J’étreins ma batte de toutes mes forces, les jointures de mes doigts blanchies par la pression qu’elles subissent. Cela fait plus d’une heure que je me défoule sur le terrain de Quidditch, seule. Il ne s’agit pas d’un entraînement en équipe et je n’ai proposé à personne de me servir de binôme. En réalité, j’ai juste besoin de me défouler. La rencontre fortuite de ma cadette à l’heure du déjeuner n’était pas suffisante pour évacuer toute la frustration accumulée depuis la semaine dernière. Le cognard qui me fonce dessus à toute vitesse fait vibrer tous mes os tandis que je le propulse violemment à l’autre bout du terrain. Quarante-quatre. En attendant le quarante-cinquième, mes pupilles opalines se posent une seconde à peine sur mes doigts ensanglantés. Quelques cognards ratés, quelques coups mal placés, des gants de protection volontairement oubliés et voilà le résultat. La douleur qui irradie me donne encore plus envie de cogner, inlassablement. La balle noire revient déjà à la charge, furieuse. Avec un sourire mauvais, je dessine les traits d’un visage sur sa surface lisse, juste avant de lui donner un coup puissant.

Encore une heure plus tard, un total de soixante-quinze cognards, quelques ratés, une cuisse douloureuse et des mains colorées de mon sang, je remonte au château, ma batte et mon balai sur une épaule. Mes bras sont lourds et mon dos engourdi par les chocs à répétition. Pourtant, je me sens légère et de bien meilleure humeur qu’auparavant. Mon sourire éternellement féroce et le sang qui couvre mes doigts m’assurent une tranquillité bienvenue. Hormis quelques regards appuyés qui me font doucement ricaner, personne ne s’essaye à venir me déranger. J’arrive bientôt au hall d’entrée, le ballet des escaliers mouvants évolue au-dessus de moi. L’après-midi n’était pas encore terminé mais il me semblait bien difficile de l’occuper maintenant que j’étais de nouveau dans le château. Je ne prête pas attention aux élèves que je croise, plongée dans mes pensées, le regard fermement planté au loin.

C’est qu’il y avait du monde dans les couloirs. La fin des cours avait sûrement sonné pour tout le monde et les jeunes sorciers et autres impurs allaient pouvoir profiter de leur week-end. Les deux jours qui se dessinaient pour ma part me laissaient un goût amer et une furieuse envie de retourner frapper des cognards. Junior ne m’avait toujours pas adressé le moindre mot. Bientôt une semaine que le temps s’écoulait bien trop lentement. J’avais parfois l’impression de sentir son regard peser sur moi, je croisais quelquefois ses yeux clairs, mais il les détournait bien vite, portant chaque fois un nouveau coup à ma fierté. Apercevant les toilettes pour filles, je disparais du couloir pour y pénétrer. Personne : c’était tant mieux. Ma batte et mon balai posé contre le mur, je déplie douloureusement mes doigts endoloris avant de les passer sous l’eau tiède d’un robinet que je viens d’ouvrir. La chaleur apaise autant qu’elle enflamme les plaies, et l’eau qui coule dans la vasque blanche prend une teinte délicieusement rosée.

Avec fracas, la porte s’ouvre dans mon dos. Un coup d’oeil noir dans le miroir pour reconnaître Blaze, un Serdaigle. Tu ne sais pas que ce sont les toilettes des filles ? fais-je, moqueuse. Il se rapproche de moi et mon regard cristallin le suit, jusqu’à ce qu’il se fige à mes côtés. Je tourne la tête, un sourcil levé. Qu’est-ce qu’il lui prenait de tirer cette tête ? Son mouvement de recul m’arrache un rictus fauve tandis que je continue d’enlever le sang qui tache mes doigts. Tu poses la question alorrrs que tu connais la rrréponse me contenté-je de répondre, sans que mon sourire ne faiblisse. Blaze m’amusait. Un peu comme un animal de compagnie qui nous fait rire et que l’on accepte d’emmener avec nous pour nous divertir… et pour s’en servir. Sa question me fait rire. Parrrticiper est encorrre plus agrrréable. À mesure, l’eau devient de plus en plus claire, mes doigts de moins en moins rouges. Qu’est-ce que tu me voulais ?

