La pédagogie des psychopathes (Thor & Wen)

VOIMAKAS.
‟ @Professeur A. Thorstein & @Professeur W. Aylmer „

— Wenceslas déposa le bout restant de sa cigarette dans le cendrier, la laissant se consumer lentement alors que les dernières volutes de fumées embaumaient son bureau. Dans quelques instant, toute trace serait annihilée, un sortilège chassant constamment l’odeur du tabac froid de la pièce et le cendrier se nourrissant – au sens le plus littéral – des vestiges qu’il contenait. Des petites dents grignotaient en effet ce qu’il y avait dedans, jusqu’à ce qu’il n’en reste plus aucun résidu. L’homme annota le devoir qu’il étudiait d’un « P » et l’envoya d’un signe de la main rejoindre docilement le reste de la pile. Il avait enfin terminé ses corrections. À bientôt minuit, il s’estimait plutôt efficace. Trop pour aller d’ores et déjà rejoindre le doux réconfort de son lit. Ce soir, il n’avait pas à surveiller les couloirs, d’autres professeurs, épaulés des préfets, s’en chargeant déjà lui, il ne lui restait plus que de l’oisiveté.

Se levant de son fauteuil, il contourna son bureau pour aller regarder de l’autre côté de sa fenêtre la cime des arbres de la forêt interdire se mouvoir sous l’effet d’une brise qu’il imaginait aisément glaciale. La lune éclairait plutôt le parc, ce soir-là. Elle n’était pas encore pleine, mais ce ne devrait plus tarder. Un ou deux jours, tout au plus ; il ne s’était jamais trop intéressé à l’astronomie, si ce n’était lorsqu’il avait étudié les loup-garou depuis son bureau du département des mystères... mais ce sujet d’étude était relativement inintéressant à ses yeux et dès qu’il avait eu l’occasion de se pencher sur d’autres formes de magies, il n’avait guère hésité. Soupirant de lassitude – chose rare pour lui, il s’ennuyait – il détacha son regard de l’extérieur, se saisissant de son long manteau qui pendait sur le siège, et quitta son bureau. Lorsqu’il était encore langue-de-plomb, il n’avait que rarement eu l’occasion d’affronter le désagréablement sentiment d’être désœuvré. Il y avait toujours du travail, les complexités de la magie étant sans limites. Mais dans son travail de professeur, particulièrement alors qu’il venait tout juste d’arriver, il n’avait pas grand-chose à faire. Il n’avait même pas encore rencontré tous ses élèves, même s’il avait soigneusement étudié les dossiers de chacun d’eux, et la correction des devoirs que les premiers lui avaient rendus ne demandait pas beaucoup de temps. D’ici deux semaines, à n’en point douter, les choses seraient différentes : les travaux dont il avait pour l’heure écopé étaient ceux de son prédécesseur et il était manifeste que celui-ci était bien moins exigeant qu’il escomptait l’être. Les plus naïfs étudiants avaient un temps espéré que le changement d’enseignant signifierait qu’ils n’auraient pas à rendre les devoirs quémandés par le précédent, mais ils avaient vites déchantés et Wenceslas n’avait d’ailleurs guère tardé à charger le planning des retenues des quelques malheureux qui n’avaient pas eu la présence d’esprit de lui présenter les précieux parchemins. Ce que les autres avaient rendus était fort décevant, aussi ne doutait-il pas que du pain sur la planche l’attendrait une fois les pendules remises à l’heure.

En attendant, il n’avait pas grand-chose d’autre à faire que de préparer l’avenir et l’une des tâches à laquelle il convenait de s’atteler – sans nul doute l’une des plus ennuyeuses – était de rencontrer ses collègues. Il ne pouvait indéfiniment les ignorer, d’autant plus qu’il espérait bien découvrir lesquels se révèleraient être utiles pour ses plans futurs. Aussi ses pas le guidèrent-ils naturellement vers la salle des professeurs. Il ne s’attendait pas à y voir foule – pas à cette heure tardive – mais il ne serait guère étonné d’y rencontrer un ou deux professeurs au retour d’une patrouille dans les couloirs. Il n’avait qu’un étage à monter sous les yeux inquisiteurs des tableaux – qui n’étaient manifestement pas tous ceux qu’il avait connu lorsqu’il était lui-même élève – avant de pouvoir finalement pousser la porte de l’antre professorale.

