Quelques jours auparavant, Alice avait invité Aidan chez elle pour un repas entre amis bien agréable. Ils avaient passé un bon moment à bavarder, à parler de leurs projets pour cette année à Poudlard ensemble, et à évoquer des sujets moins plaisants comme l’agression d’une petite Poufsouffle de Première Année, Kathleen Kirte, ou l’abandon par son père d’une autre fillette, Zeynep Ozdëmir, recueillie par Alice. Au cours de leur conversation, Aidan avait mentionné avoir envie d’en apprendre plus sur le codage informatique. Alice avait donc récupéré un livre sur le sujet à la librairie de sa mère et le lui rapportait, ce matin, comme prévu. Il était aussi prévu qu’elle déjeune avec lui.

Comme d’habitude, Alice était pile à l’heure. Elle n’avait pas l’habitude d’être en retard quand on l’invitait à déjeuner, encore moins quand il s’agissait de son meilleur ami. En revanche, elle n’aimait pas tellement le quartier d’Aidan. Il n’était pas très sécure et elle avait toujours été mal à l’aise de se promener dans ce secteur de la ville. Alors qu’elle marchait tranquillement, elle sentit un petit sentiment de malaise en croisant le chemin d’un homme qui la toisa avec un sourire qui ne lui plut pas. Elle venait de le dépasser quand il s’adressa à elle.

« Salut, poupée, t’es plutôt mignonne. »

Alice se contenta de l’ignorer mais cela ne sembla pas plaire à l’homme qui l’attrapa et la colla contre un mur. Sorcière, la jeune femme aurait aisément pu le repousser si elle n’avait pas été autant figée par la peur.

« Laissez-moi, s’il vous plaît », demanda-t-elle, d’une voix un peu tremblante.

HRP:

Dans ce genre de situation, Alice était toujours paralysée par la peur. Elle ne s’était jamais rappelée pourquoi elle avait ce genre de réaction face à la violence, mais ça avait toujours été le cas depuis aussi loin qu’elle s’en souvenait, surtout quand, comme maintenant, la violence était dirigée directement contre elle. Fermant les yeux, les rouvrant, elle ne savait plus tellement comment réagir. Quand elle ouvrait les yeux, elle constatait simplement la présence du couteau à proximité de son visage et elle les refermait aussitôt. Elle ne voulait pas voir ce qu’elle ne pouvait empêcher de se produire, priant simplement pour que de l’aide arrive.

« Aidez-moi ! Aidez-moi ! » ânonnait-elle sans s’en rendre compte.

Quand le poids qu’elle sentait sur elle disparut soudainement, Alice ouvrit les yeux, ne comprenant pas sa chance, jusqu’à ce qu’elle voie devant elle Aidan, qui venait de repousser son agresseur. Alice glissa sur le sol, à genoux, se recroquevillant sur elle-même. Elle pouvait presque ressentir la fureur de son ami, elle la devinait de toute manière. S’il y avait une personne qui pouvait réagir à Alice en danger, c’était Aidan ou Hope. Elle releva la tête vers lui en entendant la voix d’Aidan, bien plus sombre que celle qu’elle avait l’habitude d’entendre, lui intimer de dégager.

Le bruit du poing de son ami sur le visage de l’agresseur fit sursauter la jeune femme. Elle se recroquevilla un peu devant l’acte de violence, même s’il était proféré par son meilleur ami. Elle en était à un stade où elle n’arrivait plus à supporter la moindre démonstration de violence. Elle n’eut même pas totalement conscience du bruit des sirènes. Quand Aidan s’approcha d’elle pour s’assurer de son état, elle croisa son regard dans un mouvement inconscient de recul. Il put alors lire la terreur dans les yeux. Elle ne parvint même pas à répondre à sa question, se contentant de tenir son pan de t-shirt pour ne pas qu’il tombe complètement. Les policiers s’avancèrent et s’adressèrent directement à elle.

« Madame, est-ce que vous allez bien ? Cet homme vous ennuie ? »

C’en fut trop pour Alice qu’on soupçonne Aidan et elle fondit en larmes en détournant les yeux dans la direction opposée à celle des policiers, incapable de leur dire que Aidan ne lui avait rien fait, incapable de leur dire qu’il l’avait sauvée de quelqu’un de bien pire.

Quand Aidan fut brutalement éloigné d’elle pour être remplacé par un policier à l’allure de gorille, Alice eut encore plus peur qu’avant. Aidan, au moins, elle le connaissait et il la rassurait un peu, même si elle avait eu un relent incontrôlé de peur. Le gaillard qui était devant elle, quoique tout aussi bienveillant que Aidan, lui faisait infiniment plus peur, surtout qu’il était quand même armé de partout. C’était logique pour un policier mais ls armes s’associaient un peu trop à la violence dans l’esprit tourmenté de la jeune femme. Elle recula encore un peu plus face au policier qui se trouvait devant elle.