Je lui demandais ce qu’il faisait dans ces toilettes et il me répondait avec la liste de ses méfaits les plus récents. Je hausse un sourcil amusé tandis que mes lèvres se teintent de férocité. Je n’étais pas mon frère adoré mais je savais tout de même l’importance de conserver bien précieusement ce type d’information. Tu es un vrrrai délinquant ma foi ! me moqué-je avec un petit rire sarcastique tandis que mes mains poursuivaient leur petit ballet visant à éliminer toute trace de sang. J’imagine que tu fais la fierrrté de tes prrréfets ironisé-je. Blaze avait le don de m’amuser : son énergie était inébranlable ; son culot à toute épreuve. Il ne craignait pas de venir me trouver et de bousculer parfois la mauvaise humeur que je pouvais afficher. Cependant, il avait suffisamment peur de ce que j’étais capable de faire pour que ses prunelles se teintent d’un doute qui provoquait une joie brutale chez moi et qu’un mouvement de recul le saisisse quand il constata le sang qui recouvrait mes mains.

Sa question me fait hausser les épaules, l’air de rien, tandis que je reporte mon regard sur l’eau rosé qui coule. Les blessures étaient profondes et continuaient de laisser s’échapper mon sang si pur tandis que l’eau nettoyait les plaies. Qu’il était donc ignorant. Sa question lui fournissait la réponse : jamais je ne me salirais les mains pour corriger un impur gênant mon chemin. Ma baguette était une arme redoutable et les cafards qui pullulaient dans ce château ne méritaient pas que je les touche directement. Il ne le savait pas et j’avais donc tout naturellement envie d’y jouer. Tu as encorrre tellement à apprrrendrrre, Blaze soupiré-je, l’air faussement nonchalant. J’étais incapable de rester impassible trop longtemps et déjà un sourire de prédateur remplaçait l’absence d’émotion de mon visage. C’est parrrfois bien plus satisfaisant de sentirrr de ses prrroprrres poings les coups que l’on donne. Dans mes yeux brille une lueur dangereuse et volcanique. Le genre de lueur que l’on ne peut saisir pleinement, pas sans se brûler au passage. Ce que je disais n’était pas totalement faux, ceci étant. Le plaisir de la souffrance que l’on inflige valait autant que cette dernière. Mais de là à me salir directement en provoquant le contact avec ces miséreux ? Certainement pas. S’il pouvait croire au passage que je maîtrisais sans problème le sortilège Doloris me convenait parfaitement.

Enfin les plaies semblent s’apaiser. Je coupe l’eau, arrêtant le filet d’eau qui coulait sans discontinuer et ôte le maillot de Quidditch qui couvrait mon sous-pull noir. Le tissu enroulé autour de ma main droite, j’observe les lésions de la gauche avec une satisfaction étrange. La douleur m’apaisait aujourd’hui. La mienne, et celle des autres. Relevant mes pupilles opalines pour les poser, pleines d’assurances, sur mon vis-à-vis. Que me voulait-il ? Ma patience ne souffrirait pas d’attendre trop longtemps avant qu’il n’exprime le fond de sa pensée. De nouveaux mes sourcils s’étirent vers le haut, adoptant un air qui signifiait qu’il n’avait pas intérêt à me croire plus idiote que je ne l’étais. Misha avait soigneusement démenti être derrière le journal accusant mon frère, mais je ne le croyais pas. C’était lui, ou du moins en avait-il fait partie. La coïncidence était trop énorme pour que c’en soit une : Finnbjörn accusait le Russe d’être derrière l’incendie de Noël, et brusquement mon frère adoré se retrouvait affublé d’une maladie écoeurante ? Je voyais enfin ce que voulait dire mon jumeau lorsqu’il affirmait que la subtilité était absente : vu sous cet angle, c’était si grossier… Néanmoins, je restais sur mon idée première : Misha aurait utilisé ses poings. Mon sourire se fait féroce et vient plisser jusque mes yeux. On connait tous les deux la rrréponse fais-je sans ciller. Ce n’est pas parrrce que Misha affirrrme qu’il n’y est pourrr rrrien que je le crrrois surrr parrrole. Je n’avais pas abordé une seconde fois le sujet avec le Poufsouffle, cela n’en valait pas la peine. Finnbjörn était sûr de lui et cette histoire d’éclabouille, bien qu’agaçante, ne l’atteignait guère plus que cela.

Et puis une idée me traverse. Mon regard se fait plus profond, plus dur. Croisant les bras sous ma poitrine, je fais un pas pour me rapproche de Mansfield et un nouveau sourire, bien plus menaçant pour qui saurait le lire, soulève le coin de mes lèvres. Mais dis-moi. Brrradforrrd est ton meilleurrr pote. Ce ne serrrait pas étonnant que tu aies souhaité le défendrrre. C’était plausible. Et même plus que cela, en réalité. Puis, haussant les épaules, je balaie la question en suspens, un petit rire achevant de réchauffer l’atmosphère. Enfin bon, peu imporrrte. Finnbjörrrn va bien, ta sincèrrre sollicitude me touche terminé-je avec un sarcasme grinçant.

