Don't be so naive

À SAVOIR Arrivé(e) le : 04/04/2020 Parchemins rédigés : 1181 Points : 10

Don't be so naive

@Jane E. Gray

Carla avait été particulièrement de recevoir une missive de leur infirmière. Il y avait deux étés de cela, quand elle avait été coincée en monde moldu à cause d’Appleton, elle se souvenait avoir apprécié la jeune fille, tout comme elle lui vouait une reconnaissance certaine depuis son séjour à l’infirmerie en raison de ses frasques avec Casey, mais elle ne se rappelait pas qu’elles étaient proches. Elle n’avait jamais considéré qu’un membre de l’équipe enseignante puisse réellement l’être d’un élève et elle avait considéré après son mystérieux malaise de l’an dernier qu’elle avait tout intérêt à faire profil bas si elle ne voulait pas que Miss Gray creuse ce que pouvait être cette faiblesse cardiaque sortie de nulle part qui avait manqué de la terrasser. Elle conservait jalousement ses secrets, par peur des conséquences, mais également par habitude de la solitude.

Dépliant la lettre avec étonnement, elle en parcourut rapidement le contenu, toujours plus circonspecte, avant de comprendre que ces mots ne lui avaient jamais été adressés. Cela faisait sens. Par contre, ce qui n’avait strictement aucune logique était qu’elle s’adresse à Avery comme s’ils étaient de grands amis. A vrai dire, elle en ressentit une forme de jalousie incompréhensible. Après leur conversation de cet été, elle s’était figurée qu’ils se ressemblaient et qu’il vivait les mêmes difficultés qu’elle. Force était de constater que ce n’était pas réellement le cas. Il pouvait bien chouiner tout ce qu’il voulait, il était plus adapté qu’elle aux deux mondes dans lesquels ils évoluaient. Et elle l’enviait terriblement de cela. Depuis le départ de Casey et Killian, elle avait été bien incapable de tisser la moindre relation d’amitié, Finnbjörn mis à part, mais qui était dans son entourage depuis plus longtemps. Elle ne se sentait jamais toujours à sa place, sans cesse en décalage. Comme si elle était plus spectatrice qu’actrice, perpétuellement de côté. Elle était désormais bien trop indépendante pour ce que le monde des sangs purs avait à offrir à une fille. Trop sang pur pour le reste du monde. Lui, il arrivait à passer d’un état à l’autre sans problème apparent. Même Jane lui confiait ses histoires de cœur ! A quoi bon cet air sinistre de cet été, alors ? Elle secoua légèrement la tête et soupira avant de retourner au parchemin entre ses mains. Il fallait qu’elle rende cette lettre à Jane. Elle la relut une nouvelle fois, avant de laisser échapper un sourire plus amusé que surpris cette fois. Si l’infirmière était diabolique de manipulation. Parce que cela ne pouvait être que cela, non ? Elle essayait d’attirer l’attention de Caleb en faisant mine de ne pas comprendre que Jaimie – enfin le professeur Alexander – lui avait donné un rencard. C’était brillant de fausse naïveté. Ingénieux à souhait. Mais tout le monde savait qu’un rendez-vous dans la salle sur demande était propice à plus qu’une soirée entre collègues. Elle-même avait des souvenirs fort agréables de cet endroit avec Maxwell … Elle secoua la tête brusquement avant de se perdre définitivement dans ses pensées. Ce n’était pas le moment. Elle regarda rapidement l’heure, 20 heures, elle était dans les temps pour un aller-retour à l’infirmerie.

Elle se releva de son lit sur lequel elle était à moitié avachie, en soupirant. Définitivement, sa bonté la perdrait. Elle traversa rapidement les cachots, grimpant rapidement les escaliers pour se rendre à l’infirmerie, non sans une pointe d’appréhension. Elle n’aimait pas cet endroit. Trop de mauvais souvenirs. Ca l’oppressait plus qu’elle n’était capable de le verbaliser. Elle jeta un coup d’œil prudent dans les lieux afin de s’assurer qu’elle était bien seule et se dépêcha de traverser quelques rangées de lit pour se rendre vers le bureau de Miss Gray. Elle tapa légèrement à la porte, lançant prudemment

- Miss Gray ?

