Astride regardait Hecate depuis dix bonnes minutes maintenant, s’attendant à la voir tourner de l’œil d’un moment à l’autre. Bien sûr, lorsque sa meilleure amie se retournait vers elle, elle feignait d’être plongée dans la lecture d’un passionnant article relatant la vie paisible de pauvres petits pingouins subissant le réchauffement climatique. Sa discrétion n’était cependant pas parfaite, être à la même page de son magasine depuis tout ce temps pouvait être assez révélateur de sa concentration. Mais en même temps, comment ne pas s’inquiéter alors qu’elle avait à côté d’elle une Hecate blanche comme un linge qui menaçait à tout moment de s’écrouler, aussi fragile qu’un château de cartes ? La poufsouffle ne pouvait malheureusement pas faire grand-chose pour elle puisque de toute façon, elle n’y connaissait rien en mal des transports. Etant issue d’une famille de moldus, elle avait l’habitude de prendre l’avion, le train ou la voiture à chaque fois qu’elle devait se déplacer et elle n’en avait jamais eu réellement peur. Finalement, se déplacer avec un balai ou dans une cheminée était tout de même nettement plus effrayant, il aurait donc été assez drôle de voir Hecate paniquer à ce point si elle n’avait pas été aussi inquiète pour sa meilleure amie. Heureusement, le voyage touchait bientôt à sa fin et elle n’aurait probablement pas besoin de sortir sa petite cuillère pour ramasser les morceaux de sa meilleure amie éparpillés un peu partout à bord. La jeune fille se pencha pour regarder par le hublot, constatant avec satisfaction que l’avion avait perdu un peu d’altitude ce qui présageait une fin proche du voyage.

La pauvre serdaigle n’avait tout de même pas eu de chance, New-York n’était vraiment pas la porte à côté et le mal des transports de la jeune fille allait forcément faire des siennes. Cependant, la perspective de faire ce voyage en compagnie de la personne avec qui elle partageait tout depuis maintenant cinq ans, loin de ses parents et de toutes ses préoccupations habituelles avait de quoi l’enthousiasmer et il aurait été vraiment dommage de renoncer à cause de ce petit obstacle. Au départ, elles avaient commencé ce concours simplement pour s’amuser et pour passer un peu plus de temps ensemble loin des cours habituels. Bon, s’inscrire à un concours de lecture pour s’échapper des devoirs n’aurait pas été le premier choix de beaucoup de gens, mais les deux jeunes filles s’étaient toujours ressemblé dans leur gout prononcé pour la littérature. Elles avaient eu vite fait de changer d’objectif en apprenant ce qu’il y avait à la clé de ce petit jeu. Gagner leur permettait d’avoir des vacances toutes trouvées et c’était un objectif qu’elles souhaitaient plus que tout atteindre. La poufsouffle s’attendait donc à passer les vacances les plus extraordinaires de sa vie et pour la première fois de sa vie, elle n’avait véritablement aucune appréhension. La peur de se perdre dans les rues, que la compagnie aérienne ait perdu sa valise ou tout autre chose ne l’avait même pas encore traversé et c’est avec un plaisir manifeste qu’elle attendait la fin du voyage.

" On y est! C'est formidable! "

La serdaigle semblait avoir retrouvé des couleurs et le retour sur la terre ferme y était sans doute pour quelque chose. Elles allaient probablement se perdre à présent dans l’immense aéroport mais ni l’une ni l’autre ne semblait en tenir compte. Qu’elles soient déjà totalement émerveillées alors qu’elles n’avaient pas encore mis un pied au dehors encore. Cependant, Astride rêvait de pouvoir franchir les portes de l’aéroport le plus rapidement possible, elle suivit donc sa meilleure amie sans broncher à travers la foule qui se pressait dans toutes les directions, faisant bien attention à ne pas perdre de vue la serdaigle. C’était sans doute la seule crainte de la jeune fille, perdre de vue sa meilleure amie. A deux, elles réussiraient sans doute à s’en sortir mais toute seule, c’était peine perdue. Elle était loin de tous ses repères à présent et se raccrochait à sa meilleure amie pour tous les petits détails pratiques qu’elle n’était pas sûre de maitriser. Astride avait toujours eu un sens de l’orientation épouvantable, et même lorsque les gens autour d’elle parlaient la même langue et étaient forcément aptes à l’aider à trouver ce qu’elle cherchait, elle se retrouvait noyée dans un univers qu’elle ne connaissait pas. Même à Londres, la jeune fille était capable de se perdre, certes, elle n’y vivait pas, mais la minuscule petite ville qu’avaient choisie ses parents se trouvait juste à côté et il était tout de même risible de constater qu’après seize années à côtoyer plus ou moins fréquemment les rues Londonienne, elle n’avait toujours pas réussi à intégrer à peu près le chemin qu’elle devait parcourir pour aller d’un point A à un point B. La poufsouffle profita d’une petite pause pendant laquelle elle devait simplement attendre que le tapis roulant lui rende sa valise pour ouvrir la bouche pour la première fois depuis l’atterrissage.

« Olalala, c’est super grand. Ça va être génial, je te l’avais dit. Comment tu te sens ? J’ai bien cru que tu allais t’évanouir tout à l’heure. »

Si elles devaient se mettre en quête d’une pharmacie dans les plus brefs délai, autant le savoir dès maintenant, Astride n’était pas sûre d’avoir envie de trainer sa meilleure amie derrière elle en la tenant par un pied tout en trainant avec elle sa valise plus celle d’Hecate qui devait bien peser une tonne. A croire qu’elle avait décidé d’emmener toute sa maison avec elle. Pour une fois, la poufsouffle avait été plus que raisonnable, ses livres de cours étaient restés bien sagement sur une étagère, rangés par ordre alphabétique au cas où elle ait à appeler sa maman en plein milieu de la nuit parce qu’elle doutait d’une information contenue dans l’un d’eux. On ne se refaisait pas, et pour éviter les coûts exorbitants de téléphone mieux valait qu’elle sache cibler exactement le bon ouvrage dès le départ. Cependant, elle était pour le moment ravie de s’être fait violence compte tenu du poids qu’elle avait réussi à éliminer. Il fallait tout de même espérer que ses bouquins ne lui manquent pas trop même si elle en doutait fortement. Il y avait tellement de choses à voir à New-York, tellement d’incontournables qu’elle repartirait probablement avec quelques regrets, la déception de ne pas avoir pu tout faire dans le laps de temps qui leur était imparti. Les parents d’Astride lui avaient donné de nombreuses recommandations à propos de e voyage, non pas pour la mettre en garde contre tous les dangers qu’elle aurait pu rencontrer mais surtout parce qu’ils avaient déjà eu l’occasion de se rendre dans cette ville immense et qu’ils voulaient être certains qu’elle irait bien au bon endroit dès le départ. Hecate semblait avoir lu dans ses pensées, puisqu’elle rouvrit la bouche dès qu’elles eurent enfin franchi les portes de l’aéroport.

" On commence par quoi? "

C’était une excellente question à laquelle elle n’avait évidemment pas de réponse. Il y avait trop de choses à voir et pas assez de temps et leurs valises les empêchait forcément de faire tout un tas de trucs sympa qu’elles auraient aimé pouvoir tenter dès le début de leur périple New-Yorkais. De toute façon, Astride avait bien évidemment prévu de se concocter un petit planning dès le début de leurs vacances, non pas qu’elles aient forcément besoin d’une organisation quasi militaire, mais si elle voulait trouver du temps pour tout, il allait falloir qu’elle trouve comment assembler les pièces du puzzle pour qu’elles tiennent toutes dans le nombre de jours et d’heures qu’elle avaient à leur disposition. Cependant, pour leur premier jour, elles avaient quartier libre puisqu’elles n’avaient absolument rien prévu. C’était assez étonnant venant d’elles d’ailleurs, mais si la poufsouffle avait imaginé l’espace d’un instant qu’elles pourraient revoir un petit peu leur planning pendant les nombreuses heures de vol qu’elles allaient devoir subir. Astride avait dû rayer cette idée de la liste avant même qu’elles ne montent dans l’avion, voyant qu’Hecate regardait le dit avion d’un air suspicieux comme si elle s’attendait à ce qu’il se mette à rire en lui hurlant « attention, je vais te manger ». La suite avait montré qu’elle n’avait pas eu tort mais à présent, Hecate semblait avoir retrouvé toutes ses capacités de réflexion et de rationalisation ce qui n’était pas plus mal pour l’une comme pour l’autre.

« Je ne sais pas, j’avais fait une liste des incontournables. Tu veux la voir ? Je pensais qu’on pourrait mettre une croix à côté à chaque fois qu’on aurait fait un truc important. Bon, je reconnais que la plupart des points de la liste correspondent à des restaurants, enfin pas vraiment des trucs où on peut trouver à manger, mais j’étais sûre que j’aurais faim. Il parait qu’à New-York on peut trouver des hot-dogs presque à tous les coins de rues. On fait quoi de nos valises ? »

Penser à manger avant toute chose ressemblait bien trop à Astride et parler beaucoup aussi. Mais au moins ça prouvait que son humeur était au beau fixe ce qui était le principal. La jeune fille comptait bien profiter de ses vacances un maximum et pour le moment, elle flottait sur un nuage rose à des kilomètres au-dessus de la réalité.

" Ca va beaucoup mieux, merci, c'était juste... par Merlin, c'est immense! Comment on va faire pour s'y retrouver? Et si on se perd? Il faut qu'on trouve un point pour se donner rendez-vous au cas où. Ça m'étonnerait qu'on ait le droit d'envoyer en l'air des étincelles rouges, même en cas d'urgence... "

La jeune fille hocha vaguement la tête adoptant un air dubitatif pendant quelques secondes avant de reprendre un grand sourire enjoué. Si Hecate devait tomber dans les pommes, elle n’aurait qu’à faire jouer ses connaissances en médecine et en premiers secours pour lui apporter l’aide nécessaire. Et puis de toute façon, il était vrai que sa meilleure amie commençait à reprendre quelques couleurs ce qui était plutôt bon signe. Après avoir mis les deux pieds dans un cercueil en s’apprêtant à refermer le couvercle au-dessus de sa tête, elle avait peut-être décidé que finalement, elle allait être un peu à l’étroit là-dedans et qu’il était bien plus utile d’attendre d’être vieille et rabougrie avant de faire un tout nouvel essai. Bref, il n’y avait que du positif dans cette histoire. Enfin, Astride commençait tout de même à se demander s’il ne valait mieux pas confectionner un radeau et tenter de rentrer en Angleterre avec des rames improvisées au lieu de l’obliger à remonter dans un avion dans si peu de temps. Parce qu’elles allaient évidemment profiter de leur séjour mais ne garderait-elle pas un mauvais souvenir de cette expérience si la dernière chose dont elle se souvenait restait les transports ? Elle n’aurait probablement pas du tout envie de réitérer l’expérience une seconde fois et c’était bien dommage. Astride avait toujours rêvé de visiter New-York mais c’était loin d’être la seule ville qui l’intéressait. L’année prochaine serait la dernière qu’elle passerait en compagnie d’Hecate et peut-être même les seules vacances scolaires où elles pourraient se consacrer entièrement l’une à l’autre. Il fallait en profiter. La poufsouffle s’imaginait très bien se joindre à un groupe de touristes téméraires pour un safari en Afrique ou toute autre chose qu’elle n’avait jamais tenté et qu’elle aurait aimé pouvoir cocher sur la liste des choses à faire avant de devenir une adulte responsable. La jeune fille avait tendance à garder la tête sur les épaules en toutes circonstances mais pas là. Certes, elle était toute seule dans une ville immense qu’elle ne connaissait pas, mais c’était justement ça qui lui donnait envie de se comporter tout simplement comme une adolescente pour changer un peu.

« Ouais, non, ça tu évites s’il te plait. J’ai été très contente de gagner ce voyage, je ne veux pas un aller simple pour le ministère de la magie. Si on a un problème on trouve une cabine téléphonique, il devrait y avoir dans le coin, tu sais comment ça marche, rassure-moi ? »

Astride avait tendance à oublier que tous ses nouveaux amis n’avaient pas onze ans d’éducation moldues dans les pattes et que contrairement à elle, ils se retrouvaient bien vite complétement déboussolés lorsqu’ils ne pouvaient pas utiliser leurs baguettes. Peut-être parce qu’ils avaient toujours un adulte auprès d’eux qui pouvaient en faire usage dès qu’ils en avaient besoin. Là, tout était différent, elles allaient devoir se débrouiller comme des grandes, Hecate loin de la magie et donc de toutes ses habitudes et Atride sans appeler papa et maman à la rescousse toutes les dix secondes parce qu’elles s’étaient encore perdues. De toute façon, ils lui avaient dit avant son départ que si la situation devenait trop compliquée, ils pouvaient venir les retrouver pour les aider un peu chose que la poufsouffle espérait fortement ne jamais voir arriver. Elle avait trop l’habitude de se reposer sur sa petite famille. Pourtant, Poudlard lui avait permis de gagner sacrément en autonomie mais elle avait toujours tendance à faire appel à sa maman lorsqu’elle se heurtait à un problème qu’elle jugeait bien trop difficile à gérer pour elle avant même d’avoir tenté de le résoudre. Les hiboux fusaient donc dans les deux sens ce qu’elle ne pourrait pas se permettre en étant ici. Finalement, cet été allait être pour les deux jeunes filles à la fois des vacances de rêve et un défi. Elles étaient toutes les deux aussi douées pour les crises de névroses en tout genre et se retrouver complétement perdues au milieu de nulle part avec leurs lourdes valises sans pouvoir situer leur hôtel au moins vaguement pourrait s’avérer être une expérience quelque peu perturbante. Seulement, pour le moment, Astride était bien trop heureuse et avide d’en savoir plus sur l’endroit où elle venait de mettre les pieds pour songer que peut-être elle allait avoir de quoi paniquer dans les prochains jours. Pour l’instant, il y avait plus important, à savoir tenter de se repérer et de prendre une décision quant à la marche à suivre pour se rapprocher de leur objectif. Et si leur but était d’en voir le plus possible en un minimum de temps, leurs valises encombrantes constituaient un obstacle de taille la réussite de leur projet, il était grand temps de trouver un moyen de s’en débarrasser.

