Pandora Atkins & Ruby L. Marsh

The big tree

Elle était à bout.
D'abord, elle était fatiguée ; ça avait été une longue nuit blanche (ou plutôt argentée vu les reflets de Lune sur le sol du dortoir) durant laquelle elle n'avait absolument pas fermé l’œil. Enfin, si, vers cinq heures, mais elle n'avait pu dormir que deux heures avant de s'élever pour son cours d'étude des runes. Ensuite, elle était allée à la bibliothèque pour s'avancer pour un travail de défense contre les forces du mal : trois parchemins entiers, elle avait mal à la main d'écrire quand elle décida d'aller manger. Evidément, pour bien finir cette matinée, Oz avait tenu à manger avec elle ; mais encore une fois, il l'avait fatiguée avec ses gamineries. C'était finalement une matinée assez ordinaire pour Pandora, mais, puisqu'elle avait vraiment peu dormi, et qu'en plus elle avait eu quelques soucis avec Casey qui partageait sans chambre... C'étaient les gamineries de trop.
C'était justement ce à quoi elle songeait en quittant la Grande Salle pour profiter de quelques rayons de soleil à l'extérieur. C'était le mois de Novembre, il commençait à faire assez froid, en effet de la buée sortait de ses lèvres tandis qu'elle respirait l'air frais. Le parc était verdoyant, il avait beaucoup plu ces derniers temps et ces éclaircies étaient les bienvenues ; quelques derniers oiseaux chantaient sur des branches jaunies par l'automne, et quelque part, Pandora se sentit un peu mieux d'être dans la nature, ce qui lui rappelait son Irlande natale.
Les mains enfoncées dans les poches de sa cape, l'écharpe bleue et bronze remontée jusque sous le menton et les cheveux noués rapidement dans un petit chignon défait, elle devait avoir l'air d'être ou profondément énervée, ce qui dans le fond n'était pas complètement faux.
Mais quel était le vrai problème, finalement ?
Outre ses parents, situation à laquelle elle ne pouvait rien, le fond de sa colère, cet après-midi, c'était certes son insomnie, et Casey, mais c'était avant tout Oz ; Oz, comme d'habitude, la rendait infiniment heureuse ou, parfois, infiniment irritée. En fait, c'était en fonction de ses jours ; si elle était enjouée, elle adorait les stupidités du Poufsouffle, et se joignait même à lui dans ses divagations insensées.
Mais depuis quelques temps et surtout depuis cet été, Pandora n'y arrivait plus, la joie, la vraie joie, la gaieté, n'étaient plus de son quotidien et, en permanence comme anesthésiée et absente, toutes distractions, ou tous commentaires enthousiastes lui plombaient le moral. Comment faisait-on pour être heureux ? Elle se le demandait bien ; et Oz, cet être si dynamique et content, l'épuisait plus que les autres. A vrai dire, le pire de tout, c'était qu'elle n'arrivait pas à se détacher de lui.
Mais pourquoi ? Elle et lui, c'était comme la guerre ; des tensions, des énervements, puis la paix et l'euphorie des retrouvailles, et à nouveau, des tensions... Un rythme conceternant duquel elle n'arrivait pas à s'échapper. Elle tenait trop à lui, et lui à elle, mais elle avait de plus en plus l'impression que tout cela ne tournait pas rond. Peut-être parce qu'elle était de mauvaise humeur en ce moment, ou bien parce qu'elle comprenait que quelque chose, dans le fond de leur relation, clochait vraiment...
Il valait mieux qu'elle s'éloigne de lui. Cette conclusion, elle y était souvent parvenue ; mais bon sang, pourquoi n'arrivait-elle pas à l'appliquer ??
Exaspérée de réfléchir à cent à l'heure et de toujours finir sur la même note d'incapacité, Pandora se laissa tomber sur un banc sous un immense chêne, à l'est du château. Elle posa ses coudes sur ses genoux, pencha la tête en avant et posa ses mains sur son crâne, comme si elle se mettait dans une coquille pour échapper à ses pensées. Ce cocon, au milieu de ce beau parc imbibé de soleil, avec la fraîcheur de l'air qui l'aidait à se déconnecter de son esprit, lui fit un bien fou, alors elle se redressa, ferma les yeux et huma l'air qui était encore un peu humide, imprégné d'odeurs automnales, de feuilles mouillées, de champignons, d'herbe, et de toutes ces odeurs qui lui rappelaient avant.
Elle commença à se calmer, se détendit, ouvrit les yeux et sourit un instant, heureuse d'être seule. Heureuse... Cela restait tout de même un bien grand mot, disons qu'elle était simplement soulagée d'enfin avoir ce moment de paix, ce moment à elle, où elle pouvait remettre de l'ordre dans ses pensées. Même si, elle le savait, à peine rentrée entre les murs de Poudlard, tous ses problèmes referaient surface, elle pouvait être sûre qu'ici, elle aurait droit à ce moment de tranquillité rien qu'à elle.
"Profite Pandora, profite, en plus, il fait beau..."
Elle n'avait pas pour habitude de parler toute seule mais elle avait besoin de se rappeler que oui, il fallait qu'elle saisisse ce moment de quiétude. Alors elle poussa un profond soupir, comme pour libérer les quelques soucis qui trottaient encore dans son esprit, puis pencha légèrement la tête sur le côté en fermant les paupières à nouveau, afin de capter au mieux le rayon de soleil qui l'éclairait et de savourer cette légère sensation de picotement sur sa peau.

Quelle raison as-tu d'être triste?

Ruby, comme à son habitude, se baladait seule en dehors du château. Rien ne lui faisait plus de bien que de passer son temps en cours et à la bibliothèque, puis de trouver son petit moment dans l'après midi pour sortir s'aérer bien comme il faut et digérer par la même occasion.