Tout à son angoisse, elle n’entendit pas Aidan se justifier auprès des policiers, mais quand ils s’adressèrent directement à elle, elle releva la tête et se rendit compte que son meilleur ami n’était absolument plus dans son champ de vision. Pour une raison quelconque, cela l’inquiéta encore davantage. Elle finit par l’apercevoir un peu derrière le second policier.

« Non ! » s’écria-t-elle, sans songer que son cri serait mal interprété en réponse à la question qu’on lui avait posé.

Se relevant brusquement, bousculant le policier qui était à proximité d’elle, elle se précipita sur l’autre qui tenait toujours Aidan par le torse et heurta son bras. Le policier, qui n s’y attendait pas, ne put maintenir le jeune homme et Alice se retrouva face à lui, entre lui et Aiden, bras un peu écartés comme pour protéger son ami, paradoxalement.

« Laissez Aidan tranquille ! Il ne ferait jamais rien de mal ! »

Toute à cette nouvelle obsession de défendre son ami, la jeune femme en avait oublié son vêtement qui pendouillait lamentablement, laissant entrevoir un peu plus d’elle qu’elle ne l’aurait voulu. Le policier, qui ne pensait plus du tout faire face à un quelconque danger, sembla un peu mal à l’aise, tout à coup.

« Madame… euh… votre haut… »

Il avait l’air un pu bête à essayer de lui dire sans se montrer incorrect qu’elle devrait se couvrir un peu. Alice baissa les yeux sur son vêtement, rougit comme une tomate et se retourna immédiatement afin d’échapper au regard du policier… pour se retrouver face à Aidan. Ses joues s’empourprèrent encore un peu davantage s’il était possible et elle se recroquevilla, serrant les bras sur ce qu’elle voulait cacher, baissant la tête et ne sachant plus qui ni où regarder. C’en fut trop pour elle, et son souffle se fit court, rapide, des larmes coulant de ses yeux sans qu’elle ne les contrôle. Elle était en train de faire un crise de panique, et s’en rendre compte l’aggravait encore.

Quand elle croisa le regard de son ami, qui avait encore les mains en l’air, Alice était angoissée, perturbée, elle ne savait plus où elle en était. Et même s’il s’agissait de son meilleur ami, elle se sentait gênée qu’il puisse voir quelque chose d’aussi intime que ses sous-vêtements, même si ce n’était pas pire que d’avoir été surprise ainsi par le policier. Elle baissa instantanément ls yeux en rougissant. Plus maître de lui qu’elle, Aidan posa sur ses épaules sa propre veste en tweed. Le geste fit sursauter la jeune femme à fleur de peau mais elle tira sur le vêtement comme pour espérer se couvrir avec sans grand résultat.

Prise de panique devant la situation complexe au sein de laquelle elle ne contrôlait rien et qui semblait aller de catastrophe en catastrophe, Alice n’en tint plus. Elle avait l’impression de ne plus réussir à respirer, que tout son être se bloquait. Elle porta la main à son cou, puis sur sa poitrine, tentant de faire fuir la terreur qui bouillonnait en elle et de reprendre un contrôle qu’elle était concrètement incapable d’avoir. Elle ne put retenir les larmes qui coulaient, ne sanglotant pas, mais subissant la tentative désespérée de son corps pour évacuer la terreur et l’angoisse, sans grand résultat. Elle n’entendit même pas la demande des policiers, complètement dans son monde d’émotions, de peur et d’angoisse. Un seul ici pouvait encore franchir sa bulle et atteindre ses pensées, et elle releva une tête suppliante vers lui.

« Aidan… », bredouilla-t-elle d’une voix frêle, comme une supplique d’aide à celui qui était comme son frère.

Elle se sentit incapable de tenir sur ses jambes, ce qui était assez courant lors de ses crises d’angoisse et s’effondra. Mais à-cause de sa proximité avec Aidan, au lieu de tomber sur le sol, ce fut contre lui qu’elle s’effondra, sans contrôler ce qu’elle faisait.

Les mots rassurants de son ami, et ses bras solides et affectueux, étaient précisément ce dont Alice avait besoin en ce moment précis. L’entendre simplement lui dire qu’il était là soulageait, sinon la crise d’angoisse, un peu de la terreur et de la sensation d’impuissance d’Alice. Lui proposer de s’asseoir était la meilleure idée possible, compte tenu de son état actuel. Il fallait reconnaître que ce n’était pas la première crise que le jeune astronome avait à gérer. Depuis leur enfance, Alice lui en avait déjà fait voir. A chaque fois, elle se sentait terriblement coupable, mais il lui rappelait alors qu’elle n’était jamais en reste pour l’aider à son tour.

Mais la vérité, c’était qu’avec son expérience en la matière, Aidan était probablement, avec Hope, le meilleur pour gérer une de ses crises. Il se mit à décompter doucement, trois par trois. Mentalement, entre chaque chiffre, Alice comptait spontanément « un, deux, trois » et nouveau chiffre, et « un, deux, trois » et nouveau chiffre. A force de rythmer comme ça la situation, Aidan arriva à faire reprendre un rythme plus calme à son cœur. Elle continua de se concentrer sur sa respiration pendant que son ami laissait son identité aux policiers.

