La longueur de cette journée avait été plus qu’impressionnante. Marlow supportait plus ou moins bien les cours et les salles de classes remplies d’élèves, mais aujourd’hui, le mal l’avait très largement emporté sur le bien. Durant son cours de divination, elle avait dû se mettre en binôme avec un garçon qu’elle connaissait à peine et celui-ci avait trouvé judicieux de lui envoyer de grandes claques dans le dos toutes les trente secondes en l’appelant « coquine » sur un ton pervers qui ne lui disait rien qui vaille. Après l’avoir rembarrée deux ou trois fois en ayant la nette impression de parler à un mur, la jeune fille avait choisi de prendre son mal en patience et avait presque couru vers la sortie lorsque le professeur avait enfin annoncé la fin du cours. Le reste de la journée s’était enchainé sans problème notable, mais la rouge et or avait eu beaucoup de mal à se concentrer. Et pour cause, James, son ami depuis un bout de temps maintenant, avait tenu à lui faire une surprise et l’attendait après la fin des cours dans un coin reculé de Pré-au-Lard. Marlow avait beau adorer le jeune homme et lui faire entièrement confiance, elle ressentait tout de même une légère appréhension à l’idée de se jeter dans l’inconnu. Très anxieuse de nature, elle aimait tout programmer à l’avance et ne pas pouvoir le faire la rendait sacrément nerveuse.

Toutefois, il était bien sûr hors de question qu’elle le laisse tomber, elle était curieuse de savoir ce que ça pouvait bien être et de toute façon, il avait eu l’air bien trop enthousiaste pour qu’elle renonce à le laisser lui montrer sa fameuse surprise. La fin des cours ayant sonné, elle prit tout juste le temps de passer dans son dortoir pour attraper un manteau, une écharpe et une paire de bottes absolument pas sexy qu’elle ajouta par-dessus ses collants et fila vers l’extérieur pour ne pas être en retard au rendez-vous. Pré-au-Lard était totalement désert lorsqu’elle traversa la grande place pour rejoindre le coin le plus reculé du village, seul le bruit de ses bottes sur le pavé résonnait à ses oreilles. Son sac de cours, qu’elle n’avait pas voulu laisser dans son dortoir, venait taper régulièrement contre sa cuisse alors qu’elle remontait instinctivement la bandoulière le long de son épaule toutes les deux minutes. Lorsqu’enfin elle aperçut James à l’endroit exact où il lui avait donné rendez-vous, elle lui sourit joyeusement, laissant dans un coin de sa tête toutes les craintes qu’elle pouvait ressentir à l’idée de découvrir cette fameuse surprise. Elle était contente de le voir, quelles que soient les circonstances.

« Salut toi, t'es ponctuelle. Tu seras pas déçue d'être venue. »

Son ton de voix se voulait rassurant, et la jeune fille lui en fut reconnaissante. Il n’était pas du genre à la narguer en lui demandant toutes les deux secondes à quel point elle était en train de flipper, au contraire, il avait toujours été là pour l’aider à relativiser dans les moments où ça n’allait pas, et il savait qu’ils étaient plutôt nombreux. Marlow évitait de lui parler de ses problèmes, n’aimant pas spécialement que la conversation tourne autour d’elle et encore moins divulguer ses secrets, mais elle avait appris à faire confiance à James avec le temps et elle savait qu’il faisait toujours tout pour la mettre à l’aise et faire en sorte que ses soucis s’éloignent. Evidemment, ça ne l’empêchait pas d’appréhender la fameuse surprise, mais ça c’était son côté angoissé, et absolument pas un doute quant au jeune homme qui lui faisait face. Elle ne pouvait pas douter de James, de toute façon, elle l’avait fait pendant trop longtemps déjà avant de réaliser qu’elle avait tort sur toute la ligne, il était hors de question qu’elle retombe dans ses anciens travers, il avait plus que largement fait ses preuves.

« Salut toi. » Répondit-elle en écho. « Je suis toujours ponctuelle, on dirait que ça te surprend. »

La légèreté de sa voix contrastait avec l’appréhension bien réelle qu’elle ressentait. Elle voulait lui montrer que tout allait bien dans le meilleur des mondes et qu’elle n’aurait pas voulu être à un autre endroit que celui-ci. La vilaine menteuse… Enfin, pas totalement en soit, elle était toujours contente de passer du temps avec James, c’était un des rares garçons qui parvenait à la mettre à l’aise et à la faire oublier provisoirement qu’elle était un peu hors norme et qu’elle n’entrait dans aucun moule prédéfini. Il la traitait constamment avec une extrême gentillesse, un peu comme une petite chose fragile qu’il craignait de briser à tout moment. Enfin, c’était une impression extérieure, peut-être était-il aussi gentil et prévenant avec tout le monde, si un tel comportement était dans sa nature, c’était tout à son honneur. En tout cas, James avait l’air relativement enthousiaste et la Gryffondor en était un peu rassurée, il n’aurait pas été super heureux à l’idée de lui filer la frousse de sa vie, ça n’aurait pas eu le moindre sens, Marlow essayait tant bien que mal de relativiser, tout en se demandant ce qui pouvait bien le rendre aussi impatient et quand elle allait bien pouvoir avoir le verdict. Il s'était montré tellement mystérieux en mentionnant ce rendez-vous, elle ne pouvait que se poser des milliers de questions.

« J’espère que t’as la pression, tu m’as quand même attiré loin de l’école alors qu’il fait un froid de canard pour une raison des plus obscures… Tu ne vas pas me mettre un bandeau sur les yeux ou un truc du genre, hein ? »

Elle se plaignait vraiment pour la forme. Encore une de ses piètres tentatives pour se détendre, taquiner le jeune homme lui semblait être des plus appropriés si elle voulait réussir à avoir l’air naturelle et au top de sa forme, mais sa dernière question laissait bien entre qu’elle avait quelques craintes. Son père avait pour habitude de lui respecter constamment qu’affronter ses peurs était un bon moyen de grandir mais Marlow avait tendance à penser que les éviter était aussi une idée plus que judicieuse. Heureusement que c’était James et pas quelqu’un d’autre, elle n’aurait pas pu se montrer aussi sereine avec une autre personne et en ce moment sa sérénité n’était déjà pas franchement au rendez-vous.

« Ne me donnes pas d'idées ! »

La jeune fille ne put s’empêcher de rire, rassurée qu’il n’ait pas prévu une mise en scène théâtrale pour introduire sa surprise. Elle arrivait presque à se détendre, James était fidèle à lui-même, gentil et peut-être un peu surexcité parfois, mais c’était un peu contagieux et elle avait hâte de découvrir ce qu’il tentait de lui dissimuler. La journée avait déjà été bien longue et le mystère qui planait autour de ce fameux rendez-vous ne pouvait que la rendre impatiente et anxieuse à la fois. Finalement, James avait peut-être une nouvelle vocation, celle de jouer les présentateurs télé dans une émission à suspens ayant pour vocation d’annoncer qui serait le vainqueur à la fin. Si jamais il exprimait à haute voix ses doutes quant à sa future orientation, elle n’aurait aucun mal à lui trouver cette nouvelle voie, il serait parfait. En plus, le costar de pingouin lui irait certainement à ravir. Elle se garda toutefois de préciser ce détail, ce n’était pas le moment de le charrier, il avait sa soirée entre les mains et mieux valait ne pas le provoquer sans savoir à l’avance à quelle sauce il prévoyait de la manger. Marlow était du genre courageuse mais pas téméraire, lorsqu’elle pouvait jouer la carte de la sécurité, c’était avec plaisir qu’elle le faisait.

« Ne t'en fais pas, mais en revanche, j'aimerai que tu gardes pour toi ce que tu vas voir. Je te fais confiance de toute façon, mais je tiens énormément à ce que je vais te montrer. Allez, suis-moi miss. »

La jeune fille hocha la tête, l’air d’un seul coup très sérieux. S’il voulait qu’elle garde le secret, c’est que ça devait être quelque chose de très important. Mais quoi ?! Ne pas savoir la rendait malade, d’autant plus que pour le coup, elle n’avait aucun moyen de deviner ce que ça pouvait être. Il hébergeait un dragon dans une maison de Pré-au-Lard ? Il avait retrouvé un proche parent qu’il voulait lui présenter parce qu’il savait qu’elle était accro à tout ce qui touchait à l’histoire de la magie ? Il avait décidé de la faire transplaner dans une contrée lointaine pour qu’elle respire le grand air frais d’un pays étranger et découvre des paysages encore inconnu ? Toutes ces propositions n’avaient pas le moindre sens et la dernière encore moins puisqu’ils n’étaient pas du tout préparés pour ce genre de voyage. Marlow n’avait pas pris la peine d’enlever son uniforme d’écolière, ajoutant juste à sa tenue de quoi être à l’aise durant leur sortie et James ne semblait pas avoir fait spécialement d’effort de ce côté-là non plus. Seuls ses sacs pouvaient laisser présager qu’ils allaient faire un peu de route. D’ailleurs, elle se demandait bien ce qu’ils pouvaient contenir. Ils n’allaient tout de même pas faire un pique-nique par ce temps ? Trop d’incertitudes. Elle n’en pouvait plus d’attendre.

