut-être leur dernière chance de crever cet abcès géant qui les éloignait, parce qu'ils ne se reparleraient plus jamais sinon. Et elle l'aimait quand même, Dashiell, même si ce n'était pas comme ça, même si elle n'aurait jamais dû lui dire oui, même si elle lui en voulait de ne pas être assez, même si elle ne comprenait pas tout de ce qu'il s'était passé. Devant eux, une assiette se matérialisa, pleine d'un potage à l'aspect répugnant — c'était marron, avec des petits bouts flottants, et un cœur dessiné avec de la crème — qui lui souleva le cœur mais à l'odeur entêtante qui fit gargouiller son ventre. Comment quelque chose d'aussi laid pouvait bien sentir aussi bon, mystère. Selene y plongea bien sa cuillère mais la laissa là, l'estomac bien trop noué pour espérer en faire quoi que ce soit. C'était vraiment la pire soirée dont elle pouvait se rappeler.

ft @Dashiell Dashner

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surtout quand c'est dans son intérêt

ft. @Selene O. Paulet & Dashiell Dashner

C'était pas juste. Au bal de Noël, il s'était barré pour la lui laisser entre les pattes, maintenant, il venait pas et la lui laissait encore entre les pattes. C'était quoi, son problème, hein ?! Il était assez grand pour savoir s'il avait envie de lui parler, à Selene, merde ! Et franchement, il avait pas envie. Pour dire quoi ? « On est encore ensemble » ? Et si elle disait oui ?! Là, au moins, il pouvait faire genre il savait pas, faire l'autruche, lui foutre tous les torts sur le dos. C'était même pas son genre, en plus ! C'était pas une lumière mais il était pas méchant... et il assumait plutôt bien ses conneries en général. Sauf celle-là... putain sauf celle-là. « Eh déso, je t'ai trompé avec un mec pendant les vacances mais on reste potes. » Plutôt. Mourir. Y'avait moyen de se pendre avec une serviette de table ou de s'ouvrir les veines avec un couteau à bout rond, sinon ? Parce que cette soirée aussi, elle donnait envie de clams'. Il aurait probablement pu tomber avec n'importe qui dans la salle qu'il aurait trouvé le moyen de relativiser et d'avoir cet air de débile amusé qu'il avait tout le temps... jouer les gros beaufs avec Kenneth... balancer les projets de son pote à Antonella... écouter les conseils techniques balancés d'un ton probablement paternaliste de son capitaine... même se taper le tête-à-tête dont il avait rêvé pendant des mois avec Teddy maintenant que ça n'avait plus aucun sens... Il aurait fait avec, peu importe la personne sur qui il serait tombé mais bordel pas elle ! Par automatisme, pour tuer ce silence de mort, il attrapa la carafe d'eau posée sur la table et lui demanda si elle en voulait.

— Oui, merci…

Alors il remplit leurs verres et tenta de se noyer dans le sien. Au bout de combien de temps ça ferait pas Connard Ier de se barrer ? Il était prêt à renoncer à la soirée tout entière pour pas qu'elle se sente à l'origine de sa fuite, même, si ça pouvait adoucir le truc... ça pouvait adoucir le truc ? Il s'agita sur sa chaise, mal à l'aise. Il avait merdé, quand même. Il n'avait pas tous les torts, ok, mais quand même... et le pire du pire, c'était qu'il regrettait même pas. Il regrettait de lui avoir demandé d'être sa copine, plutôt... pas tant ce qu'il s'était passé après. À quel moment on regrettait de sortir avec l'une des filles les plus canons de l'école plutôt que de peloter son meilleur pote ? Il avait un sacré problème, il était pas tout-à-fait fini ce gamin ! Mais... elle méritait pas ça. Et s'il avait pris la peine de réfléchir, il était évident qu'il lui aurait jamais fait ça. Parce que ça se faisait pas. Vraiment pas. Son regard se fit plus fuyant encore. Sous la table, sa jambe se secoua nerveusement.

— Tu venais avec qui, à la base ?
— Thomas. Azure fait sa tchoin avec un aut' gars, du coup on d'vait s'faire une soirée entre potes, expliqua-t-il dans un haussement d'épaules. Et ça aurait dû être une bonne soirée, sans prise de tête ni rien pour l'enfoncer. Et toi ?

Il n'avait aucun mal à l'imaginer traîner avec Teddy, comme à Noël, puisqu'elles semblaient être devenues les meilleures amies du monde du jour au lendemain. C'était dommage parce qu'il avait toujours apprécié la Poufsouffle – plus que ça, même ! il n'aurait volontiers juré que par elle l'an dernier – mais il avait l'impression qu'elle était devenue omniprésente dans son entourage. Proche de tous ses proches. Trop proche de tous ses proches. Et c'était flippant.

— On peut peut-être échanger de place sans que personne ne dise rien ? J'veux pas… j'veux pas déranger.
— J'sais pas. On peut ?

Prendre la fuite, jouer les lâches. Tant pis pour la bravoure légendaire des Gryffondors, que celui qui n'avait jamais failli lui jette la première pierre ! Mais alors qu'il s'apprêtait à repousser sa chaise et à mettre les voiles, son regard glissa malencontreusement sur le visage de sa camarade. Il lui devait plus que ça. ...et mine de rien, à Silas aussi, il devait plus que ça. Parce que ok c'était sûrement le pire coup de pute possible, mais le message était clair. Et... dans le fond... c'était touchant. Un peu. Une fois le côté dégueulasse passé quoi... alors Dashiell battit en retraite et ne se leva pas. Et Selene ne le fit pas davantage. Le silence retomba. Les assiettes arrivèrent. Un potage qui donnait aussi peu envie que le reste de sa soirée, avec un cœur en crème dessus. La cuillère de la jeune femme tinta contre la porcelaine – ou peu importe ce que c'était –, la sienne s'acharna à noyer la crème dans la soupe. Plus de cœur dessiné, juste un gros tas qui ressemblait à rien. Mort à la Saint-Valentin ! C'était vraiment la pire fête de l'année ! Il lâcha finalement sa cuillère, éclaboussant légèrement autour de lui. L'un des angelots de la nappe se reçut une goutte et eut l'air d'avoir reçu une balle en plein front. Bien fait ! Nouveau silence. Bon, allez, porte tes couilles rien qu'une fois dans cette histoire ! Sans oser croiser son regard, il ouvrit la bouche. Rien. Putain... Allez !

— P'quoi t'me causes plus d'puis la rentrée ?

Chaque chose en son temps... déjà, essayer de comprendre, la suite viendrait après... peut-être.

