Le long gémissement désespéré qui s'éleva des canalisations des toilettes des filles lui arracha un soupir qui l'était au moins tout autant, désespéré. L'année avait à peine commencé que, déjà, Mimi passait sa vie à pleurnicher parce que le monde entier était méchant avec elle, que la vie était injuste et que personne ne l'aimait... Ce qui était passablement faux, sauf peut-être pour l'injustice de la vie – de la mort, des deux, qu'importe... Parce qu'il n'avait pas l'impression d'être particulièrement méchant avec elle, seulement taquin parfois, mais sa susceptibilité rendait la chose parfois chaotique, et il n'avait jamais caché l'affection sincère qu'il avait fini par lui porter au fil des ans... Après tout, même si de son vivant il avait fait partie de ces gamins idiots à l'insulter en ricanant parce que tout le monde le faisait, il avait fini par voir en elle une véritable amie, une alliée de choix dans l'éternité qui les attendait. Ils étaient dans le même bateau, désormais. Mais aujourd'hui, il n'était pas d'humeur à supporter  ses jérémiades. C'était l'un de ces jours où cette demi-existence était lourde à porter, où l'inutilité des heures qui s'échappaient lui filait la nausée. D'ordinaire, il se réfugiait sous les combles qu'il avait désigné comme étant sa chambre, mais aujourd'hui, la solitude ne l'attirait même pas. Il voulait tout et rien à la fois, côtoyer les vivants et les fuir à tout jamais, plaisanter comme il le faisait d'habitude et s'apitoyer sur son triste sort... Et s'il aurait pu tout ça auprès de la jeune défunte, il n'avait pas le cœur à remonter le moral de qui que ce soit alors que le sien semblait avoir définitivement passé l'arme à gauche.

Alors tant pis, Adrian se décida à abandonner les couloirs froids et agités du château pour rejoindre le terrain, espérant un peu bêtement qu'Edgar Cloggs serait en train de s'y entraîner. C'était toujours agréable de faire quelques passes avec lui. Il ne parlait jamais, sinon pour commenter ses réceptions ou lui donner des conseils pour augmenter sa précision ; il ne posait jamais de questions et ne semblait pas attendre qu'on s'intéresse à autre chose qu'au souafle fantomatique qu'il gardait constamment sous le bras. On disait qu'il était mort avec et qu'il l'accompagnait depuis dans le moindre de ses déplacements... Il aurait bien aimé mourir avec de quoi s'occuper, lui aussi... En dehors de ça, il ne lui restait qu'une tablette de chewing-gum et un paquet de cigarettes à moitié écrabouillé – par l’atterrissage, probablement. Mais au lieu de son aîné translucide, ce fut une silhouette en chair et en os qui s'entraînait sur le terrain. Durant une seconde, l'adolescent hésita à faire demi-tour pour aller ruminer dans son coin... mais l'air frais lui faisait du bien, le soleil également... Il pouvait simplement occuper l'autre partie de la pelouse et aller jouer entre les anneaux. Mais avant qu'il n'ait eu le temps de s'approcher de l'élève, dont il ne distinguait qu'une tignasse rousse de là où il était, pour lui demander si ça la dérangeait, elle se mit à brailler :

— Attention ! Écarte-toi !

Il ne comprit qu'une seconde plus tard lorsqu'un cognard sorti de nulle part le traversa littéralement. Un frisson désagréable le parcourut alors qu'il retenait à grand peine une grimace. Non mais franchement, quel accueil ! Ça valait le coup d'avoir quitté la tranquillité de ses combles ! Il croisa les bras d'un air boudeur alors que la jeune fille s'approchait, visiblement surprise.

— Quand on sait pas maîtriser les cognards, on les laisse dans la boîte, sérieux...

En fait, peut-être que Mimi n'avait pas si tort que ça, dans le fond... La vie était injuste, la mort aussi, et les élèves n'étaient que des imbéciles sans cœur qui n'avaient aucune considération pour eux.

