Le prix de l’attention

Depuis son arrivée à Poudlard, Jasper avait vu son quotidien bouleversé. Habitué de l’école par correspondance, il n’était pas accoutumé au fait d’avoir des camarades et  encore moins d’être dans un dortoir avec des inconnus. Le confort de sa maison entouré de ses parents et de sa sœur était bien loin. Habitué à une vie solitaire au sein de la maison familiale, il l’était resté tout autant depuis son arrivée à Poudlard. Ce n'étaient pas les gamins moldus qu’il avait fréquenté lors de leurs sorties au parc qui lui avaient donné envie de se sociabiliser. Bien au contraire, leur propension à les harceler Opal, Emerald et lui avait contribué à le renfermer et ne pas avoir envie de s’ouvrir aux autres. La seule personne à qui il avait réussi à s’ouvrir un minimum depuis son arrivée à Poudlard était Gwendolyn. Une serpentard d’un an son aîné avec qui il avait travaillé pour remettre l’école en état alors qu’il n’avait effectué qu’une année à Poudlard. Un an plus tard, il se retrouvait de nouveau en équipe avec la jeune fille pour les cours d’étude de runes. Le temps passé ensemble aidant, Jasper avait fini par s’ouvrir à elle.

Ce n’était pas du tout le cas avec Blaze, leur préfet depuis le début de cette rentrée scolaire. Déjà, dès son arrivée parmi les Serdaigle avec ses autres camarades de promotion, leur aîné avait commencé à se vanter de diverses choses, raconter ses exploits, etc. Si les autres avaient été directement happés par le charisme de l’adolescent, cela n’avait pas été le cas de Jasper. Il préférait lire des livres racontant de réels exploits accomplis en dehors de l’école, face à un réel danger, ou même lire des genres plus divers et pas nécessairement liés à leurs études tels que de la science-fiction.

Quand le jeune Bellingham avait appris que ce serait Blaze leur préfet pour cette nouvelle aîné, il avait été exaspéré par la nouvelle. Il allait pouvoir se mettre encore plus en avant et être admiré par les plus jeunes. Tant mieux si cela fonctionnait avec eux, mais Jasper ne lui donnerait pas cette attention qu’il cherche, peu importe son statut. Bien entendu, il le respecterai en tant que préfet mais cela s’arrêterai là.
Cela s’était même avéré pire que cela après le bizutage qu’il leur avait fait subir en début d’année. Devoir déambuler dans la forêt interdite en sous-vêtements, qui pouvait avoir des idées aussi cruelles et absurdes. Depuis cet événement, il ne pouvait pas s’empêcher de haïr son aîné. Déjà qu’il ne lui adressait pas tellement la parole, c’était encore pire depuis cette soirée-là. Il ne s’attendait pas à ce que Blaze recommence ses idioties avec lui pour unique cible.

Peu de temps après le déjeuner, il se rendait aux toilettes pour prendre ses précautions avant les cours de l’après-midi. Le garçon ne s’était pas rendu compte qu’il était suivi et ne s’était pas posé de questions en s’enfermant dans le cabinet.
Lorsqu’il tenta d’ouvrir la porte, il ne comprit pas tout de suite pourquoi elle ne s’ouvrait pas. Aussi, il forçait sur la poignée pour tirer dans tous les sens la porte. Il n’y avait rien à faire, elle ne bougeait pas d’un millimètre. Se disant qu’il était victime d’une farce, peut-être de la part d’un fantôme, il sortit sa baguette et incanta la formule la plus classique pour ouvrir une porte.

“Alohomora.”

Evidemment, ce fut sans aucun effet. De nouveau il tirait sur la poignée dans tous les sens en espérant que la porte finisse par bouger. Après quelques minutes d’efforts, il pointa de nouveau sa baguette sur la porte. Jasper passait en revue les sortilèges qu’il connaissait pour se libérer du piège dans lequel il se trouvait. Il pouvait enflammer la porte et attendre qu’elle se consume, mais il risquait à la fois de se blesser avec les flammes et de fortes sanctions. Il pouvait utiliser Ventus, mais le vent serait-il plus puissant que lui pour ouvrir la porte ? Il n’en était pas persuadé. L’idéal pour ne pas faire trop de dégâts était de rétrécir la porte, et il n’aura qu’à annuler son sortilège après être passé.

“Reducio !” incantait-il avec force.

Effets de Reducio:

Le prix de l’attention

Dès le départ, c'était son plan de remettre en ordre les dégâts qu’il avait causés. Un simple sortilège d’annulation suffirait à rendre à la porte sa taille normale, le plus délicat serait de la remettre dans ses gonds, ce n’était pas avec son gabarit qu’il réussirait à le faire sans magie. Et réussir à la replacer parfaitement risquait d’être une autre paire de manches. Jasper voyait déjà les gouttes de sueur perlait sur son front à l’idée de s’évertuer à remettre la porte en place.