(c) jawn

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(SELENE ☉ DASHIELL)
le hasard fait bien les choses

Quand, comment, pourquoi leurs échanges avaient-ils glissé de cette insouciance adolescente qui lui faisait chaud au cœur à ce mutisme froid comme l'hiver ? Chaque fois que Selene était convaincue que rien ne pourrait être pire, le destin s'amusait à lui prouver le contraire. Aucune soirée ne pouvait être plus gênante que le bal de Noël ; la Saint-Valentin s'imposait avec un sourire carnassier. Aucune absence ne pouvait être pire que le silence radio de ses deux amis ; leur présence constante à Poudlard se chargeait de lui faire savoir que si. Le rappel constant de leur existence ne faisait qu'exacerber la tristesse de ce lien qui s'était brisé du jour au lendemain ; ce tête-à-tête imprévu ne faisait qu'enfoncer le couteau dans une plaie qui n'arrivait pas à se refermer, tournant, tournant, tournant encore en susurrant des atrocités, en ricanant que plus rien ne serait comme avant, que cet ami qu'elle chérissait tant ne voudrait plus jamais aller à Pré-au-Lard avec elle pour le découvrir sous toutes les saisons, lui préférant Silas envers et contre tous ; quoi de plus normal, qui la préfèrerait jamais ? Pourtant, ce n'était pas en compagnie du Serdaigle qu'il avait prévu de passer la soirée ce soir, laissant plein de questions en suspens dans l'esprit chamboulé de Selene qui se risqua à une question, laquelle fit voler en éclat le silence pesant, comme s'il n'y avait aucune manière douce de procéder, tout finissant immanquablement par prendre des proportions plus brutales. « Thomas. Azure fait sa tchoin avec un aut' gars, du coup on d'vait s'faire une soirée entre potes. Et toi ? » Son cœur qui pesait déjà une tonne se décrocha et tomba au plus bas. Certes, il ne parlait pas d'elle, mais enfin, de désagréables réminiscences lui susurraient qu'elle ne valait pas beaucoup mieux. « Thomas, c'est l'apprenti garde-chasse ? Le pauvre, j'espère qu'il est tombé avec quelqu'un de bien… » Et que sa soirée ne serait pas gâchée comme la leur. « J'étais avec Teddy, on venait entre copines, un peu pour oublier Noël et tout... 'fin, elle savait qu'on serait probablement pas ensemble, ceci dit. » Ses doigts qui n'étaient pas crispés autour du verre enroulèrent le parchemin replié sur lui-même comme pour en essorer les moindres secrets.

Ils ne pouvaient pas rester ainsi, murés dans un silence dissonant, et de toutes les possibilités qui s'offraient à elle, Selene se décida pour celle qu'elle maîtrisait le mieux, proposant une fuite en avant, une échappée planifiée pour leur permettre de faire comme si ces minutes n'avaient jamais existé. «J'sais pas. On peut ? » Elle se tortilla sur sa chaise, mal à l'aise. « Aucune idée, on peut toujours essayer. J'peux aussi m'en aller, il aura qu'à prendre ma place, ils y verront que du feu, ils vont pas consulter leur liste toute la soirée… » Dans le fond, elle n'en savait rien. Elle ne savait rien. Elle ne faisait qu'imaginer des choses et espérer qu'elles soient vraies, ou fausses, tout dépendait de quoi on parlait. Tout comme elle s'était figuré pouvoir devenir amie avec Dash, avec Silas, avec tous les autres, puis un peu plus que ça encore avec le Gryffondor, perdue dans les sentiments naissants travestis par l'émotion de se sentir libre, de se sentir vivre, pour la toute première fois depuis qu'elle s'était réveillée amnésique. Probablement qu'elle aurait pu tomber amoureuse de Dash, vraiment amoureuse, si le temps avait fait son œuvre et si elle ne s'était pas rendue compte qu'elle faisait du mal à tout le monde en restant à cette place, à Silas surtout, mais à d'autres aussi. Probablement qu'elle l'était un petit peu déjà, entichée en tout cas, mais pas assez pour accepter d'être plus que ça. C'était sa faute aussi, sur ce point là. Est-ce qu'elle méritait pour autant d'être oubliée pendant un Noël entier ? Qu'on ne pense pas à elle, qu'on la délaisse comme un bagage oublié ? Et même si Silas lui avait affirmé qu'ils lui avaient écrit, le nœud restait le même, goulot d'étranglement qui l'étouffait quand elle y pensait. Elle les aimait tous les deux, beaucoup, pour des raisons différentes, elle tenait à eux et aurait fait beaucoup pour leur prouver ; mais la voilà, la triste vérité, l'inverse n'était pas aussi vrai qu'elle le pensait, et elle pouvait bien s'en attrister, elle n'avait pas le pouvoir de rien changer.

En fait si, elle pouvait bien dessiner cette soirée selon ses envies, mais à quoi bon ? Selene ne savait même pas de quoi elle avait envie. Que tout redevienne comme avant, mais pas vraiment. Peut-être que la fuite n'était pas la meilleure solution, peut-être qu'affronter ce qui se dressait devant elle — et elle ne parlait pas de la soupe aux champignons qui ne réveillait pas son appétit — était le choix à faire. De l'autre côté de la nappe parsemée de cupidons, la cuillère de Dash tomba lourdement, éclaboussant quelques êtres ailés au passage, faisant sursauter Selene qui s'attendit à le voir se lever et partir pour toujours d'une seconde à l'autre. Au lieu de quoi, rien, juste le silence qui revint, et ses pensées embêtées qui ne savaient pas par où commencer. Devait-elle dire quelque chose ? « P'quoi t'me causes plus d'puis la rentrée ? » Son cœur s'enfonça encore plus bas. Qu'est-ce qu'elle pouvait répondre à ça ? Que depuis le soir du bal de Noël, elle s'en voulait d'avoir accepté quelque chose qui n'était pas fait pour elle ? Qu'elle avait passé des vacances horribles sans jamais sortir de chez elle et que l'espoir de recevoir une lettre de leur part était tout ce qui l'empêchait de passer ses journées à pleurer ? Qu'elle était épuisée, en colère, qu'on lui avait arraché tout ce qui comptait pour elle et qu'elle devait quand même réussir à se lever le matin ? Qu'elle lui en voulait de lui écrire à Poudlard et de faire comme s'il était content de la voir alors qu'il s'en fichait bien tant qu'il était chez lui avec son meilleur ami ? Sa gorge se noua douloureusement et, comme trop souvent ces derniers temps, les mots qu'elle avait longtemps retenus débordèrent sans demander leur reste, dans une cacophonie tumultueuse. « Parce que je voulais pas être un poids... Je trouvais le message assez clair vu que vous aviez pas répondu à mes lettres de tout Noël, 'fin, Silas dit que vous avez rien reçu, que vous en avez même envoyées… Mais vous vous posiez pas la question à ce moment-là, de savoir pourquoi je vous parlais pas. J'ai passé les pires vacances de ma vie, et j'avais juste personne, et je suis fatiguée de tout, et mes notes sont nulles, et mon p… » Il fallut qu'elle se morde les lèvres pour arrêter de parler. Ça n'avait aucun sens et lui, il devait bien s'en foutre. « Je suis désolée… C'est pas tes oignons. » Son ton s'affaissa, son cœur encore plus. Sans croiser son regard, ses yeux baissés sur la nappe qu'elle assassinait entre ses doigts, elle osa dire tout haut ce qu'ils pensaient tous les deux tout bas. « J-Je… Je t'aime vraiment beaucoup, tu sais, mais je crois… J'aurais dû dire non, après le bal de Noël. » Et ça, deux fois plutôt qu'une, mais il y avait des ombres qu'elle n'était pas prête à affronter.

ft @Dashiell Dashner

(c) SIAL ; icons sial

Le hasard fait bien les choses
surtout quand c'est dans son intérêt

ft. @Thomas Chastel, @Selene O. Paulet & Dashiell Dashner

— Thomas, c'est l'apprenti garde-chasse ?

L'adolescent hocha la tête. Ouais, l'apprenti garde-chasse. C'était un peu triste que les gens se sentent obligés de préciser, juste pour être sûrs, comme s'il existait que par ce rôle-là alors que franchement c'était un chouette gars. Il n'en ferait probablement jamais son meilleur pote – la place était prise de toute façon – mais c'était toujours agréable de se poser à côté de lui, ne serait-ce que vite fait entre deux cours. Vraiment, il était content à l'idée de partager cette soirée en sa compagnie. Bien sûr il aurait préféré autre chose, mais niveau plan B ça lui convenait très bien !