Alice lui en fut reconnaissante car elle aurait été vraiment incapable de s’occuper des policiers pour le moment. Elle se demanda si Aidan envisageait de la conduire à l’hôpital quand il affirma qu’il allait s’occuper d’elle chez lui. Elle en ressentit un élan de reconnaissance, mais elle se sentit aussi rassurée en se rendant compte à quel point elle pouvait compter sur lui. Quand les policiers s’adressèrent à elle, cette fois, la jeune femme fit l’effort de hocher la tête pour leur signifier qu’elle avait bien compris ce qu’ils venaient de lui dire et qu’elle ne l’oublierait pas.

Quand Aidan la releva pour marcher jusque chez lui, Alice sentit ses jambes flageoler et se raccrocha au cou d’Aidan, risquant de lui provoquer une douleur au cou en plus de la main. Mais une fois qu’elle eut le bras autour de son ami, il lui fut plus facile de faire les quelques mètres qui la séparaient de l’appartement de son meilleur ami. Une fois installée sur le fauteuil, elle sentit toute la pression qui s’écroulait et elle fondit en larmes, mais cette fois, ce n’était pas une crise, c’étaient les larmes salvatrices qui évacuaient enfin l’angoisse qui avait pris naissance quelques minutes plus tôt. Quand elle essuya le flot de larmes, Alice se sentait vide mais apaisée.

« Je… je veux bien boire quelque chose… n’importe quoi, ce que tu as… » Elle se tut un instant avant de reprendre d’une voix un peu lasse. « Merci, Aidan. »

Et ce remerciement n’était pas simplement pour la chemise ou pour lui donner à boire. Alice avait conscience qu’elle n’avait évité quelque chose de grave que de justesse et uniquement parce que son ami était intervenu à temps.

Tandis qu’Aidan mettait de l’eau à chauffer pour le thé, Alice tournait et retournait dans sa tête ces simples mots « Je serai toujours là pour toi. » Si c’était une conviction qu’elle avait depuis toujours, quelque chose qu’elle savait, mais dont ils ne parlaient jamais, l’entendre donnait à cette vérité une force tout autrement puissante. Ces vérités qu’on ne se disait pas, « je t’aime », « tu me manques », « je suis là », portaient un tel poids quand elles étaient formulées. Un poids qui guérissait tout, un poids qui ramenait tout à la vie, y-compris le sentiment de sécurité d’Alice.

Alice n’aurait jamais osé dire à Aidan qu’elle l’aimait. Elle le faisait parfois sur le ton de la plaisanterie, pour le taquiner, mais tous les deux connaissaient la portée d’une telle taquinerie et il n’y avait pas de profondeur derrière. Mais dire à Aidan ce qu’elle ressentait pour lui, avec l’intention et la portée que ça impliquait, elle n’avait jamais osé. Elle savait trop comme elle pouvait risquer de le perdre en le formulant, de le voir s’enfuir à toutes jambes. Pourtant, quand il vint s’asseoir près d’elle, elle ne put faire autrement. Se laissant spontanément tomber sur l’épaule de son meilleur ami, elle ferma un instant les yeux.

« Je t’aime, tu sais », murmura-t-elle si bas qu’elle ne pouvait même pas être certaine qu’il l’avait entendue.

Elle espérait qu’il ne la repousserait pas, qu’il ne fuirait pas. Ce n’était pas l’amour d’une femme qu’elle lui avouait là, simplement l’amour d’une sœur. Peut-être que celui-là, il pourrait le tolérer. Peut-être qu’il ne s’enfuirait pas. Alice prit toutefois peur des pensées qui se dessinèrent à cet instant dans son esprit, la pensée que s’il s’enfuyait, ce serait normal car elle ne méritait pas un ami comme lui. Ce genre de pensées destructrice li était fréquentes après ses crises, mais elle ne l’avait jamais avoué à Aidan. C’était décidément le jour des aveux car elle ajouta quelque chose qui, sans être aussi destructif que la réalité de sa pensée, en prenait néanmoins le chemin.

« Je ne te mérite pas. »

De quoi avait-elle besoin ? Cette question tourna dans la tête de la jeune artithmancienne sans trouver de réponse claire. Elle avait besoin de lui, de se sentir protégée, en sécurité. C’était le cas auprès de Aidan, comme auprès de Hope ou de sa mère par exemple, elle avait besoin de ne pas être seule et en cela, elle pouvait dire que son meilleur ami était des plus efficaces. Mais au fond d’elle, elle se sentait perdue. Peut-être que de verbaliser certaines choses l’aideraient.

« Je ne sais pas… », répondit-elle, un peu hagarde. « J’ai eu… J’ai eu si peur… »

De sombres pensées sur ce qui aurait pu arriver sans l’intervention du jeune homme lui passèrent dans la tête et quelques larmes résiduelles coulèrent.

