Sa première fois avec Masha

En se réveillant ce matin, Thomas constata qu’il n’avait pas très faim, et un peu la boule au ventre. Selon le calendrier que lui avait offert son grand-père à l’hôpital, c’était aujourd’hui le grand jour : le jour de la pleine lune. Sa première pleine lune qu’il allait vivre consciemment, avouez qu’il y avait de quoi être stressé.

Comme on lui en avait donné instruction, il prit un rapide petit-déjeuner et s’en alla ensuite à l’infirmerie où Jane – la gentille infirmière – lui donna à boire une potion « tue-loup ». Infecte, soit dit en passant, mais c’était un mal nécessaire pour ne pas perdre complètement la tête une fois la nuit tombée et s’il y avait bien une chose que ne voulait pas Thomas, c’était donner motif qu’on se plaigne de sa présence. Il était ravis d’être à Poudlard et n’avait aucune envie d’être un poids pour qui que ce soit.

Paradoxalement, il s’acquitta de ses taches du jour avec un certain sérieux, sans chercher à tirer-au-flanc, mais tout en gardant un œil attentif sur toutes les pendules et horloges qu’il croisait, comptant les minutes non sans une certaine angoisse allant grandissante. Dans la journée il reçu un petit mot de Stanley et aussi un de son cousin Jack pour lui souhaiter bonne chance et cela lui fit bien plaisir.

Puis le soleil au loin commença à donner des signes qu’il était l’heure d’aller se coucher et Benjamin Duncan lui signifia qu’il pouvait lâcher son râteau, qu’il était l’heure de se mettre en route. Pour une fois, Thomas n’aurait pas été contre prolonger un peu son travail d’une heure ou deux.

En compagnie du garde-chasse ils traversèrent silencieusement les jardins du château jusqu’au saule cogneur où les attendait une fille de Gryffondor, Masha. Thomas avait déjà eu une ou deux fois l’occasion de la voir et ils avaient discuté brièvement de leur conditions, mais sans plus. Il la salua d’un geste timide, guère d’humeur à l’enthousiasme et ils s’engouffrèrent dans le passage sous les racines.

Il fallu ramper un peu longtemps pour finalement déboucher dans la fameuse cabane hurlante. C’était la première fois qu’il y mettait les pieds. Duncan leur rappela quelques consignes de sécurité comme « ne sortir sous aucun prétexte » et « ne pas faire de bêtises » mais le ciel était d’un rouge vif désormais et ses rayons ne tarderaient pas à ne plus repousser ceux de la pleine lune. Il les laissa là, et les deux adolescents se retrouvèrent seuls.

Thomas laissa promener son regard sur l’endroit. C’était un peu sale et glauque et n’aidait pas à calmer l’angoisse qui montait.

- « Ça fait mal ? La transformation ? »

C’était une question qu’il s’était toujours refusé à poser jusque-là, pour ne pas se paniquer inutilement, mais maintenant il avait envie de savoir, pour être prêt. Puis lui vint aussi une idée bizarre.

- « Et ça déchire les habits ? J’ai vu ça dans une série. »

Il ne savait plus comment ça s’appelait mais le loup-garou avait tellement de muscles que sa chemise craquait par en dessous. Ça, ça lui aurait peut-être plu. Les idées tournoyaient vite maintenant, gagnées par le stress, il avait trop d'interrogations sans réponses et n'était même pas sûr de pouvoir les poser une fois la pleine lune commencée et s'il ne redevenait pas humain au matin ? Et si la potion ne fonctionnait pas ? Et s'il se transformait en un autre animal ?

- « Si je te mords une fois transformé, tu redeviens humaine ? »

C’était clairement la question la plus stupide du lot.