— Le pauvre, j'espère qu'il est tombé avec quelqu'un de bien…

Un haussement d'épaules servit de réponse. Il espérait aussi mais vu le hasard, il y avait des chances que ça ne soit pas le cas. Ou alors Silas avait vraiment décidé de gâcher leurs trucs à eux ? Peut-être qu'il était avec Teddy, Thomas ? Ou alors la meuf du couple qui était juste devant quand ils étaient arrivés ? Peut-être... En vrai, il n'arrivait même pas à comprendre la logique derrière tout ça. Le message passait mais... franchement, il aurait pu faire autrement. Pas gâcher littéralement sa soirée dans l'espoir qu'il mette un terme à cette relation qui n'en était même pas vraiment une. C'était même une grosse blague quand on y pensait. À quel moment il s'était dit que c'était vraiment une bonne idée de lui demander d'être sa meuf ? Il avait fait que repousser depuis leur premier baiser, là...! S'il en avait vraiment eu envie, il lui aurait demandé tout de suite... Il ne l'avait pas fait, et il ne l'avait pas fait à la sortie ciné, non plus, alors qu'ils y avaient été tous les deux et que ça avait éhontément flirté dans l'obscurité complice de la salle... et il ne l'avait fait aucun autre jour après ça... avant que Silas ne le rembarre et ne le plante salement au milieu du bal pour se tirer avec une Teddy trop tactile pour pas lui filer la gerbe. Coïncidence ? Je ne crois pas. Et avec le recul, il était prêt à admettre que peut-être – peut-être seulement – il y avait un lien de cause à effet.

— J'étais avec Teddy, on venait entre copines, un peu pour oublier Noël et tout... 'fin, elle savait qu'on serait probablement pas ensemble, ceci dit.

Dash se retint de lever les yeux au ciel. Évidemment qu'elle y allait avec Teddy... et évidemment que Teddy savait ce qui se passerait puisque Silas le savait aussi et qu'ils étaient inséparables. La jalousie fut si violente que ses doigts se crispèrent sur son verre. Et puis d'où elle voulait oublier Noël ? Ok y'avait eu un moment grave bizarre mais en vrai c'était pas une si mauvaise soirée que ça, quand même ! Son ego en prit un coup. Il avait fait ce qu'il pouvait pour qu'elle ait de bons souvenirs de son bal malgré le départ de Teddy ! Ok, il n'était pas elle, il ne lui arriverait jamais à la cheville, elle était trop merveilleuse, trop parfaite, trop indispensable pour tout le monde mais il avait fait tout son possible pour que ça soit pas trop nul !

— Ouais j'me doute, admit-il, un peu plus amer qu'il ne l'aurait voulu, avant de plonger ses lèvres dans son verre d'eau.

Le silence retomba. Lourd. Pesant. Plein d'une évidence qu'il refusait de mettre sur la table. Par peur de la blesser. D'abandonner pour de bon l'image dépassée de ce qu'il croyait être un homme. Sortir avec une jolie fille, c'était être un vrai homme. S'abandonner à un désir incontrôlable entre les bras de son meilleur pote, c'était pas être un vrai homme... et c'était effrayant. Rompre avec sa copine après l'avoir trompé avec Silas, c'était reconnaître qu'il en pinçait pour lui. Enfin non, il n'en pinçait pas pour lui. Il était probablement amoureux, et c'était encore pire. Selene reprit finalement la parole, leur offrant la porte de sortie qu'il attendait sans oser la franchir :

— Aucune idée, on peut toujours essayer. J'peux aussi m'en aller, il aura qu'à prendre ma place, ils y verront que du feu, ils vont pas consulter leur liste toute la soirée…
— Ouais, on peut essayer.

Mais il ne bougea pas. Et elle non plus. Ils se perdirent dans leur potage d'un marron grisâtre, noyant leur cuillère sans même y faire attention. Pourquoi elle ne partait pas ? C'était son idée, non ? Elle attendait quoi...? Est-ce qu'elle aussi elle voulait savoir ce qu'ils faisaient ? ...ce qu'ils étaient ? Plus vraiment un couple, depuis le temps, si ? S'ils avaient échangé trois mots depuis la rentrée, ça tenait du miracle... C'était dommage parce qu'ils s'entendaient bien, avant. Il avait adoré chaque moment passé avec elle, vraiment. Sauf le bal, peut-être, dont le souvenir global restait anxiogène. Il se rappelait plus volontiers du dos de Silas s'enfuyant main dans la main avec Teodora que des instants passés à danser avec la jolie blonde... Quel bal de merde ! Comme cette soirée ! Il n'avait pas envie qu'il reparte avec elle, après ce soir. Qu'il en ait marre d'attendre qu'il répare ses conneries, qu'il lui préfère la simplicité de son lien, quel qu'il soit, avec la Poufsouffle. Son ventre se serra plus fort. Pas encore. Pas après leurs vacances. Pas après... Alors sans crier gare, il finit par mettre les pieds dans le plat. Ou du moins, à côté du plat. Chercher à comprendre ce qu'elle lui reprochait avant de lui donner vraiment des trucs à lui reprocher... C'était nul, comme technique, mais il n'avait pas le courage de faire mieux pour l'instant.

— Parce que je voulais pas être un poids... Je trouvais le message assez clair vu que vous aviez pas répondu à mes lettres de tout Noël, 'fin, Silas dit que vous avez rien reçu, que vous en avez même envoyées… Mais vous vous posiez pas la question à ce moment-là, de savoir pourquoi je vous parlais pas. J'ai passé les pires vacances de ma vie, et j'avais juste personne, et je suis fatiguée de tout, et mes notes sont nulles, et mon p…

Comment ils étaient censés savoir qu'elle avait passé les pires vacances ? Ils s'étaient étonnés qu'elle ne leur réponde pas et puis étaient passés à autre chose. Puisqu'elle avait l'air de profité des fêtes de son côté, ils avaient décidé de faire pareil. C'était vraiment son silence à elle qu'elle lui reprochait ?

— Je suis désolée… C'est pas tes oignons.

La violence de cette dernière phrase lui arracha un mouvement de recul. Ah ouais... ils en étaient là ? Sérieusement...?

— On t'a écrit. T'as jamais rep. On s'est dit qu'on avait mal fait l'adresse alors on a d'mandé à ma mère d'vérifier et tout mais y'avait pas d'problème. T'as qu'à lui d'mander s'tu m'crois pas. T'pouvais juste êt' partie en vacances ou un truc comme ça, qu'est-ce qu'on en savait, sérieux ? Et j't'ai écrit dès la rentrée aussi, genre si j'pensais t'étais un poids j'aurais juste fait l'mort...

Un soupir lui échappa alors qu'il abandonnait le bord de la table pour s'affaler contre le dossier de sa chaise. Sous la nappe, sa jambe cessa doucement de s'agiter.

— Désolé, pour tes vacances. Ça craint si elles ont été aussi pourries. I' s'est passé quoi...? 'Fin... s'tu veux en parler...

Dans sa tête, il ne put que s'engueuler. Il était censé la larguer, cette fille, pas lui proposer son épaule pour pleurer ! Mais en même temps, il l'aimait bien... il ne l'aimait pas comme ça mais l'aimait bien quand même... alors ça lui faisait de la peine de la savoir mal.

— Et pour tes notes, j'suis sûr y'a des soluces en vrai. Les profs, i' sont là pour ça genre. Et même nous, on peut t'aider s'tu veux. Genre... vraiment, Selene. T'pas toute seule.