Il y avait des accueils dont on se passerait bien... et se faire traverser par un cognard avant même d'avoir eu le temps de dire bonjour en faisait évidemment partie. Adrian ne put s'empêcher de râler en se demandant pourquoi il avait eu la bêtise de quitter le château. D'ordinaire, il passait ses moments de déprime à broyer du noir sous les combles de la tour de Divination – sa chambre – en regardant son crapaud fantôme essayer de gober des mouches qui avaient le malheur d'être encore en vie. Mais non, évidemment, il avait fallu qu'il aille prendre l'air, qu'il s'aventure en terrain miné ! Tout le monde savait que les vivants se fichaient bien des morts et que seul leur plaisir perso comptait ! Cette première approche ne faisait que le confirmer... Pourtant, la fille ne perdit pas de temps et rangea le cognard dans la boîte, l'air visiblement désolé. L'adolescent lâcha un soupir à fendre l'âme. Bon... ok... peut-être que ça n'était pas si grave que ça...

— Je suis désolée. J’avais demandé des Cognards à la magie plus soft, mais je crois qu’on m’a trompée.

Le fantôme leva les yeux au ciel en l'entendant. Un cognard, c'était un cognard... Il n'y avait que les enfants pour avoir des versions moins dangereuses ! Et, de toute évidence, elle n'était pas une enfant. Elle avait quoi... quatorze ou quinze ans ? Il ne se souvenait pas l'avoir vue dans la classe de sa sœur. La seule rouquine qu'il y apercevait souvent – depuis la mort de la Gryffondor – c'était Lilith. Donc... elle devait être en quatrième ou en sixième année, quelque chose comme ça... ou en troisième peut-être parce qu'à bien y regarder elle faisait un peu gamine pour une fille de seize ans.

— Je vais peut-être être titulaire pour le poste de batteuse de l’équipe de Poufsouffle et je voulais m’entraîner un peu.
— Ouais bah y'a du boulot, répliqua-t-il d'un ton boudeur.

Quel peut-être batteur titulaire voulait jouer avec des cognards moins brutaux ? Jamais Fife ne se serait abaissé à ça ! Des vrais ou rien du tout ! La base quoi ! C'est comme si les attrapeurs s'entraînaient avec des vifs d'or ralentis... aucun intérêt ! Et il savait de quoi il parlait ! Bon, d'accord, il n'avait pas eu le temps de montrer toute l'étendue de son talent puisqu'il avait été attrapeur qu'une seule vraie année... la deuxième, les matchs étaient bizarres là, officiellement interdits puisque les nés-moldus n'avaient pas eu le droit de jouer... Tout le monde s'était débrouillé pour les faire en intérieur, dans les salles magiques du château. Mieux que rien, certes, mais pas l'idéal pour autant.

— Tu as eu mal ?
— ...mal ?

Elle était surprenante, cette fille. Comment est-ce qu'il pourrait avoir eu mal ? Ça l'avait juste traversé. C'était désagréable, vraiment, et un peu humiliant aussi – surtout humiliant – mais pas douloureux. L'ego prenait, le reste, ça allait.

— Je ne sais pas grand-chose sur les fantômes, mais j’espère sincèrement que ça ira.

Elle avait l'air sérieuse, pour le coup... et dire qu'à son âge – ou du moins, avant sa mort – il était du genre à balancer des trucs sur les fantômes de l'école comme on jouerait aux fléchettes. Dix points si la boulette de parchemin traversait une épaule, cinquante si ça finissait entre les deux yeux... C'était stupide mais, à l'époque, il n'y voyait pas vraiment le mal. Maintenant... c'était une autre histoire. Et celui qui s'amuserait à ça avec lui risquait de passer de très mauvaises nuits.

— Ouais, c'est bon, je m'en remettrai.

Même pas un bleu, même pas une égratignure... de toute façon, il n'était plus en état d'en avoir. Ça lui manquait, parfois... Ces moments débiles où on appuyait sur un bleu juste pour voir si ça faisait bien mal, ou qu'on comparait ses blessures de guerre après un match... Il s'était rendu compte un peu tard que ça ne l'en avait rendu que plus vivant encore. Ils ne se rendaient pas compte de la chance qu'ils avaient, tous autant qu'ils étaient !

— Je ne sais pas si on peut soigner les fantômes d’une certaine façon.

Adrian ne put retenir un ricanement un peu moqueur. Sérieusement ? Soigner les fantômes ? Mais le soigner de quoi ? Ils n'étaient pas malades, ils étaient morts ! Et les seules plaies qu'ils avaient, elles étaient psychologiques ! Au mieux, il faudrait un psy mais il n'était pas certain que ça soit particulièrement utile pour autant. Les résultats seraient temporaires, il y aurait bien un moment où l'éternité qui les attendait finirait par reprendre le dessus.