Elle choisissait bien son moment, quand les rayons du soleil se pointent et percent la fraîcheur hivernale qui s'installait.
Elle avait l'impression de toujours en découvrir un peu plus sur l'extérieur de cette école, le lieu était sauvage et magnifique à explorer en toutes saisons.

Elle avait cette fois trouvé un vieux chêne contre lequel s'appuyer, face au soleil. Oui il y avait un banc mais il n'était pas forcément bien exposé tout le temps à la lumière réchauffante du soleil. Ou simplement n'avait-elle pas l'envie de s’asseoir, les élèves passent déjà leurs journées les fesses posées sur des bancs et des chaises il fallait bien travailler un peu ses gambettes aussi.

Frisk était d'humeur chantante aujourd'hui. Ruby adorait ça. Il coassait sur son épaule pour son plus grand plaisir.
Mais Ruby se voilait un peu trop la face. Elle était triste, et même les coassements de son gros Frifrisk ne lui faisait pas oublier les doux sourires de sa maman et les blagues vaseuses de son papa, qui lui manquaient affreusement. Elle ne les avait pas beaucoup vus puisqu'elle n'était rentrée qu'en août, suite aux événements de l'année dernière. Elle se demandait finalement si elle avait fait le bon choix de repartir loin d'eux pour une nouvelle année. De plus, elle n'avait pas revu beaucoup d'amis pour l'instant, elle se demandait si les relations qu'elle avait tissé étaient vraiment aussi fiables qu'elle n'avaient pensé...Sage ne l'avait pas encore abordée, il était entouré d'autres personnes la plupart du temps, Frances et Finley restaient beaucoup tous les deux, elle ne les avait pas beaucoup croisés...encore une autre déception en vue. Décidément le domaine social ne lui faisait pas beaucoup de cadeaux.

C'est alors que des bruits de pas la fit sortir de ses pensées. Quelqu'un s'était assis sur le banc sous le même chêne contre lequel elle se tenait. Elle fit ses grands yeux, interloquée par la délicate situation, et plus encore quand elle entendit que la jeune fille parla seule.

-"Profite Pandora, profite, en plus, il fait beau..."

Ruby retint un peu sa respiration et avala sa salive. Elle espérait vraiment ne pas déranger Pandora et surtout pas se faire remarquer dans cette situation particulière. La fille était, il semblerait, comme Ruby : à la recherche de calme loin des autres. Sinon, pourquoi serait-elle ici seule, et de quoi devrait-elle profiter, à part du beau temps.. ?

Ruby était curieuse de savoir si celle qui lui faisait dos derrière ce tronc était bien la Pandora qu'elle connaissait, (même si il y avait peu de chances pour qu'il y ait deux Pandora à Poudlard) elle jeta un petit coup d'oeil furtif : Cheveux longs clairs, Serdaigle, voilà toutes les informations qu'elle tenait d'elle dans l'instant. Oui c'était elle, Pandora de sa connaissance.

Elle aurait pu patienter pendant une heure comme ça mais Frisk, après une grande pause, avait jugé bon de recommencer sa chanson.
Aaaah...Frissssk nooon... ! Elle tira la grimace. Elle était repérée, elle avait senti sa semblable Serdaigle sursauté et se retourner.

Ruby se retourna alors à son tour et baissa sa tête sur un côté de l'arbre pour se faire voir de l'élève, un léger sourire aux lèvres et de grands yeux comme après une gaffe :
-Ah, Pandora, Bonjour...Désolée j'étais là, et puis tu t'es assise...
Ruby soupira.

Elle vit que sa camarade n'était pas enchantée de n'être plus seule. Même si cela lui fit penser d'abord que Pandora était finalement une forte tête qui ne l'appréciait pas trop, elle comprenait totalement, elle n'était pas d'humeur non plus à faire bonne image à la vue des autres. Elle effaça donc rapidement sa mine bienveillante en regardant le sol, ne sachant pas trop quoi faire. Après tout elle avait été là la première, si Pandora n'était pas contente, elle n'avait qu'à partir.
Elle était sortie de derrière l'arbre, et décida de s'assoir à son tour sur le banc.

Le dos courbé et la mine renfrognée, elle jeta un coup d'oeil à sa gauche : Pandora n'avait pas vraiment l'air bien non plus. Ruby pris Frisk dans ses deux mains et le fixa, les yeux vides. Puis elle sentit aussi un regard sur elle, cette fois moins négatif.

-Moi aussi je m'isole loin de tout quand je vais pas bien. Sauf que sûrement contrairement à toi, je n'ai pas à me cacher de beaucoup d'amis pour me permettre de parler toute seule...c'est p'têtre bien pour ça que j'en ai pas beaucoup, des amis

Puis elles se regardèrent brièvement toutes les deux en même temps. Ruby tourna les yeux au ciel et souri de lui avoir dit une telle bêtise.