Elle n’eut guère à attendre longtemps avant que la jeune femme ne lui ouvre. Elle était la conscience professionnelle incarnée, Carla savait parfaitement qu’elle répondrait. Elle aurait sûrement préféré se trancher les veines que de prendre le risque de laisser un élève en détresse. Carla lui sourit en la voyant, presque instinctivement. Jane était le genre de personne à qui on souriait sans savoir pourquoi tant elle dégageait une forme de douceur. Elle lui tendit le parchemin

- Je suis désolée, le courrier est arrivé au mauvais destinataire. Je n’ai pas réalisé tout de suite alors je l’ai lu, pardon.

Elle l’était sincèrement. Elle n’avait jamais voulu porter volontairement atteinte à la vie privée de la jeune femme.

- Ne vous inquiétez pas, je ne parlerai pas de votre date avec le professeur Alexander. C’est pour cela que je suis venue vous rapporter le parchemin en mains propres, pour qu’il n’y a pas une nouvelle méprise. Mais je suis contente pour vous.

Cela aussi ce n’était pas un mensonge. Elle l’avait vu interagir avec l’ancien bibliothécaire, Wes. Son départ avait dû être particulièrement difficile pour elle. Et elle avait compati de tout son cœur. Les romances sans fin heureuse, c’était son truc à elle aussi, après tout.

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Don't be so naive

Les huit coups sonnèrent. Une nouvelle journée était en train de se terminer. Jane était installée à son bureau, remplissant les dossiers des élèves qui étaient passés ce jour à l’infirmerie. Un problème de furoncles, un poignet cassé, des brûlures… Rien de très graves qu’elle n’avait pu gérer avec quelques coups de baguette et quelques potions multicolores. Dans son bureau, on entendait que le grattement de sa plume sur le parchemin et les crépitements du feu qui ronflait dans sa cheminée. Elle attendait également une réponse de Caleb à sa lettre envoyée un peu plus tôt. Ce qu’elle lui avait confié la travaillait beaucoup. Pour Caleb, il s’agissait d’un rencard. Ca l’avait beaucoup gênée qu’il lui dise cela. Sachant que c’était lui-même qui, un peu plus d’un an plus tôt, la formait pour un rencard éventuel avec Wes. Elle n’était pas aussi proche de Jaimie qu’elle ne l’avait été de Wes et ils ne s’étaient pas vus tant de fois que ça, d’ailleurs. C’était un bon ami, le béguin qu’elle avait eu pour lui remontait à bien des années lorsqu’ils étaient encore tout deux à Poudlard. A présent, c’était loin derrière elle tout ça. Jaimie n’avait jamais fait attention à elle lorsqu’ils étaient étudiants, il était donc très peu probable que ce soit le cas maintenant.

Il était plutôt gentil avec elle. Il leur arrivait de faire une promenade ensemble dans le parc ou d’échanger quelques mots pendant le diner, bien qu’ils ne partagent des places l’une à côté de l’autre. L’essentiel de leur discussion se faisait par lettre, ce qui facilitait les choses pour Jane, qui n’aimait pas trop se retrouver entre quatre yeux. Il était plus simple pour elle de communiquer via des lettres… Les mots sur parchemin permettait de montrer une autre facette des gens, plus de douceur. Bon, pas chez Jane, elle était déjà des plus douces au quotidien, avec tout le monde. Sauf peut-être avec Maxwell, dont elle redoutait particulièrement la prochaine visite. Il faudrait d’ailleurs qu’elle demande à Caleb la faveur qu’il accompagne Maxwell à l’infirmerie si celui-ci devait s’y rendre. Elle n’avait plus envie de devoir l’affronter seul, lui et sa… Non, elle ne voulait plus imaginer ça. Ca avait été un moment particulièrement horrible et gênant.

Les coups sur sa porte lui firent faire un bond sur sa chaise, éloignant loin d’elle ses pensées. Elle se mit debout et ouvrit la porte pour découvrir Carla. Jane lui adressa un sourire.

« Bonsoir Carla, puis-je faire quelque chose pour t’aider ? »

La jeune femme lui tendit un parchemin tout en s’excusant de l’avoir lu. Jane tendit la main par réflexe mais l’incompréhension se lisait parfaitement sur son visage. Ce n’est que lorsque Carla ouvrit à nouveau la bouche que l’infirmière commença d’abord à pâlir avant de rougir intensément. C’était la lettre qu’elle avait envoyée à Caleb ! Et elle était arrivée chez Carla !

