Le mois de mai avait toujours été agréable aux yeux de Kath. D’abord, c’était le mois de son anniversaire qui aurait lieu dans une semaine ou deux. Et puis, c'était le moment où le soleil pointait à nouveau le bout de son nez. Tout ceux qui la connaissaient bien savaient qu'il n'était pas impossible de la voir chantonner et trépigner dans le parc de l'école à cette époque de l'année. Même les actualités de l'école n'étaient pas toute roses, la Poufsouffle arrivait encore à prendre plaisir à un rayon du soleil et un parterre de fleurs. Elle était donc plutôt de bonne humeur.

Comme elle n'avait pas envie d'être la seule à profiter du beau temps, elle avait décidé d'organiser un pique-nique pour elle et son cousin Jasper dans un coin reculé du parc où personne ne viendrait les embêter. Elle savait que son cousin n'aimait pas trop la foule et qu’il se sentirait mieux tout seul avec elle là on ne pourrait pas les voir. Ça leur donnerait une occasion de parler tous les deux et de se raconter les dernières nouvelles. Après tout, ça faisait un moment qu'ils n'avaient pas eu l'occasion de parler et il devait s'en être passé des choses dans la vie de Jasper.

Évidemment, elle lui avait dit qu'elle sortait avec Florent. S’il y avait bien quelqu'un avec qui elle se devait de partager ce genre de chose, c'était le garçon qu'elle considérait presque comme un frère. Mais leur dernier tête-à-tête remontait déjà à plusieurs mois, elle était sûre qu'elle avait loupé plein de choses dans la vie du garçon. Elle était donc impatiente de le retrouver et de pouvoir passer un moment à discuter rien qu'avec lui. Elle avait passé la journée de la veille à tout préparer tranquillement dans les cuisines. Bien entendu, les elfes de maison avaient tenu à l'aider. Mais elle avait fait un maximum de choses toute seule.

Le moment venu, elle alla récupérer tout ce qu'elle avait préparé et elle se rendit dans le coin de l'école où ils allaient quand ils avaient envie d'être tranquilles et de ne pas être dérangés. Elle ne pouvait pas être sûre que personne d'autre ne connaissait ce petit coin privé, Mais ce dont elle était sûre, c'était que personne n'était jamais venu les embêter quand ils passaient un moment tous les deux à cet endroit là. C’était donc toujours là qu’elle lui donnait rendez-vous. Comme ça, ils pouvaient espérer être tranquilles. Elle posa le sac qui contenait tout ce qu'elle avait ramené. Il ne restait plus qu’à tout installer.

Elle commença par placer la nappe sur le sol bien à plat. Ensuite, elle disposa des assiettes contenant les sandwichs découpés en triangles et quelques bols de chips. D’autres bols contenaient des fruits et des légumes à croquer et elle sortit également une bouteille de limonade fraîche et deux verres pour la partager. Ça n'avait pas besoin d'être très compliqué pour plaire à Jasper. Le plus important, c'était encore le gros gâteau au chocolat qu'elle avait prévu pour le dessert. C’était peut-être ce qui avait le plus de chances d'attiser la gourmandise du jeune garçon.

Jasper ne tarda pas à arriver et la petite Poufsouffle accueillit son cousin avec un grand sourire, d'autant plus quand celui-ci la prit dans ses bras. Il n'était pas dans le naturel de son cousin d'être particulièrement chaleureux avec les gens, mais il réagissait différemment en présence des membres de sa famille ou de ceux qu'il considérait comme tel. Pour ce qui était des deux pré-adolescents, c'était encore plus particulier car ils se sentaient tout particulièrement proches l'un de l'autre. D’ailleurs, c'était la raison pour laquelle Kathleen ne lui cachait absolument rien. Leur complicité leur faisait du bien et ils appréciaient le fait de la partager rien que tous les deux.

