Tracy Bennet avait-elle cru tout ce qu’il disait ? Il semblerait, car elle se voulait rassurante, affirmant que tout irait bien et que les circonstances seraient mises sur la balance.
De cela, le professeur d’Histoire de la Magie doutait beaucoup. Son métier l’a fait étudier tant de périodes où la soi-disant justice n’a tenu compte que de ce qui l’arrangeait… Mais cette serdaigle, puisqu’elle était crédule en ce qui concerne Shafiq, était crédule également en ce qui concernait la justice. Logique. Ou alors ne croyait-elle pas ce qu’elle affirmait et essayait-elle simplement de rassurer le « pauvre » professeur aux abois ? Elle alla jusqu’à souhaiter qu’il y ait plus de professeurs comme lui…
*Si c’était le cas, la révolte à Poudlard aurait été étouffée dans l’œuf et tu ne serais pas là pour gober mon mélodrame…*pensa-t-il fugitivement, sans vouloir reconnaître que la remarque flattait sensiblement son égo d’enseignant.
« J’aimerais avoir votre assurance, mademoiselle Bennet... » affirma le néo-mangemort d’un ton désabusé, continuant dans sa lancée de victime quasi-condamnée, « ...mais pour être sincère, je doute que mes juges, qui seront tous résistants ayant combattu contre Blackman, garderont la tête froide et ne feront pas de procès expéditifs, voire groupés, voire les deux… Je ferais mieux de profiter de la vie tant que je respire encore… » D’un geste désinvolte, il balaya l’air d’un revers de main « Mais bon, ne parlons plus de choses tristes, intéressons-nous au présent. »
Heather fit une remarque étrange suite à la tirade prudente de Salazar sur la révolte qu’elle voulait fomenter en toute inconscience. En effet, « seul le château » était pris, mais c’était d’une importance stratégique capitale ! N’en avait-elle vraiment pas conscience ? A moins qu’elle se raccrochait à l’espoir d’une victoire finale de Blackman ? En ce cas qui était Salazar pour le lui reprocher ..?
« Poudlard est le seul collège de Royaume-Uni, mademoiselle Tiesenhausen, le seul endroit où la jeunesse de la communauté sorcière est réunie. » expliqua Shafiq d’un ton grave. « En tenant les enfants, vous tenez les parents. C’est donc une grande importance stratégique. Rajoutez à cela des Septième Année tous majeurs à cette époque de l’année, jeunes et fougueux, et vous disposez d’un réservoir de combattants déterminés. Les mangemorts n’ont pas perdu, mais ils sont en mauvaise posture. Tout se décidera dans ces prochains mois, croyez-moi. »
Heather ne dit ni oui ni non aux séances de rattrapage, faisant comprendre à Salazar à demi-mot qu’elle ne voulait pas se mélanger avec les nés-moldus, mais disant qu’elle participerait moins… Donc qu’elle participerait quand même.
« Je comprends votre décision, mais soyez assurée que vous vous sentirez toujours à votre place dans mon cours. » assura le professeur Shafiq, histoire de lui faire comprendre qu’il n’a rien renié de ses idéaux, qu’il fasse cours ou non avec des nés-moldus. « Je serais ravi de vous y voir. » Entre néo-mangemorts, il faut se serrer les coudes…
Heather fit une magnifique passe de torero en ce qui concerne Tracy, et Salazar la savoura : qu’une Troisième Année aide une Quatrième, c’était étrange mais pas si étonnant quand on considère la difficulté à réussir certains sorts, mais là où Heather s’en sortait magistralement, c’est quand elle exigea que Tracy soit remise sur pieds avant de commencer.