Pandora Atkins & Ruby L. Marsh

The big tree

Comme c'était agréable, ce rayon de soleil en plein mois de novembre, un dernier moment de chaleur avant la dureté de l'hiver, comme c'était bon de...
Krooooaaaaaaaak.
Pandora sursauta. C'était bien une grenouille qui venait de chanter ? Une grenouille dans le parc, alors qu'elle était loin du lac ?
Elle fit volteface et croisa le regard de Ruby, qui semblait toute penaude de l'avoir ainsi dérangée. Mais Pandora pensait à d'autres choses, par exemple, depuis combien de temps était-elle là ? L'avait-elle entendue parler à voix haute, et toute seule en plus ? Ça lui apprendra à se jeter sur le premier banc venu et à ne pas vérifier. Elle qui voulait de la tranquillité, la voilà bien embêtée ; d'un autre côté, dans le fond, elle se sentit un peu détendue de savoir que ce n'était pas quelqu'un de proche. Elle n'avait clairement pas envie de se mettre à papoter, or Ruby était... une connaissance, finalement, elles n'étaient pas proches, même si elles s'étaient déjà croisées et adressées la parole à plusieurs reprises. Au moins n'allait-elle pas se sentir obligée de maintenir une conversation, comme à chaque fois qu'elle était en présence d'amis.
"Moi aussi je m'isole loin de tout quand je vais pas bien. Sauf que sûrement contrairement à toi, je n'ai pas à me cacher de beaucoup d'amis pour me permettre de parler toute seule...c'est p'têtre bien pour ça que j'en ai pas beaucoup, des amis."
Pandora fronça les sourcils. C'était bien là la plus grosse stupidité qu'elle avait entendue de la semaine ; et pourtant, elle en entendait souvent, des idioties, avec Oz à ses côtés.
Quand elle croisa son regard, Pandora y lut une note de mélancolie, puis Ruby leva son visage vers le ciel et elle sut que, bien qu'elle ait rompu sa tranquille solitude, Ruby n'allait pas être l'une de ces présences envahissantes desquelles elle avait juste envie de fuir. En fait, c'était même l'inverse ; la note de tristesse qu'on percevait dans son visage donnait envie à Pandora de rester un petit peu sur ce banc.
La compagnie d'une âme en peine valait bien mieux qu'un chagrin en solitaire.
"Oh, tu sais, l'amitié est un concept vraiment abstrait. Je suis franchement pas sûre d'avoir plus d'amis que toi."
En effet, finalement, qui savait vraiment les problèmes qui la taraudaient ? Qui avait essayé de comprendre pourquoi elle s'était renfermée ? Pas grand monde, presque personne en réalité. Dire bonjour à des gens, manger avec eux, partager quelques blagues pendant les cours, tout cela ne valait rien dire.
"Donc, je suppose que si tu étais seule derrière cet arbre avec ton... ton crapaud, c'est que tu es triste ?" reprit-elle sans cesser de la regarder. Après tout, c'était ce que venait d'avouer Ruby, et sa façon de regarder les quelques nuages qui se promenaient là-haut ne trompait personne.
Seulement Pandora voulait, au fond d'elle, comprendre le pourquoi. Après tout, de ce qu'elle savait, Ruby n'avait pas vraiment de raison d'être malheureuse. Elle était douée en cours, elle avait une bonne famille, et puis, si elle n'avait pas d'amis pour l'assaillir de banalités au quotidien, elle disposait d'une situation assez agréable.
Puis Pandora posa ses yeux sur l'herbe autour d'elles. En réalité, l'herbe est toujours plus verte ailleurs. Peut-être que Ruby avait davantage de raisons qu'elle de s'être isolée. Même si elle doutait que son père soit parti sans nouvelle, même si elle doutait qu'elle avait un meilleur ami aussi fatiguant qu'Oz.
"Bon, d'un autre côté, c'est rare de se promener seul sans avoir quelques problèmes. Tu as eu une mauvaise note en sortilèges ?" demanda-t-elle en enlevant son écharpe ; car elle commençait à avoir chaud avec tout cet ensoleillement.
Pandora esquissa un sourire ironique. Elle savait bien que ce n'était pas pour cela que Ruby avait cet air affligé, mais elle avait beau y réfléchir, elle ne comprenait pas ce qui pouvait lui faire de peine.

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Quelle raison as-tu d'être triste?

Là sur le banc, Ruby regardait les nuages gris se mouvoir derrière les branches de l'arbre, nues de leurs feuillage à présent mort et décomposé sur le sol, qui allait nourrir herbes, terre et insectes.

Pandora avait eu un visage défiguré par l'agacement quand Ruby avait daigné s'ouvrir un peu à elle. Elle savait bien qu'en général, elle n'avait pas un don pour établir une bonne connexion, alors pourquoi avait-elle laissé ces mots lui échappé de sa bouche? Surtout quand la personne cherche de la tranquillité et qu'elle montre clairement qu'elle ne veut pas être dérangée.
Enfin, cela ne lui faisait rien, Pandora allait surement partir en faisait mine de s'enfuir loin d'une looser en lui envoyant un dernier regard méprisant. Elle avait l'habitude, cela ne faisait rien.

Tout ce qu'elle voulait, c'était retrouver les seuls qui l'aimaient sur cette planète, ses parents.

Même si Ruby avait une lourde carapace et savait bien vivre le rejet d'autrui, elle n'était malheureusement pas faite de marbre mais de chair et d'os, le tout guidé par un coeur aux battements faibles et d'un cerveau aux terminaisons nerveuses en suractivité, ainsi elle connaissait comme toutes adolescentes de son âge des moments de faiblesse. Seulement en général, elle se débrouillait pour s'éloigner de tous afin de ne le montrer à personne.

A sa grande surprise, Pandora n'était toujours pas partie, elle prit même la peine de lui répondre :

-"Oh, tu sais, l'amitié est un concept vraiment abstrait. Je suis franchement pas sûre d'avoir plus d'amis que toi."

Tiens, c'était intéressant. Ruby n'avait jamais aimé l'abstrait en général, que ce soit conceptuel ou artistique. Elle jetait son regard dans le vide, tout en l'écoutant attentivement continuer de dire :

-"Donc, je suppose que si tu étais seule derrière cet arbre avec ton... ton crapaud, c'est que tu es triste ?
Bon, d'un autre côté, c'est rare de se promener seul sans avoir quelques problèmes. Tu as eu une mauvaise note en sortilèges ?"