— Il faudrait que je demande à Maman. Nous sommes guérisseuses dans la famille, je sais certaines choses, mais pas ça. Enfin en dehors du philtre de Mandragore, mais dans le cas présent, je ne sais pas si ça serait utile à quoi que ce soit.

Ah bah y'avait des chances que ça le soit pas, en effet. Est-ce qu'il avait l'air pétrifié ? Pas à sa connaissance.

— Un conseil : si tu veux pas devenir la honte de la famille, évite de lui poser la question.

On pouvait pas vraiment avoir passé des années à vivre auprès des morts et y avoir fait si peu attention, tout de même, c'était gênant ! Il n'y connaissait pas grand chose en guérisseur et compagnie mais ils devaient pas être à l'écoute du monde dans lequel ils vivaient, des trucs comme ça ? Pour pouvoir aider les autres et utiliser ce qu'ils avaient à porter de main...? Ou alors il se plantait totalement, c'était possible aussi.

— Je m’appelle Kathleen, au fait, Kathleen Kirte. Et toi ?
— Adrian Leonhart, se présenta-t-il à son tour, esquissant le début d'un geste pour lui tendre la main avant de réaliser que c'était stupide et de l'enfoncer dans sa poche, plutôt. Je suis le frère de Murphy, tu sais, la préfète de Serpentard.

Est-ce que c'était de la fierté qui pointait dans sa voix à ses derniers mots ? Oui, totalement.

— C'est bien pour ça que je m’entraîne. On m'a toujours nommée comme poursuiveuse jusqu'à maintenant, enfin les matches où j'ai pu jouer. J’ai envie de réussir au poste de batteuse, mais Poudlard ne s'est pas bâti en un jour.

Bon... d'accord... peut-être qu'elle marquait un point. Mais pourquoi est-ce qu'elle avait changé de poste, aussi ? Elle pouvait pas continuer à être poursuiveuse pour éviter de viser des innocents, là ? Et puis, plus sérieusement, avec son gabarit, elle serait plus crédible dans ce rôle-là... ou en attrapeuse, à la limite. Après, Erin Sørensen n'avait rien eu d'une bodybuildeuse et elle avait géré... Mais bon, elle, elle était tarée, ça comptait même pas. Celle-là, là, elle avait l'air un peu nulle mais pas bonne à foutre à l'asile.

— Et ça te plaît comme poste, au moins ?

Parce qu'il y avait des gens qui prenaient n'importe quoi seulement pour faire partie de l'équipe ou boucher des trous alors peut-être qu'elle...? Qui savait ? Et puis finalement, au milieu des excuses, elle glissa quelques inquiétudes, laissant flotter au-dessus du fantôme comme un nuage de culpabilité. Peut-être qu'il avait été un peu trop désagréable pour la faute commise... Peut-être que c'était pas si dramatique que ça... et puis elle l'avait pas fait exprès... Ok, c'était pas ouf, ok, ça faisait pas plaisir, ok, c'était pas le jour... mais bon... Il fallait relativiser aussi. Ce qu'il commença péniblement à faire...

— Oh, je ne lui demanderai pas pour le philtre de mandragore, mais je lui poserai la question pour savoir s'il y a d'autres choses qui sont applicables sur les fantômes. C’est intéressant je pense. Je ne connais pas encore tous les trucs et les secrets de ma famille, mais je suis persuadée qu'il y a des sujets comme ça qui font partie de ce que ma mère évoquera un jour.

En cinq ans de mort, il avait jamais entendu quelqu'un s'intéresser à une pseudo-médecine pour fantôme... et pour cause puisqu'ils ne pouvaient pas se blesser, ni être malades, ni risquer la mort... Nicholas se vantait bien, parfois, d'avoir été pétrifié de sa mort, et on l'apprenait dans les bouquins d'Histoire, aussi, tellement c'était rare, mais c'était la seule chose connue du genre. Est-ce que ça servait vraiment à faire des recherches là-dessus ? Il en était pas convaincu. Au pire, si jamais un autre esprit se faisait pétrifier par un Basilic un jour, ils sauraient quoi faire, c'était sûrement l'essentiel.

— Le plus important, c'est que tu n'aies rien de mal.
— C'est sympa, concéda-t-il finalement.