Je me détache finalement du fascinant spectacle de ce sang emporté par le mouvement précipité de l’eau pour me sécher les mains et me tourner face à Blaze. Ses exploits étaient amusants, démontrant la folie précipitée de ce garçon. Un sourire fauve se détache sur mon visage alors qu’il me question à propos des méthodes que j’emploie pour torturer mes victimes. Je laisse sous-entendre qu’il est bien plus plaisant de sentir directement l’effet des coups sur celui qui les reçoit. Un rire me secoue alors qu’il avoue que Misha lui a dit exactement la même chose quelques mois plus tôt. Il fallait croire que Poufsouffle ne rassemblait plus vraiment les élèves les plus patients, loyaux et justes mais plutôt les brutes les plus volcaniques de cette école. C’était peut-être nos caractères nordiques qui faisaient de nous ce que nous étions : bien plus abrupts et violents que ces précieux anglais. Tu vois, il s’agit là d’un prrrincipe essentiel conclus-je sur le même ton.

Autre principe essentiel qu’il ne lui faudrait jamais oublier - bien que cela ne me dérange pas le moins du monde à cet instant présent - c’était de prendre garde à ne jamais réveiller l’instinct fauve des prédateurs qu’il pouvait croiser. Mon sourire féroce qui s’étend jusque mes yeux parle pour moi. J’écoutais toujours mon intuition et laisserait éternellement mes émotions guider mes réactions. Je n’étais pas mon aîné, ni même mon jumeau adoré, qui passaient bien trop de temps à gommer tout sentiment pour agir de la manière la plus froide possible. J’étais un volcan là où ils étaient la banquise. Et ce qui venait de réveiller toute mon attention, c’était la nonchalance de Blaze qui masquait mal tout l’intérêt que sa question portait dans ses mots. Le visage fermé par ce qui se dessinait devant moi, je fais un pas dans la direction du Serdaigle, réduisant l’espace qui nous séparait, fondant dans sa zone de confort.

Je regrettais presque que mon frère adoré ne soit pas là : il était bien plus doué que moi pour déceler les infimes expressions de ses interlocuteurs et en tirer les conclusions qui s'imposent. Je le faisais moins bien que lui mais je pouvais tout de même noter le regard que m'accorde Blaze, teinté de trop de d’innocence pour que j’envisage seulement de le croire. Il devrait déjà être entrain de s’indigner de mes accusations glaciales, au lieu de quoi il préférait jouer d’autres cartes. Et bien soit ! Je m’étais suffisamment défoulée en rencontrant ma cadette plus tôt dans l’après-midi, puis en passant de longues heures à frapper des cognards. J’étais délassée, reposée, prête à rentrer dans n’importe lequel de ses jeux si c’était ce qu’il voulait. Du moins, jusqu’à ce que mon impatience frappe. Non, c’est même plutôt l’inverrrse. C’est que le garçon était bien plus fourbe qu’il ne pouvait le laisser paraître au premier abord, mais je le côtoyais depuis suffisamment longtemps pour le savoir.

Je l’observe avec une prétention amusée se mettre à réfléchir d’un air exagéré et se lancer dans le sarcasme. Je lève les yeux au ciel, un rictus moqueur aux lèvres face à son petit numéro. Il était doué pour embobiner son monde, c’était certain. Tu as entièrrrement rrraison admetté-je, sarcastique. Il n’avait absolument rien du genre à voler au secours de la veuve ou de l’orphelin comme il le disait si bien. Non, ça non. Par contre, saisir l’opportunité pour jouer de sa fourberie, c’était déjà une scène que je parvenais à bien mieux imaginer. Laisse-moi donc rrreforrrmuler. Misha est ton ami. Ce ne serrrait pas étonnant que tu aies sauté surrr l’occasion pourrr déployer toute ta sourrrnoiserrrie et t’amuser un peu. Est-ce qu’il se reconnaissait déjà plus dans cette description-là ?

Je termine dans un dernier persiflage, le remerciant sans en penser le moindre mot de l’attention qu’il porte à la maladie dont mon frère n’est pas affecté. Il y a un sorrrtilège pourrr cela, tu veux que je le teste surrr toi ? proposé-je avec un sourire qui se fait plus grand, plus menaçant. Non pas que je comptais lui faire quoique ce soit, Blaze m’amusait encore bien trop pour que j’en aie l’envie. Je doute d’entendrrre de tes nouvelles concerrrnant cette histoire mais fais donc, mène ton enquête. Attention à ne pas trrrop trrraîner dans nos pattes cependant. Ma patience à des limites le prévins-je, mes prunelles ne lâchant pas les siennes.

