J’étais un peu triste d’être revenue à Poudlard sans ma grande sœur Hailey. Même si j’avais eu tout l’été pour me faire à l’idée qu’Hailey ne reviendrait pas à Poudlard cette année pour finir ses deux années de scolarité, j’étais quand même triste aujourd’hui d’être loin d’elle, alors que nous avions toujours été proches l’une de l’autre. Par contre, j’étais bien contente de revenir au château pour continuer à apprendre, revoir mes amies, pouvoir refaire de la magie. J’avais croisé Bailee et Candlynn depuis la rentrée, il y a de cela deux jours; je leur avais un peu parlé mais sans plus. Pour une raison inconnue, je ne me sentais plus aussi à l’aise avec les deux aiglonnes qu’autrefois. De toute façon, je n’avais jamais été très à l’aise avec Bailee. C’était plus avec Candlynn que je m’étais éloignée… Je voyais souvent les deux jeunes filles ensemble et me sentais de plus en plus exclue. Je soupçonnais le fait qu’elles commençaient à me trouver « bébé », et ça me faisait un peu de peine qu’elles pensent ça. Ce n’est pas parce que je ne m’intéresse pas aux garçons que je suis « bébé », bon! J’aime juste rester dans mes jeux imaginaires et croire ce que j’ai envie de croire, c’est tout! De toute façon, je m’étais rapprochée de deux autres filles à la fin de l’année précédente : Marie-Joséphine et Lou. C’était deux Poufsouffles vraiment gentilles! J’avais aussi fait la rencontre d’Helen, également à Poufsouffle, et que je considérais comme une amie aujourd’hui. J’avais rencontré Marie-Joséphine lorsque celle-ci m’avait entendue jouer du violon dans une classe vide, au printemps dernier. On avait aussitôt sympathisé et j’étais contente d’avoir trouvé quelqu’un avec qui ça « cliquait » vraiment, comme disait ma sœur. Quant à Lou, MJ me l’avait présenté par la suite, et même si ça avait moins « cliqué » avec elle, ça n’empêchait pas le fait que je la trouvais tout de même sympathique.

Bref, cette deuxième journée d’école venait de se terminer. Avec tous mes livres de mon dernier cours, Sortilèges, je m’étais rendue à ma Salle Commune pour déposer mes affaires et prendre une couverture extérieure avant de descendre à la Grande Salle pour manger rapidement, mâchant à peine les morceaux de nourriture avant de les avaler. C’est qu’il faisait beau et chaud aujourd’hui et je souhaitais profiter des rayons du soleil dans le parc avant de rentrer à l’intérieur. Une fois que ce fut fait, je me dirigeai vers le parc. Je m’en allais m’asseoir au bord de l’eau et installer ma couverture sous moi lorsque je vis MJ installée un peu plus loin à l’écart en train d’arracher des bouts d’herbes dans ses doigts. Heureuse de la revoir enfin – je n’avais pas eu la chance de la croiser depuis le printemps dernier – j’accouru vers elle. J’accélérai la cadence de ma course en criant « MJ !!!! ». Cette dernière, surprise par autant d’enthousiasme de ma part, se remit sur ses genoux et m’accueillit avec un grand sourire. Je m’agenouillai à côté d’elle lorsque MJ ouvrit la bouche:

« Coucou ! T'vas bien ? Regarde ce que j'ai trouvé ! On dirait une corne de licorne ! »

Je regardai à mon tour le drôle de bout de bois en forme de corne, ignorant sa question du même coup. Elle avait dit le mot magique « licorne »! «Wooow! », je lui répondis, les yeux brillants. « Tu es sur que c’est ça? » rajoutai-je en me rapprochant d’avantage pour observer le bout de bois dans les petits doigts de Marie-Joséphine.