*Ainsi, sa camarade née-moldue est toujours convaincue que Tiesenhausen veut l’aider, mais le temps que sa jambe se remette, il se passera des jours, voire des semaines, le temps peut-être suffisant pour que nous sortions de la Ferme… C’est une promesse qu’Heather a de grandes chances de ne pas tenir, et elle se met quand même la née-moldue dans sa poche. Du grand art !*
Mais les trois furent interrompus par un autre serdaigle, en mauvais état celui-là. *Quincey ?*
Cet élève était un des rares à avoir pris Histoire de la Magie pour les ASPICs, et il avait eu bien raison d’avoir gardé cette matière, car c’était un très bon élève. L’année s’était bien passée avec lui, il était sérieux, droit, parfois souriant, calme… Rien à voir avec la loque sanglotante, tremblotante et boiteuse qui s’était ruée sur eux. Pour un peu, Shafiq aurait eu toutes les peines du monde à le reconnaître. Les larmes aux yeux, il leur demanda des nouvelles d’un camarade. « Monsieur Quincey.. ? » s’étonna le professeur avant de lui mettre affectueusement une main sur l’épaule. « Asseyez-vous d’abord, et calmez-vous. Vous avez une mine affreuse. » Shafiq regretta que ce serdaigle ait participé à la bataille. Oui, vraiment dommage. Non pas que Salazar ait espéré le voir un jour rejoindre les rangs des néo-mangemorts, mais il avait espéré la neutralité. Ce ne fut manifestement pas le cas.
« Buvez un verre d’eau et respirez profondément. » materna-t-il. « Je n’ai pas vu votre camarade, mais la Ferme est très grande, des tentes ont été installées à l’extérieur… Et même s’il n’était pas à la Ferme, ce n’est pas forcément mauvais signe : beaucoup d’élèves se sont enfuis, et certains ont pu regagner leur chez-eux. Reprenez votre souffle. »
Shafiq évita de préciser que les fuyards que les aurors n’ont pas ramenés se sont probablement fait arrêter par les mangemorts… Et qu’à moins de maîtriser le transplanage, et d’avoir parcouru plusieurs kilomètres, personne n’a pu rentrer chez lui…
Notre liberté est menacée par le besoin de sécurité et la sécurité elle-même est menacée par le souci obsédant qu'on en a.
« Ah bon ? Parce qu’il y a une liste des choses auxquelles on a le droit de croire ou de ne pas croire ? Ou une autorité supérieure qui nous donne cette possibilité ? Et si on ne sait pas en quoi on a le droit de croire, comment on décide quelles sont nos convictions ? On suit nécessairement celles des personnes qui nous ont précédées ? » La conversation avec la fille perturbait un peu Sage. Elle posait des questions auxquelles il n’avait pas de réponse ce qui le mettait mal à l’aise. Il n’aimait pas admettre qu’il ne savait pas. Le jeune serpentard aimait avoir réponse à tout, avoir l’air intelligent et cultivé. Lorsque venait le moment d’admettre qu’il n’avait pas d’idée ou de certitude quant à quelque chose, il était rapidement piqué dans son orgueil ce qui le faisait bouillir de l’intérieur. Certes, en présence d’une personne plus âgée qui, peut-être un jour, il aurait besoin d’avoir de son côté, Sage ne laissait pas transparaître son trouble. Il sourit doucement à la belle brune, respirant profondément pour calmer le feu de colère qui avait pris naissance en lui alors qu’il se rendait compte qu’il n’avait pas de réponse à lui fournir. Une fois plus en contrôle de ses émotions, le garçon lui répondit d’un ton calme. « Tu peux bien croire en ce que tu veux, je crois seulement que la tolérance n’est pas une chose en laquelle on peut croire, mais davantage une valeur qu’on peut adopter et appliquer dans notre quotidien. Je ne pense pas qu’il y a une force supérieure qui te force à adopter telle ou telle doctrine. » Il laissa son regard glisser de la jeune sorcière aux autres étudiants rassemblés dans la salle se demandant combien parmi ceux-ci avait embrassé les doctrines misent d’avant par leur ancien directeur ; celui même qui l’avait classé au rang d’esclave pendant huit mois. « Selon moi, il est préférable de se faire ses propres convictions sans quoi, on perd un peu qui on est. On finit seulement par suivre ce qu’on nous dit de faire sans se poser de questions. » Il était un peu ailleurs, ça s’entendait dans sa voix. Il retourna ses prunelles sombres sur son interlocutrice avant de reprendre d’une voix plus normale : « Et on sait tous les deux ce que ça donne quand on se contente de suivre ce que d’autres ont fait avant soi. » Il y avait beaucoup de sous-entendu dans ses derniers mots. Sage soutint le regard de la fille un instant avant de le détourner de nouveau au profit de l’agitation qu’il y avait près de la porte où des gens commençaient à sortir. « Donc en soi, je suppose que tu peux croire en la tolérance même si ça ne me semble pas être une croyance... », dit-il le regard ailleurs.