" L'aéroport devrait être... dans ce secteur. Il faudrait trouver l'hôtel pour aller les déposer, on ne va tout de même pas traîner un étage de bibliothèque avec nous pendant qu'on visite. "

La jeune fille ne put que sourire en voyant sa meilleure amie sortir une carte, elle avait pensé à toutes les listes possibles et imaginables, listes de courses en tout genre, listes des médicaments utiles à transporter en permanences avec elles, listes de ce que devait contenir son sac à chaque excursion, listes de budget… Et toutes autres listes qui lui étaient passées pas la tête au moment de faire ses bagages, et sa meilleure amie venait compléter son organisation en y ajoutant de quoi se repérer ce qui n’était absolument pas inutile. Cependant, Astride avait constaté lors de son excursion dans le lac noir que le sens de l’orientation n’était absolument pas quelque chose d’inné chez elle-même si la poufsouffle n’en avait jamais douté jusqu’ici compte tenu du temps qu’elle avait mis à retenir les différents trajets qu’elle avait à effectuer à l’intérieur de l’école. Du coup, lorsqu’elle se pencha sur la carte que tenait sa meilleure amie, elle dut rapidement se rendre à l’évidence, elle ne comprenait rien à rien. Bien sûr, elle reconnaissait assez facilement New-York qui avait une forme assez atypique ou du moins c’était ce qu’elle avait pu constater grâce aux nombreuses recherches qu’elle avait fait sur internet avant de prendre l’avion. Elle avait d’ailleurs dévalisé la petite bibliothèque de sa ville pour pouvoir feuilleter pendant le court laps de temps qui lui restait avant son départ, les guides touristiques et autres ouvrages parlant de la ville qu’elle allait prendre tant de plaisir à visiter. C’était tout juste si elle ne s’endormait pas avec trois ou quatre bouquins sur les genoux le soir. Ses parents et ses frères et sœurs s’étaient d’ailleurs gentiment moqués de ce comportement affirmant qu’elle était plus une maniaque psychopathe qu’une jeune fille de quinze ans. Venant de sa famille, ce genre de remarques ne pouvait que l’amuser et c’était avec un pincement au cœur qu’elle avait dû se résoudre à se séparer d’eux pour un long mois de plus. Evidemment ces regrets avaient été de courtes durée mais maintenant qu’elle se retrouvait penchée sur une carte qu’elle ne comprenait pas du tout, elle se demandait si elle n’aurait pas dû mettre le peu de temps libre qu’elle s’était octroyée à profit pour prendre des cours d’orientation ou de cartographie si toutefois ça existait à cette période de l’année. La poufsouffle releva donc bien vite la tête sans pour autant se départir de son sourire, si ce truc ne lui était pas d’une grande utilité elle pouvait tout aussi bien essayer d’y aller au feeling, si toutefois elle était douée pour ça.

« D’accord, alors il faut déjà qu’on sache dans quel aéroport on est, j’ai déjà oublié. Ensuite, il faut aussi qu’on voit où se trouve notre hôtel, je crois qu’il était pas loin de Times Square, ce concours ne mentait pas su la qualité du prix décerné aux vainqueurs, mais du coup je ne sais pas si on peut le rejoindre en bus… Le plus simple serait probablement le taxi, on n’a qu’à donner un petit papier avec le nom de l’hôtel et on se laisse porter. Qu’est-ce que tu en penses ? »

Qu’est-ce qu’elle allait en penser ? Certainement qu’elle s’était trompée de personne en choisissant sa meilleure amie, que cette folle évadée d’un asile psychiatrique ne pouvait pas être Astride et que finalement elle voulait bien rentrer en Grèce un peu plus tôt que prévu. Après tout, la poufsouffle venait tout de même de lui avouer tranquillement avec un grand sourire qu’elle ne savait pas du tout où elle se trouvait. L’aéroport aurait pu se situer en Floride, elle ne se serait même pas demandé pourquoi rejoindre New-York lui prenait autant de temps. Enfin bref, Astride dans toute sa splendeur. Elle avait d’ailleurs mis un certain temps avant de réussir à se rendre à Pré-au-Lard par ses propres moyens, ce n’était qu’un village pourtant, mais il y avait déjà trop de rues pour qu’elle puisse y mettre les pieds sans craindre de se perdre. Avec un peu de chance, Hecate comprendrait assez rapidement que pour tout ce qui était trajet, il ne fallait vraiment pas compter sur elle à moins qu’elle ne veuille se retrouver au Pôle nord parmi les pingouins. C’était d’ailleurs une assez bonne idée pour un futur voyage, Astride aurait bien aimé tester un pays avec un climat différent du sien. Elle avait toujours eu l’habitude de la pluie Londonienne et n’avait jamais eu envie de s’en plaindre, mais peut-être aurait-elle un coup de cœur pour tout autre chose. En même temps, la poufsouffle avait toujours imaginé qu’elle ne pourrait pas partir vivre trop loin de sa famille, mais avec les transports sorciers qui bien que niveau sécurité semblaient laisser à désirer, elle irait vraiment beaucoup plus vite ce qui lui permettrait inévitablement de voir sa famille aussi souvent qu’elle le voudrait. Finalement, ce don avait changé sa vie mais l’avait également simplifiée, enfin par certains aspects. De toute façon, contrairement à beaucoup de nés-moldus qui songeaient à reprendre leur ancienne vie, la poufsouffle savait qu’elle ne pourrait pas retourner à son ancien univers sans se rendre compte que quelque chose lui manquait. Ce don assez spécial faisait partie d’elle à présent et elle ne se voyait absolument pas le laisser de côté.

" Si tu veux après on pourra trouver un endroit pour aller manger, il devrait bien y avoir un choix intéressant dans ta liste pour qu'on s'y arrête! Puis je commence à avoir faim aussi. "

La jeune fille se contenta de sourire en hochant la tête avant de plonger la main dans son sac à bandoulière multicolore. Au bout de quelques secondes de recherche infructueuse elle en ressorti un petit carnet contentant ses listes d’un air victorieux. Pour le moment, elles n’avaient pas encore quitté l’aéroport, mais ça ne saurait tardé et lorsqu’elles auraient réellement rejoint le monde extérieur ces petites listes seraient tout à fait utiles, elle en était plus que convaincue.

" Ah... oui, une cabine téléphonique... Oui... bien sûr... enfin, ça fait tout de même longtemps, très longtemps, que je n'ai pas eu l'occasion d'en utiliser une... je ne sais pas beaucoup si ça... nous aidera. "

Astride fit mine de lever les yeux au ciel, signifiant par là qu’elle était atterrée de voir à quel point sa meilleure amie pouvait être manchote. Bien entendu, son sourire prouvait qu’il n’en était rien. Elle aussi avait eu beaucoup de mal à s’adapter aux coutumes sorcières, il était tout à fait normal que l’inverse soit vrai, c’était même assez rassurant à bien y réfléchir. Au moins, la poufsouffle n’avait pas l’impression de passer pour la dernière des imbéciles et c’était un point qu’elle jugeait extrêmement positif. Et puis de toute façon, avec les capacités intellectuelles que possédait son amie, il y avait fort à parier que ses lacunes seraient comblées en un rien de temps, il n’y avait donc pas lieu de s’inquiéter. En temps normal, la jeune fille aurait paniqué en moins de deux secondes allant de la petite peur pas si gênante que ça à une énorme crise de paranoïa qui lui demanderait d’imaginer en un rien de temps un plan de sauvetage express en cas de danger. Mais les bonnes résolutions qu’elle avait prises pour les vacances l’empêchaient d’agir de la sorte. Il n’y avait rien de dangereux dans l’immédiat. Certes, elles étaient perdues, mais Astride aurait été capable de se perdre rien qu’en sortant les poubelles, ça ne voulait pas dire pour autant qu’elles ne retrouveraient jamais leur chemin. De toute façon, avant qu’elles se perdent réellement, il fallait déjà qu’elles arrivent à trouver le courage de sortir de l’aéroport, ce qui n’était pas vraiment gagné. Pour le moment, elles pouvaient toujours décréter que ce voyage n’était pas à leur portée qu’elles manquaient sacrément de maturité et qu’elles seraient bien mieux tranquillement chez papa et maman. Seulement, pour la poufsouffle, il était hors de question de renoncer alors qu’elle touchait l’un de ses plus grands rêves du bout du doigt. Dans le cas de la serdaigle, le choix était sans doute identique bien que les raisons différent sensiblement. Compte tenu de l’affection qu’elle portait aux avions, il serait vraisemblable qu’elle préfère aller se perdre au fin fond de Brooklyn plutôt que d’avoir à affronter ses peurs une nouvelle fois dans un laps de temps aussi court. Bref, quoi qu’il arrive, elles restaient, il fallait simplement réussir à trouver où elles allaient bien pouvoir se rendre ensuite.

« Bon, je vois, en gros t’y connais rien. T’inquiètes, je te ferais un cours accéléré comme ça on aura pas de problème et tu déchireras tout à tes ASPICs si tu tombes sur le sujet. C’est pas bien compliqué tu sais, franchement le truc de hiboux c’est antique à côté. D’ailleurs, si tu te mets au téléphone, on pourra se parler en direct pendant le reste des vacances, les appels Londres/Grèce ne doivent pas être si chers que ça… »

La poufsouffle parlait toujours autant, mais c’était dans le simple but de se montrer aussi rassurante que possible et surtout pleine d’entrain. De l’enthousiasme, elle en avait à revendre et ne voulait surtout pas le garder pour elle. De toute façon, ce n’était pas ce problème de communication qui les arrêterait, quoi qu’il puisse se passer, elles feraient toujours tout ce qui était en leur pouvoir pour ne pas se perdre de vue et si jamais l’impensable arrivait quand même, elles avaient toutes les deux une copie de la réservation de l’hôtel qui leur permettrait de s’y retrouver en cas de besoin. La jeune fille n’avait donc aucune crainte à ce sujet. La conversation lui faisait facilement repenser à sa première tentative de communication à la manière des sorciers. Elle était à Poudlard à ce moment-là et venait de réaliser que son seul contact vers l’extérieur se ferait grâce à des hiboux. Elle avait déjà fait ne drôle de tête en s’en apercevant, mais n’osait imaginer celle que feraient ses géniteurs lorsqu’ils trouveraient le volatile, les attendant bien sagement sur le balcon. Seulement, avant cela, elle s’était heurté à un tout autre problème, le premier avait été de trouver sur quoi écrire la lettre. Est-ce que du papier normal ne risquait pas de se déchirer au contact de l’air ? Et s’il pleuvait ? C’était beaucoup de questions que la poufsouffle n’avait osé poser à personne de peur d’avoir l’air ridicule et puis de toute façon si on lui répondait que le papier n’était pas idéal, elle n’allait pas détacher une pierre de l’édifice pour la graver. Cette décision pris il avait fallu qu’elle trouve comment attraper un de ces hiboux, la tâche n’était pas si compliquée que ça, mais elle avait toujours eu peur des animaux de toutes tailles et ceux-ci en faisaient évidemment parti. Et bien sûr, comme si ce n’était pas suffisant, elle avait dû mettre dix bonnes minutes à trouver un moyen de fixer correctement sa lettre à une des pattes du hibou, craignant tout de même qu’elle tombe pendant le trajet. La réponse de ses parents peu de temps après lui avait prouvé le contraire, mais la jeune fille ne pouvait empêcher ses craintes de ressurgir à chaque fois qu’elle désirait envoyer un courrier qu’elle jugeait important. Il n’y avait vraiment rien de mieux que le téléphone pour pouvoir discuter, mais les sorciers ne semblaient malheureusement pas l’avoir encore compris.

" Newark Liberty International, à Manhattan... c'est ce qu'ils m'ont dit. Je ne sais pas trop à quoi ça correspond, mais tu as raison. On devrait emprunter un taxi... mais dans ce cas je te suis, je ne suis pas très douée pour ça... "

Astride ouvrit des yeux ronds comme des soucoupes. Où était situé Manhattan par rapport à Times Square elle n’en avait absolument aucune idée ? Cette absence totale de réponse la confortait dans l’idée qu’elle aurait dû réviser sa géographie avant de venir, mais les informations qu’elle ingurgitait dans ce domaine ne faisaient généralement pas long feu dans sa tête, elle n’avait donc pas de véritables regrets à avoir à ce sujet. La jeune fille se contenta donc de rester plantée là, un peu perplexe, cherchant désespérément une solution miracle à leur problème. Elle n’en voyait pas franchement. Ne sachant pas vraiment où elle se trouvait, un trajet en bus semblait être compromis, elles risquaient fort de se retrouver encore plus loin de leur but que maintenant et il n’était pas forcément idéal de faire les quatre coins de la ville en portant leurs lourds bagages. Elles auraient certainement l’occasion de se perdre un peu plus tard, aujourd’hui n’était pas l’idée du siècle. Finalement, l’idée d’Hecate était sans doute la meilleure, elle y avait déjà songé avant, mais aurait aimé ne pas avoir à utiliser rapidement la solution de facilité, pourtant, il paraissait évident maintenant que le taxi serait ce qui les emmènerait le plus rapidement à bon port. Certes, elles devraient sans doute payer cher le voyage, mais ce n’était pas comme si elles avaient prévu de s’octroyer une petite visite guidée, avec un peu de chance, le trajet ne serait pas si long que ça. Astride devait bien reconnaitre qu’elle avait eu tort sur un point, faire confiance à sa meilleure amie pour ce qui était de l’orientation. Non pas qu’Hecate soit totalement manchote et incapable de se repérer où que ce soit, mais il paraissait évident qu’elle ne serait pas à l’aise avec les transports moldus et la jeune fille n’avait pas du tout songé à ça dans un premier temps. Le devoir de trouver une solution reposait donc sur ses petites épaules, et elle n’était pas sûre de trouver ça très agréable. Cependant, il était hors de question qu’elle se laisse déjà dépasser par les événements, elle parlait la langue du pays de toute façon et n’aurait probablement aucun mal à suivre les indications données par tel ou tel passant si elle en avait besoin, ou tout du moins, elle l’espérait.

« Super, je ne suis pas plus avancée que ça, mais ça n’a aucune importance, un chauffeur de taxi sera certainement plus apte que nous à comprendre où on se situe. Et puis même si on ne trouve pas tout de suite, comme tu l’as dit, on a plein de temps devant nous, on visitera un peu comme ça. »

La jeune fille attrapa sa valise d’une main et Hecate de l’autre, bénissant l’invention des petites roulettes. A côté d’un aéroport, elle ne devrait pas avoir trop de mal à trouver ce qu’elle cherchait, les taxis devaient être présents par dizaines. Elle n’eut d’ailleurs pas à parcourir beaucoup de mètres avant de tomber sur une rangée de taxis alignés correctement. De toute façon, le jaune poufsouffle était assez visible pour qu’elles n’aient pas pu passer à côté d’un taxi même s’il avait été le seul de son espèce. Astride laissa sa valise à sa meilleure et s’approcha d’un des chauffeurs tout en trifouillant dans son sac pour en sortir la réservation de l’hôtel, elle mit quelques secondes à lui exposer la situation et c’est la mine rayonnante qu’elle put revenir vers son amie. Elles allaient enfin s’éloigner de ce fichu aéroport et découvrir ce qu’était réellement New-York. Une poignée de minutes plus tard et une partie de Tetris leur permettant de caser leurs bagages dans le petit coffre de la voiture, elles étaient confortablement assises sur la banquette arrière à regarder le paysage qui défilait sous leurs yeux. Cette fois, c’était sûr, elles avaient réellement fait un grand pas vers l’inconnu.

