Janvier était déjà bien entamé, tout comme la nouvelle période de cours. Cruz était déjà débordée par les travaux à rendre dans toutes les matières qu'elle avait gardées cette année. A cela se rajoutait les ateliers proposés par la direction pour s'entraîner au combat. Celui dont elle faisait partie, organisé par Burgess, lui occupait tout son samedi matin. Et puis, bien sûr, il y avait ce fameux rôle de préfet à tenir et tout ce que cela impliquait. Heureusement qu'elle avait Edward avec elle pour la seconder dans cette tâche. Heureusement qu'elle l'avait tout court d'ailleurs. La jeune femme entretenait une drôle de relation avec le septième année. Elle l'adorait et le temps qu'elle passait avec lui filait à une vitesse effarante. Cruz aimait ses étreintes, ses caresses, ses baisers ... tout cela à la fois. Mais, pour autant, elle ne se pensait pas amoureuse. Elle était attachée à lui, c'était certain, mais pas à ce point là. Et elle ignorait ce qu'il pouvait bien penser de tout ça, de son côté. Oui, c'était une drôle de relation que celle des deux préfets de Serpentard. A l'occasion, Cruz songea qu'elle devrait aborder ce sujet avec Edward. Rester dans le flou avec quelque chose d'excitant tout en restant extrêmement sécurisant. Après tout, lorsque l'on ignore à quoi s'attendre, on est libre d'imaginer ce qu'on veut. Et de faire ce que l'on veut, sans penser aux conséquences que cela pourrait avoir puisque justement, on n'était pas au courant des limites à ne pas dépasser. Il fallait dire que Cruz s'en était donné à coeur joie depuis son premier baiser avec Ed. Elle était allée au bal seule pour ensuite se mettre à danser avec Isidore. Puis elle s'était retrouvée dans le corps de Zach, qu'elle avait palpé allégrement. Elle avait continué en embrassant, toujours dans le corps du préfet de Serdaigle, la fausse Narcissa alias Oliver - bien qu'elle ne soit pas au courant de la véritable identité de la personne, cela restait un baiser. Enfin, elle avait flirté avec Luca, un ami commun aux deux préfets verts et argents. Autant dire que la jeune femme n'avait pas perdu de temps. Et tout cela dans le dos du pauvre Edward, si ce n'était pas malheureux. Peut-être ne s'était-il pas gêné pour faire de même de son côté, qui sait ? Ils ne s'étaient jamais rien imposer l'un l'autre, aussi Cruz ne dirait rien si elle apprenait qu'il avait fricoté avec une autre fille. Elle se contenterait de les tuer, tous les deux, sans autre forme d'explication.

Toujours est-il que Cruz ignorait les agissements d'Edward et que ce dernier ignorait tout autant le comportement de la jeune femme, ce qui garantissait la paix dans leur relation. Du moins pour l'instant. En fin d'après-midi, comme c'était leur habitude lorsqu'ils étaient réquisitionnés pour faire la ronde de soirée, les deux préfets avaient convenu de se retrouver dans leur salle de fonction pour bosser leurs cours - et surtout faire des choses bien plus intéressantes sous couvert d'une intimité sans grand risque d'être troublée. Après son cours de Sortilèges, l'Espagnole se rendit directement dans la salle des préfets. Inutile de se rendre aux cachots d'abord, ce n'aurait été qu'une perte de temps puisque leur lieu de rendez-vous était sur le chemin et qu'elle avait toutes les affaires nécessaires. Lorsque Cruz pénétra dans la pièce, elle trouva Edward déjà totalement absorbé par ses devoirs. Il semblait avoir déjà écrit un parchemin de dissertation. Le septième année était déterminé et ambitieux, deux qualités qu'elle appréciait chez lui. Doucement, elle s'approcha derrière lui pour l'embrasser dans le cou. « T'es beau quand t'es concentré. » Lui murmura-t-elle à l'oreille en passant ses bras autour de son cou et en nichant son nez au creux de son cou. Son parfum ... elle en était dingue.

Edward ... Au milieu de tous ces chamboulements, tous ces évènements qui se succèdent à la vitesse de l'air en dévastant tout sur leur passage, il n'y a que lui qui reste inchangé. Il reste son repère quand tout part à la dérive. Un pilier sur lequel s'appuyer, la seule chose stable dans la vie de Cruz. Et cela faisait vraiment très bizarre à cette dernière, de pouvoir compter sur quelqu'un. C'était pas négatif, bien au contraire, mais elle avait tellement de mal à se dire qu'il était là pour elle. Est-ce qu'il n'allait pas s'envoler, s'évaporer, s'évanouir tel un mirage si jamais elle prenait le risque de s'attacher à lui ? Est-ce qu'elle n'était pas déjà attachée à lui, puisqu'elle se posait la question ? Est-ce qu'elle ne se posait pas trop de questions, finalement ? Souvent elle y pensait : à elle, à lui, à ce potentiel "eux" qui se profilait. La jeune femme n'aimait pas avancer dans le noir, ne pas savoir où elle allait. Elle qui avait pris l'habitude de contrôler chaque détail de sa vie, se retrouvait plongée dans l'incertitude la plus totale. Pourtant, dès qu'elle se retrouvait en la compagnie du septième année, son horizon s’éclaircissait. Elle se sentait alors parfaitement à sa place et sans la moindre interrogation. Bien étonnant comme relation après avoir passé quasiment toute leur scolarité à se chamailler. Comment continuer à être elle-même alors qu'elle n'était plus tout à fait comme avant ? Est-ce que cela impliquait qu'elle se trouvait changée avec le jeune homme à ses côtés ? Assaillie de doutes, elle préférait agir comme si de rien était. Sa relation avec Edward était cachée de tous, pour mieux la préserver. Du moins, c'était en gros la raison officielle. Officieusement, c'était quand même vachement plus compliqué. De toute façon, dès que les choses devenaient réelles et sérieuses, c'était forcément compliqué. Cruz préférait donc vivre dans le déni, faire comme si de rien n'était. Ouais, ce n'était pas vraiment courageux de sa part mais, en même temps, elle n'avait pas signée pour faire de la concurrence aux Gryffondors.