Elle posa ces questions en la regardant avec insistance, puis elle enleva son écharpe.
Ruby la regarda l'ôter de son cou si fin "Sérieusement, elle a chaud? Son pouls doit être élevé, serait elle stressée par la situation?"
Ou les gens n'étaient simplement pas aussi frileux qu'elle.
Elle rit, Pandora avait vraiment un sacré culot, elle ne la pensait pas aussi piquante en lui ayant tenu quelques mots aux détours de son repère à livres. Elle prit plaisir à lui répondre :

-Comment t'as deviné ? J'ai eu un Effort Exceptionnel en Astronomie, tu te rends compte ! Elle leva les yeux aux ciel et retourna à Pandora
J'ai tellement l'air d'une première de la classe? Merci c'est flatteur mais pour ta gouverne c'est pas le cas. Et puis je peux me retrouver seule sous un arbre avec mon crapaud sans être triste, je le fais quotidiennement. En fait je suis seule très souvent, ma vie serait bien triste si cela signifiait que je suis mal tout ce temps

Mais c'était de bonne guerre, tout comme Pandora à son égard, Ruby se demandait bien qu'est ce qui pouvait chagriner une belle fille à succès, intelligente et entourée à souhait? Les gens n'avaient-ils pas peur de la solitude en général? Alors pourquoi semblait-elle non satisfaite de tout ce beau monde qui occupait sa vie? Ruby voulait tout savoir, mais pour cela elle allait devoir se dévoiler un minimum.

-Nan en fait, aujourd'hui, je me suis demandée si j'allais un jour compter pour quelqu'un d'autre que mes géniteurs. La solitude c'est cool, mais des amis, on en a besoin aussi, dans une vie. Je me demande si un jour j'aurais le droit aussi d'avoir quelqu'un avec qui rire et confier mes secrets lourds à porter. Bah je me plains pas tu sais, j'ai jamais rien demander à personne moi, après tout j'ai la chance d'être une sorcière. Je pourrais me plaindre le jour où les livres n'existeront plus, avait elle conclu en souriant à Pandora.

Ruby ne racontait jamais de telles choses aux autres d'habitude. Ce moment était particulier, et elle ne risquait plus grand chose, elle s'était laissé allée. Mais elle allait peut être le regretter quand elle aurait repris ses esprits, plus tard, dans son lit pendant ses habituelles cogitations nocturnes par exemple.

-Si le coeur t'en dis, tu peux vider ton sac, quelles raisons tu as d'être triste toi?Tout ce que tu diras restera sous ce chêne, de toutes manières à qui j'irais le raconter..?

Pandora Atkins & Ruby L. Marsh

The big tree

Pandora fut surprise que Ruby lui parle de son sentiment de solitude avec une telle légereté, comme si dans le fond, la jeune fille était résolue, comme si elle avait abandonnée tout espoir et qu'elle acceptait sa condition en toute paix d'âme. A vrai dire elle semblait si détachée qu'elle finit sur une note d'humour qui ne manqua pas de faire sourire Pandora. C'est qu'elle savait faire rire, en plus. La jeune fille comprenait moins pourquoi Ruby n'arrivait pas à se faire d'amis, d'autant qu'elle ne semblait plus tellement timide, au contraire, elle s'ouvrait à elle et l'invitait même à en faire autant.
Pandora garda le silence un moment après la demande de Ruby. Elle se mit à contempler le parc, devant elle, avant de tourner la tête sur l'épaule de Ruby et regarder son petit crapaud. Ensuite, elle se leva, s'étira un instant, avant d'hésiter.
Elle pouvait soit partir sans plus rien ajouter, car au fond elle détestait parler de ce qu'elle ressentait, elle préférait fuir, comme d'habitude, et rester seule avec ses problèmes. Après tout, parler à haute voix, c'était concrétiser les choses, c'était donner un caractère réel à ses soucis ; tant qu'ils restaient internes, ils n'étaient pas vrais, du moins, pas matérialisés.
Ou alors, elle pouvait se retourner, regarder Ruby dans les yeux et tout déballer d'un coup, pour être soulagée, pour être libérée, quitte à pleurer, quitte à s'énerver, quitte à la regretter plus tard. Ruby n'avait pas tort, de toute façon, il n'y avait qu'elles et ce beau chêne, les deux seuls témoins de ses malheurs, et tout s'arrêterait là, et il n'y aurait pas de conséquence, et peut-être, peut-être, que tout irait un peu mieux.
Elle poussa un lourd soupir et se retourna pour faire face à Ruby, droite comme un i, les mains enfoncées dans les poches de sa cape. Elle regarda Ruby un moment, prit son inspiration pour entamer son récit, puis souffla sans sortir un seul mot, avant de reprendre son inspiration, de la retenir un moment, et de souffler à nouveau, comme si elle ne parvenait pas à prononcer une syllabe.
Elle finit par détacher d'une main pressée son chignon, et ses cheveux tombèrent en cascade ondulée sur ses épaule ; les rayons de soleil les firent briller de reflets dorés, et elle prit une mèche qu'elle inspecta distraitement. Elle se mit enfin à parler.
"Je te rejoins sur ce point : je ne serai réellement malheureuse que lorsqu'il n'y aura plus de livres, car, pour l'heure, c'est grâce aux livres que je ne craque pas. Il n'y a que eux pour me permettre de respirer, car ce sont les seuls qui ont les réponses à mes questions.
Mais quelles questions ? et bien, d'abord, si la magie est vraiment bonne, si elle guérit vraiment les maux, ou si elle n'en crée pas davantage, ou si elle n'est pas destructrice avant tout. Tu vois, toi tu dis que tu relativises en te disant que tu as de la chance d'être une sorcière, mais moi, j'ignore si je dois vraiment m'en réjouir. Si on était des moldus, tu ne crois pas qu'on aurait pu avoir moins de soucis ? Moins de mort, moins de tragédie ?
Ma famille s'est dissoute à cause de la magie. Et je pense que, si personne n'avait été sorcier, elle serait encore unie, et moi, je serais encore heureuse. Et je me dis aussi que, si je n'étais jamais venue à Poudlard, je n'aurais jamais rencontré Oz, et je me prendrais beaucoup moins la tête ; enfin, mince quoi, pourquoi est-ce qu'à cause de lui je me pose tout le temps plein de questions ??? C'est comme s'il était tout le temps dans ma tête alors que j'essaie de l'en chasser. C'est dingue ça, tu crois pas, d'avoir un garçon dans la tête contre ton gré ? Décidément, si j'étais moldue, tout serait beaucoup plus simple. Tu crois toi que les moldus ont un sorcier dans la tête ? Non, moi je crois que les moldus n'ont jamais de problème, en tout cas, ils en ont moins. Car un moldu, ça vit sa vie simplement, sans se poser plein de questions tout le temps, jusqu'à n'en plus dormir la nuit..."
On aurait dit qu'elle s'adressait à ses cheveux plutôt qu'à Ruby, mais c'était sûrement là sa façon de se sentir dans une bulle et plus à l'aise avec la vérité.
A la fin de son monologue, elle lâcha sa mèche et planta son regard dans les yeux de Ruby. Finalement, pas de larmes, juste une légère amertume et colère finales, mais heureusement, elle n'avait pas tout dit, pas en détails, alors elle put aisément se contrôler, et paraître relativement stoïque par rapport au reste.
Mais ce qui la frappa le plus, ce fut le sentiment de légèreté qu'elle ressentit immédiatement, comme un poids en moins ; pas toute la montagne en moins, mais quelques pierres, et déjà cela la faisait sentir un peu plus tranquille. Alors, sans qu'elle put le contrôler, elle esquissa un sourire, un vrai sourire, un sourire de joie.
"J'espère que tu ne vas pas me prendre pour une folle... Je ne sais pas, peut-être qu'il n'y a que les fous pour remettre en cause la magie et pour penser à quelqu'un tout le temps ?"