" D'accord! Ça ne doit pas être trop compliqué de toute manière une fois qu'on a trouvé l'interstice. En attendant il faut mieux qu'on ne se perde pas de vue, ça sera plus simple. "

Astride ne put s’empêcher d’éclater de rire. Elle n’avait absolument pas envie de se moquer de sa meilleure amie ni de son ignorance en matière de culture moldue qui était tout de même loin d’égaler celle des pros sang-purs par exemple, mais il était tout de même assez drôle de la voir parler avec tant de sérieux de quelque chose qu’elle ne comprenait absolument pas. La poufsouffle en était légèrement étonnée, il lui avait toujours semblé qu’Hecate était une sang-mêlé et que par conséquent, elle devait en apprendre un peu sur les deux mondes, au quotidien. Visiblement, elle avait délaissé bien vite l’idée de vivre comme le faisaient les parents d’Astride et c’était bien dommage. Certes, il y avait de gros avantages à vivre comme un sorcier, mais il était tout de même intéressant de se pencher sur autre chose ne serait-ce que pour se tenir un peu au courant et apprendre de nouvelles choses. La poufsouffle rêvait de pouvoir utiliser la magie chez elle, mais pour le moment, il était absolument hors de question qu’elle montre quoi que ce soit à sa petite famille. Et même lorsqu’elle aurait ce droit justement, elle n’était absolument pas certaine de pouvoir faire une petite démonstration à ses parents et à ses frères et sœur. Après tout, l’usage de la magie n’était pas autorisé devant des moldus et bien que sa famille soit forcément au courant de son don très particulier, elle n’avait pas envie d’aller contre la loi. Il faudrait certainement qu’elle pose la question. Le professeur McGonagall serait très certainement ravi de pouvoir lui apporter quelques éclaircissements à ce sujet et pour cela, il faudrait qu’elle aille le voir dès la rentrée. En plus, en étant de début d’année, elle allait être majeur assez rapidement et pourrait donc passer son permis de transplanage et tout ce qui allait avec. Cependant, il était hors de question que son ignorance mette son casier judiciaire vierge en danger. Il y avait des erreurs à ne pas faire et être issue d’une famille de moldus ne pouvait pas tout excuser. Heureusement, Astride n’avait pas encore trop de craintes pour le moment, il lui restait tout de même plusieurs mois pour se renseigner et elle pensait gérer la situation assez bien en fin de compte.

" Mais c'est vraiment gigantesque! Regarde ces rues, on dirait que ça ne se finit jamais! Puis toutes les vitrines, et là ! C'est vraiment génial, j'adore, ces vacances vont vraiment être inoubliables. "

Hecate avait réellement l’air surexcité. En même temps, comment ne pas l’être ? Le paysage qui défilait sous les yeux de la poufsouffle n’avait rien de comparable à ce qu’elle avait vu jusque-là et l’émerveillement se lisait probablement dans ses yeux. Elle aurait aimé laisser le taxi poursuivre seul sa route pour s’arrêter devant l’un ou l’autre des bâtiments, commencer à prendre quelques photos et graver dans sa mémoire les moindre petits détails. Mais elles allaient vite, très vite, trop vite pour pouvoir regarder à droite et à gauche en même temps et de toute façon, la tête de sa meilleure amie étalée sur la vitre l’empêchait de tenter de voir des deux côtés en même temps. Leur chauffeur n’aurait de toute façon pas forcément apprécié de passer pour un simple bus touristique, il n’était pas payé pour faire des arrêts visites et séances photos bien que la jeune fille s’imagine fort bien avoir un taxi privé pour ce genre de choses. Sa mère lui avait déjà conseillée de faire le tour en bus en partant de la gare, il leur permettrait de tout voir d’un seul coup, mais le problème restait qu’elles ne pourraient pas faire d’arrêt lorsqu’elles le décideraient, elles seraient condamnées à faire le tour complet pour ensuite revenir sur leurs pas et récolter les informations qui leur manquaient sur tel ou tel bâtiment. Astride avait toujours été très à cheval sur le temps qu’elle prenait pour chaque visite et c’était sûrement pour cela que sa charmante petite famille ne voulait plus l’accompagner au musée lorsqu’elle le leur demandait. En même temps, se retrouver avec quelqu’un qui avançait à deux à l’heure dans n’importe quel musée, histoire d’engranger le maximum de connaissances possibles devait être absolument barbant. Mais la poufsouffle ne voyait pas où était le mal là-dedans, ce n’était pas comme si elle s’autorisait une visite tous les week-ends et n’avait le droit à aucune pendant l’année scolaire, il était donc normal qu’elle profite de chaque instant lorsqu’enfin elle se donnait cette peine. Malheureusement, ses frères et sœurs auraient certainement beaucoup plus apprécié de se retrouver dans un parc d’attraction quelconque. La jeune fille avait d’ailleurs appris à négocier ferme pour que ses vacances ne se passent pas parmi des manèges terrifiants qu’elle n’avait jamais eu envie de voir d’aussi près. Son vertige ne l’aidait pas à s’amuser, mais en général, elle parvenait tout de même à profiter de leurs journées si toutefois elle parvenait à trouver des sucreries à grignoter pour passer le temps pendant qu’elle attendait le reste de sa famille. Avec Hecate, elle était sûre et certaine de ne pas être confrontée à ce genre de problème, c’était déjà ça de gagné.

« On aura jamais le temps de tout voir. » Se plaignit-elle. « Il faudra que je fasse quelques retouches, ma liste doit être vraiment incomplète, je ne pensais pas que c’était si grand ! »

En même temps, comment aurait-elle pu l’imaginer ? La plus grande ville qu’elle ait vue était Londres, mais pas Londres en entier, elle était toujours restée dans les environs de la gare et n’avait donc aucune idée de sa taille en réalité. D’aussi loin que remontaient ses souvenirs, ses parents avaient toujours vécus dans la même maison à Newbury, la ville n’était pas immense, loin de là, ce qui n’empêchait pas Astride d’avoir peur de s’y perdre. Pendant l’année scolaire, elle ne côtoyait pas plus grand que Pré-au-lard et encore, côtoyer était un bien grand mot puisqu’elle restait la plupart du temps enfermée dans la bibliothèque, s’autorisant de rares sorties pour aller jusqu’à Honeydukes pour remplir ses réserves de bonbons. D’ailleurs, à la fin de l’année, elle s’était promis d’agir en adulte responsable, ce qu’elle allait bientôt devenir et donc de ne pas recommencer les mêmes bêtises que ces derniers mois. Pour cela, il lui fallait un bon programme, ne pas trainer entre de cours, ne pas discuter avec des élèves qu’elle ne connaissait pas et dont elle ne savait rien niveau réputation, ne pas tenter une expérience qu’elle regretterait ensuite pour le plaisir de voir de nouvelles choses. En bref, Astride allait très certainement passer son année entière enfermée dans la bibliothèque, histoire d’échapper à tout déboire potentiel. L’idée était assez enthousiasmante pour le moment, mais elle n’était pas sûre de réussir à la tenir sur le long terme. Certes, elle adorait être au milieu des étagères pleins de livre, travailler était presque un sixième sens chez elle, mais de là à quitter tout semblant de vie sociale et toute autre activité, elle n’était pas sûre qu’elle ait assez de volonté. Et encore, l’année dernière, la poufsouffle se permettait une sortie par week-end pour aller s’entrainer d’arrache-pied au quidditch, sauf qu’elle avait abandonné cette matière à présent. Elle se demandait si le professeur Bloodworth lui en voudrait. Après tout, il n’avait pas tant d’élèves que ça à son cours, mis à part les joueurs des équipes de quidditch de chaque maison et il allait perdre la seule recrue extérieure qu’il avait eu. En même temps, ce n’était pas comme si son niveau sensationnel l’émerveillait de jour en jour, bien au contraire, si sa présence allait être remarquée niveau effectifs, il y avait fort à parier que le niveau du cours ne pourrait qu’être meilleur après son départ. Il lui suffirait de demander quelques nouvelles à Hecate, elle en aurait très certainement.

" On devrait plus être loin de l'hôtel maintenant! Il s'agit juste de le trouver dans... tout ça. "

Astride tourna sur elle-même, plissant les yeux pour voir le haut des immeubles malgré la lumière aveuglante. S’il n’avait tenu qu’à elle, elle aurait probablement retenu le chauffeur pour qu’il leur serve de guide encore quelques instants, mais ce brave homme devait avoir du travail ailleurs et donc pas forcément l’intention d’amener deux demoiselles en détresse jusqu’à un hôtel. Seulement, bien qu’elles soient maintenant sûres d’être à peu près au bon endroit, ou en tout cas, elles s’étaient sensiblement rapproché de leur objectif en peu de temps, elles n’avaient tout de même pas encore trouvé leur véritable objectif qui pouvait être un peu partout. Pourquoi le taxi ne les avait-il pas déposées directement devant la porte de l’hôtel ? Astride supposait sans mal que la circulation dans Times Square y était pour quelque chose. Les taxis étaient nombreux par ici et la progression se faisait mètre par mètre. Il ne fallait pas être pressé d’arriver à bon port et il était évident que parcourir le reste du chemin à pied ne pouvait que les aider à aller plus rapidement. Sauf qu’il fallait encore qu’elle sache comment se rendre à l’hôtel, en partant à pied dans la mauvaise direction, elles n’arriveraient jamais au bon endroit, c’était une évidence. C’était l’avantage d’habiter dans une petite ville, même en se perdant, Astride en faisait vite le tour et arrivait assez rapidement à retrouver une rue, ou un quartier connu lui permettant de regagner la maison. Ici, elles pouvaient facilement partir pour une bonne heure de marche à travers New-York sans savoir où elles atterriraient au final. Mais bon, il ne fallait pas désespérer. Au pire, il leur restait leur bouche et les passants qui allaient et venaient devant elles n’auraient probablement aucun mal à leur répondre si elles leur fournissaient un nom de rue ou même le nom de l’hôtel. C’est donc avec assurance qu’elle s’avança vers une jeune femme qui tenait une poussette. Les parents étaient souvent bien plus patients et elle n’avait aucune envie de se faire rembarrer. Une fois de plus, elle laissa sa grosse valise à Hecate et écouta très attentivement les informations qu’on lui fournissait, ce n’était vraiment pas le moment d’en oublier la moitié, la serdaigle ne pouvait pas entendre d’où elle était, et si elles se trompaient de chemin, ce serait de sa faute avant toute chose, ou celle de la personne qui venait de lui donner les explications. Au bout de quelques instants à tenter de visualiser correctement le trajet à parcourir, Astride remercia son interlocutrice et fit demi-tour immédiatement pour rapporter à sa meilleure amie, l’essentiel de la conversation.

« Elle a dit qu’il fallait prendre la rue qui est là-bas. » Affirma-t-elle en tendant le bras dans la direction indiquée. « Il faut qu’on continue tout droit et ça sera la deuxième ou la troisième à gauche, elle savait plus, de toute façon, il suffit de regarder les noms de rues ça ne devrait pas être sorcier. On y va ? »

Sans attendre de réelle réponse de la part de sa meilleure amie, la poufsouffle attrapa sa valise qui pesait de plus en plus lourd avec le temps. Ses mains étaient rouges à force de tenir la poignée qui frottait contre ses paumes. Aucune importance, elles étaient bientôt arrivées, c’était le principal.

" On devrait essayer la deuxième pour commencer, on verra ensuite... il ne devrait pas être bien loin. J'espère pas en tout cas... "

La poufsouffle acquiesça avec un grand sourire. De toute façon, mis à part chercher en tâtonnant, elles ne pouvaient pas faire grand-chose. Leur avion avait atterri depuis un moment maintenant et les deux jeunes filles n’étaient pas plus avancées quant à leur position dans cette grande ville. Mais quoi de plus normal ? Bien sûr qu’elles étaient perdues, tout leur paraissait tellement immense, elles étaient dans un lieu étranger, où elles ne connaissaient personne. Elles devaient se débrouiller seules comme des grandes si elles voulaient réussir à s’en sortir. Les heures d’avions ne les aidaient pas non plus, le trajet avait été long et tout ce temps passé dans les transports commençait à devenir pesant et fatiguant. Astride sentait ses jambes devenir de plus en plus lourdes au fur et à mesure qu’elles déambulaient dans les rues de New-York et elle ne manquait pas une si belle occasion de se féliciter d’avoir enfilé des chaussures plates. De toute façon, elle faisait toujours très attention à la façon dont elle s’habillait avant un voyage. Tout était tellement imprévisible. Elle ne savait pas combien de temps elle devrait marcher ou rester debout ce qui excluait forcément les talons de dix centimètres, qu’elle ne portait déjà pas en temps normal. Mais il y avait aussi tout un tas d’autres problèmes, la climatisation dans l’avion par exemple. Certes, elles pouvaient très bien se rendre dans un pays chaud, mais ce n’était pas pour autant qu’il fallait qu’elles s’y rendent en jupe débardeur, c’était le meilleur moyen de tomber malade dès le début du voyage. Cette fois-ci, mis à part le mal des transports d’Hecate tout s’était parfaitement bien déroulé, mais il aurait été encore mieux qu’elles parviennent à trouver rapidement leur hôtel avant de devoir s’assoir sur leurs valises dans un coin pour pleurer sur leur sort. Mais pour le moment, Astride ne désespérait pas, d’accord, leur sens de l’orientation était très moyen, plutôt proche du zéro absolu, mais ce n’était pas parce qu’elles mettaient un peu plus de temps à s’en tirer qu’elles étaient coincées dehors avec leurs valises jusqu’à la fin du voyage. Il fallait juste espérer qu’il leur resterait un peu de temps et de courage pour ressortir faire un tour une fois qu’elles auraient déposé leurs valises.