Voir Edward dans la salle des préfets, en train d'étudier, c'était comme lors de leur premier baiser. Comme si rien n'avait changé depuis ce jour. En soit, c'était plutôt rassurant. La jeune femme se glissa silencieusement derrière lui pour l'embrasser dans le cou. Si on lui avait dit il y a un an qu'elle ferait ça à Edward Carter, elle aurait sûrement trouvé ça grotesque. Les choses avaient bel et bien changé, finalement. Après l'avoir laissée quelques instants dans cette position, le nez niché au creux de son cou, le septième année attira la brune sur ses genoux, mettant clairement de côté le devoir sur lequel il était en train de plancher .« Salut toi. » La salua le préfet avec un sourire. Bon sang, ce sourire ... Cruz aurait pu donner n'importe quoi pour le voir sourire. Elle aurait aimé être à la seule à pouvoir en profiter, mais c'était bien trop égoïste de sa part non ? Edward ne lui laissa pas le temps d'y penser davantage : ses lèvres vinrent se poser sur les siennes pour lui donner un baiser à la fois tendre et passionné. « Tu es une vraie petite souris, je ne t’ai pas entendue arriver. » Lui confia le Serpentard, après avoir mis un terme à ce baiser bien trop tôt au goût de Cruz. En suivant le regard qu'il jette en direction de son parchemin, Cruz ne put s'empêcher de laisser échapper un éclat de rire. Elle venait de ruiner la fin de sa dissertation de Métamorphose. Oops, sorry but not sorry ? « En même temps t'étais tellement absorbé par ton devoir, j'aurais presque de quoi être jalouse ! » Dit-elle avec un sourire, en fronçant légèrement le nez. Est-ce qu'elle était vraiment du genre à être jalouse, en réalité ? Ça aussi c'était complètement nouveau pour elle, avoir quelqu'un dans la tête au point de ne surtout pas vouloir que la réciproque ne soit pas vraie. « Tu veux que je te fasse de la place ? » Lui proposa finalement Edward. Cruz jeta un coup d'oeil sur le bureau en pagaille. Il était sérieux là ? Elle était sur ses genoux et lui il demandait si elle voulait travailler ? Heureusement que la préfète n'était pas du genre à se vexer pour un rien parce qu'elle aurait pu mal le prendre ... Se mettant complètement à califourchon sur lui, Cruz le regarda droit dans les yeux en plaçant ses bras derrière la nuque du jeune homme. « Et si on oubliait les devoirs pour une fois ? » Lui proposa la brune en un murmure, sourire aux lèvres alors que ses dernières venaient à nouveau se poser sur celles du Serpentard. Ça promettait une rude séance de révisions, tout ça ...

« Tu n’étais pas là, il fallait bien que je m’occupe. » Répond Edward après que la jeune femme lui ait confié qu'elle avait de quoi être jalouse de l'attention qu'il portait à ses devoirs. En réalité, c'était relativement exagéré. Cruz avait toujours apprécié l'ambition du Serpentard, cette détermination à toujours davantage travailler pour atteindre l'excellence et le but qu'il s'était fixé. Ils étaient pareil, sur ce point, et la préfète ne pouvait s'empêcher de trouver cette ambition superbement sexy. Tout comme le rire d'Edward, qui la fit fondre. Qu'est-ce qu'il pouvait être beau. Comment avait-elle fait pour ne pas s'en rendre compte durant toutes ces années ? Et dire qu'il était là, avec elle, en train de la dévorer du regard. Est-ce qu'elle méritait cette chance qui lui était accordée ? Parfois, elle avait l'impression de se trouver dans un mauvais remake de la Belle et le Clochard. Cruz incarnant ici la clocharde, vous avez saisi. Ses interrogations furent rapidement éclipsées par les lèvres du septième année qui vinrent frôler le cou de la brune, lui provoquant au passage une vague de frissons qui se répartirent dans tout son corps. Il remonta ensuite lentement jusqu'à son oreille, tandis qu'elle retenait sa respiration comme une idiote. C'était dur de se sentir perdre la tête à cause d'un garçon.« Mais il n’est pas aussi intéressant que toi. » Lui susurra Edward à l'oreille avant de redescendre immédiatement le long de son cou pour l'embrasser. Un sourire s'invita sur les lèvres de Cruz tandis qu'elle se surprenait à fermer les yeux, préférant se concentrer sur les sensations que lui provoquait ce baiser. La brune prenait beaucoup trop de plaisir là, ce n'était vraiment pas raisonnable. Et Edward qui continuait à couvrir son cou de baisers ... « Ah ? Pourtant moi je trouve la Métamorphose passionnante. » Réussit à répondre Cruz, au terme d'un incroyable effort pour se détacher des douces sensations laissées par les lèvres du préfet. Elle plongea ses prunelles sombres dans celles azur d'Edward, avec une lueur malicieuse dans le regard. Juste quelques instants, les yeux dans les yeux, avant qu'elle ne cède et revienne embrasser le jeune homme. Juste une dernière fois, promis. Ou pas.