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Quelle raison as-tu d'être triste?

Cet instant, aussi fragile que les pétales d'une fleur en hiver, dont les flocons de neige glisserait jusqu'à fondre et s'écraser sur le sol en gouttelettes d'eau froide, se retrouvait isolé dans une bulle, comme virevoltante au dessus de l'école. Ce moment n'appartenait qu'à ces deux adolescentes aux cœurs lourds de peines et de questionnements, qui tentaient de rompre leur délicate solitude intérieure. Et jamais personne ne le saurais, ces quelques minutes leurs appartenaient.
S'offrait à elles l'opportunité de voir leurs armures si précieuses tomber à leurs pieds, et révéler quel corps émotionnels se cachaient ainsi secrètement en dessous, pour ainsi les débarrasser de tous leurs lourds fardeaux.

Le poids de la carapace de Pandora devait être sacrément lourd, à en voir comment celle ci fût déstabilisée quand elle la laissa tomber. Voir la jeune fille si gênée et hésitante à l'idée de raconter ses tracas inspira à Ruby, un escargot à qui on enlève sa si belle coquille : nu comme un vers ça ne ressemble plus qu'à une limace. Bien que la plupart aurait trouvé ça dégoutant, même que Pandora n'aurait surement pas apprécié la comparaison, Ruby les aimait bien ces deux mollusques là. Elle jouaient avec eux dans son jardin étant petite.

Pandora regardait, puis s'étirait, puis se rasseyait, elle était bien trop agitée pour être en paix, Ruby observa en silence cet état non serein de sa camarade. Celle ci semblait presque sur le point de déguerpir les jambes à son cou, le regard submergé de questions et de doutes.
Il n'y avait pas de quoi se moquer, Ruby aurait surement été aussi stressée en temps normal avec la plupart des autres gens.

Pandora s'était enfin décidée à se tenir droite et tranquille, en face de Ruby qui avait pivoté de sorte à être réceptive à son récit, les mains d'abord vissées au fond de ses poches.
Elle inspira et expira plusieurs fois, comme ci elle allait se jeter avec son balais au dessus d'un très grand vide. Les mots restaient coincés.
Puis elle trouva une solution : Quand on a peur de s'adresser à un certain public, le tout c'est de se concentrer sur un détail, un subterfuge à ce public. Elle trouva le bon moyen de délier sa langue : s'adresser indirectement à Ruby, faire comme ci elle n'était pas là. Elle sortit alors ses mains de ses poches et défila ses cheveux de son chignon pour jouer avec une de ses mèches claires.

Ruby ne la quittait pas trop des yeux, il fallait lui montrer qu'elle restait à l'écoute, sans quémander de contact visuel, donc rien qui lui serait intrusif ou perturbant à son lâché prise. Pandora se lança.
Il y avait beaucoup de choses sur lesquelles rebondir et répondre mais Ruby aller essayer d'être concise.
Au moins, première chose, elles étaient en accord pour la valeur des livres et ce qu'ils représentaient pour toutes les deux : ça leurs faisait un gros point commun.

«Tu vois, toi tu dis que tu relativises en te disant que tu as de la chance d'être une sorcière, mais moi, j'ignore si je dois vraiment m'en réjouir. Si on était des moldus, tu ne crois pas qu'on aurait pu avoir moins de soucis ? Moins de mort, moins de tragédie ? [...] Décidément, si j'étais moldue, tout serait beaucoup plus simple. Moi je crois que les moldus n'ont jamais de problème, en tout cas, ils en ont moins. Car un moldu, ça vit sa vie simplement, sans se poser plein de questions tout le temps, jusqu'à n'en plus dormir la nuit...

La magie était-elle si bienfaitrice qu'elle n'y parait, en effet la question était loin d'être stupide, même si pour Ruby les choses avaient été bien différentes : La magie avait été salvatrice pour elle, elle l'avait sorti de son enfer parmi les moldus. C'était surtout une question de vécu et de subjectivité.
Pandora raconta alors que la magie avaient créer un conflit qui avait divisé et brisé sa famille, et qu'un certain sorcier "Oz" prenait beaucoup de place dans sa tête et de son temps.. Elle avait effectivement toutes les prédispositions pour douter de sa nature de sorcière.

