Le soir, après le diner et le couvre feu, était le moment idéal pour tenter de prendre quelques élèves la main dans le sac et ainsi bien faire son travail, mais Anya s’était arrogée une soirée de repos. Cavaler dans les couloirs du château – voir dans le parc – pendant une partie de la nuit n’était pas une partie de plaisir et garder un rythme trop soutenu risquait d’impacter le sommeil de la belle, ainsi que son efficacité.
Du moins, ceci était la raison qu’elle exposerait si quelqu’un venait à lui reprocher. Car en vérité, la belle anglaise avait invité l’un de ses collègue à venir prendre un verre – ou plusieurs – chez elle. La tranquillité et le confort de sa cabane perdue promettait une bonne soirée, cela était certain. Ainsi, lorsque le professeur de Métamorphose se présenta devant sa porte, Anya vint aussitôt lui ouvrir et le fit entrer avec un sourire.

D’extérieur, la cabane semblait particulière délabrée et insalubre, mais l’intérieur révélait une demeure spacieuse, bien agencée et décorée avec gout, à mi-chemin entre le moderne et le traditionnel. Ce fut dans un confortable fauteuil, situé près de sa cheminée, que Anya invita Gabriel à s’assoir tandis qu’elle allait chercher deux verres et sa meilleure bouteille de whisky, alcool dont ils étaient tout les deux friands. La demoiselle ne tarda pas à réapparaitre, sa chemise ayant un bouton de trop d’ouvert, et elle déposa deux beaux verres sur la table basse. Telles de véritables œuvres d’art, les verres étaient ciselés de motif semblable à des runes ainsi que de représentations d’animaux ou de scène. La bouteille semblait également contenir un alcool d’excellente qualité – Anya n’avait donc pas mentit en promettant son meilleur whisky – et d’un coup de baguette, la demoiselle la fit léviter et remplit les deux verres, l’un allant ensuite se promener sous les yeux de Gabriel, jusqu’à ce qu’il le prenne entre ses doigts.

« De rien. Ça me fait plaisir. Je préfère milles fois une soirée comme celle qui s’annonce que celle que je passe d’ordinaire. »

Anya leva son verre et le fit tinter contre celui de son vis-à-vis, puis elle se laissa choir dans le second fauteuil. D’un coup de baguette négligeant, elle raviva le feu dans sa cheminée, puis but une gorgée. L’absence de grimace sur son visage prouvait que la demoiselle avait l’habitude de consommer cet alcool fort, servit sur glace.

« Ca te dérange si je fume ? » Politesse inutile, puisque Anya sortait déjà une cigarette d’un paquet tout juste entamé. « T’en veux une ? » proposa t-elle n allumant la tige de nicotine sur laquelle elle pompa avidement. Ses doigts retrouvèrent ensuite la fraicheur de son verre, la clope coincée entre son index et son majeur. « J'ai toujours trouvé le mélange clope et whisky parfait. Alors, comment étais ta journée ? »

La fumée de cigarette, ainsi que l'odeur particulière de cette drogue, n’incommodait plus la demoiselle depuis des lustres, mais ce n'était généralement pas le cas de tous. Toutefois, se préoccupait-elle de ce détail alors qu'elle se trouvait avec son collègue ? Pas vraiment. Comme elle l'avait mainte fois dit à ses parents ou même son ex-fiancée, ceux qui n'aimaient pas cela n'avaient qu'à ne pas l'approcher. C'était une bonne façon d'écarter les gens chiants de sa vie, en quelque sorte. A présent, il suffisait de voir si Gabriel allait réellement en être incommodé ou non... Et cette idée lui tira un sourire.

Le paquet quitta la vue du professeur pour rejoindre un coin de la table lorsque celui-ci refusa poliment une tige. Tant pis, ce m'en fera plus pour moi. Songea la jeune femme en observant son vice quelques instants. Ses beaux yeux se posèrent ensuite sur son vis à vis, à qui elle sourit en l'entendant commenter son whisky. Il l'aimait et cela ne pouvait qu'être un bon point pour lui ! En revanche, contrairement à Anya, il ne semblait pas habituer à cet alcool fort et elle ne pu s’empêcher de rire et commenter sa grimace, légèrement moqueuse.


La journée de Gabriel n’intéressait pas tant Anya, puisque celle-ci se doutait déjà de son contenu : cours, s'occuper d'élèves, corrections. Rien de très palpitant et, sincèrement, rien que pour cela la blonde ne se voyait pas dans l'enseignement. Passer ses journée à dispenser son savoir à des morveux qui n'écoutaient qu'à moitié – ou pas du tout d'ailleurs – n'était clairement pas une idée enchanteresse !

« Quel sérieux ! Détends-toi un peu et arrête de penser aux corrections... C'est un ordre, professeur. »

L'index pointé vers Gabriel, Anya tenait toujours son verre entre ses doigts. Elle profita d'avoir le bras levé pour terminer son whisky et s'en servir un second d'un coup de baguette. Un léger sourire continuait de flotter sur les lèvres de la jeune femme, qui ne quittait pas Gabriel du regard. A quoi pouvait-elle bien penser, alors qu'elle portait la tige de nicotine à ses lèvres.

Parler de moi ? L'idée fit faire la grimace à Anya, qui tenta de le cacher derrière son verre. Parler d'elle n'était pas son activité favorite, la demoiselle étant très secrète sur sa vie, sur ce qu'elle ressentait... Et surtout, elle venait à peine d'arriver ! Elle ne savait pas grand chose de son vis à vis et voulait le connaître davantage avant de lui livrer des informations... Paranoïa ? Peut-être bien ! Mais dans ce monde de fou, mieux valait cela que se livrer au premier venu.

« D'accord, jouons. » Approuva Anya, l'idée semblant lui plaire cette fois-ci. « Je pense... Que ton chat s'appelle Shakespeare. Vrai ? »

Le jeu lui plaisait. Aussi, la demoiselle reprit une gorgée de son verre avant de le reposer, de même que sa clope qu'elle laissa dans un cendrier. Les coudes sur les genoux, elle se pencha vers Gabriel.