Alors qu’il enjambait la porte pour sortir des toilettes il entendait le bruit d’un robinet se fermant, et de l’eau coulant dans le lavabo. “Punaise, il y avait quelqu’un et je n’avais pas entendu.” s’était-il dit. Son horreur fut complète en découvrant de qui il s’agissait : le préfet des Serdaigle, Blaze. Bon sang, c’était bien sa veine, il était dans de beaux draps maintenant. Vu leurs relations, il ne le croirait jamais s’il lui disait que la porte refusait de s’ouvrir et qu’il n’avait pas eu le choix que de procéder de cette manière pour sortir. Les remarques du préfet ne tardèrent pas à l’accabler. Le garçon baissait la tête en serrant les dents, laissant son aîné le sermoner.

“La porte était coincée ! Je n’arrivais pas à l’ouvrir. Et puis qu’est-ce que tu fiches ici d’abord ? Tu peux pas aller chez les préfets comme les autres ?” Rétorquait-il à son aîné, encore irrité par ce qui venait de se produire et de s’être fait surprendre.

A tous les coups Blaze allait le rapporter à qui de droit et Jasper allait soit écoper d’une retenue, soit être rétrograder, peut-être même les deux.

“J’avais bien l’intention de réparer ça, je n’ai pas besoin de toi pour me faire des leçons de morale. Et puis, qu’en as-tu à faire de la condition des elfes toi ?”

Vu le narcissisme de Blaze, cela étonnait fortement le plus jeune qu’il se soucie des conditions de travail des elfes de maison. Sans même penser à eux, il était évident pour le jeune brun qu’il devait réparer cela, cela coulait de source. Tournant le dos à son aîné, il pointait sa baguette sur la porte et prononçait la formule magique.

“Finite Incantatem.”

1/2 : le sort est sans effets et Jasper se trouve désespéré face à son aîné. Il commence à se sentir vraiment mal et à ressentir de la honte face à son échec.

3/4/5/6 : la porte reprend sa taille normale, prête à être replacée dans ses gonds. Jasper, fier de lui, enchaînait avec “Wingardium Leviosa” pour commencer à replacer la porte.

1 : c’est un échec complet, après avoir monté la porte d’un mètre au-dessus du sol, elle retombait lourdement sur le sol, s’endommageant fortement sur le bas.
2/3/4/5 : la porte se levait sans difficulté, seulement il était évident que Jasper n’avait aucune idée de comment on replace une porte dans ses gonds. Cela prend plusieurs minutes mais la porte finit par retrouver sa position initiale. Il se retourne fièrement vers le préfet et reprend la parole.
6 : Jasper s’y prend merveilleusement bien, la porte se déplace gracieusement dans les airs et va se déposer directement dans ses gonds. Le jeune sorcier se retourner fièrement vers le préfet

“Tu vois, tout était prévu.” disait-il fièrement.

Le prix de l’attention

Si Jasper était définitivement quelqu’un de solitaire et renfermé, il n’était pas spécialement timide et savait parler et répondre quand il le fallait. Tout ce qu’il ne voulait pas était de se retrouver sur le devant de la scène, le centre d’attention. Ici au milieu des toilettes masculines, il ne risquait pas vraiment d’attirer l’attention sur lui, pour l’instant il n’y avait qu’eux dans la pièce. Peu de risques également de voir débarquer un professeur dans cette pièce. A la limite le plus grand problème auquel il devrait faire face ce serait soit qu’un membre de la brigade débarque ou bien qu’un attroupement d’élèves se fasse pour observer le préfet enguirlander son élève.

“Puisque je te dis que la porte était coincée ! Tu crois que cela m’amuse de rétrécir des portes ? Je ne suis pas comme toi à me vanter de tout et n’importe quoi, tu serais capable de te vanter de battre un première année en duel.” Rétorquait-il à son aîné, toujours sous le coup de l’énervement.

Avoir Blaze qui lui parlait pendant qu’il remettait la porte en place n’était pas la meilleure des manières pour se concentrer. La mâchoire fermement serrée, on pouvait lire l’énervement sur le visage du jeune Serdaigle, le tout mêlé à l’effort fourni pour réparer le cabinet. Sa leçon de morale le faisait bien rire, à ses yeux c’était plutôt Blaze qui se fichait complètement de la condition des petits êtres.

“Qu’est-ce que je suis en train de faire là d’après toi ?!” Demandait-il en haussant le ton.
“C’est peut-être toi qui as coincé la porte pour pouvoir m’engueuler après ? Tu as l’air d’y prendre un malin plaisir à tout ça.”