« J’ai cru… qu’il… »

Ces pensées si terribles qu’elle n’était même pas capable de les verbaliser.

Alice ressentait Aidan aussi clairement que s’il avait parlé à haute voix et sa crispation lorsqu’elle ne put retenir son aveu lui fit un peu de peine, non parce qu’elle en était blessée, mais parce qu’elle craignait de l’avoir mis mal à l’aise par son manque de contrôle. Cela dit, il ne bougea pas, ne cilla pas, ne la repoussa pas loin de lui. Pour Alice, cela avait presque valeur de réponse identique, car si le jeune homme l’avait entendue, et elle était maintenant sûre que c’était bien le cas, il aurait dû flipper et s’enfuir, mais il restait là, solide comme un roc, pour elle. Elle en fut touchée.

Mais quand elle lui avoua une infime partie du cours de ses pensées, il la força à le regarder, affirmant qu’elle venait de dire une bêtise. La jeune femme n’en pensait rien mais elle se contenta de détourner le regard, baissant les yeux. Ce qui étreignait son cœur en cet instant était trop fort pour disparaître ainsi, même si la question d’Aidan détourna le sujet. La vulnérabilité dont elle ne put s’empêcher de faire preuve ne faisait qu’appuyer cette sensation qu’elle n’était bonne à rien et pourtant, elle se sentit bien quand son ami tenta de la réconforter. Doucement, elle hocha la tête.

Quand il parla de croque-monsieur, la jeune femme secoua la tête de gauche à droite, doucement, avec lassitude.

« Excuse-moi, Aid, mais je crois que je ne pourrais rien avaler. »

Ce ne fut pas la proposition du jeune homme en elle-même que son enthousiasme qui fit sourire Alice. Elle hocha doucement la tête pour approuver au moins le début du programme.

« Je ne sais pas si je serai capable de manger ce soir, mais au pire, on pourra toujours se promener le long de la Tamise. Elle est si belle, surtout quand les étoiles se reflettent dedans, n’est-ce pas ? »

A cet instant, repensant au repas, elle repensa au sac contenant le fameux pain qui était resté sur le sol de la ruelle. Et elle poussa un cri, songeant à quelque chose par association d’idée.

« Mais… mon sac… je l’ai laissé là-bas ! Il y avait toutes mes affaires et… » Elle tourna la tête vers Aidan « Ton livre ! »

A cet instant, elle entendit son ami pousser un cri et l’observa ramener les jeux Moldus à la main. Elle fronça les sourcils en le regardant.

« Aidan… ta main… tu es blessé… à cause de moi ? »

Honteuse, elle rougit fortement et attrapa son bras en delà de la blessure pour l’approcher d’elle. De sa baguette pointée sur la main, elle énonça une formule afin de soigner la blessure de la main de son meilleur ami. Ce n’était pas la première blessure qu’il se faisait et il ne le savait pas forcément mais Alice avait appris à l’adolescence une paire de sortilèges de soin, rien que pour pouvoir l’aider quand il trébuchait, notamment sur Shrödinger. Mais c’était la première fois qu’elle en était responsable. Elle se sentit tout à coup très coupable.

« Excuse-moi », dit-elle, penaude.

La douceur du regard d’Aidan, ainsi que sa compréhension face au fait qu’elle était barbouillée, fit du bien à Alice. Elle ne cessait de craindre d’être un poids pour son ami alors qu’il avait pris soin d’elle et qu’il faisait tout pour qu’elle se sente bien. Elle savait que ce sentiment ne venait pas du tout du comportement du jeune homme mais de son attitude à elle, de cette façon qu’elle avait de manquer de confiance en elle en pensant qu’elle était responsable de tout ce qui lui arrivait de mal et qu’elle ne méritait rien. C’était une douleur tapie en elle, un monstre qui la terrifiait chaque fois qu’il remontait à la surface.

Elle se contenta de lui sourire quand il accepta qu’ils aillent regarder les étoiles et se promener le long du fleuve. Ce serait déjà l’annonce d’une soirée agréable, restaurant ou pas. La jeune femme éprouvait un sentiment de quiétude à cette perspective qui la rassura. Les choses n’avaient pas changé. Elle fut rassurée quand Aidan lui dit que son sac avait été récupéré et rendu à Aidan par le policier.

« Il était très compétent et professionnel, ce policier, je trouve. Il connaissait son métier. »

Elle allait le récupérer quand elle entendit le cri de douleur de son ami. Ce fut le sac auprès d’elle qu’elle le soigna donc.

Aidan certifia qu’elle n’était pas fautive, mais la jeune femme se sentait terriblement coupable. Sur l’instant, elle ne lui répondit pas, ne sachant pas exactement comment lui exprimer ce qu’elle éprouvait, et préféra passer sur le choix d’un jeu. Elle ne se sentait pas assez affûtée dans son état pour démarrer une partie d’échecs et son choix se porta sur un jeu moldu, plus simple quoi que réclamant quand-même un minimum de réflexion. C’était le genre de jeux que les deux amis affectionnaient. Avant qu’ils ne commencent, Alice sortit le livre de son sac et le tendit à Aidan.