« De toute façon, on a une chance sur deux. » Déclara joyeusement la poufsouffle. « La prochaine fois, je viens à poil et sans bagages, ma valise est beaucoup trop lourde. »

Astride éprouvait le besoin irrépressible de détendre un peu l’atmosphère. Si Hecate semblait toujours aussi heureuse d’être ici, se perdre ne devait pas lui arriver aussi souvent qu’à elle et ne pas retrouver son chemin commençait vraisemblablement à la rendre un peu nerveuse. Pourtant, il n’y avait vraiment pas de quoi et la poufsouffle espérait fortement que son air détendu et sa bonne humeur apparente suffirait à la convaincre de ne pas se faire du souci. Elle s’engagea dans la rue avec un grand sourire, parcourant des yeux tous les hôtels devant lesquels elle passait. Il n’y avait aucune doute à avoir là-dessus, elles étaient vraiment dans un quartier touristique, mais le seul problème c’est que leur hôtel ne semblait pas figurer dans la liste de ceux qu’elles avaient déjà croisé. Au bout de quelques instants de marche, les deux amies furent donc contraintes de faire demi-tour. Astride grimaçait légèrement en marchant, elle avait beau plaisanter, sa valise était quand même beaucoup trop lourde et elle n’osait même pas imaginer à quel point il devait être compliqué pour Hecate de se trimballer avec la sienne. Il devait y avoir pas loin d’une dizaine de bouquins là-dedans, et il fallait fortement espérer que l’hôtel leur offrirait un ascenseur puisque son bagage n’était pas loin d’être complétement insoulevable. Quoi qu’il en soit, la situation restait plus comique qu’autre chose. Deux adolescentes et leurs lourdes valises complétement perdues au milieu de New-York, ça serait probablement un très bon début pour le journal de bord de la jeune fille. Astride avait eu l’idée d’en rédiger un dès que le concept du voyage avait été évoqué. Elle avait mis un temps fou à le préparer, décorant son cahier avec application. Elle avait passé une partie de leur voyage aérien à relater le déroulement du concours, chose qu’elle n’avait absolument pas eu le temps de faire lorsqu’elle était en pleine préparation pour ses examens. Maintenant, elle avait plus que hâte de rédiger son premier vrai article et ne manquerait pas de le faire avant d’attaquer la journée suivante. Le meilleur moyen de conserver des souvenirs de leur expédition était de tout retranscrire dans les moindres détails. La passion d’Astride pour la lecture, l’écriture et tout ce qui allait avec allait se révéler bien utile dans cette entreprise et peut-être qu’avec un peu de chance, sa meilleure amie l’aiderait à compléter son œuvre.

" Je ne m'y retrouve pas du tout... Ça devrait pourtant être dans les environs, non ? "

Devoir faire demi-tour semblait avoir encore plus angoissé sa meilleure amie. Pourtant, elles avaient encore une rue entière à parcourir, elles avaient simplement joué de malchance, ça ne voulait pas dire du tout qu’elles étaient coincées pour toujours dans le quartier. Au pire, elles pourraient toujours téléphoner à l’organisateur du concours qui avait affirmé être à leur disposition pour toute question supplémentaire. Le pauvre, Astride ne comptait plus le nombre d’appels qu’elle lui avait passé, allant jusqu’à lui demander si elle aurait des draps sur le lit ou s’il fallait qu’elle en amène. Il ne s’était probablement pas attendu à être aussi sollicité par deux adolescentes qui ne pensaient normalement qu’à s’amuser. Sauf que pour pouvoir prendre du bon temps et laisser derrière elle toute préoccupation, la poufsouffle devait avant tout se rassurer, chose qui ne serait possible que si elle parvenait à faire complétement le vide dans sa tête et à se dire qu’elle avait tout bien préparé sans oublier quoi que ce soit. En définitive, elle avait réussi à retrouver toute sa sérénité, sa maman l’y avait beaucoup aidé en essayant du mieux qu’elle pouvait de lui donner un coup de main pour tous ces préparatifs et en essayant de lui décrire son propre voyage là-bas qu’elle avait considéré comme quelque chose de formidable. Finalement, l’excitation l’avait très largement emporté sur l’appréhension et heureusement. Il en fallait bien une des deux pour réussir à garder son calme et à positiver en toutes circonstances. Hecate avait beau être plus âgée d’un an, ce n’était pour une fois pas au tout d’Astride de se reposer sur quelqu’un, mais plutôt l’inverse. Cette situation convenait fort bien à la poufsouffle qui avait déjà la nette impression de se reposer beaucoup trop souvent sur sa meilleure amie. La pauvre s’en prenait toujours plein la tête dès que l’humeur de la presque sixième année changeait et ce n’était pas très juste. D’autant plus qu’elle ne lui avait jamais fait de réflexion à ce sujet, se contentant visiblement d’être soulagée à chaque fois que les choses rentraient dans l’ordre. Heureusement, les disputes étaient on ne pouvait plus rares entre elles et il n’y avait aucune raison pour que ça change. Pour une fois, Astride avait l’impression d’être un pilier et non pas un poids pour Hecate, c’était une constatation plutôt agréable, il fallait au moins qu’elle se montre digne de son rôle.

« Oui, oui, ça voulait juste dire que c’était la troisième, on va essayer, si on trouve vraiment pas, je redemanderais à quelqu’un. Cesse de t’inquiéter un peu, tu as un stress communicatif. »

Sur ces bonnes paroles, la poufsouffle s’engagea dans la rue suivante, guettant le bon hôtel qui n’allait certainement pas tarder à se dresser devant elles. De toute façon, c’était soit ça, soit il n’existait pas et ce concours n’avait été qu’une vaste supercherie. C’était tout à fait impossible puisque leurs billets d’avions n’avaient pas été des faux et que les parents d’Astride avaient bien sûr vérifié toutes les informations avant d’envoyer leur bébé vers l’inconnu. Elles approchaient du but, c’était certain.

" Je... d'accord, je vais essayer. D'ailleurs tu as raison, c'est même plutôt drôle, je ne vois même pas pourquoi je me ronge les sangs, on y sera très certainement au bout de quelques minutes. J'ai même hâte de voir comment sera notre chambre. "

Astride l’encouragea d’un léger sourire. Elle savait fort bien qu’entre les paroles et les actes, il y avait un monde, mais il était déjà bien qu’elle tente de remédier à ce problème. Astride n’avait jamais rien eu contre le caractère de sa meilleure amie. Elle la savait très angoissée, parfois simplement pour une bête feuille de papier un peu froissée au fond de son sac. La poufsouffle ne comprenait que trop bien ce genre de réaction puisqu’elle avait tendance à réagir exactement de la même façon. Mais il était vrai qu’Hecate avait un sérieux don dans le domaine et qu’elle était nettement plus rongée par l’anxiété que pouvait l’être la presque sixième année. Seulement, si elle s’accommodait très bien de ce genre de défaut en temps normal, elle s’était promis de repartir sur de nouvelles bases aujourd’hui et ce n’était pas en se laissant poursuivre par l’un de ses vieux démons qu’elle parviendrait à s’en débarrasser. Les vacances seraient tout de même nettement plus profitables aux deux jeunes filles si elles parvenaient à s’entendre correctement tout le long du séjour et surtout à rester le plus zen possible ce qui ne serait pas forcément évident les connaissant. Jusqu’ici, la poufsouffle était plutôt fière d’elle et de ce qu’elles avaient réussi à faire en si peu de temps. D’accord, elles n’avaient toujours pas trouvé l’hôtel et oui, Hecate commençait légèrement à paniquer, mais elles n’étaient pas encore complétement perdues, elles avaient toujours le même objectif et s’en rapprochait dangereusement. La preuve, elles venaient de s’engager dans la rue qui devait certainement être la bonne. Astride se mit à scruter avec attention les immeubles de chaque côté de la rue, histoire d’être sûre de ne rien louper. En même temps, passer à côté de leur hôtel lui paraissait totalement impossible, déjà parce qu’Hecate la précédait et semblait aussi concentrée qu’elle mais aussi et surtout parce qu’elles avaient contemplé la brochure un nombre incalculable de fois, il était donc évident que le bâtiment qui apparaitrait sous leurs yeux aurait un air familier bien qu’un peu étrange en grandeur nature. Malgré l’attention dont faisait preuve la poufsouffle, c’est sa meilleure amie qui repéra en premier le fameux bâtiment qui allait les abriter pendant un long mois.

" Je crois qu'on y arrive... Je pense que c'est là. Enfin, je n'en suis pas certaine, mais on devrait y être."

Comment ça elle n’était pas certaine ? Astride le voyait aussi bien qu’elle et était totalement persuadée d’être au bon endroit. Enfin, elles allaient pouvoir déposer leurs bagages beaucoup trop lourds et repartir à l’assaut de l’immense ville. En réalité, la poufsouffle était claquée et si elle n’avait pas été aussi curieuse de savoir dans quoi elle s’était embarquée, elle aurait simplement attendu de trouver un lit, un fauteuil ou n’importe quoi pour pouvoir poser ses fesses et fermer les yeux. Le marchand de sable était passé avant l’heure et la fatigue du voyage commençait sérieusement à se faire ressentir. Evidemment, ce n’était pas ce qui allait arrêter la jeune fille, elle avait pris le contrôle des opérations depuis le début et bien qu’elle soit un peu impressionnée à l’idée de pénétrer dans l’hôtel sans avoir un adulte à ses côtés, il était bien sûr hors de question qu’elle se dégonfle maintenant. Astride prit donc une grande inspiration avant de s’avancer vers la grande porte vitrée qui les séparait du hall de l’hôtel. Elle ne prit pas la peine de se retourner pour voir si Hecate la suivait, persuadée qu’elle ne devait pas être très loin derrière elle. Cette histoire de téléphone avait dû chambouler complétement son équilibre interne et elle était probablement trop effrayée à l’idée de se retrouver seule pour la laisser faire un pas de plus qu’elle vers l’avant. Une fois à l’intérieur, la poufsouffle ne s’attarda pas réellement sur la décoration, préférant de très loin chercher la réception, son sens de l’orientation ne lui permettant pas de la repérer d’un simple coup d’œil. Elle finit tout de même par y parvenir et laissa comme précédemment sa valise à Hecate alors qu’elle s’avançait vers une jeune femme blonde à l’air peu engagent. Enfin, l’air était probablement dans sa tête, mais la poufsouffle avait légèrement tendance à voir le mal partout surtout chez les personnes qu’elle était obligée d’aborder bien malgré elle. Enfin, elle réussit tout de même à balbutier quelques mots, expliquant tant bien que mal sa réservation. Devant le regard interloqué de la réceptionniste, elle finit par lui donner tout simplement le bout de papier qu’elle avait à la main, chose qu’elle aurait dû faire dès le début. Après plusieurs minutes de discussion, la jeune fille put enfin récupérer les clés de la chambre et retourner auprès de sa meilleure amie, un air triomphant étalé sur le visage.

« Troisième étage, chambre 355, il faut prendre l’ascenseur au fond, je suppose que tu ne tiens pas à monter ton énorme valise par les escaliers. On a des heures fixes d’entrées et de sorties puisque je suis mineur et sous la responsabilité des organisateurs et blablabla… Ça ne nous empêchera certainement pas de nous amuser ! »

C’était malheureusement le deal. Ses parents ne l’auraient jamais laissé partir, si elle n’avait pas été correctement encadrée par des adultes responsables. Ils savaient que leur petite fille ne faisait jamais rien de mal, ou en tout cas, ils la pensaient assez grande pour veiller sur elle-même, mais pendant un mois à autant de kilomètres d’eux, ils préféraient savoir qu’elle pourrait être remise d’aplomb si jamais elle venait à dérailler légèrement. Toutefois, la pauvre Hecate n’avait rien demandé à personne et il semblait normal que devoir respecter certains horaires ne devait pas lui faire spécialement plaisir. Elles ne pourraient pas tout le temps agir comme bon leur semblerait, ce qui paraissait normal pour un concours organisé pour de simples mineurs. Seulement, Astride était tout de même ravie de voir que ces contraintes n’étaient pas trop handicapantes. Elles pourraient quoi qu’il arrive respecter leur planning de visites et vivre leur petite vie. Au départ, la poufsouffle avait imaginé avoir un « surveillant » qui la collerait toute la journée et la ramènerait à l’hôtel à la fin de chacune d’entre elles. Palpitant. Sauf qu’il n’en était rien apparemment, et la jeune fille aurait pu faire une danse de la joie en plein milieu du hall. Au lieu de ça, elle préféra appuyer sur l’un de boutons appelant un ascenseur qui ne tarda pas à leur ouvrir ses portes. Elles n’avaient jamais été aussi près du but. Astride avait l’étrange impression d’être arrivée au bout de quelque chose d’insurmontable et en éprouvait un étrange sentiment de fierté. Premier voyage, premier objectif, première réussite et elle n’avait même pas suivi sa meilleure amie à la trace sans rien faire pour l’aider. Le pied ! La jeune fille traversa le couloir du troisième étage avec un grand sourire aux lèvres, relevant la tête vers le haut des portes pour en inspecter les numéros. Elle s’arrêta avec satisfaction devant la 355 et galéra avec la clé pendant quelques secondes avant de parvenir à ouvrir la porte. Un Alohomora aurait sans doute été beaucoup plus rapide mais pas franchement autorisé non plus, il valait mieux se servir des bonnes vieilles méthodes : la persévérance et la volonté. Pour une fois, les efforts de la poufsouffle payèrent et Astride pénétra dans une chambre plutôt simple mais jolie et assez spacieuse. Elle n’avait jamais cherché à imaginer là où elle dormirait, tant la perspective de découvrir la ville était enthousiasmante et n’était donc pas du tout déçu de ce qu’elle découvrait. Elle ne mit d’ailleurs pas longtemps à se laisser tomber sur le lit, se forçant tout de même à ne pas fermer les yeux. La journée n’était pas encore terminée.

« Je suis épuisée ! Ce voyage était vraiment trop long. » Soupira-t-elle en scrutant le plafond à la recherche d’une tache inexistante. « Bon, on fait quoi maintenant ? »

Astride se força à se redresser légèrement pour ne pas sombrer dans un profond sommeil. La journée était peut-être un peu trop longue, mais elle avait tout de même hâte de repartir à l’assaut des rues New-Yorkaises, son état de fatigue ne l’empêcherait en rien de profiter de ses premiers instants à travers la ville.