Nouveau soupir. Tout ça, il le lui avait écrit, déjà, avant de se prendre un froid polaire en pleine tronche... mais ça n'en était pas moins vrai malgré tout. Au pire, elle le repousserait. Encore. Il n'était plus à ça près... Par contre, la suite eut le mérite de le surprendre :

— J-Je… Je t'aime vraiment beaucoup, tu sais, mais je crois… J'aurais dû dire non, après le bal de Noël.

Son ego gémit sous l'attaque. Putain ! Il était censé la larguer, merde, pas l'inverse ! Mais en même temps... au moins c'était fait. Est-ce qu'il était vraiment obligé de dire que c'était elle qui l'avait tej ? Ce qui se passait dans ce box restait dans ce box, non...? Peut-être... il fallait l'espérer, en tout cas.

— J'aurais pas dû t'demander en vrai, finit-il par avouer à son tour, l'air penaud. C'tait débile. 'Fin... non, c'tait pas débile... mais j'croyais c'était c'que j'voulais mais en fait j'crois j'me suis planté.

La couleur peu ragoûtante de sa soupe avait l'air passionnante, digne de toute cette attention qu'il refusait à la jeune femme.

— Mais... j'aimais bien quand on était amis... genre quand on s'écrivait et qu'on faisait des trucs ensemble et tout... c'était cool...

Perche maladroitement tendue pour revenir à quelque chose de plus innocente... Au pire, elle ne la saisirait pas et ça ne changerait rien à l'état actuel de leur relation...

(c) jawn

DASHIELL
favourite flavoured sweets
raspberry amphetamines

(SELENE ☉ DASHIELL)
le hasard fait bien les choses

Chaque mot laissait derrière lui un arrière-goût de cendres, traîne grisâtre qui se nourrissait de tous les souvenirs brûlés. Même si ça n'avait jamais été simple — parce que Selene se posait toujours bien trop de questions sur ce qu'il était convenable de dire ou de faire — leurs échanges passés avaient au moins le mérite de se décliner en nuances joyeuses et réconfortantes ; rien à voir avec cette marche funèbre forcée. Tout sonnait faux, même cette conversation banale concernant leur partenaire pour cette soirée, celui qu'ils avaient choisi avant de se voir imposer climat autrement plus angoissant. Lui avec Thomas, elle avec Teddy, sans que leurs regards n'aient besoin de s'éviter comme ils s'appliquaient à le faire présentement. « Ouais j'me doute. » Et, aussi facilement que ça, le silence revint, étouffant. Sur ses genoux, ses doigts reprirent leur danse, plus angoissés que jamais, voltige silencieuse et risquée qui s'acharnait à ne rien réveiller des doutes et des chagrins dont la place n'était pas autour de cette table, pas ce soir, pas alors que tous les couples devaient sûrement bien s'amuser, tandis qu'eux deux se muraient dans un mutisme plus gênant à chaque seconde. S'enfuir était peut-être lâche, mais était-ce moins sage pour autant ? Selene avait beau tourner ce dîner dans tous les sens, rien de bon ne semblait jamais en sortir et elle n'était pas certaine de pouvoir supporter des heures de cette contemplation crûe de ses espoirs piétinés. Il suffisait qu'elle se lève, qu'elle quitte la salle, que Dash soit rejoint par Thomas pour que tout ce qui était prévu retrouve sa place. Lui était d'accord, elle ne voulait pas rester, pourtant ni l'un ni l'autre n'esquissèrent le moindre mouvement pour mettre le plan en branle. Statues de sel figées qui se noyèrent dans le potage peu appétissant dès que l'occasion se présenta. Elle n'avait même pas faim, le ventre noué par les non-dits qui gravitaient autour d'eux, leurs longs doigts décharnés prêts à les étrangler.

Aussitôt que le Gryffondor brisa le silence, Selene regretta d'être restée. Les reproches griffus lui lacérèrent la poitrine, saupoudrant un peu de culpabilité sur les plaies sanguinolentes pour le simple plaisir de les aggraver. Évidemment que c'était sa faute à elle si la situation était aussi embarrassante et jamais la leur, surtout pas la sienne. Piqués au vif, les mots filèrent, charabia à moitié incompréhensible qui déroula un pan de la vérité, sans que le goût de cendre ne disparaisse pour autant. Emportée par la houle, Selene faillit en dire trop, parler de son père et de la violence de son regard qui s'était transposée dans son poing serré, alors elle s'emmêla, repoussa ce bout-là derrière un voile bien opaque, voulut lui faire savoir qu'il n'avait pas à s'inquiéter de tout ça, que ça n'était pas ses oignons de toute façon, et qu'elle en demandait bien trop, comme toujours ces derniers temps. « Alors on a d'mandé à ma mère d'vérifier et tout mais y'avait pas d'problème. T'as qu'à lui d'mander s'tu m'crois pas. » Un sourire triste étira ses lèvres alors qu'elle baissait les yeux pour contempler ses genoux tremblants. Il répétait exactement la même chose que Silas, presque mot pour mot. Elle n'avait qu'à, c'était aussi simple que ça, complètement à côté de ce qui l'attristait vraiment. Mais elle ne broncha pas et hocha doucement la tête ; auprès de Silas, la petite sirène avait bien compris que lutter contre les flots qui avaient déjà décidé d'où aller était vain. « T'pouvais juste êt' partie en vacances ou un truc comme ça, qu'est-ce qu'on en savait, sérieux ? » « Vous pouviez pas savoir », admit-elle, la gorge nouée, son regard accroché à un fil qui dépassait de sa jupe, minuscule et fragile. « Et j't'ai écrit dès la rentrée aussi, genre si j'pensais t'étais un poids j'aurais juste fait l'mort… » Derechef, elle opina et se concentra sur la boule dans sa gorge pour l'empêcher de prendre trop de place. Vraisemblablement, elle avait faux sur toute la ligne et ne pouvait s'en prendre qu'à elle, ou bien à personne, si ce bout-là de ces vacances avaient contribué à la fresque affreuse de l'ensemble. La colère entortilla ses entrailles, lui donnant la nausée. « Désolé, pour tes vacances. Ça craint si elles ont été aussi pourries. I' s'est passé quoi...? 'Fin... s'tu veux en parler… » Ses cheveux blonds balayèrent ses épaules alors qu'elle secouait la tête, coinçant ses mains sous ses cuisses pour se donner une certaine contenance, de se tenir là où elle était et non pas de s'éparpiller en un millier de morceaux brisés comme elle en avait l'impression. « Non, t'as raison, vous pouviez pas savoir, t'as pas à être désolé, c'est moi… » fit-elle d'une voix contrôlée assorti d'un petit sourire las. « Je m'entends juste pas trop avec mes parents, mais c'est pas comme si j'étais la seule. » Elle haussa les épaules, consciente que, de toute façon, ce pan là était de sa faute également. Les orbes noires lui rappelaient sans cesse qu'elle était un poids, une faute qui n'aurait pas dû se produire, et que le mieux qu'elle puisse faire pour se rattraper était d'atteindre les exigences fixées ; d'ailleurs, ne lui avait-il pas mentionné, que c'était de sa faute s'il en était arrivé à une telle extrémité, qu'elle le poussait à bout et qu'il fallait qu'elle trouve un moyen d'y remédier ? Depuis les pleurs égarés entre les bras de Silas, Selene avait doucement brodé la ferme résolution de ne plus faire porter le poids de ses propres erreurs aux autres, de taire les attentes qui rendaient son cœur si lourd et de les garder pour elle au lieu de les disperser auprès de ceux qui ne pouvaient les entendre ; résolution qui s'affermit autour de la petite table ronde dressée pour la Saint-Valentin. « Et pour tes notes, j'suis sûr y'a des soluces en vrai. Les profs, i' sont là pour ça genre. Et même nous, on peut t'aider s'tu veux. Genre... vraiment, Selene. T'pas toute seule. » Ses pieds balayèrent le sol, repoussant ses brefs espoirs sous la nappe. « Et ils sont là, vraiment, c'est pas leur faute si moi je suis pas capable de rien. Aylmer a beau me donner des heures de cours en plus, j'arrive pas à lancer un sort neuf fois sur dix. » Ils n'y pouvaient rien, c'était elle qui était nulle et incapable. Elle esquissa un sourire brave en direction du garçon, toujours sans vraiment croiser son regard, quand il souligna une nouvelle fois qu'elle n'était pas toute seule. C'était vrai, jusqu'à ce que ça ne le soit plus ; c'était vrai jusqu'à ce que toutes les personnes qui l'entourent trouvent mieux à faire, quelqu'un de plus important auprès de qui passer leur temps. L'échos de ses lamentations pathétiques accentua cette nausée au goût de poussière. « Ouais… Merci », souffla-t-elle, les yeux un peu brillants.