Nous nous faisons face, moi et mon sourire fauve, mes prunelles où dansaient une lueur dangereuse qu’il était risqué d’allumer ; lui et son air impertinent trop sûr de lui. Je savais où était ma place et où était la sienne. Assurément, elles n’étaient pas l’une à côté de l’autre. Il n’était pas ce que la société faisait de mieux, mais il n’était pas non plus ce qu’elle faisait de pire. À ce titre, il pouvait prétendre à une certaine tolérance de ma part. Tolérance qui ne demandait qu’à partir en fumée si seulement il franchissait des limites n’appartenant qu’à moi. Blaze m’amusait et sa propension à retourner sa veste également. Il n’était jamais le dernier pour venir me souffler de mesquines idées que je suivais avec un plaisir indicible. Je n’étais cependant pas dupe : s’il le faisait avec moi, il pouvait le faire avec d’autres. Et lentement se dessinait l’idée qu’il n’était pas étranger à l’article qui avait visé mon tendre frère.

Je n’ai pas besoin de te demander quoique ce soit, mon intuition me suffit réponds-je du tac au tac en haussant les épaules dans un geste nonchalant contrebalancé par ce sourire féroce qui ne délaisse pas mes lèvres. À jouer avec le feu il risquait de se brûler. Mais cet instinct de prédateur me soufflait que ça ne nous dérangeait, ni l’un, ni l’autre. D’un mouvement souple et imprévu, ma baguette se retrouva à danser au bout de mes doigts. Alorrrs, tu en dis quoi ? poursuis-je d’une voix dont la douceur n’en est que plus dangereuse. Probablement ne m’en croirait-il pas capable. Tant mieux, j’aurais l’effet de surprise le jour où je déciderai de lui faire ravaler son culot.

Et puis avec une impertinence qui lui donnait des ailes, le Serdaigle me mit en garde. Est-ce qu’il me fallait rire de son insolence ou la lui faire ravaler ? La seconde option était tentante et me permettrait de clore par trois ces salves libératrices qui avaient guidé mes pas aujourd’hui. Judith, tout d’abord, le Quidditch ensuite, et maintenant Blaze ? Me servait-on des défouloirs sur autant de plateau d’argent car l’on savait que l’ignorance de Junior mettait à mal mes nerfs et à rude épreuve le peu de patience que je possédais en règle générale ? Voyez-vous ça. Et toi, Mansfield, grrrand sauveurrr surrr ton cheval blanc, prrrêt à voler au secourrr de ton meilleurrr pote, tu as pourrr mission d’agiter le drrrapeau blanc ? Mon regard inquisiteur accroche le sien, ma baguette se faisant plus menaçante. Un sortilège perdu était si vite arrivé. Eparrrgne-moi ton intérrrêt trrrompeurrr, je te connais assez pourrr savoirrr que tu n’es pas le genrrre à cherrrcher la paix. Ce qu’il voulait réellement, par contre, m’intriguait.

L’intérêt se muant en une irritation brûlante. Il fallait lui reconnaître du culot. Mais il devait également comprendre que sa place n’était pas au même niveau que moi, mon jumeau adoré, ou n’importe quel sang-pur ici bas. Je comprrrends fais-je, mes yeux se plissant légèrement alors que je reprends, la pointe de ma baguette s’appuyant sur le torse de mon vis-à-vis. Moi, ce que je veux dirrre, c’est que le mieux pourrr toi c'est de ne pas te crrroirrre plus forrrt que tu ne l’es. Finnbjörrrn a vu ce qu’il a vu et a choisi d’en parrrler à la dirrrectrrrice. Tu ne devrrrais pas te mêler des affairrres des grrrands. Ça pourrrait… te rrretomber dessus. Et dans un sourire qui n’a plus rien d’aimable, je lui tapote la joue de ma baguette. Je savais bien à quel point la relation entre Misha et Blaze était chaotique et qu’il ne m’en tiendrait pas rigueur de faire passer l’envie à cet idiot de me menacer. Enfin, même s’il devait m’en vouloir… Ça m’était bien égal.