« Faudrait qu'on la retrouve, la licorne, elle a peut-être besoin de sa corne ! Oh ! Et si on la peignait en rose ! »

Alors que j’hochai la tête de haut en bas vigoureusement quand MJ proposa de retrouver la licorne, le reste de sa phrase me laissa indécise. « Hmm… peut-être que la licorne ne sera pas contente qu’on peigne sa corne, même si c’est beau le rose! Je pense qu’on devrait lui demander la permission quand on va la retrouver. » Je regardai de droite à gauche, espérant sans vraiment y croire voir la licorne à mon tour. Après tout, j’ignorais si c’était vraiment un bout de corne de licorne ou pas, même si j’espérais que ce soit le cas. « Comment elle l’a perdu, d’après toi? » demandais-je en faisant référence au bout de bois que Marie-Joséphine tenait dans ses doigts.

La gamine laissa un grand sourire se dessiner sur ses lèvres. Phoebe faisait partie de ses meilleures amies, elle était donc heureuse de la retrouver pour la rentrée. C'était dommage qu'elles ne soient pas de la même année, elles auraient pu travailler ensemble ou se mettre en binôme pour certaines matières. Mais les deux filles parvenaient tout de même à passer du temps ensemble. Elles jouaient, trouvant toujours une histoire à inventer. De toute façon, tout était bon pour jouer. Quand il ne s'agissait pas des poupées, c'était les animaux. Et quand il ne s'agissait pas des animaux, c'était un bout de bois, un peu comme maintenant. En soi, n'importe qui pouvait leur dire que ce bout de bois n'était pas une corne de licorne. Mais quel en était l’intérêt ? Elles étaient encore jeunes et naïves, il fallait simplement les laisser dans leur monde à elles. Ce fut donc sans réelles surprises que Phoebe entra dans le jeu que venait de lancer la jeune poufsouffle. La jeune fille s'assit donc sur ses fesses pour tendre le bout de bois à la bleue et bronze. Si ce bout de bois était réellement une corne de licorne, c'était évident que les deux jeunes filles allait vivre de grandes aventures ! « Bien sûr que c'est ça ! Tu veux qu'ce soit quoi d'autre ? Je pense que c'est une jeune licorne, regarde, elle n'est pas bien grande. » C'était donc encore plus intéressant ! Bien oui, tout le craquait face à un jeune animal. Ils avaient cette face toute ronde et était si pataud qu'on ne pouvait pas vouloir les toucher, les aider et leur faire des câlins. L'envie de s'approcher d'un bébé licorne était donc une priorité pour la jeune blonde.

Elle proposa donc à son amie de retrouver la dite-licorne. Cette proposition ne sembla pas tomber dans l'oreille d'une sourde puisque Phoebe s'excita aussitôt. Quant à la fin de la phrase de Marie-Joséphine, la troisième année semblait perplexe. La jeune blonde en fut instantanément déçue mais, quelque part, Phoebe avait raison : la licorne n'apprécierait peut-être pas d'avoir une corne rose. Elle ne put cependant s'empêcher de bouder un peu : « Ca l'aurait rendue unique, à la licorne... » Oui, notre petite était boudeuse et capricieuse à ses temps perdus. Mais elle avait également cette folle capacité de passer d'une mine boudeuse à une mine enjouée et impatiente. Alors, elles partaient à la recherche de la bébé licorne ou quoi ? « Elle s'est peut-être battue avec son frère ou sa soeur ? Ou alors elle était pourchassée et l'a perdue pendant la course ? Si ça se trouve, elle est en danger ! » Voilà, maintenant, Marie-Joséphine avait enfilé la cape de l'héroïne. Avec l'aide de Phoebe, elle partirait à la recherche de la licorne et irait l'aider, la sauver. Marie-Joséphine se releva et invita Phoebe à faire de même. Elle regarda un moment autour d'elle. Les couples ou groupes d'amis qui discutaient assis sur l'herbe ne l'intéressait pas. Ce n'était pas ça qu'elle recherchait. Elle posa ses yeux au sol autour d'elle. « On devrait pouvoir trouver des traces de la licorne, non ? » Elle venait d'enfiler la casquette de Sherlock Holmes. Marie-Joséphine ou la Sherlock à cape d'héroïne. Oui, la gamine pouvait porter n'importe quelle tenue tant qu'elle s'amusait ! « Là ! » Son doigt pointait une trace dans la terre. Cette dernière était ronde. Il n'y en avait pas aux alentours et sans doute ne s'agissait-il pas du tout d'une trace de licorne mais cela suffisait pour la demoiselle qui voyait son jeu devenir un peu plus réel. « Viens Phoebe, faut suivre les traces ! »