« Je ne dirais rien, je te le promets. » Répondit-elle très sérieusement. « Tu peux me faire confiance. »

Après tout, elle lui avait accordé la sienne il y a bien longtemps maintenant et elle était persuadée que dans ce genre de relation, la confiance devait être mutuelle sinon ça ne fonctionnait pas. Et puis, elle savait garder des secrets, elle en avait déjà deux à conserver pour elle et bien qu’elle ait fini par se faire violence et mettre quelques personnes au courant un peu au compte-goutte, elle était très fière d’avoir réussi à les garder pour elle un certain temps sans que son secret ne soit dévoilé au grand jour. Bien sûr, il y avait des loupés, elle connaissait certaines bribes du passé de ses camarades, mais jamais rien de bien traumatisant finalement. Elle n’avait pas vu une personne tuer quelqu’un ou un drame familial trop important… Enfin, dans certains cas, ce n’était pas non plus tout rose et elle avait toujours la pression. Il était difficile de savoir comment réagir quand on voyait quelque chose d’important dans la vie d’une personne. Fallait-il le mentionner ou se taire ? Jouer les intruses dans le passé des gens était délicat et beaucoup pouvaient mal le prendre, elle n’avait pas envie d’être mal vue. Mais elle n’eut pas le loisir d’y songer un peu plus, ils venaient de s’arrêter, James ouvrant toujours la marche et sous les yeux écarquillés de la Gryffondor, un animal étrange émergea de derrière les arbres.

« Marlow, voici Flynn. C'est un Ethonan, je l'ai apprivoisé et je m'occupe de lui. Et si tu veux savoir, oui il est inoffensif. »

Le ton de James était calme et posé, comme s’il lui apprenait quelque chose de parfaitement normal et naturel. « Marlow, tu veux manger des crêpes ce midi ? » Aurait été dit exactement de la même façon. Mais pour la jeune fille, c’était un peu le tsunami dans sa tête. Elle passa par plusieurs stades, l’étonnement en premier lieu et il ne passa pas inaperçu puisqu’une exclamation de surprise franchit ses lèvres au moment même où elle haussait ses sourcils, les yeux grands ouverts. Puis le choc de cette rencontre fit bientôt place à de l’émerveillement, elle était ravie que James lui fasse partager ce moment, c’était vraiment incroyable. La jeune fille n’était pas une grande fan des animaux en règle générale, mais elle n’avait jamais vu une telle créature, fragile et majestueuse à la fois, elle donnait envie de s’approcher d’elle et la rouge et or fit un pas en avant, puis se tourna vers son ami, guettant une potentielle approbation. Elle ne le connaissait pas, alors même s’il était inoffensif, mieux valait demander une autorisation préalable.

« Tu l’as apprivoisé ? » Demanda-t-elle toujours un peu sous le choc. « Mais comment tu as fait ? Tu l’as depuis quand ? T’arrives à sortir du château en douce pour venir t’en occuper ? Personne ne le sait ? T’es dingue… Positivement dingue mais dingue quand même. »

Marlow était rarement aussi loquace mais la surprise qu’elle venait de subir lui donnait des ailes. Elle aurait pu faire tous les pronostics du monde quand à ce qu’il lui réservait mais jamais elle n’aurait trouvé la clé, ça semblait totalement improbable et surréaliste. Elle avait beau être dans un univers où la magie permettait des choses sensationnelles, elle parvenait encore à être émerveillée et elle ne pouvait qu’être reconnaissante envers James. Tout ça, c’était grâce à lui.

« Ahaha ! Je suis heureux que tu réagisses comme ça. C'est un cheval très apprécié, il n'est pas difficile d'en trouver. Je l'ai depuis la rentrée, il était blessé et abandonné un peu plus loin. Grâce à mes cours en soin des créatures magiques j'ai pu m'occuper de lui jusqu'à ce qu'il se soit remis. Je vais continuer de m'occuper de lui jusqu'à ce qu'il soit capable de déployer ses ailes et de s'envoler vers un milieu plus approprié. De ce fait, je me libère pendant 80% de mes pauses pour venir ici et prendre soin de lui. »

En même temps, elle ne voyait franchement pas comment elle aurait pu réagir autrement face à une telle révélation. Même le plus fataliste et blasé des élèves de Poudlard n’aurait pu que s’émerveiller devant une telle créature. James avait beau dire que ce n’était pas difficile à trouver, la rouge et or ne se souvenait pas du tout être déjà tombée nez-à-nez avec un tel animal. Pourtant, elle vivait au quotidien chez sa mère qui était une sorcière, elle avait donc nettement plus l’habitude de côtoyer le monde magique que le monde moldu. Qui plus était, Marlow passait des heures et des heures à parcourir les environs de Liverpool pour trouver de nouveaux paysages à photographier ou à dessiner, voire même les deux parfois. Elle avait pris pour habitude de reproduire ses photos en croquis ou en peintures lorsqu’elles les trouvaient particulièrement bien réussies, elle était toujours en quête d’une beauté qui sortirait de l’ordinaire que ce soit dans la nature ou dans la civilisation moderne et cet animal en faisait partie, elle en était persuadée. Des tas de questions continuaient à s’accumuler dans sa tête, elle avait envie de les poser toutes en même temps, résultat, elles ne parvenaient pas à en sortir une seule correctement, les mots refusant de sortir correctement. Elle dut attendre quelques secondes, histoire de reprendre ses esprits avant de pouvoir de nouveau s’exprimer de manière convenable.

« Depuis la rentrée ?! » S’exclama-t-elle alors qu’elle allait de surprise en surprise. « Mais comment ça se fait que personne ne s’en soit rendu compte ? T’arrives à venir ici sans qu’on te pose de questions ? Et s’il s’attache à toi et ne veux plus repartir, tu feras comment ? T’as demandé des conseils à des professeurs ou tu as tout géré tout seul ? »

Marlow se trouvait idiote de n’avoir rien vu. James et elle étaient assez proches pour qu’elle puisse remarquer qu’il était de plus en plus absent du château, mais non, elle n’avait vraiment rien vu et surtout rien compris. Il lui semblait toujours parfaitement normal, jamais elle n’aurait pu imaginer une telle chose. Et puis honnêtement, la rouge et or était impressionnée de voir qu’il avait pu secourir cet animal blessé avec un tel self contrôle, ça ne devait pas être évident de prendre des décisions dans ce genre de circonstances, de savoir quoi faire et comment le faire sans douter de soi-même. Pourtant, James semblait parfaitement à l’aise avec l’idée d’être la personne qui sauverait cet animal. Impressionnant, vraiment. La Gryffondor n’aurait pas été capable d’un tel exploit. Certes, il était possible que le jeune homme ait reçu une aide extérieure, mais d’après ce qu’il lui racontait, ça ne semblait pas être le cas. Finalement, Marlow se rendait compte que le secret allait être difficile à tenir, si elle ne lui avait pas promis d’en parler à personne, elle aurait couru pour le raconter à sa meilleure amie. Mais elle savait qu’elle n’en ferait rien, elle voulait prouver à James qu’elle était digne de confiance, il avait déjà tellement fait pour elle.

« Carrément fou, à tel point que je vais t'aider à lui faire boire son lait. Tu vas voir, il va vite t'adorer. Ne te dis pas que tu n'es pas faites pour ça et essayes, tu n'as rien à perdre, juste une expérience inoubliable à gagner. Les Ethonans se font de plus en plus rare alors je te laisse le privilège de t'en occuper avec moi ! »

La jeune fille avait haussé un sourcil intrigué en le voyant sortir un biberon de son sac mais elle ne s’attendait vraiment pas à ce qu’il lui fasse une telle proposition… Tout était parfaitement normal, elle allait simplement donner un biberon à un poney ailé… Marlow n’en revenait pas, c’était à la fois sensationnel et complètement effrayant. Elle avait conscience que c’était probablement une occasion unique et comme James venait de lui préciser, elle ne pouvait pas renoncer avant même d’avoir essayé. Elle attrapa le biberon qu’il avait sorti de son sac, en prenant bien garde à ne pas frôler les doigts de son ami de trop près, réflexe dont elle avait pris l’habitude depuis l’enfance lorsque sa maman lui tendait n’importe quels objets, jeux ou ustensiles de cuisine et qu’elle voulait éviter un accident. Tout cela était vraiment trop bizarre. Le regard de la jeune fille se posait successivement sur le biberon qu’elle tenait désormais dans une main et l’animal étrange qui se trouvait en face d’elle. Marlow avait beau avoir l’habitude du surnaturel, et pour cause, elle avait été plongée dedans avec le don un peu spécial qu’elle avait reçu, elle restait complètement ébahie par une telle découverte. James devait bien s’amuser de la voir se comporter comme une petite fille de six ans allant à Disneyland pour la première fois.