« Mais de rien. Ça m'a manqué, d'avoir un moment tranquille avec toi, ça fait super longtemps. Et je sais même pas si on a mangé ensemble depuis que vous êtes venus nous rendre visite l'été dernier. Bon, je veux dire, à part les banquiers et les repas communs, mais c'est pas pareil. En plus, on reste plutôt avec ceux de notre maison dans ce cas. On mange pas vraiment ensemble. »

Kathleen parlait-elle pour ne rien dire avec tout le monde, y compris sa famille de cœur ? Certes oui. Mais c'était ainsi qu'ils l'aimaient et ces personnes- là avaient au moins le mérite de la connaître par cœur et de ne pas s'étonner quant elle commençait à partir dans cette direction. Lorsqu’ils avaient quelque chose de très important à lui dire, il pouvait arriver qu'ils lui coupent la parole, mais généralement, ils prenaient plaisir à la laisser discourir sans l'interrompre, sachant le plaisir qu'elle avait à babiller de la sorte. Elle les avait souvent surpris un petit sourire sur les lèvres.

Elle ne put s'empêcher de saliver un peu en voyant qu'il avait préparé ses jus de fruits préférés. Il était vraiment très cool, son cousin, il pensait toujours à elle et faisait de son mieux pour lui faire plaisir. Ils allaient passer un bon moment entre les petites attentions de Kathleen et celles de Jasper. Opal dirait que son frère et sa cousine se méritaient l'un l'autre et elle n'avait pas tort. Mais c'était dans le bon sens. Ils faisaient toujours attention l'un à l'autre depuis qu'ils étaient tout petits. Ce n'était pas maintenant, 13 ans plus tard, que ces choses-là allaient changer.

Jasper lui demanda ce qu'il y avait de nouveau dans la sa vie depuis la dernière fois qu'ils avaient parlé. La vie personnelle de Kathleen était plutôt calme. Elle profitait de sa vie avec son petit-ami, ce dont le Serdaigle devait bien se douter. En dehors de cela, elle essayait surtout de comprendre comment sa cousine, si douce, si gentille et si bienveillante avait pu être estimée suffisamment dangereuse pour passer au grade acier et subir toutes les brimades qui allaient avec cela. Elle ne parvenait pas à le comprendre.

« Pas grand chose de nouveau. J’ai fait une partie de Quidditch avec Florent. C’était plutôt sympa. Et toi, quoi de neuf ? Toujours pas de copine en vue ? »

Elle ne voulait pas qu'il pense qu’elle ne s’intéressait pas du tout à lui, mais elle avait l'intime conviction qu'il se sentait tout aussi concerné par la situation de sa sœur qu’elle. La seule chose, c'était qu'aucun des deux n'avait vraiment de réponse sur la situation, du moins à sa connaissance. Elle espérait que le garçon en saurait plus. Il avait peut-être pu obtenir les confidences de sa sœur et savoir ce qui s'était passé pour qu'on l'évalue à ce point négativement. Cela dit, elle se demandait si tous les grades acier savaient pertinemment pourquoi on les avait nommés à ce grade.

« Tu as des nouvelles de Opal ? Tu as le droit de lui parler vu que tu es son frère ? Tu sais pourquoi elle a été mise en grade acier ? Et sa retenue ? Elle a pas eu de problème dans la forêt ? »

C'était finalement ceux qu'on connaissait le mieux que l'on voyait le moins quand on était à l'école, quand la personne n'était pas de la même année ou de la même maison. Les deux cousins en faisaient l'amère expérience car cela faisait bien trop longtemps qu'ils ne s'étaient pas vus, simplement parce qu'ils n'avaient pas eu l'occasion de le faire. Kathleen s'était montrée volubile dans l'expression des raisons pour lesquelles ils n'avaient pas eu l'occasion de se voir en excluant les moments où tout le monde était ensemble. Jasper fut plus discret. Mais ils étaient tous les deux d'accord sur le fait que cela faisait bien trop longtemps.

Kathleen était heureuse de sentir l'affection de son cousin. Elle savait qu'elle était une privilégiée et qu’il n'offrait cette affection qu'à un nombre exclusif de personnes dont elle faisait évidemment partie. Depuis qu'ils étaient tout petits, ils passaient tout leur temps ensemble dès qu'ils se voyaient et ils avaient tellement joué ensemble dans le parc du manoir Kirte ou dans le jardin des Bellingham, qu'ils savaient probablement tout l'un de l'autre. Aujourd’hui, Kathleen avait conscience que la plupart de leurs jeux appartenaient au passé et que c'était d'une façon beaucoup plus paisible qu’ils passeraient leur temps, mais ça ne lui déplaisait pas. À quatorze ans, Kathleen avait l'impression d'être infiniment plus mature qu'elle ne l'était même un an auparavant. C’était sûrement illusoire de penser cela, mais Kathleen était ainsi.