" T'as bien parlé d'aller manger, tout à l'heure, non? Mon estomac approuve ton idée, on pourra en profiter pour explorer les alentours en même temps. Je suis sûre qu'on devrait arriver à trouver un endroit sympa ! "

Le ventre de la jeune fille gargouilla à cette évocation. Leur recherche compliquée de l’hôtel avait permis à Astride d’oublier un instant qu’elle n’avait rien avalé de vraiment comestible depuis qu’elle avait quitté Londres. La nourriture de l’avion était toujours aussi infecte que dans ses souvenirs, et même sa gourmandise habituelle n’avait pas suffi à lui faire avaler en entier le plat proposé. Heureusement, elle avait pensé à tout en bourrant son sac à dos de sucreries en tout genre. Sauf que le dit sac n’avait jamais été extensible et qu’elle n’avait pas mis deux heures à le vider entièrement, regrettant assez rapidement par la suite de n’avoir pas été un peu plus raisonnable. L’idée de sa meilleure amie était donc fabuleuse. Commencer leur visite de la ville en cherchant un endroit où manger… Que rêver de mieux ? La poufsouffle n’était pas très difficile à contenter. Et puis, en cherchant un petit restaurant pas cher, elles tomberaient bien sur des choses intéressantes et pourraient commencer à faire des croix sur leur liste de choses à faire dans le mois. Parfait. Le seul problème était de réussir à faire tout ça sans se perdre, la jeune fille aurait bien aimé pouvoir jouer au petit Poucet et semer derrière elle de quoi retrouver son chemin un peu plus tard. Elle n’était pas idiote et savait pertinemment qu’en s’éloignant un peu trop de l’hôtel, elle oublierait totalement le chemin qu’elle venait d’emprunter et serait obligé de demander à bon nombre de passants comment faire la route en sens inverse. En même temps, elles n’étaient sur le territoire américain que depuis quelques heures, cette confusion pouvait donc aisément s’excuser. Il faudrait simplement qu’elles parviennent à reconnaitre un peu mieux les lieux dans moins d’une semaine et qu’elle reparte à la fin du mois en ayant l’impression d’avoir vécu à New-York toute leur vie. Pour le moment, ça semblait presque inimaginable. Astride n’avait jamais su se repérer dans sa propre ville, et elle ne voyait pas du tout pourquoi ça devrait changer maintenant. A la limite, elle pouvait tout aussi bien essayer d’apprendre à lire une carte, ça serait plus utile que d’essayer de graver des noms de rues et des embranchements compliqués dans sa mémoire. Enfin, pour le moment, la poufsouffle se donnait tout à fait le droit de se perdre, du moment qu’elle ne se retrouvait pas à errer comme une âme en peine sans savoir si oui ou non, elle était toujours dans la bonne ville.

« Oh oui ! Je pourrais avaler un éléphant. Je ne sais pas s’ils cuisinent de l’éléphant à New…. Mon Dieu ! J’ai oublié de regarder les spécialités ! Non, mais quelle idiote ! »

Et dire qu’il y a un instant encore, elle était prête à se lever, à marcher droit vers la porte de l’hôtel et à en sortir pour partir à l’assaut de tout ce qui pourrait être comestible à plusieurs kilomètres à la ronde. C’était certainement trop beau pour être vrai. Astride ne parvenait pas à croire qu’elle ait pu oublier quelque chose d’aussi élémentaire. Elle avait pourtant fait toutes les recherches possibles et imaginables. Elle avait ingurgité en un temps record toute l’histoire de la ville et du pays pour être bien certaines de ne pas passer à côté d’une information, elle s’était lancée dans l’architecture des bâtiments, qu’elle avait abandonné en constatant que les termes techniques n’étaient pas compréhensibles et la ralentissaient dans ses préparatifs et elle avait également étudié jusqu’à l’accent des New-Yorkais. Dans tout ça, elle avait trouvé des choses plus ou moins utiles et plus ou moins intéressantes, mais jamais elle ne s’était dit qu’il serait sympa de savoir quelle était la spécialité culinaire, ni même s’il y en avait une. Après tout, en lisant un peu, elle s’était tout de même rendue compte que les fast-foods avaient tout à fait leur place ici, ce qui montrait bien qu’ils étaient loin de la nourriture saine et équilibrée, mais après tout, il était fort possible que ce soit simplement un immense cliché et non pas le reflet de la réalité. A bien y réfléchir, elle s’était adressée à des personnes très minces, lorsqu’elles étaient encore perdues dans les rues, elle ne s’était pas retrouvée seule brindille dans une foule d’obèses, les bouquins devaient donc se tromper. Quoi ?! Mais non, elles ne pouvaient pas en plus de ça avoir ingurgité des informations erronées, c’était la fin des haricots. Comment distinguer le vrai du faux à présent ? La poufsouffle se voyait déjà reprendre toutes ses listes une par une et tenter de trouver tant bien que mal une bibliothèque pour passer les premiers jours à tout revoir en détail. Tant pis pour ses nuits, de toute façon, avec le décalage horaire, elle ne serait probablement pas très fatiguée, rien de tel qu’une bonne nuit de recherche pour se remettre les pendules à l’heure. Astride respira un grand coup, toutes ses pensées se bousculaient bien trop vite dans sa tête. Elle était ici pour passer des vacances, rien de plus, il était inutile de paniquer. Pas très convaincue, la jeune fille tâcha de ressasser ce message tandis qu’elle suivait sa meilleure amie vers l’extérieur de l’hôtel.

" Il vaudrait mieux qu'on aille pas trop loin, tout de même, autrement on va finir par demander notre chemin à toute la population new-yorkaise pour rentrer. On devrait bien trouver quelques rues intéressantes dans le coin sans pour autant se perdre... on pourra en profiter pour aller voir quelques trucs, il doit bien y avoir des choses à voir dans les environs. Puis on pourra réfléchir à comment organiser notre après-midi, et sinon on pourra toujours aller visiter ou se balader dans les avenues! Bref, on a la journée devant nous pour jouer les touristes. "

Hecate semblait avoir lu dans ses pensées. Seulement, il y avait un léger hic dans leur façon de procéder. D’accord, rester dans les environs était plutôt rassurant, elles avaient évidemment beaucoup moins de chance de se perdre et même si c’était le cas, elles pourraient probablement se retrouver assez rapidement. Mais ça avait aussi de nombreux inconvénients. Astride avait envie de tout voir, tout découvrir et non pas de se limiter à une simple partie de la ville sous-prétexte qu’elles pourraient ne pas retrouver leur chambre le soir venu. Dans ce cas, autant s’acheter une roulote, elles auraient plus de chances de voir tout ce qu’elles avaient envie. C’était le premier jour et il était inutile de chercher les ennuis en s’éloignant trop, mais dès le lendemain, la poufsouffle s’attendait à ce qu’elles commencent à regarder les horaires de bus et la direction qu’ils prenaient afin de pouvoir faire preuve d’un peu d’autonomie. Il était sans doute inutile de soumettre l’idée à Hecate pour le moment. La serdaigle semblait déjà avoir beaucoup de mal à ne pas paniquer, il ne fallait pas lui rajouter en plus d’autres obstacles qui risqueraient de la mettre au plus bas. Pour l’instant, Astride voulait surtout lui prouver qu’elles étaient tout à fait capables de se débrouiller et cette première journée devait être absolument parfaite. Pour le moment, leur sortie de l’aéroport s’était plutôt bien passée et la jeune fille considérait que c’était pour le moment un sans-faute. Finalement, ce n’était pas si difficile que ça. La jeune fille avait hâte d’annoncer à Bonnie qu’elle avait été capable de retrouver son chemin dans une ville totalement inconnue, il y avait fort à parier qu’elle serait impressionnée puisque rien que dans un simple lac, il leur avait été totalement impossible de réussir à se retrouver. Et puis, ça faisait longtemps qu’elle n’avait pas eu l’occasion de parler avec la vipère, le sujet n’était sans doute pas le plus important, mais c’était déjà mieux que rien. Elle voulait à tout prix renouer contact. En attendant, il fallait simplement qu’elle trouve où elles pourraient bien aller. Ce n’était pas en restant debout devant la porte de l’hôtel qu’elles arriveraient à manger quelque chose, il fallait prendre une décision et de préférence avant que la nuit tombe.

« De toute façon, j’ai mon guide ! Mais comme c’est le premier jour, on peut tout aussi bien faire au pif, pour changer. Ça sera probablement notre seule journée désorganisée autant en profiter ! » Plaisanta-t-elle tout en continuant à scruter les environs. « On a qu’à aller par là. »

Astride s’engouffra sans plus tarder dans la rue qu’elle venait d’indiquer. Etaient-elles déjà passées par ici en arrivant ? La poufsouffle n’en savait rien du tout et c’était bien le problème. Certes, elles avaient réussi à trouver leur chemin une première fois, mais il aurait été plus que judicieux d’essayer de s’en souvenir, chose que la jeune fille se sentait bien incapable de faire. Elle avait déjà fait au moins trois fois le tour du bocal.

" À défaut d'éléphant, on devrait bien pouvoir manger indien ou chinois, dans le pire des cas. Ou dénicher un fast-food si on en trouve un, ça ne devrait pas être bien compliqué, avec tous ces touristes dont nous faisons d'ailleurs partie dans les environs... "

Astride ne put qu’être ravie de voir que sa meilleure amie retrouvait un semblant d’enthousiasme. Elle l’avait vraisemblablement perdu en réalisant que trouver leur hôtel ne serait peut-être pas une vraie partie de plaisir et la poufsouffle s’était évertuée depuis à lui prouver que tout allait pour le mieux, qu’il était inutile de s’inquiéter et que quoi qu’il puisse se passer ensuite, elles finiraient bien par retomber sur leurs pattes. Elle s’en voulait toujours un peu de ne pas avoir pensé à ajouter une liste supplémentaire à celles qu’elle avait déjà pris la peine de faire, mais il n’y avait pas mort d’homme. Au pire, elle trouverait bien un moyen de rectifier le tir. La jeune fille avait eu peur qu’on leur offre un voyage d’une semaine à New-York au départ, et quand elle avait réalisé qu’au lieu de ça, elle pourrait y séjourner un long mois, elle s’était sentie rassuré. Elles n’auraient pas à se créer un emploi du temps qui leur laisserait à peine quelques heures de sommeil, elles pourraient découvrir à leur rythme ce que la ville avait à leur offrir sans avoir spécialement à se presser. Donc, si elles oubliaient quelque chose, il n’y avait rien de grave, elles avaient du temps beaucoup de temps même. Astride n’était jamais restée si longtemps en dehors de chez elle excepté pour aller à Poudlard. Sa famille allait-elle finir par lui manquer ? Pas plus que quand elle était à l’école, vraisemblablement, un peu moins même. Quand elle avait des examens à préparer, une tonne de devoirs et une quantité astronomique de problèmes son moral avait tendance à faire le yoyo et il lui arrivait dans des moments de doutes de regretter que sa famille ne se retrouver pas autour d’elle pour la soutenir. À New-York, il y avait fort à parier que ces moments en questions seraient totalement inexistant. Elle n’avait pas de cours à réviser, la préparation de la nouvelle année attendrait bien son retour en Angleterre et elle était partie avec la seule personne qui ne cherchait jamais à se disputer avec elle et inversement. Il n’y avait donc aucune raison pour qu’elle souhaite rentrer chez elle plus vite que prévu. Enfin, il fallait aussi qu’elles évitent de mourir de faim immédiatement histoire que leur voyage ne soit pas sensiblement raccourci.

« Oh ouais, c’est une super idée ! Par contre, pas de restaurant français, il parait qu’ils mangent des trucs trop bizarre là-bas, comme des grenouilles par exemple. Je crois que je vais devenir végétarienne. » Termina-t-elle avec un étonnant sérieux. « Toutes ces pauvres petites bêtes, c’est tragique ! »

Elle ne se basait que sur certains livres qu’elle avait pu lire sur le sujet et sur ce que lui avaient racontés ses parents. En réalité, elle n’en savait pas grand-chose. Astride n’avait pas eu la chance de se rendre en France. Elle n’avait pas beaucoup voyagé de toute façon et même si c’était un pays qui la tentait bien, elle ne l’avait pas fait passer en tête dans sa liste des priorités. Elle ne connaissait même pas encore toutes les régions d’Angleterre, elle était restée confinée chez elle, pouvait à la limite reconnaitre Londres quand elle y arrivait sans être pour autant capable de s’y repérer et avait une vague connaissance d’un ou deux villages puisque ses grands-parents y habitaient et qu’il fallait bien se résoudre à leur rendre visite de temps en temps. Ils n’arrêtaient pas de se plaindre qu’elle ne les voyait pas assez souvent, qu’elle les évitait, ce qui était totalement faux. Il y avait peut-être une légère part de vérité là-dedans, mais elle n’était pas due au peu d’envie qu’elle avait de les voir. Astride avait simplement du mal à gérer tout ce qu’elle avait à faire lorsqu’elle rentrait de Poudlard. Bien sûr, être à l’école lui plaisait beaucoup, mais elle aimait aussi pouvoir être dans la maison familiale. Sauf que ses parents y étaient toute l’année et aspiraient à autre chose lorsqu’ils avaient enfin la chance d’être en vacances. Elle devait donc batailler pour obtenir qu’ils restent chez eux au lieu d’aller vadrouiller à droite à gauche. Elle espérait d’ailleurs très fortement qu’ils aient profité du mois entier qu’elle leur laissait pour partir où ils voulaient aller et ne pas l’enquiquiner à son retour. À la limite, elle pourrait leur accorder un week-end chez ses grands-parents, mais elle voulait avoir le temps de retrouver sa chambre, ses affaires, son environnement, ses habitudes. Ce n’était pas chose facile, ils avaient pris l’habitude de l’exclure du train de vie familiale et y replonger l’obligeait à se frayer un chemin à l’intérieur de celui qui avait déjà été instauré. Ariane, en particulier, avait toujours eu un peu de mal à la calculer. La jeune fille ne pouvait pas franchement lui en vouloir mais avait toujours un pincement au cœur lorsqu’elle constatait que son rôle de grande sœur ne semblait pas évidemment aux yeux de sa frangine. Malgré tout, la bonne entente était toujours au rendez-vous ce qui était déjà un plus non négligeable.

" Une préférence ? Tant qu'on n'en sort pas obèses et qu'il n'y a pas que de la viande, je suis prête à te suivre n'importe où. Il va aussi falloir que j'étudie la question de la monnaie, j'ai un peu de mal avec les "dollars"... "

Les deux jeunes filles s’étaient engagées dans la rue choisie au pif par Astride qui n’avait pas du tout pensé jusqu’ici à regarder où elle allait. Il aurait sûrement été très utile qu’elle relève un peu la tête, arrête de trop réfléchir et se mette à regarder autour d’elle en quête du restaurant idéal. Hecate n’avait manifestement pas prévu de faire un choix à sa place, tout comme le début du voyage d’ailleurs. De quoi avait-elle peur ? Que ça ne lui plaise pas ? Elles avaient sensiblement les mêmes gouts pour tout un tas de chose et la poufsouffle n’aurait pas hésité une seule seconde à la laisser l’emmener où elle voulait en fermant les yeux. La seule chose qui lui aurait posé problème était probablement le côté vestimentaire. Non pas que son amie ne savait pas s’habiller, bien au contraire, elle la trouvait toujours plutôt jolie. Elle avait surtout peur qu’elle la transforme en une petite poupée en essayant sur elle ce qu’elle n’osait pas porter en temps normal. Or, Astride aimait beaucoup ses pulls trop larges et ses pantalons amples qui pouvaient aisément laisser penser qu’elle avait des tonneaux à la place des jambes. Elle n’avait pas l’air fine lorsqu’elle se regardait dans la glace et bien que tout le monde ne cesse de lui répéter que ses vêtements la grossissaient plus qu’autre chose, elle n’en démordait pas. Contrairement à toutes les autres filles du château, elle aurait plus eu tendance à chercher des moyens de rallonger sa jupe d’uniforme plutôt qu’à la raccourcir. Elle n’aimait pas n’avoir qu’un simple petit collant sur ses jambes et encore moins que des regards s’attardent dessus de temps à autres. Bien sûr, ces coups d’œil n’existaient probablement que dans son imagination, mais elle avait une fâcheuse tendance à croire que tout le monde se moquait d’elle dans les couloirs pour peu qu’elle croise des élèves en train de rire. Elle avait d’ailleurs déjà pensé à écrire une pétition pour pouvoir mettre autre chose que cette jupe affreuse, mais après l’échec cuisant de sa première tentative, visant à l’autoriser à suivre plus de matières que les autres élèves, elle s’était résignée à rester habillée comme les autres. Peut-être pourrait-elle profiter de ce voyage pour soumettre son idée à Hecate ? Mais pour qu’elle puisse correctement lui exposer son projet, il faudrait qu’elle ait le ventre plein. Le voyage lui avait creusé un énorme trou dans l’estomac et elle était sûre et certaine de mourir de faim dans les prochaines minutes si elles ne trouvaient pas enfin un endroit où manger.