Puis, sans trop savoir comment, elle osa libérer le dernier démon de culpabilité qui tempêtait dans sa cage verrouillée. Le bal de Noël s'était terminé sur quelques erreurs qui pesaient lourd à ses poignets mais en mentionner une n'allégea pas grand-chose, contrairement à ce qu'elle pensait. « J'aurais pas dû t'demander en vrai. C'tait débile. 'Fin... non, c'tait pas débile... mais j'croyais c'était c'que j'voulais mais en fait j'crois j'me suis planté. » Elle le savait, elle le savait depuis qu'il lui avait posé la question, elle le savait par cœur et le savait consciemment ; alors pourquoi est-ce que faisait mal de l'entendre confirmer aussi facilement qu'elle était une erreur ? Décidément, Selene avait perdu toute raison au profit d'une prétention aberrante. « Ouais… On est deux. » Lui pour avoir demandé, elle pour avoir dit oui. Aussi facilement que ça, sans même échanger un regard, le nez baissé sur les bols qui ne se vidaient pas, ce qui n'avait jamais vraiment commencé se termina et le silence, rampant, aurait pu se réimposer, mais Dashiell le repoussa. « Mais... j'aimais bien quand on était amis... genre quand on s'écrivait et qu'on faisait des trucs ensemble et tout... c'était cool… » Selene arrêta de triturer la nappe, un peu surprise de l'entendre dire ça, moins contente que ce qu'elle aurait pu être si tous les espoirs anéantis n'avaient pas ensevelis sa joie sous une tonne de gravats. Enfin, tout de même, ça ralluma quelque chose, une petite étincelle lointaine qui étira la commissure de ses lèvres. « Moi aussi… C'était bien… À chaque fois. » Vaillamment, elle verrouilla son cœur à ces désirs parfaitement innocents. Elle apprendrait à se contenter de ce qu'elle avait, à ne rien espérer de plus ni souhaiter ce qui n'était pas.

ft @Dashiell Dashner

(c) SIAL ; icons sial

Le hasard fait bien les choses
surtout quand c'est dans son intérêt

ft. @Thomas Chastel, @Selene O. Paulet & Dashiell Dashner

Une tension palpable avait fini par tirer une chaise et s'installer avec eux pour dîner. Quelque chose de lourde, de gênant. De gêné aussi. Dash voulait tout à la fois se débarrasser de la fille et de la soirée, sans la blesser ni écorcher les restes faiblards de son ego dans la bataille. De tous les scénarios possibles, c'était probablement le pire. Selene Paulet face à lui pour la Saint-Valentin. La Saint-Valentin, bordel ! Quelques semaines plus tôt, il se serait senti trop frais, un sourire débile et vaguement amouraché – à moins que ça ne soit simplement la fierté d'être vu avec une fille aussi jolie que celle-là – posé sur sa face d'idiot... mais là... à quel moment il était censé lui annoncer qu'il l'avait trompée avec son meilleur pote ? Entre le plat et le dessert ? à moins qu'il faille attendre que les elfes viennent leur balancer des petits cœurs en confettis dessus ? Envie de mourir. La conversation aussi la lui donnait, cette envie. Entre le nom de Teddy qui s'y glissa comme il lui semblait qu'il se glissait dans chacune des conversations qu'il pouvait avoir depuis la rentrée, peu importe avec qui, peu importe à propos de quoi, réveillant une jalousie toujours plus farouche dressée contre celle qui l'avait fait rêvasser pendant ce qui lui avait paru être une éternité ; et la violence des reproches, des aveux, du rejet... « C'est pas tes oignons »... Occupe-toi de ton cul, mon gars. Comme il l'avait fait jusque là, quoi... Non ! C'était même pas vrai ! Il lui avait écrit durant les vacances, il avait fait les choses bien ! ...au début du moins... et il lui avait écrit à la rentrée, il s'était inquiété de son silence ! Il avait merdé, toute la mauvaise foi du monde ne suffisait pas à le nier mais à aucun moment il l'avait délaissée, plantée, oubliée ! Elle pouvait lui reprocher ce qu'elle voulait, il pouvait s'en reprocher autant, mais là-dessus, il était clean ! Il avait été le pire petit-ami du monde mais un ami potable malgré tout. Durant une seconde, il se demanda si les choses se seraient passées exactement de la même manière si elle avait répondu à leurs lettres... Probablement pas. Parce qu'il se serait pris la tête pour elle, aurait sûrement remué ciel et terre pour squatter la boutique de son père de temps en temps pour lui tenir compagnie et éviter qu'elle ne se sente abandonnée... Leur histoire, aussi bancale qu'elle ait pu être, aurait existé. Et sûrement que toute l'ambiguïté qui avait toujours existé avec Silas n'aurait jamais été que la même toile de fond qu'elle avait été jusque là. Quelque chose de sourd, devant quoi il était facile de fermer les yeux. D'un côté ça aurait été dommage... d'un autre... Il n'avait jamais vraiment été prêt à tout ça. Ni à ce tête-à-tête là, ni à ses conneries qu'il fallait assumer, ni à tout ce que ça remettait en question.

— Vous pouviez pas savoir.

L'adolescent secoua doucement la tête. Est-ce qu'ils auraient pu...? Il savait que c'était bizarre avec ses parents, il en avait eu un avant-goût cet été quand il avait joué les livreurs auprès des Paulet mais... sérieusement ? Il avait quinze ans, il vivait les meilleures vacances de sa vie... Il avait bêtement plaqué sur son silence tout ce qu'on aurait pu plaquer sur le sien : il était trop occupé à profiter pour en avoir quelque chose à foutre du monde extérieur. Il tenta maladroitement de ramasser les morceaux des pots cassés en chemin mais ils lui échappaient les uns après les autres. Il fallait dire qu'elle ne faisait pas beaucoup d'efforts pour l'y aider non plus. Ils avaient des torts tous les deux, merde, elle pouvait quand même assumer les siens et pas le laisser ramer tout seul comme un con, non ?! Non, bien sûr... Dans le fond, il voulait bien faire l'effort de comprendre : elle avait passé des vacances à chier, elle devait mal vivre que ce soit pas le cas de tout le monde et qu'on lui fourre sous le nez à quel point certaines avaient pu être incroyables... mais quand même ! C'était elle qui leur avait jamais répondu ! Si elle s'était sentie toute seule, c'était pas de leur faute à eux !