Entre les jus de fruits de son cousin et ses petits plats, ils allaient sûrement se régaler. Quand elle regarda la table de pique-nique, la jeune Poufsouffle se dit qu'ils allaient passer un moment formidable tous les deux. Elle adorait cuisiner presque autant que les potions, surtout quand il s'agissait de préparer de bons petits plats pour les personnes qu'elle aimait. Ses cousins Bellingham en faisaient partie et elle avait passé beaucoup de temps dans la cuisine du manoir en compagnie de l'adorable cuisinière à apprendre toutes sortes de choses et à préparer les plats pour la visite de ses cousins.

« On va se régaler. »

Quand elle expliqua ce qu'elle avait fait avec Florent la dernière fois qu'ils s'étaient vus, son cousin lui posa une question qui fit baisser les yeux d'un air triste la jeune Poufsouffle. Le sujet du Quidditch avait toujours été un peu délicat car elle avait espéré intégrer l'équipe dès sa deuxième année et n’avait été que remplaçante, mais en plus, cette année, il y avait eu le sabotage de cette brute de Sorensen. La jeune fille en avait gros sur le cœur et elle ne pouvait s'empêcher de se dire que tout cela était profondément injuste. Elle n'avait pas encore eu l'occasion d'en parler avec le Serdaigle qui n'était donc pas au courant qu'il venait de mettre les pieds dans le plat.

« Je sais pas si tu as suivi les matchs ces dernières années, mais l’année dernière, j'ai fait plusieurs remplacements. Je ne m'en suis pas mal sortie, mais je n'étais pas titulaire. Mais quand j'ai fait les essais cette année, Erin a dit que je devais m'éloigner des nés-moldus, voir leur nuire, si je voulais intégrer l'équipe. Comme j'ai refusé, j'ai pu oublier le Quidditch toute cette année. Je ne sais pas si je vais pouvoir avoir cette chance l'année prochaine. Ça dépend de qui passe capitaine. Mais j'ai été trop dégoûtée par le comportement de Sorensen. »

Elle n'avait pas encore digéré la situation, même une année après. La preuve en était les larmes au coin de ses yeux qui perlaient encore au moment où elle manifestait son indignation à l'égard de celle dont elle ne comprenait pas ce qu'elle faisait dans une maison aux valeurs de tolérance et de respect envers les autres. Une telle maison ne pouvait pas accueillir en son sein une personne aussi machiavélique. Il devait y avoir une erreur quelque part. Malheureusement, le fait était que le directeur était aussi le grand-père de cette personne et qu'il avait fait le nécessaire pour qu'elle soit capitaine de l'équipe.

« Je suis désolée, ça ne devrait pas me toucher autant, mais je trouve ça tellement injuste. »

Il était vrai que ce n'était pas facile pour son cousin de penser à se trouver une petite amie car c'était quelqu'un de très solitaire. La jeune sorcière aurait très bien pu essayer de lui en trouver une, mais elle ne pensait pas que c'était une bonne chose à faire de se mêler des histoires de cœur de ses proches. S’ils avaient besoin d'aide, ils étaient assez grands pour lui en faire part. Et dans ce cas, elle se révélerait ravie de leur donner un coup de main. Elle savait qu'il y avait beaucoup de personnes qui se mêlaient de ce qui ne les regardait pas à ce niveau, mais elle n'en avait jamais fait partie, trouvant cela profondément ridicule.

Elle se contenta donc de hocher la tête et de lui parler de sa sœur qui était, depuis longtemps, descendu parmi les grades acier. Les élèves qui occupaient ce grade n'avaient pas le droit de communiquer avec les autres et il était donc difficile de pouvoir se parler. La Gryffondor manquait singulièrement à la Poufsouffle, mais cela ne devait être rien en comparaison de ce que devait ressentir son cousin. Après tout, elle était ça sœur. Ce fut avec bienveillance que la jeune fille écouta son cousin lui décrire ce qu'il vivait avec sa grande sœur.