« Tu veux dire que nous n’avons pas un seul ange gardien mais plusieurs en fonction des situations auxquelles nous sommes confrontés et qu’ils ont une sorte de spécialisation qui leur permet de déterminer qui doit intervenir à quel moment ? Mais du coup, si deux personnes ont besoin du même ange au même moment, comment ça se passe ? » Des questions et encore des questions. Elle en avait beaucoup à poser cette fille ce qui agaçait Sage en un sens et le flattait en un autre. Il n’arrivait pas à savoir si elle se moquait de lui ou si, au contraire, elle était réellement intéressée par ce qu’il avait à dire sur le sujet. Au moins, elle avait abandonné le ton maternel qu’elle avait adopté un peu plus tôt ce qui mis le jeune garçon nettement plus à l’aise. Il ne savait plus trop s’il la trouvait idiote ou s’il la trouvait intéressée. Ses questions étaient quand même assez pointues et Sage se demandait comment il allait pouvoir lui expliquer sans la perdre dans les explications. Il avait lui-même mis quelques temps à tout bien saisir ce qu’on racontait dans les textes ainsi que le contenu des sermons de son père les dimanches matins à l’église. « Disons que tous les anges gardiens forment des équipes de Quidditch. », commença Sage tout en cherchant ses mots. Il espérait que son explication ne soit pas trop simplifiée. « Ils sont tous des joueurs, mais n’ont pas la même tâche dans l’équipe. Ils fonctionnent ensemble, en équipe, et forment un tout. » Il réfléchit une demi-seconde à comment imager les choses telles qu’elles apparaissaient dans son esprit. « Il y a plusieurs équipes donc plusieurs poursuiveurs, plusieurs gardiens, plusieurs attrapeurs et plusieurs batteurs. Il y a donc toujours quelqu’un pour te venir en aide. » Enfin c’est ainsi qu’il imaginait les choses qu’on lui avait inculqué à l’église le dimanche après-midi dans ces cours de catéchèse. Il ne savait pas si c’était vrai ou pas, mais Sage se disait que du moment qu’il y croyait, ce pouvait être vrai.
La conversation pris une toute autre tournure après qu’ils se soient présentés l’un à l’autre. Sage la questionna sur ce qu’elle comptait faire ici, si elle avait envie de suivre des cours de rattrapage ou non. SA réponse ne tarda pas à venir. « Je pense que oui, mais j’aurais dû passer mes BUSE cette année et franchement, j pense que même en suivant les cours tout l’été, je n’arriverais pas à rattraper mon retard. Tu penses que tu vas y arriver, toi ? » Sage se sentit désolé pour elle. C’était quand même nul de ne pas pouvoir passer ses buses en même temps que ses copains. Lui, il avait de la chance dans son malheur puisque ses deux meilleurs amis – Jayden et Kenny – avaient été dans les cachots avec lui. Tout le monde redoublait sans doute l’an prochain – même si pour sa sœur ça ne changeait rien comme elle était toujours une année au-dessus de lui en cours. « Je ne pense pas que je puisse passer en troisième l’an prochain, même avec un million de cours de rattrapage pendant l’été. Je ne pense pas qu’on puisse reprendre une année entière en deux mois. J’étais déjà bon en classe avant, mais ça ne me semble pas possible sans terminer dans les derniers de classe…. » Il marqua une pause, un peu triste de cette constatation en soi. Il n’avait pas envie d’être dans les derniers de classe autant qu’il n’avait pas envie de redoubler, mais quel choix il avait au final ? C’était l’un ou l’autre. Sans doute que la fierté du serpentard l’emporterait et qu’il reprendrait l’année scolaire qu’il venait de rater. « Ce que je préfère, ce sont les cours de vol, je suis passionnée de Quidditch, et toi ? » Il avait la mine un peu basse donc le changement de conversation se centrant sur les cours favoris lui fit du bien. « Le quidditch c'est trop bien! Tu comptes jouer dans l'équipe ? », commença-t-il sans chercher à aller plus loin. Il avait l'intention de faire partie de l'équipe, depuis l'an dernier, mais il voulait garder son désir secret jusqu'aux sélections. Il avait peur de se faire couper l'herbe sous le pied par un plus vieux. « Mais ce n'est pas mon cours préféré. J'adore celui de sortilèges ! J'ai trouvé fabuleux comment le professeur Winslow arrivait à faire de la magie dans baguette. Malheureusement, je n'ai jamais réussi, mais je ne perd pas espoir d'y arriver avec de l'entraînement. » Un sourire angélique à l'intention de Savannah compléta sa phrase.