Il est vrai que dans les moments de difficultés, l'on préfère toujours la simplicité, car l'ignorance nous protège souvent de la dure réalité. Mais une chose dont Ruby était sûre, il ne valait pas mieux être moldus que sorcier, ou sorcier que d'être moldu. Les deux mondes avaient leurs lot de souffrances, et aucun n'était supérieur à l'autre. Elle en savait un rayon sur les non-sorciers pour affirmer que Pandora n'aurait pas eu une vie forcément plus tranquille..Même si les malheurs familiaux sensibilisaient beaucoup Ruby, elle pouvait affirmer que la magie était une raison bien plus noble pour une famille d'être en désaccord. Les faits devaient être certes terriblement durs à vivre, les yeux de Ruby devinrent vitreux et humides, sans pour autant donner l'air de pleurer, on pouvait juste y lire une profonde et silencieuse compassion. Mais Pandora devait cesser de se bercer d'illusions.

Elle regardait maintenant Ruby dans les yeux.

J'espère que tu ne vas pas me prendre pour une folle... Je ne sais pas, peut-être qu'il n'y a que les fous pour remettre en cause la magie et pour penser à quelqu'un tout le temps ? »

-Entre folles t'as pas de soucis à te faire, la taquina Ruby.
Je suis désolée pour ta famille. Mais tu sais, les parents, les familles, ça se séparent même chez les moldus, et souvent pour des raisons encore moins nobles : certains se quittent pour des raisons d'argent, de tromperie, loin de toute loyauté. Tu n'aurais pas été plus heureuse en étant moldue. La souffrance ça va bien au delà de toutes ces frontières, malheureusement.
Aujourd'hui tu en veux à la magie car elle a détruit une chose à laquelle tu tenais beaucoup. Pourtant grâce à elle, tu pourra aussi créer et construire d'autres belles choses

Ruby repensa soudainement aux cachots. Elle posa sa main sur sa manche, dessous se trouvait une cicatrice assez conséquente de l'année dernière.

Et puis je dois dire que mon sang de moldu ne m'a pas tellement donné avantage jusqu'à maintenant, dit elle avec un sourire désolé.
Si ce n'est pas ma famille qui a volé en éclat, c'était mes plus précieux amis qui m'ont complétement oubliée.
Elle soupira et s'affala sur le banc.
Ah la la, tellement de raisons d'être triste sur cette terre ! dit elle dans un rire ironique. Moi je dis merci à la magie d'exister ! Avant d'en connaître l'existence, c'était encore plus dur que maintenant de trouver des couleurs au monde.
Après tout que serais-je sans mon Frifrisk? elle lança un regard amusé sur son batracien préféré.

Pour dédramatiser la situation, elle fit une mine étonnée avant de sortir à Pandora :
Et pour te répondre, oui je trouve ça carrément dingue que tu sois amie avec le magicien d'Oz! Et à vrai dire je ne suis pas sure de la nature de votre relation vu comme tu en parle...mon petit doigt me dit que tu ne serais pas si enchantée que ça à l'idée de ne l'avoir jamais connu

C'est le genre d'attitude qu'avaient les gens qui n'acceptent pas leurs sentiments envers quelqu'un, pensait Ruby. Elle était peut être elle même bien placée pour le savoir...

Pandora Atkins & Ruby L. Marsh

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Il y avait quelque chose de bienveillant, dans les grands yeux noisette de Ruby. C'était peut-être parce qu'ils étaient noisette, justement, et pas bleus et froids ; non, ils étaient chaleureux, doux, et puis le soleil les illuminait, et ils semblaient irradier de bonté. Pandora fut touchée par ce seul détail, avant de comprendre qu'au-delà de son regard, il y avait tout simplement les paroles de la Serdaigle ; des paroles peut-être simples, dans le fond, mais des paroles qu'elle avait besoin d'entendre.
Alors quoi, il suffisait de se confier pour avoir un retour ? Elle qui cherchait les réponses dans des livres ou au travers de questions indirectes, venait d'avoir un avis, un précieux avis qui répondait à son angoisse, ou plutôt, qui y mettait un premier coup. Comme un immense incendie incontrôlable dans lequel on jette un premier jet d'eau. Ça n'avait peut-être l'air de rien, c'était peut-être même inutile face au désastre qui s'étendait. Mais c'était le premier jet d'eau, celui qui montrait que oui, l'incendie commençait à être pris en main. C'était l'annonce d'un début de contrôle. Et un contrôle sur toute cette angoisse et tous ces doutes, c'était simplement le miracle qu'attendait Pandora. Ruby venait de lancer la première offensive à son malheur, et c'était tellement inattendu, et tellement lourd de sens, que Pandora passa brièvement un bras sur ses yeux.
Il ne fallait pas non plus commencer à pleurer, car elle saurait qu'elle ne pourrait plus s'arrêter après quelques larmes.

"Je suis désolée pour ta famille. Mais tu sais, les parents, les familles, ça se séparent même chez les moldus, et souvent pour des raisons encore moins nobles : certains se quittent pour des raisons d'argent, de tromperie, loin de toute loyauté. Tu n'aurais pas été plus heureuse en étant moldue. La souffrance ça va bien au delà de toutes ces frontières, malheureusement.
Aujourd'hui tu en veux à la magie car elle a détruit une chose à laquelle tu tenais beaucoup. Pourtant grâce à elle, tu pourra aussi créer et construire d'autres belles choses."