Cruz se mit ensuite à califourchon sur le préfet de Serpentard, de façon à pouvoir pleinement lui faire face. Au diable les devoirs autres dissertations, ils pouvaient bien attendre un peu. Les deux verts et argents ne se voyaient pas si souvent que ça en tête à tête, ils pouvaient bien s’octroyer une petite pause pour profiter l'un de l'autre. Elle l'embrassa à nouveau, comme si c'était la dernière fois qu'elle en aurait l'occasion. L'attraction de ses lèvres était bien trop forte, elle n'arrivait pas à s'en décoller trop longtemps. Edward lui rendit son baiser, tandis que ses mains se placèrent naturellement dans le dos de la jeune femme. Il la serre contre lui et Cruz n'a aucune envie de stopper ce contact prolongé. Elle se sent de plus en plus attirée comme un aimant, son baiser se fait plus passionné, le désir prend le dessus sur la raison. « C’est tentant. » Murmure Edward avant de retourner l'embrasser, cette fois-ci dans le cou à nouveau. Moment magique qui commence néanmoins à se rompre, puisque Cruz devine sans mal qu'un mais ne va pas tarder à se rajouter à l'équation. Elle se laisse cependant aller sous les baisers de son camarade, espérant se tromper sur toute la ligne. « Mais je ne sais pas si peux vraiment me le permettre. » Cruz suit le regard du jeune homme vers la table de travail jonchée de parchemins et de livres en tout genre. C'est vrai qu'il a dû prendre du retard à cause de sa grippe et qu'il doit le rattraper. Elle pourrait comprendre sans aucun mal, elle agirait sûrement comme lui dans la même situation. Mais la brune ne peut s'empêcher d'afficher une moue boudeuse tandis qu'Edward embrasse une nouvelle fois son cou. Avait-elle tort de se considérer un chouia plus importante que le devoir de Métamorphe des septièmes années. Sans doute. « J’ai pris un peu trop de retard à cause de ma grippe pendant les vacances. » Tente finalement de se justifier le Serpentard, en lui offrant un regard digne des pires martyrs de l'histoire. Et comment résister à ces magnifiques yeux bleus qui vous fixent comme cela ? Il se mord la lèvres, les mains toujours dans le dos de la brune. Elle fait de même, rongée entre désir et raison. Ses yeux se perdent sur le torse du jeune homme, elle aurait tellement envie de lui enlever cet uniforme ... « Métamorphose d'abord. » La préfète s'avoue finalement vaincue non sans une pointe de vexation. Elle se défait de l'étreinte d'Edward et se lève de sur ses genoux pour aller chercher son sac, qu'elle a laissé tomber dans le feu de l'action. Il faut dire qu'elle avait une montagne de devoirs à faire, elle aussi. Sans un regard pour son camarade, elle s'assoit sur la chaise à côté de lui et sort ses affaires. Si elle évite tout contact visuel c'est parce qu'elle est agacée d'être encore reléguée à la seconde place mais aussi parce qu'elle a trop peur que sa raison ne disparaisse complètement si elle repose les yeux sur le septième année. Il est beaucoup trop beau, beaucoup trop attirant pour qu'elle puisse lui résister. Cruz sort son manuel de Potions ainsi que du parchemin afin d'écrire une dissertation donnée par le Professeur Burgess en début de semaine. « J'aurais aimé que tu sois là, au bal. » Prononce enfin la brune pour rompre le silence qui s'est installé dans la pièce. Oui, elle aurait aimé qu'Edward l'accompagne à ce bal de Noël. Et en même temps, elle avait passé un super début de soirée en compagnie d'Isidore avant de foutre le bazar dans le corps de Zach. Pourquoi fallait-il que les choses ne soient jamais simples, avec Cruz ?

Si Cruz s'écoutait, elle pourrait passer sa vie entière dans les bras d'Edward. Elle se sent tellement différente lorsqu'il est là, lorsqu'il la touche, lorsqu'il l'embrasse. La brune pourrait se nourrir uniquement de ses baisers. Cela va bien au delà de la simple attirance, elle s'en rend compte depuis quelques temps. Au début, il s'agissait simplement de deux corps qui s'attiraient. Rien de plus, juste des premiers émois adolescents et la sensation grisante de se cacher et d'être découverts à tout instant. Cependant, les choses s'étaient accélérées récemment. Cruz n'aurait pas su dater avec exactitude ce changement, elle l'aurait placé en début d'année 2024 mais sans grande certitude. Désormais, ce n'était plus juste un passe-temps ou un divertissement. Elle voulait Edward et se languissait de lui lorsqu'il n'était pas avec elle. Pourtant, les deux Serpentards ne s'étaient jamais rien promis et Cruz se maudissait de voir grandir cet attachement non souhaité. Aimer quelqu'un, c'était prendre le risque qu'il vous blesse et ruine votre vie entière. L'Espagnole ne souhaitait pas prendre se risque. Pas plus qu'elle ne voulait voir Edward le prendre. Parce que, si elle échouait dans ses ambitions, elle l'entraînerait avec lui. Qui plus est, une orpheline était loin d'être un bon parti. Mais au fait, pourquoi est-ce qu'elle se mettait à penser à ? Elle se prenait la tête alors que c'était une simple relation faite de baisers, de tendresse, de complicité ... Ce n'étaient pas comme s'ils étaient amoureux, que diable ! Si ?

De toute manière, la préfète des Serpentards n'a guère le loisir de s'abandonner davantage dans les bras de son collègue. Ils sont tout aussi sérieux dans leur travail l'un que l'autre, Edward l'est même sans doute davantage qu'elle. Il a du retard à rattraper à cause de la grippe qui l'a cloué au lit pendant les vacances, la brune le comprend aisément. Mais elle aurait envie parfois, d'un peu de folie. D'un petit truc qu'ils n'auraient pas prévu, qui enverrait valdinguer les devoirs étalés sur la table pour s'occuper d'un travail à groupe beaucoup plus intéressant ... Et malheureusement ça ne sera pas pour tout de suite. Cruz se lève, rompant ainsi tout contact avec le septième année. Elle est déçue et ça se voit. Sans un regard en direction d'Edward, elle ramasse son sac de cours et vient s'asseoir à côté de lui. Elle sort ses affaires - du parchemin, sa plume, de l'encre, son manuel de Potions - et commence à noter le sujet de la dissertation donnée par Burgess. Les yeux rivés sur sa copie, la brune rompt finalement le silence pesant qui s'est installé en confiant au Serpentard qu'elle aurait aimé qu'il l'accompagne au bal. Aveu sincère, le destin ayant décidé de les séparer ce soir là. Un mal pour un bien, puisque Cruz avait quand même passé une très bonne soirée. Mais, aux bras du préfet, elle aurait sans doute était mille fois meilleure. Même s'ils auraient pris le risque d'être découverts, à coup sûr. Le jeu en valait peut-être la chandelle.