— Non, t'as raison, vous pouviez pas savoir, t'as pas à être désolé, c'est moi… Je m'entends juste pas trop avec mes parents, mais c'est pas comme si j'étais la seule.

Dash ouvrit spontanément la bouche.

— Ah -

« Ah merde... t'veux qu'j'voy' avec mes vieux pour qu'tu viennes à la maison c't'été ? » fut-il sur le point de proposer avec une innocence presque enfantine. Parce qu'ils ne diraient jamais non, parce qu'ils étaient pas parfaits mais qu'ils s'occuperaient d'elle comme de leur propre gosse, parce qu'il y avait de la place et qu'elle serait loin de déranger... Mais la réalité de la situation lui tomba lourdement dessus et fit mourir cet élan ridicule. Ce serait bizarre, un peu, de ramener son ex et son copain chez lui pour y passer les vacances. Même pour lui, pour ses deux neurones qui fonctionnaient au ralenti... Est-ce que c'était son copain, même ? Non. Pas vraiment. Plus ou moins. Sans qu'il ne sache si c'était plutôt « plus » ou plutôt « moins ». C'était bizarre. Ni comme avant ni différent pour autant. Putain... Y'avait vraiment rien qui allait, avec personne, en fait. Son estomac se noua plus encore. Et tant qu'il n'aurait pas pris ses responsabilités avec elle, il n'y aurait rien de clair avec lui. Putain putain putain ! Et en même temps, là tout de suite maintenant, il n'avait pas envie de grand chose avec lui sinon de lui faire savoir que c'était dégueulasse de niquer sa soirée comme ça pour le pousser à faire des trucs qu'il n'avait pas envie de faire. Sérieux, niveau début de relation, y'avait mieux, non ? Ok, c'était même pas une relation ! Du coup, c'était encore plus foireux comme façon de faire !

— Et ils sont là, vraiment, c'est pas leur faute si moi je suis pas capable de rien. Aylmer a beau me donner des heures de cours en plus, j'arrive pas à lancer un sort neuf fois sur dix.
— Nan mais faut tu r'partes du début aussi, tu m'étonnes qu't'en chies : Y'a grave des gens i' s'seraient pas cassés l'cul, i' z'auraient juste lâché en mode « déso j'recommence pas tout ». T'es pas pas capab' d'rien, juste t'peux pas faire limite cinq ans d'un coup. C'est normal aussi...

Lui, il n'aurait même pas essayé. Flemme. Il avait été assez nul la première fois pour pas retenter une deuxième. L'angoisse.

— Et pis au pire du pire tu tej les trucs avec des sorts l'année prochaine genre.

Un haussement d'épaules lui échappa, comme si c'était évident. Si on retirait les matières qui posaient problème, il n'y avait plus de problème. C'est ce qu'il aurait fait, lui, s'il n'avait pas eu pour projet de se les infliger une année de plus, les matières à problèmes ! Virer l'Histoire, et la métamorphose, et l'Astronomie aussi, et tous ces trucs pourris qui servaient à rien !

— Ouais… Merci.

Nouvel haussement d'épaules. Moins évident que le premier, plus mal à l'aise également. C'était la moindre des choses même si franchement elle n'allait plus jamais vouloir entendre parler de lui lorsqu'elle saurait. Si elle savait un jour. Il n'était pas obligé de lui dire, si ? ...non...? Silas n'allait pas balancer, de toute façon. Il ne put s'empêcher de se demander ce que Sainte-Teodora savait... Il avait promis mais... Est-ce qu'il ne lui disait pas tout, à cette fille ? Après tout, il lui avait balancé toute sa vie au bout de deux jours d'amitié quand lui avait dû supporter un an de silence et d'abandon... Alors une merde du genre... Non, ils étaient meilleurs potes depuis toujours, il ne lui ferait jamais ça. N'est-ce pas...? Mais en même temps, il n'aurait jamais pensé qu'il l'aurait foutu un jour au pied du mur comme ça et pourtant ! Y'avait vraiment des baffes qui se perdaient, bordel ! Et puis d'un coup, comme ça, sans prévenir, Selene lâcha la bombe, celle-là même qu'il refusait de faire exploser, coincé dans un élan de lâcheté qu'il ne se connaissait pas. Elle n'aurait pas dû accepter de sortir avec lui. Sa fierté prit cher. Il avait envie de bouder comme un enfant. D'où elle le larguait comme ça, sérieux ? Il avait tout fait pour être un flirt digne de ce nom ! C'était après que ça avait merdé, au début il avait géré ! ...hein ? Mais en même temps... au moins c'était fait. Il se risqua même à admettre qu'il aurait pas dû lui demander quoi que ce soit. Ça faisait un peu rageux mais tant pis. Dans le fond, c'était vrai. Qu'il n'aurait pas dû lui demander de sortir avec lui, pas que c'était un gros rageux. Encore que...

— Ouais… On est deux.

Un hochement de tête servi de réponse et clôtura silencieusement la conversation. D'un côté, un poids avait quitté ses épaules. C'était fini. Ça n'avait jamais vraiment commencé, d'accord, mais c'était fini. D'un autre... la gêne fut plus grande encore. Il était censé faire quoi maintenant ? « Allez salut ! » ? C'était pas cool. Mais en même temps, c'était la Saint-Valentin. Qui avait envie de rester avec la personne avec qui il venait de rompre ? Il s'agita faiblement sur sa chaise. C'était vraiment une soirée de merde, quand même ! Tout ce qu'il trouva à faire fut d'essayer de sauver les meubles. Ok, c'était pas ouf en tant que couple mais en tant que potes ça avait été grave cool. « Eh, on reste amis ? » Dans le genre cliché pathétique, ça se posait là ! Achevez-le, s'il vous plaît.

— Moi aussi… C'était bien… À chaque fois.

Un sourire un peu éteint se refléta dans la surface fadasse de la soupe qui lui faisait face avant qu'il ne hoche à nouveau la tête, à la fois soulagé et désolé. C'était vraiment pas comme ça que ça aurait dû se passer. Ils auraient dû être heureux, tous les deux. Continuer à aller se bouffer des glaces à Pré-au-Lard en se bouffant surtout du regard, profiter des animations de l'école pour se retrouver au milieu d'un monde qui se fichait bien d'eux. Découvrir ce que c'était que l'amour, du haut de leur quinze ans, tâtonner, se foirer un peu, mais garder finalement des bons souvenirs lorsqu'il aurait été temps de passer à autre chose. Là, c'était juste brutal, rempli de désillusions, avec l'amertume des goûts d'échec. Tant pis, d'un côté, c'était trop tard maintenant... mais tout de même. Tout conscient qu'il était qu'autre chose l'attendait déjà plus ou moins, il aurait voulu que ça se passe autrement.

— On pourra r'faire des fois s'tu veux...

Une seconde de silence s'étira avant qu'il ne reprenne :

— ...'fin, sauf s'tu trouves c'trop bizarre quoi... T'me diras.