Si on m’avait dit que j’aurais une conversation plutôt sympa avec un petit bonhomme de Serpentard à ma sortie des cachots, je ne l’aurais sans doute pas cru. Je me rends compte que j’ai passé beaucoup trop de temps à me lamenter sur mon sort et à imaginer une fin très proche. Il n’est donc pas désagréable de reconnecter un peu mes neurones pour avoir une conversation un peu plus sérieuse que d’habitude. « Tu peux bien croire en ce que tu veux, je crois seulement que la tolérance n’est pas une chose en laquelle on peut croire, mais davantage une valeur qu’on peut adopter et appliquer dans notre quotidien. Je ne pense pas qu’il y a une force supérieure qui te force à adopter telle ou telle doctrine. » Je ne peux m’empêcher de sourire devant le côté borné du garçon. Je trouve mignon qu’il ait de telles convictions et qu’il soit prêt à les défendre. Je dois admettre qu’il est même plutôt bluffant. Ses arguments ne suffisent pas forcément à me convaincre parce que je ne crois tout simplement pas qu’on puisse cataloguer des termes et les mettre dans une case de laquelle ils ne peuvent pas sortir, mais c’est mon point de vue à moi et je ne considère pas que le sien soit mauvais pour autant. « Selon moi, il est préférable de se faire ses propres convictions sans quoi, on perd un peu qui on est. On finit seulement par suivre ce qu’on nous dit de faire sans se poser de questions. » Alors là, par contre, je suis bien d’accord avec lui, je déteste l’idée d’être un mouton qui suit le troupeau sans chercher à réfléchir par lui-même. J’aime avoir mes propres opinions et faire en sorte de respecter la ligne de conduite que je me suis fixée. « Je crois que le plus difficile, c’est d’arriver à la fois à avoir nos propres convictions et en même temps de continuer à écouter les autres et de prendre en compte leur avis pour avancer dans la vie. » Ce n’est pas parce que j’ai mes propres convictions que j’estime ne rien avoir à apprendre des autres, au contraire, je ne veux pas me montrer trop sûre de moi et incapable de me remettre en question, ça ne me ressemble pas. « Et on sait tous les deux ce que ça donne quand on se contente de suivre ce que d’autres ont fait avant soi. Donc en soi, je suppose que tu peux croire en la tolérance même si ça ne me semble pas être une croyance... » Je souris une nouvelle fois, consciente qu’il semble me donner une sorte d’autorisation. C’est assez amusant, il vient de faire tout un cheminement intellectuel pour parvenir à la conclusion qu’il n’arrive pas à penser comme moi mais qu’il peut tout de même m’autoriser à penser de cette façon. J’aime bien cette idée. « Tant mieux, parce que je crois que je vais continuer à y croire. » Non mais que sa façon de voir les choses ne soit pas convaincante mais j’estime qu’il est capable de croire en tout et n’importe quoi, tout simplement.