« Je dois faire comment ? » Demanda-t-elle finalement, incapable de savoir comment s’y prendre pour donner correctement son déjeuner au poney ailé. « Il est vraiment trop beau, j’aurais bien aimé pouvoir le dessiner. »

Cette dernière phrase s’adressait plus à elle-même qu’à son ami, mais c’était plus fort qu’elle. Marlow pensait souvent d’abord à son travail, elle adorait immortaliser toutes les scènes qui s’offraient à elle, pourtant, ce n’était pas la mémoire qui lui faisait défaut, bien au contraire, son don lui permettait théoriquement de ne rien oublier du passé que ce soit le sien ou celui des autres, mais elle avait besoin de dessiner pour se remémorer les bons moments, c’était plus fort qu’elle. Dans le cas présent, c’était bien sûr exclu, mais en avoir envie n’était pas un crime.

« Je suis les cours de soin aux créatures magiques depuis cinq ans et les chevaux ailés sont mes créatures préférées. Une chance que ce soit moi qui soit tombé dessus pas vrai ? Vu que les Ethonan ont une croissance relativement rapide, je finirai par mettre mon prof au courant, mais jusqu'à aujourd'hui je me suis occupé de lui tout seul oui. »

La classe. Marlow ne pouvait pas s’imaginer ce que ça aurait été si elle s’était retrouvée dans sa situation. Un carnage très probablement. Elle aurait paniqué, en aurait parlé aux mauvaises personnes, aurait été incapable de se justifier convenablement auprès de la directrice après sa convocation en urgence et se serait probablement fait renvoyer de l’école pour avoir tenté d’y intégrer un animal potentiellement dangereux sans attendre d’autorisation préalable. De son côté, James semblait gérer tout cela très bien, il s’était manifestement organisé pour pouvoir rendre visite très régulièrement à son poulain ailé, savait à peu près quoi faire et ce qu’il adviendrait par la suite. La rouge et or savait qu’il prenait des cours de soin aux créatures magiques, mais ce n’était pour autant qu’il pouvait être un expert en la matière, or ça semblait être le cas actuellement. Mais il fallait qu’il fasse attention, la roue pouvait tourner très vite et elle aurait détesté que son acte de bravoure se retourne en sa défaveur.

« C’est peut-être parce que tu as un don spécial avec les animaux, il s’est senti en confiance et est venu vers toi. » Lui fit-elle remarquer, pas forcément convaincu que ce genre d’événement ne puisse être que le fruit du hasard. « Pourquoi tu n’as pas voulu en parler à qui que ce soit ? »

Non pas que la jeune fille refuse catégoriquement de croire qu’une telle rencontre puisse être dû au destin, au karma ou à un truc du même genre, mais elle avait toujours entendu dire que les animaux étaient des êtres prudents et intelligents. S’il s’était caché dans cette forêt et n’en était ressorti qu’à l’apparition de James, il y avait forcément une raison à cela. Peut-être avait-il simplement perçu sa gentillesse et son désir d’aider son prochain ? C’était tout à fait possible et si c’était le cas, l’animal avait été beaucoup plus perspicace que Marlow qui, de son côté, avait mis plus que des semaines et des semaines avant de parvenir à faire confiance au jeune homme. Elle était méfiante et réservée de nature ce qui ne l’aidait pas à bien s’entendre avec les gens en général, mais dans le cas du rouge et or, elle avait conscience qu’elle aurait pu faire un petit effort longtemps auparavant. Elle avait eu de la chance, James s’était montré patient et persévérant, tout le monde n’aurait pas agi de la sorte.

« Tu n'as qu'à glisser le bout du biberon à l'extrémité de ses lèvres. Il fera le reste et n'hésite pas à lui caresser son visage quand il boit. Il adore ça. Ne te fais pas prier. Tu pourras après si tu veux, ou plus tard si tu souhaites revenir ici. Je t'y autorise. »

Trop d’informations en même temps, elle ne savait plus trop quoi dire ou quoi faire, elle était super contente qu’il lui fasse assez confiance pour lui octroyer un tel privilège, mais d’un autre côté, elle trouvait horrible d’être confrontée à ce genre de situation. Ne pas savoir si elle allait être à la hauteur, si elle allait faire les gestes correctement ou si ça allait se terminer en catastrophe était un problème difficile à résoudre pour la jeune fille. Tout pour elle était matière à angoisse, elle ne pouvait pas s’en empêcher c’était plus fort qu’elle. Sa particularité avait eu pour désastreuse conséquence de lui faire perdre toute confiance comme elle et même si la Gryffondor avait la chance d’être bien entourée, elle avait beaucoup de mal à acquérir la même aisance qu’avait une grande partie des autres élèves de l’école. Marlow aurait beaucoup aimé pourtant, elle avait des choses à dire et des idées à énoncer, mais tant qu’elle n’oserait pas être un peu plus présente, elle ne serait pas entendue alors elle ne prenait même pas la peine d’essayer de se faire entendre, préférant rester dans son coin avec ses carnets à dessin et des rêves plein la tête.

« Oh c’est vrai ? Merci, merci, merci ! » S’exclama-t-elle ravie de pouvoir exhausser son souhait. « Ce serait génial, je n’ai jamais vu aucun Ethonan avant, et à l’aquarelle, et si je m’y prends bien, ça pourrait donner un résultat super ! »

Sans son stupide don, elle se serait jeté à son cou pour lui exprimer sa gratitude, mais hors de question qu’elle se laisse aller, ses merci enthousiastes devraient lui suffire à comprendre qu’elle était vraiment touchée par son autorisation et de plus en plus reconnaissante. Marlow avait pourtant réussi à arrêter de penser dessin, dormir dessin, manger dessin et respirer dessin lorsqu’elle était à Poudlard. Elle savait que son passe-temps typiquement moldu ne plairait pas forcément à une grande partie de ses petits camarades, aussi faisait-elle preuve la plupart du temps de discrétion. D’autant plus que ce n’était pas comme si elle s’ennuyait à l’école lorsqu’elle dessinait, bien au contraire. Elle avait toujours du travail par-dessus la jambe, des personnes à voir, des cours à suivre et tout un tas de choses à découvrir. Mais de temps à autres, la rouge et or prenait le temps de s’adonner à sa passion, tant pour ne pas perdre la main que pour replonger dans cet univers de création dans lequel elle se sentait si bien. Sauf que pour l’instant, elle avait un devoir à accomplir, le biberon qu’elle tenait toujours dans la main était là pour le lui rappeler.

« Bon, je me lance. » Finit-elle par dire comme pour se donner du courage. « Il doit avoir faim le pauvre. »

Elle s’approcha de l’animal tout doucement avant de lui tendre la tétine dont il se saisit goulument mais sans brusquerie, comme s’il avait été habitué à être doux et calme. C’était un moment génial et elle comprenait maintenant pourquoi James avait voulu la pousser à essayer. Alors qu’elle le regardait boire, elle se rappela les paroles du jeune homme et tendit sa main libre pour lui gratouiller la joue d’un geste un peu maladroit dans un premier temps puis de plus en plus assuré par la suite. Elle avait quasiment occulté la présence du rouge et or à ses côtés, et pourtant elle lui devait beaucoup.