Le sourire en coin de Blaze pouvait se deviner sur ses lèvres, cela n’étonnerai même pas le plus jeune que ce soit lui qui soit la cause de tout cela. Il y avait une forte ressemblance avec ses manières de faire, lui qui avait organisé un bizutage humiliant dès le début d’année.
Après s’être retourné le garçon rangeait sa baguette à l’endroit approprié dans sa robe de sorcier et soutenait le regard du plus vieux. Son regard était clairement méprisant à l’égard de Blaze, démontrant tout ce qu’il ressentait pour lui.

“Tu croyais quoi ? Que j’allais me planter pour pouvoir me coller en retenue ? Raté. Je te laisse aller passer tes nerfs sur des plus jeunes, cela sera plus à ta hauteur.” Terminait-il avec froideur, commençant à marcher en direction de la sortie.

Le prix de l’attention

Le sourire arboré par Blaze face à lui avait le don d’agacer Jasper et d’accélérer sa perte de patience. Son air suffisant insupportable n’aidait pas le jeune Serdaigle à conserver son calme pour prendre la situation avec calme et raison. Malgré les risques de sanctions, il avait perdu toute rationalité. S’en tenir aux faits ? Bon sang, c’étaient les faits que lui racontait Jasper, cette fichue porte était complètement bloquée et il ne pouvait rien faire. Et puis quel était le problème ? La porte était remise en place et il n’y avait plus aucune trace du problème.

“Tu veux juste chercher des problèmes où il n’y en a pas pour asseoir ta pseudo autorité de Préfet. C’était tellement mieux avec tes prédécesseurs. Le dortoir s’en portait à merveille.” Lançait-il sur un ton toujours plus froid, laissant paraître son énervement.

Descendre d’un ton alors qu’il était victime d’une parfaite injustice ?  C’était tout bonnement impossible pour lui qui a horreur de cela. Ca pour ne pas être son ami, c’était certain et il ne le serait jamais, Jasper ne pourrait jamais supporter le caractère de son aîné. Il était déjà trop tard pour que Jasper se calme, même si cet appel à l’apaisement l'aidait à prendre le temps de réfléchir à ce qu'il allait rétorquer à son aîné. Un long soupir mêlé d’un “pff” sortait de la bouche du plus jeune avant qu’il ne reprenne la parole.

“Oui, veuillez m’excuser Ô grand préfet de Serdaigle.” rétorquait-il ironiquement.

Le fait que Blaze l’accuse de mentir alors qu’il n’avait absolument rien affirmé mais simplement fait une supposition suffisait à le remettre en rogne. Tout cette situation était du grand n’importe quoi aux yeux du jeune sorcier. Autant de pouvoir entre les mains d’idiots comme celui en face de lui l’irritait. Le choix de préfets avait été fait n’importe comment cette année à Poudlard, comme beaucoup d’autres choses d’ailleurs.

“Je n’ai fait que suggérer quelque chose, je ne t’ai pas accusé.”

Alors qu’il allait passer devant son aîné pour rejoindre la porte et mettre un terme à cette histoire ridicule, celui-ci lui donnait l’ordre de ne plus bouger en quelque sorte. Évidemment, il n’allait pas échapper à la punition qui viendrait mettre la cerise sur le gâteau de cette aventure.

“Eh bien qu’est-ce que tu attends ? Tu veux me mettre en retenue ? Vas-y et ne me fais pas perdre mon temps, mes livres et mes devoirs m’attendent. A côté d’eux tu n’as vraiment aucune importance à mes yeux.”

Invoquer un elfe ? Puis quand encore ? Il voulait qu’il aille faire la cuisine avec eux et récure les toilettes de tout Poudlard aussi ? Même si Jasper avait énormément de respect pour les petites créatures, c'était vraiment la punition la plus ridicule de toute l’histoire de Poudlard.

"Si ce n'est que ça et bien vas-y et sans tarder. Je préférerai même aller directement les rejoindre aux cuisines, au moins cela leur économisera le déplacement, puisque tu sembles tant tenir à leurs conditions."

Pourquoi l'invoquer alors qu'ils pouvaient se déplacer ? Cela allait totalement à l'encontre du fait de considérer les elfes comme leurs égaux. S'ils les considéraient ainsi alors c'était à eux de faire le déplacement, pas l'inverse.

Le prix de l’attention

L’injustice que lui faisait subir Blaze le mettait de plus en plus hors de lui. Jasper se voyait comme l’un des élèves ayant le moins de choses à se reprocher, pourtant son préfet se faisait un malin plaisir à lui mettre tous les maux du monde sur les épaules. Qu’est-ce que le jeune serdaigle pouvait bien avoir fait à son aîné pour se retrouver dans cette position ? Il se le demandait bien mais restait dans l’incompréhension la plus totale.

“Bien sûr que oui. Lui au moins ne se pavanait pas devant les plus jeunes et ne leur racontait pas des histoires arrangées à sa sauce. Comme tu le feras pour celle-ci.” Rétorquait Jasper à Blaze.