Je crois que finalement, j’aime beaucoup sa façon de voir les choses. Bon, évidemment, je le trouve toujours aussi spécial et j’ai un peu l’impression qu’il a grandi dans une sorte de secte géante mais je dois admettre que je trouve assez intéressante sa manière de voir les choses. Bien sûr, c’est à des années lumières de tout ce que j’aurais pu imaginer mais ses explications sont plutôt claires et me permettent de me projeter dans son univers assez facilement. « Disons que tous les anges gardiens forment des équipes de Quidditch. Ils sont tous des joueurs, mais n’ont pas la même tâche dans l’équipe. Ils fonctionnent ensemble, en équipe, et forment un tout. Il y a plusieurs équipes donc plusieurs poursuiveurs, plusieurs gardiens, plusieurs attrapeurs et plusieurs batteurs. Il y a donc toujours quelqu’un pour te venir en aide. » Je hoche la tête, contente qu’il ait choisi le sport que je préfère pour son explication. Bon, plusieurs attrapeurs, ça reste à voir mais au moins je comprends un peu où il veut en venir. En fait, il n’y a pas un ange gardien par spécialité mais plus précisément un groupe d’anges gardiens par spécialité. Je ne peux m’empêcher de me demander quel doit être l’état du ciel avec tous ces bonhommes dedans, ça doit être un sacré bordel. Cette fois, je me garde bien de poser la question, je crois qu’il s’imaginerait immédiatement que je me fous de sa gueule et même si ce n’est pas le cas, j’avoue être un peu sceptique. Evidemment, je trouve normal qu’il y croit s’il a grandi dans cette culture mais pour ma part, je pense que je vais être difficile à convaincre. C’est dommage, j’aime pourtant beaucoup l’idée que quelqu’un quelque part soit en train de veiller sur moi. « J’aurais bien aimé qu’ils nous permettent de ne pas vivre ce que nous avons vécu cette année. » Je me doute bien que le rôle d’anges gardiens n’est pas de nous empêcher de vivre certaines épreuves parce que si nous avions une vie incroyablement facile, nous n’aurions pas la même personnalité et pas la même force de caractère. Toutefois, je ne peux m’empêcher de penser que je ne méritais pas ça et que mes camarades non plus. Je crois que je ne comprendrais jamais pourquoi on nous a infligé de pareils traitements.
Cet événement a influé de manière importante sur notre vie, je sais que j’ai loupé une année scolaire entière et que je ne pourrais pas la rattraper en un été. En plus, je ne sais même pas si je pourrais retourner à l’école à la rentrée ou si, au contraire, je serais coincée dans cette ferme pendant de longs mois sans pouvoir revoir ma famille. Je n’ai jamais été une élève exceptionnelle mais je m’en suis toujours sortie en travaillant un peu et en m’intéressant à certaines matières malgré mon désintérêt total pour ma scolarité. Savoir que je vais peut-être redoubler mais que ce redoublement ne sera pas de mon propre fait me déplait carrément. « Je ne pense pas que je puisse passer en troisième l’an prochain, même avec un million de cours de rattrapage pendant l’été. Je ne pense pas qu’on puisse reprendre une année entière en deux mois. J’étais déjà bon en classe avant, mais ça ne me semble pas possible sans terminer dans les derniers de classe… » Evidemment que ce n’est pas possible, seuls les élèves qui ont suivi les cours de leur année en cachette pendant que nous étions aux cachots vont peut-être pouvoir envisager de réussir les rattrapages. Je sais que ce ne sera pas pour moi, j’ai complètement lâché ma scolarité cette année en me disant que de toute façon ça ne servirait à rien. J’ai bien vu que certains d’entre nous récupéraient des cours en cachette mais je n’en voyais clairement pas l’intérêt. Maintenant, je