Mon offre de l’Oublietter reste sans réponse. Ne disait-on pas que qui ne dit mot consent ? La tentation de lui faire ravaler son aplomb plein d’arrogance coulait dans mon sang avec plus de force à chaque seconde, mais je me contiens encore. La douce voix de mon frère adoré arrivant au moment propice pour me souffler à l’oreille de bien me tenir et de ne pas faire trop de vagues. J’avais bien conscience qu’un tel sort ne resterait pas sans conséquences et que la nouvelle directrice était bien capable de passer toutes les baguettes de l’école au peigne fin pour savoir qui avait osé effacer la mémoire d’un camarade. Il aurait été mal avisé de prendre un tel risque ; surtout lorsques d’autres perspectives existent, tout aussi alléchantes, bien plus amusantes. Car Oublietter Blaze, cela revenait à effacer potentiellement le savoir de qui était derrière tout ça, et de quoi j’étais, moi, capable.

Son air gêné me fait sourire un peu plus. Je ne savais pas encore quel intérêt il tirait à prendre part à cette querelle entre deux adolescents ; autre que de pouvoir remuer un peu le chaos qui régnait et s’en amuser, évidemment. Ni même ce qu’il avait prévu de faire par la suite. Mais qu’importe ce qu’il en disait, je restais intimement persuadée qu’il n’était pas étranger à ce journal accusant Finnbjörn d’être malade. Mon intuition poussait ma conviction, et à moi de me présenter l’auteur et la preuve qu’il n’était pas derrière tout ça, je n’en démordrais pas. C’est mieux ainsi approuvé-je, mon rictus se faisant suffisant. Je savais d’ores et déjà que je préviendrais Finnbjörn afin qu’il garde ce Serdaigle à l’oeil. Je laissais les grandes stratégies à mon tendre jumeau, c’était lui le plus doué là-dedans.

Si je faisais preuve d’une patience d’ange jusqu’à présent, les menaces voilées qu’il fit peser sur mon frère adoré achevèrent de faire brûler ma retenue. Ma baguette s’enfonce un peu plus dans sa peau, pointe dangereuse dont il ferait bien de se méfier. Coincé comme il l’était entre moi et les lavabos, il n’avait pas beaucoup de marge de manoeuvre, et cette révélation se refléta sur ses lèvres qui s’étirent une grimace. Il ne comprit pas cependant qu’il était l’heure pour lui de se taire et j’en étais bien plus que ravie. Son impertinence revenait déjà au grand galop, allumant mes prunelles d’une flamme sauvage. Nous nous ressemblions beaucoup. L’un comme l’autre adorions flirter avec les limites et nous jouer de la patience des autres. Nous ne vivions jamais autant que lorsque nous sentions le danger et que nous étions entrain de l’affronter. Il voulait goûter le risque ? Il était venu titiller le bon prédateur.

Je me recule alors d’un pas, lui laissant toute la liberté de respirer un peu mieux, mon sourire se faisant plus grand, plus dangereux. Ma baguette toujours pointée dans sa direction, prête à la moindre provocation ; celle de trop. Non Blaze, ce n’est pas une invitation fais-je d’un air suave. Il s’agit d’une menace. Et mes yeux de pétiller de quelque chose d’indéfinissable, comme si j’essayais tout simplement d’instruire mon camarade. Toute amabilité avait disparue de mes traits aussitôt qu’il avait commencé à dessiner les contours d’un avertissement destiné à Finnbjörn. Me laisser entendre, à moi, que mon tendre jumeau devait se montrer prudent était comme jeter un incendio sur un tas de bois qui n’attendait qu’une chose : s’enflammer. Je pousse un soupir, comme si j’étais face à une situation inextricable et secoue légèrement la tête, ma chevelure brune dansant autour de mon visage. Bloclang lancé-je d’un ton brûlant, me délectant déjà de la surprise que je lisais dans le regard de Blaze (dé lancé dans le flood).

Je fais encore quelques pas en arrière, observant mon interlocuteur de la tête aux pieds. Tu es trrrop bavarrrd. On ne t’a jamais dit que ça rrrisquait de te jouer des tourrrs ? Je ricane, l’amusement reprenant sa place. Bien sûrrr que tu vas le fairrre affirmé-je d’un ton qui ne laissait planer aucun doute, revenant sur sa proposition de dénoncer les nés-moldus qui oseraient se moquer de mon cher frère. Parrrce que sinon, il se pourrrait bien que quelqu’un d’autrrre attrrrape une maladie bien pirrre que l’éclabouille. Enfin, conclus-je d’un vague geste de la main, comme si je chassais la menace voilée, l’air de rien. Je ne suis pas médecin aprrrès tout. Et sur un dernier sourire, je me dirige vers la porte pour quitter ces toilettes. Un dernier regard en direction de Blaze, toujours muet, et je m’évanouis dans le couloir. Pensive, je joue avec mes doigts, faisant craquer le cuir de mes gants qui s’arrêtent au début de mes phalanges, dessinant dans mon esprit les mots que j’allais pouvoir écrire à Finnbjörn.