« Moi aussi… Il paraît que j'ai raté quelque chose. » Répond Edward sur un ton monocorde, semblable à celui de sa partenaire. Cette dernière se décide enfin à tourner la tête en sa direction : elle n'a pas envie de passer ce moment à faire comme s'ils étaient deux inconnus obligés de se côtoyer pendant une heure avant d'aller faire des rondes. Non, la Salle des Préfets avait une signification toute particulière pour eux et il était hors de question de jouer au même jeu d'ignorance dans ces quatre murs que dans les restes du château. Tant pis pour le naturel boudeur de Cruz, cette fois ci elle fait un effort.« Ah c'est sûr que c'était une sacrée pagaille ! Y'en a même certains qui ont été transférés dans des corps de professeurs, tu te rends compte ? » Le récit de cette soirée épique fait renaître un sourire malicieux sur les lèvres de la sixième année. Certains n'ont pas du tout apprécié la farce de Londubat mais, pour sa part, elle y a pris un certain plaisir. Et le début de soirée n'était pas mal non plus. Elle s'était sentie tellement bien sur cette piste de danse, avec un Isidore plus que débutant mais désireux de lui faire plaisir. C'était bien ça le plus important, au diable la perfection qu'elle s'imposait d'habitude. Cruz ne voulait retenir que cette danse, ce porté inespéré et les compliments du Serpentard. Heureusement que le changement de corps était intervenu, car la conversation avait pris un ton bien moins agréable. Mais la brune préférait oublier ça.

« Tu as dû bien t’amuser. » Poursuit Edward, comme s'il lisait dans les pensées de l'Espagnole. Oui, elle s'était remarquablement bien amusée. Notamment lorsqu'elle avait pris possession du corps de Zach et qu'elle lui avait fait commettre l'irréparable : embrasser Narcissa devant toute l'assemblée. Une superbe blague dont elle était particulièrement fière mais dont elle ne se vantait pas pour autant. Personne ne savait encore dans quel corps elle avait atterri, mis à part Billie. Cette chipie connaissait le nom de son partenaire de crime - le possesseur du corps de Narcissa - mais avait fait exprès de ne rien lui dire. L'impatience de connaître l'identité de cette personne rongeait Cruz, il fallait absolument qu'elle tire les vers du nez de son amie. Ne souhaitant pas évoquer avec Edward le corps dans lequel elle s'était retrouvée, la brune préféra narrer sa soirée. « Au début, pas trop. Puis j'ai passé un bout de la soirée avec Izzie donc c'était chouette. Le changement de corps m'a bien plu aussi, même si celui qui était dans le mien m'a fait une entorse à la cheville. » Une vilaine entorse, d'ailleurs. Cela avait été une sacrée surprise lorsqu'elle avait repris possession de son corps et que la douleur s'était emparée de sa cheville. Cruz avait dû ôter ses talons et s'aider d'Isidore pour qu'il la conduise à l'infirmerie. Heureusement, l'infirmier Lennox avait rapidement pu réparer les dégâts et les vacances de Cruz n'en avaient pas été affectées. La préfète avait d'ailleurs aperçu Edward, ce soir là, endormi dans son petit lit d'infirmerie. Il avait un visage d'ange, quand il dormait. Peut-être avait-elle été vraiment séduite ce soir là, qui sait ? « Il m'a envoyé un mot pour s'excuser après. C'était Skat, tu sais le garçon un peu timide qui est arrivé cette année ? Il a été adorable. » Recevoir ce petit message d'excuses, écrit timidement et dans un anglais mal maîtrisé, avait touché la préfète. L'intention était belle et le contenu du mot, empli de compliments, l'était tout autant. Depuis qu'elle avait été nommée à ce poste, Cruz s'était découvert une tendresse nouvelle pour les plus jeunes. Elle aimait être leur référent, une personne en qui ils avaient confiance. Un peu comme une seconde maman, et c'était d'ailleurs bien étrange quand on savait qu'elle n'avait jamais connu la sienne.

« C’est plutôt… inédit … Et c’est Londubat qui a décidé ça ? » Répondit Edward après que sa comparse lui ait fait le récit accéléré de la folle soirée qu'ils avaient passé au bal de Noël. Pour être inédit, ça l'était. N'importe quel adulte normalement constitué et avec un cerveau en état de marche aurait senti que ce n'était pas l'idée du siècle, mais pas lui. Parce que franchement, entre nous soit dit, vous vous doutez de ce qui risque de se passer si on fait changer de corps à des adolescents. Les hormones en ébullition, les amitiés, les inimitiés ... Cela semblait évident que les élèves de Poudlard n'allaient pas se contenter d'essayer de se mettre à la place de l'autre. Cette hypothèse s'était d'ailleurs confirmée dans les faits : ce bal s'était transformé en un bazar sans nom. Cruz n'était pas la seule à avoir fait une petite blague à ses camarades, elle se souvenait encore très nettement du cinéma qu'avaient fait les personnes se trouvant des les corps de Sage, Jayden et la gamine infernale de Poufsouffle. Du pur spectacle, c'était vraiment dommage que le préfet des Serpentards n'ait pu y assister. Quoique, ce n'était peut-être pas forcément le genre de vision qui l'aurait amusé ... « Qui d'autre pourrait avoir une idée aussi tordue ? Tu penses qu'il ne nous a pas prévenu à l'avance, évidemment. Je me demande comment les échanges de corps ont été décidés ... » Interrogea la jeune femme, plus comme des pensées à voix haute plutôt que comme une véritable question. Il s'agissait, en effet, d'une équation qu'elle n'avait toujours pas réussi à solutionner. Ce n'était pourtant pas faute d'avoir essayé. Pendant une bonne partie des vacances, l'Espagnole avait cherché à savoir quelle logique avait pu être celle du directeur concernant ces transferts. Pourquoi s'était-elle retrouvée dans le corps de Zach ? Pourquoi Skat s'était-il retrouvé dans le sien ? Pourquoi Zach était-il dans le corps de leur professeur de Potions ? Toutes ces questions étaient restées sans réponses. Cruz ne voyait aucune règle, aucune logique à tout ça. Edward n'étant pas présent ce soir là, il ne détenait sans doute pas davantage de réponses qu'elle.