regrette un peu de ne pas avoir agi de la même manière qu’eux, ça m’aurait peut-être un peu aidé. « C’est nul, hein ? » C’est la première fois que je râle à voix haute, en général j’essaie de me montrer positive mais ça fait du bien aussi de pouvoir s’apitoyer un peu sur son sort. « J’aimais bien ma classe, je n’ai pas envie de laisser mes amis l’an prochain… Si nous retournons à Poudlard. » Le « si » n’est pas agréable mais je préfère ne pas trop me projeter tant que notre avenir est aussi incertain, la désillusion risque d’être particulièrement douloureuse. « Heureusement, ma jumelle va sûrement redoubler avec moi, au moins nous serons ensemble. » J’ai vraiment beaucoup de mal à envisager le redoublement d’Avalon, elle qui est si brillante et cultivée, mais je sais qu’elle n’envisage pas non plus de réussir à rattraper son année alors je suppose que nous resterons ensemble et je dois avouer que ça me rassure. « Le Quidditch c'est trop bien ! Tu comptes jouer dans l'équipe ? » Mon regard s’illumine, aborder ce sujet que j’aime tant me fait évidemment plaisir. Le Quidditch joue une place extrêmement importante dans ma vie, je m’entraine quasiment tous les jours à Poudlard et j’aime la sensation de voler même si je sais que je peux me retrouver par terre en une fraction de secondes. « J’aimerais beaucoup ! J’ai commencé à m’entrainer pour devenir attrapeur… C’est peut-être un peu ambitieux mais j’aime la vitesse et on m’a toujours dit que j’avais une bonne vue, alors je trouverais ça chouette. Tu voudrais faire partie de l’équipe toi aussi ? » J’ignore ce que va devenir notre équipe de Quidditch l’an prochain, si toutefois il en existe une puisqu’une fois de plus, tout dépendra de notre avenir à Poudlard. Je veux croire que nous allons pouvoir revenir à l’école. « Mais ce n'est pas mon cours préféré. J'adore celui de sortilèges ! J'ai trouvé fabuleux comment le professeur Winslow arrivait à faire de la magie sans baguette. Malheureusement, je n'ai jamais réussi, mais je ne perds pas espoir d'y arriver avec de l'entraînement. » Je hoche la tête, consciente de ne pas vraiment partager son enthousiasme sur le sujet. Bien sûr, avoir la possibilité de faire tout un tas de choses avec une baguette m’a toujours subjuguée mais mes habitudes d’ancienne moldue me poussent bien souvent à agir comme telle et j’en oublie presque que je suis une sorcière. « Tu y arriveras, j’en suis sûre, la persévérance permet de surmonter tous les obstacles. » En tout cas, je veux vraiment y croire.
Notre liberté est menacée par le besoin de sécurité et la sécurité elle-même est menacée par le souci obsédant qu'on en a.
S’ils avaient au préalable abordé un sujet plus religieux, il n’en était plus vraiment question à ce moment précis. La conversation avait nettement dévié vers leurs croyances personnelles, leurs convictions. Sage n’était pas tout à fait d’accord avec ce que Savannah avançait, il ne pensait pas qu’on puisse croire en la justice comme il croyait en Dieu. C’était deux choses tout à faire différentes. Il n’y avait aucun lien entre les deux, mais son interlocutrice n’avait pas l’air tout à fait en accord avec lui. Elle lui posait des questions auxquels il n’avait pas de réponse. Plutôt mourir qu’admettre qu’il ne savait pas. Sage avait bien trop de fierté – et sans doute était-il beaucoup trop têtu – pour l’admettre à voix haute. À la place, il se fit un casse-tête mental pour arriver à lui offrir une réponse un tant soit peu convenable. Il n’était pas tout à fait convaincu de ce qu’il avançait. Sa réponse sembla satisfaire Savannah et c’était tout ce qui importait. « Je crois que le plus difficile, c’est d’arriver à la fois à