(c) jawn

DASHIELL
favourite flavoured sweets
raspberry amphetamines

(SELENE ☉ DASHIELL)
le hasard fait bien les choses

La gêne s'épaississait à chaque mot, brume visqueuse qui lui collait à la peau et la faisait frissonner, malgré le cardigan sur ses épaules, malgré les petits cœurs qui y étaient brodés. Étoiles rosées sur une toile beige qui brillaient vaillamment alors que son palpitant perdait ses dernières couleurs. La soupe à peine entamée, refroidie par le vent glacial de leurs silences répétés, fut remplacée par le plat principal, une pizza façonnée pour représenter l'amour et que le serpent entortillé dans son ventre eut soudainement envie de déchiqueter. Selene n'en fit rien, trop sage pour exploser, se contentant d'offrir à ses doigts le petit fil de sa jupe qui dépassait, sur lequel elle tira, observant d'un œil attristé la toute petite zone détricotée que personne ne verrait jamais comme elle elle la voyait : une déliquescence silencieuse qui n'était pas que celle de cette jupe. Elle avait essayé, pourtant, mais elle était incapable de faire sortir les mots tout droit, ils prenaient mille et uns tournants qui les déformaient complètement, tant et si bien que personne ne comprenait ce qu'elle voulait dire, au fond. Alors il ne lui restait plus qu'à abandonner, arrêter d'espérer des retrouvailles qui ne viendraient jamais, cesser de croire qu'elle goûterait un jour encore cette chaleur qui avait éclairé son automne. Du bout des lèvres, elle acquiesça au fait qu'ils ne pouvaient pas savoir, que Dashiell n'avait pas à être désolé, de rien, que c'était de sa faute et puis que la simple raison qu'elle ne s'entende pas trop avec ses parents n'avait pas à peser sur d'autres épaules que les siennes. Aucun mensonge là dedans, elle le pensait sincèrement ; simplement, elle était peut-être un peu déçue et attristée que personne ne s'en indigne comme elle l'aurait aimé. « Ah - » Juste ça et puis plus rien, parfaite conclusion à ses pensées entremêlées. Ah, et puis c'est tout. Ah, et puis on s'en fout.

Selene esquissa un sourire penaud et s'attaqua à la pâte croustillante, l'estomac tordu par bien des émotions qui lui coupaient la faim. Mais elle tenait à ne pas complètement gâcher la soirée de Dashiell, si tant est que ce soit encore possible, et de faire contre mauvaise fortune bon cœur, aussi découpa-t-elle celui de la pizza en deux et porta un petit bout à sa bouche, ignorant le goût de cendre de la garniture, machonnant ses ressentiments en même temps que le reste. « T'es pas pas capab' d'rien, juste t'peux pas faire limite cinq ans d'un coup. C'est normal aussi… » Sauf qu'elle n'avait pas vraiment le choix ou en tout cas qu'elle en craignait bien trop les conséquences. Et cette compassion bienveillante qui lui tordait un peu plus les entrailles, faisait remonter une bile acide qui supplantait même le goût de poussière. Ce n'était pas une question de pouvoir, c'était une question de devoir ; ce n'était pas un besoin de les entendre lui dire ça, c'était une envie profondément ancré d'avoir l'impression de compter, de se connaître des repères sur lesquels il était possible pour elle de s'échouer, quand ce qu'elle était obligée d'accomplir devenait un peu trop lourd ; ce n'étaient pas des mots creux et vides de sens qui lui feraient du bien, qui pourraient rattraper la glaçante impression de toujours être au second plan. « Et pis au pire du pire tu tej les trucs avec des sorts l'année prochaine genre. » Ça paraissait si simple, quand ça venait de lui. Ses doigts crispés abandonnèrent les couverts dans son assiette à peine entamée. « J'aurais pas le choix de toute façon, parti comme c'est… Mais je pense plutôt que je risque de redoubler. » Et elle était terrifiée de savoir quelle option serait la plus susceptible de réveiller sa colère, à peu près certaine qu'aucune ne rentrait dans ses exigences d'excellence. Brusquement, le besoin impérieux de se blottir contre Teddy l'enveloppa et lui coupa le souffle. C'était comme se noyer une nouvelle fois, sauf que cette fois-ci elle avait l'impression que la chaleur des caresses de la Poufsouffle étaient tout ce qui pourrait la ramener à la surface. Il n'y avait pas eu de mot creux avec elle, pas de fausses considérations, pas de solutions toutes faites qui ne marcheraient jamais, dans les faits. Juste une présence inconditionnelle et une compréhension qui se passait bien des moyens habituels. Sauf qu'elle n'était pas là mais assise à une autre table, répartie avec quelqu'un d'autre dans une blague qu'elle avait elle-même orchestrée.

Seule dans ce bourbier, Selene se décida au moins à faire quelque chose de bien. Dans un élan de courage dont elle ignorait tout, elle osa avouer ce qu'ils pensaient tous les deux, ce qui suintait des silences répétées, ce qui planait au-dessus de leurs têtes et menaçait de les blesser. Ce ne fut pas sans douleur malgré tout, alors que Dashiell répliquait qu'il n'aurait jamais dû lui demander de sortir avec lui, que c'était débile même s'il essaya de rattraper ce mot, ce qu'elle savait pertinnement, bien évidemment, mais ça faisait mal quand même. Affronter la réalité n'avait décidément rien de joyeux. Tout ce qu'elle voulait maintenant, c'était disparaître sous terre, s'effacer complètement et ne plus sentir cette tension gênée qui les enveloppait. Alors oui, c'était bien avant, quand ils étaient allés manger des glaces, qu'ils s'étaient promenés à Pré-au-Lard, qu'ils s'étaient embrassés dans la salle de cinéma, qu'ils avaient fait toutes ces petites choses soigneusement consignées dans ses carnets, mais ramener les souvenirs ne faisait qu'empirer le présent. Pourtant, elle acquiesça encore une fois, sincère dans ce qu'elle disait, quand bien même le chagrin était là, si lourd derrière ses yeux clairs, prêt à lui faire baisser les paupières. « On pourra r'faire des fois s'tu veux… ...'fin, sauf s'tu trouves c'trop bizarre quoi... T'me diras. » Selene croisa le regard chocolat qui lui donnait tellement confiance il y a quelques semaines de ça, sans trop savoir quoi répondre. D'un côté ces espoirs qui virevoltaient de joie à l'idée de prochaines fois, de l'autre ce cœur désillusionné qui n'y croyait plus et était trop fatigué pour essayer. Il fallait apprendre à se contenter de ce qu'on voulait bien lui donner, et tant pis si ça n'était qu'une prochaine fois qui ne se produirait peut-être jamais. « On fera ça ! » s'exclama-t-elle avec un entrain un peu feint, celui de quelqu'un qui n'arrivait plus trop à y croire mais qui ne pouvait quand même pas s'en empêcher. Qui sait ? Peut-être que ça arriverait vraiment, alors elle aurait été bête de simplement refuser. Dans le pire des cas, elle se dirait qu'elle le savait, comme c'était déjà souvent le cas. « Si toi tu trouves pas ça trop bizarre non plus, bien sûr », ajouta-t-elle en se forçant très fort pour ne pas mentionner Silas et ce que lui pourrait bien en penser. Là-dessus le silence revint, habitué des lieux désormais, troisième membre à leur table. « Est-ce que… Est-ce que pour ce soir tu m'en veux si je vais me coucher ? J'crois que j'ai mangé un truc pas frais ce midi parce que j'arrive rien à avaler », mentit-elle gentiment, ne précisant pas que c'était plutôt l'absence de repas qui lui retournait l'estomac et toute cette conversation qui l'avait épuisée. Elle voulait juste se retrouver toute seule, se glisser dans son lit et se couvrir la tête de sa couette pour disparaître, et peut-être pleurer un petit peu, juste pour évacuer le trop plein qui pesait si lourd.