« Tiens, voilà un livre qui correspondra à ce que tu voulais je pense. C’est principalement pour développer des technologies dédiées au web, mais c’est pour les débutants. Donc, il me semble pas mal pour ce que tu voulais en faire. C’est un cadeau de maman, elle a dit qu’elle pouvait bien faire ça pour son meilleur client » acheva-t-elle avec un sourire doux.

Sa mère avait toujours eu beaucoup d’estime pour Aidan et elle appréciait cette amitié saine et tranquille entre sa fille et le jeune homme. Alice ne pouvait que valider son jugement. Ils avaient démarré le jeu et fait quelques tours quand Alice reprit la parole.

« Tu sais, la vérité, c’est que oui, je m’estime responsable. Et inutile. Je suis une sorcière et je ne suis même pas capable de repousser un moldu un peu trop insistant. Si tu n’avais pas été là, j’aurais été incapable de l’empêcher de me faire du mal, alors que d’un simple sortilège de repousse qu’un première année est capable de faire, j’aurais pu m’en débarrasser. Mais j’en suis incapable. Paralysée. Complètement. Finalement, je ne sais pas si c’est une bonne idée que j’enseigne. Si je suis confrontée à une agression comme tu l’as été, saurais-je simplement comment réagir ou serai-je aussi inutile face à la violence ? »

Encore une fois, elle se sous-estimait franchement. Alice était paralysée face à la violence qu’on lui faisait subir. Peut-être que l’agression physique par un élève âgé directement envers elle pourrait lui faire peur, mais face à un conflit entre élèves, elle n’aurait pas le même problème. Mais elle n’était pas dans l’état psychologique d’en prendre conscience.

Aidan lui donna la carte du policier qui leur était venu en aide durant l’agression et Alice la contempla d’un air pensif tandis qu’il lui expliquait qu’elle pouvait aller le voir si elle voulait porter plainte et raconter ce qui s’était passé. Il ajouta qu’il serait là pour elle si elle avait besoin qu’il l’accompagne au poste de police. Alice savait qu’elle devrait aller jusqu’au bout et signer une plainte mais la présence de son ami lui serait vraiment précieuse, surtout qu’il avait été le témoin de la scène, il pourrait donc apporter de l’eau au moulin de la jeune femme. Par ailleurs, elle avait beau y réfléchir, elle ne savait absolument pas quelle tête son agresseur pouvait bien avoir.

« J’irai, oui. Je ne sais pas s’ils pourront le retrouver, mais il faut essayer de le mettre hors d’état de nuire et puis… je reviendrai forcément ici un jour et… » Elle n’acheva pas sa phrase mais elle voulait pouvoir le faire en toute sécurité. « Je ne crois pas que j’en serai capable aujourd’hui, mais… tu viendras vraiment avec moi ? Ca m’aiderait vraiment tu sais et puis… tu l’as peut-être vu, toi… »

Le pire dans le fait de ne pas du tout se rappeler la tête de son agresseur, c’était qu’elle allait probablement se méfier de tout le monde. Sauf de Aidan évidemment. Le seul homme qui ne pourrait jamais lui faire du mal, elle le savait pertinemment. Elle lui sourit quand il accepta son cadeau avec un sourire. Elle était vraiment curieuse d’en savoir plus sur ses projets sur le sujet.

« Tu comptes faire un site web pour Poudlard ? » plaisanta-t-elle.

Elle rougit en lui exposant ses craintes et ses doutes. Elle n’avait pas l’habitude de s’exposer ainsi, même si quand elle le faisait, c’était souvent avec Aidan. C’était celui en qui elle avait le plus confiance pour ce genre de choses. Lorsqu’il lui affirma que chacun réagissait différemment à la violence, mais elle savait que peu de monde avait une réaction aussi forte que la sienne. Cela dit, c’était pour l’école qu’elle était le plus inquiète.

Sur ce point, Aidan sut trouver les mots pour la rassurer un minimum. Il marqua un point en évoquant le moment où elle avait fait face au flic pour le protéger, lui. Alice se souvint aussitôt dans quel état elle lui avait fait face et rougit de nouveau avant de relever la tête vers son ami.

« Justement, j’aurais peut-être dû y réfléchir un peu avant de me jucher devant lui dans cet état », fit-elle remarquer. Mais elle avait un sourire légèrement amusé. « Je ne sais pas qui a été le plus mal à l’aise au final, de lui, de moi ou de toi, en réalité. »

Il n’avait pas tort en disant que le rôle d’un enseignant débloquait certaines choses. Le fait d’être pourvu d’une certaine autorité changeait la donne, même si elle n’y avait jamais concrètement réfléchi. Et elle savait qu’elle se comporterait différemment face à un élève que face à la plupart des gens. Elle pensait à ses propos quand il lui dit soudain qu’elle serait une prof du tonnerre. Elle rougit fortement, sincèrement flattée par son enthousiasme.