avoir nos propres convictions et en même temps de continuer à écouter les autres et de prendre en compte leur avis pour avancer dans la vie. » Sage hocha la tête de manière affirmative tout en lui répondant : « De ce côté, tu n’as rien à envier à qui que ce soit. Tu me sembles assez ouverte d’esprit. » C’était une simple constatation, mais Sage n’était pas connu pour être avare de compliments lorsqu’il cherchait à se mettre quelqu’un sans la poche. Comme dit plus tôt, il croyait que la serpentard pourrait peut-être lui être utile à un moment ou un autre. Mieux valait l’avoir de son côté immédiatement. Si, pour ce faire, ça impliquait de lui donner le « droit » de croire en ce qu’elle voulait, Sage était prêt à le faire. Après tout, entre ce qu’il disait et ce qu’il pensait, il y avait une bonne différence. La conception des anges gardiens que se faisait Sage échappait à son aînée. Il fit de son mieux pour lui expliquer en usant d’une comparaison avec le Quidditch qui, même approximative, permis à Savannah de comprendre un minimum ce qu’il tentait d’expliquer. C’était un bon début. « J’aurais bien aimé qu’ils nous permettent de ne pas vivre ce que nous avons vécu cette année. » Le petit serpentard ne pouvait qu’être d’accord avec elle. En même temps, il se souvenait d’une phrase qu’avait dit son père une fois un dimanche matin à l’église. « Ils n’ont pas le droit de nous empêcher de vivre notre vie. Ils n’ont pas la permission d’intervenir dans les affaires des humains. Ils peuvent seulement nous guider et tenter de nous protéger de manières indirectes. » Il avait prononcé ses paroles sur un ton de réflexion. Il se pressa d’ajouter : « En tout cas, c’est ce que dit mon père. » Il croyait ce que son père lui disait parce qu’il était son père voilà tout. C’était sans aucun doute naïf, mais on ne pouvait rien y changer.
Constater qu’il ne pourrait pas passer en troisième année mina un peu le moral de Sage. Il devint furieux contre les mangemorts, contre Blackman plus qu’il n’était raisonnable de l’être. Surtout compte tenu du fait qu’il n’avait pas le pouvoir de changer les choses. Ça ne servait à rien de s’énerver contre ce qui était hors de notre contrôle et Savannah l’avait compris elle aussi. « C’est nul, hein ? J’aimais bien ma classe, je n’ai pas envie de laisser mes amis l’an prochain… Si nous retournons à Poudlard. » Elle était quelque peu pessimiste au goût du petit serpentard qui voulait encore croire qu’il retournerait à Poudlard un jour. Il n’avait pas envie d’aller à l’école moldu avec les autres. Il voulait continuer à apprendre la magie, continuer à suivre les cours qui l’intéressait et ne pas redevenir la victime des moqueries qu’il avait été avant Poudlard. « Nous y retournerons. » ,affirma-t-il avec un sourire forcé plus pour se convaincre lui-même que Savannah. Il voulait vraiment y croire. « Heureusement, ma jumelle va sûrement redoubler avec moi, au moins nous serons ensemble. » Et bien voilà, ce n’était pas totalement négatif. « Je suis bien d’accord ! Moi aussi j’aimais beaucoup ma classe. Il y a des gens que j’aime pas trop dans l’année en dessous. » Une personne pour être plus exact ; Jade Shepherd. Insupportable fille qu’il se plaisait à embêter. Même s’il aimait se jouer d’elle, ce n’était pas pour autant qu’il voulait la voir chaque jours dans tous ses cours. « Au moins, comme toi pour ta jumelle, mon meilleur ami va être avec moi. Il est né-moldu lui aussi. » Un meilleur ami qui n’avait toujours pas refait surface. Comme Jaspe d’ailleurs, mais Sage faisait de son mieux pour se convaincre que tout allait bien pour les deux. Après tout il priait pour eux, comment ça pourrait mal tourner ?