« Je-je-j-je suis sincèrement dé-désolée que tu sois t-t-tombée là-dessus ! »

Mince ! Bon, il n’y avait pas d’information capitale là-dedans, rien de fou à vrai dire. Jane avait simplement expliqué à Caleb les informations qu’elle avait reçu depuis leur dernière conversation et Jane ne croyait pas un instant le jeune homme quand il affirmait que ce n’était pas qu’un simple diner entre collègues.

Elle avait l’impression de se liquéfier sur place. Mais il fallait voir le bon côté, le courrier aurait pu tomber en des mains plus mauvaises que dans celles de la gentille Serpentard. Jane avait beaucoup apprécié apprendre à la connaitre lors du voyage scolaire dans le monde moldu.

« Veux tu entrer ? Je vais préparer un peu de thé. » fit-elle d’une voix mal assurée en tentant de maitriser sa voix.

Elle respira un grand coup en récupérant sa bouilloire et en la plaçant sur le feu. Elle sortit deux tasses en tachant de reprendre ses esprits et les installa sur la table en prenant l’un des deux fauteuils.

« Je ne sais pas comment ce courrier s’est retrouvé chez toi, il était destiné à Caleb… »

Elle n’en voulait à personne, ça pouvait arriver ce genre de choses. Mais pourquoi fallait-il que ça tombe sur elle lorsqu’elle envoyait un courrier embarrassant ?
Une chose dite par Carla lui revint en mémoire, rendant les joues de l’infirmière un peu plus roses.

« Je n’ai pas de rendez-vous romantique avec le Professeur Alexander. C’est un simple repas de Noël avec les collègues je pense… »

Elle se sentait obligée de se justifier, sans savoir pourquoi. Elle n’avait pas envie que Carla s’imagine des choses, encore moins qu’elle fricotait avec un professeur au lieu de s’occuper de l’infirmerie.

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@Jane E. Gray

Carla fut agréablement étonnée que Gray semble se souvenir d’elle de manière aussi positive. Sa manière de l’accueillir était chaleureuse. Bon, pour être honnête, elle l’imaginait difficilement polaire avec quelqu’un, mais elle se souvenait de son prénom et l’avait gratifié d’un sourire fort encourageant. Preuve que Carla n’avait pas été la seule à conserver un bon souvenir de cette soirée bowling en sa compagnie. Si ce voyage scolaire avait autorisé la magie, elle y serait volontiers retournée. A l’époque, elle avait bien moins de soucis et un entourage relativement bienveillant. Ou plutôt un entourage tout court comme lui fit remarquer avec ironie une voix dans sa tête. Là, elle était seule, plus qu’elle ne l’avait jamais été. Même enfant, elle avait été entourée par sa mère et même si ce n’était pas parfait, c’était un élément de stabilité. Là, depuis les révélations de Mary, elle n’avait même plus cela.

Son interlocutrice devint littéralement livide quand elle lui tendit la lettre et Carla contempla cette réaction avec surprise.

- Ce n’est pas grave.

Elle eut beau lui opposer cette réponse, Jane se mit à bégayer, manifestement mortifiée. La blonde ne comprenait pas bien ce qui était à ce point dérangeant. Si c’était son âge, c’était hypocrite de considérer que Caleb pouvait lire ces trois lignes et elle non. Si c’était le contenu, il n’y avait rien de particulièrement choquant. Si elle avait donné des détails d’une nuit partagée, là, elle aurait compati. Visiblement déboussolée, elle lui proposa un thé, ce que Carla analysa plus comme une façon de meubler le silence et de s’occuper les mains que comme une furieuse envie de boire une boisson chaude. Elle jeta un coup d’œil à l’horloge, hésita, puis acquiesça en remerciant Jane. Elle n’avait pas réellement de meilleure chose à faire et cette tasse de thé était sans doute une entorse au profil bas qu’elle adoptait depuis la rentrée. A la moindre question des sangs purs, elle dirait qu’elle avait eu un souci de santé et en échange, elle pouvait s’accorder autre chose qu’un échange poli avec des camarades qui ne l’appréciaient que modérément. Elle entra doucement dans la pièce, plus pour ne pas brusquer Miss Gray que par méfiance. Chaque fibre de l’être de Jane hurlait qu’elle était inoffensive.