La brune poursuivit le récit de sa soirée en racontant à Edward que la présence d'Isidore avait grandement contribué à embellir sa soirée. Ce dernier ne répondit rien, aussi Cruz continua en expliquant qu'elle savait qui se trouvait dans son corps puisque Skat lui avait envoyé un mot d'excuses suite à l'entorse qu'il avait fait à sa cheville. « Ah, tant mieux. C’est très prévenant de sa part. » Cruz arqua un sourcil à moitié interloqué, à moitié mécontent. Elle se faisait des idées ou il s'en fichait complètement de ce qui avait pu lui arriver ce soir là ? Non parce que, si ce n'était pas le cas, cela restait drôlement bien imité. Si elle l'embêtait, le préfet n'avait qu'à le dire. Cruz savait très bien garder le silence pendant des heures, voire des jours s'il le souhaitait. Agacée, vexée, elle se saisit de sa plume et commença à écrire quelques mots sur son parchemin. « Heureusement qu’Isidore était là alors. » Poursuivit néanmoins le septième année. A mille lieux d'imaginer la jalousie que ressentait son camarade, Cruz ne comprit pas vraiment la subtilité de ses propos et se contenta de hocher la tête en se tournant à nouveau vers lui. Oui, elle avait vraiment eu de la chance de tomber sur lui ce soir là. C'était sans doute l'un de ses meilleurs souvenirs avec le Serpentard. Surtout cette danse, surtout ce porté ... Cruz n'arrivait pas à savoir si elle était aussi heureuse parce qu'il avait réalisé un de ses rêves de petite fille ou bien parce qu'il avait réussi à la porter en dépit de sa prothèse. Peut-être les deux cumulés, ce qui donnait toute sa magie à cet instant. Mais il valait sans doute mieux éluder ce passage avec Edward. « Tu as raison, je ne sais pas ce que j'aurais fait sans lui. Il m'a même accompagnée à l'infirmerie ! D'ailleurs ... je t'ai aperçu en train de dormir. » Lui confia la sixième année avec un sourire timide. Est-ce que c'était considéré comme du voyeurisme de l'avoir observé alors qu'il était plongé dans les bras de Morphée ? Cruz n'y pouvait rien, elle n'avait pas pu décrocher son regard de ce visage paisible, de ces lèvres qui étaient siennes quand ils se retrouvaient dans cette salle. Leur relation avait tellement changé en l'espace de quelques mois, la brune avait à peine eu le temps de s'en rendre compte. Tout était allé si vite et sans qu'elle s'y soit préparée. Désormais, Cruz sentait une peur nouvelle grandir en elle : celle de trop s'attacher à l'homme qui se tenait en face d'elle et qui quitterait Poudlard, dans quelques mois. « Et toi, tu étais dans le corps de qui ? » La question du préfet sortit Cruz de ses pensées. Elle le regarda d'un air surpris. Qu'est-ce que ça pouvait bien lui faire, l'identité du corps dans lequel elle s'était retrouvé ? C'était une drôle de question, surtout venant d'un jeune homme qui n'avait pas pour habitude d'en poser. Qui plus est, Cruz n'avait aucune envie de révéler cette information. Elle ne l'avait encore dit à personne, pour l'instant c'était son mystère à elle. « Ça, c'est un secret ! » Répondit l'Espagnole sur un ton taquin. Non mais franchement, plutôt mourir que d'avouer à Edward qu'elle s'était retrouvée dans le corps de leur collègue de Serdaigle. Qu'est-ce qu'il dirait, s'il apprenait qu'elle avait embrassé le corps de Narcissa et touché les parties intimes de Zach alors qu'elle se trouvait dans son enveloppe corporelle ? Sans compter qu'elle risquait de s'attirer des ennuis si jamais cela venait à être répété. Non, elle n'allait rien dire, rien du tout. Après tout, ils n'étaient pas obligés de tout se raconter, si ?

Au cours de son récit du bal de Noël, Cruz en vint à se demander comment les échanges de corps avaient été décidés. Si elle avait été directrice et qu'une telle chose avait été décidée, nul doute qu'elle aurait pris ses dispositions pour que les permutations se fassent selon un algorithme précis et minutieusement étudié. Malheureusement pour la plupart des élèves, ce n'était pas l'Espagnole qui occupait le fauteuil de la direction mais bel et bien Londubat. Précision et minutie ne devaient sûrement pas faire partie de son vocabulaire ... « Sûrement aléatoirement. S’il s’agit d’un sortilège, il y avait trop de monde dans la pièce pour que les échanges soient censés je pense … En tout cas, ce directeur n’en manque pas une pour nous surprendre… » Edward partageait donc l'avis de sa co-préfète concernant les échanges de corps. Rien d'étonnant à cela, le septième année était certainement le garçon le plus intelligent et raisonné qu'elle connaissait. Quant à sa remarque sur leur nouveau directeur, Cruz ne pouvait là encore qu'approuver. Il enchaînait les bêtises et les erreurs de jugement à un rythme infernal, tant et si bien qu'on pouvait croire qu'il avait tout prémédité. Quoi qu'il en soit, s'il existait vraiment une logique dans tout ça, elle était soigneusement cachée. « C'est clair qu'il n'en manque pas une, il met les pieds dans le plat à chaque fois ! C'était quand même risqué, imagine que je me sois retrouvée dans le corps de Keagan ou inversement ... J'en ai des frissons de dégoût rien que d'y penser. » Plaisanta la jeune femme, en mimant exagérément une grimace dégoûtée. Avoir parlé de ce déchet humain en la présence d'Edward était risqué. En effet, il semblait à la brune que les deux jeunes hommes étaient amis. Ou du moins, ils se connaissaient puisqu'ils étaient dans la même classe jusqu'à cette année. Peu importait, Cruz n'allait tout de même pas se censurer sous prétexte que son amoureux ne savait pas choisir ses fréquentations. Attendez une minute ... J'ai dit "son amoureux", là ?