« J’espère… »

Alice fut surprise quand Aidan détourna le regard, mais elle comprit au moment où elle l’entendit la raison pour laquelle il avait détourné le regard en entendant la dureté dans sa voix. Il était plein de colère en lui. Elle devina qu’il repensait à ce qu’il avait ressenti pendant qu’il la protégeait et si elle se fiait à ce qu’elle connaissait de lui, il avait dû être fou de rage. Aidan ne supportait pas qu’on s’en prenne à ceux qu’il aimait. Et en général, quand il passait en mode protecteur, il pouvait faire peur. Il détournait probablement le regard pour ne pas l’effrayer.

Il parvint tout-se-même à retrouver un peu le sourire quand elle plaisanta sur l’opportunité d’un site pour Poudlard. Ca ne la surprenait pas qu’il ait envie de découvrir et d’apprendre, c’était digne de Aidan. Son petit côté Serdaigle. Elle se demanda ce qu’il allait apprendre et s’ils pourraient en parler. Aidan ne s’y opposerait pas mais Alice ne savait pas si elle serait en mesure de comprendre de quoi il parlerait. Ou alors il faudrait aussi qu’elle lise un de ces livres d’initiation, mais ça ne la dérangerait pas plus que ça. Elle était elle aussi amatrice de découvertes.

Aidan assura que c’était probablement le policier qui avait été le plus gêné, ce qui n’était pas impossible. Alice se souvenait de sa voix toute penaude et de sa réaction plutôt gênée. Il avait l’air un peu décalé avec son apparence de dur à cuire et tout gêné devant une paire de seins. Mais la remarque d’Aidan effaça immédiatement son sourire et la rendit muette durant un instant. Non qu’elle fut choquée outre mesure, elle n’était pas si prude que ça et puis, ce qui ne passait pas avec la plupart des hommes pouvait parfaitement passer avec Aid. Non, elle était simplement abasourdie de l’entendre évoquer avec tant de légèreté et de plaisanterie ce qu’il avait vu. Lui qui généralement restait muet et tout gêné à la plus petite évocation du moindre élément intime concernant le sexe opposé.

Néanmoins, cela ne faisait que démontrer un peu plus que le jeune homme était parfaitement à l’aise avec sa meilleure amie. A chaque moment qu’elle passait avec lui, Alice avait la chance de pouvoir observer des choses qui lui prouvaient combien elle était spéciale pour lui, des choses peu perceptibles à l’œil d’un quidam. Personne ne se serait posé de question devant un homme plaisantant sur l’anatomie féminine, mais pour Alice, cela signifiait qu’Aidan était plus à l’aise que jamais avec elle, et c’était un cadeau précieux qu’il venait de lui faire.

Décidée à ne pas laisser l’émotion l’emporter à nouveau, Alice prit un sourire malicieux avant d’envoyer un coussin en direction de la figure de son meilleur ami.

« Espèce de goujat ! » lança-t-elle d’une voix faussement indignée. « On ne parle pas comme ça de la poitrine d’une dame. »

Elle leva le nez en l’air avant de pouffer. Elle n’en était pas encore aux fou-rires, mais cela avait eu le mérite de détendre l’atmosphè re. Quand ils se remirent à jouer, Aidan râla de devoir passer son tour mais Alice lui fit un clin d’œil.

« Tu devrais être content, tu vas pouvoir me plumer pendant deux tours avant de devoir me filer des sous à nouveau. »

Alors que le jeu approchait de la fin, en picorant des chips, Alice sentit une bonne nouvelle se profiler à l’horizon.

« Tu sais quoi ? Je crois que ça va le faire pour ton super restau ! »

Le coussin atterrit en plein sur le nez de Aidan, qui grimaça sur le coup. Alice regretta de l’avoir amoché un peu plus, non sans songer que son ami avait vraiment des réflexes compliqués. Mais c’était plutôt attendrissant, même si ça lui causait quelques petites contrariétés comme des bleus un peu partout. Il le prenait à la légère comme le jour où elle s’inquiétait et qu’il lui avait dit que quand il s’ennuyait, il comptait ses bleus pour passer le temps. C’était typique de lui, désamorcer le souci qu’on avait de lui par l’humour. La jeune femme y était habituée. Il répondit d’ailleurs à sa provocation avec de l’humour, encore une fois, mais la jeune femme le provoqua.

« Tu veux des cours ? Des fois que l’envie te prendrait de dragouiller au cours de l’année prochaine. Leçon numéro 1 : les parties intimes de la femme et ce qu’il faut en dire » lança-t-elle, malicieusement.

A son grand étonnement quand ils terminèrent la partie, Alice la gagna. Aidan avait donc eu du flair sur les conséquences du jeu de dé sur sa chance.