Mu par un élan de curiosité un peu enfantine, il était rapidement venu découvrir la pièce à son arrivée à Poudlard ; c’était la seule pièce qu’il n’avait jamais vue de l’école durant ses jeunes années, même le bureau du directeur l’avait vu contraint de s’y rendre au cours de sa sixième année. L’endroit était assez spacieux, agrémenté de plusieurs armoires où s’entreposaient les dossiers scolaires des enfants actuellement présents, de quelques confortables fauteuils et d’une longue table, tandis que plusieurs bougies et tableaux ornaient les murs, le tout formant un espace relativement accueillant. Et calme, ce qui était un petit miracle.

Il y avait déjà une personne à l’intérieur. Une femme à la longue chevelure blonde et aux yeux glacés. Wenceslas n’avait pas encore eu l’occasion de converser avec elle, mais pour l’avoir croisé à plusieurs reprises à la table des professeurs, il pouvait la reconnaître comme l’implacable enseignante de défense contre les forces du mal. Les ragots allaient vite dans l’établissement scolaire et sa réputation n’était plus à sa faire. « Bonsoir professeur. » salua-t-il en refermant la porte derrière lui. « Navré de venir troubler votre quiétude. » Il allait sans dire qu’il n’était pas le moins du monde désolé, si elle désirait être seule elle pouvait toujours retourner dans son bureau. Il s’avança dans la pièce, approchant de la nordique sans toutefois être à portée de main ; il serait impoli d’envahir ainsi son espace vital et l’homme était d’une nature distante. Il glissa les mains dans les poches de son costume trois pièces.

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La pédagogie des psychopathes

Les rondes le soir, un moment de calme de manière générale. Tout dépendait d’avec qui il fallait la faire, cela dit. Lorsque c’était avec Siwan, ça n’avait jamais rien de calme, elle parlait sans s’arrêter, à croire qu’elle avait une fonction spéciale pour parler en continu en respirant en même temps. Quand il y avait encore des adolescents assez fous pour oser sortir quand il ne fallait pas, là non plus ça n’avait rien de calme, comme lorsque Thor avait coincé trois élèves revenant d’une fête clandestine. Elle avait été prévenue par Siwan et étaient tombée dessus en traversant un couloir. Perte de points et retenue au rendez-vous.

Avec la plupart des professeurs, Thor se séparait et faisait la ronde de son côté. Ou alors, elle gardait un silence de mort et des yeux de glace. Elle n’avait pas besoin de coéquipier pour faire une ronde ici. A la rigueur, le seul qui lui serait d’une quelconque utilité, ce serait Fergal. Ou encore le vieux Van Aken. Wayde aussi aurait pu être utile. Mais il n’était plus là et il n’y avait plus lieu de parler de lui. Elle ne parlait pas des absents. Elle ne parlait pas, de toute façon. Ou peu. Et pas avec tout le monde.

Ainsi, elle avait fait sa ronde tranquillement de son côté, guettant le moindre mouvement, toisant les tableaux et les statues, profitant du calme des couloirs et du peu de lumière. Lorsque la ronde se termine, les pas de la nordique l’emmène dans la salle des professeurs. Il n’y a personne et ça lui convient très bien. Elle veut que le calme perdure. Elle sort un parchemin de son casier, une plume et un encrier. Soigneusement, Thor attribue les notes des exercices pratiques du jour.

Certains ne sont pas étonnants, constant dans leur nullité. D’autres se révèlent décevants. Quelques rares sortent du lot et Thor ne leur en demandera que plus la prochaine fois. Certains ont tendance à laisser les meilleurs pour s’occuper de remonter le niveau des plus faibles. Pour la blonde, c’est peine perdue. Mieux vaut rendre les meilleurs encore meilleurs, ile le méritent. Cela évite de perdre des coéquipiers pendant une mission car ils sont médiocres. Il n’y aucune place pour la médiocrité quand la vie des uns et des autres est en jeu. Voilà pourquoi elle est ici. Voilà pourquoi elle a quitté la dureté du terrain. Marre de finir blessée par sa propre équipe, de voir ceux qui tombent à cause du manque de vigilance des autres membres. Pour la nordique, le problème vient de la source des apprentissages.

Elle inscrit la note de Misha avec un sourire en coin. Elle a vu en lui du potentiel, elle l’a collé un nombre incalculable de fois, elle l’a vu plusieurs fois par semaine pour l’entrainer et ses efforts se ressentent. Il avait besoin d’un coup de pied au cul que son abruti d’oncle n’était pas capable de le faire comme il se devait. Les gens sont comme ça quand survient un drame, ils ont tendance à s’adoucir pour ne pas accabler encore plus la personne. Mais un drame n’est pas une faiblesse, c’est une force. Une force dans laquelle il faut puiser pour avancer, pour avoir la rage de vaincre. Voilà pourquoi elle n’avait jamais eu pitié du côté orphelin de Misha. L’excuse était trop facile. Quand on veut, on peut. Un parfait adage pour la Thorstein.

Le bruit de la porte qui s’ouvre ne lui fait pas lever la tête. C’est pourtant surprenant qu’un prof passe par ici à ce moment de la journée. Voilà pourquoi elle vient ici à cette heure-ci, d’ailleurs, pour éviter la foule. Elle termine de mettre la note du dernier élève quand il l’a salue et qu’elle lève ses yeux glacés sur lui. Le nouveau professeur de sortilèges. Elle n’a pas encore échangé de conversation avec lui, cependant il dégage quelque chose qui éveille sa curiosité. Il n’est pas comme cette bande de crétins souriants et pimpants qui sont là pour cajoler les abrutis de l’école. Non, il a de l’allure, du charisme, une aura respectable autour de lui. Et des yeux de glace, comme elle.

« Prrrofesseurrr Aylmerrr. »

Elle lui adresse un petit signe de tête tout en le jaugeant du regard. Il s’excuse tout en s’approchant et elle en profite pour refermer l’encrier et poser la plume devant elle.

« J’ai ouï dirrre que vous me faisiez concurrrrence avec vos courrrs. »

Un petit rictus en coin étira ses lèvres. Elle s’était renseignée un peu sur lui et sa pédagogie. Si ce qu’on lui a dit est vrai, peut-être rejoindra-t-il le peu de personnes qui trouvent grâce à ses yeux dans cette école. La théorie c’est bien, mais les élèves peuvent l’apprendre lors des devoirs. La pratique, il n’y a que ça de vrai. Sur le terrain, il n’y a de place que pour l’instinct, la réflexion et la pratique. Pas de place pour les livres et les théories. Répéter encore et encore jusqu’à la maitrise parfaite, l’automatisme.

Et leur apprendre à réagir en cas de stress et d’urgence. Même les meilleurs lanceurs de sortilèges peuvent s’avérer médiocre quand ils ne peuvent gérer la pression et la course contre le temps. Voilà ce qu’elle leur apprend en DCFM. C’est dur. Ca vide l’énergie. C’est stressant, oppressant. Mais ça paie. Pour la plupart en tout cas. Et tant pis si on la déteste, elle n’a jamais été là pour se faire des amis.

Elle l’observe, il a les mains dans les poches. Elle croise les bras sur sa poitrine, détendue. Il s’est approché mais pas trop, chacun sa bulle. Pas comme les débiles ici qui se sentent obligation de venir toucher leur interlocuteur et lui parler très près du visage. Enfin, ils le faisaient avec les autres, pas avec elle. Elle avait déjà mis un coup de poing à une collègue – si on pouvait la nommer ainsi – il n’en faudrait pas plus pour qu’elle réitère l’expérience.

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La pédagogie des psychopathes.
‟ Thor & Wen „

— Il fallait le reconnaître, Wenceslas aurait pu tomber sur pire personne pour converser. Ses contacts avec ses collègues demeuraient encore bien sommaires, mais il avait pu mentalement noter quelques noms qui ne lui paraissaient guère très importants. Il ne portait aucun intérêt pour le professeur d’étude des moldus qui en plus d’enseigner une matière négligeable était infiniment trop jeune pour qu’il lui accorde le moindre crédit. Il avait reconnu Henry Tyrell bien sûr, ils avaient après tout côtoyé l’école pendant une même courte période, mais n’avait pas encore eu le temps de se faire un avis sur sa pédagogie et sur l’homme qu’il était devenu. Bien de l’eau avait coulé sous les ponts – sans compter qu’ils n’avaient jamais fréquenté les mêmes cercles amicaux à Poudlard, ce qui n’était en soi pas bien difficile compte tenu du nombre restreint d’amis qu’il avait lui-même eu – aussi l’adolescent qu’était autrefois Tyrell n’avait plus rien à voir avec le professeur qu’il était devenu.

Thorstein en revanche appartenait à cette catégorie de personne qui éveillait indubitablement la curiosité. Sa réputation était à elle seule un monument dans l’école, à en croire les bavardages des enfants. Lorsque l’anglais avait pour la première fois traversé la grande salle à son arrivée, il avait entendu deux petits élèves de première année s’avouer mutuellement être effrayés par la nordique. Et si seules des personnes si jeunes pouvaient l’avouer à haute voix sans trop en rougir, il ne doutait pas que le sentiment fût partagé par biens d’autres de leurs camarades de toutes années confondues. Ainsi, il avait été indubitablement intéressé par ces ragots écoutés ça et là. Il avait entendu bien des choses sur l’état actuel de l’établissement scolaire, sur sa pédagogie parfois discutable et lorsqu’il avait assisté au procès de l’ancienne directrice, il avait pu se faire un avis plus personnel... qui n’avait rien de bien glorieux. L’on ne trouvait rien de mieux pour discipliner les enfants que leur retirer leurs baguettes – un comble dans une école de magie – et renonçait à punir réellement ceux qui devaient l’être par faiblesse ou incompétence. Mais le professeur de défense contre les forces du mal ne semblait pas faite de ce bois-là. La pratique primait et si ses punitions étaient aussi inventives que ses cours, elle ne devait sûrement pas avoir beaucoup de chahut dans sa classe. « J’essaie de me maintenir au niveau d’exigence que vous avez instauré » répondit-il d’une voix calme. Fausse modestie et discret compliment renvoyé étaient les bases d’une neutralité somme toute très appréciable dans les relations humaines.

Wenceslas n’était pas un homme très mondain, c’était le moins que l’on puisse dire. Trop d’années passées dans le dernier sous-sol du ministère à étudier des formes de magies méconnues, si ce n’était éteintes, n’avait guère contribué à le rendre très prompt pour les discours grandiloquents. Il avait néanmoins une certaine éducation et savait se montrer assez doucereux pour berner un peu les gens. Il n’était ni gentil, ni méchant, mais d’une neutralité telle qu’on ne pouvait lui reprocher trop de choses si ce n’était sa rigueur tenant parfois de l’excessif. « Il me semble avoir entendu quelques élèves parler du test d’aptitude que vous leur avait concocté. » Un sourire fendit son visage, mais il n’avait cette fois rien de mielleux, il était même un brin carnassier. « Je dois vous avouer que c’en est presque vexant. Lorsque l’on arrive dans mon cours, je ne m’attends pas à entendre des bavardages sur les enseignements de mes collègues. » Il ne s’attendait pas à des bavardes tout court, d’ailleurs. Les quelques classes qu’il avait déjà eues semblaient l’avoir plutôt bien compris à présent, et si le message n’était pas assez bien passé, ça n’était qu’une question de temps. Pour une entrée en matière, il était resté bien gentillet, mais dans les prémices de ce qui deviendrait sûrement sa pédagogie, il ne rechignait pas à la perspective de sévir de manière plus ardue. « Aussi traumatisants soient-ils. » Il ne prenait pas de plaisir à effrayer les jeunes générations ou à les mettre dans une position inconfortable. D’ailleurs, mis à part peut-être la classe de septième année, on ne pouvait lui reprocher d’agir ainsi. Pour autant, il pouvait reconnaitre l’utilité pédagogique d’un tel procédé, particulièrement dan une discipline comme celle qu’enseignait le professeur Thorstein.

L’homme alla à son tour s’asseoir dans l’un des confortables fauteuils de la pièce, observant subrepticement, depuis sa position, les parchemins qui occupaient jusqu’alors l’attention de la Suédoise. Il croisa les jambes, mains posées sur la cuisse gauche. « Vous ai-je interrompu pendant votre travail ? » Il trouvait, pour sa part, plutôt curieux de se rendre dans un salon commun pour effectuer quelque paperasserie inévitable, mais n’étant pas un exemple de sociabilité, il n’était guère très surprenant qu’il cherche à éviter la moindre distraction.

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La pédagogie des psychopathes

Celui qui lui fait face ce soir à une aura particulière. Il dégage quelque chose. Quelque chose d’assez intéressant pour que Thor soit encline à lui adresser la parole et même un sourire. A voir si les échos qu’elle a entendu reflète le personnage. Mais elle n’en doute pas trop. Les bruits de couloirs vont vite et Siwan à une ouïe particulièrement développée lorsqu’il s’agit d’apprendre tous les ragots, potins et informations du coin. De manière générale, Thor n’y prend jamais garde. Mais lorsqu’il s’agit d’un nouveau, elle lui prête toujours une oreille attentive. Après tout, mieux vaut savoir qui met les pieds dans le château.

Ce qu’elle a entendu des cours du nouveau professeur de sortilèges n’est pas pour lui déplaire. Il a une méthode proche de la sienne, apparemment. Elle n’a pas eu beaucoup d’allié dans sa pédagogie depuis qu’elle est arrivée, voilà un an et demi. Il n’y a que Van Aken pour la concurrencer à ce niveau, également en terme de punitions. C’était presque devenu un petit concours entre eux, maintenant.

Le commentaire de l’homme qui lui fait fasse étire un peu son sourire, presque imperceptiblement.

« Il était temps que quelqu’un se joigne à moi pourrr rrremettrrre l’école à niveau. »

Le dos toujours très droit, le menton levé, les yeux couleur glace de la suédoise sont fixés sur ceux de la même couleur de son homologue masculin. La couleur des yeux n’est pas leur seul point commun, apparemment. La pédagogie également. Forcément, il grimpe dans l’estime de la blonde, devançant clairement la plupart des personnes travaillant dans l’école.

Elle a une impression de déjà-vu. Elle a déjà croisé ce visage et l’endroit où cela s’est déroulé n’est pas difficile à identifier. Depuis qu’elle est sur cette partie du continent, elle n’a été qu’à Poudlard et au Ministère de la Magie. Peut-être était-il comme Wayde, un Auror. Après tout, Wayde avait longtemps été Auror sans qu’ils ne se croisent. Leur rencontre s’était faite dans un bar non loin du Ministère, quand elle avait commencé à se battre avec un gars qui lui cherchait des noises dans un bar. Il avait désamorcé une situation cocasse dans laquelle elle aurait pu avoir des ennuis, s’attirant au passage les foudres de l’ancienne Tireuse de Baguette d’élite.
Elle conserva l’information dans un coin de sa tête tendit qu’il ouvrait à nouveau la bouche.

Le test d’aptitudes. Un éclat particulier s’alluma dans les yeux de Thor. Ainsi donc, la vermine profitait des cours de son collègue pour se plaindre ? Elle ne manquait pas noter l’information, pour les prochains cours qu’elle aurait avec les cinquièmes, les sixièmes et les septièmes. Les jérémiades n’avaient jamais été les bienvenues. Quel manque de courage affligeant. S’ils pensaient que ce test était traumatisant, ils n’avaient encore rien vu d’un réel traumatisme.

« Si tous les enseignants faisaient rrrégner la discipline comme il le fallait dans cette école, cela n’arriverrrait pas. Hélas, vous trrrouverrrez peu d’alliés dans les rangs prrrofessoral si vous aimez vous fairrre rrrespecter des élèves comme il se doit. »

Elle croisa sa jambe droite par-dessus la gauche, les coudes sur la table.

« Il semblerrrait que le choix pédagogique de la majorrrité de nos collègues soit le laxisme. Mais je ne doute pas que vous emprrrunterrrez un chemin plus… rrrespectable de votrrre enseignement. »

La prestance pouvait faire beaucoup. Après tout, il n’avait pas fallu qu’elle hausse la voix pour faire taire les élèves de ses classes. Le premier cours avait suffit pour leur montrer qu’elle n’était pas là pour rire. Et son fonctionnement sur la ponctualité avait largement participé à l’élimination des retardataires dans sa classe. Quand la cloche sonnait, le cours commençait. Peu lui importait que certains n’aient pas réussi à franchir le seuil de la porte avant qu’elle ne soit bloquée. Ainsi, nombreux des élèves arrivaient en avance. Ceux qui s’étaient essayé à ne pas venir avait vu la liste de leurs devoirs relongés et avaient écopé d’une retenue immédiate afin de rattraper le cours perdu.

Il s’installa sur l’un des fauteuils lui aussi, prenant une position confortable en apparence. Elle se laissa aller contre son dossier, les mains croisées sur son ventre lorsqu’il reprit la parole à nouveau.

« Non, j’ai terrrminé lorrrsque vous êtes arrrivé. »

Elle se redressa légèrement pour sortir sa baguette d’une poche le long de sa cuisse et donna un coup pour faire disparaitre l’encrier, la plume et le parchemin jusqu’à son casier. Elle en profita pour tirer à elle deux verres qui se trouvaient dans l’armoire avant de réitérer l’expérience pour faire venir à elle une bouteille avec un liquide ambré du fond de son casier. Elle ne le partageait pas avec n’importe qui. Mais il ne semblait pas de la même trempe que les imbéciles qui se disaient professeurs dans l’école – Coucou Cooper et Alexander – .

Elle fit sauter le bouchon avec son pouce et servit deux verres avant d’en pousser un vers son interlocuteur. Elle leva le sien dans sa direction sans le quitter des yeux et avala une gorgée qui lui brûla la langue et la trachée. Elle l’observa un instant en silence en se remettant contre le dossier de son siège.

« Votrrre visage m’est familier. »

Elle fit glisser sa langue sur ses lèvres roses, le gout de l’alcool faisant picoter ses papilles gustatives. Elle haussa légèrement un sourcil.

« Dans quelle brrranche du Ministèrrre étiez-vous ? »

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‟ Thor & Wen „

— Si étant élève, il avait eu Thorstein, sûrement aurait-il détesté les cours de défense contre les forces du mal. En réalité, ses propres cours étaient assurément de ceux que l’adolescent qu’il fut aurait détesté. Cela la rendait d’autant plus intéressante : Wenceslas n’aurait jamais eu la prétention de se décrire comme un étudiant brillant et fort. Il avait été tout le contraire, plutôt pathétique même. Assez tristement, il avait fallu un séjour à Azkaban de presque un an pour qu’il se décide à s’endurcir, ou plutôt y soit forcé. À côté des détraqueurs, la Suédoise était bien indéniablement d’une meilleure compagnie, mais à une époque où la prison des sorciers ne comportait plus le moindre détraqueurs et où la politique semblait s’être adoucie, elle devait sûrement faire office de pire vision qu’un élève puisse craindre d’affronter. Du moins pouvait-il l’espérer. Poudlard avait toujours été le théâtre de conflits et de retournements de situation, sa présence comme professeur en témoignait suffisamment. « Je suis forcé de vous croire sur ce point, n’ayant hélas pas encore eu l’occasion de converser avec beaucoup de nos collègues. » Il marqua une pause, un sourire placide figé sur le visage. « Vous êtes la première avec qui j’ai l’honneur de partager une véritable discussion. » Une conversation qui serait assurément plus instructive que n’importe quel bruit de couloir. Il n’était pas venu dans l’école simplement pour combler une place vacante, aussi la parole fiable d’une collègue pouvait être d’un grand secours pour cerner une situation trop hermétique pour être observée de l’extérieure. Et si le moment n’était pas désagréable, c’était toujours ça de gagné.

S’agissant d’ailleurs de ragots en tout genre, ceux des jeunes gens qui fréquentaient sa salle de classe avaient été une première mise en bouche fort intéressante. Il s’amusait des discours des adolescents bien plus qu’il ne l’avouerait : ils avaient quelque chose de rafraîchissant. « Poudlard a bien changé depuis ma propre scolarité. À l’époque, l’on ne pouvait guère accuser beaucoup d’enseignants de laxisme. » Il laissa à nouveau le silence gagner la pièce, comme gagné par la nostalgie, quoiqu’en réalité, ce sentiment ne l’habitait pas réellement. Loin de clamer que tout était mieux avant – l’école anglo-saxonne avait connue de biens meilleures années que celles qui l’avaient eu comme étudiant – son retour encore très frais dans ces murs éveillait facilement en lui des envies de comparaisons. « Si ce n’était quelques options mésestimées comme les divinations ou l’étude des moldus. » Il ne disait pas ce qu’il pensait de ces disciplines, mais son ton ne donnait pas l’impression qu’il les tenait en haute estime. Le professeur Trelawney n’avait, en son temps, pas brillé par son talent, et celui qui occupait le poste d’études des molus, malgré tous les efforts qu’il pouvait y mettre, enseignait alors une matière que Wenceslas avait toujours trouvé des plus ridicules. À quoi bon prétendre faire découvrir le monde moldu aux sorciers ? Ceux qui ne le connaissaient pas demeuraient le rejetaient par principe, et les autres n’apprenaient rien d’intéressant. Et de toute façon, puisque leurs deux mondes étaient séparés – et devaient le rester – l’intérêt de connaître l’autre lui paraissait fort discutable.

Un sourire fendit son visage à l’instant où quelques souvenirs de son enfance revenaient à son esprit. Une époque qui n’était pas toujours très joyeuse, mais qui après tant d’années lui semblait presque douce. « Cela étant, les défenses contre les forces du mal n’ont pas toujours été très bien représentées à mon époque. Il a fallu que deux mangemorts se succèdent pour rattraper le niveau d’un seul professeur. » Si Ombrage n’avait guère eu pour elle la sympathie et le bénéfice de la pratique, Lockhart avait été indéniablement le plus désastreux du lot. « Mais il semblerait que la malédiction qui touchait autrefois ce poste ne soit qu’un ancien souvenir. » S’il n’avait pas discuté avec ses collègues, il avait observé les dossiers au ministère. Rares étaient ceux qui avaient conscience de la quantité d’informations croustillantes qui pouvaient être gardées là-bas. Il n’avait eu la possibilité de lorgner que brièvement les informations conservées sur le personnel de Poudlard – et avec d’ailleurs eu le malheur de retrouver un nom connu fort peu agréable à lire – il avait tout de même apprécié de pouvoir se préparer à sa future tâche avec une petite mise en bouche administrative. Ainsi, Askja Thorstein tenait son poste d’une main de maître depuis quelques années déjà. Elle n’avait elle-même pas été scolarisée en Écosse, mais cette différence de culture semblait porteuse d’une pédagogie nouvelle assez intéressante. La rigueur était indéniablement une bonne chose.

Enfin installé face à elle – signe qu’il lui accordait de ce fait un intérêt tout particulier – il l’observa se munir de sa baguette et se séparer des copies corrigées, avant de lui présenter un verre remplit d’un liquide ambré dont il se saisit bien volontiers, inclinant la tête en un geste de gratitude polie. « Je vous remercie. » Bien, elle semblait tout aussi disposé que lui à discuter. À l’unisson avec Thorstein, il leva son verre en un salut un peu rigide, mais ne trempa pas immédiatement ses lèvres dans le verre. Il préféra en humer le parfum – vif et brûlant, mais dans le bouquet dégageait une certaine douceur automnale – avant d’en gouter enfin un peu. « J’étais langue-de-plomb il y a encore quelques jours » répondit-il sans quitter des yeux les iris glacées de sa nouvelle collègue.

Ils se tenaient face à face, chacun savourant leur verre dans le silence paisible de la salle des professeurs. « Je crois pouvoir dire sans me tromper que vous avez également travaillé au ministère avant de venir enseigner ? » demanda-t-il, tout en connaissant pertinemment la réponse. Si elle l’avait déjà croisé, ce ne pouvait qu’être là-bas.

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