Par la suite, la préfète expliqua qu'elle avait eu de la chance de tomber sur Isidore lors du bal. En effet, il avait bien fallu que quelqu'un l'accompagne jusqu'à l'infirmerie une fois que les élèves avaient retrouvé leurs corps, puisqu'elle s'était retrouvée dans l'incapacité de poser le pied par terre. La brune avait absolument eu besoin de quelqu'un sur qui s'appuyer pour pouvoir se déplacer. Izzie avait donc été d'un précieux soutien. Cruz confia à son camarade qu'elle l'avait aperçu en train de dormir, lorsqu'elle était allée trouver l'infirmier Lennox. Cette annonce n'eut pas l'air d'enchanter le jeune homme puisqu'il affichait un visage des plus fermés. « Shooté et comateux tu veux dire … Je n’ai jamais aussi mal dormi de toute ma vie que pendant mon séjour à l’infirmerie... » Bougonna Edward, face à une Cruz de plus en plus interloquée. Qu'est-ce qu'elle avait dit encore ? Non seulement il n'en avait rien eu à faire de sa cheville - elle avait fait l'effort de ne pas relever ce désintérêt, ce qui était assez rare pour être souligné - mais voilà qu'en plus il semblait mécontent de sa visite à l'infirmerie. C'était à n'y rien comprendre. La préfète n'avait pas envie de voir Edward fâché pour si peu alors elle décidé de justifier ce pourquoi elle l'avait observé durant son sommeil. « Tu avais pourtant l'air si paisible ... S'il n'y avait pas eu Izzie et Lennox, je crois bien que je serais allée te rejoindre ... Pour dormir, hein. » C'était maladroit et Cruz s'en était rendue compte, c'est pourquoi elle avait aussitôt précisé que c'était uniquement dans le but de dormir. Elle ne voulait pas rejoindre Edward dans son lit pour faire autre chose ... Quoique, réflexion faite. De drôles de pensées s'invitaient dans la tête de Cruz, lui faisant se mordre la lèvre inférieure. C'était déjà bien assez gênant d'admette qu'elle aurait aimé dormir avec lui, voilà qu'en plus elle s'exprimait mal. Le septième année prit une longue inspiration, tandis que sa camarade retenait son souffle. C'était un signe d'énervement, elle en était sûre. « J’aurais aimé être à sa place. » Déclara subitement Edward. A la place de qui ? Cruz mit un instant avant de comprendre qu'il devait parler d'Isidore. Alors c'était ça qui le chiffonnait depuis tout à l'heure ? Le simple fait qu'elle ait passé la soirée avec un autre que lui ? C'était tellement stupide. Il était malade, il n'avait pas eu d'autre choix que d'aller à l'infirmerie. Quant à Cruz, elle s'était rendue au bal seule. Ce n'était qu'une simple coïncidence si elle avait trouvé Isidore, d'ailleurs elle n'aurait pas parié deux noises sur sa présence. D'accord, elle avait passé une superbe soirée mais ça ne voulait pas dire qu'elle n'avait pas regretté le plan initial, à savoir s'y rendre avec Edward.« J'aurais aimé qu'il puisse en être ainsi. » Répondit doucement la brune, alors qu'Edward gardait les yeux rivés sur sa copie. En se penchant un peu, Cruz se rendit compte que ses joues étaient écarlates. Tellement craquant ... Dans un élan de spontanéité, la brune posa sa main sur la cuisse du jeune homme pour la lui caresser avec le pouce. Est-ce que c'était pour le rassurer ? Le faire dédramatiser ? Lui montrer qu'elle était sincère ? Peut-être tout ça à la fois, en réalité elle n'avait pas vraiment réfléchi. Cela lui paraissait juste évident, sur l'instant.

Néanmoins, ce moment d'affectuosité n'empêcha pas Cruz de refuser de donner l'identité du corps dans lequel elle s'était retrouvée au bal. Même si la question venait d'Edward et qu'il semblait tenir à la réponse. Elle s'était jurée de n'en parler à personne pour l'instant et c'est ce qu'elle comptait faire. Edward était vraiment la dernière personne qu'elle souhaitait voir au courant de toute cette histoire. « Et pourquoi ça ? » Demande ce dernier d'un air suspicieux, en fronçant les sourcils. Il avait raison de se douter de quelque chose, le refus de la préfète n'était pas anodin. Mais elle n'en démordrait pas : il était impensable qu'elle lui répondre. Si Cruz avait décidé de le garder pour elle, alors elle le garderait pour elle. Il ne pouvait de toute façon pas la forcer à parler. « Parce que j'ai envie de laisser planer le mystère. Ça te pose un problème ? » Demanda la jeune femme, d'un ton neutre. Il avait intérêt à dire que non, ça ne lui posait aucun problème. Même si c'était le cas, il allait bien devoir se contenter de la réponse qu'elle lui fournissait. Autrement, le ton risquait de monter et Cruz n'avait vraiment pas envie d'en arriver là.