« Heureusement que c'est bientôt les vacances, on va pouvoir se retrouver avec elle, comme avant. »

L'avantage d'être né dans une famille de sang-pur qui avait l'habitude de donner des réceptions, c'était que Kathleen avait appris à recevoir. Il était vrai qu'elle savait prévoir de bonnes choses à manger, un menu complet et même le cuisiner, mais c'était aussi parce que sa mère lui avait appris ce qui se faisait et ce qui ne se faisait pas. Et puis, il fallait reconnaître aussi qu'elle avait cette tendance à faire attention à ceux qu'elle aimait afin de connaître leurs goûts et leurs préférences, ce qui faisait qu'elle savait exactement quoi préparer à son cousin pour qu'il se pourlèche les babines rien qu'en voyant ce qui avait été préparé. Elle eut tout de même le bon ton de rougir un peu quand il la complimenta.

Très vite, alors qu'il se mettait à table, Kathleen orienta la conversation sur le jeune homme et les nouvelles qu'il avait à lui donner. Il devait se sentir un peu frustré de la situation de sa sœur et des interdictions d'avoir trop de contacts avec elle. Il n'était tout de même pas juste qu'une famille soit obligée de se séparer, simplement parce qu'on avait décidé arbitrairement que l'un des deux n'avait plus le droit d'être traité comme une vraie personne. Le trait était peut-être un peu exagéré mais pas tant que ça si on regardait comment avaient été traités les grades aciers cette année. Kathleen était très inquiète pour l'avenir de l'école.

Mais quand il parla de Quidditch, la fillette fut confrontée à ses propres injustices et elle ne put s'empêcher de lui expliquer la raison pour laquelle l'évocation de ce sport lui causait un nœud à l'estomac. Évidemment, le jeune Serdaigle abonda dans son sens. Il n’était peut-être pas toujours partant pour faire ami-ami avec tout le monde, mais le minimum restait quand-même d'avoir suffisamment de tolérance pour mettre tout le monde au même niveau et ce n'était pas gagné pour l'instant. L’ensemble du système prouvait que quelque chose n'allait pas à Poudlard.

« Comme je ne sais plus qui me l'a dit, je ne peux absolument rien y faire. J’ai décidé de laisser tomber et de me tenir à carreaux. Il n'est pas question de prendre parti dans cette guéguerre entre les moldus et les sorciers. Moi, ce que je préfère c'est attendre qu'ils comprennent que tout le monde devrait être égaux. S’ils ne comprennent pas ça, ils n'arriveront jamais à gérer quoi que ce soit à Poudlard. »

Si on n’arrivait pas à équilibrer les choses, il y aurait toujours quelqu'un pour se rebeller. A l'adolescence, c'était le moment où les gens étaient déjà les plus rebelles. Alors, si la situation en rajoutait une couche, ça risquait de partir en conflit ouvert. La jeune sorcière ne comprenait pas comment il se faisait que les dirigeants actuels ne l’aient pas en tête. Et s'ils l'avaient, elle était étonnée qu'ils ne réagissent pas en conséquence. Mais il était inutile d’espérer que quelque chose se passe en ce qui la concernait, et elle préférait tout simplement laisser tomber la question.

« En vrai, je n'ai pas tellement envie de faire des histoires. Tu comprends, si on s'en mêle, ça va nous créer des ennuis. Et de toute façon, on n'est pas assez forts pour pouvoir vraiment faire quelque chose. De toute façon, avec leurs méthodes, quelque chose va arriver un jour et ils verront bien qu'ils n'ont pas suivi la bonne direction. J’espère juste que ça ne va pas devenir dangereux, parce qu'avec ce qui s'est passé dans la tour, on peut le penser. »

Elle ne put s'empêcher d'avoir un sourire tendre face à son cousin quand il évoqua la fin des cours et le moment de prendre Opal dans ses bras. Elle aussi était impatiente de pouvoir la retrouver et parler avec elle. Ce n'était pas juste de ne pas pouvoir s'adresser à quelqu'un de votre famille, ou que l'on considérait comme tel, simplement parce que quelqu'un en avait décidé ainsi. En plus, elle ne voyait pas Opal faire quelque chose de vraiment grave qui aurait pu le justifier. C’était même ça qui la perturbait le plus.