ft @Dashiell Dashner

(c) SIAL ; icons sial

Le hasard fait bien les choses
surtout quand c'est dans son intérêt

ft. @Thomas Chastel, @Selene O. Paulet & Dashiell Dashner

Aux vacances pourries se rajoutaient des difficultés scolaires, assombrissant davantage une conversation qui l'était déjà bien trop. Est-ce qu'il pouvait faire quelque chose pour elle ? Il le lui avait déjà proposé, à la rentrée. Celle de septembre et lui la dernière aussi. Il ne pouvait pas prétendre être d'une utilité incroyable mais il était prêt à faire son possible si ça pouvait servir à quelque chose. Il n'était pas complètement con, il y avait deux trois matières dans lesquelles il s'en tirait pas trop mal... et puis il voulait bien casser les couilles du monde pour lui trouver des gens brillants s'il fallait. C'était dans ses cordes, ça ! Mais à chaque fois qu'il avait abordé l'idée, n'importe laquelle, il s'était plus ou moins fait rembarrer. « C'est pas tes oignons » qu'elle lui aurait sûrement répété encore... la violence, quand même. Il aurait voulu prétendre que ça ne l'avait pas atteint, parce qu'elle n'était même pas vraiment sa meuf, et que ça faisait des semaines qu'ils s'étaient pas adressés la parole... mais force était de constater que ça n'était pas le cas. Ils s'étaient assez bien entendus pour espérer, rien qu'une seconde, qu'il y ait eu plus entre eux que ce silence gênant. Visiblement pas. C'était ça les relations amoureuses alors ? Rien qui puisse compter en dehors des fins foireuses ? Putain... durant un instant, Dash se demanda si ce serait la même avec Silas, s'il se passait quelque chose... Oui, sûrement. D'autant plus qu'il s'était déjà passé quelque chose... genre... s'il arrêtait tout, maintenant, en mode « en vrai, c'est mieux si on reste potes », est-ce qu'il ne leur resterait surtout que cette dernière phrase comme souvenir des années passées ? Une angoisse nouvelle lui étreignit l'estomac. Dans quelle merde il s'était encore foutu ? Il ne voulait pas perdre son meilleur ami. Jamais. Il n'était pas certain d'y survivre une nouvelle fois. Est-ce que ça faisait pitié dit comme ça ? Un peu sûrement... mais bordel, qu'est-ce que c'était vrai ! Faisant fi des craintes naissantes, des regrets peut-être aussi, l'adolescent tâcha de la rassurer. Maladroitement, sans être sûr d'en avoir le droit. Il ne pouvait pas trop faire mieux sans avoir l'impression que ça soit assez.

— J'aurais pas le choix de toute façon, parti comme c'est… Mais je pense plutôt que je risque de redoubler.

Est-ce que c'était grave ? La question lui brûlait les lèvres. Il allait retaper, lui aussi, et ça n'avait pas l'air d'être le pire truc de l'univers. Enfin... il se ferait sûrement taper sur les doigts parce que c'était le rôle des parents de pas encourager les conneries mais ça n'allait pas ruiner le reste de sa vie. C'était qu'un an. Même Griffith l'avait admis, c'était pour dire !

— I' reste encore la moitié d'l'année, tenta-t-il plutôt, y'a rien qu'est fait encor' hein.

En vrai, il n'en savait pas grand chose. Si ça se trouvait, elle n'avait que des T partout et rien n'était rattrapable mais... est-ce que les profs n'auraient pas fait quelque chose ? Si elle se noyait à ce point, c'était leur taf de trouver des solutions, non ? Enfin... les profs, dans cette école... Ça lui faisait de la peine pour elle, quand même. Elle méritait pas ça, cette fille. Juste de finir sa scolarité tranquillement, elle en avait assez chié comme ça... Et puis, d'un coup, sans prévenir, elle rasa le peu qui tenait encore entre eux. Elle n'aurait jamais dû accepter de sortir avec lui. Même si c'était exactement la fin qu'il espérait, il ne put s'empêcher de sentir son ego piquer salement. Il n'avait pas fait les choses comme il fallait ? Il n'était pas assez bien pour elle ? Sûrement qu'elle avait fini par réaliser qu'ils jouaient pas franchement dans la même cour ou que ses copines s'étaient foutues de sa gueule... c'était grave possible. Il eut envie de se tasser sur sa chaise, de disparaître. Au lieu de quoi, il répliqua, sincèrement mais lamentablement. Ils étaient pas fait pour ça, tous les deux. Elle méritait mieux, là encore. Et lui... lui méritait sûrement le chemin foireux sur lequel il s'était bêtement lancé... Il croisait juste les doigts pour que ça fasse pas trop mal à l'arrivée. Enfin, peu importe. Ils pouvaient peut-être rester en bons termes, au moins, non ? S'adresser la parole sans être accompagnés de cette gêne palpable, ne pas avoir envie de changer de couloir en s'apercevant...?

— On fera ça !

Son entrain sonnait faux, le sourire que le Gryffondor afficha également. Teinté d'une tristesse trop vraie, néanmoins. Est-ce qu'il avait perdu une bonne copine pour un flirt débile ? Genre... vraiment ?

— Si toi tu trouves pas ça trop bizarre non plus, bien sûr.
— Nan t'inquiète, ahah.

Ahah... De toute façon, est-ce que ça pourrait être plus bizarre que ça, même ? Probablement pas. C'était la pire Saint-Valentin du monde... Il n'avait jamais été très attaché à la symbolique du machin – la preuve, il était prêt à y aller avec un pote pour lui tenir compagnie – mais... putain, sa première rupture ce jour-là ! À cause de celui qui pouvait prétendre à la place devenue vacante, en plus ! C'était n'importe quoi. Brutal. Étourdissant. Épuisant.

— Est-ce que… Est-ce que pour ce soir tu m'en veux si je vais me coucher ? J'crois que j'ai mangé un truc pas frais ce midi parce que j'arrive rien à avaler.

Dashiell secoua simplement la tête, son regard sombre se perdant un instant du côté de sa propre assiette restée intacte. Lui non plus n'arrivait pas à avaler grand chose... ce qui, quand on le connaissait, suffisait à allumer tous les signaux d'alarme du monde. Pire soirée, sérieusement. Il repoussa la porcelaine qui tinta contre son verre juste derrière et secoua à nouveau la tête.

— J'crois tu loupes pas grand chose, ça a l'air un peu dégueu'.

Il était censé faire quoi, là ? La laisser se barrer et croiser les doigts pour que Thomas soit abandonné aussi pour finir la soirée comme ils avaient prévu de la passer...? Jouer les gamins bien élevés, même si elle venait de la larguer sale...? Dans d'autres circonstances, il en aurait sûrement profité pour rejoindre Silas mais là... il n'était même pas certain d'avoir envie de le voir. Pas après ce coup de pute ! Un soupir manqua de passer ses lèvres mais il le retint de justesse et finit par hausser les épaules, plus pour lui qu'autre chose.

— Tu... t'veux qu'j'te raccompagne...? à Serd' ou à l'infirmerie...?

C'était plus par politesse que par réelle envie, éclairé de l'espoir ridicule qu'elle refuse. Se donner bonne conscience, essayer de se rattraper mais sans avoir à trop se mouiller pour autant... mais non, bien sûr, elle était bien élevée aussi, Selene, alors... elle accepta, évidemment. Dash resta con, coincé entre l'envie de ricaner face à cette situation qui n'avait vraiment aucun sens et le désespoir le plus total. Et bien... il fallait la raccompagner, maintenant... Il se releva d'un geste trop brusque, sa chaise se renversa dans un bruit d'enfer. Il lança un regard désolé à sa camarade avant de la ramasser en rougissant bêtement. En vrai, c'était sûrement mieux comme ça : plus vite ce serait fini, plus vite il pourrait aller se coucher et oublier jusqu'à l'existence de ce fiasco.

— Bon... bah... vas-y... j'te suis...

Et bonne Saint-Valentin, surtout...

(c) jawn

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