« Oui ! T’as proposé chinois tout à l’heure, j’ai toujours voulu apprendre à me servir des baguettes, mais mes parents m’obligent à prendre une fourchette pour pas que je mette trop de temps à manger. Mais bon, si dans la lettre que je leur envoie, j’avoue que la première chose que j’ai fait en arrivant c’est manger chinois, ça va pas trop le faire. Ou alors, je leur dis rien, ou on va jusqu’à Chinatown mais ça me parait un peu loin quand même et… Oh… C’en est pas un, là ? »

La jeune fille venait de repérer une enseigne lumineuse au loin, donc les sigles noirs paraissaient être une langue étrangère. À cette distance, elle pouvait totalement se tromper, aussi préférait-elle que sa meilleure amie lui donne raison avant d’aller voir de plus près. La poisse légendaire de le poufsouffle pouvait également la faire tomber sur une secte bouddhiste étrange, dont elle ne ressortirait pas vivante. D’accord, elle s’était promis de ne pas paniquer pour un rien, mais on ne se refaisait pas…

" On peut toujours essayer, ça pourrait être amusant! Tant que la nourriture qu'on y rencontre n'est pas trop étrange et que c'est comestible, ça me convient. Ils... ne cuisinent pas de grenouilles au moins, eux? Comment est-ce qu'on peut en manger, de toute manière? Devenir végétarienne n'a rien d'une mauvaise idée, maintenant que tu en parles. On ne doit pas perdre beaucoup en renonçant à la viande... "

Astride éclata de rire devant l'air dégoutté de son amie. Elle ne pensait pas réussir à la convaincre si facilement que la gastronomie française ne lui conviendrait pas, mais visiblement, elle n'avait pas eu beaucoup de mal à le faire. Pourtant, la poufsouffle n'avait pas souvent eu l'occasion de voyager. Ses parents n'avaient pourtant pas de gros problèmes d'argents, mais il y avait tout de même un gouffre entre pouvoir faire vivre correctement une famille ou prétendre pouvoir payer de longs voyages très chers à quatre enfants. La plupart du temps lorsqu'ils partaient, c'était tout simplement pour aller chez leurs grands-parents pour une petite visite. A choisir, Astride préférait encore rester chez elle mais personne ne lui demandait son avis. C'était quand même agaçant d'avoir seulement seize ans ! D'un côté, on lui demandait d'être une grande fille de faire ses propres choix et de pouvoir dire dès maintenant de quoi serait fait son avenir, et de l'autre elle était obligée d'être confrontée à tout un tas d'adultes qui passaient leur temps à lui poser des limites comme si elle en avait absolument besoin pour devenir quelqu'un de bien. Qu'on chercher à la remettre en permanence dans le droit chemin lorsqu'elle était seulement une enfant ne lui posait pas franchement de problèmes, mais avoir l'impression d'être un peu enfermée dans une cage alors qu'elle était presque adulte lui posait quelques soucis. La poufsouffle savait très bien qu'elle avait tort de se plaindre, ses parents n'avaient jamais eu de réelle autorité sur elle et n'avaient jamais cherché à en avoir. Si elle avait des barrières c'était simplement parce qu'elle se les était mises toute seule et ne parvenait pas franchement à les retirer à présent voire même à les repousser de quelques mètres. Il était plutôt facile d'accuser ses parents alors qu'ils n'étaient pas du tout responsable au final, ce n'était pas très juste. En plus, elle était tout de même seule à New-York alors qu'elle n'était même pas majeur. C'était bien une façon de lui prouver que ses géniteurs lui faisaient entièrement confiance et la croyaient largement assez mature pour qu'elle parvienne à se gérer toute seule.

« Non, pas de grenouille, je t’assure, ou en tout cas je n’en ai jamais vu. Les français sont des gens trop bizarres de toute façon. » Conclut-elle avec une moue dégoutée. « Détrompe-toi, la viande est excellente pour la santé, les végétariens arrivent à s’en passer parce qu’ils mangent quand même des produits qui viennent des animaux, mais beaucoup de végétaliens ont des carences… Bref, on s’en fiche, j’ai toujours l’impression d’être à l’école, je m’afflige moi-même. À la rentrée, on aura qu’à se programmer une petite semaine où on mangera comme des végétariens, on verra bien ce que ça donne. Mais je suis sûre que j’aurais du mal à la longue. »

Une période sans manger de viande ? Elle n'était pas sûre que ça soit l'idée du siècle sachant qu'elle n'était pas capable de se contrôler lorsqu'elle voyait une sucrerie en face d'elle. Bon, après, ça ne devrait pas lui poser autant de problème de se priver de viande que de se priver de sucre, mais même ! C'était presque aussi dur que d'être obligée de jeûner pendant toute une journée. Astride n'était pas capable d'arrêter de manger même si elle essayait de perdre quelques kilos. Elle avait toujours besoin de se goinfrer de toute ce qu'elle pouvait trouver dans ses affaires. Ses rares visites à Pré-au-Lard avaient pour seul but de refaire le plein de bonbons en espérant qu'elle puisse tenir jusqu'à se prochaine sortie. La bibliothécaire voyait malheureusement d'un très mauvais œil qu'elle prenne avec elle de quoi se nourrir lorsqu'elle venait, soit à peu près tous les jours. Elle avait trouvé différents stratagèmes pour contourner le problème, dissimulant ses bonbons dans sa trousse ou dans les petites poches sur le côté de son sac, elle se contentait d'attendre que la bibliothécaire tourne le dos pour attraper discrètement l'un de ses bonbons qu'elle se hâtait de mettre dans sa bouche en mâchant doucement pour ne pas se faire lamentablement griller. Parfois, il lui arrivait de se réveiller en plein milieu de la nuit avec l'impression d'avoir sauté un repas si bien qu'elle ne pouvait pas se rendormir avant d'avoir mangé quelque chose. Ni l'inquiétude de ses parents, ni les remarques de ses proches n'avaient réussi à y changer quelque chose. Astride s'était toujours un peu fichue de faire une taille mannequin, elle veillait à ne pas trop grossir, mais elle n'avait aucun problème à avoir quelques kilos en trop, bien au contraire. Comme disaient ses grands-parents, elle avait l'air en bonne santé, et non pas d'une brindille qui allait se briser à la moindre pichenette. Le jour où elle subirait un trop grand nombre de critères, peut-être se déciderait-elle à changer, mais ce jour n'était pas encore arrivé. En plus, se priver de manger alors qu'elle avait faim risquait de la mettre de mauvaise humeur et d'altérer ses capacités de concentration. Ses parents ne voulaient pas qu'elle rate sa vie et ce n'était pas non plus dans ses projets, il était donc totalement hors de question qu'elle se prive. Tant pis s'ils considéraient que ses arguments étaient un peu trop bancals.

" Je n'ai jamais goûté de rouleau de printemps, je crois que je vais en prendre pour essayer, avec de la sauce au soja. Oh... je n'arrive pas à croire qu'il y ait autant de plats à base de seiche. Il y a quelque chose en particulier qui t'intéresse? Il faut aussi qu'on fasse attention à ne pas forcer sur le budget, on a encore un mois à tenir et au moins une cinquantaine d'autres repas, sans compter nos achats et le reste... heureusement qu'on n'a pas à payer les visites. On devrait peut-être prendre note de nos dépenses à chaque fois, histoire de pouvoir s'y retrouver? "

Astride se plongea à son tour dans le menu, cherchant à savoir ce qu'elle pouvait bien avoir envie de manger. Sauf qu'il y avait un problème, chaque nouvelle page la faisait changer d'avis. Elle aurait aimé goûter un peu de tout sans pour autant payer plus. Il fallait faire attention au budget et la jeune fille ne voulait pas que tout son argent de poche passe dans la nourriture. Si jamais elle revenait sans avoir gardé le moindre centime pour elle, ses parents ne perdraient pas une seule minute pour lui faire des reproches. Elle ne rêvait pas que ses retrouvailles avec sa famille se déroulent avec une dispute en premier lieu, ce n'était pas franchement l'idéal. Et puis, qu'allait penser Hecate d'un tel comportement ? D'accord, elle savait qu'elle était gourmande mais à quel point ? La serdaigle n'aurait plus la même vision des choses que sa meilleure amie, c'était une évidence. Enfin, la poufsouffle se faisait sans doute du soucis pour rien, le voyage avait été long, elles n'avaient pas eu l'occasion de manger quelque chose et il était donc normal qu'elles aient un peu faim. La nourriture de l'avion était vraiment exécrable de toute façon, et même si l'estomac d'Astride n'avait eu aucun problème à tout ingurgiter, il n'avait pas du tout était rempli grâce à ça, loin de là. En définitive, elle pouvait tout se permettre tant que ça restait dans les prix qu'elle avait pris soin de calculer bien avant son départ. Pour un voyage bien organisé, il était vital que tout ceci soit préparé largement avant de partir. Heureusement qu'elle était partie avec Hecate et pas avec quelqu'un d'autre qui aurait pu la prendre pour une vraie folle. Au moins, son amie ne la jugerait pas, elle n'ouvrirait pas des yeux ronds à chaque fois qu'elle ressortirait l'un de ses petits carnets visant à améliorer toute leur belle organisation. Il étai même possible que le serdaigle finisse par prendre le pli et qu'elle apporterait sa contribution pour compléter toutes les petites notes qu'elle avait pu prendre en lisant des bouquins ou en faisant tout simplement fonctionner sa tête. Mais malheureusement ce n'était pas ses précieux carnets qui lui donneraient une solution toute faite pour qu'elle parvienne à choisir dans le menu ce qu'elle aurait aimé manger. Mais il fallait qu'elle fasse un choix avant que le serveur ne devienne tout rouge et que la fumée lui sorte par les oreilles. Pour l'instant,il ne semblait pas s'intéresser de trop près à elle, il fallait simplement que ça dure.

« Je sais pas, j’hésite. J’ai toujours aimé les nems, mais ils en proposent tellement que c’est difficile de faire un choix… Ou alors une soupe, au moins je pourrais avoir une cuillère. Ohlala, c’est compliqué de choisir. » Mais son regard parcourant le menu ne suffisait pas à faire oublier à la poufsouffle son sens de l’organisation. « Ne t’inquiète pas pour le budget, j’ai un carnet pour faire les comptes. J’y ai déjà inscrit l’argent total qu’on avait au départ, j’ai calculé ce qu’on pouvait dépenser en moyenne par jour et par personne en faisant en sorte de garder de quoi faire de petits extras. Je voulais avoir ton avis, mais je pensais que ça pouvait attendre demain. On avait dit qu’on faisait désorganisé aujourd’hui. »

Cette conclusion n’empêcha pas la jeune fille de mettre la tête dans son immense sac pour tenter d’y découvrir le carnet et qu’elle voulait à tout prix retrouver pour l’occasion. Parmi tous ceux qu’elle projetait de garder toujours sur elle, celui des comptes y figurait en bonne place et elle ne mit pas longtemps à trouver la main dessus. Elle fit passer le carnet au-dessus de son menu pour le tendre à sa meilleure amie. Astride était plutôt fière d’avoir réussi à penser un tout, évitant ainsi un tas de problèmes qu’elles auraient inévitablement fini par rencontrer.

" Probablement... enfin on ne perdra rien à essayer, ça pourrait être drôle. Il y aura simplement fort à parier qu'au bout de trois jours passés à recentrer notre régime sur les fruits et les légumes lors des banquets dans la grande salle, on sera toutes les deux en train de s'approvisionner chez Honeydukes pour parer à nos "carences" entre chaque repas. "

Elle avait vraiment de la chance d'avoir une meilleure amie telle qu'Hecate. Beaucoup de ses amis d'école auraient soupirés en entendant son monologue barbant avant de bailler et de changer de sujet comme si elle avait raconté quelque chose d'inutile et que ça ne valait pas la peine qu'on s'y intéresse. Alors que ce n'était pas le cas du tout de la jeune fille, elle n'avait pas l'air de se forcer pour avoir quelque chose à dire sur le sujet, c'était plutôt gentil de sa part. Elle semblait même presque être enthousiaste, ce qui était plutôt bon signe. Astride ne se souvenait pas avoir ne serait-ce qu'une seule fois agacé sa meilleure amie parce qu'elle parlait un peu trop. Pourtant, elle savait qu'elle était bavarde et qu'elle parlait assez souvent pour ne rien dire, mais c'était comme si sa langue avait décidé de bouger sans qu'elle puisse s'en empêcher, elle n'avait pas forcément envie de raconter sa vie en long en large et en travers, mais elle le faisait quand même et s'empressait de le regretter très rapidement après. La poufsouffle détestait les longs silences gênés pendant lesquels elle devait regarder son interlocuteur sans rien dire, comme si les sujets de conversations étaient subitement devenus inexistants entre eux. Dans ces moments-là, elle préférait presque se mettre à parler du premier nuage qui passait dans le ciel, du dernier cours d'Histoire de la magie qu'elle avait suivie, aussi barbant soit-il ou de ce qu'elle avait mangé à midi. C'était inintéressant au possible, mais au moins, elle combattait le silence et gagnait presque à tous les coups. Et puis, si son comportement n'énervait pas Hecate alors que la jeune fille passait un temps fou avec elle, ça ne devrait pas pas gêner quelqu'un d'autre. Ou alors, sa meilleure amie faisait preuve d'une grande hypocrisie mais ça ne ressemblait tellement pas à la serdaigle, qu'Astride ne pouvait absolument pas envisager cette hypothèse sans avoir envie d'exploser de rire. Son amie aurait eu certainement beaucoup de mal à comprendre, pourquoi elle plaisantait d'un seul coup, alors qu'elle n'avait rien dit de si drôle que ça. Il faudrait ensuite lui expliquer qu'elle venait de penser à quelque chose de drôle et que c'était simplement sa tête qui n'allait pas bien. Hecate la prendrait pour une vraie folle et elle l'emmènerait très certainement directement à Sainte-Mangouste, mettant fin à un voyage qu'elles venaient à peine de commencer. Elle avait encore toute une liste de choses à faire écrites sur ses nombreux carnets, et elle n'avait pas du tout l'intention de partir avant d'avoir pu écrire des petites croix au bic noir devant chacune des phrases qu'elle avait soigneusement rédigées.