Le plus jeune n’avait pas encore compris que plus il attaquait l’égo surdimensionné de son aîné, plus ce dernier allait s'énerver et le prendrait encore plus en grippe. Peut-être qu’avec cette nouvelle pique et la réponse à venir de Blaze, il allait enfin comprendre. Pour le moment, l’énervement restait supérieur à sa jugeote.
Bon sang mais où était le directeur de Serdaigle quand il avait choisi Blaze comme préfet ? C’était comme le choix des membres de la brigade : très mauvais. Et pour couronner le tout, cela serait pendant encore une année supplémentaire puisque le préfet n’était qu’en sixième année. Jasper n’était clairement pas au bout de ses peines avec lui.
Les joyeusetés qu’il lui balançait ? Alors que Jasper se trouvait encore très poli avec lui ? Blaze était clairement en train d’abuser de son autorité sur le plus jeune. Ce dernier n’y pourrait malheureusement rien, il n’allait pouvoir que subir.

“Deux ou trois heures ? Attends je ne t’ai pas agressé à ce que je sache. La sanction est clairement abusive.”

Puisque de toutes façons il n’avait pas le choix, Jasper secouait la tête de gauche à droite en soupirant avant de faire un pas en avant pour se diriger vers la cuisine. Rapidement stoppé par son aîné. Le plus jeune se mit à rire nerveusement.

“Je donne ma baguette à n’importe quel professeur si tu veux ou elfe. Mais tu ne poseras pas tes sales doigts dessus Blaze.” Répondait-il encore plus froidement qu’il n’avait jamais pu l’être.

Donner sa baguette à cet individu ? C’était tout bonnement hors de question. Et puis, est-ce qu’il avait même le droit de faire cela ? Jasper en doutait fort et n’allait clairement pas laisser passer cela.

Le prix de l’attention

En réalité, Jasper s’en fichait éperdument d’une potentielle guerre d’égo afin de savoir qui était le meilleur préfet. Si cela pouvait énerver Blaze, autant lui lancer cette pique comme il venait de le faire. Après tout, il prenait un malin plaisir à le tourner en ridicule et à l'énerver. Autant rétorquer et ne pas laisser faire. Le préfet fit référence aux retenues dans la forêt interdite, évidemment cela eut pour effet de rappeler au jeune Serdaigle la retenue subie par sa sœur aînée. La mâchoire du garçon se resserrait, on pourrait presque entendre ses dents grincer. A n’en point douter, cette référence était faite exprès pour mettre Jasper hors de lui. Il valait mieux ne pas en rajouter s’il ne voulait pas réellement finir dans la forêt interdite.

“Tu as apprécié ton séjour là-bas ?” Demandait-il ironiquement, sans pouvoir se retenir d’un commentaire.

“Bon nombre de sorts que nous utilisons sont issus du latin, tu me prends pour le dernier des idiots ?”

En plus d’être quelqu’un d’intelligent, Jasper était cultivé et aimait beaucoup engranger de nouvelles connaissances. Aussi, il avait rapidement voulu connaître les racines des formules magiques qu’ils utilisent dans leur quotidien. Des citations latines, il en connaissait de nombreuses. Si Blaze pensait l’impressionner en étalant sa science, c’était raté. Bellingham n’était pas comme tous les autres gamins de Serdaigle, il ne se laisserait pas impressionner si facilement. D’ailleurs cela avait plutôt pour effet de l'horripiler que Blaze tente de frimer devant lui.
L’ultime affront fut de lui réclamer sa baguette. Comment Blaze avait pu un seul instant croire que Jasper la lui remettrait sans rien dire. Décidement, les plus jeunes se laissaient bien trop faire par le préfet.

“Très bien.”

Jasper repoussa ardemment la main de son aîné. Pour qui se prenait-il à le toucher ? Même ses parents ne le touchaient jamais que ce soit dans un but positif ou négatif. Alors ce n’était pas Blaze qui allait avoir le droit de le toucher.

“Ne me touche pas.” Lâchait-il froidement. “Tu peux toujours rêver pour que je vienne te demander quoi que ce soit. Surtout après cette mascarade.”

Jasper, récolter des retenues à répétitions ? Non, cela ne lui ressemblait pas. Vivement que cette année d’enfer se termine. C’était la première fois qu’il était en retenue, en plus ce n’était même pas de sa faute. Il n’y était pour rien si cette porte était restée bloquée. Fichus concours de circonstances, il avait fallu que ça arrive au moment où un préfet était aux toilettes. Une chose était sûre, il allait faire attention aux serrures des toilettes où il se rendait à partir de ce moment. S’assurant de pouvoir les rouvrir une fois qu’il aurait fermé derrière lui. Jasper se jurait de ne jamais plus se retrouver dans cette situation.