@Masha P. Clark

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thomas & masha

sa première fois en duo

Jetant un regard torve à sa montre, Masha leva les yeux au ciel. L’heure fatidique approchait et, comme tous les mois depuis désormais de nombreuses années, elle avait envie de vomir. Au tout début, elle avait pensé que c’était un effet de la transformation, une sorte de signe avant-coureur un peu comme la fatigue, la pâleur et autres symptômes sympathiques qui annonçaient les transformations. Ensuite, elle avait cru que c’était à cause de la potion Tue-Loup – cette chose avait un goût infâme, et ce malgré la soupe qu’elle avait pris coutume de boire en même temps – puis elle avait fini par comprendre. De l’appréhension. C’était simplement sa façon à elle de ressentir l’appréhension qui accompagnait chaque transformation. Non pas qu’elle ait beaucoup eu l’occasion de comparer son expérience avec d’autres… malades, toutefois une discussion avec son Médicomage lors de son bilan annuel l’an passé l’avait aidé à tirer cette conclusion. Elle avait beau prendre l’apparence d’un loup plusieurs fois par an et ce depuis de nombreuses années maintenant, la peur ne la quittait jamais vraiment à l’approche de la pleine lune. Oh en dehors de tout ça, Masha était plutôt une jeune fille courageuse voire un peu trop téméraire : elle n’avait jamais craint la froideur du professeur Thorstein ni ses redoutables punitions. Elle n’avait jamais eu peur de s’aventurer dans la forêt interdite lors de ses discussions avec Monsieur Armitage. Néanmoins, l’idée de prendre l’apparence d’un loup, et ce même en gardant son esprit clair et vif la tourmentait plus qu’elle ne voulait bien l’admettre.
Néanmoins cette fois ci… Quelque chose était différent. Elle allait bien prendre le chemin de la cabane hurlante, elle allait s’installer bien sagement dans un coin en attendant la transformation mais… Elle ne serait pas seule. Qu’elle n’avait pas été sa surprise en recevant une missive quelques temps plus tôt, la conviant à l’infirmerie. Là-bas, elle avait fait la connaissance d’un élève qu’elle ne connaissait pas : petit, chétif, les cheveux ébouriffés et l’œil vif, elle avait haussé un œil et laissé les adultes parler. Par Romulus, un autre comme elle ?! Elle se souvenait du mouvement de dégoût qu’elle avait dû réprimer en reposant son regard sur l’adolescent, adoptant la mine la plus fermée et sans expression possible. L’école en avait un autre comme elle en réserve… Un Cracmol, de surcroit. Elle n’avait pas su trop quoi dire et avait écourté l’entrevue, lâchant un vague « À bientôt…. » à l’enfant avant de quitter les lieux bien plus précipitamment que ce qu’elle aurait voulu. Masha se souvenait très bien de l’émotion qui l’avait saisie à ce moment précis et il s’agissait exactement de la même qu’elle ressentait à présent : de l’appréhension. Non pas forcément de côtoyer un autre loup, mais surtout de la mine qu’avait adopté le fameux Thomas lors de leur entrevue. Il semblait paisible, calme et… heureux ? Heureux d’être ici, à Poudlard ? Retenue comme une bête de scène ? Masha n’arrivait pas à comprendre, et encore pire, l’idée de côtoyer le jeune garçon lors de ses moments les plus… intimes la mettait assez mal à l’aise.
Repoussant tout ceci dans un coin de sa tête, elle tenta le plus possible de se reconcentrer sur son devoir. Mieux valait ne pas prendre de retard étant donné l’état dans lequel elle serait les jours prochains… Les lunes hivernales étaient toujours les plus difficiles à supporter selon elle. Tiens, un sujet qu’elle pourrait peut-être aborder avec Thomas… Elle secoua négativement la tête : et puis quoi encore ?! Une petite discussion « secrets de loups » au coin du feu ?! Non merci.
L’après-midi fila bien trop vite pour Masha qui dû se résoudre à ranger ses affaires disséminées dans la salle commune avant de monter revêtir une tenue confortable. Elle devait retrouver Benjamin, le garde-chasse, en compagnie du jeune Thomas au pied du Saule Cogneur. L’idée de retrouver l’oncle d’Hilary la renfrogna d’autant plus : ce type ne l’aimait pas, et elle ne l’aimait pas non plus. Comme si se rendre dans la Cabane Hurlante n’était déjà pas assez humiliant, il fallait qu’elle subisse le regard désapprobateur du garde-chasse une fois par mois…
Terminant de se préparer, Masha quitta la salle commune sans un regard, rapide et discrète comme une ombre avant de dévaler les escaliers en direction du parc. Elle ne croisa personne, évitant ainsi les potentielles questions incongrues et quitta le château alors que le soleil, tel un astre doré, accélérait sa descente dans le ciel.