« Oh oui ! A Honeydukes ! » s'enthousiasma Astride en battant des mains comme une enfant. « On y est pas beaucoup allé en plus cette année, il va falloir se rattraper, j'ai presque l'impression d'avoir été mise au régime de force. »

Enfin, leur dernière sortie à Honeydukes c'était tellement mal déroulée qu'elle avait fait en sortes de ne pas s'y rendre avant la fin de l'année. Elle avait économisé ses sucreries restantes pour pouvoir tenir le coup jusqu'à la fin de l'année. Elle avait aussi dans l'idée de pouvoir profiter du bal de fin d'année pour se goinfrer un peu. La nourriture y était en général excellente et elle attendait avec impatience les soirées de l'école, rien que pour ça. Mais cette année, elle avait eu un petit contretemps, au moins, Enzo pouvait se vanter d'avoir contribué à son régime d'été. La courte, très courte aventure qu'elle avait eu avec lui, avait servi aisément de coupe-faim et elle n'avait pas peur de ne pas pouvoir enfiler son bikini si elle allait à la piscine avec sa famille au mois d’août. Sa mère lui avait même fait remarquer qu'elle était bien trop mince lorsqu'elle était rentrée chez elle, chose qui ne se produisait absolument jamais en temps normal. Ses parents s'inquiétaient toujours pour les risques de diabète qu'elle pouvait encourir en mangeant si mal et semblaient la scanner du regard pour savoir si oui ou non elle avait mangé beaucoup de bonbons pendant son année scolaire. Au moins, cette fois-ci ils avaient dû être un peu rassurés. Quoi que... Comme elle s'y attendait, ses parents avaient reçus des lettres de l'école, les informant de ses récentes âneries. Au départ, ils n'y avaient pas fait allusion, la laissant se convaincre que tout était derrière elle, mais finalement, ils avaient décidé d'avoir une discussion avec leur fille, ils lui avaient reparlé de son passage dans la tuyauterie de l'école avec deux garçons et de sa balade dans le lac au début de l'année. Ils avaient conclu leur petit speech par une question très peu pertinente, à savoir : prenait-elle des stupéfiants ? Astride les avait regardé l'un après l'autre en s'attendant à ce qu'ils finissent par se mettre à rire, mais non... Elle avait donc à son tour parlé de son année, leur racontant que toutes ces choses s'étaient déroulées sur de stupides malentendus et ils avaient semblé convaincu. La jeune fille avait quand même de la chance dans son malheur. Ses parents n'avaient pas entendu parler de l'attaque aux Trois-Balais, de ce qu'il s'était passé avec Enzo ou de plein d'autres petites choses. S'ils venaient à l'apprendre, ils l'interneraient certainement et elle préférait éviter que ça se produise. Elle avait donc bien fait de garder le silence et ne regrettait absolument pas son choix. Le poufsouffle pouvait aller au diable, elle était bien mieux sans lui. Tant qu'un mauvais choix de sujet de conversation ne venait pas gâcher leur diner, tout se passerait parfaitement bien.

" Je ne t'ai jamais dit que t'étais géniale? Bon, et bien on n'aura pas besoin de trop surveiller nos dépenses aujourd'hui, en ce qui concerne les repas tout du moins, on calculera à un autre moment. J'en prendrais deux comme ça, s'il vous plait. Au fait, qu'est-ce que tu comptes faire pendant le mois qui restera quand on sera rentrées? "

Le compliment fit rougir la poufsouffle de plaisir. Elle qui n'avait pas été totalement convaincue d'avoir organisé le voyage du mieux qu'elle pouvait, commençait à être légèrement rassurée sur ce point. Sa meilleure amie semblait aux anges, et encore mieux, elle approuvait ses idées ! Avoir l'approbation d'Hecate valait toutes les bonnes notes du monde pour la future sixième année, aussi se sentit-elle d'un seul coup débordante d'enthousiasme. Ce voyage allait être plus que formidable en fin de compte, il ne pouvait en être autrement. Avant de partir, elle s'était demandée si faire toutes ces listes avait vraiment été une bonne idée. Elle avait tendance à être un peu trop organisée et elle ne laissait absolument aucune place à l'imprévu. Hecate ne risquait pas de trouver barbant d'avoir toutes ses journées réglées comme du papier à musique ? Certaine et elle allait lui dire dans quelques minutes. Astride ne s'était pas attendue à être félicitée pour sa maniaquerie, c'était bien la première fois que ça plaisait à quelqu'un. Quoi que, Bonnie aussi aurait probablement apprécié une telle organisation. Tout comme elle, la vipère détestait sortir des sentiers battus et c'était un des nombreux points communs que les deux jeune filles avaient vite repéré dans leurs personnalités. C'était certainement ce qui les avait rapprochés au début, entre autres choses. Astride aurait beaucoup aimé savoir ce qui les avait éloignées au fil du temps. Peut-être n'avaient-elles tout simplement pas réellement digéré cette stupide dispute à la bibliothèque, ce qui lui paraissait quand même peu probable. Après tout, tout cela était loin derrière elles mais les deux amies ne s'étaient jamais expliquées à ce sujet et il était possible que le malaise persiste entre elles si elles ne faisaient pas en sorte de recoller les morceaux. La poufsouffle regrettait amèrement de ne pas avoir réussie à régler les choses avant de quitter le château. Elle aurait aimé savoir que son amie en était toujours une pour elle, sauf qu'elle n'avait absolument aucune certitude à ce sujet. A la rentrée, il y avait fort à parier que ce serait une des premières choses qu'elle ferait, elle trouverait Bonnie et aurait enfin une réelle conversation avec elle, c'était indispensable. Cette tension n'était peut-être que dans sa tête, mais elle la perturbait beaucoup trop pour qu'elle ne tente pas de faire quelque chose à ce sujet.

« Je prendrais des Nems s'il vous plait. » demanda-t-elle au serveur en souriant de toutes ses dents avant de se concentrer sur la question posée par sa meilleure amie. « Je pense que je vais travailler un peu, histoire d'avoir les bases pour attaquer correctement ma sixième année. J'aimerais bien passer devant Bonnie pour une fois. Non pas que ce soit une compétition, mais ça serait sympa, juste une toute petite fois. Sinon, je vais rester avec ma famille, mes frères n'ont pas eu beaucoup le temps de me voir cette année et Ariane se souvient à peine de mon existence. Et toi ? Qu'est-ce que tu as prévu ? Tu retournes en Grèce j'imagine ? »

La distance qui séparait les deux jeunes filles pendant la quasi totalité de leurs vacances n'avait jamais dérangé Astride. Elle n'avait presque pas l'impression que sa meilleure amie soit aussi loin, elle parvenait à communiquer avec Hecate aussi souvent qu'elle en avait envie et c'était tout ce qui comptait. Et pour une fois, elles allaient passer une bonne partie de ces fameuses vacances ensemble, c'était encore mieux.

" On se rattrapera dans ce cas, avec tout le travail que je vais avoir cette année, Pré-au-Lard risque de se révéler incontournable pour les fins de semaine. Enfin, tant qu'on ne se retrouve pas dans ces rues, là... Enfin bref, j'espère que les cours de cette année confondront sixième et septième année. "

La jeune fille fronça les sourcils, un peu contrarié que le sujet des cours à venir arrive si tôt dans leur conversation. Non pas qu'elle en voulait à Hecate, ce n'était absolument pas le cas, avant qu'elle arrive à lui en vouloir vraiment pour quelque chose, il faudrait probablement que la jeune fille soit à l'origine d'un tremblement de terre ou ait tenté de commettre un meurtre, ce qui n'était pas sur le point d'arriver, mais elle aurait aimé passer leurs vacances loin de tout sans que l'ombre de Poudlard ne vienne planer au dessus d'elles. Mais bon, on ne se refaisait pas, les cours avaient toujours été leur sujet de conversation favori, c'était d'ailleurs leur assiduité et leur amour inconditionnel pour les livres qui avait réussi à les rapprocher. Personne ne pouvait dire qu'elles n'étaient pas faites pour être amies, leur lien était d'une telle évidence ! Enfin, pour Astride, ça coulait de source, elle ne se voyait absolument pas avec une autre meilleure amie que la serdaigle. Hecate parvenait toujours à la comprendre, elle était douée pour ça. Elle était une excellente élève, avait presque les mêmes qualités et les mêmes défauts que la poufsouffle ce qui les aidaient à être sur la même longueur d'onde. La serdaigle ne rechignait jamais à l'accompagner à Honeydukes lorsque son addiction au sucre refaisait surface et ne se moquait presque jamais de sa maladresse même si la jeune fille lui en donnait tout à fait le droit. Après tout, si elle ne laissait pas sa meilleure amie la taquiner un peu, qui aurait le droit de le faire ? Personne probablement, et encore moins sa famille dont elle avait tout de même plus de mal à supporter les critiques. Ses parents étaient toujours un peu trop doués pour lui faire des reproches, ça en devenait presque lassant à la longue, à croire qu'ils voyaient toujours le côté négatif des choses. D'un autre côté, ils étaient toujours là pour lui remettre les pendules à l'heure quand elle n'était pas dans le droit chemin mais ils la soutenaient aussi du mieux qu'elle pouvait, elle n'avait donc pas franchement le droit de leur en vouloir. Malgré sa volonté de s'éloigner un peu de l'ambiance des cours, elle ne mit pas dix secondes à rompre sa promesse intérieur. Elle était déjà affreusement bavarde en temps normal, mais ça serait probablement une catastrophe si Hecate la lançait sur le sujet de l'année à venir. Elle avait beaucoup trop de choses à dire et de question à poser, leur repas risquait d'être fortement rallongé.

« Je vais essayer de travailler beaucoup aussi, si on pouvait bosser ensemble ça serait génial ! Mais bon, avec les cours particuliers que me donne le professeur Londubat, j'ai l'impression ne de plus avoir beaucoup de temps pour moi. » Déclara la jeune fille en riant. « De quelles rues tu parles ? »

Hecate avait totalement raison, se retrouver dans la même classe que sa meilleure amie ne pouvait que l'aider à se montrer encore plus attentive et assidue en cours. Certes, la serdaigle n'était pas sa mère et elle n'avait aucune compte à lui rendre, mais elle aimait beaucoup se dire qu'elle était fière d'elle parce qu'elle faisait les choses correctement. Cette année, elle lui avait malheureusement donné beaucoup trop de raisons de penser qu'elle n'était pas digne de son amitié, et encore elle ne savait pas tout. L'idée qu'Hecate puisse un jour découvrir sa plus récente bêtise la rendait malade. Jusqu'ici, tout ce qu'elle avait fait avait été réparable d'une façon ou d'une autre, alors que là, c'était un petit plus délicat. Elle ne pouvait pas effacer ce qu'il s'était passé avec Enzo et c'était bien dommage. Si elle s'était écoutée, elle aurait probablement demandé au jeune homme de supprimer cette partie de sa mémoire pour qu'elle puisse continuer à vivre sa vie le plus normalement du monde. Sauf qu'elle détestait penser qu'il serait le seul à avoir toutes les cartes en main, lui se souviendrait de plein de choses sur elle, il pourrait tout faire rejaillir à la surface, elle n'aurait jamais pu le prévoir et n'aurait aucun moyen de se défendre, sa mémoire lui faisant cruellement défaut. C'était donc une très mauvaise idée qu'il ne valait mieux pas mettre en application. Le mieux qu'elle pouvait faire restait de tenter d'écarter ce sombre événement de ses pensées pour se concentrer sur l'avenir. Jusqu'ici, elle avait plutôt bien réussi. Évidemment, mentir à sa meilleure amie n'était pas chose facile d'autant plus qu'Hecate aurait certainement de bons conseils à lui donner. Cependant, elle était convaincue que c'était la meilleure solution. Si jamais elle l'apprenait, la serdaigle risquait de ne pas comprendre que tout ceci avait été indépendant de sa volonté, elle se contenterait de la regarder bizarrement en prolongeant un silence qui en dirait long sur sa façon de penser. Non, Astride ne pouvait pas réellement tenter de provoquer une chose pareille, elle avait bien trop peur de devoir en affronter les conséquences. La poufsouffle trouvait qu'elle avait déjà été bien assez punie à son goût, il était tout à fait inutile d'en rajouter une nouvelle couche. Et puis, il y avait des conversations bien plus intéressantes à avoir alors qu'elles se trouvaient à New-York pour entamer leur premier mois de vacances. La future sixième année tenait avant toute chose à rester enjouée et positive, et quelque chose lui disait qu'elle n'aurait aucun mal à y parvenir.