« J’aimerais beaucoup ! J’ai commencé à m’entrainer pour devenir attrapeur… C’est peut-être un peu ambitieux mais j’aime la vitesse et on m’a toujours dit que j’avais une bonne vue, alors je trouverais ça chouette. Tu voudrais faire partie de l’équipe toi aussi ? » Tient donc, elle avait autant de détermination que lui cette fille. S’entraîner pour devenir attrapeur sans même faire partie de l’équipe actuelle – plutôt passée – de Quidditch, voilà qui était louable. Elle venait de marquer des points dans l’estime du deuxième année. « Je ne sais pas encore si je vais tenter ma chance. J’aime beaucoup voler, mais je crains qu’il y ait des gens plus âgés qui soient meilleurs que moi. » C’était tout faux. Sage se savait très talentueux. Il se savait meilleur que bien des gens, ou du moins le croyait-il. Sauf qu’il préférait mentir. De un parce que ce serait mieux perçu s’il jouait les modestes. Ensuite, il ne voulait pas qu’on sache qu’il pensait tenter sa chance dans l’équipe. C’était son secret. Ainsi, il pouvait se pratiquer à l’abri des regards. Si on ne savait pas, on ne pourrait pas se méfier de lui. Donc lors des sélections, les gens ne le verraient pas comme une menace jusqu’à ce qu’il les éclipse un à un de leur chance d’accéder à un place dans l’équipe.
« SAGE ! », s’exclama une voix du côté de la porte. Le jeune garçon se tourna pour voir sa sœur qui lui faisait signe de le rejoindre. Le deuxième année lui fit signe d’attendre une minute avant de se retourner vers Savannah. « Je dois y aller, ma sœur m’attend. Ce fut un plaisir de faire ta connaissance. » Il avait dit la dernière phrase pour la forme, mais se surpris quand même à y croire un peu. Elle était pas désagréable à cotoyer cette fille. « À la prochaine ! », lui lance-t-il avec un sourire en se levant pour rejoindre Kenny qui commençait déjà à s’impatienter.
« Ah bon ? Parce qu’il y a une liste des choses auxquelles on a le droit de croire ou de ne pas croire ? Ou une autorité supérieure qui nous donne cette possibilité ? Et si on ne sait pas en quoi on a le droit de croire, comment on décide quelles sont nos convictions ? On suit nécessairement celles des personnes qui nous ont précédées ? » La conversation avec la fille perturbait un peu Sage. Elle posait des questions auxquelles il n’avait pas de réponse ce qui le mettait mal à l’aise. Il n’aimait pas admettre qu’il ne savait pas. Le jeune serpentard aimait avoir réponse à tout, avoir l’air intelligent et cultivé. Lorsque venait le moment d’admettre qu’il n’avait pas d’idée ou de certitude quant à quelque chose, il était rapidement piqué dans son orgueil ce qui le faisait bouillir de l’intérieur. Certes, en présence d’une personne plus âgée qui, peut-être un jour, il aurait besoin d’avoir de son côté, Sage ne laissait pas transparaître son trouble. Il sourit doucement à la belle brune, respirant profondément pour calmer le feu de colère qui avait pris naissance en lui alors qu’il se rendait compte qu’il n’avait pas de réponse à lui fournir. Une fois plus en contrôle de ses émotions, le garçon lui répondit d’un ton calme. « Tu peux bien croire en ce que tu veux, je crois seulement que la tolérance n’est pas une chose en laquelle on peut croire, mais davantage une valeur qu’on peut adopter et appliquer dans notre quotidien. Je ne pense pas qu’il y a une force supérieure qui te force à adopter telle ou telle doctrine. » Il laissa son regard glisser de la jeune sorcière aux autres étudiants rassemblés dans la salle se demandant combien parmi ceux-ci avait embrassé les doctrines misent d’avant par leur ancien directeur ; celui même qui l’avait classé au rang d’esclave pendant huit mois. « Selon moi, il est préférable de se faire ses propres convictions sans quoi, on perd un peu qui on est. On finit seulement par suivre ce qu’on nous dit de faire sans se poser de questions. » Il était un peu ailleurs, ça s’entendait dans sa voix. Il retourna ses prunelles sombres sur son interlocutrice avant de reprendre d’une voix plus normale : « Et on sait tous les deux ce que ça donne quand on se contente de suivre ce que d’autres ont fait avant soi. » Il y avait beaucoup de sous-entendu dans ses derniers mots. Sage soutint le regard de la fille un instant avant de le détourner de nouveau au profit de l’agitation qu’il y avait près de la porte où des gens commençaient à sortir. « Donc en soi, je suppose que tu peux croire en la tolérance même si ça ne me semble pas être une croyance... », dit-il le regard ailleurs.