« Salut. » marmonna-t-elle plus par politesse que par réelle envie à l’intention de Thomas. Elle adressa un signe de tête au garde-chasse et les deux adolescents s’engouffrèrent silencieusement dans le passage secret leur étant destiné, suivi de près par Duncan.
Une fois arrivé dans la sinistre mais néanmoins familière prison mensuelle, Masha retrouva ses habitudes et se dirigea vers un des coin de la pièce tandis que le garde-chasse rappelait les consignes de sécurité. Bla-bla-bla… Comme si l’envie de sortir pouvait ne serait-ce que la traverser… L’adolescente retint un bâillement et jeta un coup d’œil à travers les planches qui obstruaient les fenêtres ; le soleil poursuivait sa course dans le ciel devenu rouge sang et son cœur s’accéléra. C’était pour bientôt…

« Hein ? »

La voix de Thomas l’avait presque faite sursauter. Interdite, elle posa son regard acier sur lui. Est-ce que ça faisait mal ?

« Un peu comme une grosse chute. » répondit-elle laconiquement en détournant le regard.

Elle ne savait plus vraiment si la douleur s’atténuait avec le temps ou simplement si elle s’y était habituée avec les années… Difficile à dire. Masha détourna à nouveau la tête, s’obstinant à contempler les rayons du soleil qui disparaissaient au loin lorsque la voix de Chastel s’éleva à nouveau dans la pièce déserte. Elle se retint de soupirer et reporta à nouveau son attention sur lui.

« C’est plutôt une métamorphose, donc on reste globalement habillé. Un peu comme les Animagus. »

Elle détourna à nouveau le regard. D’après ce qu’elle savait, les Animagi se transformaient à volonté et ce sans risquer de détruire la moindre robe de sorcier. Pour eux c’était quelque peu… Différent. Comme si leur malédiction n’était pas suffisante, la nature ne semblait pas vouloir préserver leur tenue : si Masha ne s’était jamais retrouvée complètement nue, ses vêtements souffraient de ses métamorphoses, réapparaissant toujours effilochés voire complètement déchirés. Poussant un soupir, elle se redressa pour se diriger vers un buffet branlant dans lequel elle prenait soin de ranger des sweat-shirt de rechange au cas où sa transformation mensuelle épargnerait sa tenue moins qu’à l’accoutumé. Elle devait bien avoir un truc qui irait à Thomas si jamais il finissait nu comme un ver… Elle s’apprêtait à ouvrir le meuble défoncé lorsque la dernière question du garçon l’interpela. Elle se retourna lentement et lui fit face en arquant un sourcil. Il était stupide ? Elle fronça le nez et s’apprêta à le renvoyer bouler lorsqu’une odeur prit d’assaut ses narines. La peur. Ce n’était pas la sienne, mais bien celle du Cracmol qu’elle sentait se répandre dans la pièce. Elle retint un nouveau soupir et haussa les épaules.

« Je sais pas. On essayera si tu veux. »

La débilité de sa propre réponse la surprit et elle s’adossa à nouveau contre le mur en se laissant glisser au sol. L’heure approchait, son cœur s’emballait… Elle posa son regard sur Thomas. C’était sa première fois. Sa première transformation. Elle savait combien cela pouvait-elle effrayant et bien qu’agacée par le fait de devoir jouer les baby-sitter, une sorte d’instinct animal prenait peu à peu le dessus. Il faisait partie de la meute. De sa meute.

« Assied-toi c’est moins désagréable en général. » dit-elle d’un ton qui restait sec malgré sa tentative pour s’adoucir.

Le dernier rayon du soleil avait disparu. Sa respiration lui paraissait de plus en plus bruyante tandis que la nuit tombait sur Pré-au-Lard. Les premiers rayons de lune n’allaient pas tarder et, pour la première fois de sa vie, Masha partagerait cet instant avec quelqu’un d’autre…

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Duncan disparu dans l’espèce de bouche-noire qui servait de passage souterrain entre la cabane et le parc du château, il ne restait plus dans la pièce que la taiseuse gryffondor. Si Thomas pouvait parfois se montrer un peu lunaire – sans mauvais jeu de mot – il n’était pas complètement à côté de la plaque encore et comprenait assez aisément qu’au mieux, la jeune fille se montrait assez indifférente à lui. Au pire, sa présence l’importunait.

Mince. Thomas n’aimait pas trop déranger, surtout à Poudlard, institution envers laquelle il conservait une sympathie diffuse et reconnaissante, simplement heureux de pouvoir y faire son petit chemin sans embêter personne.