Ce fut seulement là-dessus que les présentations se firent enfin. Et c'était définitif, il n'y avait pas de « Kathleen » dans la classe de sa sœur. Donc elle était soit un peu plus grande soit un peu plus petite. Mais bon, c'était sûrement sans importance.

— Enchantée. Ça doit être sacrément chouette d'avoir une préfète dans la famille.

Adrian hocha la tête, sans grand sérieux cependant. Bien sûr qu'il était fier de sa frangine ! Une préfète dans la famille, c'était incroyable ! Il n'aurait pas parié une Noise sur elle pourtant ! Comme quoi... Il aurait tellement aimé être à la maison pour pouvoir fêter ça avec elle et leurs parents quand elle l'avait appris ! Si seulement ses parents n'étaient pas convaincus qu'il était bel et bien mort et que la seule chose qui restait de lui, c'était un cadavre dans un cercueil... Il retint un soupir désespéré.

— Surtout quand elle peut plus rien contre toi, ouais.

Il haussa finalement les épaules et jeta un œil au matériel abandonné un peu plus loin. Son attention revint sur la Poufsouffle et, si l'hésitation fut palpable durant une seconde, il finit par croiser les bras d'un air expert.

— Je veux bien te servir de cible. T'es nulle et je risque rien. Mieux vaut que je prenne avant les entraînements avec ton équipe, sinon tu vas les décimer vu comment c'est parti.

S'il n'avait pas eu l'occasion de faire partie de l'équipe de Serpentard pendant très longtemps – deux ans seulement dont une qui ne comptait même pas puisque les matchs avaient été tout ce qu'il y avait de plus clandestins et approximatifs – Adrian s'était assez intéressé au Quidditch durant toute sa scolarité, et même après, pour savoir qu'on faisait parfois ce qu'on pouvait plus que ce qu'on voulait... comme prendre un poste qui ne nous intéressait pas trop juste parce que c'était mieux que rien. Il semblait que les nouvelles générations se désintéressaient du sport, aussi... C'était à se demander ce qu'ils faisaient de leur temps libre ! ...de la lecture...? Rien que d'y penser, ça lui donnait envie de ricaner. Un vrai truc de tête d'ampoule, ça ! Enfin, toujours était-il qu'il n'aurait pas été étonné d'apprendre que c'était son cas... Mais non.

— Non, c’est ce que j’ai envie d’être depuis deux ans. J’adore taper dans les Cognards, mais j’arrive pas bien à viser pour le moment.

L'adolescent se retint de lâcher un « ça j'ai remarqué, ouais » assez vexant. Il avait été suffisamment vache avec elle et puis, elle avait fait amende honorable, c'était bon, autant passer à autre chose... C'est dommage, elle était tombée au mauvais moment... Normalement, il l'aurait pas forcément bien pris mais ne l'aurait pas nécessairement mal pris pour autant. Il fallait être réaliste : c'était désagréable, rien de plus, un peu comme on se reprendrait un courant d'air en passant entre deux portes, ça n'avait jamais tué personne... encore moins quelqu'un de déjà mort ! Alors il finit par abandonner son agacement et voir l'intérêt que sa condition pouvait avoir dans cette situation. Après tout, qu'elle vise bien ou mal, elle pouvait pas faire de dégâts avec lui... alors que si elle attendait d'être avec des vivants pour s'entraîner, ça pouvait être plus chiant. Elle devait apprendre, elle l'avait dit elle-même... alors il lui proposa finalement de lui servir de cible mouvante. Comme dans un vrai match, quand elle devrait viser des joueurs en mouvement. Mais là encore, sa réaction n'eut rien à voir avec ce à quoi il s'attendait :

— Je vais pas te tirer dessus. Ce ne serait pas… bien. Même si tu sens rien, c’est pas respectueux pour toi de te lancer des Cognards. Je sais que c’est ce qui s’est passé mais c’était un accident. Non, si tu m’aides, ce sera plus pour que je te protège du Cognard, ça c’est plus respectueux.
— Pas bien de quoi...? …je suis d'accord, rappela-t-il au passage.

Est-ce qu'elle comptait ne pas viser les autres joueurs parce que c'était pas bien...? Non parce que sérieux, autant qu'elle change de poste tout de suite si c'était le cas ! Si son seul but était de taper dans des balles, autant qu'elle se mette au baseball, ce serait plus tranquille !