« J’ai gagné ! », dit-elle avec surprise. « J’y croyais pas ! »

Elle lui sourit franchement et semblait avoir regagné tout son entrain, même si au fond, ce n’était pas le cas. Et en le voyant se lever, elle sentit comme quelque chose retomber sur son estomac vide. Elle se leva très lentement, pendant qu’il récupérait ses affaires. Quand il lui prit la main, elle ressentit de nouveau une peur l’envahir. Il attrapa son sac et se tourna vers elle pour lui demander si elle avait confiance en lui. La question ne se posait pas, il était celui en qui elle aurait toujours confiance. Mais la peur de sortir l’étreignait au point qu’elle se rapprocha de lui, presque sans s’en apercevoir, et se retrouva presque collée à lui. Un frisson la parcourut et elle déglutit. Elle voulut parler mais elle n’y arriva pas et se contenta de hocher la tête.

Il l’entraîna sur le pas de la porte en souriant mais Alice se contentait de fixer ses pieds avec nervosité. Quand ils apparurent à Pré-au-Lard, marchant main dans la main, la jeune femme se serra encore un peu plus contre Aidan, regardant autour d’elle. Quand il l’invita à entrer la première chez Gaichiffon et qu’elle entraperçut le vendeur devant elle, c’en fut trop pour la jeune femme. Elle s’accrocha au bras de Aidan, contenant difficilement sa panique face à homme, pourtant pas inquiétant du tout. Elle ressemblait à un animal blessé et effrayé. Aidan avait aperçu son ami et s’était avancé, entraînant ainsi Alice, mais elle ne savait pas s’il s’était rendu compte de son état.

Quand le vendeur avança vers elle, elle se recula instinctivement avant de se traiter mentalement d’idiote. Elle connaissait Jeremiah depuis leur quinze ans puisqu’il était celui qui avait recueilli Aidan et qu’elle était déjà passée à Gaichiffon pendant leurs sorties à Pré-au-Lard. Mais elle n’y pouvait rien, même le policier l’avait effrayée, elle se sentait prise de panique. L’homme s’embla le comprendre et il s’éloigna vers les vêtements d’été pour femme afin d’en sélectionner quelques unes, sans s’approcher d’elle. Alice, toujours agrippée au bras de son ami comme à une bouée de sauvetage leva le regard vers lui et croisa son regard.

Ce fut une fois de plus son meilleur ami qui parvint à lui faire reprendre contact avec la réalité et la jeune femme fit l’effort de se prêter au jeu des essayages. Mais sans un mot. Malgré les tentatives du vendeur de la faire sourire, Alice se contenta d’obtempérer un peu en mode robotisé, laissant les deux hommes bavarder tranquillement et en évitant tout contact avec le protecteur de son ami, comme si elle ne pouvait pas supporter la proximité d’un homme. Elle finit par choisir deux tenues aussi discrètes qu’élégantes que Aidan tint à payer. Alice ne dit rien, n’ayant même pas la force de protester.

Quand ils apparurent au bord de la Tamise, Alice respira à plein poumons, essayant de retrouver l’humeur qu’elle avait réussi à retrouver chez Aidan, mais pour une raison qu’elle ne comprenait pas, la terreur l’étreignait toujours. Alors qu’ils avançaient, Alice crut que ses jambes allaient à nouveau la trahir. Entre les émotions et le fait qu’elle n’avait rien mangé depuis le matin, c’était plausible et elle serra un peu plus la main de son meilleur ami qui ne la lâchait pas, ce dont la jeune arithmancienne lui était reconnaissante. A leur arrivée, on leur proposa de choisir leur place et Alice regarda tout autour avant d’apercevoir une table pour deux, dans un coin isolé du bateau, collé à la fenêtre. Sans hésiter, elle entraîna son ami dans cette direction et se plaça dos à la salle, ne percevant plus que Aidan et le fleuve. Elle se concentra sur ça pour tenter de calmer la peur qui ne l’avait pas quitté depuis le seuil de l’appartement de son ami. D’ailleurs, elle n’avait pas dit un mot depuis cet instant.

Au fond, quand Aidan lui avait demandé si elle lui faisait confiance, la portée pouvait être plus grande que ce qu'il en avait pensé. Si elle c'était écoutée, Alice serait restée cloitrée chez lui, probablement plus longtemps qu'on aurait pu le soupçonner. Cela dit, ce n'était pas bon pour elle et puis, elle n'allait pas s'imposer chez lui éternellement. La visite au protecteur d’Aidan et l'achat de cette tenue avait été une épreuve pour la jeune arithmancienne. Le repas en serait sûrement un autre. mais, à terme, elle rentrerait ce soir plus capable et autonome que s'ils n'étaient pas sorti du tout.

Au moment de choisir la table, Alice s'était précipitée sur celle qui l’éloignerait le plus possible des autres clients. Et la place qu'elle avait choisie ne l’obligeait pas à les regarder si elle ne le souhaitait pas. Elle était nerveuse mais le fait de sortir avec son meilleur ami la rassurait quelque peu. Un serveur zélé et néanmoins souriant s'approcha d’eux afin de les accueillir sur le bateau. Il adressa un franc sourire à Alice.