Si Kathleen était persuadée d'une chose, c'était que le statut du sang n’influençait pas tant que ça les sélections de Quidditch dans les équipes qui n'étaient pas dirigées par un membre de leur clique. Et encore. Elle doutait que tous soient aussi pénible qu’Erin Sorensen. Celle-là, elle l'avait en travers de la gorge mais l'année était presque finie et la jeune fille avait la certitude que le problème ne se poserait pas autant l'année suivante. Elle devrait pouvoir faire partie de l'équipe de Quidditch et il serait sans doute plus facile de gérer les choses à partir de ce moment-là. Il était inutile de continuer à parler d'une chose qu'ils ne pouvaient, de toute façon, pas changer pour le moment.

C'était exactement pareil pour la façon dont Poudlard était géré. La seule chose dont elle était certaine, c'était que l'injustice qui avait beau jeu à l'école durerait tant que le pouvoir serait exercé de la même façon. Et pour le moment, rien ne semblait aller dans la direction vers laquelle ce problème ne se poserait plus. Il allait falloir avoir de la patience, non seulement avec des gens comme les Sorensen, mais aussi avec ceux qui se trouvaient dans l'autre camp à essayer à tout prix de ramener la justice entre les deux camps. Ceux-là étaient puni et rabaissés à un grade où ils ne pouvaient presque plus rien faire.

« Ne t'en fais pas pour moi, je n'ai pas l'intention de prendre ce chemin. »

Elle tenait à ce que Jasper soit tout à fait rassuré. A moins que quelqu'un ne la descende arbitrairement jusqu'au grade acier pour aucune raison, il n'y avait aucune situation dans laquelle Jasper et elle ne pourraient plus se parler. De toute façon, ça ne servait à rien de vouloir jouer au plus malin. La seule chose qu'on y gagnait c'était de se faire maltraiter à une époque où les choses n'étaient pas gérées équitablement pour tout le monde. Elle n'avait pas l'intention de laisser une situation comme celle-là transformer sa scolarité en cauchemar. Kathleen n'était pas de ceux qui se révoltaient et elle avait plutôt tendance à faire partie des personnes qui suivaient le mouvement.

« Je ne sais pas. Mais entre l'attaque sur les professeurs de l'année dernière, celle sur ses élèves de cette année, je commence à penser que les élèves ne seront jamais décidés à se laisser faire et je n'ai pas envie de savoir quelle sera la prochaine étape de la rébellion de l'école. Je ne veux juste pas m'en mêler. »

Elle approuva totalement la décision de Jasper de changer de sujet et de parler de quelque chose de plus agréable. Toutes ces histoires de politique la fatiguaient beaucoup et elle n'aimait pas du tout parler de ces choses-là et écouter ceux qui poussaient à la révolte alors qu'ils n'avaient aucune conscience des conséquences qu'il pourrait y avoir à se révolter de la sorte. Et quand on y réfléchissait, il était parfois difficile de se dire qu’on allait devoir payer les conséquences des actes d'autres personnes. Elle comprenait ceux qui avaient le cœur à se battre pour tout, mais elle ne se sentait pas le courage d'en faire autant. Sachant cette réalité, elle préférait la laisser de côté.

Jasper commença à lui parler d'une jeune fille qui était en cinquième année et qui s'appelait Gwendolyn Chastel. Kathleen ne connaissait pas bien les cinquièmes année et elle ne savait donc pas qui était cette jeune fille mais pour que Jasper lui en parle, c’était qu'il devait y avoir anguille sous roche. Il était peut-être amoureux d'elle. Ce serait tellement romantique. Elle attendit qu'il veuille bien lui dire ce qui en était. Elle n'allait pas le forcer à parler tant qu’il ne se sentait pas prêt, mais elle était curieuse de savoir ce qu'il avait envie de lui dire au sujet de cette jeune fille.

« Je ne vois pas qui c'est, pourquoi ? Elle est importante pour toi ? » demanda-t-elle avec un sourire à la fois tendre et malicieux.