« Quand j'ai remis Flynn sur pied, je me suis documenté sur son espèce aussitôt rentré au château. Quand j'ai vu que l'espèce se faisait rare, j'ai préféré garder cela secret. Je sais qu'à Poudlard je ne fais pas l'unanimité donc des emmerdeurs pourraient très bien se servir de Flynn contre moi. Et ça je refuse. Et si je confie ce secret à toi, c'est pour ton épanouissement, car je sais que tu n'as rien contre moi. »

L’explication se tenait mais elle ne voyait pas vraiment qui pouvait bien en vouloir à ce point-là à James. C’était un garçon adorable. Certes, il avait une certaine réputation à cause de ses origines, tout le monde connaissait Harry Potter dans le monde des sorciers, il avait sorti l’univers magique d’une catastrophe imminente et tout le monde lui devait une fière chandelle. Alors oui, il restait certains réfractaires à cette paix retrouvée, mais elle n’avait jamais eu l’impression qu’ils soient si nombreux que ça à Poudlard. Qui plus était, James était un garçon attachant qui ne s’amusait pas à narguer ses camarades sous prétexte qu’il était le fils d’une célébrité. D’ailleurs, la plupart du temps, il n’en parlait tout simplement pas, se contentant de rester lui-même et naturel. Après, peut-être n’était-il pas comme ça avec tout le monde, mais Marlow avait du mal à croire qu’il puisse adopter un comportement complètement différent de celui qu’il avait avec elle lorsqu’il était en présence d’autres élèves. En plus, ça n’aurait pas eu le moindre sens, ce n’était pas comme si elle aurait pu lui reprocher de se la raconter un peu, elle avait lu tous les livres parlant de cette célèbre guerre et trouvait toujours très intéressant de le questionner à ce sujet.

« Oh… Je comprends. Mais je ne pense pas qu’il pourrait y avoir des élèves assez vicieux pour maltraiter Flynn rien que pour te faire du mal. » Répondit-elle totalement convaincue par ses propos. « On peut être cruel entre nous, mais pas avec un animal sans défense, c’est impossible. Mais je respecte ton choix, il se défend, je ne dirais rien à personne. »

Marlow avait conscience qu’elle se montrait un peu naïve parfois et pour cause, elle aimait croire que les personnes qu’elle côtoyait avaient un bon fond malgré tout, il était très difficile pour la jeune fille d’envisager que ça puisse ne pas être le cas. Elle avait besoin de ça pour son équilibre. Son enfance avait un peu délicate, sa famille autrefois soudée avait complètement explosée, le divorce de ses parents avait eu un effet boule de neige imprévisible et dévastateur. D’abord forcée de partager son temps entre ses deux parents qu’elle adorait, Marlow avait dû faire face à l’emprisonnement de son père pour un meurtre qu’il avait véritablement commis, même s’il n’avait pas eu l’intention de le faire. Les articles de journaux parlant de le faire avait été une autre épreuve à surmonter. Ses relations avec sa génitrice s’étaient dégradées lorsque cette dernière avait réussi à reprendre le dessus et à avancer dans la vie, rencontrant un autre homme, l’épousant, ayant même deux nouveaux enfants. La Gryffondor, de son côté, avait longtemps vécu dans le passé, espérant sans trop savoir pourquoi que sa famille allait renaitre de ses cendres. En parallèle, elle devait jongler avec sa particularité qui lui donnait l’impression d’être un monstre, impression qui ne la quittait toujours pas à l’heure actuelle, elle avait simplement appris à vivre avec. Alors forcément, lorsqu’elle pouvait voir le bien partout, Marlow ne se privait pas, c’était une nécessité que de croire qu’autour d’elle, les choses pouvaient finalement être roses.

« C'est amusant, on dirait que tu t'y es déjà attachée. »

Finalement, la jeune fille avait pris son courage à deux mains pour donner le biberon au poney ailé apprivoisé par son ami et elle ne regrettait rien. Non seulement il ne se comportait pas comme un animal sauvage, mais en plus ce doux contact lui rappelait qu’elle pouvait se permettre de lâcher prise de temps en temps et de profiter des moments merveilleux que lui offrait le quotidien dans une école de magie. Certes, il lui arrivait, comme tout le monde, de se laisser entrainer par sa routine, entre les cours, les repas dans la grande salle, les soirées devoirs dans son dortoir et des weekends entiers à rêvasser, dessiner ou encore profiter de la ville de Pré-au-Lard, il était facile de se laisser entrainer dans un rythme confortable et linéaire. Sauf que lors de ces rares petits moments d’exception, Marlow réalisait que finalement, l’imprévu n’était pas aussi désagréable qu’il en avait l’air et elle avait bien raison de jouer les courageuses et d’affronter ses peurs, c’était toujours payant. Absorbée par sa tâche, elle en avait d’ailleurs complètement oublié son ami et il eut la gentillesse de se rappeler à son bon souvenir en reprenant la parole, une fois de plus.

« Vous êtes adorables. »

Pour le coup, elle aurait presque été d’accord avec lui, sans lâcher le biberon, Marlow se tourna brièvement vers son ami, un large sourire sur le visage. Il lui avait fait partager sa passion et elle était vraiment fière qu’il l’ait choisi pour ça. D’après tout ce qu’il lui avait dit jusque-là, elle savait que Flynn avait une importance primordiale dans sa vie à l’heure actuelle, alors forcément, elle ne pouvait que se sentir importante à son tour. Non seulement il l’avait fait venir alors qu’il n’avait amené personne avant elle, mais en plus il jugeait qu’elle était assez digne de confiance pour qu’elle puisse revenir le voir et s’en occuper. Marlow n’était pas sûre de mériter un tel honneur, mais elle garda ses doutes pour elle, cette fois-ci. Si le rouge et or avait pris cette décision, c’était probablement qu’il avait pris le temps de la réfléchir et il devait avoir ses raisons même si elle ignorait ce qu’elles pouvaient bien être. Le poney ailé finit par relâcher la tétine, ayant but le biberon jusqu’à la dernière goutte. La Gryffondor se retourna vers son ami pour lui tendre le récipient désormais totalement vide, s’éloignant de seulement un pas de l’animal qu’elle avait désormais adopté.

« Comment ne pas s’y attacher ? Il est incroyable. » Lui répondit-elle, des étoiles plein les yeux. « Il faudra que tu m’emmènes plus souvent. Je vais te harceler pour pouvoir venir le voir. »

Il allait avoir du mal à réussir à se débarrasser d’elle désormais mais James aurait dû y penser avant. Marlow n’était pas sûre de réussir à dormir ce soir, c’était comme un jour de Noël pour elle, la jeune fille avait la nette impression d’avoir déballé un immense paquet cadeau et de ne pas réussir à se remettre de la surprise de taille que celui-ci contenait. Une chose était sûre, James avait particulièrement bien réussi son coup.

« Tu n'auras pas besoin de mon autorisation pour venir rendre visite à mon p'tit Flynn va. Je t'autoriserai à venir quand tu en ressentiras l'envie ou même le besoin. Mais bien sûr, tu peux venir m'harceler même si ce n'est pas pour Flynn ! »

Evidemment, la dernière phrase du jeune homme fit rougir la jeune fille qui, bien qu’habituée aux taquineries de son ami, supportait toujours aussi mal ce genre d’allusion. Mais elle reprit bien vite contenance, il y avait une information importante dans ses paroles et elle n’était pas bien sûr d’en saisir le sens. Il venait de lui dire que son autorisation ne serait pas nécessaire pour qu’elle aille rendre visite à Flynn. Signifiait-il par ces mots qu’il lui permettait de venir ici par ses propres moyens sans qu’il soit là pour superviser la rencontre ? C’était vraiment inattendu pour Marlow qui n’était vraiment pas certaine d’avoir bien saisi le sens qu’il voulait bien donner à ses mots. Peut-être sous-entendait-il toute autre chose ? Qu’il allait lui donner ses horaires de cours et ses heures de pauses habituelles pour qu’elle puisse se caller dessus au lieu de lui poser constamment dix milles questions ? C’était déjà plus crédible comme façon de voir les choses, et puis ça éviterait qu’ils galèrent à se donner rendez-vous. Toutefois, la jeune fille restait convaincue que ce n’était pas de ça dont il avait voulu parler mais bien d’une autorisation pleine et entière de voir Flynn quand elle le souhaitait, autant en avoir le cœur net.