« Bonjour, bienvenue, je suis Vladimir et je serai votre serveur ce soir. J'espère que vous passerez une agréable soirée. Madame est très en beauté ce soir. »

Il n'y avait dans la remarque du serveur aucune mauvaise intention. Peut-être trouvait-il effectivement Alice séduisante, mais son propos n'était que le compliment prévu dans son travail pour mettre le client à l'aise. Manque de chance, c'était précisément le genre de remarque qu'il ne fallait pas faire à Alice ce soir. Détournant les yeux sans répondre, Alice espéras que Aidan saurait expliquer son attitude, pour éviter que le serveur la pense impolie. Un peu gêné, après l'échec de son accueil, le serveur se reprit pour leur proposer l'apéritif. Alice pris sur elle de relever les yeux vers lui.

« Je prendrai le cocktail », parvînt-elle à prononcer, non sans difficulté.

Elle avait finalement décidé que ce ne serait pas une mauvaise chose de prendre un peu d'alcool, en espérant que cela fasse tomber quelques barrières et lui permette de passer une meilleure soirée. Elle sourit franchement à son ami en trinquant avec lui, tentant de faire fi de sa nervosité. Elle et Aidan dégustèrent leur apéritif pendant que les clients arrivaient au fur et à mesure. Quand il fut temps de choisir le menu, pour la seconde fois de la soirée, Alice parvint à prononcer quelques mots.

« Je prendrai le poulet rôti aux pommes de terre. »

L'alcool ayant fait un peu d'effet, Alice put enfin se prendre au jeu de l'enthousiasme d’Aidan , cette fois-ci concernant un jeune couple installé non loin d'eux. Alice les regarda un instant avant de répondre à son meilleur ami.

« Il est tout timide », murmura-t-elle. « A mon avis, il n'osera pas. »

Constatant le succès de la boisson alcoolisée, Alice commanda un verre de vin Pour en augmenter l'effet.

Alice fut reconnaissante au serveur de ne pas prendre mal sa réaction face à son compliment. Elle n'avait pas envie de le vexer, ni de le blesser. Elle ne contrôlait simplement plus ses réactions à cet instant même. Le cocktail commença à lui brouiller la tête et elle sentit comme un vide, ce qui était presque réconfortant après les tourments que son âme endurait depuis leur départ. Elle parvint même à plaisanter avec Aiden sur un petit couple qui semblait amoureux mais un peu intimidé. Forte de cette victoire, elle se décida à commander un verre de vin pour appuyer l’effet que l'alcool avait eu sur elle.

L’effet fut celui qu'elle attendait et tandis qu'ils mangeaient, elle prit plaisir à échanger avec lui, à rire avec lui , retrouvant presque la joie des instants qu'il venait de vivre chez Aiden avant de sortir. Malgré tout, entre le choc qu'elle avait subi et les émotions qui s'en étaient suivies, le plat suffit amplement à Alice pour combler sa faim. Quand le serveur vint leur demander s'ils voulaient un dessert, Alice lui offrit le sourire qu'elle n'avait pas pu lui donner lorsqu'il l’avait complimentée.

« Merci, je n'ai plus du tout faim. »

Ils payèrent et les deux amis décidèrent comme prévu de finir la soirée en marchant sur les bords de la Tamise. Non seulement pour Alice mais aussi pour leur confort personnel, ils choisirent un lieu où il y avait peu de monde et où ils étaient bien tranquilles. L'effet de l'alcool sur Alice se faisait différent au contact de la nuit, du fleuve, et de la douceur du soir dans lequel ils se promenaient. Les tourments qui l'avaient prise juste après l’agression, quand elle se sentait coupable et inutile, se firent ressentir en force dans son esprit alors qu'elle tentait de leur intimer de partir. Ils marchèrent silencieusement quelques minutes avant que la jeune femme ne prenne la parole, le regard tourné vers la Tamise.

« J'ai toujours aimé l'eau » dit-elle d'une voix étrange, comme si elle était ailleurs. « La contempler m'a toujours apaisée. Elle est tellement changeante, parfois douce, parfois tourmentée. C'est comme un flot qui vous emporte et qui lave tout, tout ce qui est impur, tout ce qui doit être éliminé. »

Elle s’approcha du bord, contemplant les flots au-dessous d’elle. Une petite vague venait frapper le mur juste en dessous d’elle, qu'il hypnotisait et lui faisait penser à un pendule qui allait et venait, faisant oublier tous les tourments on pouvait ressentir.

« Quand quelque chose ne sert à rien, quand c'est inutile, pourquoi ne pas tout simplement bi offrir la chance de pouvoir se laisser emporter sans avoir besoin de faire d'effort supplémentaire. C'est tellement plus facile, parfois, de tout lâcher. »

Elle se pencha un peu plus.