Carla ne comprit pas réellement pourquoi Jane semblait se sentir à ce point obligée de se justifier. Elle n’avait pas eu la sensation d’avoir exprimé le moindre reproche et elle n’en avait de toute façon pas l’intention. Elle ne voyait pas pourquoi les professeurs de Poudlard n’auraient pas eu droit à une vie privée. Il était certain que l’enfermement avec des centaines d’adolescents réduisaient le temps dont ils disposaient et surtout le nombre de rencontres possibles, mais tant mieux s’ils faisaient quelque chose de leurs soirées. D’abord, cela les rendrait peut-être moins attentifs aux errances interdites des élèves et en plus, la jeune fille jugeait cela beaucoup plus sain que de n’être encadrée que par des adultes frustrés. D’ailleurs, elle se garderait bien de le verbaliser à qui que ce soit, mais si le professeur Thorstein pouvait évacuer quelques pulsions dans du sport de chambre au lieu d’essayer d’assassiner systématiquement ses élèves, cela ne serait pas si terrible. Ce serait agréable pour elle, rassurant pour eux … S’asseyant sur la chaise que lui désignait la jeune femme, Carla se contenta donc d’hausser les épaules, pas très convaincue, mais pas contrariante.

- Si vous le dites ... Mais enfin, il n’y a pas mort d’homme, vous savez. Personne ne s’attend à ce que vous finissiez nonne.

C’était déjà suffisamment triste de s’enterrer ici avec des vieilles croûtes inquiétantes comme van Aken … En tout cas, Carla n’envisagea pas une seule seconde que l’infirmière puisse être novice en matière de relation ou de rencard. La Serpentard se basait sur sa propre expérience pour estimer qu’avec quelques années de plus et surtout plus de jugeote qu’elle, Jane n’avait pas dû passer son temps à soupirer après un garçon comme Maxwell. Pour le reste, elle était jolie et gentille, elle avait bien dû faire tourner des têtes non ? Un peu timide, certes, mais ça devait avoir son charme. Elle l’observa, se demandant si elle rougissait et bégayait aussi facilement chaque fois qu’il était question de relations amoureuses. Si c’était le cas, elle devait être régulièrement à deux doigts de l’évanouissement en tant qu’infirmière. Elle ne doutait pas que bien des adolescentes aient simulé n’importe quelle pathologie pour se terrer à l’infirmerie le temps d’une journée pour une peine de cœur ou encore que quelques élèves téméraires avaient profité du secret médical pour aller poser des questions bien gênantes. Pour cela, elle était presque reconnaissante que Maxwell ait été son premier petit ami. Il avait suffisamment d’expérience pour lui épargner la honte de devoir glaner des renseignements auprès d’une adulte ou d’une amie. L’expérience de la mère de Maxwell lui parlant contraception hantait encore ses cauchemars. Quant à sa propre mère … Elle grimaça de dégoût. Il y avait des choses qu’elle ne voulait ni savoir, ni imaginer. Revenant à Jane, elle se mordilla la lèvre, toujours songeuse, avant d’en revenir à l’idée qui lui avait fugacement traversé l’esprit alors qu’elle se trouvait encore dans sa chambre.

- Après, c’est une tactique intéressante pour rendre jaloux quelqu’un. Ca fonctionne avec Caleb ?

Pour quelle autre raison lui aurait-elle écrit ? Ce n'était pas la personne la plus charmante de ce château. Si ça fonctionnait, elle se promit d’envoyer un hibou dans la minute même à Maxwell. Ou plutôt, non, elle ne le ferait pas. Le passif était trop chargé avec l’histoire de Finnbjörn, elle ne pouvait plus se permettre ce genre de magouille … Il lui en voudrait trop et ce serait contreproductif. Par contre, elle était réellement intéressée pour savoir si Caleb montrait le moindre signe de réaction à quelque chose. Depuis qu’ils avaient parlé de Casey, cet été, elle le regardait avec plus d’attention. C’était la première fois d’ailleurs qu’elle ne s’employait pas à le fusiller du regard, mais réellement à se soucier de lui. C’était étrange. Tout autant que de réaliser que sous ses airs débonnaires à la Maxwell, il pouvait paraître aussi mélancolique qu’elle pouvait l’être. Plus le temps passait, plus elle le comprenait d’une certaine manière. Plus elle le jalousait aussi. Son existence avait l’air plus simple que la sienne, par bien des aspects.

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