« Tu veux dire que tu m’autoriserais à venir lui rendre visite toute seule ?! » Demanda-t-elle un peu interloquée malgré tout. « Je veux dire… C’est gentil, ça me fait super plaisir mais je… Je ne voudrais pas faire une bêtise ou que tu puisses me reprocher quoi que ce soit. Contrairement à toi, je ne m’y connais pas du tout. J’aurais vraiment adoré, mais je crois que je préfère que tu sois là, c’est plus rassurant. Et puis au moins, je peux garder ça comme excuse pour te harceler, quoi que tu puisses en dire. »

Elle avait toujours quelques scrupules lorsqu’elle allait trouver James si elle avait besoin de lui. Après le calvaire qu’elle lui avait fait endurer pour lui accorder un minimum de confiance, elle ne trouvait pas très correct de sa part de se reposer sur lui de cette façon. En plus, Marlow avait toujours sa meilleure amie à ses côtés mais ce n’était pas pareil, Siobhan n’avait pas cette assurance si caractéristique du Gryffondor et elle ne lui donnait pas non plus le même genre de conseils. Voilà pourquoi la jeune fille avait pris pour habitude de s’appuyer sur l’un ou sur l’autre, suivant la situation. James était rapidement venu son pilier, celui qui encaissait tout à sa place, l’aidant à relever lorsqu’elle tombait, riant avec elle lorsqu’elle avait besoin de rigoler. Alors forcément, de temps à autres, Marlow avait l’impression que cette relation était un peu à sens unique et elle essayait au maximum de réduire la dépendance qu’elle ressentait perpétuellement à son égard. C’était sûrement pour cette raison qu’elle avait préféré éviter lui parler de sa courte amourette avec Jesse et peut-être aussi parce que parler de relation amoureuse avec un garçon aurait été vraiment bizarre.

« En tout cas, je vois que la surprise est à la hauteur de mes attentes. Essayes juste de résister à l'envie de prendre Flynn avec toi pendant les vacances, d'acc ? »

Un large sourire illumina le visage de la jeune fille. Elle ne pouvait que trouver l’idée amusante. Elle se voyait bien rentrer chez sa mère avec le poney ailé… Où pourrait-elle bien le caser pour éviter que tous les moldus de la planète le voient ? Il y avait bien une petite forêt non loin de Liverpool dans laquelle ils allaient très régulièrement se promener en famille. Certes, il fallait prendre la voiture pour s’y rendre, mais ce n’était pas très loin et en vélo, la distance ne paraissait pas catastrophique non plus. Ce serait un moyen comme un autre de brûler les calories. Le problème restait qu’ils n’étaient pas la seule famille à apprécier ce coin, il était devenu assez touristique car permettant de sortir un peu de l’ambiance citadine et Marlow n’était pas sûre que ce soit la cachette la plus judicieuse. Elle n’avait pas de jardin et ne se voyait pas franchement mettre l’animal dans la maison familiale, qui plus était ça risquait de jaser puisque les voisins se rendraient forcément compte qu’ils se passaient quelque chose. En définitive, ce n’était pas une idée envisageable mais elle restait quand même amusante.

« Tu lis dans mes pensées. » Plaisanta-t-elle, entrant dans son jeu sans la moindre difficulté. « On pourrait toujours créer un système de garde alternée, ça marche pour les divorcés alors pourquoi pas pour nous ? »

Pour ce qui était des divorces, Marlow s’y connaissait plutôt bien même si dans le cas de ses parents, ça ne s’était pas exactement passé comme dans un divorce lambda. Son père avait rapidement perdu sa garde, faute de pouvoir s’occuper convenablement d’une enfant. Il s’était retrouvé dans une situation précaire et assumer son rôle de parent semblait un peu délicat. Sauf que contrairement à beaucoup de gens dans cette situation, il s’y était accroché. Sa fille était devenue son objectif, celle pour qui il se battait pour remettre sa vie à flots. Alors certes, il n’avait pas les moyens de l’héberger un week-end sur deux et une partie des vacances scolaires, mais il s’était arrangé avec son ex-femme pour avoir la possibilité de lui rendre visite et s’arranger pour ne pas être totalement absent de sa vie. Sauf qu’en plus de tout ça, la rouge et or avait découvert qu’elle avait hérité du côté sorcière de sa mère ce qui impliquait qu’elle renonce à rentrer chez elle tous les soirs après l’école au profit d’un passage dans la prestigieuse école de sorcellerie de Poudlard. Une chance en moins de voir ses parents, donc et lorsqu’en plus elle ne pouvait pas les voir au même moment, ça paraissait plus que délicat.

« Tu aurais fait quoi si la surprise ne m’avait pas plu ? » Demanda-t-elle avec curiosité. « Ça semblait tellement important pour toi, imagine que je n’ai pas eu la réaction que tu attendais, ça aurait changé quelque chose entre nous ? »

James n’avait pas pris trop de risques, la rouge et or était facile à surprendre, elle aimait s’émerveiller pour de petites choses et était parfois un peu trop sensible. Sauf qu’elle n’était vraiment pas accro aux animaux, en temps normal, bien au contraire, alors elle aurait aussi pu avoir peur, lui demander de rentrer et pleurnicher comme une gamine en l’accusant de l’avoir fait exprès. Marlow ne pouvait pas s’empêcher de se demander ce qui se serait passé dans une telle situation.

Encore une allusion au harcèlement potentiel de Marlow qui ne put que la faire rougir davantage. Elle ne savait pas trop ce qu’il attendait par-là, mais il était plaisant de voir que sa présence quasi constante à ses côtés ne semblait pas être une hypothèse déplaisante pour James, au contraire d’après ce qu’il disait. La jeune fille qui avait eu l’habitude d’être celle dont personne ne voulait se trouvait plutôt chanceuse d’être tombée sur quelqu’un comme le rouge et or, et Siobhan aussi, sa meilleure amie avait eu le mérite de réussir à lui donner un semblant de confiance en elle et les deux jeunes filles avaient basé leur relation sur une confiance et une entre-aide qui les avaient aidées à tout surmonter durant ces longues années à l’école. Cependant, bien que sa relation avec Siobhan soit primordiale à ses yeux, elle avait conscience que son rapprochement avec James l’était tout autant, il lui apportait l’équilibre dont elle avait besoin, et même si pour le moment, il restait assez instable, il l’était déjà beaucoup moins que lors de son arrivée à l’école.

« Eh bien, je te remercie… Vraiment, je suis touchée par cette marque de confiance. Quoi qu’il en soit, si je décide de venir seule, je te préviendrais avant et je te laisserais donner tes instructions, je ne voudrais surtout pas faire les choses de travers. »

Pour qu’il confie son animal apprivoisé à quelqu’un, c’était forcément qu’il devait avoir une confiance aveugle en cette personne. En effet, il avait l’air de beaucoup tenir à Flynn. Si ce n’était pas le cas, il ne lui aurait probablement pas consacré toutes ses pauses dans le seul but de pouvoir le dresser, lui donner à manger et l’aider à se soigner et à reprendre du poil de la bête. C’était vraiment bien de sa part d’avoir agi de la sorte. Mais ce n’était pas tout, il avait aussi fait des pieds et de mains pour dissimuler son existence aux yeux des personnes qui auraient pu lui nuire alors qu’il aurait pu se décharger de cette lourde tâche en le confiant directement à son enseignant en cours de soin aux créatures magiques. Pour finir, il lui avait même donné un nom et ça, pour Marlow, ça restait un signe d’attachement certain. Elle se sentait à la fois très honorée par une telle marque de confiance et également un peu mal-à-l’aise en se rendant compte de l’importance probable qu’elle semblait avoir à ses yeux, importance qu’elle n’avait pas franchement réalisé. Elle savait que la présence du jeune homme était primordiale dans sa vie, mais inversement, elle n’en avait pas été convaincue jusqu’à aujourd’hui.

« Le mode d’emploi, vraiment ? » Demanda-t-elle vaguement étonnée. « J’espère pour toi qu’il ne fait pas plus de trente pages, je n’aurais probablement pas le courage de le lire et tu risques d’être un peu déçu à la première interrogation surprise. »

Ils rigolaient et ça faisait également du bien de voir l’atmosphère se détendre et de pouvoir parler avec un peu plus de légèreté, non pas que le ton soudainement grave de la conversation ait pu lui déplaire, elle avait trouvé ce moment important et relativement approprié à la situation, mais elle ne pouvait s’empêcher d’aimer également lorsqu’il n’y avait plus de pression entre eux, ils étaient simplement des amis en train de plaisanter et ça ne pouvait que lui faire plaisir. Elle pouvait être relativement naturelle avec James et c’était plutôt agréable, elle avait la sensation de ne pas être jugée ce qui n’était pas du tout le cas avec bon nombre de ses autres camarades. Mais ce fut de courte durée puisque la question qu’elle posa à James sembla le rendre particulièrement songeur. Espérant ne pas l’avoir déstabilisé, la rouge et or ne put qu’attendre sa réponse, légèrement anxieuse de savoir ce qu’il en pensait réellement. Elle ne s’attendait pas à être positivement étonnée par ses arguments mais ce fut le cas, elle l’entendit pour la première fois parler à cœur ouvert de leur amitié et de ce qu’elle représentait à ses yeux. Marlow put alors découvrir qu’elle était loin d’être à sens unique et lorsqu’il posa lentement sa main sur son épaule avant de poursuivre ce qu’il avait à dire, elle n’eut pas de mouvement de recul, probablement aidée par le fait que la main du jeune homme n’ait pas de contact direct avec sa peau. Une chose était sûre, elle n’avait pas eu envie de l’interrompre, désireuse d’entendre jusqu’au bout ce qu’il avait à lui dire.