" Je trouve ça intéressant de se fixer un objectif, ça aide à s'améliorer. Enfin, je dis ça, et après toutes ces années je ne suis toujours pas parvenue à avoir ma revanche sur Honeycutt... et c'est vrai que Bonnie travaille beaucoup, quand je la vois à la bibliothèque. Enfin tu dois compter parmi les meilleures élèves de cinquième année, tu devrais t'en sortir. Comment vont tes parents au fait ? Ca m'a un peu étonné qu'ils nous laissent partir si facilement toutes seules, les tiens comme les miens, d'ailleurs. Enfin j'imagine qu'ils sont bien trop occupés à se disputer au sujet de l'autre abruti, chez moi... Mais je serais bien en Grèce, j'ai un programme de révisions en béton qui m'attend, les nouveaux manuels à acheter et comme Alex est au camping j'imagine que je vivrais en recluse dans ma chambre à ingurgiter les dates de guerres de géants. "

Honeycutt ? Comme Logan Honeycutt ? Le poufsouffle ? Astride n'avait jamais entendu parler de lui comme un élève brillant, mais pourquoi pas. Finalement, elle n'avait jamais été proche de lui, il avait un an de plus qu'elle et elle ne discutait pas très souvent avec le jeune homme. Enfin, il était tout de même dans la même maison qu'elle et la jeune fille n'avait vraiment rien contre lui, peut-être était-il un garçon gentil et brillant. Finalement, les élèves doués étaient assez nombreux à Poudlard, elle qui avait l'habitude de se retrouver à la bibliothèque de sa ville, entourée par deux ou trois personnes seulement pendant les heures creuses avait presque l'impression que celle du château était surpeuplé. Mais ce n'était pas plus mal, elle aimait voir les pages se tourner et les élèves se lever pour arpenter les rayons à la recherche d'un autre ouvrage. Certes, ce n'était pas forcément idéal pour la concentration, mais Astride avait bien souvent besoin de faire des petites pauses pendant ses journées de travail. L'espace de cinq minutes, elle aimait pouvoir relever la tête et observer les mouvements des élèves qui étaient venus passer la journée à la bibliothèque tout comme elle. Il était de rassurant de voir qu'elle n'était pas un monstre, beaucoup de gens comme elle aimaient particulièrement la lecture. Bonnie en était d'ailleurs un très bon exemple puisqu'elle passait les trois quarts de son temps derrière les bouquins. C'était sans doute pour ça que la jeune fille la dépassait aussi souvent, la poufsouffle avait tendance à se laisser un peu distraire ce qui ne l'avantageait pas. Cependant, l'objectif qu'elle s'était fixée pour la nouvelle année était plus une façon de se motiver qu'autre chose. Elle ne voulait pas se lancer dans une compétition acharnée avec une fille qu'elle avait toujours considéré comme son amie, ce n'était absolument pas logique. La poufsouffle peinait à croire qu'elles se soient aussi peu adressé la parole l'année passée. Elles avaient toujours été plus ou moins proches, espaçant les moments qu'elles passaient ensembles en fonction de leur quantité de travail, mais ce n'était pas parce qu'elles avaient passé leurs BUSEs qu'elles s'étaient éloignées aussi soudainement. De toute façon, ce mystère restait à élucider comme celui de la compétition existant entre Logan et sa meilleure amie. Après tout, même en imaginant qu'il puisse être quelqu'un de brillant, elle ne se souvenait pas avoir vu Hecate en sa compagnie ne serait-ce qu'une seule fois et elle se serait probablement souvenue de l'évocation de son prénom dans une conversation. Ou alors, sa mémoire commençait à lui jouer des tours, c'était aussi tout à fait possible.

« Je suis sûre que ton frère n'est pas aussi horrible que ça. Vous êtes simplement très différents voilà tout. Je comprends que ça doit être dur de ne pas se sentir proche d'un des membres de sa famille, je n'aimerais pas ça non plus. » Affirma-t-elle avec sérieux. « Logan ? Le poufsouffle ? Une vengeance sur quoi ? Je ne savais pas qu'il était un très bon élève, comme quoi on en apprend tous les jours. De toute façon, c'est peut-être mieux qu'Alex ne soit pas dans tes pattes si tu tentes de travailler, l'année des ASPICs est importante, il ne vaut mieux pas la négliger. »

En même temps, il était facile pour Astride, d'affirmer que l'ancien serdaigle serait un frein à la réussite de sa meilleure amie. Et dire qu'elle avait pu imaginer l'espace d'une seconde qu'elle pourrait avoir le béguin pour le jeune homme. C'était une idée bien stupide, il était arrogant, trop sûr de lui, il avait une nette tendance à avoir raison sur tout.. Bref, il était totalement odieux et la poufsouffle ne comprenait pas ce qu'elle pouvait bien à faire avec lui. L'arrivée du serveur qui transportait leurs deux assiettes l'empêcha de continuer la liste des défauts d'Alexander. Elle attaqua son contenu comme si elle n'avait pas mangé depuis trois jours, prenant à peine le temps de respirer entre deux bouchées.

" Des rues dans Pré-au-Lard... on s'y est perdus un soir, et honnêtement même si ça semble un peu stupide j'ai bien cru que j'allais y passer, j'y ai eu la peur de ma vie. Avec un garçon qui s'appelle Gabriel. Il a vraiment l'air de s'intéresser de très près à ton avenir, c'est une bonne chose au moins. Et puis c'est de la botanique, pour toi et pour la voie que tu veux emprunter c'est idéal. Tu as l'impression de mieux avancer, avec lui ? "

Gabriel avait l'air de s'intéresser à son avenir ? La jeune fille se sentit flattée l'espace d'une seconde avant de réaliser qu'Hecate voulait plutôt parler du professeur Londubat, ça paraissait tout de même plus logique. Un peu déçue, elle ne se départit cependant pas de son sourire. Elle n'avait pas réellement repensé à sa conversation avec le gryffondor, ou en tout cas pas depuis qu'elle avait retrouvé Hecate à l'aéroport. Cependant, maintenant qu'elle y réfléchissait bien, ils avaient mentionné le prénom de sa meilleure amie lors de la conversation. Elle n'avait pas du tout cherché à approfondir, ne pensant ni à lui demander comment ils s'étaient rencontrés, ni s'ils s'étaient bien entendus tous les deux. Sur le coup, elle avait trouvé génial qu'il connaisse une fille aussi merveilleuse qu'Hecate et elle avait fait son éloge pendant une bonne partie de la conversation avant de rebondir sur autre chose. Elle était d'ailleurs désolée que leur discussion ait tourné court tout simplement à cause du vent et elle aurait beaucoup aimé avoir l'occasion de reparler au jeune garçon si mystérieux et discret la plupart du temps. Et dire qu'il avait le même âge qu'elle et suivait très certainement une bonne partie de ses cours, Astride ne se souvenait pas l'avoir remarqué rien qu'une fois, signe qu'il était bien la personne la plus discrète qu'elle ait jamais rencontré. Dès qu'elle l'avait entendu ouvrir la bouche, la poufsouffle s'était rendue compte qu'il n'était pas du genre bavard et expansif, il n'arrêtait pas de bégayer et peinait à enchainer quelques mots. Toutefois, elle avait trouvé ça plutôt touchant et loin d'en être agacée, elle avait bien profité de ce moment. La jaune et noir espérait revoir Gabriel très prochainement et ne voyait pas pourquoi elle n'en aurait pas l'occasion. Après tout, le jeune homme allait être dans sa classe pour peur qu'il suivre les mêmes cours qu'elle. Il n'y avait aucune raison pour que ce ne soit pas le cas sachant qu'elle allait certainement tenter de caser le plus de matières possibles dans son emploi du temps. Mis à part le quidditch qu'elle était sûre et certaine de vouloir abandonner, faute d'avoir les capacités physiques nécessaires pour être douée dans cette discipline, elle aurait aimé pouvoir suivre tous les autres cours. Seulement, elle savait fort bien que ce n'était pas possible. Elle ne pouvait pas se dédoubler et parfois, deux cours différents avaient lieu à la même heure. Pourtant, si elle en avait eu l'autorisation, la poufsouffle aurait quand même suivi ces deux cours quitte à rattraper celui qu'elle n'avait pas eu le temps suivre en récupérant les cours un peu plus tard. En quoi ça pouvait bien être gênant ? Ça ne dérangerait personne du moment qu'elle continuait à avoir de bons résultats et à rendre ses devoirs en temps et en heure. Peut-être devrait-elle demander à la directrice à la rentrée, au moins elle ne pourrait pas dire qu'elle n'avait pas essayé.

« Entendre que tu t'es perdue ne m'étonne même plus. » Plaisanta-t-elle, ravie de pouvoir taquiner un peu la serdaigle. « En plus, si tu étais avec Gabriel, ça va, je crois que c'est vraiment un très gentil garçon, du peu que j'en ai vu. Pour ce qui est de Londubat, je ne sais pas vraiment, j'ai un peu peur qu'il me laisse tomber en fait tout se passe si bien, j'ai pas l'habitude, je suis douée pour tout foirer. »

Tout se passait très bien, vraiment très bien et Astride trouvait ça presque un peu louche. Elle était trop heureuse pour que ça puisse durer. Après tout, cette année avait été riche en émotions et pas forcément en bonnes émotions, elle avait presque l'impression de mettre toujours les pieds dans le plat en permanence et comme elle n'avait rien fait pour arranger ça, elle ne voyait pas pourquoi ça devrait changer. La jeune fille était pourtant convaincue qu'elle devait faire quelque chose pour que tout revienne dans l'ordre, il n'y avait aucune raison pour qu'elle ne retrouve pas la petite fille qu'elle avait été il y a encore un an. La première année à Poudlard avait été de loin la plus angoissante pour elle, la poufsouffle s'était retrouvée dans un univers totalement inconnu et elle avait eu un peu de mal à trouver sa place parmi les autres élèves. Déjà qu'elle n'avait pas eu franchement l'habitude de l'école, la poufsouffle avait dû à la fois tenter de s'adapter à un pensionnat, aux horaires fixes de cours, à la présence des professeurs, mais encore pire, à un tout nouveau monde avec de toutes nouvelles règles auxquelles elles ne connaissaient rien, absolument rien. La magie était pourtant quelque chose de formidable et elle avait hâte de pouvoir l'utiliser en dehors de l'école. Cette lettre avait changé toute sa vie et ça avait été quelque chose de très positif, la jeune fille en était plus que convaincue. Qu'aurait-elle fait sans sa lettre ? Elle aurait probablement continué à vivre le plus normalement du monde, restant scolarisée à domicile alors que ses frères et sœurs partiraient tous les matins pour rejoindre leurs écoles respectives et tous les amis qu'ils avaient rencontrés là-bas. Seulement, elle n'aurait pas eu l'impression que Poudlard lui manquait puisqu'elle ne connaîtrait même pas son existence. Tout cela lui aurait paru parfaitement normal, même si elle aurait toujours eu l'impression de vivre un peu en dehors la société puisqu'elle n'aurait aucun contact avec le monde extérieur en dehors de sa propre famille. Se réintégrer à l'âge adulte aurait certainement été affreusement compliqué alors que maintenant, son futur lui paraissait extrêmement simple. Elle sortirait se Poudlard en même temps que tous ses petits camarades, ils continueraient tous ou presque leurs études à l'université ce qui lui permettrait de connaître encore pendant longtemps les mêmes amis et de ne plus jamais se retrouver toute seule. Dans l'idéal, Hecate et elle resteraient amies jusqu'à ce qu'elles deviennent vieilles et leurs enfants aussi seraient de bons amis, mais ça, elle ne pouvait que l'imaginer, bien loin de savoir ce que l'avenir pouvait bien leur réserver à toutes les deux. Pour l'instant, Astride voulait juste profiter de ses vacances et de ce que cette immense ville avait à leur offrir. Elles replongeraient bien assez tôt dans le monde réel.

" Tu parles, c'est vraiment un bon à rien. Si tu ne voies pas assez souvent ta petite soeur, personnellement je me passerais volontiers de la présence de cet incapable à longueur de journée. Oui, le Poufsouffle, mais il n'est pas question de cours, plutôt du Quidditch, je n'aime pas rester sur un échec. Tu le connais ? Enfin, je ne comptais pas négliger mon année ! Mais comme il est sur le point de partir... il doit bien y avoir des septièmes années que tu ne veux pas voir s'en aller. "

Astride haussa les épaules, peu convaincu par la dispute opposant Hecate et Victor. D'un côté, elle ne connaissait pas vraiment le jeune homme et ne pouvait donc pas dire s'il était quelqu'un de véritablement imbuvable ou pas du tout, mais la poufsouffle partait du principe qu'il fallait aimer ses frères et sœurs quels que soient les différents qu'ils pouvaient rencontrer. Bien sûr, ils avaient le droit d'être différents, elle-même ressemblait beaucoup à Arthur mais pas franchement à ses cadets ce qui ne l'empêchait pas du tout de les aimer, alors cette stupide querelle entre Hecate et son frère n'avait pas vraiment lieu d'être. Un jour peut-être, elle lui demanderait de s'expliquer à ce sujet, cherchant à comprendre ce qui pouvait bien la pousser à haïr autant celui qui partageait quand même une bonne partie de son quotidien lorsqu'elle n'était pas à l'école. Cependant, la poufsouffle avait toujours eu peur de provoquer une dispute en montrant clairement qu'elle ne se rangeait pas directement du côté de la serdaigle, mais elle espérait encore que sa meilleure amie ait une très bonne raison d'en vouloir à son frère et dans ce cas, elle n'hésiterait certainement pas à se ranger de son côté et à négliger Victor même si elle était amenée à le rencontrer un jour. Mais mieux valait ne pas gâcher leurs vacances, il était beaucoup plus simple de rebondir sur le quidditch, sport auquel elle ne connaissait rien, ou encore sur les élèves qui allaient lui manquer l'an prochain ou les années d'après, même s'ils n'étaient pas si nombreux que ça au final et que l'évocation des derniers années lui rappelait forcément Enzo. Si elle était un peu déçue de voir certains de ses camarades partir, elle avait eu hâte que l'année se termine pour que le poufsouffle sorte définitivement de sa vie. Bien sûr, si elle devait un jour reparler de cette triste histoire, elle pourrait probablement lui envoyer un hibou, mais elle voulait surtout enterrer à jamais ce qu'ils s'était passé dans la salle commune et dans l'idéal, ne plus jamais avoir à en reparler à qui que ce soit, à part peut-être à un de ses petits amis, mais ce n'était pas du tout à l'ordre du jour. Elle avait seize ans et n'avait encore rencontré encore aucun garçon qui lui avait véritablement plu si ce n'était Alexander qui était passé de petit ami potentiel à garçon qu'elle détestait et ne voulait plus jamais revoir. Astride s'imaginait donc sans mal pouvoir prétendre à encore quelques années de célibat ce qui ne l'obligerait pas à parler de cette sombre histoire avec qui que ce soit. Hecate n'avait pas besoin de savoir. Elle n'était pas obligée de toujours tout dire à sa meilleure amie, n'est-ce pas ? La jeune fille n'arrivait pas réellement à s'en convaincre et elle avait déjà passé de longues heures à repenser à toute cette histoire en culpabilisant. Sauf qu'ici, elle s'était jurée de parvenir à penser à autre chose et elle allait y arriver, c'était la première journée après tout, il était tout à fait normal qu'elle ait un peu de mal à décompresser.

« Ah oui, le quidditch, je suis désolée mais je suis vraiment une quiche pour tout ce qui est sport, si ça peut te rassurer, je suis sûre que tu vas y arriver. » Déclara-t-elle avait sérieux. « Elliott va beaucoup me manquer. Mais si tu veux parler des futurs septième année, non, je ne vois pas. A part peut-être.... Toi, mais très légèrement. »

Astride pouffa, essayant tant bien que mal de ne pas se mettre à imaginer le moment où elles devraient se séparer. Il était nettement plus simple d'en plaisanter maintenant alors que le moment fatidique semblait encore très loin. Seulement, en vérité, la jeune fille avait bien du mal à accepter leur différence d'âge d'un seul coup. Il ne s'était pas écoulé une seule année à Poudlard sans qu'elle puisse compter sur le soutien de sa meilleure amie, et elle ne voyait pas du tout comment elle allait pouvoir se débrouiller sans elle. Désireuse de se changer les idées, la poufsouffle se concentra de nouveau sur son assiette, finissant les dernières bouchées à une vitesse impressionnante.