S’il en était capable, il se contenterait de se taire. Parfois il y a arrive, ne pas faire de vague, rester bras et jambes ballantes à juste regarder les autres comme un spectateur au théâtre. Mais ce soir, impossible, même avec toute la bonne volonté du monde, il y a trop de questions jusque-là refoulée qui débordent à présent, glissant sur un fond d’angoisse des premières fois.

Lorsque finalement il crève le silence, peu après le départ de Duncan, il la sent presque sursauter. Désolé pour ça. Laconiquement, elle compare la transformation à une chute. Mais genre, la chute, quand on tombe ou quand on heurte le sol ? Il n’ose pas demander plus de détails, Masha répond laconiquement, visiblement il la saoule un peu.

Il se mort une joue, attend. Puis repose une nouvelle question. Il n’arrive pas à les retenir en fait, elles lui traversent l’esprit soudainement et semblent bien trop grosses pour être ignorées.

« globalement », à nouveau Thomas ne trouve pas que c'est une réponse claire du tout et à nouveau il ne demande pas de précisions, se contente de hocher la tête d’un air de celui qui a bien compris. Faudrait pas passer pour un crétin quand même. Bon après il aimerait bien que « globalement » signifie plutôt plus que moins. Il a la pudeur des adolescents et clairement Masha ne lui inspire pas trop de se sentir à l’aide là tout de suite.

Alors que la jeune fille se déplace dans la pièce, Thomas pose une nouvelle question ! Décidément.

Apparemment celle-ci n’est pas aussi stupide qu’il l’imagine puisque Masha lui propose simplement de tester. Il lui répond d’un grand sourire. Ok pour tester, oui ! Et puis l’idée lui vient : que ce passe-t-il si vraiment cela soigne sa malédiction ? Est-ce qu’il pourra rester à Poudlard quand même ? Trop de questions, beaucoup trop de questions, et cette angoisse qui monte alors qu’à travers la fenêtre le soleil est sur le point de disparaitre.

Thomas respire profondément, il a l’impression d’être bloqué de l’intérieur, tout serré, tout crispé, cette fois-ci c’est la voix de Masha qui le fait sursauter, elle l’invite à s’asseoir. Il secoue la tête dans une approbation, incapable d’ouvrir la bouche pour dire un mot maintenant, il a envie de vomir en fait.

Il imite Masha, pose ses fesses sur le plancher poussiéreux de la cabane. Le soleil a disparu maintenant. Vraiment envie de vomir. Il fixe fixement le mur en face de lui, n’ose même pas regarder sa camarade. Heureusement qu’elle est là quand même…

…

Un mal de tête soudain, comme un coup de marteau qui résonne à l’intérieur du crâne. Thomas s’attrape la tête entre les deux mains, il voudrait dire quelque chose mais impossible de desserrer les mâchoire. Tout son corps est tendu comme une statue de fer, ses muscles se contractent, se contractent, se contractent… vont-ils s’arrêter à un moment de se contracter ? Thomas a l’impression qu’il vont se déchirer, mais ils tiennent bon, le monde se transforme, sa vision se trouble, s’ensanglante puis s’affine, sous ses yeux ses membres s’allongent, c’est hallucinant, c’est épouvantable, c’est magique !

Alors il veut fermer les yeux, regarder ailleurs que cette transformation terrifiante qui le prend, il ne parvient pas à clore les paupières, relève la tête, la lumière de la lune le frappe, le noie, l’absorbe, il a l’impression de tomber, de tomber, comme une chute.

Masha.

Elle lui avait dit que ça se passerait comme ça !

Comme on se raccroche à une branche cette diée lui apporte une infime bribe de réconfort. C’est… normal ??

Il ferme les yeux, ses muscles se réorganisent sous sa peau, celle-ci le démange, l’irrite, se couvre de poils.

In-croy-able !

Quand il ouvre les yeux, il n’y a plus que l’impression d’une vaste crampe, douleur immédiatement balayée par la force du monde qui l’entoure. Il sent. Il voit. Il flaire. Il entend. Comme une bête. La métamorphose est aussi terrible que plaisante et pris d’une joie sauvage, mêlant angoisse et excitation, il ne trouve rien de mieux à faire que de pousser un long hurlement à la lune.

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