Dans le parc de Poudlard, j’étais assise à côté de ma nouvelle amie Marie-Joséphine, en train d’observer un bout de bois qui ressemblait très fortement à une corne de licorne. Marie-Joséphine, que j’avais rencontré l’année dernière, au printemps, était devenue plus proche de moi en quelques mois que Bailee et Candlynn en plusieurs années. L’amour de la musique, notre innocence, notre plaisir à s’inventer des jeux, à voir dans de simples bouts de bois une aventure à venir… Au fil de nos conversation, j’avais compris que Marie-Joséphine était une personne très catholique. Ça ne me dérangeait pas du tout, j’acceptais qu’elle soit comme ça, avec cette amour pour Dieu. Je me disais qu’elle devait rarement se sentir seule, avec la foi qu’elle avait. Je ne ressentais pas les mêmes sentiments pour la religion mais pour le moment, ce n’était pas un élément qui nous séparait.

Marie-Joséphine lui tendit le bout de bois et répondit du tac au tac à sa question: « Bien sûr que c’est ça! Tu veux qu’ce soit quoi d’autre? Je pense que c’est une jeune licorne, regarde, elle n’est pas bien grande. ». Prenant des airs de professionnels, j’observai la licorne sous tous ses angles avant de dire: « Hmm… Je ne crois pas qu’elle soit si jeune. Les licornes-enfants n’ont pas de cornes, je l’ai lu dans un livre sur les licornes. Mais c’est probablement que ce soit une jeune adulte. » Je m’y croyais vraiment, dans ce jeu, assez pour perdre pied à la réalité, totalement concentrée dans notre jeu. Ainsi, quant la deuxième année me proposa de rechercher la licorne, je répondis avec beaucoup d’enthousiasme, jetant déjà des regards dans les alentours, en quête d’un éclat blanc dépassant entre les arbres. Elles parlèrent ensuite de peindre la corne en rose: sur cette idée, j’étais un peu moins enchantée. « Ça l’aurait rendue unique, à la licorne… » répondit mon amie, un peu désappointée. « Oui mais, imagine que c’est un jeune mâle? Il préférerait peut-être le bleu? Et puis, on ignore la portée de la magie de la corne! Imagine qu’on perturbe les ondes magiques en la peignant! La licorne ne serait pas contente… » Marie-Joséphine sembla prendre ma proposition en compte (ou alors elle était pressée de partir à la recherche de la licorne) car elle enchaîna aussitôt en suggérant que la licorne s’était peut-être battue avec son frère et sa soeur, ou qu’elle a été pourchassée, concluant qu’elle était sûrement en danger! L’inquiétude de la Poufsouffle était contagieuse, vrillant une pointe d’angoisse en moi. Nous nous levâmes, jetant des regards inquiets autour de nous, lorsque Marie-Joséphine pointa un bout de la terre qui semblait avoir été fauché par quelque chose de rond. « Viens Phoebe! Faut suivre les traces! » Je la suivis, excitée, avant de pointer autre chose à mon tour. « Là! Regarde! » Je m’étais accroupie à côté d’herbes plus hautes qui semblait avoir été coupées en deux. « Je crois que la licorne s’est nourrie ici, pour reprendre des forces. »

Spoiler: