song of lost girls ♦ feat. Jade

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Hilary avait pris son courage à deux mains et avait envoyé un mot à Jade pour lui demander de parler de vive voix avec elle. Il était temps, en vrai. Elle avait fait traîner les choses depuis trop longtemps. Combien de temps ça faisait, en vrai, qu’elle n’avait pas parlé correctement à Jade ? Depuis… Oh, au moins depuis la dernière Saint Valentin, quand elle avait appris la vérité par Cameron. Ensuite il y avait eu la fête clandestine : minuscule espoir de mettre les choses au clair ; grand échec. Et puis après… après, plus grand chose. La tête blonde avait fui comme une grande lâche, faisant la sourde oreille à ses mots, ne sachant que faire. Il y avait Cameron et Jade qui ne s’aimaient guère, Oncle Ben qui avait été mêlé à tout ça avant qu’Hilly ne se dispute avec lui et puis, et puis… Et puis tout s’était embrouillé dans sa tête. Elle avait bien demandé des conseils à Opal, mais elle n’avait pas été entièrement d’accord avec elle sur la solution au problème. Couper les ponts avec Jade ? Sans s’être expliquées ? Sans savoir s’il était encore possible de trouver un terrain d’entente ? De reprendre une amitié ? Peut-être, moins forte, mais une amitié quand même… Après tout, avant d’être amies, elles avaient juste eu la même mésentente avec une certaine Mackenzie Sinclair. Et uniquement après cela s’était transformé en amitié. Du moins, Hilly le pensait sincèrement. Seulement… Elle ne pouvait pas offrir cette même mésentente envers Cameron à Jade. Elle avait appris à le connaître, le Serdaigle. Elle l’avait bien aimé, puis apprécié, puis aimé tout court finalement. C’était trop bizarre comme enchaînement, surtout quand tout sa relation avec Jade avait stagné, voire reculé. Hilary ne pouvait pas dire adieu ni à l’un ni à l’autre, sauf si des réconciliations étaient véritablement impossibles. Mais pour le savoir, elle devait essayer.

Le rendez-vous était pris, 16h près du ponton au niveau du lac. La jeune fille appréhendait un peu, il était vrai, mais au moins, il y aura la brise pour lui rafraîchir les idées et le lac pour s’y noyer si quelque chose se passait mal. Non pas qu’elle imaginait les choses en arriver à de tels extrêmes. Probablement pas. Elle espérait pas… ? En vrai, si Jade voulait lui crier dessus toutes les horreurs du monde pour l’avoir rejetée et ignorée comme une malpropre, ce serait légitime. Si elle avait accepté de lui parler seulement pour lui dire d’aller voir ailleurs si elle y était et de ne plus compter sur elle, Hilary comprendrait. Mais elle aurait au moins essayé.

La Gryffondor s’était installée en tailleur au bord du ponton et laissait une de ses mains caresser la surface de l’eau. L’envie furieuse de fuir une nouvelle fois lui tenaillait les entrailles, mais elle luttait. Elle luttait parce qu’elle avait discuté avec Oncle Ben également, pendant les vacances, et tout s’était très bien passé. La discussion leur avait fait du bien. Ils avaient réglé ce qu’il y avait eu à régler, et tout allait pour le mieux, désormais. Hilly en avait appris un peu plus, mais pas trop. Oncle Ben possédait encore ses zones d’ombre, mais c’était normal, finalement, de ne pas connaître quelqu’un à cent pour cent. C’était impossible de connaître quelqu’un totalement, surtout quand on n’arrivait pas à se comprendre soi-même totalement. Mais cela n’empêchait pas le fait qu’elle pouvait apprendre à mieux comprendre la personne en face d’elle. Et, tout de suite, elle voulait mieux comprendre Jade, ses raisons et tout ce qui expliquait… tout le reste. « Hey », fit-elle quand elle l’entendit arriver. « C’est gentil d’être venue… » La Poufsouffle aurait pu lui poser un lapin que la tête blonde n’en aurait pas été étonnée. « Encore merci pour les chocolats de la dernière fois. » Mais si Jade avait été du genre à lui poser un lapin, elle ne lui aurait jamais déposé des chocogrenouilles sur sa table de chevet, à l’infirmerie. Hilly avait cherché, quand même, l’identité du J, mais excluant d’office Judith et Joanne ayant été dans le même état qu’elle, il n’avait resté que Jade. Une des raisons pour laquelle Hilary pensait que tout était encore possible. Il lui avait fallu du temps et le mois de janvier avait été chargé, mine de rien, mais là c’était bon. C’était l’occasion.

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Song for lost girlsConfrontation avec HilaryL’amitié était une force qui avait construit Jade, et lui avait permis de s’élever, tout en palliant au déséquilibre créé par le chaos familial qui régnait chez elle. Mais c’était également un sentiment capable de la fragiliser profondément… Et ces derniers mois, elle avait cette désagréable impression que ceux en qui elle croyait l’abandonnaient progressivement : le Breakfast club traversait une crise houleuse, quelques disputes éclataient de temps à autre, et ceux qui s’étaient toujours trouvés près d’elle ne l’étaient plus vraiment. Alors, plus que jamais, elle se focalisait sur le Quidditch : les entraînements et matchs étaient les seuls événements de l’année qui rythmaient son quotidien. Ne se concentrer que sur l’obtention de la coupe, sur la formation de son équipe, et sur son possible recrutement… ça permettait d’oublier tout le reste. Jusqu’à ce fameux matin où elle déplia le mot d’Hilary, déposé par une chouette de l’école… Sourcils froncés, elle l’avait relu deux fois pour être bien sûre de bien comprendre. Sans même prendre la peine d’y réfléchir, elle avait répondu, attendant quelques heures avant de faire envoyer sa réponse, de manière à ne pas signifier un certain empressement… Et elle s’était rendue sur le terrain pour y chasser quelques vifs d’or, ne le quittant qu’après s’être retrouvée baignant de sueur.

Et le lendemain, elle rejoint Hilary qui était déjà assise en tailleur sur le ponton, les yeux rivés sur l’eau. Cela faisait des mois qu’elles ne s’étaient pas parlé, et le dernier moment qu’elles avaient passé ensemble datait d’au moins une éternité… Hésitant à se signaler, Jade attendit que sa présence devienne perceptible, et se contenta d’un simple hochement de tête en arrivant à son niveau. À côté d’elles, la surface du lac était si lisse, si imperturbable, qu’elle semblait même gelée, reflétant les plus hauts sommets des montagnes environnantes. C’était un lieu que Jade affectionnait tout particulièrement, parce qu’elle avait bon nombre d’histoires qui y étaient liées : l’expédition sous-marine avec Blaze, quelques unes de ses fins de métamorphose en Louve… Et pour une confrontation telle que celle qui s’annonçait, elle tenait particulièrement à se sentir tout à son aise. Elle ne s’assit finalement pas, et resta debout…« Salut » lança-t-elle d’un ton qu’elle tenta de faire passer pour désinvolte. Ce genre de conversation s’annonçait clairement compliqué, et ressemblait étrangement avec la discussion désagréable qu’elle avait pu avoir avec Blaze à la rentrée des cours, après leur dispute de l’été. Sauf que cette fois, à sa connaissance, il n’y avait eu aucun sujet de discorde… À croire qu’Hilary avait tout simplement décidé de lui tourner le dos, du jour au lendemain, pour une raison qui lui échappait encore. Enfin non, ses soupçons se portaient bien sur quelque chose, ou plutôt quelqu’un… Cela coïncidait étrangement avec le moment où Hilary avait commencé à côtoyer Cameron. Décidément, avec ce cloporte dans les parages, tout ce à quoi elle tenait finissait par lentement pourrir, comme s’il se plaisait à tout dégrader dans sa vie.

La tension lourde qui régnait encore elles était perceptible. Bras croisés, Jade faisait face à celle qui était encore son amie, il n’y avait pas si longtemps, et qui avait cessé de l’être du jour au lendemain. Et maintenant, un après-midi d’hiver, elle se décidait enfin à se présenter à elle, comme si elle était enfin devenue digne de son attention… Ah oui, les chocolats. Qui lui étaient revenus avec un mot laconique, comme si elle était n’importe qui, comme si elle n’avait jamais compté. Si tôt après avoir déplié le petit bout de papier, Jade avait regretté son envoi, et d’avoir accordé peut-être trop d’importance à quelqu’un qui ne lui en adressait visiblement plus. « C’était juste la moindre des choses, c’était une de mes joueuses qui t’avait fait tomber. » fit-elle remarquer, en haussant simplement les épaules, comme si elle n’avait rien fait de plus que son devoir de capitaine. La chute de Hilary l’avait inquiétée, si bien que comme lorsque Joanne était tombée, elle était restée suspendue quelques secondes à califourchon sur son balai, observant l’immensité du vide après la disparition des joueuses rouges. Et cette dernière n’avait été capable que de lui lâcher un indifférent "merci", se rajoutant au pesant silence de ses dernières lettres…

Jade avait voulu comprendre. Elle s’était férocement accrochée longtemps à cette amitié, si bien que maintenant, elle commençait à se demander si tous ces efforts en valaient réellement la peine. Après tout, si Hilary avait été capable de l’abandonner si rapidement, que ce soit parce que Cameron l’y avait poussée ou non, cela en disait beaucoup sur l’amitié qui les unissait… Cornelia aussi avait rompu du jour au lendemain les liens qui existaient entre elles. Alors, elle décida de rentrer dans le vif du sujet, sans détour… « Ça m’a étonné que tu veuilles me parler, ça a pas eu l’air de te manquer en six mois. » lâcha-t-elle finalement, un peu plus sèchement qu’elle ne l’aurait voulu. Elle s’était promis de ne pas avoir l’air affectée, mais son ressentiment était perceptible… Se mordant l’intérieur de la joue, elle considéra longuement Hilary, comme si la réponse à ses interrogations était censée se manifester d’elle-même. En fin de compte, elle n’était plus certaine d’avoir la patience d’attendre… « T’avais un truc à me dire ? » demanda-t-elle enfin à la Gryffondor. Peut-être valait-il mieux abréger là leur échange, et directement en venir au fait… C’était suffisamment éprouvant de lui faire face alors que leur amitié avait déjà bien pâti du mutisme et des silences anxiogènes, alors autant entendre ce qui l’avait motivée à finalement rompre sa résolution, et partir.

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Murphy's law

by Wiise

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hexagone gare de l'amitié

Oh qu’il était triste d’avoir un bateau sur l’eau dérivant sur les flots, sans capitaine à la barre. Le galion prendrait rapidement l’apparence d’un rafiot de la taille d’une barque. Une apparence misérable pour un état misérable. Perdu toute la splendeur, perdu toute l’innocence des débuts… Un éclat terni sur le pont qui ne brillait plus par la présence de l’équipage. S’il fallait représentait toutes les relations qu’elle avait avec les gens, son amitié avec Jade aurait probablement cette apparence. Les voiles étaient mises et l’ancre était levée, mais les voiles avaient des trous et l’ancre n’était plus lustrée. Le tricorne qu’Hilary avait volontiers donné à Jade dans son imaginaire pour leur petite vendetta contre la sœur de Sage avait fini par rester dans la cabine du capitaine. Et le capitaine ? Elle ne le voyait plus sur le pont. De la proue à la poupe, le bateau semblait déserté. Pourtant, aucune mutinerie, aucune révolte, aucune trahison. Juste… l’effet du temps et des déceptions. Il n’y avait plus de cap et plus de port à proximité. Perdues en mer, voilà tout ce qu’elles étaient. Et si Jade n’avait jamais réellement abandonné la chose, Hilly avait longtemps cherché des yeux une chaloupe pour peser le pour et le contre avec l’idée de déserter. C’était au capitaine de mourir avec le bateau ; elle, elle n’avait aucune obligation ! Toutefois, c’était chose impossible pour elle aussi. Jade pourrait lui faire tous les reproches du monde - et elle allait le faire et ce serait légitime -, même si elle n’en donnait pas l’air, Hilary n’avait jamais cherché à partir non plus. Elle s’était juste fait… plus discrète. Elle avait pris le temps de réfléchir la chose, pour ne pas prendre de décision hâtive, voilà tout. Elle l’aimait, ce bateau. Elle l’aimait de tout son cœur, comme un des premiers ayant pris la mer. Comment pourrait-elle l’abandonner sans essayer de le sauver du naufrage d’abord ?

La Gryffondor salua la Poufsouffle quand elle fut à son niveau, incapable de regarder directement dans ses yeux. Elle affichait un sourire bien moins assuré que d’ordinaire, incapable de dire plus pour le moment. Elle l’avait saluée, Jade l’avait saluée… La Poufsouffle restait debout et Hilary sentait bien que ses jambes allaient trembler comme jamais si elle risquait de se mettre debout. À croire qu’elles n’avaient rien de plus à se dire. Pourtant, la tête blonde avait des tonnes de choses à exprimer au fond de sa poitrine ! Elles avaient juste du mal à se frayer un chemin jusqu’à sa bouche… Et puis, par où commencer ? Comment ? Sur quel ton ? Parce qu’elle ne voulait pas donner l’impression à Jade qu’elle lui reprochait tous les malheurs du monde et qu’elle était en colère. Elle l’avait été, bien sûr, mais comme pour Oncle Ben, c’était le regret et la déception qui avait remplacé le reste. Oui, elle avait trop attendu, mais elle avait tout de même bien fait d’attendre, non ? Après tout, Jade était tout de même venue, et elle l’en remerciait sincèrement. Et puis elle la remercia également pour les chocolats - maigre consolation pour s’être évanouie à cause d’un Cognard, mais consolation qui faisait du bien quand même. Si seulement Jade ne faisait pas passer ça pour un simple acquit de conscience. « C’est… Je suppose, oui, mais c’était gentil quand même. » La rouge et or avait reposé son regard sur l'étendue d’eau plutôt que de regarder Jade qui montrait clairement qu’elle aurait préféré être ailleurs qu’ici. Ça devait être horrible, pour elle, de voir Hilary prolonger la chose, mais elle ne comptait pas aller plus vite…

Alors, forcément, c’était Jade qui tentait de faire avancer les choses, quitte à se montrer brusque. Hilary encaissait - qu’est-ce qu’elle pouvait faire d’autre ? Jade avait toutes ses raisons d’être en colère. Et… Enfin, elle avait déjà encaissé trois Cognards jusqu’à en perdre connaissance, un de plus ou de moins… Pourtant, les accusations de son ancienne amie lui faisaient très mal. Et Hilary éleva plus la voix qu’elle ne l’aurait voulu. « Ça m’a manqué ! Bien sûr que ça m’a manqué ! Mais je pouvais pas juste… » C’était raté pour ne pas avoir l’air en colère. Enfin, ce n’était même pas de la colère dans cette situation, mais de la vexation. Comment pouvait-elle dire ça ? Si ça n’avait pas été pour elle, elle ne serait jamais allée à cette fête clandestine et elle ne se serait jamais disputée avec Cameron et… Rien de ce qui en a découlé ne serait arrivé. Mais Hilary ne pouvait pas juste lui pardonner et tourner la page aussi facilement, sans aborder le problème. Ce serait trahir Cameron et ce serait se trahir elle-même. L'honnêteté, c’était important. Que quelqu’un lui mente, c’était déjà horrible. Que ce soit quelqu’un de proche d’elle, c’était encore pire. Bonus si c’était pour causer du tort à quelqu’un sans raison. Double bonus quand on utilisait sa foi pour trouver l’excuse parfaite, mais Priest n’avait pas fait la lumière sur la question à un tel extrême. Heureusement pour Jade, d’ailleurs, sinon cette entrevue n’aurait certainement jamais eu lieu.

Est-ce qu’elle s’était promis de se montrer forte et de ne pas pleurer ? Probablement. Est-ce qu’elle allait échouer ? Plus que certainement. Toutefois elle arrivait encore à garder la face tant qu’elle ne regardait pas Jade en face. Un regard, un regard sur la Capitaine - oh, mon capitaine ! - aux bras croisés et à l’envie de partir le plus vite possible, et la jeune fille céderait à la pression, expédierait la chose et se noierait dans ses larmes sans n’avoir rien réglé. Belle fin de journée. Non, vraiment, elle faisait de son mieux pour rendre la chose le plus agréable possible, parce que la pilule était décidément difficile à avaler pour toutes les deux. « Tu… Tu veux pas t’asseoir d’abord ? On peut se mettre dos à dos si tu préfères. » Parce qu’à rester debout, ça la stressait juste encore plus. « Ça risque d’être long, alors… » Pas forcément long en reproches, mais long en explications. Un an de déception et six mois sans parler… Ça faisait accumuler beaucoup de sentiments et de pensées au grenier. Et, Seigneur !, elle ne savait toujours pas comment entamer la chose !

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Song for lost girlsConfrontation avec HilaryLa surface cristalline qui s’étendait à des lieues devant elles était particulièrement calme, ce matin. Comme si rien au monde ne pouvait perturber, comme si un simple ricochet ne suffirait pas à troubler le voile parfaitement lisse qui recouvrait le lac noir. Pourtant, Jade était toujours en colère. Même si se tenir face à Hilary alors qu’elles ne s’étaient pas approchées durant des semaines la plongeait dans un état de profond désarroi, elle fit le choix de ne rien en laisser paraître, et de se camoufler derrière une carapace d’intransigeance. Et elle, avec son ton doucereux, qui s’adressait à elle comme si elle n’était qu’une enfant qui avait mal interprété la situation… De qui elle moquait ? Si elle lui avait réellement manqué, elle lui aurait écrit, elle lui aurait parlé. Elle aurait fait quelque chose, et ne serait pas restée là, les bras ballants, jusqu’à un matin de Février. Menteuse ! « Tu pouvais pas ? Comment ça, tu pouvais pas… ? On t'en a empêché ? » demanda-t-elle, interloquée, comme si elle attendait que la Gryffondor lui livre une meilleure explication. Le regard sévère et empreint d’une certaine dureté, elle laissa ses yeux posés sur Hilary, sans pour autant perdre de sa stature. « Je regrette, on peut pas quand on est malade, ou quand on a une jambe cassée. Ou qu’on a entraînement, ou qu’on est collé. Toi, c’est juste que t’avais pas envie. » constata-t-elle amèrement, ses paroles chargées d’un voile de reproches qui lui étaient tout droit adressés. Non, elle ne la laisserait pas lui faire ce coup-là : en plus de six mois, ce n’était pas quelques empêchements qui avait fait obstacle à leur relation, c’était un choix délibéré. Dès lors qu’elles s’étaient croisées, en cours, dans les couloirs, sur le terrain, ou même le soir de Halloween, c’était Hilary qui avait fui, délibérément. C’était Hilary qui avait choisi de ne répondre à ses courriers que par le silence. Et toujours Hilary qui se comportait comme si elles n’avaient jamais été amies, alors qu’elle passait vraisemblablement le plus clair de son temps agglutinée à Cameron Brown. Elle ne le connaissait même pas un an auparavant, et voilà qu’il devenait son âme soeur, maintenant ! Tout ça, c’était n’importe quoi, et Jade n’avait pas l’intention de se laisser avoir par les beaux discours. Parce que elle, elle en avait réellement souffert. Pendant que Hilary jouait à la nouvelle meilleure amie du sociopathe de service, elle l’avait complètement abandonnée, alors pourtant que leur amitié semblait inébranlable, comme si elle n’obéissait pas aux règles qui régissaient les autres relations. Pourtant, force était de croire que si…

Demeurant levée comme pour établir une certaine limite entre elles, Jade demeura de marbre, face au vent. Non, elle n’avait pas envie de s’asseoir, ni de faire comme si de rien n’était, ni de reprendre leurs petites habitudes d’avant. Elle avait été déçue, et comme lorsqu’elle s’était disputée avec Blaze, elle tenait à le faire savoir. Pourtant… elle savait bien qu’en repartant sans avoir eu cette discussion inévitable, elle ruminerait des jours durant, macérant longuement les quelques mots brefs qu’elles venaient d’échanger. Ce n’était pas ça non plus, la bonne solution. « Ok pour le dos à dos. » lâcha-t-elle finalement en soupirant, consentant à perdre de la hauteur pour s’agenouiller, au niveau de la Gryffondor déjà assise. Faisant fi du craquement sonore des planches du ponton, Jade replia ses jambes contre sa poitrine, s’adossant contre celle qui avait longtemps été son amie, retrouvant son contact avec une certaine amertume. A l’entendre, ça ne ressemblait qu’à un malentendu qui n’attendait qu’à être éclairci… Mais plus de six mois s’étaient écoulés avant qu’elle ne daigne lui offrir ne serait-ce qu’un signe de vie, et ça, Jade aurait toutes les peines du monde à le lui pardonner. Dès qu’elle avait commencé à traîner avec Brown, Hilary avait laissé ses lettres sans réponse, comme si elle n’existait plus pour elle, comme si elle avait littéralement choisi son camp entre eux deux. La déception avait été aussi brutale qu’inattendue, parce que Jade ne l’aurait jamais soupçonné : pas de sa part à elle. Pas alors qu’elle lui avait semblé si loyale et dévouée, au cours de toutes ces années. Alors quand la Gryffondor parlait avec ce ton d’espoir, comme s’il était possible de tout arranger, Jade soupira, le regard perdu vers la forêt qui s’étendait face à elle. « Je sais pas, Hilary. Dis moi ce que t’as à me dire, ou je m’en vais. » intima-t-elle d’un ton calme, mais sans appel. C’était réellement étrange, de s’adresser à elle comme à une simple camarade de classe, et non plus comme Hilly, son amie pirate… Mais elle n’avait pas l’intention de passer la journée à épiloguer sur ces mois de silence pesant sans d’abord comprendre leur cause. Finalement, c’était mieux qu’elles ne se regardent pas ; Jade n’était pas d’humeur à partager les émotions fluctuantes qui se lisaient sur son visage, allant de l’amertume au ressentiment, de la colère à la tristesse, du regret au dépit. Alors, elle laissa ses yeux se perdre dans l’horizon, attendant qu’un nouvel élément vienne débloquer la situation, comme un pavé dans la mare, un éperon brisant la glace.

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hexagone gare de l'amitié

C’était horrible, de lui avoir donné rendez-vous si près du lac. C’était horrible de voir toute cette nature, si calme, si belle, si pleine d’harmonie ; imperturbable. Une nature indifférente aux malheurs des autres, qui ne compatissait jamais à la tristesse et à la souffrance. Qui continuait d’être, finalement, juste d’être. Il y avait eu des fois où Hilary ne s’était jamais vraiment sentie à sa place, sur terre. C’était toujours avoir un pied dans l’eau et avoir l’autre dans les airs, mais jamais sur le sol. Sur le sol, c’était trop compliqué, trop sombre, trop instable ; alors que dans l’eau ou dans les airs… tout était plus léger, plus agréable. Elle en avait mis du temps pour se trouver une place stable sur ce sol, trouver un endroit solide qui ne s’écroulerait pas sous ses pieds quand elle s’écroulerait. Et pourtant… avoir rendez-vous ici pour un moment si important, si grave… Ça lui donnait juste envie de plonger dans l’eau et de se laisser emporter au milieu du lac, loin de tout. Peut-être qu’en s’éloignant encore un peu, toujours un peu plus, tout finirait par s’effacer. Plus de problèmes, plus de colère, plus de disputes, plus de déception, plus de mensonges, plus de trahison. C’était horrible parce que la tête blonde pensait sincèrement avoir pris les bonnes décisions, mais une petite voix dans sa tête lui disait qu’elle aurait dû s’éloigner encore un peu plus pour ne pas avoir à affronter cette situation aujourd’hui. Cela aurait voulu dire de ne plus parler à Jade, ne plus parler aux amis de Jade, ne plus faire de Quidditch, ne plus… ne plus rien faire en rapport avec la Poufsouffle. Abandonner ses fantaisies maritimes ? Honnêtement, elle en aurait beaucoup souffert, mais elle en aurait été capable, si seulement il n’y avait pas eu cette discussion avec Oncle Ben qui lui avait donné un peu de courage pour avoir cette discussion avec Jade. Discussion qui commençait si mal… Hilary n’avait pas voulu crier, mais elle avait élevé la voix malgré tout. Comment Jade pouvait-elle dire que ça ne lui avait pas manqué ? Ça lui avait fait mal aussi de ne plus lui répondre ! Elle s’en était arrachée les cheveux chaque soir dès qu’elle avait reçu un mot de sa part ! Elle en avait eu mal au ventre de l’ignorer alors qu’elle était juste en face d’elle au point de ne pas réussir à manger le lendemain matin ! Elle s’était retournée la tête encore et encore en se demandant si elle faisait les choses correctement, au point de demander conseil à Opal qui lui avait dit de rompre tout contact, et quelque part, oui, c’était un peu ce qu’elle avait fait, mais Hilary n’avait pas pour autant arrêté de penser à Jade, elle avait continué de réfléchir à trouver la bonne solution pour elles deux, alors, alors… ! « N-Non… ! » Non, on ne l’avait pas empêché de lui parler. Oui, c’était un choix qu’elle avait fait d’elle-même, et c’était un choix injuste, mais… mais de là à dire qu’elle n’en avait pas eu envie… Est-ce que c’était vraiment ça ? Est-ce qu’elle avait été aussi horrible avec son amie ? Est-ce que c’était vraiment ce que Jade pensait d’elle ? Une amie qui abandonne ses potes dès qu’elle trouve quelqu’un d’autre avec qui elle s’entend mieux ? Qui disparaît sans rien dire et qui revient comme une fleur ? Un… un pirate qui déserte pour un meilleur gallion en emportant le trésor… ?

Dur de voir l’eau du lac si calme et si plate quand tout en elle commençait à prendre l’apparence d’une masse hideuse et visqueuse, prête à sortir les pics au moindre chamboulement trop dangereux pour son intégrité. Honnêtement, la Gryffondor n’avait ni la force de se lever ni la force de parler suffisamment fort pour que Jade puisse l’entendre. En fait, elle aurait même aimé pouvoir tout lui communiquer mentalement, pour ne plus avoir à parler, mais elle n’avait pas ce pouvoir et doutait que quiconque ne l’ait… Alors elle invita le capitaine à s’asseoir, dos à elle, pour qu’elle n’ait pas à la voir trop longtemps. Hilly pensait que cela restait la meilleure solution possible, mais sentir le dos de Jade contre le sien… En fait, c’était peut-être pire d’avoir ce contact entre elles que de se voir. Elle prenait vraiment conscience de toute la distance qu’elle avait mis entre elles et… Même dos contre dos, finalement, Hilly comprenait que Jade n’allait plus se reposer sur elle. C’était le moment de se montrer forte, ma fille ! Il ne fallait pas laisser les sanglots prendre assaut de ton corps avec des soubresauts ! Le dos droit et fier ! La verve… La verve quoi ? Seigneur, elle avait la bouche pâteuse et la gorge sèche. Par où commencer ? Comment expliquer six mois de silence ? Un an de distance ? Évidemment, Jade s’impatientait. « J-Je… ! » Elle ? Oh, Hilary n’avait pas envie de faire des reproches à Jade. Elle voulait juste lui expliquer ce qu’il s’était passé, mais tout sonnait comme des reproches ou des accusations, dans sa tête. C’était étouffant, devoir réfléchir à ce point pour bien faire les choses. Alors autant ne pas trop réfléchir. Ça ne lui avait jamais fait grand bien. Et ça leur avait déjà fait plus de mal que de bien. Ce serait difficile de recoller les pots cassés, certes, mais Hilary voulait essayer. À sa façon. « Désolée… Pour avoir ignoré tous tes messages et plus encore, je suis désolée. » Mieux valait commencer par-là, pas vrai ? « Il fallait juste que… que je fasse le tri, dans ma tête et j’aurais pas pu si on avait continué de se voir comme avant. Ça aurait pas été correct. Ni pour toi ni pour moi. Tu m’as menti, Jade. Sur Cameron. » Et même si cela faisait si longtemps qu’elle le savait, cela faisait si mal de le dire à voix haute. C’était comme voir sa confiance bafouée par un acte ignoble, digne du meurtre. Hilary enchaîna rapidement : « Et je suis pas en colère ! Je suis juste vraiment… vraiment déçue. Parce que je pensais pas que tu aurais pu me mentir, surtout sur un truc pareil. Et… Et j’avais l’impression de plus te connaître, Jade… Comment tu voulais que je fasse comme si rien ne s’était passé ? Je pouvais pas faire comme avant. Et je pouvais pas non plus t’abandonner sans qu’on s’explique. Il m’a juste fallu du temps… » À tour, Hilly rapporta ses jambes contre elle pour pour la tête sur ses genoux. Ne pas pleurer : objectif raté.

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Song for lost girlsConfrontation avec HilaryAcceptant la proposition de son amie - ou ancienne amie, comment savoir - elle s'abaissa jusqu'à arriver à la hauteur de Hilary, et se plaça dos à dos avec elle. A la fois, leur proximité était perturbante... elles s'étaient tellement éloignées ces derniers temps, que la retrouver de cette manière était franchement étrange. Incapable de la voir, seulement de la sentir au niveau de ses épaules, et de ses lombaires, Jade se fit la réflexion que cela faisait bien longtemps qu'elles s'étaient perdues de vue. Puis, la Gryffondor commença à parler, et elle l'écouta silencieusement, se remémorant chaque détail de cette fameuse journée d'hiver, l'an passé, où elle avait poussé l'adolescente à franchir quelques unes de ses limites. Elle n'avait pas repensé à cette journée depuis bien longtemps... mais force était de constater que ce qui clochait entre elles remontait jusque là. Elle grimaça légèrement en entendant le nom de Cameron, imaginant sans mal ce dernier se complaire à lui raconter à des salades, et à l'attirer dans ses filets... Et lorsqu'elle eut terminé, Jade se redressa légèrement, faisant craquer légèrement l'une des planches du petit ponton. « C’est vrai, j’l’ai fait. » avoua-t-elle sans peine. Là où elle savait parfaitement mentir le plus effrontément du monde à ses professeurs, leur soutenant avec la plus grande des mauvaises fois que non, ce n'était pas elle qui avait collé des chewing-gums sous la table, il fut pourtant naturel de répondre honnêtement à Hilary. Tout d'abord parce que le ton de la discussion l'exigeait, et que même si elle éprouvait ce profond malaise envers la Gryffondor, n'étant pas habituée à se sentir aussi embarrassée à cause d'un acte qu'elle ne regrettait pourtant pas, elle sentait intimement qu'elle la lui devait, cette vérité.

Elle ne s'en voulait pas spécialement pour cette histoire de caleçon... et avec un peu de recul, elle se dit qu'elle aurait tout simplement du demander à Misha, ce dernier n'aurait certainement pas eu besoin d'une histoire de biche pour obtempérer. Mais il était vrai qu'elle n'avait pas été sincère avec Hilary, en déguisant la vérité à son avantage pour la pousser à la croire, et pour cette raison, elle lui devait bien quelques justifications. Serrant ses doigts, paume contre paume, elle inspira longuement, et s'expliqua : « Il m’a énervée, il m’a provoquée exprès alors qu’il savait très bien que ça se passerait mal, et je l’avais mauvaise. J’avais envie de le faire payer pour être un con et s’être comporté comme un con, t’étais là, et j’me suis dit que ça serait rigolo, que ce serait une bonne vanne à faire. J’avais vraiment pas envie de te faire du mal, ou que tu te sentes blessée à cause de moi, j’y ai juste pas réfléchi. » Elle marqua un instant de pause, tentée de jeter un oeil en arrière, comme pour deviner la réaction de Hilary. Mais faute de pouvoir observer son expression faciale ou d'y lire quoi que ce soit, elle demeura immobile, de dos. Elle soupira longuement, les yeux dirigés vers l'horizon, lorgnant sur la surface du lac, en cherchant les bons mots, ceux qui feraient la différence... « Et t’as le droit d’être en colère contre moi pour ça. T’as le droit de penser que c’était méchant et nul, et j’aurais pas du te mentir. » reconnut-elle d'un ton étrangement calme, auquel elle n'était pas habituée elle-même. Ce genre de discussion avait pour don de la mettre un peu mal à l'aise. Elle n'avait pas coutume d'avoir à rendre des comptes à qui que ce soit, et assumait généralement ses décisions, aussi insensées fussent-elles... Mais l'importance qu'elle accordait à ses amitiés l'obligeait à penser différemment, et à réfléchir dans un autre sens. Ce qu'elle avait fait à Hilary, ça n'était pas bien... Et ce serait peut-être même un motif légitime pour mettre fin à leur amitié pour de bon.

Cependant, il y avait autre chose, et si elles devaient quitter les lieux chacune en empruntant un chemin différent, alors elle devait savoir. Tentée à nouveau de tourner la tête pour regarder en direction de son ancienne amie, elle se risqua finalement à demander : « Ce que je comprends pas… c’est à quel moment ? À quel moment, il est devenu plus important que moi ? Je croyais que les copines, ça passerait toujours d’abord. Il t’a monté la tête contre moi ? ». C'était toujours une possibilité après tout... ce mec était un vrai cancer ambulant, il suffisait de voir comment il avait réussi à jouer la victime auprès d'Hatwell ! Mais Jade commençait à croire que ça n'était même plus seulement ça. En un an, elle avait bien changé, Hilary... si la timidité qui la caractérisait autrefois perdurait toujours, il lui fallait bien constater qu'elle avait aussi appris à développer une certaine force de caractère, même si elle émergeait à peine. Les yeux perdus sur les remous qui troublaient la surface pourtant parfaitement lisse du lac, le ton de Jade changea soudainement. « T’aurais pu m’en parler ! C’est pas ça qu’on est censées faire ? Ouais, je comprends bien qu’il t’a fallu du temps… Mais pendant des mois, ça ressemble plus à… un genre de punition, j’sais pas ! Si tu voulais juste plus me voir, ça aurait mieux de me le dire cash. Moi, je tiens à toi, pour de vrai, alors oui, t'as gagné, ça m'a fait un truc ! » s'emporta-t-elle, les joues empourprées, ne sachant trop comment elles pourraient parvenir à un terrain d'entente. Et si cette discussion ne leur permettait même plus de se comprendre ? Alors ce serait fini, d'un coup ? Elle préféra ne pas y songer, mais une drôle d'impression s'installa en elle, la plongeant dans un état de profonde mélancolie.

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Finalement, cette idée de se mettre dos à dos pour épargner Jade de devoir la regarder servait peut-être bien plus à Hilary qu’elle ne l’aurait pensé. Est-ce qu’elle aurait été capable de parler aussi distinctement, aussi librement si elle avait eu Jade en face d’elle, ses yeux reflétant indifférence et colère braqués sur elle ? Est-ce qu’elle aurait été capable d’en dire autant et d’être aussi honnête ? Oh, honnête elle l’aurait été, elle ne pouvait pas être autre chose qu’honnête, ce qui n’était pas le cas de tout le monde, mais elle n’en aurait certainement pas dit autant. Avoir Jade à ses côtés, c’était impressionnant ; avoir Jade en face de soi, c’était intimidant. Pourtant, il fallait que la Gryffondor dise tout ce qu’elle avait sur le cœur. Six mois de silence, bizarrement, ça ne se résumait pas si bien en deux trois phrases. Hilary n’était même pas sûre d’avoir réussi à exprimer tout ce qu’elle voulait… Elle lui avait qu’elle était plus déçue qu’en colère, qu’elle n’avait pas apprécié qu’elle lui mente, qu’elle était désolée pour le temps d’attente, qu’il lui avait fallu du temps… Et après ? La tête blonde pleurait déjà qu’elle n’avait même pas demandé si elles pouvaient rester amies malgré tout. Après tout, cela dépendrait des réponses de Jade. Si la Capitaine continuait de lui mentir, comment pourraient-elles rester amies ? Mentir, ça entrait en contradiction avec ses valeurs. Elle ne demandait pas à Jade de ne plus le faire, mais ne de pas lui faire. Tout comme elle ne lui demanderait pas d’être gentille avec Cameron pour préserver leur amitié. S’ils ne s’entendaient pas, c’était leur problème, elle ne voulait juste pas… y être mêlée plus que ça. Ou qu’ils mêlent d’autres personnes comme Oncle Ben, à tout ça. C’était pas la bonne façon de procéder. Mais, après, Hilary n’était pas une experte en relations, amicales ou amoureuses. Elle pouvait bien parler, finalement, elle n’était pas plus éclairée que Jade ou que quiconque sur ce qu’elles auraient dû faire, toutes les deux. Elles avaient fait des erreurs. À elle de les réparer.

Mais, tout de même, Priest ne s’était pas attendue à ce que Jade soit aussi honnête d’entrée de jeu : elle avouait. Elle avouait avoir menti ce qui, quelque part, faisait beaucoup de bien à Hilary. C’était déjà un pas en avant, pas vrai ? Un progrès. Et ce fut au tour de la Poufsouffle d’expliquer ses raisons, ses agissements, de se justifier sur ce qui s’était passé. Hilary savait que Cameron et Jade ne s’entendaient pas, mais elle ne savait pas à quel point ni pourquoi. Pour que Jade en vienne à lui mentir et à lui jouer un tour pareil, cela devait être une haine énorme. Quelque part, elle voulait savoir exactement ce qu’il s’était passé entre eux, parce que si Cameron avait mal agi comme Jade avait mal agi, ça la détruirait tout autant. Mais d’un autre côté, elle n’avait pas envie de savoir. Hilary n’avait pas le courage et l’énergie suffisants, encore, pour affronter toutes les révélations du monde. Pour une fois, ne pas savoir était préférable que d’obtenir toutes les réponses du monde. Les idiots étaient les plus heureux de la terre, à ce qu’on disait. C’était peut-être vrai… Pourtant, vraiment, ce n’était pas de la colère qu’elle ressentait - plus maintenant, en tout cas. La colère ne lui mettait pas autant de lourdeur dans le cœur. Elle avait le dos tendu et les bras crispés autour de ses jambes. « C’était méchant et nul, et t’aurais pas dû me mentir non… » Hilary avait la naïveté de croire que ses amitiés valaient plus qu’un mensonge et qu’aucun de ses amis ne chercherait à la tromper de cette façon. Et même si, avec Jade, elles n’étaient pas le duo le plus naturel de l’école, elle s’était au moins attendu à ça de sa part. Que la Poufsouffle mente à ses autres amis si elle le désirait, mais qu’elle ne lui fasse pas ça. Pas à elle. « Je veux pas que tu me mentes encore une fois… » C’était sa seule demande. Cela ne voulait pas encore dire qu’elles redevenaient amies, mais du côté d’Hilary, elle en laissait la possibilité… Si Jade le voulait bien. Et qu’elles en étaient capables, toutes les deux.

Néanmoins, l’histoire ne s’arrêtait pas là. Jade ne s’était pas excusée à proprement parlé, mais Hilary s’était expliquée, et Jade s’était expliquée, et la Gryffondor était prête à lui pardonner et à refaire comme avant - en sachant pertinemment que ce serait tout de même différent. Ce qu’il y avait entre Jade et Cameron, Hilary ne s’en préoccupait pas. Mais ça n’avait pas l’air d’être le cas de Jade. Qu’est-ce qu’elle voulait qu’elle lui dise ? Cameron était devenu plus important que beaucoup de personnes, elle ne contrôlait pas ses sentiments ! « Il a rien fait ! C’est lui qui m’a dit que tu m’avais menti, c’est vrai, mais c’est tout. Tu vois le mot des Anonymes Indignés ? Il pense que ça vient de toi. Moi j’le crois pas. » Ce n’était peut-être pas grand-chose, mais Hilary voulait lui faire comprendre qu’elle ne croyait pas tout ce qu’il disait non plus. Elle était toujours naïve et bête, mais moins qu’avant. « Et puis je sais pas… Tu me l’as vendu comme un monstre et j’ai juste trouvé un mec sympa, drôle et sincère. Ça s’est fait tout seul. » La tête blonde prit une grande inspiration et changea de position pour se mettre en tailleur. Bien sûr que les amies ça passait avant beaucoup de choses. Mais Jade ne pouvait pas lui reprocher d’être tombée amoureuse. « Je t’ai pas remplacée, si c’est ça la question », fit-elle en se tournant de trois quart vers Jade pour la première fois depuis qu’elles étaient assises. « Jamais ! » Qui pourrait être assez horrible pour remplacer quelqu’un avec quelqu’un d’autre ? Cameron et Jade n’avaient rien en commun, ou presque. Enfin, elle ne les considérait pas comme étant pareils et ne les aimait pas de la même façon. Ça changeait tout, ça faisait toute la différence. Cependant, il fallait croire que cela ne suffisait pas à Jade. Cette dernière prit la mouche, et il fallait bien avouer qu’Hilary fut piquée de colère également au changement de ton du Capitaine. « Mais merde Jade ! » - Seigneur pardon pour l’injure - « J’avais envie de te voir ! J’allais pas te dire que je ne le voulais plus alors que c’était pas vrai ! » Cette fois-ci, Hilary se retourna franchement vers sa camarade : « Moi aussi je tiens à toi ! Pourquoi tu penses que j’ai pris mon temps ? Je voulais pas faire d’erreurs, je voulais être sûre de moi et de toi et… Et je voulais qu’on se donne une nouvelle chance comme il faut, pas qu’on fasse comme s’il n’y avait rien eu et qu’on gâche tout ensuite. » Elle pouvait pas lui dire que c’était de sa faute. Elle avait pas le droit, elle pouvait pas faire ça ! C’était trop injuste ! Hilary tentait de paver le monde de bonnes intentions ! Jade pouvait pas juste venir lui dire qu’elle avait mal posé les dalles au lieu de venir l’aider.

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Song for lost girlsConfrontation avec HilaryCertes, dans cette affaire, quelques torts lui revenaient. Jade n’était pas la plus douée pour l’admettre, lorsqu’elle était prise en faute, mais elle se souvenait avoir franchi une certaine limite avec Hilary. Une ligne au-delà de laquelle elle ne s’était jamais aventurée… Et visiblement, c’était ce qui avait changé les choses, quand bien même elle restait convaincue qu’elle était dans son bon droit. Elle garda le silence quelques secondes, recevant les reproches de Hilary sans broncher, reconnaissant leur légitimité. Puis, elle ouvrit finalement la bouche, et déclara, d'un ton ferme… « D’accord. Je le ferais plus. » Libre à elle de la croire ou non. Elle-même ignorait à quel point elle serait engagée dans cette résolution, mais Hilary avait le droit à la vérité ; c’était une affirmation qu’elle tenait à ancrer dans sa tête. Même si elles quittaient la rive du lac en froid et ne s’adressaient plus jamais la parole, la guerre qu’elle menait avec Cameron ne l’impliquerait plus à l’avenir… D’ailleurs, c’était à se demander, à quoi ça ressemblerait, maintenant. S’ignoreraient-elles dans les couloirs, en s’évitant soigneusement, songeant avec amertume aux liens forts qui avaient existé entre elles, par le passé… ? Si Hilary était réellement entichée de Cameron, elle avait du mal à imaginer qu’elles puissent retrouver leur relation d’antan, et faire comme si de rien n’était.

Il suffisait de l’entendre parler de lui pour l’énerver… ce qui ne manqua pas lorsque la Gryffondor évoqua le mot des Anonymes machinchose. « Haha, j’y crois pas. Le culot de ce mec. » ricana-t-elle en levant les yeux au ciel. Il était sérieux lui ? Et dire qu'à côté de ça il allait volontiers raconter à la prof d'histoire de la magie qu'il n’était pas l’auteur des lettres piégées qu’il lui avait envoyés tout l’été, et qu’il ne s’aventurait jamais à la diffamer… Maintenant, tout ce qu’il avait trouvé de mieux, c’était aller raconter à Hilary que c’était elle à la tête d’un groupe qui sortait littéralement de nulle part. Il comptait abuser de son statut de préfet pour la mettre en retenue pour ça, tant qu’on y était ? Réellement, la directrice nommait n’importe qui… Elle reprit cependant son sérieux lorsque Hilary se mit à parler de lui en termes élogieux. Sérieusement, elle avait toute sa tête ? C’était à se demander combien de temps exactement elle avait passé en compagnie de Cameron pour le trouver sympa et drôle. Grimaçant en repensant aux moments souvent désagréables qu’elle avait passés en compagnie du préfet de Serdaigle, elle chercha à imaginer dans quel monde il pouvait ressembler à la personne que décrivait Hilary. Elle se redressa et tendit sa colonne vertébrale, toujours dos à dos avec son amie… « On doit vraiment pas parler du même, celui que je connais c’est un fil… c’est tout le contraire. » Oups, ça avait failli sortir. Dans le pire des cas elle n’aurait qu’à dire que c’était "filou" qu’elle avait en tête, et non pas "fils de pute". Décidément, entre Blaze qui ne réfléchissait à rien et qui s’était entiché d’une garce, et elle qui semblait avoir le béguin pour le roi des abrutis, c’était à croire que tous ses amis s’étaient donné le mot pour craquer sur de parfaits imbéciles.

Demeurant interdite, Jade réfléchit quelques secondes, et demeura ainsi méditative, le regard porté sur la surface miroitante du lac. Est-ce que tout cela en valait réellement la peine ? Elle avait beau retourner tout cela dans son esprit, elle ne parvenait pas à comprendre. Et pourtant, elle essayait… « Tu l’aimes… genre vraiment bien ? » finit-elle par demander. Elle avait l’impression de déjà connaître la réponse, mais c’était ce qu’elle avait demandé à Blaze en début d’année, avant de se résoudre à mettre fin à leur longue dispute. Ça n’arrangerait certainement pas leurs affaires, mais ça l’aiderait probablement à y voir plus clair, quand bien même il était absolument surréaliste d’imaginer quelqu’un s’intéresser à ce crapaud… Puis, elle sentit dans son dos les muscles de Hilary bouger, puis un léger mouvement au niveau de ses lombaires. La Gryffondor semblait s’être retournée dans sa direction, et Jade dut se mordre la lèvre pour se forcer à ne pas manifester l’émoi qui s’était emparée d’elle. Elle n’avait pas été remplacée, donc. Mais pour autant, qu’est-ce que ça changeait… ? Elles étaient toujours là, plantée sur ce ponton, incapables de se faire face, se reprochant des faits qu’elles ne pourraient probablement pas se pardonner. Ça ressemblait peut-être à ça, la fin.

Ses yeux s’embuèrent lorsque son amie haussa le ton - elle ne l’avait jamais entendu injurier qui que ce soit - et elle dut passer le bout de sa manche sur ses yeux pour faire disparaître la trace minuscule de sa mélancolie. Plusieurs fois, elle fut tentée de se retourner, elle aussi… « Je sais pas Hilly… tu crois qu’on peut faire ça ? Genre tout reprendre à zéro comme s’il s’était rien passé ? » demanda-t-elle en levant les mains, comme si c’était une idée absurde. Elle avait beau essayer, elle ne parvenait pas à imaginer comment il serait possible à l’avenir de composer entre eux trois… Ce château était déjà trop petit pour son conflit avec Cameron Brown, alors qu’est-ce que ça donnerait s’ils devaient composer ensemble ? « Et puis, tu te doutes bien que ça risque de pas plaire à ton copain Cameron, faudrait pas le froisser. Tu lui as dit que tu suivais un cours de cuisine, pour pouvoir venir me voir ? » lâcha-t-elle amèrement. Il ne fallait pas être naïf, Hilary n’avait pas du recevoir sa bénédiction pour pouvoir honorer ce rendez-vous. Il avait du jubiler en remarquant qu’elles ne s’adressaient plus la parole… Peut-être n’était-ce pas lui qui l’avait montée contre elle - et elle se permettait encore d’avoir quelques doutes sur la question -, mais toujours était-il qu’il avait bien du se réjouir. Jade soupira, et entoura ses genoux avec ses bras, les ramenant à sa poitrine. Elles avaient grandi, depuis un an… Il s’en était passé, des choses, si bien que la perspective d’un retour en arrière semblait quasiment impossible. Pourtant, elle ne put taire la question qui lui venait à l’esprit, la lèvre inférieure tremblant légèrement… « On fait quoi, maintenant… ? ». Il était impossible d’y voir clair dans le paysage qui se dessinait à l’horizon, pourtant Jade ne pouvait non plus se résoudre à imaginer que c’était terminé, et qu’elles se lèveraient en même temps pour emprunter un chemin différent, sans se retourner. C’était trop difficile… Pour le coup, elle espérait que Hilary aurait une meilleure solution qu'elle.

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Que Jade reconnaisse certains de ses torts, c’était presque un miracle, mais qu’elle accepte de ne plus lui mentir, ça… ça dépassait les espérances d’Hilary. Non pas qu’elle n’avait pas espéré que la Capitaine lui promette une chose pareille comme elle l’imaginait dans ses plus sauvages de ses rêveries, mais bien souvent, ce genre d’attente ne se réalisait jamais. Enfin, ça ne s’était jamais réalisé pour elle… jusqu’à maintenant. À croire que Dieu voulait réellement leur offrir une seconde chance, à toutes les deux. Parce que c’était ainsi que la tête blonde voyait les choses : une seconde chance. Si Jade admettait avoir mal fait les choses, qu’elle s’excusait, que Hilary s’excusait également, et que la Poufsouffle acceptait de ne plus lui mentir, la rouge & or ne voyait pas comment il ne serait pas possible pour elles de redevenir amies comme avant. Oh, certes, dans les faits, les choses ne se passaient jamais aussi simplement, et les ressentiments avaient la prise tenace sur le cœur des gens, mais… pour une fois, vous savez ? Un peu d’espoir et de facilité, ça ne faisait pas trop de mal.

Plus si naïve et plus si bête. Du moins, c’était ce qu’Hilary pensait être à ce jour. Plus si innocente non plus, du moins en ce qui concernait les jurons que les gamins de son âge pouvaient débiter. Si ça l’avait gênée au début de sa scolarité à Poudlard, quand on sortait d’un village majoritairement catholique et portant la bienséance comme étendard, ça avait de quoi choquer, bien sûr. Mais avec le temps, c’était comme avec tout : on s’habituait. On s’habituait à entendre « va te faire enculé » et autre au détour d’un couloir. Après, s’habituer ne voulait pas dire tolérer, mais même pour ça, Hilary avait fini par accepter le fait que beaucoup de ses amis n’auraient pas la même retenue qu’elle sur le sujet. Cameron ne l’avait pas, en tout cas. Jade non plus. Alors que cette dernière se retienne de jurer, vraiment, ça la fit sourire. Cela voulait dire qu’elle faisait des efforts pour ne pas la vexer, non ? Qu’elle tentait d’aller dans son sens ? Ça lui faisait chaud au cœur, à tel point qu’Hilary se demandait si elle avait fait suffisamment de pas vers Jade de son côté aussi… Il ne fallait pas que ça paraisse déséquilibré non plus. Oui, elle voulait que Jade s’excuse pour les mensonges et les mauvaises actions. Mais Hilary s’excusait pour l’ignorance et le temps que ça avait pris. Chacune ses torts, chacune ses excuses.

C’est sûr que les choses avaient beaucoup évolué, depuis la dernière fois qu’elles s’étaient parlées. Évidemment que sa relation avec Cameron était un détail qui allait revenir sur le tapis, mais a question presque innocente de Jade lui fit louper un battement malgré tout, et quand elle pensa à Cameron, elle en manqua quelques autres. Est-ce qu’elle l’aimait vraiment bien ? Et bien… il était grossier, oui, d’apparence indélicate comparée à Charles par exemple, capables d’autant de méchanceté que Jade et de déblatérer des mensonges, ça elle n’en doutait pas, mais il s’était montré honnête avec elle, jusqu’à présent. Il avait une petite sensibilité, avait la volonté de faire les choses bien et Hilary avait toujours envie de passer sa main dans ses cheveux. Elle avait probablement vécu les meilleurs mois de sa vie grâce à lui, et ça semblait irréel. Mais, en vérité, toutes ces raisons étaient presque futiles quand on remarquait le sourire qui planait sur ses lèvres rien qu’à la pensée du Serdaigle. « Peut-être un peu trop bien, oui… » Hilary n’expliquait pas l’amour comme elle n’expliquait pas l’existence de Dieu : elle acceptait les deux sans se poser de questions… Mais son amour pour Cameron ne venait pas remplacer celui qu’elle portait pour Jade, bien plus platonique celui-ci, certes, mais qui était tout aussi authentique et sincère ! Il fallait que Jade le comprenne et Hilary se tourna à moitié vers la Poufsouffle pour le lui dire. Pour l’affirmer, même, avec l’énergie du désespoir, probablement, car même si les choses avançaient et se démêlaient, elles avaient l’air de couler vers le fond sans espoir de flotter à nouveau…

Alors, oui, oui prendre son temps avait augmenté le mal qu’elles s’étaient fait, toutes les deux, mais la tête blonde n’avait pas vu d’autres solutions, n’en avaient pas envisagé d’autres et… et elle pensait sincèrement que tout reviendrait à la normal ! Enfin, elle l’avait cru, au début. Maintenant… maintenant elle continuait d'espérer qu’elles repartiraient d’ici amies, mais peut-être plus de la même manière qu’avant. On ne pouvait pas oublier ce qu’il s’était passé. Ce serait pire de faire comme s’il n’y avait rien eu. Elles ne pouvaient pas faire ça, pas maintenant, pas après tous les efforts. Hilary tenta de répondre à la question de Jade, sans succès. Elle s’était mise à genoux, tournée vers le dos de sa camarade, les poings serrés, la tête baissée, le dos voûté. Elle ne pouvait pas dire « non » parce que cela mettrait fin à tout. Elle ne pouvait pas dire « oui » non plus, car c’était impossible de faire comme si de rien n’était. Elles se feraient encore plus de mal, Hilary en était persuadée… Pourtant, est-ce qu’il existait une réponse qui ne soit ni l’un ni l’autre mais qui conviendrait tout de même ? Un « peut-être » qui ne paraîtrait pas aussi indécis ? Mais quand Jade remit Cameron sur le tapis, ça l’énerva un peu. C’était leur problème à elles deux, leur discussion, leur règlement de compte. « Je comptais lui dire après, qu’on s’était parlées, selon… » Selon le résultat de l’entrevue… Parce qu’elle n’avait pas à lui dire tout ce qu’elle faisait, et cette idée la chiffonnait plus qu’elle ne l’aurait pensé. Pourtant, elle comptait lui en parler après, parce que… parce qu’ils formaient un trio étrange, voilà tout, mais un trio qui n’avait pas lieu d’être. « Et il aura pas à se mêler de notre amitié tout comme je veux pas être mêlée à votre histoire. » Tout comme Jade n’avait pas à se mêler de son couple. Pour la tête blonde, les choses iraient très bien comme ça si tout le monde se mêlait de ses affaires. Oui ça la peinait de voir qu’ils ne pouvaient pas s’entendre. Oui, ça devait les énerver de voir qu’elle ne pouvait pas en choisir un et dire adieu à l’autre. Mais c’était comme ça. Ils n’en étaient pas à vivre dans la même maison et à dormir dans la même chambre ! Le château c’était déjà beaucoup, en vrai…

Jade ne s’était toujours pas tournée vers elle, et Hilly ne savait toujours pas ce qu’il en était, ce qu’il en saurait de leur relation à toutes les deux. Elles avaient parlé, mais c’était comme si rien n’avait avancé, comme si aucun changement n’avait démarré… Qu’est-ce qu’elles faisaient maintenant ? La question de Jade fit écho à la sienne et la Gryffondor soupira sans se cacher, toujours sur le point de pleurer. Elle savait ce qu’elle voulait : redevenir amie avec Jade. Mais était-ce la bonne solution ? Était-ce ce qu’elles devaient faire tout de suite maintenant, ou fallait-il attendre encore un peu, ou bien était-ce foutu pour toujours ? La vérité, c’est qu’elle ne savait pas. Et elle pouvait pas prendre la décision pour Jade non plus. « J… J’aimerais qu’on tente de redevenir amies, Jade… » fit-elle en prenant soin de ne pas lui imposer quoi que ce soit dans le choix de ses mots. « Si… Si tu veux pas, tu peux toujours partir, mais… mais si ça te dit, tu te tournerais vers… ? » Hilary ne termina jamais la phrase, appréhendant bien trop la chose. Elle voyait déjà Jade se lever et s’éloigner sans un mot, laissant là les dernières miettes d’espoir qu’elle gardait au creux de son ventre. Ça faisait peur. Ça faisait trop peur, merde !

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HJ:

Song for lost girlsConfrontation avec HilaryD'un point de vue extérieur, pour quelqu'un qui ne les connaissait ni l'une ni l'autre, la situation aurait pu paraître assez cocasse, tandis qu'elles étaient adossées l'une à l'autre à l'extrémité de ce ponton, le silence régnant sur le lac noir prenant parfois le pas sur leur conversation difficile. Plutôt sanguine, Jade s'était imaginée, devant le silence de son amie ces dernières semaines, que plus jamais elles ne se parleraient. La colère froide dans laquelle l'avait mis la réaction inattendue de Hilary l'avait conduite à imaginer la fin de leur amitié, et... maintenant, elle ne savait plus trop. A sa façon, elle tentait de comprendre, cherchant à découvrir les réels motifs qui les avaient conduites à s'éloigner autant. Parce qu'il y avait forcément une raison... Dont une particulièrement évidente, qui la faisait grincer des dents. Pour elle qui n'avait jamais pu piffer Cameron, et ce dès que leurs chemins s'étaient croisés dans le Poudlard Express, impossible d'imaginer qu'il puisse disposer de quelque qualité que l'une de ses copines pourrait trouver appréciable... Alors, lorsque Hilary lui avoua l'aimer plus qu'elle ne l'aurait du, elle leva un sourcil interloqué, et secoua la tête en levant les mains, comme cette situation était bien trop absurde pour être réellement envisagée. « C’est complètement ouf mais ok. T’es folle, mais admettons. » Elle était beaucoup trop bien pour lui... Même un véracrasse l'aurait été. Si ça se trouvait, il n'était même pas amoureux d'elle, et se servait simplement d'elle pour l'atteindre, afin de remporter leur guerre ! Et le pire, c'est que ça marchait : Jade écumait de rage en les voyant ensemble, nourrissait de sévères envies de meurtre envers ce benêt de Serdaigle qu'elle ne supportait pas de voir en peinture, et le maudissait de lui avoir piqué son amie. Alors... comment ? Qu'est-ce qui avait pu attirer Hilary chez lui ? La réponse demeurerait un nébuleux mystère.

En attendant, sur ce ponton, face à un horizon brumeux et incertain, elles étaient là, dos à dos, sans savoir quoi faire. D'ordinaire, Jade avait tendance à écouter son seul instinct, quitte à parfois le regretter... Mais cette fois, elle était partagée. Certes, elle avait réellement envie de se réconcilier avec Hilary, de mettre cette stupide histoire derrière elles, et d'avancer. Après tout, les copines devaient toujours pouvoir passer avant les garçons, non... ? Mais elle se sentait toujours intimement blessée de ce qui s'était passé entre elles. Alors, dodelinant de la tête, donnant un petit coup de pied dans l'eau glacée qui fit naître plusieurs ondulations sur la surface cristalline, elle répondit, sans conviction : « Ecoute, faut que je prenne le temps d’y réfléchir. Tout ça, ça fait beaucoup d’un coup et… » commença-t-elle sans savoir comment terminer cette phrase. Elle fit claquer la langue contre son palais, hésitante, cherchant les bons mots... Sans toutefois oser se retourner, elle se mordit légèrement la lèvre, risquant un coup d'oeil en arrière. Puis, finalement, elle se décida à briser ce mur invisible entre elles : elle pivota, faisant craquer quelques planches du ponton, et déposa ses mains sur les épaules de Hilary pour l'enlacer maladroitement, déposant sa tête sur son épaule quelques instants. Ce bref et intense contact la revigora, comme si elle réalisait qu'elle en avait eu besoin tout ce temps... Elles restèrent ainsi quelques minutes, étrangement serrées l'une à l'autre, retrouvant un peu de cette proximité que le temps leur avait fait perdre... Jade ne savait pas exactement ce qu'il était bon de faire, ou dire, alors dans le doute, elle resta muette et immobile, nichée contre son amie, avec qui ses échanges de ces derniers étaient très froids. « ... mais je pense qu’on pourra redevenir copines, ouais. » murmura-t-elle à voix basse, avant de finalement se relever, et épousseter ses genoux sales. Elle demeura une minute ainsi, à toiser Hilary, qui semblait tout aussi peinée qu'elle, lui sourit timidement, et fit volte-face. Ramenant les pans de sa robe sur sa poitrine afin de se protéger du froid, elle traversa alors l'espace qui les séparait de la rive, et commença doucement à remonter vers le château. Même si les choses n'étaient pas encore résolues entre elles, Jade demeurait plutôt optimistes... Un jour, elles retrouveraient leur relation d'antan.

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