« Fort heureusement, ça ne s’est pas produit.» Cruz nota la tension qui s'était emparée de son camarade lorsqu'elle avait volontairement critiqué son meilleur ami. La préfète ne comptait pas se censurer sous prétexte que son ... enfin sous prétexte qu'Edward et cet homme des cavernes étaient amis. Au contraire, l'honnêteté était la plus belle des qualités donc pourquoi s'en priver ? Connaissant le tempérament de son camarade - assez similaire au sien, sous certains aspect - la brune s'était attendue à une réaction beaucoup plus explosive que cela, mais il n'en fut rien. Le jeune homme se contenta de lever les yeux au ciel, desserrant finalement les poings. L'orage n'était pas passé loin, une fois de plus. « L'honneur est sauf ! » Poursuivit Cruz avec un clin d’œil, sur le ton de l'humour. Jamais elle ne se lasserait de taquiner Edward sur ses fréquentations douteuses alors autant l'y acclimater au plus vite. La patience s'apprend avec de l'entrainement. « Ça aurait été un vrai calvaire, tu aurais rabâché les oreilles de tout le monde pendant des mois avec cette soirée. T’imagine l’horreur ? » Edward reprit la parole, non sans une pointe de sarcasme. Ton que Cruz connaît bien, puisqu'ils se sont parlés de la sorte pendant toute leur scolarité. Ce que la brune connaît moins, en revanche, c'est l'effet que lui fait désormais le sourire outrageusement charmeur du septième année. Avant, il l'aurait tout simplement agacée et encouragé à poursuivre la provocation. Mais là ... elle a juste envie de le faire taire en l'embrassant. Parce qu'elle le trouve irrésistible quand il prend cet air taquin. Parce que si elle s'écoutait, elle lui sauterait dessus. Mais ce n'est ni le l'heure ni l'endroit. « Allons, ne me fais pas croire qu'il n'aurait pas fait exactement la même chose de son côté. Quoique, il aurait peut-être apprécié d'avoir des neurones pour une fois ... » Répond l'Espagnole du tac au tac pour dissiper au plus vite son trouble. Hors de question de montrer à Edward qu'il avait un certain pouvoir sur elle, ça non. Cruz était une femme libre, indépendante et sous l'emprise de personne et surtout pas de ces yeux bleus et de ce sourire enjôleur. Certainement pas. Cependant, renchérir en critiquant sans détour le manque criant d'intelligence du Poufsouffle n'était peut-être pas l'idée du siècle pour réchauffer l'ambiance. Cruz n'était pas connue pour son tact et elle risquait bien de le regretter, cette fois ci.

L'aveu de Cruz concernant l'envie qu'elle avait eut lorsqu'elle avait aperçu Edward en train de dormir ne sembla pas déplaire à ce dernier. Au contraire, un sourire béat s'invite sur ses lèvres et en attire un autre plus amusé sur celles de Cruz. Est-ce que ça lui vraiment plaisir, ce qu'elle vient de dire ? « Pour dormir, bien sûr. J’aurais pas dit non, dommage que tu n’aies pas pu le faire… » La préfète des Serpentards se met à rougir tout en se mordillant la lèvre inférieure. Oui, c'était vraiment dommage. Rien que d'y penser, elle avait subitement envie de remédier à la chose. C'était vraiment dommage que les garçons ne puissent pas se rendre dans les dortoirs des filles, elle qui était la seule occupante du sien. Néanmoins, le dortoir des cinquièmes années garçons était dépourvu d'occupants. Peut-être qu'ils pouvaient s'en servir ? Vu les relations qu'elle avait avec Luca, il était bien évidemment hors de question qu'elle s'invite dans le dortoir qu'Edward partageait avec lui. Pas après s'être donné tant de mal pour lui cacher leur relation. « On se rattrapera. » Murmura la brune avec un sourire, plus comme une formulation de pensées à voix haute que comme une réelle réponse. Une hypothèse, une supposition, une promesse. Souhait conforté par l'aveu soudain d'Edward qui exprime son regret de ne pas avoir été aux côté de la préfète pour le bal de Noël, comme c'était prévu initialement. Cette déclaration semble le gêner puisqu'il concentre immédiatement son attention sur ses devoirs, les joues écarlates. Cruz tente de le rassurer comme elle peut en glissant sa main sur la cuisse du jeune homme. Geste inné, non calculé, preuve d'une certaine complicité entre les deux Serpentards. Edward relève la tête, sa main vient se poser sur celle de Cruz alors qu'ils échangent un regard. Là, c'est du concret, c'est réel, ils n'ont même plus besoin de parler pour communiquer. Enfin, ça c'était jusqu'à ce que le sujet de l'échange de corps revienne sur le tapis. Il veut savoir dans quel corps elle s'est retrouvée ? Elle n'a pas envie de lui dire et elle peut être très bornée parfois. Ça lui pose un problème, tant pis pour lui. « Ouais. On peut dire ça. T’as quelque chose à cacher ? » Leurs mains se séparent aussi vite qu'elles s'étaient rejointes. Le ton est dur, l'atmosphère devient électrique. Impulsivité, brutalité. Ce n'est pas de cette manière qu'il obtiendra quelque chose de l'Espagnole. Cette dernière s'enfonce dans sa chaise et s'appuie contre le dossier. Ses prunelles sombres fixent celles de son camarade en un regard étrangement impassible. « Bien sûr que j'ai des choses à cacher et c'est mon droit. On n'est pas mariés, que je sache. » Mots durs, ton acerbe. Oui, elle a des choses à cacher et des détails bien plus important que l'identité du corps dans lequel elle s'était retrouvée. Est-ce qu'il s'était rendu compte qu'il ne savait rien d'elle, dans le fond ? S'était-elle rendue compte qu'elle ne savait rien de lui non plus ? Heureusement qu'ils n'étaient pas mariés, car le divorce semblait approcher à grands pas.

Cruz savait pertinemment dans quoi elle s'engageait en évoquant Keagan. Sujet de discorde certain, comme de nombreux autres. L'entourage du préfet de Serpentard ne plaisait pas à sa collègue, c'est le moins qu'on puisse dire. A part Luca - là encore un sujet sensible qu'il vaut mieux ne pas développer ici - et quelques autres, la brune n'appréciait guère les amis d'Edward. Keagan l'homme des cavernes, Daniela sa petite amie fade et inintéressante, Megan le petit oisillon tombé du nid ... Vous avez compris. Mais le pire restait Keagan, sans aucune forme de comparaison. C'est pourquoi elle ne pouvait s'empêcher de le tacler dans ses paroles, ce qui ne sembla pas plaire à son meilleur ami. « C’est quoi votre problème à tous les deux ? Vous vous comportez comme des gamins de 5 ans et ça devient vraiment chiant. » Le ton s'est durci, visiblement les deux préfets viennent d'abandonner le registre humoristique pour passer à de vraies joutes verbales. Cruz serra les dents, adoptant une moue boudeuse pour signaler son mécontentement. Elle ne se comporte pas comme une gamine de cinq ans, elle essaie juste de se mettre à la hauteur du cerveau primitif du Poufsouffle. Ce n'est pas bien compliqué à comprendre, si ? « Mon problème, c'est lui. » Maugréa la jeune femme entre ses dents, plus pour elle même que pour son interlocuteur. Clairement, Keagan lui pourrissait la vie depuis qu'elle était à Poudlard alors il était hors de question de lui faire le moindre cadeau. Même pas pour les beaux yeux d'Edward. D'autant plus que, d'après les paroles de ce dernier, le Poufsouffle avait déjà dû parler d'elle avec son meilleur ami et pas en bien de toute évidence. Elle n'allait pas se gêner de son côté. « Vous pouvez pas vous contenter de vous ignorer comme tout le monde ? » Edward croise les bras et baisse les yeux, visiblement contrarié par les chamailleries de Cruz et Keagan. Dans le fond, il n'a sûrement pas tort : par égard pour lui, la brune pourrait faire un effort et éviter le sujet en sa présence. Elle en est consciente et, pourtant, elle s'est jetée dedans la tête la première. Comme un besoin de rendre les choses toujours plus compliquées qu'elles ne le sont, de gâcher un bonheur à portée de main. Sans compter que, derrière les reproches que lui fait Edward, les siens ne sont pas loin. « C'est lui qui n'arrête pas de me chercher en cours ! T'as qu'à lui dire de se calmer. Mais visiblement, prendre ma défense ce n'est pas trop ton truc. » Voilà, c'est sorti. Cruz a le regard dur malgré son ton neutre. Cela la gêne, de n'être qu'une simple collègue du septième année aux yeux de ses amis. Cela la dérange, qu'il prenne la défense de son meilleur ami mais jamais la sienne. Est-ce qu'elle serait tentée de s'afficher à son bras devant toute l'école, clouant ainsi le bec aux rageux ? Peut-être, oui. L'idée lui est déjà passée par la tête. Mais si c'est pour que le Serpentard se range toujours du côté de Keagan, alors ce n'est la peine. Elle préfère se taire. Déçue ? Oui, sans doute.

L'orage qui s'est abattu sur la salle des préfets se permet une petite accalmie lorsque ses deux occupants avouent qu'ils auraient aimé passer le bal de Noël ensemble voire même la nuit entière. Révélations teintées de gêne, comme deux enfants. Cruz essaie de rassurer Edward en passant une main sur sa cuisse, geste qui semble lui plaire autant que le mettre dans l'embarras. Pourtant, le préfet relève les yeux et les plonge dans ceux de sa camarade. Pas besoin de parler, Cruz comprend. Elle aurait presque envie de lui dire qu'ils peuvent se rattraper ici et maintenant, qu'ils n'ont qu'à envoyer valser leurs devoirs et .... mais non. On pourrait les surprendre et puis, ce n'est peut-être pas le bon endroit ni le bon moment. D'ailleurs, l'éclaircie est de courte durée car déjà, les hostilités reprennent. L'Espagnole ne désire pas révéler à Edward l'identité du corps dans lequel elle s'est retrouvée au bal. Elle ne l'a dit à personne et ne compte pas commencer aujourd'hui. D'ailleurs, le jeune homme l'agace avec ses questions. Il pourrait simplement profiter d'un moment avec elle mais non, il insiste. Cruz se braque et, pour couper court à tout ça, décide d'appuyer là où ça fait mal. Ils ne sont pas mariés, pas même en couple, elle n'a pas à lui révéler quoi que ce soit. Au moins, Edward ne pourra pas lui reprocher de ne pas être claire sur ce coup là. Elle ne compte pas céder et compte aller aussi loin qu'il le faut pour gagner. Oui, elle voit ça comme un jeu et elle ne peut qu'en être le vainqueur. « C’est ton droit, en effet. Je pensais juste que je méritais un peu plus de sincérité de ta part. De toute évidence, je me trompais. » Déclare Edward d'un ton plus que froid. Ses paroles provoquent un levé de sourcils interrogateur chez Cruz, avant de lui faire carrément lever les yeux au ciel. Il ose remettre en doute sa sincérité alors qu'elle a l'impression de ne jamais avoir autant été elle-même qu'avec lui. Il est le premier garçon qu'elle embrasse et il considère cela comme de la fourberie ? Décidément, si Edward s'est trompé sur elle alors elle en a fait tout autant sur son compte. « Tu ne me penses pas sincère, c'est vraiment ce que tu es en train de dire là ? » Demande Cruz d'une voix qui cache mal sa déception, une fois n'est pas coutume. Elle n'aime pas qu'on remette son honnêteté et son intégrité en doute. D'accord, elle n'a pas cessé son petit jeu de séduction avec Luca, mais ça ne veut rien dire. Pas vrai ? C'est bel et bien Edward qui hante ses pensées, c'est bien à lui qu'elle pense le soir. Mais le principal concerné n'a pas l'air de s'en rendre compte. « J’ai dû me tromper sur toute la ligne. » Poursuit le jeune homme, visiblement affecté. Ils se font du mal l'un à l'autre, dans une course à celui qui portera le coup de grâce. Cruz est touchée, elle ne peut le nier. Cela lui fait tout drôle, d'ailleurs, de voir son humeur autant liée aux mots d'une personne. D'habitude, la brune s'en fout si sa sincérité est mise en doute : souvent, c'est à raison car elle dissimule bien trop de secrets. Mais on dirait que les habitudes sont en train d'évoluer. « Eh bien, si tu t'es trompé sur toute la ligne, je ne vois vraiment pas pourquoi tu perds ton temps avec moi. » Répond finalement la sixième année, avant de se tourner face à leur table de travail. Elle avance sa chaise et se saisit de sa plume. Edward a ses ASPICS à réviser et elle doit garder un niveau excellent, ils n'ont pas de temps à perdre l'un avec l'autre et elle s'en voudrait de lui gâcher son temps si précieux alors qu'elle n'est apparemment qu'une fille qui se joue de lui. Idiot.