« Oh… Euh… Merci… Je te fais confiance moi aussi. » Réussit-elle finalement à prononcer, un peu perturbée par sa main sur son épaule. « Mais c’est rassurant de voir que nous avons maintenant un lien assez solide pour qu’il ne puisse pas être affecté par un seul événement négatif, même si ce n’était qu’une hypothèse. J’ai de la chance de t’avoir rencontré. »

Ce n’était pas forcément évident d’exprimer quelque chose à son tour, James savait parler correctement alors qu’elle-même se trouvait un peu gauche et maladroite. Passer après lui pour faire le même genre de discours semblait donc mission impossible et elle le pria intérieurement de bien vouloir excuser sa piètre performance. Au moins, l’essentiel de ce qu’elle avait voulu lui dire avait été véritablement exprimé et c’était le principal pour Marlow qui avait déjà l’impression de se surpasser. Elle avait affronté la surprise et maintenant elle avouait ses ressentis, plein de premières dont elle pouvait certainement être fière.

« Une interro surprise ? Hmm, t'as intérêt d'être au taquet sinon tu seras collée. Je suis du genre intransigeant ! »

La jeune fille fit mine d’être choquée par les paroles de son ami mais son jeu d’actrice montrait bien qu’il n’en était rien. Elle trouvait plutôt amusant qu’il se considère comme un professeur intransigeant. Elle le voyait plus comme un garçon sensible qui serait prêt à beaucoup pour protéger les personnes qui lui étaient chères, mais il était vrai que ça ne voulait pas dire qu’il n’avait pas le droit d’être exigeant, c’était deux traits de caractères totalement séparés. Toutefois, Marlow n’avait jamais eu l’impression qu’il le soit beaucoup avec elle, il était surtout d’un grand soutien et ne la poussait pas forcément à dépasser ses peurs et ses appréhensions, préférant certainement lui apprendre à les gérer et à vivre avec. La rouge été or avait beaucoup appris à ses côtés et elle avait pas mal grandi aussi, l’aide de Siobhan couplée à la sienne lui avait permis de traverser des moments difficiles de sa scolarité à Poudlard et elle ne regrettait plus désormais de ne pas avoir arrêté sa scolarité. Elle s’était pas mal posé la question l’an dernier, il lui paraissait tellement invraisemblable qu’elle puisse avoir de bonnes notes aux BUSEs que la possibilité d’arrêter ses études magiques après celles-ci pour retourner dans le monde moldu lui avait paru être une solution envisageable, mais l’idée de se retrouver loin des personnes qu’elle aimait lui avait suffi pour qu’elle renonce, au moins pour le moment, à ce projet.

« Il n’y aucun moyen de soudoyer le professeur ? » Demanda-t-elle avec un sourire. « Chaque enseignant a ses failles. »

Ou comment tenter d’échapper à une mauvaise note… Heureusement, Marlow ne faisait que plaisanter pour le coup, il n’y avait pas le moindre fond de vérité dans ses paroles, jamais elle ne se serait permis de demander ça à un vrai professeur quelles que soient les notes qu’elle pouvait bien récolter. La rouge et or savait depuis bien longtemps que le travail n’était pas toujours récompensé contrairement à ce que tout le monde pouvait dire et qu’elle devait travailler dix fois plus que ses camarades pour obtenir de médiocres résultats. Mais elle avait fini par accepter cette injustice et depuis elle n’avait plus la même colère sourde lorsqu’elle récoltait une sale note après des heures d’acharnement pour réussir un sortilège. Heureusement qu’il y avait toujours eu les cours théoriques pour rattraper ses piètres performances, elle aurait eu du mal à s’en sortir si ça n’avait pas été le cas. Mais tout cela était derrière elle à présent et l’idée de soudoyer James lui plaisait bien. Après tout, il fallait bien pouvoir trouver des avantages au fait que son ami était également son professeur, ça aurait aussi sûrement été le cas si un des membres de sa famille s’était trouvé à Poudlard, elle n’était peut-être pas fan de l’idée d’être pistonnée mais il fallait savoir saisir les opportunités qui se présentaient.

« Et moi donc. Avant de te rencontrer je n'imaginais faire montrer ma passion à quelqu'un, tu es une fille formidable, ce n'est pas négligeable ! Je pèse mes mots dans la mesure où tu mérites tellement de choses, il faut juste que tu es ais conscience, Marlow. »

Une fois la main qu’il avait posé précédemment sur son épaule était enfin partie, la rouge et or se détendit considérablement. Pourtant, elle ne pouvait pas dire sans mentir qu’elle n’avait pas apprécié ce contact, mais c’était plus fort qu’elle, la rouge et or ne pouvait pas s’empêcher de se raidir s’attendant toujours à un faux mouvement alors qu’elle savait pertinemment que James ne pourrait jamais lui faire une chose pareille. C’était inconscient, elle ne pouvait pas s’empêcher de stresser, quand bien même elle aurait voulu se détendre elle aurait eu du mal à le faire. Toutefois, c’était toujours moins catastrophique que les années précédentes. Cet été, lorsqu’elle sortait avec Jesse et qu’ils entretenaient une relation purement platonique, la jeune fille s’était juré qu’elle allait faire quelque chose pour tenter d’apprivoiser son don et pouvoir devenir progressivement une personne normale. Elle n’allait peut-être pas pouvoir tout de suite faire des câlins à tous ses amis, mais au moins elle allait apprendre à vivre plus facilement avec et peut-être même à le contrôler. Mais cette étape semblait encore bien trop lointaine pour qu’elle puisse réellement l’envisager, elle ne pouvait pas se permettre de faire des plans sur la comète en sachant qu’il avait très peu de chance pour qu’ils se réalisent. Marlow avait beau prendre son courage à deux mains, elle restait très effrayée à l’idée d’être déçue, l’espoir faisait peut-être vivre mais lorsqu’on le perdait, on tombait de beaucoup plus haut.

« Je suis flattée que tu aies pensé à moi James, vraiment flattée. Je ne suis pas sûre de saisir tout ce que tu veux dire par-là, ni pourquoi je mériterais quoi que ce soit plus que quelqu’un d’autre, mais je ferais mon possible pour me montrer à la hauteur. » Répondit-elle en sentant ses joues rosir de nouveau. « Ce moment restera gravé dans ma mémoire. »

C’était sûrement un peu trop fleur bleue et elle n’en avait pas l’habitude, mais James faisait tant pour elle qu’elle se devait d’exprimer clairement ses ressentis aussi difficile que ça puisse lui paraitre. Ils se connaissaient depuis un long moment maintenant et la rouge et or savait pertinemment qu’elle pouvait tout lui dire sans crainte qu’il se moque d’elle ou aille tout répéter pour se moquer, mais ça ne rendait pas franchement les confidences plus simples. Marlow avait l’habitude devoir dissimuler, elle l’avait appris dès son enfance et ne parvenait pas franchement à se débarrasser de ce défaut mais apparemment James parvenait à la changer petit-à-petit et c’était vraiment une bonne chose.

« Aucun moyen, je ne ploierai pas ! »

Une mine à la fois boudeuse et vexée s’afficha sur le visage de Marlow mais elle ne put rester bien longtemps, la bonne humeur reprenant vite le dessus sur ces expressions totalement feintes. Au moins, si James devait devenir professeur dans un futur plutôt lointain encore, elle ne pourrait pas douter de son impartialité. Il semblait plutôt stricte sur le sujet et bien que la rouge et or ait parfaitement conscience qu’il était en train de plaisanter, elle ne voulait même pas imaginer ce que ça pourrait donner si elle lui demandait de l’aider pour préparer un contrôle ou un devoir. D’un autre côté, il ne lui arrivait pas très souvent de faire ce genre de choses. Marlow n’aimait pas donner sa feuille à un camarade de maison et lui demander de poser des questions car si par malheur elle se rendait compte qu’elle n’était pas à la hauteur, elle craignait un peu les moqueries de son entourage. Dans le cas de James, elle avait surtout à craindre sa sévérité, visiblement.