Depuis qu’elle était à Poudlard, l’endroit supposément le plus sûr de tout le monde sorcier, Kathleen avait l’impression qu’elle n’avait jamais couru autant de dangers. Et quand elle pensait que si, pour une mystérieuse raison, elle avait été grade or, elle aurait été dans la tour au moment où elle avait explosé. Elle n’imaginait pas l’horreur que cela aurait été pour Jasper si elle avait été blessée, même peu gravement. Son inquiétude aurait été proportionnelle à l’affection qu’il avait pour elle, et elle savait combien elle était conséquente. S’il y avait bien une chose dont elle ne doutait pas, c’était de l’affection que lui portaient ceux qu’elle considérait comme sa famille.

Jasper pensait à la même chose quand il lui avoua qu’il ne voudrait pas qu’elle soit la victime de quelque chose comme ce qui était arrivé à la Tour des élèves grade or. Elle le prit dans ses bras sans un mot. Il n’avait pas besoin d’en dire plus, ses mots la touchaient aussi clairement que s’il l’avait enlacée de lui-même. Il n’était pas vraiment du genre à se confier sur ce qu’il éprouvait, que ce fut pour Kathleen ou pour n’importe qui d’autre, mais quand il le faisait, elle savait combien il était sincère.

Mais il avait surtout besoin de lui parler. Apparemment, les choses avançaient avec une de ses amies. Il lui en avait souvent parlé, mais Kathleen ne se souvenait plus de son nom et quand il l’avait prononcé, elle avait mis un instant à comprendre de qui il parlait. Mais une fois qu’elle eut compris, elle sourit. Quitte à se rapprocher de quelqu’un, il lui apparaissait logique que ce soit de cette personne-là, quelqu’un qu’il aimait et pour qui il avait déjà des sentiments, peut-être moins poussés au départ. Mais avec le temps, cela était amené à évoluer. Kathleen était heureuse pour lui.

« Ah oui, ça y est, je me rappelle. Tu m’as déjà parlé d’elle. Je ne me rappelais plus son nom, mais je vois bien maintenant. Et donc ? »

Et donc, ils s’étaient embrassés. Jasper arrivait à un âge où la plupart des personnes avaient eu un ou plusieurs amoureux ou amoureuses, mais le Serdaigle était si timide qu’il n’avait pas eu cette occasion pour le moment. Du coup , elle était contente pour lui qu’il ait l’occasion de connaître ce tendre sentiment que pouvait être l’amour. Mais bien entendu, il ne savait pas quoi faire. Il était mignon, tout innocent comme ça, à ne pas savoir exactement quoi faire de ce qu’il éprouvait pour elle. Kathleen ne savait pas quelle décision il devait prendre mais elle était disposée à le soutenir et à l’écouter.

« Tu as des sentiments pour elle ? Si oui, il faut juste que tu suives ton cœur, ça devrait bien se passer. »

Kathleen n'aurait jamais pensé embrasser quelqu'un dont elle n'était pas amoureuse. Elle était donc partie du principe que son cousin avait embrassé sa meilleure amie parce qu'il y avait entre eux davantage que de l'amitié. Mais apparemment, ce n'était pas le cas. Jasper semblait penser qu'il ne ressentait rien de plus pour Gwendoline que l'amitié qu'il avait toujours eue pour elle. La rousse aurait alors pu demander pourquoi il avait posé ses lèvres sur les siennes, mais elle s'abstint. Il n'avait pas besoin qu’elle remette ses paroles en doute. Il avait besoin de soutien. C’était pour ça qu’elle avait décidé de l'écouter.

« Mais si elle t'a embrassé derrière, et que c'était spécial, c’est peut être qu’elle, elle a des sentiments. »

Si Kathleen avait eu des sentiments pour quelqu'un pendant des années et si cette personne l'avait soudainement embrassée, elle n'aurait sans doute pas pu résister à l'embrasse de toutes ses forces à son tour. Si ça c'était passé ainsi, il était possible que la Serpentard ne soit pas très à l'aise pour avouer ses sentiments réels et que c'était pour cette raison qu'elle gardait ses distances. Il fallait bien qu'il l'entende s'il voulait que tout se passe bien et retrouver une relation harmonieuse avec la jeune fille.