— J'ai été attrapeur de Serpentard dans une autre vie, tu sais ? Des cognards je m'en suis bouffé un paquet. C'est dingue comme c'est toujours pour notre tronche en premier limite.

Mais c'était le bon temps... Finir à l'infirmerie avec un truc cassé mais s'inquiéter plus d'une défait ou ne parler que d'une victoire, c'était la base. Il aurait donné cher, n'importe quoi, même, pour pouvoir revivre ça rien qu'une fois.

— Mais comme tu veux, écoute, je te force à rien. Je trouve juste ça dommage parce que la moitié de ton job, c'est quand même de dégommer des gens.

Après, si elle préférait jouer les gardes du corps... libre à elle.

Bon, objectivement, cette conversation n'avait pas beaucoup de sens. Qui faisait forcing pour se faire frapper par un cognard, hein ? Mais il fallait remettre les choses en contexte, aussi : lui ne risquait rien. Dans le pire des cas, le cognard le traverserait, ce serait désagréable, et puis ça s'arrêterait là... Il pouvait bien faire un effort, un tout petit effort, pour aider une gamine à s'entraîner. Parce que si elle se plantait en plein match comme elle l'avait fait avec lui à son arrivée, elle risquait de devenir la risée de toute l'école en moins de deux et la tête de turc de son équipe. Et même si elle n'avait pas l'air particulièrement douée, elle ne méritait pas de subir une quelconque humiliation pour ça. Sûrement qu'elle finit par le comprendre, elle aussi, parce que là où elle s'était opposée fermement à l'idée, son discours vint à changer :

— C’est vrai, tu as raison.

Le sourire qui étira les lèvres du fantôme claironnait un « ouaiiis, je sais » d'une prétention enfantine.

— C’est bête, je pense tellement à bien faire que c’est pas logique, du coup.

Un haussement d'épaules lui échappa presque malgré lui. Il était prêt à admettre que, peut-être –b et rien que peut-être ! – la manière dont il avait réagi avait pu la refroidir et lui faire craindre d'accepter sa proposition. Que, peut-être, dans d'autres circonstances elle aurait fait preuve d'un chouïa plus de bon sens... Il ne la connaissait pas, et rien ne lui disait qu'elle n'aurait pas réagi comme ça n'importe quand avec n'importe qui mais bon... il était prêt à lui laisser le bénéfice du doute. La môme s'arma à nouveau de sa batte et s'apprêta à reprendre son entraînement. C'était stupide parce qu'il ne lui devait rien, et que s'il avait dû filer un coup de main à quelqu'un, ça aurait été à sa frangine qui avait récupéré le poste qu'il avait lui-même occupé au sein de l'équipe de Serpentard... Mais bon, il avait l'impression de faire un truc bien et, mine de rien, cette rencontre malvenue avait réussi à dissiper sa humeur morose. Ou, en tout cas, à le faire penser à autre chose.

— Merci de m‘aider à m’améliorer, je vais faire de mon mieux.
— Vas-y, lâche ton cognard !

Adrian ne traîna pas davantage et s'échappa, prêt à essayer d'esquiver autant que possible. Ça lui rappelait des bons souvenirs, de ceux de ces matchs oubliés où il avait encore un rôle à jouer, des espoirs, des ambitions. Quand la vie lui tendait les bras, qu'il pouvait se projeter. Ah ! C'est qu'il y avait cru à cette carrière professionnelle qu'il s'imaginait ! C'est qu'il en avait rêvé, de cette équipe grandiose qui n'attendait que lui ! Il n'avait jamais su laquelle, ni où, ni comment, mais il n'avait jamais douté que ça arriverait un jour ! Combien de fois avaient-ils disséqués Balais Magazine, Fife et lui, en comparant leurs qualités respectives à celles qu'on prêtait à tous ces grands noms du Quidditch ?! Et puis sans prévenir, une sensation désagréable le prit tout entier et il ne put que voir le cognard qui, après l'avoir traversé, continuait sa route droit devant lui. Il se retourna vers la Poufsouffle et leva les deux pouces en guise de félicitations.

— Mortel ! Tu veux réessayer ? Je passe au-dessus des gradins et t'évites d'envoyer la balle dans les sièges ?

Si elle pouvait continuer son job sans faire des fautes susceptibles de pénaliser son équipe, après tout... non ?