La souffrance était donc universelle, et proportionnelle ? Somme toute, un moldu pouvait tout à fait souffrir autant qu'un sorcier, même sans magie, car il trouverait une source de souffrance ailleurs et toute aussi forte ?
Pandora n'avait jamais envisagé cet aspect et pourtant il semblait on ne peut plus évident ; ce n'était pas tant la sorcellerie, c'était l'humanité.
Puis Ruby posa une main sur son bras, ça n'avait peut-être l'air de rien, mais associé à ses dires sur sa vie moldue, Pandora comprit que Ruby avait subi les cachots, elle aussi, chose qu'elle ignorait complètement. Elle pencha légèrement le visage sur le côté, comme si cette révélation lui était lourde et pesante ; Ruby, qui se tenait là sur ce banc avec tout son coeur et toute sa sympathie, alors même qu'elles ne connaissaient que très peu, venait la consoler, venait l'aider. Mais c'était à Pandora de l'aider, ou en tout cas, comme pouvait-elle expliquer ses "problèmes" alors qu'elle n'avait jamais connu l'horreur des coups et de la torture ?
Heureusement, Ruby semblait minimiser son vécu, mieux, même, elle faisait preuve d'un optimisme et d'une foi immenses : elle remerciait la magie.
Pandora comprit en définitive que le principal responsable des maux de ce monde, c'était l'homme en tant que tel, et qu'il n'existe pas de bonne ou de mauvaise magie, mais simplement des gens bienveillants, comme Ruby, et des personnes malveillantes.
C'était ce que sa mère lui avait toujours répété, mais son père ne semblait jamais avoir songé à cette possibilité. Il était parti sans se remettre en question.

"Et pour te répondre, oui je trouve ça carrément dingue que tu sois amie avec le magicien d'Oz! Et à vrai dire je ne suis pas sure de la nature de votre relation vu comme tu en parle...mon petit doigt me dit que tu ne serais pas si enchantée que ça à l'idée de ne l'avoir jamais connu."

Pandora ne put s'empêcher d'éclater de rire. Le magicien d'Oz, c'était plutôt flatteur comme surnom pour un garçon pareil ! Puis Ruby insinua qu'il y avait plus que de l'amitié et Pandora ne put faire autrement que de se braquer aussitôt, comme à chaque fois que quelqu'un essayait de creuser la nature de ses sentiments.
Non mais, sérieusement, des histoires d'amour, elle en avait lu des tonnes dans sa jeunesse, et ils étaient loin d'être comme tous ces héros de roman qu'elle avait rencontrés dans ses lectures. Oz n'était pas son prince charmant à dos de cheval blanc ; Oz était son meilleur ami, même plus, il savait tout d'elle et elle tout de lui, et s'il avait une épée et un titre de noblesse, elle l'aurait su depuis longtemps. Quant à elle, elle n'avait pas de grands yeux azur et de longs cheveux blonds, elle était loin d'aimer les robes à froufrous et puis, même en sortant des clichés, en quoi correspondait-il à Lysandre, et elle à Hermia ? Il n'était pas dingue d'elle, prêt à se confronter au règlement pour elle, et Pandora n'était pas fille d'un roi. Même les drames shakespeariens ne s'appliquaient pas à leur relation ; en quoi pouvaient-ils se définir comme un couple ?
Ils étaient juste deux amis, et Pandora se prenait simplement trop la tête à essayer de comprendre ce qui pouvait se cacher en-dessous. De toute évidence, il n'y avait rien en-dessous.

"Oh tu sais, tu n'es pas la première à me dire ça. Alors certes, effectivement, si je ne l'avais pas rencontré, il manquerait peut-être quelque chose à mon quotidien mais, de toute façon, je ne l'aurais pas su, et je me serais très bien portée..."

Elle esquissa un sourire amusé en imaginant sa vie sans Oz. Une vie plus plate, moins colorée. Plus tranquille, sûrement.

"Ne cherche pas de sentiments là-dessous, tu n'es pas la première à essayer et crois-moi, tout le monde a perdu ! ironisa-t-elle ensuite en revenant s'installer à côté de Ruby.

Elle tapota des pieds un instant, puis se tourna à nouveau vers la Serdaigle. Son visage lui inspirait une confiance nouvelle, qu'elle n'avait jamais remarquée jusqu'alors. Et pourtant, cette fille émanait la bonté d'âme. C'était même fou qu'elle ne l'ai jamais remarqué auparavant.

"Je te trouve très honorable. Regarde, tu donnes des conseils à une fille que tu ne connais presque pas, sans la juger, en toute honnêteté, tu l'écoutes se plaindre alors que tu as connu l'enfer. Je dois te paraître arrogante, ou stupide de me plaindre pour des choses qui ne valent rien en rapport à ce que tu as traversé. Crois-moi, tu es admirable, et franchement, je ne comprends pas comment tes amis ont pu te tourner le dos. Tu vaux sûrement bien plus qu'eux. Et dans ce cas, c'est une chance, qu'ils se soient éloignés : tu ne seras plus entourée d'idiots."

Puis elle jeta un oeil à son crapaud, comment s'appelait-il, déjà ? Fri... Firz... Bon, peu importait. Elle tendit une main vers lui, une main hésitante car elle ne portait pas spécialement les batraciens. Frifrisk se mit alors à croasser et Pandora sursauta ; elle recula instinctivement sa main avant d'éclater de rire. C'était vraiment une après-midi spéciale, mais elle apprit que spéciale ne voulait pas forcément dire mauvaise.



.

Quelle raison as-tu d'être triste?

Les rayons de soleil s'intensifiaient à cet instant.

Rien de mieux ne pouvait tomber autant à point pour réchauffer la scène dramatique qui avait lieu ici, dont les seuls spectateurs étaient en fait un chêne et les deux actrices elles même : Pandora et Ruby avaient toutes deux un rôle à jouer dans ce scénario, écrit de toute pièce par les circonstances de la vie.