« C’est trop nul ! » S’écria-t-elle comme offensée par son ton catégorique. « Et moi qui me suis rapprochée de toi juste parce que je croyais que tu pourrais m’être utile… Tu me déçois beaucoup James. »

C’était tellement loin de la vérité que c’en était risible. Marlow était bien loin d’être une fille opportuniste, elle avait beaucoup de mal à se lier aux gens et l’idée même de devoir le faire par intérêt la rendait malade. En même temps, elle avait toujours craint de tomber sur les mauvaises personnes et d’être manipulée, ce n’était pas pour agir de la sorte à son tour par la suite. La rouge et or n’avait rien des exhubérantes pestes qu’elle croisait continuellement dans les couloirs du château, ces filles qui semblaient avoir tout pour elle, l’intellect, la prestance et un certain nombre d’amis dont elle ne pourrait jamais rêver. Toutefois, elle savait également que ces fameuses filles étaient des adeptes de manipulations en tous genres, il était difficile de voir en elles une quelconque trace d’honnêteté et c’était une raison parmi tant d’autres qui faisait dire à Marlow que jamais elle ne voudrait leur ressembler.

« On va le faire marcher, après nous rentrerons au château. »

La jeune fille hocha la tête et attendit que James range toutes ses affaires pour pouvoir se mettre en route. Elle prenait plaisir à imaginer ce qu’avaient dû être les premiers jours de rencontre entre son ami et Flynn, ils devaient avoir partagés des moments inoubliables, hauts en couleurs et forts en émotions. Marlow ne pouvait pas s’empêcher de remarquer qu’une certaine complicité semblait les lier, le poney ailé devait avoir pris l’habitude de voir James arriver à ses côtés tous les jours ou presque et donc lui donner sa confiance en comprenant que ce serait lui qui s’occuperait de l’aider à se rétablir. Avoir la responsabilité de quelqu’un que ce soit un être humain ou un animal devait être à la fois passionnant et effrayant. James devait se sentir important parce qu’indispensable pour le bien-être de Flynn mais même s’il ne semblait pas stressé par son rôle, il y avait de fortes chances pour qu’il angoisse un peu, parfois et c’était bien normal.

« Ceci restera aussi gravé dans ma mémoire, promis. »

La jeune fille sentit une nouvelle fois ses joues devenir plus roses qu’à l’accoutumée, elle qui n’était pas très habituée aux démonstrations d’affection se surprenaient à apprécier celles de James. De toute façon, tant qu’elles restaient verbales et qu’il ne se jetait pas sur elle pour lui faire un câlin ça n’avait pas la moindre importance, elle n’avait rien à craindre. En plus, il ne fallait pas se leurrer, Marlow trouvait plaisant de recevoir ce genre de compliments surtout de la part d’une personne qu’elle affectionnait particulièrement. Toutefois, la rouge et or avait pris l’habitude d’être plus que raisonnable, de ce côté-là, que ce soit avec ses amis ou sa famille, elle ne laissait jamais s’emballer des démonstrations d’affection ou d’émotions de peur que ça se retourne contre elle à cause de sa fichue particularité. C’était un peu dommage, parfois elle aurait vraiment aimé pouvoir s’exprimer, faire un câlin, un bisou ou sauter de joie dans les bras de n’importe qui, mais elle devait toujours mesurer et contrôler ses gestes, un peu usant à la longue.

« Et sinon, t'as un emploi du temps chargé en ce moment ? J'me disais que ça serait pas mal de se voir plus souvent, t'en penses quoi ? »

Ils avaient commencé à marcher, suivant le poney ailé qui semblait apprécier la petite balade. Toutefois, elle occulta presque complètement la présence de l’animal lorsqu’elle entendit la question du jeune homme. Sans trop savoir pourquoi, elle ignorait si elle devait prendre cette proposition pour un simple renforcement de leur amitié ou si elle devait y voir plus derrière. Mais c’était sûrement stupide de sa part, James avait toujours été très prévenant et à l’écoute avec elle, il voulait probablement continuer à prendre de ses nouvelles et vu qu’ils ne se voyaient pas très souvent et qu’en plus en présence d’autres élèves, ils ne pouvaient pas aborder n’importe quels sujets, leurs entrevues devenaient un peu plus rares avec le temps. Et puis quand bien même, Marlow avait bien envie de profiter des moments qu’elle avait à passer avec son ami, ils s’étaient toujours très bien entendu et elle aimait être en sa compagnie.

« Non, c’est plutôt calme depuis que les BUSEs sont derrière moi, j’ai plein de matières en moins aussi, ça aide. » Expliqua-t-elle à son ami avec un sourire. « Je serais ravie de te voir plus souvent, on a beau être dans la même école, on a plus tendance à se croiser qu’autre chose, c’est un peu dommage. Il faudrait qu’on s’organise, je suis sûre que c’est tout à fait possible. Tu avais une idée précise en tête ? »

Peut-être voulait-il encore lui faire découvrir des choses. Finalement, Marlow se rendait compte qu’elle apprenait beaucoup à ses côtés et n’avait rien contre l’idée de poursuivre. Certes, au départ c’était surtout pour avoir des anecdotes pour son cours d’histoire de la magie qu’elle avait apprécié passer du temps en sa compagnie, mais c’était bel et bien l’amitié qui les réunissaient désormais et aucun opportunisme ne semblait être d’actualité.

Leur balade se poursuivait sans que Marlow ne ressente le moindre stress ce qui était déjà un petit miracle. La jeune fille avait pour habitude de paniquer lorsqu’elle sentait qu’une situation lui échappait ou qu’elle ne maitrisait pas tout ce qui lui arrivait. En l’occurrence, elle avait beau ignorer tout de leur destination, elle se sentait relativement bien et parvenait à poursuivre la conversation sans le moindre mal, comme si les choses coulaient de source entre eux. Il était plaisant de pouvoir faire une telle constatation à l’heure actuelle, ça n’avait pas toujours été le cas et la Gryffondor ne pouvait qu’être ravie du tournant très positif qu’avait fini par prendre leur relation. Même leur conversation était devenue plus fluide et la rouge et or se surprenait à avoir beaucoup plus de facilités qu’auparavant à s’ouvrir au jeune homme et à lui parler à cœur ouvert, chose qui ne lui arrivait pas si souvent que ça finalement. Ils avaient progressé lentement mais sûrement et pouvaient désormais être fiers de leur parcours.

« Tu veux dire que tu as choisi de conserver toutes tes matières pour les ASPICs ? » Demanda-t-elle avec intérêt. « C’est vraiment très courageux de ta part, ça doit te demander beaucoup de travail et d’investissement. Je suis étonnée que tu parviennes encore à trouver du temps pour toi, les rares personnes que j’ai rencontré et qui ont fait le même choix semblaient être complètement submergées. »

James était définitivement un garçon plein de surprise. Il ne semblait pas être un bosseur acharné et encore moins un élève modèle mais si on prenait un peu le temps de creuser pour voir ce qu’il y avait sous la surface, il était assez simple de se rendre compte qu’il avait beaucoup de ressources à exploiter et un potentiel qui ne demandait qu’à être découvert. Peut-être était-il même un peu ambitieux finalement ? Difficile de cerner véritablement le jeune homme, sans vouloir il laissait planer autour de sa personnalité une part de mystère que Marlow peinait à déchiffrer. Mais avant qu’elle n’ait pu faire une nouvelle réflexion à ce sujet, James se retourna pour lui faire face, marchant en arrière ce qui ne put que faire flipper la rouge et or qui craignait qu’un faux mouvement ne lui fasse perdre l’équilibre. Certes, ce ne serait pas la fin du monde, mais elle avait toujours eu la poisse et il suffisait qu’il tombe mal pour se blesser pour de bon. Elle ne se sentait absolument pas capable de transporter le jeune homme s’il était blessé, d’autant plus qu’elle ne pouvait pas le toucher alors forcément, son comportement l’inquiétait un minimum.

« Fais attention. » Se sentit-elle obligée de dire, un peu protectrice malgré tout, alors qu’elle attrapait le bras du jeune homme d’une main pour l’empêcher de se casser la figure. « Je ne voudrais pas t’emmener à l’infirmerie. »

Son geste avait été naturel et motivé par la crainte, pourtant elle trouvait toujours aussi étrange d’avoir ce genre de contact avec quelqu’un, même si dans le cas présent, la robe de sorcier du jeune homme lui permettait d’être préservée de toute vision potentielle. Pourtant, elle réussit à prendre sur elle et ne lâcha pas le jeune homme, adaptant même son rythme au sien pour leur permettre d’avancer ensemble, tout en continuant à discuter en ayant la possibilité de se regarder dans les yeux alors qu’ils poursuivaient leur promenade. Marlow savait pertinemment que son ami n’avait certainement pas besoin d’être materné, mais c’était plus fort qu’elle, il lui était parfois plaisant de savoir qu’elle pouvait aussi prendre soin des autres, elle avait tellement l’habitude que ce soit l’inverse. En plus, James venait de lui montrer de quoi il était capable en lui présentant Flynn et tout ce qu’il avait accompli pour pouvoir le remettre sur pieds, il était certainement assez autonome pour se gérer tout seul, mais qui n’avait pas parfois besoin d’une amie ? Même pour quelque chose d’aussi futile.