« Et si elle est pas assez à l'aise pour te le dire, peut-être que c'est pour ça qu'elle a pris un peu de distance. Ou peut être que parce qu’elle est comme toi et qu'elle a peur que ce soit toi qui aies des sentiments. L’amour, c'est plutôt compliqué je pense. »

Le problème était que la Poufsouffle ne pouvait pas savoir à la place de son cousin ce qu'il aimait, mais ne pouvait pas non plus présumer des sentiments qu’éprouvait la meilleure amie du jeune homme. Il n'y avait qu'un moyen de le savoir, c'était que les deux se parlent. Tant que la discussion ne serait pas provoquée et n'aurait pas lieu, aucun des deux ne pourrait vraiment savoir ce que l'autre ressentait pour lui et la situation ne serait claire pour personne. Si Kathleen avait un conseil à donner, c'était de travailler avec la plus élémentaire honnêteté.

« Il faut que tu trouves le moyen de lui parler pour savoir exactement ce qu'il se passe et ce qu'elle ressent pour toi et lui dire ce qu'elle représente pour toi aussi, pour que tout soit clair entre vous et que vous puissiez passer à autre chose. »

Le problème, dans ce genre de situation, c’était qu’il était difficile d’évaluer les tenants et les aboutissants et dangereux de sauter aux conclusions. Quand il était question d’affection, tout devenait si compliqué à gérer et les réponses n’étaient pas faciles à trouver. Parfois, même les personnes directement concernées n’avaient pas les réponses. Concernant Gwendolyn, Kathleen ne pouvait présumer de rien. Mais elle était certaine que son cousin ne reconnaitrait pas l’amour s’il se présentait sous son nez. Il n’était pas à l’aise pour exprimer ses sentiments et peut-être pas beaucoup plus pour les comprendre. A ce stade, comprendre ceux des autres était quasiment impossible.

« C’est compliqué. L’amour peut prendre différentes formes. Et parfois, on peut avoir envie d’embrasser quelqu’un, juste parce qu’on a envie de le sentir près de soi, mais ça ne veut pas forcément dire qu’il y a vraiment des sentiments. Enfin, je crois. Et des fois, les sentiments se mélangent entre amour et amitié. Peut-être qu’elle ne sait pas exactement ce qu’elle ressent. »

Le fait de s’aimer n’avait pas trop changé de choses entre Kathleen et Florent et une fois le premier instant de gêne dépassé, ils avaient profité e leur nouvel état de relation et finalement, la plupart de leurs activités communes étaient les mêmes qu’avant, même si s’embrasser en faisait désormais partie. Mais elle savait que ce ne serait pas forcément facile pour son cousin d’en arriver là. Et s’il avait apprécié, c’était déjà qu’elle lui plaisait, mais Kathleen ne savait pas vraiment vers où il allait. Elle ne pourrait pas le savoir à sa place. Mais elle pouvait le conseiller.

« Tu as aimé, c’est déjà quelque chose. Que tu sois amoureux ou pas, le fait que tu aies envie de recommencer, c’est qu’il y a quelque chose entre vous. Maintenant, il s’agirait de savoir ce dont elle a envie elle, et puis, il faut aussi trouver le moyen que ça ne vous blesse ni l’un ni l’autre. »

L’amitié était une chose fragile et quand les relations amoureuses s’en mêlaient, on avait tendance à ne pas savoir quelle direction emprunter et quel chemin prendre. Evidemment, ce n’était pas facile pour Jasper, pour qui parler de ce qu’il ressentait était un véritable supplice. Mais il allait bien falloir qu’il en passe par là s’il ne voulait pas la perdre. Il y avait des moments où il fallait avoir le sens des priorités, quitte à se bousculer un peu. Evidemment, Kathleen n’était pas du genre à bousculer les autres, même son cousin, mais elle sentait qu’il en avait un peu besoin.

« Je comprends, c’est dur. Mais si elle vient pas en parler avec toi et toi non plus, si aucun de vous deux n’ose, vous saurez jamais ce que vous pouvez faire de ça et vous risquez même de perdre plus que juste ce que vous auriez pu avoir. C’est quand-même dommage. Je sais que c’est pas facile pour toi, mais Gwen, c’est pas la personne à qui tu parles le plus sauf ta famille ? Du coup, ça devrait être plus facile avec elle, non ? »