Ruby vit Pandora se frotter le visage à l'aide de son coude. Était ce la friction de son bras contre sa peau qui crééa cette soudaine rougeur, ou Pandora était-elle au bord des larmes?
La cadette tourna la tête d'un air désolé, elle espérait ne pas avoir encore manquer de tact, elle disait souvent avec trop d'objectivité ce qu'elle pensait, ce qui en vexait plus d'un.

La belle Serdaigle semblait encore plus mal quand elle apprit que Ruby était une née moldue, et donc que son année précédente avait été de toute évidence longue et éprouvante.
Ruby s'en voulu fortement sur le coup. Elle détestait s’apitoyer sur son sort comme un chien battu. Ses traits de visage s'était tendus, la mâchoire resserrée et ses poings fermés, mais elle sût rapidement se ressaisir et rattraper la trop sérieuse tournure que prenait le dialogue ; Elle avait comme à son habitude su parfaitement faire reprendre le dessus à l'humour et la bonne humeur. C'est pourquoi Pandora remarqua à peine cet état d'esprit.
Maîtriser les situations était inscrit dans ses codes, rectifier les paramètres en perdition était un terrain battu pour elle. Il ne lui était jusqu'à présent que rarement arrivé de perdre le contrôle d'elle même, depuis son entrée à Poudlard du moins. Cela se résumait à des petite crises de nerf personnelles quant à des résultats scolaires ou d'exercices de pratique en sortilèges qui ne la satisfaisait pas, ou encore de situations embarrassantes où elle n'arrivait plus à gérer sa timidité, sans compter les fois où elle passait des nuits à l'infirmerie à verser des larmes silencieusement, recroquevillée sur elle même et tremblante : Elle ne pouvait pas contrôler ses spasmes douloureux , seules séquelles qu'avait provoqué le choc du sortilège Doloris. Elle prenait un traitement pour gérer cela au dessus de ses forces, seul point défaillant à la gestion de sa vie.
Mais ça, même sans armure, c'était caché dans une chaussette : à la vue de tous, mais d'une vérité ignorée, comme une chaussette. On la sait bien là sous ses chaussures, sans trop en connaitre la couleur.

Ruby chassa ces pensées de la tête. Elle alla chatouiller son interlocutrice avec le sujet délicat qui portait le nom de Oz. Pandora avait rit aux éclats en entendant son allusion au fameux magicien du même nom tiré tout droit d'un vieux conte.
Même si son visage était détendu d'un sourire amusé, elle se crispa instantanément.
Elle lui répondit sans trop grande surprise que bien d'autres avaient fait le rapprochement, à tord, qu'il n'y avait rien de plus que de l'amitié.

Elle se réinstalla prêt de Ruby et tapotait des pieds. Elle la regardait minutieusement maintenant, Ruby était loin de s'attendre à ce qu'allait lui dire sa semblable :

"Je te trouve très honorable. Regarde, tu donnes des conseils à une fille que tu ne connais presque pas, sans la juger, en toute honnêteté, tu l'écoutes se plaindre alors que tu as connu l'enfer. Je dois te paraître arrogante, ou stupide de me plaindre pour des choses qui ne valent rien en rapport à ce que tu as traversé. Crois-moi, tu es admirable, et franchement, je ne comprends pas comment tes amis ont pu te tourner le dos. Tu vaux sûrement bien plus qu'eux. Et dans ce cas, c'est une chance, qu'ils se soient éloignés : tu ne seras plus entourée d'idiots."

Ruby se retourna vers Pandora à ces paroles ; ses yeux brillaient de milles feux, ceux de ses soudains sentiments. Elle ne put s'empêcher de lui sourire comme rarement elle avait adresser de sourire à quelqu'un. Mais elle se mit à rougir, et enfoui un peu plus son visage dans le tour de son écharpe. On lui disait si rarement de tels compliments, c'était pour elle incroyable de s'être fait appréciée par une élève aussi reconnue socialement. "Une fille comme Pandora me trouve admirable? Ouaah..."

-Mais non voyons tu n'es pas arrogante. Tu es très gentille toi aussi...et puis tout le monde a ses raisons d'être malheureux, je ne suis pas une martyre haha

Quant à ses deux anciens prétendus "amis", elle avait surement raison, il valait mieux que Ruby ne soient plus avec eux. Aujourd'hui, Ruby se rendait réellement compte à quel point elle leurs accordait encore une place trop pesante sur sa vie. Il était temps qu'elle les oublie, il était temps de penser cette blessure là.
Après tout, elle s'était fait d'autres nouveaux et vrais amis, Finley, Frances, Sage et bien d'autres, et Pandora en faisait dorénavant partie elle aussi.
Elle comprit qu'elle devrait, à partir de maintenant, accorder plus de confiance en l'humanité, sans forcément penser qu'on l'a laisserait tomber un jour ou l'autre, car des gens biens ça existe partout, tout comme les mauvais, on peut tomber sur les uns comme sur les autres. Mais pour rencontrer les bonnes personnes, il fallait laisser leurs chance de rentrer dans sa vie sans qu'elle résiste en bloc.

-Merci...lâcha t-elle un peu nostalgique après un court silence.

Pandora avait essayé de toucher Frisk, elle avait quelques appréhensions envers son batracien. C'était normal beaucoup n'aimaient pas trop ça, mais Ruby elle, les adorait.
Frisk coassa, se qui fit sursauter Pandora : les jeunes filles rirent ensemble.
Leurs rires s'élevèrent dans les airs.

Elle ne savait plus trop quoi dire, elle avait déjà bien assez empiété sur le temps et l'espace de son aînée et craignait de la déranger.
Elle décida alors de laisser le silence et la légèreté du moment les guider vers l'issue de cette belle rencontre, qui avait mis du baume au cœur à Ruby. Elle se sentait encore moins seule désormais.