« Oui, bien sûr, ça me parait parfait, en plus c’est la saison idéale pour se retrouver près du feu. On pourra même faire griller des Marshmallow quand il n’y aura pas de préfet dans le coin. Tu aimes ça au moins ? »

Faire chauffer des bonbons à la cheminée de la salle commune n’était probablement pas ce à quoi aurait songé tout élève lambda, mais Marlow trouvait l’idée plutôt sympathique. Elle adorait la nature et c’était vraiment l’idée qu’elle se faisait du feu de camp autour duquel tout le monde s’asseyait à la nuit tombée. Il ne lui arrivait pas très souvent de faire du camping avec sa famille, ses deux petites sœurs étaient encore trop jeunes pour pouvoir marcher sur de longues distances, la randonnée n’était pas forcément envisageable. En plus, sa maman avait tendance à préférer son confort plutôt que de jouer les aventurières. La rouge et or s’estimait déjà donc très chanceuse de voir qu’elle s’intéressait à son travail et lui avait même permis d’installer sa chambre noire dans la maison sans trop se montrer réfractaire à l’idée. Elle était peut-être un peu en décalage avec le reste de sa famille, mais elle ne pouvait que constater les efforts qu’ils faisaient pour qu’elle soit intégrée au même titre que leurs autres enfants dans ce foyer si bancal et si accueillant à la fois.

« Ta question me prend un peu au dépourvu. » Avoua-t-elle le plus naturellement du monde. « La photographie et le dessin sont mes plus grandes passions, j’aime immortaliser les paysages que je trouve beaux, mais j’adore faire des portraits aussi, ça me donne l’impression de pouvoir attraper les moments de bonheur pour qu’ils ne s’échappent jamais. C’est niais, je sais… »

Elle ne dessinait pas les personnes comme elle représentait des lieux, elle aimait que ses personnages fictifs ou non aient l’air en mouvement, joyeux, alors qu’elle préférait que les représentations de la nature, soient figées comme suspendues dans le temps, sans pour autant enlever la vie qui la parcourait forcément. C’était un peu particulier et certainement compliqué à expliquer mais Marlow savait ce qu’elle faisait pour le coup et rien ni personne n’aurait pu venir perturber son objectif.

« Entre nous, je n'attends pas d'être libre pour m'occuper de Flynn ou être avec mes amis. Je me donne ce temps libre, ce ne sont pas le nombre de matières qui va m'empêcher d'avoir une vie sociale. »

Carpe diem. Ce proverbe s’appliquait particulièrement bien à James, il semblait être ambitieux, certes, mais à la fois désireux de ne louper aucun moment important dans sa vie et même si la rouge or craignait qu’il ne parvienne pas à maintenir ce rythme de vie pendant très longtemps, elle trouvait impressionnant qu’il cherche à ne renoncer à rien et à faire tout son possible pour organiser son emploi du temps en y incluant toutes ses passions et ambitions. Beaucoup auraient sacrifié une partie de leur vie sociale pour une profession haut placée et un salaire allant avec, mais lui visait le sommet de la pyramide, ou presque, et ne semblait pas du tout vouloir délaisser ses proches. Tant mieux, plus elle passait du temps en compagnie du jeune homme et plus Marlow réalisait qu’elle aimait être avec lui et elle aurait eu beaucoup de mal à y renoncer. Bien sûr, s’il lui disait qu’il avait trop de travail et qu’il n’avait pas le temps de la voir, elle comprendrait et s’effacerait au moins le temps qu’il ressorte la tête de l’eau, mais fort heureusement, il lui consacrait beaucoup de temps et la rouge et or ne pouvait qu’espérer que ça continue ainsi.

« J’espère que tu prends le temps de te reposer aussi, tu dois vivre tellement vite pour avoir le temps de tout faire… »

Prenait-il simplement le temps de se poser et de réfléchir ? C’était le gros défaut lorsqu’on avait un emploi du temps surchargé, on était forcément obligé de faire quinze choses en même temps, d’avoir un planning minuté du moment du réveil jusqu’à l’heure du couché et donc aucun laps de temps pour se permettre de ne rien faire, ou d’écouter un peu de musique, les yeux fermés pendant qu’on se laissait entrainer par une réflexion plus ou moins futile qui s’égarerait forcément en cours de route. Bon, pour la musique, à Poudlard, c’était un peu mort et enterré, la technologie moldue n’avait jamais fonctionné dans l’enceinte du château, que ce soit dans le parc ou ailleurs. Marlow était la première à le déplorer, lorsqu’elle chez elle, la jeune fille appréciait particulièrement de pouvoir s’allonger sur le dos, les yeux résolument fixés sur le plafond alors qu’elle plaçait les précieux écouteurs sur ses oreilles pour se laisser entrainer dans un autre monde qui n’était pas le sien. Bien sûr, l’imagination se travaillait aussi sans musique, mais ça restait beaucoup plus évident lorsqu’elle était présente.

« S'il y a bien une chose avec laquelle je joue avec le feu, c'est bien les marshmallow ! »

La jeune fille ne put s’empêcher de rire, faisant sans le vouloir, résonner sa voix dans la forêt. Le jeu de mot était particulièrement bien trouvé et Marlow n’avait aucun mal à se projeter vers une pareille soirée, ce serait même la meilleure de l’année, elle en était persuadée. Au moment des fêtes de Noël, une grande partie des élèves de l’école regagnaient leurs foyers familiaux, ils auraient donc un minimum de tranquillité et pourraient se permettre ce genre de distraction… Sauf que, Marlow avait prévu de rentrer chez sa famille pendant les vacances de Noël, elle ne voyait pas du tout assez son père à son goût et même si elle continuait à lui envoyer constamment des dessins par hibou pour lui faire vivre une partie de son quotidien, ce n’était pas pareil que lorsqu’elle se présentait au parloir de la prison. Il faudrait donc qu’ils trouvent un autre moment de tranquillité, il y en aurait très certainement d’autant plus que les salles communes se vidaient vite à l’heure du coucher. Etre aux côtés de son père était quelque chose de primordial et elle ne pouvait pas vraiment se permettre d’y renoncer.

« En aucun cas c'est niais, tu as donné à ton travail la qualité et la maturité qu'il mérite. Tu es talentueuse alors fais bon usage de ton expérience, cela se fait rare de nos jours. »

La gentillesse de James la fit rougir, comme d’habitude, elle n’avait pas l’habitude de recevoir une avalanche de compliments ni même que son travail soit reconnu de la sorte et le jeune garçon semblait vouloir lui prouver que contrairement à ce qu’elle pouvait bien penser, elle méritait d’aller loin et de faire connaitre son travail. Marlow n’en ressentait pas encore la nécessité, sûrement parce que c’était plus une passion qu’une éventuelle perspective d’avenir mais sentir qu’elle avait quelqu’un à ses côtés qui croyait en elle était déjà une petite victoire, elle ne pouvait pas le nier. Bien sûr, elle avait ses parents et tout le reste de sa famille recomposée à ses côtés, mais la rouge et or savait pertinemment que la famille n’avait pas une objectivité folle, bien au contraire puisque les mamans étaient capables de s’extasier pendant dix minutes sur les colliers de pâtes de leurs rejetons. Mieux valait qu’elle garde la tête froide lorsqu’elle leur montrait une peinte et que son beau-père lui proposer de l’encadrer pour la mettre dans le salon, elle avait d’ailleurs toujours refusé de peur qu’ils se sentent obligés d’accrocher une horreur pour lui faire plaisir. Peut-être se trompait-elle, mais dans le doute, elle préférait s’abstenir.

« Je dirais qu’on a tous une sensibilité différente et qu’il est souvent difficile de trouver quelqu’un qui partage la même que nous. »

Est-ce qu’on pouvait réellement dire que ces stupides Serpentard dans le genre de Franz avaient une réelle sensibilité ? Rien n’était moins sûre et Marlow en doutait fortement, mais elle préférait s’écarter au moins pour cette fois-ci des préjugés qui créaient ce stupide esprit de compétition entre les maisons, c’était bien souvent difficile, mais elle ne voulait surtout pas que James pense qu’elle jugeait les gens selon leurs couleurs, car bien que ce soit souvent le cas et un acte presque naturel, elle tâchait de s’en abstenir autant que possible.